Le Quotidien du 30 mars 2023

Le Quotidien

Droit pénal spécial

[Brèves] Dénonciation des dangers du glyphosate par détérioration : la justice refuse de reconnaître l’état de nécessité

Réf. : Cass. crim., 29 mars 2023, n° 22-83.911, F-B N° Lexbase : A39239LU

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par Adélaïde Léon

Le 26 Avril 2023

► Ne peuvent se prévaloir de l’état de nécessité les militants écologistes s’étant emparés de bidons appartenant à des magasins pour les enduire de peinture afin d’alerter sur les dangers du glyphosate, rendant les produits concernés impropres à la vente en raison de la persistance de traces de peinture. De nombreux moyens d’action, politiques, militants, institutionnels existant dans tout État démocratique leur étaient accessibles.

Rappel des faits et de la procédure. Les 27 septembre 2016 et 1er mars 2017, un groupe de militants écologistes a fait irruption dans trois magasins de jardinage.

Ils se sont emparés de bidons de produits vendus par ces magasins pour les disposer sur une bâche et les enduire de peinture afin d’alerter sur les dangers du glyphosate contenu dans ces produits, vendus, selon eux, dans des conditions contraires à la réglementation.

Les intéressés ont fait l’objet d’une convocation à comparaître devant le tribunal correctionnel du chef de destruction, dégradation ou détérioration grave du bien d’autrui, en réunion.

Après une relaxe prononcée par le tribunal, le ministère public a fait appel de ce jugement.

En cause d’appel. La cour d’appel a condamné chacun des prévenus à 300 euros d’amende avec sursis pour dégradations aggravées.

Pour dire établi le délit de destruction, dégradation ou détérioration grave du bien d’autrui les juges ont relevé que les prévenus s’étaient emparés de bâches, de pots et de bombes de peinture dont ils ont badigeonné de produits désherbants rendant ainsi les produits concernés impropres à la vente en raison de la persistance de traces de peinture, même après leur nettoyage.

La juridiction d’appel a par ailleurs rejeté le fait justificatif tiré de l’état de nécessité invoqué par les prévenus. Selon les juges, les prévenus, qui avaient accès à de nombreux moyens d’action, politiques, militants, institutionnels existant dans tout État démocratique, ne démontraient pas en quoi leurs actes constitueraient un acte nécessaire et le seul moyen indispensable à la sauvegarde des personnes.

Les intéressés ont formé des pourvois contre l’arrêt d’appel.

Moyens du pourvoi.

S’agissant de l’état de nécessité. Il était fait grief à la cour d’appel d’avoir rejeté l’état de nécessité déclaré par les prévenus sans rechercher si, d’une part, face au danger actuel connu de longue date par les pouvoirs publics, l’inaction persistante de ceux-ci n’était par de nature à justifier les actions poursuivies et si, d’autre part, la preuve de la nécessité des infractions ne se déduisait pas des grandes avancées que ces actions avaient permises en Europe et en France.

Les prévenus affirmaient que « l’état de nécessité doit être interprété en contemplation du devoir qui incombe à toute personne de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement ». Or, ils relevaient que la cour d’appel avait elle-même constaté que le caractère nocif de l’exposition aux pesticides, tel que le glyphosate peut être considéré comme un danger actuel ou en tout cas comme un péril imminent pour les personnes et que des articles scientifiques produits et les témoignages recueillis le confirment. Dès lors, en affirmant que les prévenus ne démontraient pas en quoi leurs actions constituaient un acte nécessaire et le seul moyen indispensable à la sauvegarde des personnes alors que, face à un danger actuel qu’elle constatait elle-même pour l’ensemble de la population et face à l’inaction persistante des pouvoirs publics, toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement, la cour d’appel avait, selon les prévenus, violé l’article 122-7 du Code pénal N° Lexbase : L2248AM9 (tel qu’interprété à la lumière des articles 1er et 2 de la Charte de l’environnement).

S’agissant de l’infraction. Les pourvois soutenaient que le délit de destruction ou détérioration d’un objet mobilier suppose une altération de la substance de ce bien. Dès lors, ce délit ne peut être constitué que si le produit est rendu impropre à sa destination. Or, tel n’est pas le cas lorsque ledit objet est seulement couvert d’une inscription à la peinture délébile. Les prévenus font à ce titre valoir que la substance des produits n’avait pas été altérée et que l’un des magasins avait nettoyé les bisons utilisés et les avaient remis à la vente.

Décision. La Chambre criminelle rejette les pourvois.

La Haute juridiction affirme que la cour d’appel avait souverainement estimé, en répondant à l’ensemble des chefs péremptoires des conclusions des prévenus, qu’il n’était pas démontré que la commission d’une infraction était le seul moyen d’éviter un péril actuel ou imminent.

La Chambre criminelle estime que la cour d’appel a également justifié sa décision s’agissant de l’infraction retenue puisqu’elle a constaté que les prévenus avaient rendu les produits impropres à la vente en raison de la persistance de traces de peinture même après nettoyage et que les responsables des trois magasins avaient estimé leur préjudice aux sommes de 2 168,14 euros, 2 038,17 euros et 4 268,79 euros. Par son appréciation souveraine, elle avait donc valablement jugé que les faits constituaient des dégradation ou détérioration à caractère délictuel.

Contexte. Cet arrêt peut être rapproché de deux autres affaires dans lesquelles la Chambre criminelle a également refusé de reconnaître l’état de nécessité face à des actions ayant pour objet de dénoncer l’inaction climatique des pouvoirs publics ou d’alerter sur les dangers d’infrastructure pour la santé humaine.

L’intrusion dans une centrale nucléaire aux fins de dénoncer sa vulnérabilité - Cass. crim., 15 juin 2021, n° 20-83.749, F-B N° Lexbase : A00954WG : un danger qu’aucune mesure actuelle ne permettrait de prévenir ne peut être assimilé à un danger actuel ou imminent susceptible d’écarter la responsabilité pénale d’un individu au motif qu’il répond, selon l’article 122-7 du Code pénal, à un état de nécessité, a fortiori si l’infraction commise n’est pas de nature à remédier au danger avancé.

Décrochage d’un portrait présidentiel pour dénoncer l’inaction climatique du Président de la République - Cass. crim., 22 septembre 2021, n° 20-80.489 N° Lexbase : A134647Y et n° 20-85.434 N° Lexbase : A134747Z, FS-B : par ces deux arrêts, la Cour de cassation confirme que l’état de nécessité ne peut être invoqué pour justifier le décrochage de portraits présidentiels poursuivi sous la qualification de vol. Mais elle laisse la porte ouverte à la justification de tels faits sur le fondement de la liberté d’expression garantie par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme (CESDH).

On regrettera que la motivation de la cour d’appel n'envisage pas que ces détériorations, intrusions, décrochages, puissent constituer la traduction de l’insuffisance – voir de l’inefficacité – des moyens d’action « politiques, militants, institutionnels » auxquels elle renvoie.

Pour aller plus loin :

  • v. J.-B. Thierry, ÉTUDE : Les causes d’irresponsabilité ou d’atténuation de la responsabilité pénale, Les conditions tenant au péril, in Droit pénal général, (dir. J-B. Perrier), Lexbase N° Lexbase : E1542GAD ;
  • v. E. Dreyer, Décrochage d’un portrait présidentiel : par quoi justifier ce vol ?, Lexbase Pénal, septembre 2021, n° 42 N° Lexbase : N8892BYY.

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Actualité judiciaire

[A la une] Accusé de ne pas collaborer avec la justice pour lutter contre le cyberharcèlement, Twitter a été, à nouveau, relaxé

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par Vincent Vantighem

Le 29 Mars 2023

Visiblement, il est toujours aussi difficile de réclamer des comptes à Twitter… Comme le tribunal judiciaire de Versailles (Yvelines) l’avait fait en mars 2022, le tribunal judiciaire de Paris a relaxé, lundi 27 mars, le réseau social à l’oiseau bleu des chefs de « complicité d’injure » et de « refus de déférer à une demande d’une autorité judiciaire ». C’est sous ce vocable un peu abscons que Twitter était accusé, une fois de plus, de ne pas coopérer avec la justice française.

À l’origine de cette procédure se trouvaient trois victimes de cyberharcèlement. Et non des moindres : Aurélia Gilbert, rescapée de l’attentat contre le Bataclan en 2015, Georges Salines, père d’une des victimes du même attentat, et Nicolas Hénin, journaliste otage en 2013 du groupe État islamique. En 2019 et 2020, ils avaient, tous les trois, été la cible d’une vague de cyberharcèlement sur Twitter après avoir pris position en faveur du rapatriement des enfants de djihadistes français retenus en Syrie. Rien que de très habituel pour ces trois figures militantes…

Sauf que cette fois-là, ils avaient décidé de ne pas laisser passer la haine déversée en 280 caractères par des internautes bien planqués derrière leurs claviers. Ils avaient donc porté plainte. Saisis de ces plaintes, les policiers avaient donc envoyé des réquisitions à Twitter afin de pouvoir remonter jusqu’aux auteurs des messages haineux. Mais le réseau social n’a jamais vraiment fourni d’informations valables, ce qui a contraint la justice a classé les trois plaintes sans suite. Pour tenter de remettre un peu d’humanité sur ce réseau, les trois victimes avaient donc décidé de poursuivre Twitter pour « refus de déférer à une demande d’une autorité judiciaire ». Mais la justice ne les a pas suivis…

Les policiers contraints de remplir une demande en ligne sur Twitter

Car, Twitter n’a donc jamais vraiment collaboré avec les enquêteurs. Dans ce genre de cas, ces derniers sont bien démunis. Sans prendre exemple sur les séries télé, on se dit logiquement que la police dispose de moyens pour enquêter. Qu’il lui suffit de passer un coup de fil au service juridique de Twitter pour découvrir qui se cachent derrière les avatars anonymes déversant leur lot de fiel à longueur de journée. Mais non… Dans les faits, les policiers n’ont pas pu faire autrement que de remplir un… formulaire en ligne préétabli par Twitter pour espérer résoudre leur affaire. Dans les cas d’Aurélia Gilbert et de Nicolas Hénin, leur demande n’a suscité aucune réponse. Rien. Dans le cas de Georges Salines, les policiers de la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP) ont eu la chance, eux, d’avoir un retour. Mais il s’agissait d’un refus de fournir la moindre information. Justifié par le fait que Twitter ne daigne répondre que dans le cadre de commission rogatoire internationale ou de demande d’entraide pénale internationale… Autrement dit, les « petits problèmes » franco-français les laissent de marbre.

Une fois informés que leurs plaintes pour cyberharcèlement avaient été classées sans suite faute d’aide de Twitter, Aurélia Gilbert, Georges Salines et Nicolas Hénin avaient donc décidé de s’attaquer au monstre d’Internet. Sauf que là aussi, ce n’est pas simple. Les trois victimes avaient fait citer à comparaître Twitter Incorporation (installé à San Francisco, États unis), Twitter International Company (installé à Dublin, Irlande) et Twitter France (installé à Paris). Difficile de s’y retrouver dans cette jungle…

Pour la justice, un « silence » constitue une réponse

Mais la justice leur a donc donné tort. Pour motiver la relaxe, le tribunal judiciaire de Paris a d’abord exclu la responsabilité pénale de Twitter France, cette entité n’ayant pas le statut d’hébergeur collectant les données des usagers. S’agissant de l’entité de San Francisco, elle est uniquement responsable des utilisateurs résidants aux États-Unis. Il ne restait donc que Twitter International Company de Dublin pour répondre aux questions des policiers français. Le tribunal a donc estimé que les réquisitions avaient été adressées « justement ».

Pour autant, le tribunal de Paris a considéré que les réponses ou absences de réponses du réseau social n’avaient rien d’illégal. La justice française a, en effet, estimé par exemple que le « silence » adressé dans le dossier d’Aurélia Gilbert constituait bien une « réponse » de la part de Twitter. Dans le cas d’une réquisition « simple » adressée à l’étranger, la personne visée « reste […] libre d’y répondre », selon la jurisprudence.

Une déception évidente pour les trois plaignants. Qui ont logiquement choisi de réagir directement… sur Twitter. « On s’y attendait, mais ça fait suer quand même », a ainsi posté Aurélia Gilbert en accompagnant son message d’un émoji symbolisant un étron. « Nous avons été victimes de la stratégie “d’optimisation juridique” mise en place par Twitter », a, pour sa part, commenté Georges Salines.

Leur seul motif de satisfaction pour eux réside dans une autre décision judiciaire rendue, elle, jeudi 23 mars. Et elle émane de la Cour de cassation, plus haute instance judiciaire de France. À cette date, celle-ci a, en effet, rejeté le pourvoi de Twitter qui avait été condamné, en appel, à détailler ses moyens pour lutter contre la haine en ligne, à la demande de plusieurs ONG et associations. Reste à savoir si le réseau à l’oiseau bleu déféra, cette fois, à la demande de cette autorité judiciaire…

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Bancaire

[Brèves] Crédit immobilier et droit des clauses abusives : nouvelles précisions

Réf. : Cass. civ. 1, 22 mars 2023, n° 21-16.476, FS-B N° Lexbase : A06899KQ

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N4877BZN

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par Jérôme Lasserre-Capdeville

Le 29 Mars 2023

► Méconnaît son office et viole l’article L. 132-1 du Code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301, du 14 mars 2016, une cour d’appel qui fait application d’une clause d'un contrat de prêt immobilier autorisant la banque à exiger immédiatement, sans mise en demeure ou sommation préalable de l’emprunteur ni préavis d'une durée raisonnable, la totalité des sommes dues au titre de ce prêt en cas de défaut de paiement d'une échéance à sa date, sans examiner d'office le caractère abusif d'une telle clause.

Plusieurs décisions rendues ces dernières semaines en matière de crédit immobilier ont eu l’occasion de se prononcer sur le droit des clauses abusives (Cass. civ. 1, 1er février 2023, n° 21-20.168, F-D N° Lexbase : A49829B7 ; Cass. civ. 1, 1er mars 2023, n° 21-20.260, F-B N° Lexbase : A17899GD, J. Lasserre-Capdeville, Lexbase Affaires, mars 2023, n° 748 N° Lexbase : N4571BZC ; Cass. civ. 1, 22 mars 2023, n° 21-16.044, F-B N° Lexbase : A06929KT, J. Lasserre-Capdeville, mars 2023, n° 751 N° Lexbase : N4838BZ9). Le prêteur se doit, par conséquent, d’être particulièrement vigilant lorsqu’il vient à rédiger une telle convention. La décision sélectionnée en témoigne une nouvelle fois.

Faits et procédure. Le 4 décembre 2009, la société banque X. avait consenti à Mme S. un prêt immobilier en francs suisses, garanti par une hypothèque et comportant une clause de soumission à l’exécution forcée immédiate. Or, à la suite du défaut de paiement des échéances de ce prêt, la banque avait délivré à l’emprunteuse un commandement aux fins de vente forcée.

Le 17 février 2020, le tribunal de l’exécution forcée en matière immobilière avait ordonné la vente forcée des immeubles garantis, fixé le montant de la créance de la banque et commis un notaire pour précéder à l'adjudication.

Décision. Dans son pourvoi en cassation, l’emprunteuse reprochait aux juges du fond (CA Colmar, 4 mars 2021, n° 20/02575 N° Lexbase : A90374ZQ) d’avoir écarté d’office l’application d’une clause dont le caractère abusif ressort des éléments du débat. Or, selon elle, est abusive la clause d’un prêt, conclu entre un établissement prêteur professionnel et un consommateur, par laquelle le créancier s’autorise, en raison d’un manquement du débiteur à son obligation de rembourser une seule échéance du prêt au jour prévu, de prononcer la déchéance du terme sans mise en demeure préalable et immédiatement, sans préavis d'une durée raisonnable ni mécanisme de nature à permettre la régularisation d'un tel retard de paiement. Or, en l’occurrence, il ressortait de l’article 4 des conditions générales du prêt conclu entre madame S et la banque X, « si bon semble à la Banque, toutes les sommes restant dues au titre du prêt en principal, majorées des intérêts échus et non payés deviennent immédiatement exigibles, sans sommation ni mise en demeure et malgré toutes offres et consignations ultérieures en cas de non-paiement d'une échéance à bonne date ». Dès lors, en n’écartant pas d’office l’application d’une telle clause, qui revêtait un caractère abusif, la cour d’appel aurait violé les articles L. 132-1 du Code de la consommation N° Lexbase : L6478ABK, dans sa rédaction applicable à l'espèce.

La Cour de cassation se montre sensible à cette critique. Sa décision se veut très précise.

D’abord, elle rappelle que, selon l’ancien article L. 132-1 du Code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. L'appréciation du caractère abusif de ces clauses ne concerne pas celles qui portent sur l'objet principal du contrat, pour autant qu'elles soient rédigées de façon claire et compréhensible.

Ensuite, elle reprend plusieurs solutions dégagées par la Cour de justice de l’Union européenne.

En premier lieu, cette dernière a dit a dit pour droit que le juge national était tenu d'examiner d’office le caractère abusif d'une clause contractuelle dès qu'il disposait des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet et que, lorsqu'il considérait une telle clause comme étant abusive, il ne l’appliquait pas, sauf si le consommateur s'y opposait (CJCE, 4 juin 2009, aff. C-243/08 N° Lexbase : A9620EHR).

En second lieu, par un arrêt du 26 janvier 2017 (CJUE, 26 janvier 2017, aff. C-421/14 N° Lexbase : A9995TM7), la CJUE a dit pour droit que l'article 3, § 1, de la Directive n° 93/13/CEE du 5 avril 1993 N° Lexbase : L7468AU7 devait être interprété en ce sens que s’agissant de l’appréciation par une juridiction nationale de l’éventuel caractère abusif de la clause relative à la déchéance du terme en raison de manquements du débiteur à ses obligations pendant une période limitée, il incombait à cette juridiction d’examiner si la faculté laissée au professionnel de déclarer exigible la totalité du prêt dépendait de l’inexécution par le consommateur d’une obligation qui présentait un caractère essentiel dans le cadre du rapport contractuel en cause, si cette faculté était prévue pour les cas dans lesquels une telle inexécution revêtait un caractère suffisamment grave au regard de la durée et du montant du prêt, si ladite faculté dérogeait aux règles de droit commun applicables en la matière en l’absence de dispositions contractuelles spécifiques et si le droit national prévoyait des moyens adéquats et efficaces permettant au consommateur soumis à l’application d’une telle clause de remédier aux effets de ladite exigibilité du prêt

En dernier lieu, par arrêt du 8 décembre 2022 (CJUE, 8 décembre 2022, aff. C-600/21 N° Lexbase : A02078YC, G. Poissonnier, Lexbase Affaires, janvier 2022, n° N° Lexbase : N3960BZP), elle a dit pour droit que l’arrêt précité devait être interprété en ce sens que les critères qu’il dégageait pour l’appréciation du caractère abusif d'une clause contractuelle, notamment du déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat que cette clause créait au détriment du consommateur, ne pouvaient être compris ni comme étant cumulatifs ni comme étant alternatifs, mais devaient être compris comme faisant partie de l'ensemble des circonstances entourant la conclusion du contrat concerné, que le juge national devait examiner afin d'apprécier le caractère abusif d'une clause contractuelle.

Par ailleurs, et toujours dans la même décision du 8 décembre 2022, après avoir relevé que la clause contractuelle en exécution de laquelle la banque avait, dans le cas qui lui était soumis, prononcé la déchéance du terme, n'apparaissait pas relever de la notion d'« objet principal du contrat », ce qu'il appartenait à la juridiction de renvoi de vérifier (points 47 et 48), elle avait dit pour droit que l'article 3, § 1, et l'article 4 de la Directive n° 93/13 devaient être interprétés en ce sens que, sous réserve de l'applicabilité de l'article 4,§ 2, de cette Directive, ils s’opposaient à ce que les parties à un contrat de prêt y insèrent une clause qui prévoyait, de manière expresse et non équivoque, que la déchéance du terme de ce contrat pouvait être prononcée de plein droit en cas de retard de paiement d’une échéance dépassant un certain délai, dans la mesure où cette clause n’avait pas fait l'objet d’une négociation individuelle et créait au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties découlant du contrat.

Ces solutions ont alors une incidence dans l’affaire qui nous occupe.

En effet, pour ordonner la vente forcée de l'immeuble et fixer à une certaine somme la créance de la banque, l’arrêt de la cour d’appel de Colmar avait considéré que la somme réclamée par celle-ci au titre du capital restant dû et des échéances échues impayées était exigible en application de la clause des conditions générales du contrat de prêt qui, en cas de défaillance de l'emprunteur, prévoyait l'exigibilité immédiate des sommes dues au titre du prêt.

Dès lors, en statuant ainsi, sans examiner d’office le caractère abusif d'une telle clause autorisant la banque à exiger immédiatement la totalité des sommes dues au titre du prêt en cas de défaut de paiement d'une échéance à sa date, sans mise en demeure ou sommation préalable ni préavis d'une durée raisonnable, la cour d'appel avait violé le texte susvisé.

Observations. La décision ici dégagée est importante. Même si elle s’adresse avant tout au juge, elle témoigne du fait que les banques n’ont pas intérêt à écarter, par l’intermédiaire d’une clause figurant dans les conditions générales du prêt, le recours à une mise en demeure avant le prononcé de la déchéance du terme de la convention (en raison de la défaillance de l’emprunteur), ou encore d’écarter tout délai de préavis raisonnable dans de telles circonstances (sur ce dernier point, v. également, Cass. civ. 1, 22 mars 2023, n° 21-16.044, préc. et les obs. préc.).

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Contrat de travail

[Brèves] Précisions utiles sur le calcul de l’indemnité de non-concurrence

Réf. : Cass. soc., 15 mars 2023, n° 21-16.057, FS-B N° Lexbase : A80119H8

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N4861BZ3

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par Lisa Poinsot

Le 29 Mars 2023

Les indemnités consécutives à la rupture du contrat de travail doivent être calculées sur la base de la rémunération que le salarié aurait dû percevoir et non sur celle de la rémunération qu'il a effectivement perçue du fait des manquements de l'employeur à ses obligations.

Faits et procédure. Un salarié se voit licencier sans indemnité ni préavis.

Il saisit la juridiction prud’homale pour contester cette mesure et obtenir notamment le paiement d’un rappel de salaire pour heures supplémentaires et d’une indemnité de non-concurrence.

Pour fixer la contrepartie financière due au salarié au titre de la clause de non-concurrence, la cour d’appel (CA Orléans, 9 mars 2021, n° 18/01849 N° Lexbase : A42494KL) se fonde sur le salaire mensuel de base de 6 380,60 euros.

Elle déboute le salarié de sa demande au titre de la contrepartie de la clause de non-concurrence en ce que cette demande tendait au paiement d’une somme excédant 19 141,80 euros.

Le salarié forme alors un pourvoi en cassation.

La solution. Énonçant les solutions susvisées, la Chambre sociale de la Cour de cassation casse et annule la décision de la cour d’appel.

Elle rappelle les règles applicables pour calculer le montant de la contrepartie financière de l’application de la clause de non-concurrence due au salarié.

La Haute juridiction affirme qu’il faut prendre en considération les dispositions de la clause en vertu de l’article 1134 du Code civil N° Lexbase : L0857KZR, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131, du 10 février 2016 N° Lexbase : L4857KYK.

En l’espèce, dès lors que la clause de non-concurrence stipule que le salarié percevra une indemnité mensuelle égale à 5/10e de la moyenne mensuelle des appointements ainsi que des avantages et gratifications contractuels dont il a bénéficié au cours des douze derniers mois de présence dans l’entreprise, la contrepartie financière doit tenir compte du rappel de salaire que l’employeur est condamné à payer au salarié au titre des heures supplémentaires accomplies dans les douze mois ayant précédé la rupture.

Pour aller plus loin :

 

newsid:484861

Droit du sport

[Brèves] Clauses ayant trait à l'organisation et au fonctionnement interne d’une fédération sportive : compétence du JJ

Réf. : CE, 2°-7° ch. réunies, 15 mars 2023, n° 466632, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A75959HR

Lecture: 2 min

N4831BZX

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par Yann Le Foll

Le 29 Mars 2023

► Un litige relatif à des clauses ayant trait à l'organisation et au fonctionnement interne d’une fédération sportive relève de la compétence du juge judiciaire.

Principe. Les décisions prises par les fédérations sportives, personnes morales de droit privé, sont, en principe, des actes de droit privé. Toutefois, en confiant, à titre exclusif, aux fédérations sportives ayant reçu délégation, les missions prévues aux articles L. 131-15 N° Lexbase : L7940MBP et L. 131-16 N° Lexbase : L8163LS7 du Code des sports, le législateur a chargé ces fédérations de l'exécution d'une mission de service public à caractère administratif.

Les décisions procédant de l'usage par ces fédérations des prérogatives de puissance publique qui leur ont été conférées pour l'accomplissement de cette mission présentent le caractère d'actes administratifs. Il en va ainsi alors même que ces décisions seraient édictées par leurs statuts (abandon de la jurisprudence CE, 12 décembre 2003, n° 219113 N° Lexbase : A3852DAW).  

Application. La Fédération française de billard ayant reçu délégation du ministre chargé des Sports, la juridiction administrative est compétente pour connaître des règles édictées par ses statuts si elles manifestent l'usage de prérogatives de puissance publique dans l'exercice de sa mission de service public.

Or, les clauses en litige sont relatives à la composition et aux organes de la fédération, ainsi qu'au contrôle exercé sur eux par cette dernière, aux incompatibilités avec le mandat de président de la fédération, aux conditions d'élection de son bureau fédéral, aux commissions obligatoires de la fédération et aux rétributions perçues par la fédération pour services rendus.

Décision. Ces dispositions ont trait à l'organisation et au fonctionnement interne de la fédération et ne manifestent pas l'usage par celle-ci de prérogatives de puissance publique dans l'exercice de sa mission de service public. Elles ne relèvent donc pas de la compétence de la juridiction administrative.

newsid:484831

Fiscalité immobilière

[Brèves] Le droit à l’erreur et taxe annuelle sur les immeubles possédés en France

Réf. : QE n° 4005 de Mme Alexandra Masson, JOANQ 13 décembre 2022 p. 6149 , réponse publ. 7 mars 2023 p. 2175, 16ème législature N° Lexbase : L2864MHK

Lecture: 3 min

N4842BZD

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par Maxime Loriot, Notaire Stagiaire - Doctorant en droit international privé à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Le 29 Mars 2023

► Par une réponse ministérielle Masson en date du 7 mars 2023, le Gouvernement est venu éclaircir le régime du droit à l’erreur applicable à la taxe annuelle sur les immeubles possédés en France posé par les articles 990 D à 990 G du Code général des impôts.

Cette réponse ministérielle s’inscrit dans un arrêt rendu par la Cour d’appel d’Aix-en-Provence, le 7 mars 2023 (CA Aix-en-Provence, 7 mars 2023, n°19/12727 N° Lexbase : A37569HL) où les juges ont considéré qu’après l’expiration du délai de trente jours, le contribuable est tenu au règlement de pénalités, intérêts de retard mais également à la taxe de 3 % elle-même.

La taxe annuelle de 3% sur les immeubles possédés en France

L’article 990 D du Code général des impôts N° Lexbase : L5483H9X soumet le contribuable à une taxe annuelle égale à 3 % de la valeur vénale des immeubles ou droits les personnes morales qui, directement ou par personne interposée, possèdent un ou plusieurs immeubles situés en France.

Les entités juridiques redevables de la taxe de 3 % sont tenues d’effectuer chaque année, au plus tard le 15 mai, une déclaration portant sur les biens et droits immobiliers imposables détenus au 1er janvier de chaque année.

Le défaut de déclaration autorise l’administration fiscale à engager la procédure de taxation d’office prévue par l’article L. 66 du Livre des procédures fiscales N° Lexbase : L1447MDX.

Toutefois depuis une réponse ministérielle Loncle en date du 13 mars 2000 (QE n° 39372 de M. Loncle François, JOANQ 27 décembre 1999 p. 7348, min. éco., réponse publ. 13 mars 2000 p. 1638, 11e législature N° Lexbase : L9057D7L ; BOI-PAT-TPC-30 n° 20 N° Lexbase : X7990ALI), l’administration fiscale admet que le contribuable qui n’a pas souscrit ses déclarations de taxe de 3 % ou pris l’engagement prévu par la loi, n’est pas redevable de la taxe de 3 % s’il s’engage à régulariser sa situation dans les trente jours suivant une mise en demeure par l’administration fiscale.

Cette mesure est uniquement applicable à la première demande de régularisation et pour l’ensemble des années non prescrites.

Les juges du Quai de l’Horloge ont à ce sujet rappelé que la mesure de tolérance a pour seul objet la régularisation de la situation des contribuables n’ayant pas souscrit les déclarations et non celle des contribuables ayant procédé à leurs déclarations de façon incomplète ou erronée (Cass com., 31 janvier 2006, n° 02-20.387, FS-P+B N° Lexbase : A8371DMY).

Lire en ce sens, F. Dal Vecchio, Taxe de 3 % due par une société de droit luxembourgeois à raison de ses immeubles situés en France, Lexbase Fiscal, février 2006, n° 203 N° Lexbase : N4849AKS.

Par une réponse ministérielle Masson en date du 7 mars 2023, le Gouvernement procède à une triple précision du régime applicable à la taxe annuelle sur les immeubles possédés en France :

  • le droit à l’erreur est conditionné à l’exigence de bonne foi des contribuables (CGI, art. 990 E N° Lexbase : L1479IZS) ;
  • le droit à l’erreur ne concerne que les contribuables n’ayant pas procédé à leurs déclarations de taxe de 3 % ou pris l’engagement prévu par la loi ;
  • le droit à l’erreur ne s’applique pas aux contribuables ayant effectué des déclarations incomplètes ou erronées. Le seul remède dont ils bénéficient est une réduction des intérêts de retard à hauteur de 50 % en cas de régularisation spontanée ou de 30 % en cas de régulation en cours de contrôle par l’administration fiscale (CGI., art. 1727 N° Lexbase : L5776MA8 ; LPF., art. L. 62 N° Lexbase : L6959LLC).

newsid:484842

Habitat-Logement

[Brèves] La procédure administrative d’expulsion du domicile d’autrui, validée, sous réserve d’interprétation, par le Conseil constitutionnel

Réf. : Cons. const., décision n° 2023-1038 QPC, du 24 mars 2023 N° Lexbase : A50169KY

Lecture: 5 min

N4884BZW

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 29 Mars 2023

► Sont jugées conformes à la Constitution, sous une réserve d’interprétation, les dispositions de l’article 38 de la loi n° 2007-290, du 5 mars 2007, permettant d’obtenir du préfet l’évacuation forcée de l’occupant irrégulier d’un domicile ; ces dispositions ne sauraient alors être interprétées comme autorisant le préfet à procéder à la mise en demeure sans prendre en compte la situation personnelle ou familiale de l'occupant dont l'évacuation est demandée.

Les dispositions contestées. Les dispositions contestées étaient celles de l'article 38 de la loi n° 2007-290, du 5 mars 2007, instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale N° Lexbase : L5929HU7, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2020-1525, du 7 décembre 2020, d’accélération et de simplification de l’action publique N° Lexbase : L9872LYB.

Aux termes de ces dispositions, la personne dont le domicile est occupé de manière illicite, qu’il s’agisse ou non de sa résidence principale, peut, sous certaines conditions, demander au préfet de mettre en demeure l’occupant de quitter les lieux. En cas de refus de ce dernier, le préfet doit procéder sans délai à l’évacuation forcée du logement.

Critiques. La requérante reprochait à ces dispositions d'instituer une procédure administrative permettant l'expulsion de l'occupant d'un logement sans prévoir d'examen contradictoire de sa situation personnelle et familiale, ni de recours suspensif garantissant qu'un juge se prononce avant qu'il soit procédé à son évacuation forcée. Elle prétendait qu’il en résultait une méconnaissance du droit au recours juridictionnel effectif ainsi que du droit au respect de la vie privée et du droit à l'inviolabilité du domicile.

Elle critiquait, par ailleurs, la différence de traitement injustifiée entre les occupants d'un logement selon qu'ils font l'objet de la procédure d'expulsion prévue par ces dispositions ou de la procédure d'expulsion juridictionnelle de droit commun.

Contrôle du Conseil constitutionnel. Après rappel de la teneur des articles 2 N° Lexbase : L1366A9H (droit au respect de la vie privée et, en particulier, inviolabilité du domicile) et 16 N° Lexbase : L1363A9D (droit à un recours effectif devant une juridiction) de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, les Sages relèvent les points suivants.

1°) En premier lieu, en adoptant ces dispositions, le législateur a entendu assurer l'évacuation à bref délai des domiciles illicitement occupés. Ce faisant, il a cherché à protéger le principe de l'inviolabilité du domicile, le droit au respect de la vie privée et le droit de propriété des occupants réguliers.

2°) En deuxième lieu, d'une part, la mise en demeure ne peut être demandée au préfet qu'en cas d'introduction et de maintien à l'aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou de contrainte dans un domicile. D'autre part, elle ne peut être mise en œuvre qu'après que le demandeur a déposé plainte, fait la preuve que le logement constitue son domicile, et fait constater par un officier de police judiciaire cette occupation illicite. Dès lors, le préfet ne peut mettre en demeure l'occupant de quitter les lieux que dans le cas où il est constaté que ce dernier s'est introduit et maintenu dans le domicile en usant lui-même de manœuvres, menaces, voies de fait ou de contrainte.

3°) En troisième lieu, ces dispositions prévoient que le préfet peut ne pas engager de mise en demeure dans le cas où existe, pour cela, un motif impérieux d'intérêt général. Toutefois, elles ne sauraient, sans porter une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et au principe de l'inviolabilité du domicile, être interprétées comme autorisant le préfet à procéder à la mise en demeure sans prendre en compte la situation personnelle ou familiale de l'occupant dont l'évacuation est demandée.

4°) En quatrième lieu, le délai laissé à l'occupant pour déférer à la mise en demeure de quitter les lieux ne peut être inférieur à 24 heures.

5°) En dernier lieu, d'une part, les dispositions contestées ne privent pas l'occupant de la possibilité d'introduire un référé sur le fondement de l'article L. 521-3 du Code de justice administrative N° Lexbase : L3059ALU ou d'exercer un recours contre la mise en demeure devant le juge administratif qui, sur le fondement des articles L. 521-1 N° Lexbase : L3057ALS et L. 521-2 N° Lexbase : L3058ALT du même code, peut suspendre l'exécution de la mise en demeure ou ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale. D'autre part, le caractère non suspensif d'une voie de recours ne méconnaît pas, en lui-même, le droit à un recours juridictionnel effectif. En outre, en cas d'illégalité de la décision administrative d'évacuation forcée de l'occupant, ce dernier peut exercer un recours indemnitaire devant le juge administratif.

Selon le Conseil constitutionnel, il résulte de ce qui précède que, compte tenu des garanties mentionnées précédemment et sous la réserve énoncée au 3° ci-dessus, les dispositions contestées ne peuvent pas être regardées comme méconnaissant le droit au respect de la vie privée ou le principe de l'inviolabilité du domicile. Elles ne méconnaissent pas non plus le droit à un recours juridictionnel effectif.

newsid:484884

Salariés protégés

[Brèves] Salarié protégé gréviste : à quelles conditions peut-il être licencié ?

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par Lisa Poinsot

Le 29 Mars 2023

À l’heure du mouvement social contre la réforme des retraites, la Direction générale du Travail rappelle, dans une note publiée le 13 mars 2023, le cadre du contrôle de l’inspecteur du travail saisi d’une demande de licenciement pour des faits commis dans le cas particulier de l’exercice du droit de grève par le salarié protégé.

Dans quel cas un inspecteur du travail, saisi d’une demande d’autorisation de licenciement d’un salarié protégé pour des faits commis lors de l’exercice du droit de grève, peut-il répondre favorablement ?

Au préalable, certains principes doivent être respectés :

  • le droit de grève est un droit constitutionnel ;
  • aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire en raison de l’exercice normal du droit de grève ;
  • l’exercice du droit de grève ne peut justifier la rupture du contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié.

En cas de demande de licenciement de salariés protégés, l’inspecteur du travail ne contrôle pas le caractère licite ou abusif de la grève. Il doit au contraire contrôler :

  • la matérialité des faits, c’est-à-dire la participation personnelle et active du salarié aux faits reprochés (ex : par constat de commissaire de justice, par procès-verbaux de gendarmerie ou de police) ;
  • la gravité des faits (ex : comportements agressifs et violents, atteintes à l’outil de production, entraves à la liberté du travail, entraves à la liberté de circulation, séquestrations, occupation des lieux de travail et piquets de grève).

La décision doit expliquer les raisons pour lesquelles les faits matériellement établis et fautifs revêtent, ou non, un caractère de gravité suffisant pour justifier une mesure de licenciement. Néanmoins, la motivation de la gravité de la faute ne doit pas être centrée sur la notion de « faute lourde », cette qualification relevant du seul contrôle du juge judiciaire.  

Pour aller plus loin :

 

newsid:484859

Surendettement

[Brèves] Surendettement : nature et effets de la contestation par le créancier des mesures recommandées ou imposées

Réf. : Cass. civ. 2, 23 mars 2023, n° 20-18.306, FS-B N° Lexbase : A39499KH

Lecture: 3 min

N4869BZD

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par Vincent Téchené

Le 29 Mars 2023

► La contestation par le créancier de mesures recommandées ou imposées par une commission de surendettement constitue une demande en justice qui interrompt le délai de prescription. L'interruption de la prescription s'étend à la demande en paiement ultérieurement engagée par le créancier, les deux demandes tendant aux mêmes fins.

Faits et procédure. Une société a consenti à deux époux un prêt immobilier. Le mari a saisi une commission de surendettement des particuliers d'une demande de traitement de sa situation financière le 30 juin 2012.

À la suite de l'échec de la phase amiable de la procédure, constaté par la commission le 25 juillet 2012, le débiteur a demandé, le 3 août 2012, à bénéficier de mesures recommandées. Le 21 décembre 2012, la commission a établi des mesures recommandées que la banque prêteuse a contestées le 22 janvier 2013. La contestation a été rejetée par jugement d'un juge de l'exécution du 19 novembre 2013, confirmé par un arrêt d'une cour d'appel du 20 janvier 2015.

Le 21 octobre 2014, la banque a assigné le débiteur devant un tribunal de grande instance à fin de condamnation en paiement du solde du prêt.

La cour d’appel (CA Fort-de-France, 17 décembre 2019, n° 18/00487 N° Lexbase : A2806Z9S) a constaté que l'action de la banque était prescrite et l’a déboutée, en conséquence, de ses demandes en paiement à l'encontre des époux emprunteurs. La banque s’est donc pourvue en cassation.

Décision. La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel au visa de l’article 2241 du Code civil N° Lexbase : L7181IA9 dont il résulte que si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en va autrement lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent aux mêmes fins, de sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première.

Or, pour la Cour, la contestation par le créancier de mesures recommandées ou imposées par une commission de surendettement constitue une demande en justice qui interrompt le délai de prescription et cette contestation tendant au même but que la demande en paiement engagée ultérieurement par le créancier, la seconde action est virtuellement comprise dans la première.

La cour d’appel avait au contraire estimé que le recours formé par un créancier contre la décision par laquelle une commission de surendettement déclare un débiteur recevable en sa demande de traitement de sa situation financière ne constitue pas, au regard de son objet, une demande en justice de nature à interrompre le délai de prescription.

La Haute juridiction en conclut qu’en statuant ainsi, alors que l'effet interruptif de prescription de la contestation des mesures recommandées ou imposées s'étendait à l'action en paiement, la cour d'appel a violé l’article 2241 du Code civil.

newsid:484869

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