Le Quotidien du 20 février 2023

Le Quotidien

Construction

[Brèves] Le vice du matériau n’est pas une cause exonératoire à l’égard du maître d’ouvrage mais il peut se retourner contre le fabricant

Réf. : Cass. civ. 3, 8 février 2023, n° 21-20.271, FS-B N° Lexbase : A96999BT

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N4393BZQ

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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats

Le 17 Février 2023

► Le constructeur ne peut s’exonérer de sa responsabilité en invoquant le vice du matériau ;
Il peut exercer son action contre le fabricant sur le fondement des vices cachés de la vente sans que le point de départ ne coure à compter de la vente.

Si le constructeur aura le plus grand mal à s’exonérer de sa responsabilité dans le cadre de l’action exercée contre lui par le maître d’ouvrage, les juges sont plus cléments dans l’application des règles, notamment de prescription, lui permettant d’engager son recours, notamment contre le fabriquant. Même si la justice n’est pas le droit, il pourrait sembler injuste que le maître d’ouvrage puisse agir pendant dix ans à l’encontre du constructeur, lequel serait tenu par le bref délai de l’article 1648 du Code civil N° Lexbase : L9212IDK, dans le cadre de son action récursoire, contre le vendeur fabricant.

La Haute juridiction poursuit ici la construction prétorienne, cohérente, amorcée il y a quelques mois.

En l’espèce, des particuliers confient à une entreprise le lot « électricité/ventilation » de la construction de leur maison, laquelle achète sa VMC à un vendeur. Après la réception, un incendie se déclare. Une procédure au fond s’ensuit après expertise, aux fins d’indemnisation. Les maîtres d’ouvrage exercent leur action contre le constructeur, lequel appelle en garantie le vendeur.

La cour d’appel de Rennes, dans un arrêt du 27 mai 2021 (CA Rennes, 27 mai 2021, n° 19/03864 N° Lexbase : A08844TW), condamne notamment l’assureur du vendeur lequel forme un pourvoi dans lequel il expose que l'action en garantie des vices cachés, qui devait être exercée dans un bref délai à compter de la découverte du vice, est également enfermée dans le délai de prescription fixé par l'article L. 110-4 du Code de commerce N° Lexbase : L4314IX3, lequel court à compter de la vente initiale.

Le pourvoi est rejeté et la Haute juridiction rappelle avec force la solution posée aux termes de l’arrêt rendu il y a un an presque jour pour jour, le 16 février 2022 (Cass. civ. 3, 16 février 2022, n° 20-19.047, publié au bulletin N° Lexbase : A33497ND).

L'entrepreneur ne pouvant pas agir contre le vendeur et le fabricant avant d'avoir été lui-même assigné par le maître de l'ouvrage, le point de départ du délai qui lui est imparti par l'article 1648, alinéa 1er, du Code civil N° Lexbase : L9212IDK est constitué par la date de sa propre assignation et que le délai de l'article L. 110-4, I, du Code de commerce, courant à compter de la vente, est suspendu jusqu'à ce que sa responsabilité ait été recherchée par le maître de l'ouvrage.

Dès lors que le vendeur peut voir, ainsi, sa garantie recherchée par le constructeur et qu'il ne peut, non plus, agir avant d'avoir été assigné, le recours contre son propre vendeur ne peut, pas plus, être enfermé dans le délai de prescription de droit commun courant à compter de la vente initiale. La prescription de ce recours est elle-même suspendue jusqu'à ce que la responsabilité de son auteur soit recherchée.

L’articulation de tous ces délais reste tout de même d’une mise en œuvre assez malaisée, comme le prouve l’importance des contentieux, allant jusqu’à la Cour de cassation.

newsid:484393

Cotisations sociales

[Brèves] Nullité du redressement en l’absence de respect de la procédure prévue dans l’hypothèse d’un abus de droit

Réf. : Cass. civ. 2, 16 février 2023, n° 21-11.600 N° Lexbase : A24109DM, n° 21-18.322 FS-B N° Lexbase : A24139DQ et n° 21-17.207 N° Lexbase : A24199DX, FS-B

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N4425BZW

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par Laïla Bedja

Le 22 Février 2023

► Lorsque l'organisme de Sécurité sociale écarte un acte juridique synonyme d’un abus de droit dans les conditions prévues à l’article L. 243-7-2 du Code de la Sécurité sociale, il se place nécessairement sur le terrain de l'abus de droit ; il en résulte qu'il doit se conformer à la procédure prévue par le texte précité et les articles R. 243-60-1 et R. 243-60-3 du Code de la Sécurité sociale et qu'à défaut de ce faire, les opérations de contrôle et celles, subséquentes, de recouvrement sont entachées de nullité.

Les faits et procédure. La solution précitée concerne trois affaires différentes au cours desquelles différents actes ont été écartés par l’Urssaf, cette dernière procédant au redressement de la société sans mettre en place la procédure d’abus de droit.

Dans la première espèce (pourvoi n° 21-11.600), dans la lettre d’observation, l’inspecteur du recouvrement énonce qu'en l'état des informations recueillies au cours du contrôle, les procédures de licenciement présentées par l'entreprise à l'appui de l'exonération des cotisations et contributions de Sécurité sociale d'une partie des indemnités versées lors du départ de nombreux salariés sont réputées fictives. L’Urssaf avait alors décidé délibérément de ne pas appliquer la pénalité de 20 % prévue en cas d’abus de droit et de ne pas mettre en œuvre la procédure d’abus de droit.

La cour d’appel ayant annulé le redressement, l’organisme avait notamment mis en avant le fait que le comité d’abus de droit ne disposait plus de membres depuis le 12 janvier 2015, si bien que la procédure d’abus de droit, prévue à l’article L. 243-7-2 du Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L9267LNK ne pouvait plus être mise en œuvre.

Dans la seconde espèce (pourvoi n° 21-18.322), l’Urssaf a fondé le redressement sur la mise en place d'un habillage légal des ruptures en constatant qu'il n'existait pas de nette séparation entre les attributions techniques des emplois respectifs de directeur administratif et financier et de directeur d'exploitation des intéressés et celles relevant de leurs mandats sociaux antérieurs officiels, puisqu'ils avaient continué à présider à tour de rôle les assemblées générales et que leur rémunération au titre du contrat de travail, en l'absence de lien de subordination, était identique à celle perçue au titre du mandat social. La cour d’appel avait alors aussi déclaré la procédure irrégulière.

Dans la dernière espèce (pourvoi n° 21-17.207), l’Urssaf reprochait à la société sportive d'éluder le paiement des cotisations sociales sur la partie du salaire réglée sous forme de droits à l'image considérés comme des revenus mobiliers. La cour d’appel avait alors validé le redressement et la société a formé un pourvoi en cassation.

La décision. Énonçant la solution précitée et s’appuyant sur les conditions liées à la procédure d’abus de droit prévue à l’article L. 243-7-2 du Code de la Sécurité sociale, la Haute juridiction se prononce en faveur de la mise en œuvre obligatoire de la procédure d’abus de droit lorsque l’organisme de contrôle constate qu’un acte du cotisant est susceptible d’être constitutif d’un abus de droit. Elle rejette alors le pourvoi de l’Urssaf dans les deux premières espèces et accède à la demande de la société dans la dernière.  

La deuxième chambre civile aligne ainsi sa décision avec celle de la Chambre commerciale rendue en matière fiscale (Cass. com., 23 juin 2015, n° 13-19.486, FS-P+B N° Lexbase : A9788NL4). Les juges de cette dernière avaient ainsi décidé « que l’administration s’était nécessairement placée sur le terrain de l’abus de droit et que, faute par elle de s’être conformée à la procédure prévue par le texte visé au moyen, la procédure de redressement et celle subséquente de recouvrement étaient entachées d’irrégularité ».

Pour aller plus loin :

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Entreprises en difficulté

[Brèves] Autorité de la chose jugée attachée à la décision d’admission d’une créance au passif et contrôle des clauses abusives devant le juge de l’exécution

Réf. : Cass. com., 8 février 2023, n° 21-17.763, FS-B N° Lexbase : A97209BM

Lecture: 8 min

N4366BZQ

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par Vincent Téchené

Le 08 Mars 2023

► Un débiteur soumis à une procédure collective contre lequel a été rendue une décision, irrévocable, admettant à son passif une créance au titre d'un prêt immobilier, qu'il avait souscrit antérieurement en qualité de consommateur, peut, à l'occasion de la procédure de saisie immobilière d'un bien appartenant à ce débiteur, mise en œuvre par le créancier auquel la déclaration d'insaisissabilité de l'immeuble constituant la résidence principale du débiteur est inopposable, nonobstant l'autorité de la chose jugée attachée à cette décision, soulever, à l'audience d'orientation devant le juge de l'exécution, une contestation portant sur le caractère abusif d'une ou plusieurs clauses de l'acte de prêt notarié dès lors qu'il ressort de la décision revêtue de l'autorité de la chose jugée que le juge ne s'est pas livré à cet examen.

Faits et procédure. Une banque a consenti à un emprunteur des prêts destinés à l'acquisition d'un immeuble constituant sa résidence principale et garantis par un privilège de prêteur de deniers ainsi qu'une hypothèque conventionnelle.

Postérieurement, l’emprunteur a effectué une déclaration d'insaisissabilité de cet immeuble, qui a été publiée.

La banque a prononcé la déchéance du terme des prêts. Par la suite, l’emprunteur a été mis en redressement puis liquidation judiciaires. La banque a donc déclaré au passif ses créances au titre des prêts qui ont été admises.

La banque a délivré à l’emprunteur un commandement de payer valant saisie immobilière, puis l'a assigné à l'audience d'orientation devant le juge de l'exécution, afin que soit ordonnée la vente forcée de l'immeuble.

L’emprunteur s'est opposé à cette mesure d'exécution forcée en soulevant, à titre principal, la prescription de l'action de la banque et, subsidiairement, le caractère non exigible de la créance, en se prévalant, notamment, du caractère abusif de la clause d'exigibilité anticipée stipulée dans les prêts.

La cour d’appel (CA Versailles, 3 décembre 2020, n° 20/01525 N° Lexbase : A758238C) a rejeté la contestation de l’emprunteur relative à la prescription des créances de la banque. Elle a également déclaré irrecevables ses contestations relatives aux créances de la banque et, en conséquence, fixé le montant de ces dernières. L’emprunteur a donc formé un pourvoi en cassation

Décision. C’est par un long arrêt particulièrement argumenté que la Cour de cassation répond aux différents moyens soulevés.

En premier lieu, la Haute juridiction rappelle qu’il résulte des articles L. 526-1, alinéa 1er, du Code de commerce N° Lexbase : L5330IMD, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 10 juin 2010 applicable en la cause, et L. 622-24 de ce code N° Lexbase : L8803LQ4 que, si un créancier inscrit à qui est inopposable la déclaration d'insaisissabilité d'un immeuble appartenant à son débiteur peut faire procéder à la vente sur saisie de cet immeuble et use de la faculté de déclarer sa créance au passif de la procédure collective du débiteur, il bénéficie de l'effet interruptif de prescription attaché à sa déclaration de créance, cet effet interruptif se prolongeant jusqu'à la date de la décision ayant statué sur la demande d'admission, dès lors que ce créancier n'est pas dans l'impossibilité d'agir sur l'immeuble au sens de l'article 2234 du Code civil N° Lexbase : L7219IAM.

La Cour de cassation rappelle ici une solution précédemment dégagée (v. Cass. com., 12 juillet 2016, n° 15-17.321, FS-P+B N° Lexbase : A2003RXH ; Cass. com., 24 mars 2021, n° 19-23.413, F-P N° Lexbase : A67344MD, P.-M. Le Corre, comm., Lexbase Affaires, avril 2021, n° 673 N° Lexbase : N7169BY8).

En second lieu, la Cour énonce que la décision d'admission d'une créance au passif de la procédure collective d'un débiteur a, en principe, autorité de la chose jugée sur l'existence, la nature et le montant de la créance admise. Cette autorité s'impose en particulier au juge de l'exécution statuant à l'audience d'orientation qui se tient en cas de saisie immobilière initiée par un créancier auquel est inopposable la déclaration d'insaisissabilité d'un immeuble appartenant à son débiteur et qui peut donc faire procéder à la vente sur saisie de cet immeuble, l'audience d'orientation ayant notamment pour objet, à l'instar de la procédure d'admission, de constater le principe de la créance du créancier poursuivant et d'en mentionner le montant retenu.

Mais l’apport principal de l’arrêt se situe ailleurs en ce qu'il répond à la question suivante : en matière de clauses abusives, le juge de l’exécution peut-il se fonder sur l’autorité de la chose jugée attachée à une décision d’admission pour rejeter une contestation soulevée à l’audience d’orientation, à l’occasion d’une saisie immobilière ?

Pour y répondre, la Cour de cassation se réfère alors à la jurisprudence de la CJUE, convoquant quatre arrêts importants (CJUE, 26 janvier 2017, aff. C-421/14 N° Lexbase : A9995TM7 ; CJUE, 4 juin 2020, aff. C-495/19 N° Lexbase : A81223MR ; CJUE, 17 mai 2022, aff. C-600/19 N° Lexbase : A16647XW ; CJUE,  17 mai 2022, affaires jointes C-693/19 et C-831/19 N° Lexbase : A16667XY).

Il s'en déduit alors, selon la Haute juridiction, que l'autorité de la chose jugée d'une décision du juge-commissaire admettant des créances au passif d'une procédure collective, résultant de l'article 1355 du Code civil N° Lexbase : L1011KZH et de l'article 480 du Code de procédure civile N° Lexbase : L2318LUE, ne doit pas être susceptible de vider de sa substance l'obligation incombant au juge national de procéder à un examen d'office du caractère éventuellement abusif des clauses contractuelles.

Il en découle ensuite que le juge de l'exécution, statuant lors de l'audience d'orientation, à la demande d'une partie ou d'office, est tenu d'apprécier, y compris pour la première fois, le caractère éventuellement abusif des clauses contractuelles qui servent de fondement aux poursuites, sauf lorsqu'il ressort de l'ensemble de la décision revêtue de l'autorité de la chose jugée que le juge s'est livré à cet examen.

Enfin, la Cour de cassation énonce qu’il en résulte qu'un débiteur soumis à une procédure collective contre lequel a été rendue une décision, irrévocable, admettant à son passif une créance au titre d'un prêt immobilier, qu'il avait souscrit antérieurement en qualité de consommateur, peut, à l'occasion de la procédure de saisie immobilière d'un bien appartenant à ce débiteur, mise en œuvre par le créancier auquel la déclaration d'insaisissabilité de l'immeuble constituant la résidence principale du débiteur est inopposable, nonobstant l'autorité de la chose jugée attachée à cette décision, soulever, à l'audience d'orientation devant le juge de l'exécution, une contestation portant sur le caractère abusif d'une ou plusieurs clauses de l'acte de prêt notarié dès lors qu'il ressort de la décision revêtue de l'autorité de la chose jugée que le juge ne s'est pas livré à cet examen.

Elle censure alors l’arrêt d’appel qui a rejeté les contestations de l’emprunteur. En effet, dans ses décisions d'admission, le juge-commissaire n'avait pas examiné le caractère abusif de la clause d'exigibilité anticipée des prêts notariés fondant la saisie immobilière litigieuse, de sorte qu'il appartenait au juge de l'exécution, saisi d'une contestation formée sur ce point pour la première fois devant lui lors de l'audience d'orientation, de procéder à cet examen.

Cet arrêt est accompagné d’une notice au rapport dans laquelle on peut notamment lire que cet arrêt « franchit une étape supplémentaire et essentielle dans l’office du juge en matière de clauses abusives, spécialement le juge de l’exécution, la solution adoptée valant quelle que soit la décision revêtue de l’autorité de la chose jugée, et non pour le seul cas de la décision d’admission au passif. Il importe néanmoins de souligner que cette solution est doublement circonscrite : elle suppose, d’une part, qu’une clause contractuelle soit arguée d’abusive au sens de la Directive n° 93/13 N° Lexbase : L7468AU7, d’autre part, que, lors de la précédente décision revêtue de l’autorité de la chose jugée, le juge n’ait pas déjà effectivement exercé son contrôle sur ce point ».

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La décision du juge-commissaire en matière de déclaration et de vérification des créances, La portée de l'autorité de la chose jugée attachée à la décision d'admission de la créance, in Entreprises en difficulté, (dir. P.-M. Le Corre), Lexbase N° Lexbase : E61477CN.

 

newsid:484366

Procédure pénale

[Brèves] Décision orale de destruction des biens meubles saisis : un PV doit rendre compte de la décision et de ses motifs

Réf. : Cass. crim., 15 février 2023, n° 22-83.956, F-B N° Lexbase : A24219DZ

Lecture: 4 min

N4427BZY

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par Adélaïde Léon

Le 20 Mars 2023

► La décision de destruction prise par le procureur de la République peut être écrite ou orale, à la condition que le procès-verbal rende compte de cette décision et de ses motifs ; Excède ses pouvoirs le président de la chambre de l’instruction qui statue seul sur la contestation d’une décision de destruction prise par le procureur de la République.

Rappel des faits et de la procédure. Dans le cadre d’une enquête de flagrance diligentée du chef de port d’arme de catégorie D, un couteau à cran d’arrêt a été saisi. Son propriétaire a fait l’objet d’un rappel à la loi et s’est vu notifier oralement par les enquêteurs la décision prise par le procureur de la République de détruire le couteau. Cette notification a été inscrite dans un procès-verbal du même jour. Cette destruction était motivée par le fait que le couteau constituait un produit dangereux et nuisible dont la détention est illicite et que son maintien sous scellé n’était plus nécessaire à la manifestation de la vérité.

En réponse à la contestation formulée par le propriétaire du bien en cause contre la destruction de celui-ci, le président de la chambre de l’instruction de la cour d’appel a infirmé la décision du procureur de la République.

Le Procureur général près la cour d’appel a formé un pourvoi contre l’arrêt du président de la chambre de l’instruction.

Moyen du pourvoi. Il était fait grief au président de la chambre de l’instruction d’avoir rendu seul l’arrêt attaqué, en violation des dispositions  de l’article 41-5 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L7474LPI.

Le Procureur général reprochait également à l’arrêt d’avoir sanctionné l’absence de décision formalisée de la part du procureur de la République au motif que la pertinence de la motivation, ni les éléments de fait et de droit ne pouvaient être appréciés en raison de la seule notification orale de la décision.

Décision. La Chambre criminelle casse et annule l’arrêt du président de la chambre de l’instruction en toutes ses dispositions au visa de l’article 41-5 du Code de procédure pénale et renvoi la cause et les parties devant la chambre de l’instruction.

Cet article permet au procureur de la République d’ordonner par décision motivée la destruction des biens meubles saisis dont la conservation n’est plus nécessaire à la manifestation de la vérité, lorsqu’il s’agit d’objets qualifiés par la loi de dangereux ou nuisibles, ou dont la détention est illicite.

La cassation est d’une part encourue en raison du fait que le président de la chambre de l’instruction a statué seul sur la contestation formulée contre la décision de destruction du couteau. Or, l’article 41-5 précité désigne sans ambiguïté la chambre de l’instruction comme étant la juridiction compétente pour recevoir les contestation contre les décision du procureur de la République ordonnant la destruction des biens meubles saisis.

La Chambre criminelle déduit d’autre part de l’article 41-5 du Code de procédure pénale et des travaux préparatoire de la loi n° 2015-177, du 16 février 2015 N° Lexbase : L9386I7R à l’origine de ce texte que  la décision de destruction prise par le procureur de la République peut être écrite ou orale, à la condition que le procès-verbal rende compte de cette décision et de ses motifs.

En l’espèce, le président de la chambre de l’instruction ne pouvait soutenir qu’il n’existait pas de décision dès lors que l’existence de celle-ci résultait du procès-verbal, lequel énonçait par ailleurs les motifs de celle-ci.

Pour aller plus loin : M. Hy, ÉTUDE : Les saisies pénales, L’aliénation, la destruction et l’affectation avant jugement des biens meubles, La destruction, Le recours, in Procédure pénale, (dir. J.-B. Perrier), Lexbase {"IOhtml_internalLink": {"_href": {"nodeid": 90641958, "corpus": "encyclopedia"}, "_target": "_blank", "_class": "color-encyclopedia", "_title": "Le recours", "_name": null, "_innerText": "N\u00b0\u00a0Lexbase\u00a0: E086503G"}}.

newsid:484427

Procédures fiscales

[Brèves] Une prise de position des services du ministre de l’Économie dans une FAQ peut faire l’objet d’un REP

Réf. : CE 9°-10° ch. réunies, 3 février 2023, n° 451052, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A25729BU

Lecture: 3 min

N4342BZT

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par Marie-Claire Sgarra

Le 17 Février 2023

► Une foire aux questions peut faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir.

Les faits. Un requérant conteste le point 12 de la partie « Puis-je en bénéficier ? » d’une « foire aux questions » relative au fonds de solidarité en faveur des entreprises institué par l’ordonnance n° 2020-317, du 25 mars 2020, publiée sur le site du ministère de l’Économie, apportant – à la question : « Les loueurs en meublés non professionnels sont-ils éligibles au fonds de solidarité ? » – la réponse suivante : « Non, les loueurs en meublés non professionnels ne sont pas éligibles au fonds ».

Rappel. Les documents de portée générale émanant d'autorités publiques, matérialisés ou non, tels que les circulaires, instructions, recommandations, notes, présentations ou interprétations du droit positif peuvent être déférés au juge de l'excès de pouvoir lorsqu'ils sont susceptibles d'avoir des effets notables sur les droits ou la situation d'autres personnes que les agents chargés, le cas échéant, de les mettre en œuvre. Ont notamment de tels effets ceux de ces documents qui ont un caractère impératif ou présentent le caractère de lignes directrices.

Solution du CE. Par cette question-réponse, les services du ministre de l’Économie, ont fait part de leur interprétation de l’ordonnance du 25 mars 2020, instituant un fonds de solidarité à destination des personnes physiques et morales de droit privé exerçant une activité économique particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation du Covid-19 et des mesures prises pour en limiter la propagation.

Cette interprétation du droit positif, émise par les services chargés d’instruire les demandes d’aides au titre du fonds de solidarité puis de procéder, le cas échéant, au versement de ces aides, est susceptible de produire des effets notables sur la situation des personnes qui souhaitent bénéficier des mesures de soutien mises en place. La réponse litigieuse est susceptible de faire l’objet d’un REP.

Le requérant est fondé à demandé l’annulation du point 12 de la partie « Puis-je en bénéficier » de la FAQ.

Précisions.

► Le Conseil d’État a par une décision du 12 juin 2020 ouvert le REP à l’ensemble des « documents de portée générale émanant d'autorités publiques, matérialisés ou non, tels que les circulaires, instructions, recommandations, notes, présentations ou interprétations du droit positif […] lorsqu'ils sont susceptibles d'avoir des effets notables sur les droits ou la situation d'autres personnes que les agents chargés, le cas échéant, de les mettre en œuvre » (CE Contentieux, 12 juin 2020, n° 418142, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A55233NU).

► Le Conseil d’État a, par un arrêt rendu le 8 avril 2022, admis la recevabilité d’un recours pour excès de pouvoir dirigé contre une réponse publiée par la CNIL, au sein d’une foire aux questions (FAQ) (CE 9°-10° ch. réunies, 8 avril 2022, n° 452668, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A06317TK).

Lire en ce sens, A. Bron, Droit souple : de nouveaux horizons contentieux, Lexbase Public, mai 2022, n° 667 N° Lexbase : N1490BZ9.

newsid:484342

Santé et sécurité au travail

[Brèves] Amiante : atteinte à la dignité constituée par l’usage illégal de l’amiante par l’employeur

Réf. : Cass. soc., 8 février 2023, n° 21-14.451, FP-B+R N° Lexbase : A97099B9

Lecture: 2 min

N4329BZD

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par Laïla Bedja

Le 17 Février 2023

► L'employeur, qui avait bénéficié d'une dérogation jusqu'au 31 décembre 2001 l'autorisant à poursuivre l'utilisation de l'amiante malgré l'entrée en vigueur du décret n° 96-1133 du 24 décembre 1996, relatif à l'interdiction de l'amiante, et continué, en toute illégalité, à utiliser ce matériau de 2002 à 2005 alors qu'il n'était plus titulaire d'aucune autorisation dérogatoire, a manqué à son obligation d'exécuter de bonne foi les contrats de travail.

Les faits et procédure. Par un arrêté ministériel du 30 septembre 2005, un établissement de la société A a été inscrit sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA) pour la période 1916-2001. La période a été prolongée jusqu’en 2005 par un second arrêté.

Deux salariés ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir réparation notamment d'un préjudice au titre d'un manquement à l'obligation de loyauté de la part de leur employeur au regard de leur exposition à l’amiante.

En appel, les juges du fond (CA Lyon, 10 décembre 2020, n° 20/00955 N° Lexbase : A487439E) ont déclaré recevable l’action des salariés au titre du manquement à l'obligation de loyauté et condamné l’employeur à verser une somme à titre de dommages et intérêts. Ils ont en revanche écarté l’action portant sur la réparation du préjudice d’anxiété car prescrite.

Le pourvoi. L’employeur a alors formé un pourvoi en cassation selon le moyen, notamment que le salarié dont le droit à réparation au titre du préjudice d'anxiété, en application de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, est éteint, n'est pas recevable à solliciter le versement de dommages et intérêts au titre d'une utilisation d'amiante par l'employeur sur un autre fondement juridique.

La décision. Énonçant la solution précitée et s’appuyant sur l’article L. 1222-1 du Code du travail N° Lexbase : L0806H9Q, la Haute juridiction rejette le pourvoi. L'atteinte à la dignité de son salarié constitue pour l'employeur un manquement grave à son obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail (Cass. soc., 7 février 2012, n° 10-18.686, FS-P+B N° Lexbase : A3568IC7). La Cour a déclaré le moyen de l’employeur comme partiellement irrecevable. En effet, les salariés, au soutien de leur demande au titre de l'obligation de loyauté, n'invoquaient pas l'existence d'un préjudice d'anxiété.

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Secret professionnel

[Brèves] La violation du secret professionnel est-elle caractérisée lorsque le tiers est aussi partie à la procédure ?

Réf. : Cass. crim., 10 janvier 2023, n° 22-80.969, F-D N° Lexbase : A792987S

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N4405BZ8

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par Marie Le Guerroué

Le 22 Février 2023

► Caractérise l’infraction de violation du secret professionnel, le fait de s'entretenir avec son client en présence de l'épouse de celui-ci, certes mise en cause dans la même procédure, mais aux intérêts divergents et défendue par un conseil distinct.

Faits et procédure. À la suite du décès d’un enfant mineur, une information judiciaire avait été ouverte pour coups mortels aggravés. Les parents de l’enfant avaient été mis en examen et assisté chacun par un avocat. L’avocat de l’époux s'était entretenu de la procédure avec son client en présence constante de son épouse, et hors la présence de l'avocat de cette dernière. Des écoutes téléphoniques ayant révélé de possibles violations du secret de l'instruction, une enquête avait été diligentée, à la suite de laquelle l’avocat avait été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour violation du secret professionnel. La cour d’appel de Douai avait confirmé le jugement du tribunal correctionnel et avait condamné l’avocat à 5 000 euros d'amende et à trois mois d'interdiction professionnelle.

Moyen. L’avocat forme un pourvoi devant la Cour de cassation. Il rappelle que l'infraction de violation du secret professionnel de l'avocat suppose la révélation par l'avocat à un tiers d'une information à caractère secret. En conséquence, selon lui, ne porte nullement atteinte au secret professionnel auquel il est tenu l'avocat qui s'entretient d'une affaire en cours d'instruction avec son client, mis en examen, et son épouse, également mise en examen dans la même affaire, chaque personne mise en examen étant partie à la procédure et disposant du droit d'accéder et de prendre connaissance des éléments du dossier d'instruction.

Réponse de la Cour. La Cour relève que pour déclarer le prévenu coupable de violation du secret professionnel, l'arrêt attaqué énonce notamment que le fait de s'entretenir avec son client en présence de l'épouse de celui-ci, certes mise en cause dans la même procédure, mais aux intérêts divergents et défendue par un conseil distinct, caractérise cette infraction. Elle estime qu’en statuant ainsi, la cour d'appel a fait l'exacte application des textes. Tout d'abord, aucun texte du Code de procédure pénale ou du règlement intérieur normalisé de la profession d'avocat n'autorise l'avocat à communiquer des renseignements tirés d'une procédure pénale à une personne qui n'est pas son client, fût-elle par ailleurs partie à la procédure. Ensuite, en l’espèce, il n'est pas soutenu, et encore moins démontré, que la communication des éléments du dossier d'instruction aurait été indispensable à l'exercice des droits de la défense du client de l'avocat.

Rejet. La Cour rejette par conséquent le pourvoi.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Le secret et la confidentialité des échanges, La caractérisation d'une violation du secret de l'enquête et de l'instruction par l'avocat, in La profession d’avocat, (dir. H. Bornstein), Lexbase N° Lexbase : E35683RL.

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Urbanisme

[Brèves] Contestation de la légalité d’un permis de construire modificatif au cours de l’instance contre le permis initial

Réf. : CE, 1°-4° ch. réunies, 1er février 2023, n° 459243, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A18169BU

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N4387BZI

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par Yann Le Foll

Le 17 Février 2023

► Peuvent être contestés un permis modificatif, une décision modificative ou une mesure de régularisation délivrés et communiqués au cours de l'instance portant sur l'autorisation initiale et ce, sous la forme d'une requête ou d'un mémoire complémentaire.

Principe. Il résulte de l'article L. 600-5-2 du Code de l'urbanisme N° Lexbase : L9805LM4 que les parties à une instance portant sur un recours dirigé contre le permis de construire, de démolir ou d'aménager initialement délivré ou contre la décision de non-opposition à déclaration préalable initialement obtenue sont recevables à contester la légalité d'un permis modificatif, d'une décision modificative ou d'une mesure de régularisation intervenue au cours de cette instance, lorsqu'elle leur a été communiquée, tant que le juge n'a pas statué au fond, sans condition de forme ni de délai.

En première instance. Pour rejeter en l'espèce comme tardives les conclusions des requérants tendant à l'annulation du permis de construire modificatif délivré le 23 novembre 2020, qui avait été versé à l'instance en cours portant sur la demande des mêmes requérants tendant à l'annulation du permis de construire initial et leur avait été communiqué, le tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur la circonstance qu'ils lui avaient demandé l'annulation de ce permis de construire modificatif par une requête enregistrée le 21 janvier 2021 sous un numéro d'instance distinct, dont il a estimé qu'elle ne constituait, de ce fait, pas une contestation recevable au titre de l'article L. 600-5-2 du Code de l'urbanisme.

Il a, en outre, relevé que l'introduction de cette requête avait, en manifestant la connaissance que les intéressés avaient acquise de ce permis modificatif, fait courir à leur encontre le délai de recours de deux mois prévu à l'article R. 421-1 du Code de justice administrative N° Lexbase : L4139LUT.

Il en a déduit que ce délai était expiré lorsque les requérants, après avoir contesté la légalité de ce permis modificatif par un mémoire versé le 3 février 2021 à l'instance en cours contre le permis initial, ont expressément ajouté à leurs conclusions dirigées contre le permis initial, le 23 juillet 2021, des conclusions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du permis de construire modificatif.

Décision CE. En statuant ainsi, alors que le délai de recours de l'article R. 421-1 du Code de justice administrative n'était pas opposable aux requérants, auxquels il incombait seulement de contester le permis de construire modificatif avant que le tribunal administratif n'ait statué au fond sur le permis de construire initial, le tribunal administratif a entaché son jugement d'erreur de droit (voir pour une décision analogue en matière de sursis à statuer en vue de la régularisation d'une autorisation d'urbanisme, CE, 5°-6° ch. réunies, 16 février 2022, n° 420554, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A60927NX).

À ce sujet. Lire B. Cottet-Emard, Le Conseil d’État est-il compétent pour juger des mesures de régularisation d’un permis de construire intervenues en cours d’instance ?, Lexbase Public, novembre 2022, n° 684 N° Lexbase : N3182BZU.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les parties au contentieux administratif de l'urbanisme : le déroulé de l'instance, in Droit de l’urbanisme, (dir. A. Le Gall), Lexbase N° Lexbase : E7552YTU.

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