Le Quotidien du 11 août 2022

Le Quotidien

Contrôle fiscal

[Focus] L’opposition à contrôle fiscal à l’épreuve du pragmatisme de l’administration fiscale

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par Naël Dupeu, Doctorant en Droit fiscal à l’Université de Toulon, Cabinet Guidet & Associés

Le 05 Août 2022

Mots-clés : opposition à contrôle fiscal • administration fiscale • rectification contradictoire • imposition d’office • Livre des procédures fiscales

« Ennemie jurée de l’arbitraire, la forme est la sœur jumelle de la liberté. » [1]

Si la procédure de rectification contradictoire constitue la procédure de droit commun (LPF, art. L. 55 N° Lexbase : L5685IEB), il arrive parfois que l’administration fiscale puisse mettre en œuvre la procédure – plus violente – d’imposition d’office. L’application de cette procédure place le contribuable dans une position de faiblesse puisque d’une part, elle permet à l’administration fiscale de fixer d’office les bases d’impositions et d’autre part, elle a pour effet de transférer la charge de preuve sur ses épaules. Fort heureusement, cette procédure est encadrée.  En effet, cette procédure peut être mise en œuvre dans les situations précisées aux articles L. 65 N° Lexbase : L8461AE4 à L. 74 N° Lexbase : L0428IYI du Livre des procédures fiscales. La présente étude porte sur l’une de ces situations à savoir l’opposition à contrôle fiscal. Il s’agit ici d’esquisser les contours de cette notion (I) tout en mettant l’accent sur le risque de détournement de procédure (II).


 

I. Les contours de la notion d’opposition à contrôle fiscal

L’étude de la notion d’opposition à contrôle fiscal nous amène à pénétrer dans l’intimité d’un couple en phase de rupture. Ce voyeurisme est toutefois justifié par la nécessité de veiller au respect des règles qui encadrent l’opposition à contrôle fiscal (A). Cette curiosité touchera son paroxysme lorsque nous étudierons quelques cas justifiés d’opposition à contrôle fiscal (B). 

A. La notion d’opposition à contrôle fiscal

Le contrôle fiscal est le corollaire nécessaire du système déclaratif. En effet, selon le Professeur Martin Collet « il est impératif que l’administration dispose d’importants pouvoirs de contrôle pour s’assurer que les assujettis respectent leurs obligations » [2]. La loi fiscale permet ainsi à l’administration de mener un contrôle fiscal malgré l’absence de coopération du contribuable.

En ce sens, l’article L. 74 du Livre des procédures fiscales dispose que « les bases d’imposition sont évaluées d’office lorsque le contrôle fiscal ne peut avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers ». Les agents de l’administration fiscale ont donc les moyens de réagir face à un contribuable réfractaire au contrôle.

Champ d’application – L’article L. 74 du Livre des procédures fiscales vise l’ensemble des contrôles sur place auxquels l’administration est en droit de procéder et pas seulement les vérifications de comptabilité. Ces dispositions s’appliquent notamment au contrôle dont une société civile immobilière peut faire l’objet au titre de ses revenus fonciers [3].

Obligation de coopération du contribuable – L’administration fiscale mentionne de plus en plus souvent l’existence d’une obligation de coopération entre le service et le contribuable. Ce dernier doit, en effet, accepter « les règles du jeu » en satisfaisant aux demandes du vérificateur. Lorsque tel n’est pas le cas, le fisc peut agiter la menace dissuasive d’une opposition à contrôle fiscal. Toutefois, il faut garder à l’esprit que cette menace ne peut être mise à exécution que lorsque les conditions de l’opposition à contrôle fiscal sont remplies.

Conditions d’application – L’application des dispositions de l’article L. 74 du Livre des procédures fiscales nécessite la caractérisation d’une opposition à contrôle fiscal. Rappelons que l’opposition à l’exercice du contrôle peut émaner du contribuable lui-même ou d’un tiers. Le Professeur Thierry Lambert définit l’élément matériel de l’opposition à contrôle fiscal comme « tout obstacle apporté par toute personne, contribuable ou tiers, à l’exercice légal des fonctions des agents habilités à constater les infractions à la législation fiscale, et ayant pour effet de mettre les agents de l’administration dans l’impossibilité d’accomplir leur mission » [4]. L’exercice du contrôle doit ainsi être rendu quasi impossible. En outre, une telle opposition ne peut être caractérisée en l’absence d’un élément moral. Il doit en effet résulter des circonstances de l’espèce que l’obstacle a été apporté volontairement, consciemment et de façon délibérée [5].

Conséquences – Jouer les durs ou faire l’autruche lors d’un contrôle fiscal est une fausse bonne idée. Une opposition à contrôle fiscal emporte des conséquences désastreuses pour le contribuable. En effet, l’opposition à contrôle fiscal autorise l’administration à fixer d’office les bases d’imposition à l’aide des éléments d’appréciation dont elle dispose. La procédure de rectification contradictoire est ainsi exclue au profit de la procédure d’imposition d’office. L’article L. 76 du Livre des procédures fiscales prévoit simplement que l’administration est tenue de porter à la connaissance du contribuable les « bases ou éléments d’assiette » ainsi que les « modalités de calcul » à partir desquelles elle a établi les impositions d’office. Cela étant, l’application de la procédure d’imposition d’office a également pour effet de renverser la charge de la preuve (LPF, art. L. 193 N° Lexbase : L8356AE9). Ainsi, en cas de contestation, il incombe au contribuable de prouver le caractère exagéré des impositions (LPF, art. R. 193-1 N° Lexbase : L1588IN7).

Majoration de droits – Au titre des conséquences de l’opposition à contrôle fiscal, il faut ajouter l’application d’une majoration de 100% aux droits rappelés ou aux créances de nature fiscale qui doivent être restituées à l’État et l’interdiction, pour le contribuable, de siéger dans une des commissions fiscales instituées par les articles 1650 à 1651 M et 1653 A (CGI, art. 1732 N° Lexbase : L0571LZ8).

B. Les cas justifiés d’opposition à contrôle fiscal

La gravité des situations menant à caractériser une opposition à contrôle fiscal doit être à la hauteur des conséquences et sanctions encourues. En effet, comme l'a indiqué le commissaire du gouvernement J. Arrighi de Casanova dans ses conclusions sous la décision « Di Fazio », « l'application de l'article L. 74 suppose que le contrôle n'ait pas seulement été rendu plus difficile par l'inertie du contribuable. Il faut qu'il ait été rendu quasiment impossible, compte tenu, tant de l'attitude de l'intéressé que des diligences normales que l'on est en droit d'attendre en pareil cas d'un vérificateur » [6]. Ainsi, la caractérisation de l’obstacle procède de la conjugaison de l’attitude négative du contribuable ou du tiers et de l’attitude positive de l’agent de l’administration fiscale. En clair, l’un doit tout mettre en œuvre pour court-circuiter le contrôle tandis que l’autre doit tout faire pour le mener à bien.

Sous cette réserve, l’article L. 74 du Livre des procédures fiscales s’applique lorsque le contribuable a délibérément tenté d’empêcher la vérification mais également lorsque par son attitude, et notamment son inertie, il a rendu impossible le contrôle. En effet, l’opposition à contrôle fiscal est caractérisée lorsque le contribuable refuse de communiquer sa comptabilité [7] ou des éléments permettant de la reconstituer [8] ou lorsque l’intéressé laisse sans réponse plusieurs mises en demeure d’avoir à présenter celle-ci [9] ou décide de fermer son siège sans fournir une nouvelle adresse [10]. L’opposition à contrôle fiscal peut également être caractérisée par un report systématique des rendez-vous convenus avec l’inspecteur [11] ou l’utilisation de différents moyens pour repousser la vérification [12]  [13].

Ainsi, lorsqu’il résulte des circonstances de fait que le contribuable, ou un tiers a eu la volonté avérée de se soustraire au contrôle, l’application de la procédure d’imposition d’office est légalement justifiée. Toutefois, il existe des situations où l’excès de zèle des agents de l’administration fiscale conduit à appliquer injustement la procédure d’imposition d’office (II).

II. Le risque de détournement de procédure

Le Professeur Gérard Cornu définit le détournement de procédure comme une « irrégularité consistant à substituer à une procédure régulière une autre plus expédiente mais inapplicable » [14]. En ce sens, la recherche de l’efficacité fiscale peut conduire les agents de l’administration fiscale à appliquer, sans assez de précautions, la procédure d’imposition d’office (A). Le juge fiscal doit alors s’ériger en rempart, protecteur des garanties du contribuable (B).

A. Le pragmatisme de l’administration fiscale

L’inertie du contribuable est parfois source de détournement de procédure. En effet, à son tour, le vérificateur peut être tenté de faire l’autruche en interprétant, à la hâte, cette absence de réaction comme une opposition à contrôle fiscal. En pratique, le vérificateur va adresser, par lettre recommandée avec accusé de réception, un avis de vérification au contribuable en lui proposant une date de rendez-vous. En l’absence de réaction, il va multiplier les mises en garde et propositions de rendez-vous avant de perdre patience et de dresser un procès-verbal d’opposition à contrôle fiscal.

Ce procès-verbal emporte de lourdes conséquences sur la suite de la procédure. Dès lors, il est impératif de veiller à ce que les agents de l’administration fiscale prennent les précautions nécessaires afin de s’assurer que le contribuable s’oppose effectivement au contrôle. Ainsi, ces précautions ne peuvent se limiter à la multiplication de lettres recommandées avec accusé de réception retournées avec la mention « pli avisé non réclamé ». Les agents de l’administration fiscale doivent, en outre, chercher à joindre le contribuable par tout moyen afin de s’assurer qu’il s’agit de la bonne adresse et, le cas échéant, que l’inertie du contribuable n’est pas justifiée par des raisons objectives. Lorsque tel est le cas, il faut laisser au contribuable un délai raisonnable pour qu’il puisse appréhender sereinement le contrôle. En effet, rappelons que le juge fiscal exige de l’administration un certain devoir de loyauté.

Or, en pratique, il arrive parfois que de légères diligences conduisent les agents de l’administration fiscale à conclure, hâtivement, à une opposition à contrôle fiscal malgré des justifications objectives. En effet, la pandémie de Covid-19 a entraîné des restrictions de liberté exceptionnelles. Des contribuables se sont ainsi vu reprocher une opposition à contrôle fiscal alors qu’ils étaient à l’étranger, privés de leur liberté d’aller et venir. Aussi, plus simplement, il peut arriver que le contribuable s’absente quelques semaines en voyage et qu’à son retour, il perde brusquement le bienfait des vacances en découvrant le procès-verbal d’opposition à contrôle fiscal.

Ces situations ubuesques nuisent à la relation de confiance promue par la loi du 10 août 2018 [15]. Ainsi, afin de préserver cette relation, il faut veiller à ce que des précautions nécessaires soient prises pour s’assurer du caractère avéré de l’opposition.

En effet, gardons à l’esprit que la majoration de 100% appliquée en cas d’opposition à contrôle fiscal constitue la sanction la plus lourde prévue par les textes fiscaux. Dès lors, un tel traitement doit être exceptionnel [16] et réservé aux contribuables les plus récalcitrants.

B. Le juge fiscal, protecteur des garanties du contribuable

Le Professeur Gilles Noël indique que « le juge veille strictement à ce que l’administration fiscale utilise loyalement les différentes procédures de contrôle mises à sa disposition, et ne les détourne pas de leur objet pour confisquer des droits au contribuable » [17].

Ainsi, dans un arrêt du 27 juillet 2005 [18], les magistrats du Conseil d’État ont indiqué « qu’il ne ressort pas du dossier que le liquidateur, à supposer qu’il ait été sollicité par le vérificateur, a refusé de produire la comptabilité de la société ; que, dans ces conditions, en estimant que les éléments constitutifs d’une opposition à contrôle fiscal étaient réunis, à compter du 4 septembre 1990, la cour a inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis ».

Les hauts magistrats précisent en outre que « les éléments constitutifs d’une opposition à contrôle fiscal n’étaient pas réunis ; qu’en procédant à l’évaluation d’office des résultats de l’EURL Sud Harmonie en application de l’article L. 74 du Livre des procédures fiscales, l’Administration a dès lors entaché d’irrégularité la procédure d’imposition ». Dans ces conditions, le haut Conseil n’a eu d’autre choix que d’ordonner la décharge des impositions établies dans le cadre de la procédure d’évaluation d’office prévue par l’article L. 74 du Livre des procédures fiscales.

Le juge fiscal, en contrôlant la qualification juridique des faits, s’érige en protecteur des garanties du contribuable et il faut s’en féliciter. Toutefois, s’agissant du comportement passif du contribuable, des précisions pourraient être apportées.

En effet, le Conseil d’État a eu l’occasion de juger que « la procédure de l'évaluation d'office pour opposition au contrôle fiscal du fait du contribuable s'applique lorsque le contribuable, régulièrement avisé du contrôle, n'est pas présent le jour où doit se dérouler la vérification et reste absent de son cabinet pendant plusieurs mois » [19].

Il faut toutefois garder à l’esprit que l’opposition à contrôle fiscal doit être intentionnelle. Dès lors, il est impératif de veiller à ce que le contribuable ait été effectivement avisé du contrôle et non seulement « régulièrement avisé ». Cette nuance, primordiale, doit permettre au juge fiscal de faire la différence entre les véritables cas « d’esquive du contrôle fiscal » [20] et ceux qui n’en sont pas.

 

[1] R. Von Jhering, L’esprit du droit romain dans les diverses phases de son développement, 2e éd., traduit par O. de Meulenaere, t. III, Paris, Marescq, 1877, p. 158 ; Bologne, Forni, 1969, p. 164.

[2] M. Collet, Procédures fiscales, PUF, 2020, p. 5.

[3] CE, 9°-10° ssr., 5 novembre 2014, n° 356148 et 357672, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A9339MZW ; RJF, 2/15, n° 130 ; O. Négrin, Procédure n° 1, janvier 2015, comm. 27.

[4] T. Lambert, Procédures fiscales, 4e édition, LGDJ, p. 240.

[5] Ibid.

[6] Conclusions J. Arrighi de Casanova ss. CE, 8°-7° ssr., 10 avril 1991, n° 107710, Di Fazio N° Lexbase : A8950AQK : RJF, 6/1991, p. 425.

[7] CE, 7°-8° ssr., 16 février 1987, n° 50422.

[8] CAA Bordeaux, 25 février 2003, n° 99BX02355 N° Lexbase : A5778C9U.

[9] CE Contentieux, 15 juin 1987, n° 48864 N° Lexbase : A2460APS.

[10] CAA Paris, 6 février 1990, n° 1100.

[11] CE, 9°-10° ssr., 7 avril 2010, n° 325292 N° Lexbase : A5688EU9.

[12] CE, 9°-10° ssr., 29 décembre 2000, n° 196633 N° Lexbase : A2138AIZ.

[13] J-P. Casimir, Contrôle fiscal, Groupe Revue Fiduciaire, 16e édition, 2019, p. 213-215.

[14] G. CORNU, Vocabulaire juridique, 14e édition, PUF, 2022.

[15] Loi n° 2018-727, du 10 août 2018, pour un État au service d’une société de confiance N° Lexbase : L6744LLD.

[16] Charte des droits et obligations du contribuable vérifié, 2020, p. 22.

[17] G. Noël, La loyauté dans le couple administration fiscale-contribuable, in Mél., Cozian, Litec, 2009, op. cit., p. 96 in fine.

[18] CE, 9°-10° ssr., 27 juillet 2005, n° 253918 N° Lexbase : A1297DKA.

[19] CE, 7 décembre 1977, n° 3071: RJF, 1978. 56 ; Dr. fisc. 1978, comm. 379 et 381.

[20] O. Négrin, Procédures n° 1, janvier 2012, comm. 29.

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Délégation de service public

[Questions à...] Fin de concession d’une DSP « culturelle » : quel est le périmètre des biens de retour concernés ? Questions à Jean-François Lafaix, Professeur à l’Université de Strasbourg

Réf. : CE, 2°-7° ch. réunies, 16 mai 2022, n° 459904, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A15127XB

Lecture: 12 min

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Le 05 Août 2022

Mots-clés : biens de retour • réseaux sociaux • décors • monuments • délégation de service public

Dans un arrêt du 16 mai 2022, le Conseil d’État s’est prononcé sur le statut de biens matériels et immatériels produits pour l’exécution d’une délégation de service public portant sur l’exploitation culturelle et touristique des monuments romains de la ville de Nîmes, impliquant la gestion des services d’accueil, l’animation culturelle, la communication et la valorisation des arènes de Nîmes, de la Maison carrée et de la tour Magne. Outre les décors créés pour les manifestations touristiques liées aux monuments, le Conseil a qualifié de biens de retour un film dont le contrat mettait la production à la charge du concessionnaire et les droits d’administration des pages des réseaux sociaux relatives aux monuments. Le délégataire devra donc en restituer l’intégralité à la ville de Nîmes. Pour faire le point sur cette décision d’importance pour les collectivités, Lexbase Public a interrogé Jean-François Lafaix, Professeur à l’Université de Strasbourg*.


 

Lexbase : Pouvez-vous nous rappeler en quoi consistent les biens de retour ?

Jean-François Lafaix : Ainsi qu’ils sont désormais définis par l’article L. 3132-4 du Code de la commande publique N° Lexbase : L4183LRD, les biens de retour sont des « biens, meubles ou immeubles, qui résultent d’investissements du concessionnaire et sont nécessaires au fonctionnement du service public ». Cette définition reprend, en substance, celle formulée par l’arrêt du Conseil d’État « Commune de Douai » du 21 décembre 2012 [1]. Concrètement, il s’agit souvent d’ouvrages d’infrastructure ou de bâtiment ou de véhicules ou autres meubles sans lesquels il n’est pas possible d’exécuter le service public.

La définition des biens de retour par le législateur était opportune dans la mesure où elle résultait initialement de la jurisprudence administrative tout en ayant des conséquences en termes de propriété, alors qu’il revient en principe au juge judiciaire de déterminer la personne propriétaire d’un bien. Si la Cour de cassation se réfère désormais, elle aussi, à la catégorie des biens de retour [2], il n’en revenait pas moins au législateur – et non au juge – de fixer les garanties légales des exigences constitutionnelles [3]. Or, ces garanties sont liées au régime des biens de retour et leur définition, qui conditionne l’application de ce régime, en fait donc partie.

Le principal élément de définition des biens de retour réside dans leur importance pour l’exécution d’un contrat de concession. C’est leur fonction du point de vue de l’effectivité du principe constitutionnel de continuité du service public qui permet de les identifier et non leur fonction du point de vue de l’économie du contrat de concession. Bien évidemment, il est parfois difficile de déterminer si un bien est « nécessaire au fonctionnement du service public », c’est-à-dire indispensable. C’est pourquoi en pratique, les parties s’accordent généralement sur une liste. Mais l’arrêt « Commune de Nîmes »  rappelle que le contrat de concession ne peut déroger au régime de ces biens. Le contrat ne peut donc écarter cette qualification en présence d’un bien pourtant nécessaire au fonctionnement du service public. L’arrêt « Commune de Nîmes » montre aussi que le juge administratif doit « rechercher si les biens en cause étaient nécessaires au fonctionnement du service public » afin de relever d’office la violation par le contrat du régime des biens de retour. En effet, le Conseil casse l’ordonnance contestée pour ce motif « sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les moyens du pourvoi ».

Bien que l’existence de cette catégorie de biens résulte d’exigences constitutionnelles et non de l’économie particulière des contrats de concession, elle concerne uniquement l’exécution d’un contrat par lequel une « autorité concédante de droit public » a concédé la réalisation de travaux ou la gestion d’un service public. Il y a certainement matière à identifier des biens remplissant des fonctions équivalentes dans d’autres contrats passés par des personnes publiques puisque les exigences constitutionnelles ont un champ d’application qui ne se laisse pas enfermer dans telle ou telle catégorie de contrat définie par la loi. Mais, formellement, dans les autres contrats, les biens fonctionnellement équivalents ne sont pas des biens de retour.

Plus précisément, dans les contrats de concession (ou de délégation de service public, selon la dénomination antérieure conservée pour les collectivités territoriales), les biens de retour doivent être distingués de trois autres catégories de biens :

  • ceux qui sont apportés par le concédant ;
  • ceux qui sont acquis ou réalisés par le concessionnaire pour l’exécution du contrat sans être nécessaires au fonctionnement du service public, qualifiés de « biens de reprise » ;
  • et ceux qui appartiennent au concessionnaire et sont simplement utilisés pour l’exécution du contrat (et ses éventuelles autres activités), qualifiés de « biens propres » du concessionnaire. L’intérêt de cette distinction réside, bien évidemment, dans le régime applicable à chaque catégorie.

Lexbase : Quel est le régime que leur applique le juge administratif ?

Jean-François Lafaix : La particularité du régime des biens de retour réside dans les règles de propriété des biens et dans les règles d’indemnisation du concessionnaire en fin de contrat ou en cas de résiliation de celui-ci.

Dans le silence du contrat, les biens de retour « sont et demeurent la propriété de la personne publique dès leur réalisation ou leur acquisition » (CCP, art. L. 3132-4 N° Lexbase : L4183LRD), alors même que le concessionnaire assume la maîtrise d’ouvrage des constructions que le contrat met à sa charge et, plus généralement, le financement des investissements nécessaires au fonctionnement du service public. Le Conseil d’État applique cette solution de façon extensive. Ainsi, les biens de retour édifiés sur la propriété privée d’un tiers ne sont pas la propriété du propriétaire du fond ou du concessionnaire, mais celle de la personne publique concédante [4]. La qualification de biens de retour écarte donc le jeu de la règle de l’accession. De façon plus marquante encore, le Conseil d’État a étendu cette qualification à des « biens que le concessionnaire a, en acceptant de conclure la convention, affectés au fonctionnement du service public et qui sont nécessaires à celui-ci » [5], s’agissant en l’espèce de remontées mécaniques.

La propriété publique initiale des biens de retour n’est pas toujours d’ordre public. Les parties peuvent s’accorder pour octroyer au concessionnaire la propriété des biens de retour édifiés sur la propriété privée d’un tiers (CCP, art. L. 3132-5 N° Lexbase : L3767LRX) ou des droits réels sur les ouvrages et équipements qu’il réalise « dans les conditions et les limites définies par les clauses du contrat ayant pour objet de garantir l’intégrité et l’affectation du domaine public » (CCP, art. L. 3132-2 N° Lexbase : L3765LRU). Dans les deux cas, le contrat ne peut faire obstacle au retour gratuit de ces biens dans le patrimoine de la personne publique. En effet, au terme du contrat, les biens de retour qui ont été amortis au cours de l’exécution du contrat de concession font retour dans le patrimoine de la personne publique gratuitement, sous réserve des stipulations du contrat permettant à celle-ci de faire reprendre par le concessionnaire les biens qui ne seraient plus nécessaires au fonctionnement du service public (CCP, art. L. 3132-5 N° Lexbase : L3767LRX).

Les provisions constituées par le concessionnaire pour financer les travaux de « renouvellement des biens nécessaires au fonctionnement du service public » et non utilisées en fin de contrat reviennent également gratuitement à la personne publique concédante [6].

Lexbase : Le fait qu’ils puissent aussi englober des biens incorporels vous paraît-il logique ?

Jean-François Lafaix : Votre question invite à examiner deux dimensions en particulier : celle de la nature des « biens » en cause et celle de l’extension donnée à la catégorie des biens de retour.

Dans son arrêt du 16 mai 2022, le Conseil d’État qualifie de biens de retour trois types de biens : les décors fabriqués pour les « Grands Jeux romains », le film relatif à la Maison carrée et les droits d’administration des pages des réseaux sociaux relatives aux monuments. Les décors étant des biens meubles corporels, comme le sont les véhicules de transports, notamment, il paraît assez logique de les considérer comme des biens de retour (s’ils sont effectivement nécessaires au fonctionnement du service public). Le film est, quant à lui, l’œuvre de l’esprit dont le contrat de concession conférait l’usage à la commune de Nîmes. En tant qu’œuvre, indépendamment de son support, c’est un bien immatériel. Enfin, les droits d’administration des pages des réseaux sociaux sont des pouvoirs juridiques réservés aux titulaires des comptes.

Les œuvres littéraires et artistiques sont des choses incorporelles, dont il est admis qu’elles constituent des objets de propriété. Les considérer comme des biens de retour ne constitue donc pas un effort original même si cela risque de soulever des difficultés sur lesquelles le Conseil d’État ne s’est pas attardé en l’espèce. En cas de différend entre le concessionnaire et le concédant, les actions civiles et les demandes relatives à la propriété littéraire et artistique sont exclusivement portées devant des tribunaux judiciaires (CPI, art. L. 331-1 N° Lexbase : L0398LTW). Il n’est donc pas exclu que le juge judiciaire soit appelé à trancher les litiges portant sur les biens de retour et leur indemnisation. Sa compétence, à ce titre, déroge, en effet à celle du juge administratif pour connaître des litiges relatifs à l’exécution des contrats administratifs de la commande publique [7].

Les droits d’administration des pages des réseaux sociaux pouvaient être considérés simplement comme des droits et non comme des biens. Une partie des juristes estime que les droits ne devant leur existence qu’au système juridique, ils ne sont pas des biens et ne sont pas, en eux-mêmes, des objets de propriété. Il y aurait une « titularité » des droits, mais pas une propriété des droits. Au contraire, une autre partie estime que les créances et d’autres droits peuvent constituer des biens en tant que moyens d’obtenir un avantage et en raison de leur valeur économique et patrimoniale.

L’arrêt du Conseil d’État ne doit pas nécessairement être compris comme une prise de position dans ce débat, même si le Conseil n’avait écarté la qualification de biens de retour pour les quotas d'émission de dioxyde de carbone qu’en raison du régime spécifique auquel ils sont soumis [8]. La nature de bien des différents objets matériels, intellectuels ou juridiques servant à l’exécution continue du service public n’a pas d’importance en elle-même. Seule la continuité du service public importe. Il faut qu’au terme du contrat, la personne publique concédante ait la disposition de tous les instruments nécessaires au fonctionnement du service public. La propriété publique de ces instruments est la solution retenue par le législateur pour y parvenir. Les droits sont des biens en ce sens ou dans ce but. Les exigences constitutionnelles seraient les mêmes si l’on refusait unanimement et catégoriquement la qualification de biens à des droits. La Constitution exigerait simplement que les biens et droits nécessaires au fonctionnement du service public reviennent à la personne publique concédante en fin de contrat.

Fallait-il alors considérer que des décors, un film et des droits d’administration des réseaux sociaux sont nécessaires au fonctionnement du service public, me direz-vous ?

Cette solution montre que le Conseil d’État a une conception assez exigeante de la continuité du service public qui peut paraître étrangère au sentiment et à l’expérience d’un usager des transports publics un jour de grève. Mais si le service public consiste en un ensemble de prestations offertes aux usagers, tout ce qui est nécessaire pour effectuer toutes ces prestations est susceptible de constituer un bien de retour. Il ne s’agit pas simplement d’assurer un service minimum ou une sorte de cœur de service. Le service public en cause ne se limite pas à rendre les monuments accessibles au public. Il comporte des prestations plus sophistiquées, plus pédagogiques et ludiques. Il comporte aussi tout un ensemble d’informations qui doivent être accessibles au public intéressé par le monument même lorsqu’il ne le visite pas.

Si cette solution peut paraître extensive, c’est simplement en raison de l’extension de la catégorie de service public en droit français.

Lexbase : Cette solution ne risque-t-elle pas d’effrayer les futurs délégataires ?

Jean-François Lafaix : Cette crainte est liée à l’obligation de remettre les biens de retour gratuitement à la personne publique concédante en fin de contrat puisque ces biens lui appartiennent dès l’origine. S’agissant d’ouvrages édifiés sur un immeuble public, le concessionnaire n’a guère d’espoir et de possibilité d’en revendiquer la propriété en fin de contrat, étant précisé que ces ouvrages sont incorporés au domaine public et sont donc inaliénables. Plus les biens meubles et les biens incorporels deviennent importants, plus cette possibilité existe en pratique et plus cette question devient sensible car ceux-ci ne satisfont pas de façon évidente la définition du domaine public mobilier.

Mais la crainte n’est légitime que si cette obligation est une surprise ou si le concessionnaire pouvait légitimement espérer produire, à l’occasion du contrat, une source de richesse exploitable ensuite à des fins privées. Mais ces prétentions sont-elles légitimes…

Le régime indemnitaire des biens de retour devrait rassurer les concessionnaires. Le retour gratuit ne vaut que si le bien a été amorti au cours de l’exécution du contrat. Dans le cas contraire, c’est-à-dire lorsque la durée d’utilisation du bien est supérieure à la durée du contrat, le concessionnaire a droit à une indemnisation. Cette indemnisation est favorable au concessionnaire puisque celui-ci est censé assumer le risque d’exploitation. En principe, il ne doit pas être assuré d’amortir les investissements ou les coûts, liés à l’exploitation de l’ouvrage ou du service, qu’il a supportés (CCP, art. L. 1121-1 N° Lexbase : L4672LRH). De même, en cas de résiliation, le concessionnaire a droit d’être indemnisé de la valeur non amortie des biens de retour, alors même que la concession serait déficitaire [9]. De ce point de vue, l’extension de la catégorie des biens de retour devrait plutôt être rassurante.

*Propos recueillis par Yann Le Foll, Rédacteur en chef de Lexbase Public.


[1] CE Ass., 21 décembre 2012, n° 342788 N° Lexbase : A1341IZP.

[2] Cass. civ. 3, 9 février 2022, n° 21-12.295, FS-D N° Lexbase : A09647NZ.

[3] Cons. const., décision n° 2005-513 DC du 14 avril 2005 N° Lexbase : A9488DHU, § 4.

[4] CE Ass., 21 décembre 2012, n° 342788, préc.

[5] CE, Sect., 29 juin 2018, n° 402251 N° Lexbase : A5127XUG.

[6] CE, 18 octobre 2018, n° 420097 N° Lexbase : A9378YGG.

[7] T. confl., 7 juillet 2014, n° C3955 N° Lexbase : A4395MUC.

[8] CE, 6 octobre 2017, n° 402322 N° Lexbase : A2745WU9.

[9] CE, 4 mai 2015, n° 383208 N° Lexbase : A4465NHT.

newsid:481766

Données personnelles

[Brèves] Aide aux victimes d'événements survenus à l'étranger, notamment d'attentats ou de catastrophes : création d’un traitement informatisé de données à caractère personnel dénommé « Crisenet 2 »

Réf. : Décret n° 2022-1104, du 2 août 2022, portant création d'un traitement informatisé de données à caractère personnel dénommé « Crisenet 2 » N° Lexbase : L5953MDT

Lecture: 5 min

N2443BZI

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par Johanna Granat

Le 05 Août 2022

► Le décret n° 2022-1104, du 2 août 2022, prévoit la mise en œuvre par le ministère de l’Europe et des Affaires d’un traitement de données à caractère personnel dénommé « Crisenet 2 » et en précise le cadre. La vocation de ce traitement est de permettre aux acteurs de saisir et d’accéder aux informations nécessaires à l’aide aux victimes d’événements survenus à l’étranger, notamment d’attentats ou de catastrophes. Le texte arrête les modalités du traitement ainsi que sa nature, la durée de conservation des données, les procédures d’accès et d’éditions et les catégories de personnes y ayant accès.

 « Crisenet 2 » a pour objectifs de centraliser et fiabiliser les données sur les communautés protégées, incluant notamment les ressortissants français, leurs conjoints, leurs ayants droit, et les ressortissants étrangers dépendants d'accords bilatéraux, victimes d'événements d'ampleur survenus hors du territoire de la République française et sur les personnes à l'origine du signalement. Ce traitement doit également permettre d’améliorer l’information, l’accompagnement et la prise en charge des personnes précitées et, enfin, de produire des statistiques et des documents relatifs à la gestion de crise.

Les données à caractère personnel susceptibles d’être enregistrées

Dans le cadre d’une personne ayant pris attache avec les cellules de crise ouvertes en France ou à l'étranger, le système « Crisenet 2 » est susceptible de traiter des données relevant de l’identité, du pays de résidence, des coordonnées ainsi que du lien de proximité avec la personne recherchée.

Concernant les personnes présentes ou déclarées sur les lieux de l'événement et les proches les accompagnant, il s’agira de récolter :

  • les éléments d’identité (nom et prénom, date et lieu de naissance, sexe, les langues parlées, le numéro du passeport, les éventuels signes distinctifs) ;
  • ses coordonnées (numéro de téléphone portable, adresse postale et messagerie électronique) ;
  • les informations relavant de la santé de la personne (la prise en charge éventuelle par une structure hospitalière, le nom du médecin, le lieu de conservation du corps en cas de décès, l'état de santé, les éléments pertinents relatifs à la souscription d'assurances, les pathologies physiques ou mentales signalées) ;
  • les informations relatives à la localisation (la localisation et l'état de recherche de la personne sur le lieu de crise notamment sa localisation).

Enfin, le système « Crisenet 2 » est chargé de recueillir l'identité, les coordonnées professionnelles et personnelles, les moyens d'authentification ainsi que les profils d'habilitation des agents publics, bénévoles et membres d'associations (article 2 du présent décret).

Les acteurs assurant le traitement des données. En sa qualité de responsable de traitement, le directeur du centre de crise et de soutien du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères a compétence pour assurer le traitement de données récoltées (article 1 du présent décret).

Droit d’accès et d’édition des données. Par le présent décret, les agents publics, bénévoles et membres d'associations sont autorisés à accéder et éditer les données de traitement.

À l’exception des celles concernant ces derniers, les accédants au système d'information interministériel des victimes d'attentats et de catastrophes (SIVAC) listés aux I à V de l'article R. 2-15-2 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L9007L7Q , peuvent avoir accès aux informations concernant les personnes ayant pris attache avec les cellules de crise ainsi que les personnes présentes ou déclarées sur les lieux de l'événement ainsi que leurs proches (article 3 du présent décret).

Conservation des données. Les informations récoltées sont conservées pendant cinq ans à compter de l'ouverture d'une cellule de crise. À l’issue de cette période, les informations relevant des agents publics, bénévoles et membres d'associations sont supprimées tandis que les autres données ainsi que les statistiques et les documents issus du traitement sont archivés définitivement au sein du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères (article 4 du présent décret).

Droit d’accès, de rectification et d’opposition

Procédure de mise en œuvre de ces droits. Le droit d’accès, le droit de rectification, ainsi que le droit  à la limitation s'exercent auprès du centre de crise et de soutien du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères.

Limitation de ces droits :

  • le droit d'opposition ne s'applique pas au traitement durant la période d'ouverture de la cellule de crise ;
  • le droit à l’information ne s’applique pas lorsque la transmission ou la consultation des données relatives à l'application a pour objectif de garantir la protection de la personne concernée et des droits d’autrui ;
  • le droit à l'information ne s'applique pas lorsque les données ne sont pas directement collectées auprès de la personne concernée, et dans la mesure où la fourniture des informations mentionnées à l'article 14 du même règlement nécessite des efforts disproportionnés.

Entrée en vigueur. Le présent décret entrera en vigueur le 4 août 2022.

newsid:482443

Licenciement

[Brèves] Le comportement d’un salarié résultant d'une position managériale partagée et encouragée par la hiérarchie ne constitue pas une faute grave

Réf. : Cass. soc., 12 juillet 2022, n° 20-22.857, F-D N° Lexbase : A55958BT

Lecture: 2 min

N2420BZN

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Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/86647518-edition-du-11082022#article-482420
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par Charlotte Moronval

Le 05 Août 2022

Le harcèlement moral exercé par un salarié envers une autre salariée ne constitue pas une cause réelle et sérieuse de licenciement lorsqu’il est établi que cette situation était connue et encouragée par l’ensemble de la hiérarchie.

Faits et procédure. Un salarié est licencié pour faute grave en raison de ses méthodes managériales caractérisant un harcèlement moral à l’égard d’une autre salariée.

Les juges du fond (CA Paris, Pôle 6, 6e ch., 14 octobre 2020, n° 18/01638 N° Lexbase : A58533X3) considèrent le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse car :

  • les méthodes managériales du salarié envers l’autre salariée n'étaient ni inconnues ni réprouvées par sa hiérarchie avec laquelle il avait régulièrement partagé ses constats relatifs à l'insuffisance de sa collègue ;
  • le salarié a conduit en lien étroit avec sa hiérarchie un processus de changement et de réorganisation au sein de la direction dont il avait la charge ;
  • le salarié a agi en concertation avec son supérieur hiérarchique et le directeur des ressources humaines ;
  • l'employeur avait pris fait et cause pour le salarié en défendant ses décisions en réponse aux doléances de l'époux de la salariée qui se plaignait de harcèlement.

La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation valide le raisonnement des juges du fond.

Dès lors que le harcèlement moral émanait d’une position managériale partagée et encouragée par l’ensemble des supérieurs hiérarchiques, la Cour de cassation a estimé que ce comportement ne pouvait être entièrement imputé au salarié licencié et ne constituait pas une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Elle ajoute que ce comportement ne constituait pas une faute grave rendant impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La cause réelle et sérieuse de licenciement, Le motif lié à une situation d'harcèlement sexuel ou moral, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E9240ESZ.

 

newsid:482420

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