Le Quotidien du 2 juin 2022

Le Quotidien

Aide juridictionnelle

[Brèves] Retrait total de l'AJ prononcé d'office en cas de requête abusive ou dilatoire : quid des requêtes similaires ?

Réf. : CE, 2°-7° ch. réunies, 5 mai 2022, n° 455860, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A37137WG

Lecture: 3 min

N1474BZM

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par Marie Le Guerroué

Le 03 Juin 2022

► Si les circonstances que deux requêtes ont été présentées par un avocat postérieurement au rejet du recours gracieux et qu'elles comportaient une argumentation similaire et des conclusions à fin d'injonction identiques peuvent établir le fait que l'avocat représentant le requérant réalisait à son égard une seule et même mission au titre de l'aide juridictionnelle,  elles ne sont pas de nature à conférer à la seconde requête un caractère abusif au sens des articles 50 et 51 de la loi du 10 juillet 1991, de nature à entraîner le retrait de l'aide juridictionnelle accordée au requérant.

Faits et procédure. Le préfet de la Haute-Vienne avait refusé de faire droit à la demande d’un ressortissant algérien, de renouvellement de son certificat de résidence mention « retraité ». L'intéressé avait présenté un recours gracieux contre cette décision, rejeté par une décision du 15 décembre 2016. Il avait présenté devant le tribunal administratif de Limoges, deux requêtes distinctes tendant respectivement à l'annulation de la décision du 12 août 2016 et de celle du 15 décembre 2016. Il avait relevé appel du jugement du 29 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Limoges, après les avoir jointes, avait rejeté ses demandes et prononcé le retrait de l'aide juridictionnelle qui lui avait été accordée dans l'instance contestant le rejet de son recours gracieux. Par un arrêt du 22 octobre 2020, la cour administrative d'appel de Bordeaux a fait droit aux conclusions d'appel du ressortissant à l'exception de celles tendant à l'annulation du retrait de l'aide juridictionnelle. L'intéressé se pourvoit en cassation contre cet arrêt en tant qu'il a rejeté ces dernières conclusions.

Réponse du CE/cadre juridique. Le Conseil d’État rappelle le cadre juridique du litige et précise qu’il résulte des articles 50 et 51 de la loi n° 91-647, du 10 juillet 1991 que le juge doit, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, prononcer le retrait total de l'aide juridictionnelle accordée pour une requête lorsqu'il juge celle-ci abusive ou dilatoire. Lorsqu'il est prononcé d'office, un tel retrait traduit la mise en œuvre d'un pouvoir propre du juge qui, lorsqu'il en fait usage, ne soulève pas d'office un moyen d'ordre public et n'est en conséquence pas de tenu de procéder à la communication prescrite par l'article R. 611-7 du Code de justice administrative N° Lexbase : L2813LPU.

Réponse du CE/pourvoi. La Haute juridiction administrative rappelle que l’intéressé a présenté devant le tribunal administratif de Limoges deux requêtes distinctes, tendant respectivement à l'annulation de la décision du 12 août 2016 de refus de renouvellement de son titre de séjour et à l'annulation de la décision du 15 décembre 2016 portant rejet de son recours gracieux. Il a bénéficié de l'aide juridictionnelle pour chacune de ces deux requêtes. La cour administrative d'appel a relevé que les deux requêtes ont été présentées par un avocat postérieurement au rejet du recours gracieux et qu'elles comportaient une argumentation similaire et des conclusions à fin d'injonction identiques. Elle estime que si de telles circonstances peuvent établir le fait que l'avocat réalisait à son égard une seule et même mission au titre de l'aide juridictionnelle, elles ne sont pas de nature à conférer à la seconde requête un caractère abusif au sens des articles 50 et 51 de la loi du 10 juillet 1991 N° Lexbase : L8607BBE. Par suite, en jugeant que cette requête revêtait un caractère abusif et en prononçant, pour ce motif, le retrait de l'aide juridictionnelle, la cour administrative d'appel de Bordeaux a commis une erreur de droit et inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis. L’intéressé est donc fondé à demander l'annulation de l'article 4 de l'arrêt attaqué.
 

newsid:481474

Avocats/Déontologie

[Brèves] De l’impartialité du Bâtonnier

Réf. : CA Montpellier, 18 mai 2022, n° 21/06969 N° Lexbase : A42417XD

Lecture: 2 min

N1723BZT

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par Marie Le Guerroué

Le 02 Juin 2022

►Le seul fait qu’un Bâtonnier ait eu connaissance d'un litige à travers sa tentative de conciliation, ne suffit pas à remettre en cause son impartialité et ne porte pas atteinte à l'exigence requise par l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'Homme.

Faits et procédure. Un avocat avait saisi le Bâtonnier de l'Ordre des avocats de Montpellier afin d’obtenir la nullité de la rupture du contrat de travail passé avec une SCP. Le Bâtonnier avait notamment dit que ce dernier n'avait pas connu de rupture de contrat de collaboration vexatoire et discriminatoire et débouté, en conséquence, de ses demandes indemnitaires en lien avec cette rupture. La cour avait été saisie d'un recours de la part de l’avocat à l'encontre de cette décision. L’avocat avait également déposé des conclusions aux fins de transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité.

Réponse de la cour. L’avocat soutient que le cumul des fonctions du Bâtonnier à savoir un pouvoir de prévention, de conciliation puis un pouvoir juridictionnel, constitue une violation du droit à un procès équitable tel que défini par l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'Homme N° Lexbase : L7558AIR. Il est, pour la cour, au contraire constant que dès lors que la loi prévoit de confier à une même juridiction plusieurs phases d'une procédure, les magistrats de cette juridiction ont compétence pour statuer sur ses différentes phases, sans que les parties puissent demander leur récusation au motif qu'ils ont déjà connu du litige dans une phase précédente. Il n'est pas justifié en l'espèce que le Bâtonnier, à qui les articles 7 alinéa 7 et 21 alinéas 2 et 3 de la loi du 31 décembre 1971 N° Lexbase : L6343AGZ ont donné compétence réglementaire pour exercer une mission de conciliation et une mission du jugement, a dans la phase préalable émis un avis mettant en cause son impartialité. Le seul fait que le Bâtonnier ait eu connaissance du litige à travers sa tentative de conciliation, ne suffit pas à remettre en cause son impartialité et ne porte pas atteinte à l'exigence requise par l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'Homme. Enfin, la cour ajoute qu'il n'est pas contesté que la Cour européenne des droits de l'Homme considère que le respect des dispositions de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme résulte soit de ce que les juridictions remplissent elles-mêmes les exigences du présent article, soit subissent le contrôle ultérieur d'un organe judiciaire de pleine juridiction présentant lui les garanties de cet article. Il en résulte que la question prioritaire de constitutionnalité est dépourvue de caractère sérieux. La cour déboute, par conséquent, l’avocat de sa demande.

newsid:481723

Congés

[Brèves] Non-renvoi de la QPC relative à l’adhésion obligatoire à une caisse de congés payés

Réf. : Cass. QPC, 25 mai 2022, n° 22-40.006, FS-B N° Lexbase : A25497Y3

Lecture: 3 min

N1692BZP

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par Lisa Poinsot

Le 01 Juin 2022

N’est pas renvoyée au Conseil constitutionnel, la question relative à la constitutionnalité de l’article L. 3141-32 du Code du travail, portant sur le pouvoir réglementaire de décider de soumettre un secteur d'activité professionnelle à un régime dérogatoire d'affiliation obligatoire à une caisse de congés payés mais aussi celui de définir l'organisation et le fonctionnement de la caisse de congés payés ainsi que de fixer la nature et l'étendue des obligations de l'employeur, dès lors qu’elle n’est pas nouvelle et ne revêt pas de caractère sérieux face au droit de propriété, à la liberté d'entreprendre et à la liberté d'association.

Faits et procédure. Le tribunal de commerce (T. com. Nantes, 7 mars 2022, n° 18/005797) est saisi d’une demande de paiement de cotisations impayées par l’association Caisse de congés payés (CGO) à l’encontre d’une société. Il décide de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation :

« En édictant les dispositions de l'article L. 3141-32 du Code du travail N° Lexbase : L6692K9Q – lesquelles abandonnent au pouvoir réglementaire non seulement le pouvoir de décider de soumettre un secteur d'activité professionnelle à un régime dérogatoire d'affiliation obligatoire à une caisse de congés payés mais aussi celui de définir l'organisation et le fonctionnement de la caisse de congés payés ainsi que de fixer la nature et l'étendue des obligations de l'employeur, le tout sans aucunement prévoir un encadrement légal approprié et des garanties légales suffisantes susceptibles de protéger effectivement le droit de propriété, la liberté d'entreprendre et la liberté d'association –, le législateur a-t-il, d'une part, méconnu sa propre compétence en affectant des droits et libertés que la Constitution garantit – dont en particulier la liberté d'association, la liberté d'entreprendre ainsi que le droit de propriété – et d'autre part, porté une atteinte injustifiée et disproportionnée à ces mêmes droits et libertés, tels qu'ils résultent notamment du Préambule de la Constitution de 1946 N° Lexbase : L6821BH4 ainsi que des articles 2 N° Lexbase : L1366A9H, 4 N° Lexbase : L1368A9K et 17 N° Lexbase : L1364A9E de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ? ».

La solution. Après examen de cette question, la Chambre sociale de la Cour de cassation ne la renvoie pas au Conseil constitutionnel. Elle expose, dans un premier temps, que la question posée ne porte pas sur l’interprétation d’une disposition constitutionnelle et n’est pas nouvelle. Dans un second temps, elle affirme que la question ne revêt pas de caractère sérieux du fait que :

  • la disposition contestée n'encourt pas le grief d'incompétence négative du législateur, qui a assorti l'intervention des caisses de congés payés de garanties légales suffisantes ;
  • l'atteinte portée au droit de propriété, à la liberté d'entreprendre et à la liberté d'association est justifiée par la mission d'intérêt général confiée aux caisses de congés payés, dont l'accomplissement est de nature à garantir la protection du droit au repos et de la santé des salariés concernés résultant du paragraphe 11 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, et n'est pas manifestement disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les congés annuels payés, Les employeurs relevant des caisses de congés payés, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E7297YM9.

 

newsid:481692

Douanes

[Brèves] Le Parlement européen suspend d’un an des droits d’importation de l'UE sur toutes les exportations ukrainiennes

Réf. : Parlement européen, communiqué de presse, 19 mai 2022

Lecture: 1 min

N1645BZX

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par Marie-Claire Sgarra

Le 01 Juin 2022

Le Parlement a approuvé la suspension d’un an des droits d’importation de l'UE sur toutes les exportations ukrainiennes afin de soutenir l'économie du pays.

Cette libéralisation temporaire des échanges commerciaux, adoptée par 515 voix pour, 32 contre et 11 abstentions, intervient dans le contexte de la guerre russe qui entrave la capacité de l'Ukraine à poursuivre ses activités commerciales.

Les dispositions adoptées en plénière via la procédure d’urgence incluent une suspension totale des droits d’importation sur les marchandises industrielles, du système des prix d'entrée aux fruits et légumes et des droits antidumping, ainsi que des mesures de sauvegarde sur les importations d’acier pour une période d'un an.

Rappel.

Les relations entre l'UE et l'Ukraine sont régies par un accord d'association. La zone de libre-échange approfondi et complet qui y figure garantit un accès préférentiel au marché européen pour les sociétés ukrainiennes depuis 2016.

L'UE est le principal partenaire commercial de l'Ukraine, réalisant plus de 40 % de ses échanges commerciaux de marchandises en 2021. En retour, l'Ukraine est le 15e plus grand partenaire commercial de l'UE, représentant 1,2 % de l'ensemble du commerce de l’Union.

 

 

newsid:481645

Élections professionnelles

[Brèves] Annulation des élections en cas d’atteinte au principe d'égalité face à l'exercice du droit de vote

Réf. : Cass. soc., 1er juin 2022, n° 20-22.860, F-B N° Lexbase : A58487YA

Lecture: 2 min

N1724BZU

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par Charlotte Moronval

Le 02 Juin 2022

L’atteinte au principe d'égalité face à l'exercice du droit de vote, qui est un principe général du droit électoral, constitue à elle seule une cause d'annulation du scrutin, quelle que soit son incidence sur le résultat.

Faits et procédure. Une société prévoit l'élection par vote électronique des membres de la délégation du personnel au comité social et économique. Les deux tours du scrutin se déroulent du 19 au 26 février et du 11 au 18 mars 2020. Par requêtes des 5 et 11 mars 2020, invoquant diverses irrégularités dans le recours au vote électronique et son déroulement, deux fédérations syndicales saisissent le tribunal judiciaire en annulation de ces élections.

Le tribunal judiciaire relève que la société, alertée sur les difficultés de certains salariés, parmi les distributeurs ne disposant d'aucun bureau ni poste de travail dans les locaux de la société, à se connecter sur la plate-forme de vote durant la période d'ouverture du vote, avait interdit, pour des raisons de confidentialité, toute utilisation des ordinateurs de la société par les distributeurs ou d'un ordinateur personnel par ces derniers au sein de l'entreprise, sans avoir l'assurance que l'ensemble de ses salariés pourraient avoir accès à un matériel permettant d'exercer leur droit de vote et sans justifier de ce qui l'empêchait de mettre en place des procédés permettant de pallier le défaut d'accès de ses distributeurs au matériel de vote, comme, par exemple, la mise en place dans ses établissements des terminaux dédiés au vote électronique avec un protocole garantissant la sécurité et la confidentialité des votes.

Le tribunal en a déduit que la société n'avait pas pris les précautions appropriées pour que ne soit écartée du scrutin aucune personne ne disposant pas du matériel nécessaire ou résidant dans une zone non desservie par internet, ce dont il résultait une atteinte au principe général d'égalité face à l'exercice du droit de vote, constituant à elle seule une cause d'annulation du scrutin, quelle que soit son incidence sur le résultat.

La société forme un pourvoi en cassation.

La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi, le tribunal ayant légalement justifié sa décision.

Pour aller plus loin :

  • La Cour de cassation rappelle également que le recours au vote électronique ne permet pas de déroger aux principes généraux du droit électoral (v. déjà Cass. soc., 3 octobre 2018, n° 17-29.022, F-P+B N° Lexbase : A5411YE7) ;
  • v. également ÉTUDE : Le déroulement des élections des membres de la délégation du personnel au comité social et économique, Le recours au vote électronique, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E2092GAQ.

 

newsid:481724

Libertés publiques

[Brèves] Suspension de l’exécution de l’article du nouveau règlement des piscines de Grenoble autorisant l’usage de maillots de bains de type « burkini »

Réf. : TA Grenoble, 25 mai 2022, n° 2203163 N° Lexbase : A42047YD

Lecture: 3 min

N1708BZB

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par Yann Le Foll

Le 01 Juin 2022

►Est suspendue l’exécution de l’article 10 du nouveau règlement des piscines de Grenoble autorisant l’usage de maillots de bains de type burkini pour atteinte au principe de neutralité du service public.

Faits. Par délibération du 16 mai 2022, le conseil municipal de Grenoble a adopté une délibération approuvant un nouveau règlement intérieur des piscines municipales. L’article 10 de ce règlement dispose : « Pour des raisons d’hygiène et de sécurité, l’accès aux bassins se fait exclusivement dans une tenue de bain correspondant aux obligations suivantes : […] Les tenues de bain doivent être faites d’un tissu spécifiquement conçu pour la baignade, ajustées près du corps, et ne doivent pas avoir été portées avant l’accès à la piscine. Les tenues non prévues pour un strict usage de la baignade (short, bermuda, sous-vêtements, etc.), les tenues non près du corps plus longues que la mi-cuisse (robe ou tunique longue, large ou évasée) et les maillots de bain-short sont interdits […] ».

Principe TA. Si les usagers du service public peuvent exprimer librement, dans les limites fixées par la loi, leur appartenance religieuse, les dispositions de l’article 1er de la Constitution N° Lexbase : L1277A98 interdisent à quiconque de se prévaloir de ses croyances pour s'affranchir des règles communes organisant et assurant le bon fonctionnement des services publics. Par ailleurs, l’autorité administrative doit respecter le principe de neutralité et édicter des règles concourant au maintien de l’ordre public sous ses composantes de la sécurité, de la salubrité et de la tranquillité publiques. Il ne saurait être dérogé aux règles édictées dans l’objectif d’assurer l’ordre public.

Grief. Le préfet de l’Isère demande au juge des référés de suspendre l’exécution de cet article sur le fondement du cinquième alinéa de l’article L. 2131-6 du Code général des collectivités territoriales N° Lexbase : L7480L78, issues de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021, confortant le respect des principes de la République N° Lexbase : L6128L74, qui le permet « lorsque l'acte attaqué est de nature à compromettre l'exercice d'une liberté publique ou individuelle, ou à porter gravement atteinte aux principes de laïcité et de neutralité des services publics ».

Ordonnance. En permettant aux usagers du service public communal des piscines de Grenoble de porter des tenues « non près du corps », sous la seule condition qu’elles soient moins longues que la mi-cuisse – comme c’est le cas notamment du vêtement de baignade appelé burkini – c’est-à-dire en dérogeant à la règle générale d’obligation de porter des tenues ajustées près du corps pour permettre à certains usagers de s’affranchir de cette règle dans un but religieux, ainsi qu’il est d’ailleurs reconnu dans les écritures de la commune, les auteurs de la délibération litigieuse ont gravement porté atteinte aux principe de neutralité du service public.

Est donc suspendue l’exécution de l’article 10 du règlement des piscines en tant qu’il autorise certaines tenues non près du corps.

newsid:481708

Procédure civile

[Brèves] La décision rectificative n’a aucun effet sur le délai d’appel de la décision rectifiée !

Réf. : Cass. civ. 2, 19 mai 2022, n° 21-10.580, F-B N° Lexbase : A41097XH

Lecture: 3 min

N1650BZ7

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par Alexandra Martinez-Ohayon

Le 01 Juin 2022

La deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans son arrêt rendu le 19 mai 2022 énonce qu’en présence d’une décision rectifiée passée en force de chose jugée, la décision rectificative ne peut être attaquée que par la voie du recours en cassation ; la décision rectificative n'a pas d'effet sur le délai d'appel de la décision rectifiée, qui court depuis sa notification ; par ailleurs, une requête en rectification d'erreur matérielle ne constitue pas une cause d'interruption ou de suspension du délai d’appel.

Faits et procédure. Dans cette affaire, la CPAM a notifié la prise en charge de sa maladie à un salarié au titre de la législation professionnelle. À la suite du rejet du recours amiable, l’employeur a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une contestation de cette décision. Dans les motifs du jugement, il a été considéré que la CPAM n'avait pas pleinement respecté la procédure d'instruction de sorte que la décision de prise en charge n'était pas opposable à l’employeur. Cependant dans le dispositif il était indiqué que l’employeur était débouté de son recours et que la décision de prise en charge lui était opposable. Une requête en rectification d'erreur matérielle a été déposée. Un second jugement a été rendu rectifiant la décision en indiquant en lieu et place de ce qui était indiqué dans son dispositif que le recours de l’employeur était bien fondé et que la décision de prise en charge lui était inopposable. La CPAM a interjeté appel à l’encontre des deux jugements.

Le pourvoi. La CPAM fait grief à l’arrêt rendu (CA Paris, 6, 12, 20 novembre 2020, n° 17/13050 N° Lexbase : A3483377) d’avoir déclaré irrecevable comme tardif son appel. L’intéressée relève que la rectification d’une erreur matérielle intervenant après l’expiration du délai pour interjeter appel, ouvre un nouveau délai d’appel à l’encontre du jugement rectifié, dans le cas, où cette rectification fait naître un intérêt pour l’appelant de former appel et ne peut donner lieu à contestation utile en cassation. Elle énonce qu’elle ne disposait pas d’un intérêt à former appel avant la rectification, dès lors qu’elle ne succombait nullement, et que la rectification ne pouvait donner lieu à contestation utile en cassation. En l’espèce, lorsque la CPAM a interjeté appel, le délai d’appel était expiré et la décision rectifiée était passée en force de chose jugée à la date à laquelle le recours contre la décision rectificative a été introduit.

Solution. La Cour de cassation rappelle que :

  • en application de l’article 462 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1217INE, les erreurs et omissions matérielles affectant un jugement peuvent toujours être réparées par la juridiction l’ayant rendu ou celle à laquelle il est déféré, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande ;
  • la décision rectificative a, quant aux voies de recours, le même caractère et est soumise aux mêmes règles que la décision interprétée 

Elle déclare le moyen non fondé et rejette le pourvoi.

On peut relever que la Haute juridiction a déjà précisé dans le passé que la décision rectifiant une erreur matérielle n’est susceptible de pourvoi que dans le cas où la décision rectifiée l'est également. (Cass. civ. 2, 7 juin 2018, n° 17-18.722, F-B+B N° Lexbase : A7311XQT).

Pour aller plus loin : v. X-P. Vuitton, ÉTUDE : Le pourvoi en cassation, Décisions susceptibles de pourvoi, in Procédure civile (dir. E. Vergès), Lexbase N° Lexbase : E85517AX.

 

newsid:481650

Sociétés

[Brèves] Nomination de l’expert chargé d’évaluer les droits sociaux : important revirement de jurisprudence

Réf. : Cass. com., 25 mai 2022, n° 20-14.352, FS-B+R N° Lexbase : A14857YN

Lecture: 7 min

N1693BZQ

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par Vincent Téchené

Le 02 Juin 2022

► La décision par laquelle le président du tribunal, saisi en application de l'article 1843-4 du Code civil, refuse, pour quelque cause que ce soit et, notamment, en raison de l'autorité de chose jugée attachée à une précédente décision de refus, de désigner un expert est susceptible d'appel ;

En ce cas, au terme d'un réexamen complet des faits et circonstances de la cause, la cour d'appel peut, si elle décide d'infirmer l'ordonnance qui lui est déférée, désigner elle-même un expert, et ce, par une décision sans recours possible, sauf excès de pouvoir.

Faits et procédure. À la suite de la perte de leur qualité d’associés d’une société, deux époux ont assigné cette dernière devant le président d'un tribunal de grande instance sur le fondement de l'article 1843-4 du Code civil N° Lexbase : L1737LRR aux fins de désignation d'un expert pour fixer la valeur de leurs droits sociaux. Les associés ont été déclarés irrecevables en leur demande. Par la suite, le mari est décédé. Ses ayants droit ont alors, à nouveau, assigné la société aux mêmes fins et devant la même juridiction.

Ces derniers ayant été également déclarés irrecevables, il ont formé un pourvoi en cassation, la société contestant la recevabilité de celui-ci.

Décision. Sur la recevabilité du pourvoi, la Cour de cassation opère un important revirement de jurisprudence particulièrement argumenté.

Elle rappelle que selon l'article 1843-4 du Code civil, la décision par laquelle le président du tribunal procède à la désignation d'un expert chargé de déterminer la valeur de droits sociaux est sans recours possible.

Elle juge habituellement qu'il n'est dérogé à cette règle qu'en cas d'excès de pouvoir (Cass. com., 15 mai 2012, n° 11-12.999, F-P+B N° Lexbase : A6991ILI ; Cass. civ. 2, 7 juin 2018, n° 17-18.722, F-P+B N° Lexbase : A7311XQT) et elle déclare irrecevables les recours dans lesquels une simple erreur de droit est invoquée (Cass. com., 15 mai 2012, n° 11-17.866,  F-P+B N° Lexbase : A6914ILN ; Cass. com., 7 juillet 2020, n° 18-18.190, F-D N° Lexbase : A11853RC).

Jusqu'à présent, elle précise qu’elle appliquait cette solution même lorsque le recours était formé contre une décision rejetant la demande de désignation d'un expert (Cass. com., 11 mars 2008, n° 07-13.189, FS-P+B N° Lexbase : A4067D7R).

Toutefois, la Cour de cassation relève que cette unité de régime n'est pas exigée par la lettre du texte et ce n'est que lorsque le président désigne un expert que l'objectif de célérité poursuivi par le législateur commande l'absence de recours. Dès lors, elle estime qu’afin d'éviter de placer les parties face à une situation de blocage dans le cas où le président refuse de désigner un expert pour quelque cause que ce soit, il apparaît nécessaire de leur reconnaître le droit de relever appel de cette décision.

Par ailleurs, la Haute juridiction poursuit en rappelant que la jurisprudence considérait, en outre, qu'en cas d'annulation d'une décision de première instance refusant de désigner un expert, la cour d'appel ne pouvait désigner elle-même cet expert (Cass. com., 10 octobre 2018, n° 16-25.076, F-D N° Lexbase : A3318YGY).

Or, elle considère que cette limitation apportée au pouvoir de la cour d'appel, cohérente avec un appel-nullité, n'a plus lieu d'être dès lors qu'un appel, voie de réformation, est ouvert aux parties en cas de refus de désignation. Dès lors, elle retient désormais qu’en ce cas, au terme d'un réexamen complet des faits et circonstances de la cause, la cour d'appel pourra, si elle décide d'infirmer l'ordonnance qui lui est déférée, désigner elle-même un expert, et ce, par une décision sans recours possible, sauf excès de pouvoir. La reconnaissance d'un tel pouvoir de désignation au juge d'appel contribuera à l'efficacité et à la célérité du dispositif.

En l’espèce, la Cour relève que l'ordonnance attaquée ayant déclaré irrecevable comme se heurtant à l'autorité de chose jugée la demande de désignation d'un expert, il s'ensuit que cette décision, qui n'a pas désigné un expert, est susceptible de recours et qu'elle aurait dû être déférée à la cour d'appel.

Toutefois, pour la Haute juridiction, l'application à cette instance de la règle issue du présent revirement de jurisprudence, qui devrait conduire à déclarer irrecevable le pourvoi au motif qu'il n'est pas dirigé contre une décision rendue en dernier ressort, aboutirait à priver les demandeurs, qui ne pouvaient ni connaître ni prévoir, à la date où ils ont exercé leur pourvoi en cassation, la possibilité qui leur est désormais reconnue de former un appel d'une décision de refus de désignation d'un expert, d'un procès équitable au sens de l'article 6 § 1 de la CESDH N° Lexbase : L7558AIR.

La Cour en conclut qu’il convient de déclarer le recours recevable.

Elle poursuit en rejetant le pourvoi. En effet, le tribunal a constaté qu'une ordonnance en la forme des référés avait été rendue le 5 mai 2009, déclarant l’associé décédé et son épouse irrecevables en leur demande de désignation d'un expert chargé, en application de l'article 1843-4 du Code civil. Or, la demande dont il était saisi était présentée par les mêmes parties agissant dans la même qualité, avait le même objet et se fondait sur la même cause, de sorte qu’il en a déduit qu'elle se heurtait à l'autorité de chose jugée relativement aux contestations que cette ordonnance avait tranchées, et l'a déclarée irrecevable en application.

Or, selon la Cour, le rachat des parts n'étant pas la conséquence du décès de l’associé mais de son exclusion, et la situation de blocage invoquée préexistant à la première saisine du président du tribunal, celui-ci n'avait pas à procéder à la recherche inopérante invoquée par les demandeurs au pourvoi.

En outre, la Haute juridiction ajoute que l'absence de mention d'une possibilité de recours dans la notification de la première ordonnance déclarant les associés irrecevables ne pouvant avoir de conséquences que sur le point de départ du délai d'exercice d'une voie de recours, et n'étant pas susceptible de faire échec à l'autorité de chose jugée attachée, en l'absence de recours, à cette décision, le président du tribunal n'avait pas à répondre aux conclusions soulevant cette difficulté.

Observations. Il s’agit là d’un revirement de première importance dans un contentieux particulièrement fourni. Cette solution, en ouvrant la voie de l’appel et la possibilité pour les juges d’appel de désigner, le cas échéant, l’expert risque d’engendrer un nouveau contentieux.

On relèvera qu'un autre arrêt rendu le même jour par la Chambre commerciale est également venu préciser les pouvoirs juridictionnels du juge saisi sur le fondement de l'article 1843-4 du Code civil (Cass. com., 25 mai 2022, n° 20-18.307, F-B N° Lexbase : A14847YM, K. de Amorim, Lexbase Affaires, juin 2022, n° 719 N° Lexbase : N1696BZT).

Pour aller plus loin : v. le commentaire de cet arrêt par le Bâtonnier Philippe Duprat, Avocat au barreau de Bordeaux, in Lexbase Affaires n° 721 à paraître le 16 juin 2022. 

 

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Successions - Libéralités

[Brèves] QPC dénonçant les incapacités à être gratifié : après les auxiliaires de vie, les auxiliaires médicaux ?

Réf. : Cass. QPC, 24 mai 2022, n° 22-40.005, FS-D N° Lexbase : A32147YP

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N1711BZE

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 01 Juin 2022

► Par décision rendue le 24 mai 2022, la première chambre civile de la Cour de cassation a décidé de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée à l’encontre des dispositions de l'article 909, alinéa 1er du Code civil, qui interdisent à une personne de gratifier les auxiliaires médicaux qui lui ont procuré des soins au cours de sa dernière maladie.

La QPC. La question était formulée ainsi : les dispositions de l'article 909, alinéa 1er du Code civil N° Lexbase : L8526HWP, qui interdisent à une personne de gratifier les auxiliaires médicaux qui lui ont procuré des soins au cours de sa dernière maladie, sont-elles contraires aux articles 2 N° Lexbase : L1366A9H, 4 N° Lexbase : L1368A9K, 17 N° Lexbase : L1364A9E de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen en ce qu'elles portent atteinte au droit de disposer librement de ses biens en dehors de tout constat d'inaptitude du disposant ?

Caractère sérieux. Selon la Haute juridiction, cette question présente un caractère sérieux en ce que, ayant pour conséquence de réduire le droit de disposer librement de ses biens de la personne soignée pour la maladie dont elle meurt hors tout constat d'inaptitude de celle-ci, l'article 909, alinéa 1er, du Code civil serait susceptible de porter une atteinte disproportionnée au droit de propriété protégé par l'article 2 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789.

Contexte. Pour rappel, le Conseil constitutionnel a déjà censuré, en 2021, certaines des dispositions de l’article L. 116-4 du Code de l’action sociale et des familles, en ce qu’elles avaient pour objet d’interdire aux personnes âgées de gratifier ceux qui leur apportent, contre rémunération, des services à la personne à domicile ; suivant les arguments de la requérante, les Sages ont estimé que l'interdiction était formulée en des termes trop généraux et portait ainsi au droit de propriété une atteinte disproportionnée à l'objectif poursuivi (Cons. const., décision n° 2020-888 QPC, du 12 mars 2021 N° Lexbase : A80714K7 ; cf. J. Casey, obs. n° 4 in Sommaires d’actualité de droit des successions & libéralités 2021-1 (Janvier – Juillet), Lexbase Droit privé, n° 875, 2 septembre 2021 N° Lexbase : N8596BYZ).

Dans son analyse critique de cette décision de censure, Jérôme Casey relevait que « les motifs du Conseil pourraient aussi justifier la disparition des incapacités de recevoir de l’article 909 du Code civil N° Lexbase : L8526HWP (médecin de la dernière maladie, MJPM, ministres du culte…). Pourtant, ces dispositions demeurent. La discordance avec la disparition de l’interdiction du CASF est criante. Non que nous voulions faire disparaître aussi le contenu de l’article 909 du Code civil, bien au contraire. Mais le défaut de cohérence est évident. »

On peut donc imaginer que le Conseil constitutionnel utilisera les mêmes motifs que dans sa décision du 12 mars 2021, et procèdera également à censure des dispositions contestées.  

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