La lettre juridique n°893 du 3 février 2022

La lettre juridique - Édition n°893

Éditorial

[A la une] Le nouvel article 803-8 du Code de procédure pénale, s’en saisir et agir !

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N0166BZ8

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par Matthieu Quinquis, avocat au Barreau de Paris

Le 03 Février 2022

C’était en 1875, la IIIe République avait cinq ans, le cinéma n’existait pas et la France comptait quelque trente-huit petits millions d’habitants. Au mois de juin, à l’initiative du sénateur René Bérenger, le Parlement votait une loi encadrant le régime des prisons départementales et prescrivait que les « inculpés, prévenus et accusés [y soient] à l’avenir individuellement séparés pendant le jour et la nuit ».

C’était en 1945, l’Europe découvrait l’horreur des camps et nombre de prisonniers politiques recouvraient la liberté. Lui-même ancien résistant incarcéré, le directeur de l’administration pénitentiaire Paul Amor engageait son programme « d’humanisation » des détentions, au sein duquel figurait la règle de l’encellulement individuel.

C’était en 2000, Véronique Vasseur publiait son récit « Médecin-chef à la prison de la Santé » et le parlement s’élevait contre l’indignité de la condition carcérale. À la demande d’Élisabeth Guigou, Garde des Sceaux, députés et sénateurs adoptaient la loi sur la présomption d’innocence et exigeaient, sous trois ans, le respect du droit de chaque prévenu à disposer d’une cellule seule.

Près d’un siècle et demi s’est écoulé depuis ce premier vœu, mais aucun texte n’a été assez puissant pour l’exaucer. En dépit des nombreuses déclarations d’intention, la mise en œuvre de l’encellulement individuel s’est heurtée à la rigueur des politiques pénales, insatiables machines à incarcérer.

Dans ce contexte, l’inflation carcérale est commodément présentée comme une fatalité, une réponse mécanique à la hausse prétendue de la criminalité. Il n’en est rien. Les explications à l’envolée des taux d’occupation des établissements pénitentiaires se trouvent ailleurs, et notamment dans le refus d’envisager d’autres façons de sanctionner et punir.

Aveuglement répressif et obstination punitive

Cet aveuglement répressif explique seul que le pays compte, au 1er décembre 2021, 69 992 personnes détenues pour 60 775 places opérationnelles et que les maisons d’arrêt présentent un taux d’occupation moyen de 136 %. Quoi qu’on en dise, l’obstination punitive reste la raison principale pour laquelle 1 600 personnes couchent chaque nuit sur un matelas au sol.

De longue date, l’ensemble des observateurs s’accordent sur la nécessité de limiter le recours à l’enferment et d’adopter une politique de décroissance carcérale. Ce n’est pas moins que ce qu’a exigé la Cour européenne des droits de l’Homme en condamnant la France dans trente-deux affaires individuelles (CEDH, 30 janvier 2020, Req. 9671/15, JMB c/ France N° Lexbase : A83763C9, et 31 autres).

Après avoir constaté l’état de délabrement des établissements concernés, les juges européens ont critiqué le caractère structurel de la surpopulation carcérale. Sa décision était une sommation à « la résorption définitive » du phénomène ; elle engageait l’État à intervenir sans délai pour assurer à chacune des personnes détenues le respect de ses droits fondamentaux.

Malgré l’unanimité et la sévérité du constat, le gouvernement n’a manifesté aucun empressement à redéfinir et réorienter sa politique pénale. De nouveau, il a fallu user du contentieux et de la contrainte pour qu’il concède à appliquer, dans les marges, les mesures minimales recommandées par la juridiction européenne.

Une nouvelle voie de recours à éprouver

C’est ainsi, à la suite de deux censures du Conseil constitutionnel, que le Parlement a été amené à offrir de nouveaux moyens juridiques pour contester l’indignité des conditions de détention. C’est en ce sens que la loi n° 2021-403, du 8 avril 2021 N° Lexbase : L9830L3H, a modifié les articles 144-1 N° Lexbase : L0611L4E et 707 N° Lexbase : L0664L4D du Code de procédure pénale, avant de créer un article 803-8 N° Lexbase : L1636MAT spécialement consacré à cette nouvelle voie de recours.

De toute évidence, l’organisation de ce recours est aussi chaotique que son exercice. Les parlementaires auraient voulu décourager quiconque de s’y employer, ils ne s’y seraient pas pris autrement. C’est dans un article de plus de 6000 caractères (soit bien plus que l’éditorial que vous lisez ici) qu’a été dessinée la procédure par laquelle les personnes détenues peuvent désormais défendre leurs droits élémentaires.

Une telle disposition ne suffit toutefois pas à décourager celles et ceux qui croient en la nécessité de rompre avec l’emballement carcéral. L’Observatoire international des prisons (OIP), le Syndicat des avocats de France (SAF), l’Association des avocats pour la défense des droits des détenus (A3D) et le Syndicat de la magistrature ont ainsi, en collaboration avec le Conseil national des Barreaux (CNB), travaillé à l’édition d’un kit pratique pour faciliter l’exercice de ce recours.

Accessible sur les sites de chacune de ces organisations, il comprend un modèle-type de requête, ainsi que la documentation nécessaire à son argumentation. Face au manque de volonté de l’État pour mettre un terme aux conditions indignes de détention, il appartient aux avocats d’éprouver l’effectivité de ce recours. Saisissons-nous-en et agissons pour le respect des droits des personnes détenues !

newsid:480166

Droit pénal spécial

[Brèves] Interdiction des thérapies de conversion : la loi interdisant les pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle ou l’identité de genre est publiée

Réf. : Loi n° 2022-92, du 31 janvier 2022, interdisant les pratiques visant à modifier l'orientation sexuelle ou l'identité de genre d'une personne N° Lexbase : L9143MAU

Lecture: 3 min

N0271BZ3

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par Adélaïde Léon

Le 23 Février 2022

► La loi n° 2022-92 du 31 janvier 2022, interdisant les pratiques visant à modifier l'orientation sexuelle ou l'identité de genre d'une personne, crée une infraction relative aux pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle ou l’identité de genre et modifie le Code de la santé publique afin d’interdire ces pratiques au sein du système de santé.

Nouvelle infraction. Dès 2015, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme appelait à l’interdiction des thérapies de conversion, pratiques prétendant modifier l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’une personne. Mars 2018, le Parlement européen adoptait une résolution priant instamment tous les États membres d’adopter des mesures en ce sens.

C’est aujourd’hui chose faite en France avec la création d’un article 225-4-13 du Code pénal interdisant « les comportements ou les propos répétés visant à modifier ou à réprimer l'orientation sexuelle ou l'identité de genre, vraie ou supposée, d'une personne et ayant pour effet une altération de sa santé physique ou mentale ».

Peines. Ces faits sont punis de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende.

Cette peine est augmentée (trois ans et 45 000 euros) lorsque les faits sont commis au préjudice d’un mineur, par un ascendant ou toute personne une autorité de droit ou de fait sur la victime, sur une personne dont la particulière vulnérabilité ou dépendance est connue de leur auteur, par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteurs ou de complices, par l’utilisation d’un service de communication au public en ligne.

Par ailleurs lorsque l’infraction est commise par une personne titulaire de l’autorité parentale sur le mineur, la juridiction de jugement se prononce sur le retrait total ou partiel de l’autorité parentale.

On notera que l’infraction prévue au nouvel article est en revanche exclue du champ d’application de l’article 132-77 du Code pénal N° Lexbase : L2045AMP lequel aggrave les peines encourues lorsqu’un crime ou un délit est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature ayant un motif discriminatoire.

Action civile des associations. La loi modifie également l’article 2-6 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L7913LC3 pour ajouter aux intérêts collectifs susceptibles d’être protégés par des associations habilitées à exercer une action civile « l’orientation sexuelle » et « l’identité de genre ».

Application au système de santé. La loi du 31 janvier 2022 ajoute également au Code de la santé publique un nouvel article L. 4163-1 réprimant de deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende « le fait de donner des consultations ou de prescrire des traitements en prétendant pouvoir modifier ou réprimer l’orientation sexuelle ou l’identité de genre, vraie ou supposée, d’une personne ».

Il est précisé qu’une interdiction d’exercer la profession de médecin peut également être prononcée pour une durée maximale de dix ans.

Enfin, comme pour l’infraction crée au sein du Code pénal, les peines sont augmentées (trois ans et 45 000 euros) lorsque les faits sont commis au préjudice d’un mineur ou d’une personne dont la particulière vulnérabilité ou dépendance est apparente ou connue de leur auteur.

newsid:480271

Avocats

[A la une] Dossier spécial « Loi du 31 décembre 1971, 50 ans après »

Réf. : Loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques N° Lexbase : L6343AGZ

Lecture: 1 min

N0147BZH

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par Marie Le Guerroué, Rédactrice en chef

Le 03 Février 2022

Lexbase Avocats vous propose ce mois-ci un dossier spécial consacré à l'anniversaire de la loi du 31 décembre 1971, réalisé sous la direction de Rodolphe Bigot, Maître de conférences en droit privé, UFR de Droit, Le Mans Université.


1. 30 ans de combats passés, mais surtout à venir par Jérôme Gavaudan, Avocat au Barreau de Marseille, Président du Conseil National des Barreaux N° Lexbase : N0326BZ4

2. Histoire critique et origines de la suppression des avoués près les tribunaux de grande instance par Pierre-Louis Boyer, Doyen de la Faculté de Droit, des sciences économiques et de gestion du Mans, Maître de conférences HDR (ThémisUM EA4333 – IODE UMR CNRS 6262) N° Lexbase : N0186BZW

3. L’accès à la profession : 50 ans après par Gaëlle Deharo, Full Professor - ESCE International Business School OMNES Education Research Center CRJP – IRJS Paris 1 – Panthéon Sorbonne N° Lexbase : N0205BZM

4. La structuration des cabinets : 50 ans après par Bastien Brignon, Maître de conférences HDR à Aix-Marseille Université, Membre du centre de droit économique (UR 4224), Avocat à la cour d'appel d'Aix-en-Provence N° Lexbase : N0148BZI

5. Le statut d’avocat collaborateur : 50 ans après par Bernard Gauriau, Professeur à l’université d’Angers, Ancien avocat au Barreau de Paris N° Lexbase : N0245BZ4

6. Le secret professionnel de l’avocat : 50 ans après par Daniel Landry, Avocat honoraire - Ancien Bâtonnier - Ancien membre du CNB N° Lexbase : N0210BZS

7. L’avocat, auxiliaire de justice : 50 ans après par Rodolphe Bigot, Maître de conférences en droit privé, UFR de Droit, Le Mans Université Thémis-UM et CEPRISCA et Yves Avril, Docteur en droit, Avocat honoraire, Ancien Bâtonnier N° Lexbase : N0221BZ9

8. Le Conseil de l’Ordre : 50 ans après par Xavier Chiloux, Avocat à la Cour, Ancien Membre du Conseil National des Barreaux, Ancien Membre du Conseil de l’Ordre N° Lexbase : N0219BZ7

newsid:480147

Avocats/Procédure pénale

[Brèves] Permis de communiquer : le décret attendu est publié !

Réf. : Décret n° 2022-95, du 31 janvier 2022, relatif au permis de communiquer délivré à l'avocat d'une personne détenue N° Lexbase : L9149MA4

Lecture: 3 min

N0269BZY

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par Marie Le Guerroué

Le 02 Février 2022

► Le décret n° 2022-95, publié au Journal officiel du 1er février 2022, vient préciser les modalités de remise aux avocats des permis de communiquer ; il permet, tout particulièrement, à l'avocat désigné ou commis d'office de demander que le permis soit établi à son nom et à celui de ses associés et collaborateurs qu'il désignera.

Genèse. La Cour de cassation avait rendu, le 15 décembre 2021, un arrêt qui avait suscité l’indignation de la profession d’avocat (Cass. crim., 15 décembre 2021, n° 21-85.670, F-B N° Lexbase : A03587HQ). La Haute juridiction avait, en effet, précisé, au visa de l’article 115 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L0931DY7, que le juge d'instruction n'était tenu de délivrer un permis de communiquer qu'aux avocats nommément désignés par les parties ce qui n’incluait pas nécessairement ses collaborateurs ou ses associés. Cette jurisprudence empêchait un client d’être représenté par un collaborateur non désigné et impactait les fonctionnements des cabinets d’avocat. Conscient de ces difficultés, le garde des Sceaux avait indiqué lors de l’assemblée générale de la Conférence des Bâtonniers le 21 janvier dernier qu’un décret viendrait remédier à ces difficultés et préciser l’interprétation à donner à l’article 115 du Code de procédure pénale. Promesse tenue. Le décret a été publié au Journal officiel du 1er février 2022.

Notice. Le nouveau texte vient donc préciser les modalités de remise par le juge d'instruction des permis de communiquer délivrés aux avocats des personnes mises en examen et placées en détention provisoire, afin de permettre aux associés et collaborateurs de l'avocat d'en bénéficier.
Il prévoit que l'avocat désigné ou commis d'office pourra demander que le permis soit établi à son nom et à celui de ses associés et collaborateurs qu'il désignera. Ces dispositions, qui consacrent des pratiques existant dans de nombreux cabinets d'instruction, mais qui ne sont cependant pas généralisées, permettent ainsi d'assurer l'effectivité des droits de la défense lorsqu'un avocat doit se faire substituer par un associé ou un collaborateur pour assister son client détenu. Le nouvel article D. 32-1-2 précise que l'avocat désigné ou commis d'office pourra, en cours de procédure, demander un permis de communiquer actualisé en modifiant la liste des associés et collaborateurs concernés. Le permis de communiquer initial ou actualisé sera mis à la disposition de l'avocat désigné ou commis d'office ou lui sera adressé par tout moyen dans les meilleurs délais. L’article précise encore que lorsque l'avocat sera convoqué pour un interrogatoire ou un débat contradictoire, le permis sera mis à sa disposition ou lui sera envoyé au plus tard le premier jour ouvrable suivant la réception de la demande par le greffe du juge d'instruction.

Entrée en vigueur. Le décret entre en vigueur le 1er février 2022.

Pour aller plus loin : v. N. Catelan, ÉTUDE : Le recours à l'instruction préparatoire, Les droits du mis en examen, in Procédure pénale, (dir. J.-B. Perrier), Lexbase N° Lexbase : E65783CM.

 

newsid:480269

Données personnelles

[Brèves] Cookies publicitaires : Google définitivement condamné à payer 100 millions d’euros

Réf. : CE, 9° et 10° ch.-r., 28 janvier 2022, n° 449209, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A92167KK

Lecture: 3 min

N0266BZU

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par Marie-Lou Hardouin-Ayrinhac

Le 02 Février 2022

► Le Conseil d’État confirme les deux amendes d’un montant total de 100 millions d’euros infligées par la CNIL à l’encontre de Google en décembre 2020 ; en effet, il retient que Google n’a pas respecté ses obligations en matière de recueil du consentement de ses utilisateurs pour le dépôt de cookies ; il juge ainsi que les amendes infligées par la CNIL ne sont pas disproportionnées pour Google, compte tenu notamment des bénéfices importants produits par les cookies publicitaires.

Contexte. Dans sa délibération en date du 7 décembre 2020 (CNIL, 7 décembre 2020, délibération n° SAN-2020-012 N° Lexbase : X4445CML ; M.-L. Hardouin-Ayrinhac, Lexbase Affaires, décembre 2020, n° 659 N° Lexbase : N5705BYX), la formation restreinte de la CNIL a sanctionné la société Google LLC d’une amende de 60 millions d’euros et la société Google Ireland Limited d’une amende de 40 millions d’euros, notamment pour avoir déposé des cookies publicitaires sur les ordinateurs d’utilisateurs du moteur de recherche « google.fr » sans consentement préalable ni information satisfaisante.

Elle a également adopté une injonction sous astreinte afin que les sociétés procèdent à une information des personnes conforme à l’article 82 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés N° Lexbase : L8794AGS dans un délai de 3 mois à compter de la notification de la décision. Par une délibération en date du 30 avril 2021 (CNIL, 30 avril 2021, délibération n° SAN-2021-004 N° Lexbase : X8751CM3 ; M.-L. Hardouin-Ayrinhac, Lexbase Affaires, mai 2021, n° 675 N° Lexbase : N7408BYZ), la formation restreinte de la CNIL clôture cette injonction.

Google a saisi le Conseil d’État pour faire annuler la sanction rendue par la CNIL le 7 décembre 2020.

Décision. Le Conseil d’État confirme la compétence de la CNIL pour intervenir, ainsi que les constats qu’elle a faits :

  • absence d’information claire et complète des utilisateurs ;
  • défaut de recueil préalable de leur consentement ; et
  • mécanisme défaillant d’opposition aux cookies publicitaires.

En effet, le contrôle effectué par la CNIL en mars 2020 a établi que 7 cookies étaient automatiquement installés sur les ordinateurs des utilisateurs dès leur arrivée sur le site, dont 4 qui n’avaient qu’une finalité publicitaire. Durant la procédure de contrôle effectuée par la CNIL, Google a modifié ses pratiques en août 2020, mais a continué à ne pas informer directement et explicitement l’utilisateur sur les finalités de ses cookies et les moyens de s’y opposer.

Le Conseil d’État observe que le montant des amendes infligées par la CNIL n’excède pas la limite fixée par la loi « Informatique et Libertés ». Et qu’au vu des bénéfices importants produits par les données collectées au moyen de cookies publicitaires, mais aussi de la position de Google en France (+ de 90 % de part de marché soit 47 millions d’utilisateurs environ), ces amendes ne sont pas disproportionnées.

Pour ces différentes raisons, le Conseil d’État rejette la demande de Google d’annuler la sanction qui lui a été infligée par la CNIL.

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Droit des biens

[Brèves] Indemnité due à l’indivisaire pour le règlement des échéances d'emprunt : quid d’un crédit-relais (non amortissable) ?

Réf. : Cass. civ. 1, 26 janvier 2022, n° 20-17.898, F-B N° Lexbase : A53157K3

Lecture: 3 min

N0316BZQ

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 03 Février 2022

► Le règlement d'échéances d'emprunts ayant permis l'acquisition d'un immeuble indivis, lorsqu'il est effectué par un indivisaire au moyen de ses deniers personnels au cours de l'indivision, constitue une dépense nécessaire à la conservation de ce bien et donne lieu à indemnité sur le fondement de l'article 815-13, alinéa 1er, du Code civil, peu important que le prêt soit un prêt amortissable ou un crédit relais.

Il est acquis de longue date que les règlements d’échéances d'emprunts immobiliers constituent des dépenses de conservation donnant lieu à indemnité, sur le fondement de l’article 815-13, alinéa 1er du Code civil N° Lexbase : L1747IEG (Cass. civ. 1, 7 juin 2006, n° 04-11.524, F-P+B N° Lexbase : A8406DPZ).  

La Cour suprême ne s’était encore jamais prononcée, à notre connaissance, sur la question de l’incidence de la nature du prêt. C’est chose faite avec l’arrêt rendu le 26 janvier 2022, et la Cour de cassation retient que cette question est sans aucune importance : la nature du prêt, crédit-relais et non prêt amortissable, ne remet donc aucunement en question la qualification de « dépense nécessaire à la conservation » donnant lieu à indemnité sur le fondement de l'article 815-13, alinéa 1er, du Code civil.

En l’espèce, les demandeurs au pourvoi tentaient de faire valoir que le remboursement d'un prêt relais souscrit pour l'acquisition d'un bien indivis constituait une dépense d'acquisition qui ne pouvait pas être assimilée à une dépense de conservation, dès lors que « sa nature et son objet s'y opposent » ; selon eux, la cour d'appel de Paris (CA Paris, Pôle 3, 1ère ch., 12 février 2020, n° 18/18900 N° Lexbase : A60843E3), avait alors violé l'article 815-13 du Code civil en retenant pourtant que s'agissant du remboursement du prêt-relais, « la discussion sur la nature de la dépense faite (dépense d'acquisition ou dépense de conservation) est inutile, dès lors que leur régime est unique, les deniers personnels utilisés par un co-indivisaire en vue de financer une dépense d'acquisition étant assimilés à une dépense de conservation au sens de l'article 815-13 du Code civil ».

L’argument est écarté par la Cour suprême qui, après avoir rappelé la règle précitée tout en la complétant de la précision selon laquelle il importe peu que le prêt soit un prêt amortissable ou un crédit relai, approuve la cour d’appel qui, ayant relevé que l’intéressé avait remboursé le crédit relais le 30 novembre 2006, en avait déduit à bon droit que sa succession (l’intéressé étant décédé en cours d’instance) était titulaire d'une créance envers l'indivision à hauteur de la somme ainsi payée.

À toutes fins utiles, on signalera, à propos de l’application de ces dispositions de l’article 815-13 au cas de règlement des échéances d’emprunts contractés pour l’acquisition du bien indivis, un arrêt tout récent ayant retenu que lorsque ces échéances ont été réglées par un assureur au titre de la garantie assurance-invalidité, l’indivisaire invalide ne peut prétendre à une indemnité au titre des sommes avancées nécessaires à la conversation d'un bien indivis au sens de l'article 815-13 du Code civil (Cass. civ. 1, 20 octobre 2021, n° 20-11.921, FS-B N° Lexbase : A5245497 ; et les obs. de J. Casey, Acquisition immobilière indivise solidaire : précisions en droit de l’assurance-vie, Lexbase Droit privé, n° 887, 9 décembre 2021 N° Lexbase : N9690BYK).

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Électoral

[Focus] L’élection présidentielle et les médias

Lecture: 27 min

N0306BZD

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par Jean-Pierre Camby, Professeur de droit public, Université Versailles Saint-Quentin Paris Saclay

Le 17 Février 2022

Mots clefs : élection •propagande • audiovisuel • ARCOM

Le principe d'égalité de traitement des candidats à l'élection présidentielle dans leur faculté d'accès aux médias est la garantie d'un vote éclairé des citoyens une fois la campagne télévisuelle achevée. C'est pourquoi la nouvelle Autorité publique française de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) remplaçant le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) au 1er janvier 2022 édicte des règles très claires chargées d'assurer le respect du pluralisme en la matière.


 

Les règles relatives aux campagnes électorales sont des passagers embarqués de l’élection présidentielle. Lors de la réforme de l’élection du Président de la République au suffrage universel direct, procédure qui ne connaît historiquement qu’un seul précédent, le 10 décembre 1848, seuls le principe, les délais (notamment la règle selon laquelle quinze jours séparent les deux tours) et les modalités de présentation (les candidatures sont subordonnées, par la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962, relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel N° Lexbase : L5341AGW, à la présentation par des élus, initialement 100, chiffre porté à 500 par une loi organique du 18 juin 1976, inchangé depuis lors sur ce point, avec un seuil minimal de représentation de trente départements et un plafonnement à 10 % de signataires d’un même département) retiennent l’attention, avec naturellement le vif débat lié à la procédure constitutionnelle utilisée. Le référendum du 28 octobre 1962, convoqué sur la base de l’article 11 de la Constitution N° Lexbase : L1268A9T, qui approuve la réforme ne porte pas principalement sur les conditions de la campagne.  On ne trouve guère dans la loi originelle de 1962 que le principe, constant depuis lors, selon lequel : « Tous les candidats bénéficient, de la part de l'État, des mêmes facilités pour la campagne en vue de l'élection présidentielle » (IV de l’article 3 de la loi du 6 novembre 1962). Le décret d’application du 14 mars 1964 (décret n° 64-231) fixe quelques règles complémentaires, qui se présentent comme la mise en œuvre de cette règle d’égalisation des « facilités » offertes aux candidats. Ces textes prévoient, de façon originale pour cette élection, l’égalité de présentation pendant la campagne électorale et notamment l’attribution de deux heures d’antenne télévisées et de deux heures d’émission radiodiffusée, mais ces durées peuvent être réduites en fonction du nombre de candidats.  En outre, le principe est acté selon lequel les frais de fabrication, d’impression et surtout d’acheminement de la propagande officielle, à savoir les affiches, bulletins et circulaires adressés aux électeurs, sont pris en charge directement par l’État, alors que le droit commun subordonne un tel remboursement au fait d’avoir obtenu 5 % de suffrages exprimés (C. élec., art. L. 167 N° Lexbase : L2539AAB, L. 216 N° Lexbase : L8133I7D et L. 242 N° Lexbase : L2599AAI) [1].

Ces règles n’ont jamais été démenties par la suite, même lorsqu’un décret du 8 mars 2001 remplace celui de 1964. Mais les dispositions essentielles de la régulation audiovisuelle montent à bord du processus d’organisation au fur et à mesure que la communication prend une place importante dans les campagnes, qu’on peut situer à 1974 [2] . À partir de 1995, l’application de règles financières imposées aux campagnes s’y ajoute.

Les dispositions liées à l’élection présidentielle se sont donc beaucoup affinées sous l’effet combiné de la diversification des moyens de communication, de leur mise en concurrence, de l’expansion des réseaux sociaux et de l’affirmation jurisprudentielle de la liberté de communication, amplifiée s’agissant des campagnes électorales. « La liberté d'expression revêt une importance particulière dans le débat politique et dans les campagnes électorales. Dès lors, pour condamnables que soient les abus dans la liberté d'expression visés par ces dispositions, en prévoyant l'inéligibilité obligatoire de leur auteur, le législateur a porté à la liberté d'expression une atteinte disproportionnée », relève le Conseil constitutionnel en 2017 [3]. « L'intérêt général attaché à l'information éclairée des citoyens en période électorale et à la sincérité du scrutin » souligne-t-il l’année suivante [4]. « Les dispositions contestées prévoient que, par dérogation, la personne responsable de l'organisation d'une réunion politique peut en subordonner l'accès à la présentation soit du résultat négatif d'un examen de dépistage virologique, soit d'un justificatif de statut vaccinal, soit d'un certificat de rétablissement à la suite d'une contamination » soulève-t-il encore en 2021 [5], au moment où s’ouvre la campagne présidentielle, pour censurer cette disposition … La conclusion est simple : « Il appartient au législateur de concilier le principe constitutionnel de sincérité du scrutin avec la liberté constitutionnelle d'expression et de communication » [6], donc de ne sanctionner que des abus mais surtout de garantir l’égalité des compétiteurs, dans le contexte particulier que constitue l’élection présidentielle, la plus mobilisatrice pour les électeurs, la plus amplificatrice de débats sociétaux, la plus structurante pour la vie politique lorsque les choix sont confirmés par les élections de députés rendant, dans cette hypothèse, improbable un renversement de majorité.

L’exigence égalitaire posée par les textes est restée inchangée depuis 1964, malgré tous les changements qui ont affecté l’audiovisuel français, marqué par l’éclatement de l’ORTF avec la loi du 7 aout 1974, la régulation et le pluralisme avec la loi du 29 juillet 1982, la liberté de communication érigée en principe par la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, relative à la liberté de communication N° Lexbase : L8240AGB, dont les principes sont toujours applicables, la privatisation de TF1, etc. La physionomie juridique et économique du secteur a donc profondément changé depuis 1962, conduisant à l’édiction de règles nouvelles : le maintien de l’égalité de principe est conforté plus que combattu par le principe constitutionnel du respect du pluralisme des courants d’opinion, introduit par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 (loi constitutionnelle no 2008-724 de modernisation des institutions de la Ve République N° Lexbase : L7298IAK) à l’article 4 de la Constitution N° Lexbase : L1300A9Z, dans lequel le Conseil constitutionnel voit un changement de circonstance justifiant la recevabilité d’une question prioritaire de constitutionnalité au regard d’une loi déjà déclarée conforme à la Constitution, portant sur l’égalité entre les présentateurs des candidats [7].

Le principe d’égalité conduit donc les campagnes électorales pour garantir la liberté d’expression des candidats. Équité ou égalité d’accès aux médias, organisation du débat, confrontations revêtent une importance extrême pour ouvrir le champ pluraliste de la campagne électorale. Loin de s’opposer, ces principes se combinent.

Les candidats sont donc soumis à un contrôle général, qui garantit l’expression pluraliste de la liberté de parole et, au respect de l’équité et de l’égalité, exigence croissante au fur et à mesure que l’élection approche. La ligne de partage est la publication de la liste des candidats du premier tour.

I. Liberté de parole, équité des prétendants

L’élément le plus apparent est celui de la superposition : superposition des règles, superposition des compétences, superposition des calendriers.

1. Le droit régissant une élection présidentielle est ainsi marqué par le fait que le Code électoral et notamment ses dispositions sur la propagande, n’est pas applicable de plein droit à l’élection présidentielle, spécifique. La révision du 6 novembre 1962 mêle une partie constitutionnelle, une partie organique, une partie qui relève de la loi ordinaire et renvoie à un décret, ce renvoi ayant été jugé conforme à la Constitution [8]. La loi du 6 novembre 1962 est donc régulièrement adaptée, et intègre au coup par coup les dispositions pertinentes ayant modifié le code électoral depuis la précédente élection présidentielle. L’exemple le plus significatif pour la période récente est le renvoi dans le II de cette loi aux dispositions de la loi n° 2018-1202 du 22 décembre 2018, relative à la lutte contre la manipulation de l'information N° Lexbase : L5465LNQ (C. élect., art. L. 163-1 N° Lexbase : L5734LNP, L. 163-2 N° Lexbase : L0460LT9) et des sanctions pénales qui s’y attachent (C. élect., art. L. 112 N° Lexbase : L5773LN7), rendues applicables par la loi organique n° 2018-1201 de la même date N° Lexbase : L5464LNP, en clair de la lutte contre les fake news, «  imputations inexactes ou trompeuses d’un fait de nature à altérer la sincérité du scrutin » qui peuvent être retirées par le juge – le tribunal judiciaire de Paris. Il est probable que l’élection en cours donne lieu à application de cette loi. Mais le Conseil constitutionnel exigeant que la tromperie comme l’altération de la sincérité du scrutin qui en résulte soient manifestes [9] protège cette sincérité comme la liberté d’expression de tout acteur : électeur, candidat, soutien, parti, tout au long du débat électoral. 

Les règles applicables sont donc partiellement transposées des règles du code électoral, partiellement dérogatoires dans le sens d’une plus stricte égalité entre compétiteurs. Cette adaptation est indispensable compte tenu de la spécificité de l’élection présidentielle : seule élection dans laquelle il n’y a pas, juridiquement parlant, de déclaration de candidature mais seulement un consentement de candidats, dont la candidature est validée par un système de présentation d’élus, sur une base uniquement individuelle et pour vérifier une assise territoriale dans au moins trente départements. Elle n’organise pas non plus la participation de partis ou groupements politiques agréés [10] autre que celle du droit commun (C. élect., art. L. 52-8 N° Lexbase : L7612LT4) : ce sont les seules personnes morales à pouvoir participer financièrement à une campagne.

2. Si l’on excepte le juge judiciaire, dont la présence ne peut être que ponctuelle pour contrôler le contenu d’une information, et justifiée par l’urgence, mais qui ne saurait se substituer au juge de l’élection [11], la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, dont le contrôle est postérieur à l’élection et ne s’attache qu’aux candidats et à ces partis et groupements politiques, et la haute autorité pour la transparence de la vie publique qui publie les déclarations d’intérêt et de patrimoine, trois institutions doivent retenir l’attention. Elles sont chargées spécifiquement de garantir et de superviser la communication des prétendants, puis celle des candidats, avant et pendant toute la campagne électorale, mentionnée au titre II du décret du 8 mars 2001, qui ne saurait être réduite à la seule période des émissions officielles. Il s’agit d’abord du Conseil constitutionnel qui supervise l’ensemble des opérations, reçoit et vérifie la conformité des présentations aux exigences de la loi du 6 novembre 1962, juge le contentieux, proclame les résultats. À ce titre, tout texte d’organisation lui est transmis pour avis, et tout contentieux portant sur la campagne est tranché par lui.

En outre, l’article 13 du décret crée une commission nationale de contrôle de la campagne[12], alors qu’aux termes de l’article 58 de la Constitution, le Conseil constitutionnel « veille à la régularité » des opérations, formule suffisamment large pour inclure les actes de portée générale incluant donc la campagne elle-même.

Cette commission comprend cinq membres : le vice-président du Conseil d'État, président, le premier président de la Cour de cassation, le premier président de la Cour des comptes et deux membres en activité ou honoraires du Conseil d'État, de la Cour de cassation ou de la Cour des comptes désignés par les trois membres de droit.

Elle statue sur des irrégularités de propagande et remplit les fonctions dévolues, pour les autres élections, aux commissions de propagande pour la validation des bulletins, affiches officielles – la loi du 2 décembre 2019 (C. elect., art. L. 51 N° Lexbase : L7608LTX), renforçant l’efficacité de la prohibition de l’affichage illégal - et circulaires sous le contrôle contentieux du Conseil d’État [13] [14]. Cette communication officielle échappe aux médias et met en relation directe les candidats et l’électeur. On ne peut que regretter que celui-ci n’ait pas la possibilité de choisir une transmission électronique : si l’on comprend l’argument consistant à ne pas en faire une voie exclusive pour être assuré que ceux des électeurs qui préfèrent un envoi postal, ou n’ont que cette possibilité de réception, on voit mal ce qui empêche le libre choix. Les dernières consultations ont en outre mis en évidence les mauvais résultats du système actuel [15]. À l’heure du répertoire électoral unique, on doit s’étonner de tels dysfonctionnements. Il est vrai que le ministère de l’Intérieur, soutenu par la CADA refuse un accès aux listes actualisées [16], ce qui posera par exemple un problème en cas de primaire ouverte.

Enfin, en matière de campagne audiovisuelle, la répartition des compétences renvoie largement à  l’ instance de régulation, autorité indépendante, d’abord avec la haute autorité pour la communication audiovisuelle par la loi du 29 juillet 1982, remplacée par la CNCL, remplacée par le CSA , devenu ARCOM avec la loi n° 2021-1382 du 25 octobre 2021, relative à la régulation et à la protection de l'accès aux œuvres culturelles à l'ère numérique N° Lexbase : L6758L8S. C’est à cet organisme qu’il incombe, d’une part, d’édicter des règles générales applicables aux campagnes électorales, et, d’autre part, de régir les émissions de la campagne officielle.

3. L’organisation de l’élection présidentielle superpose ainsi trois calendriers qui renvoient les uns aux autres mais ne coïncident pas. Le calendrier financier débute un an avant le mois où se déroule l’élection, période ramenée par l’effet de la crise sanitaire à neuf mois, pour l’élection présidentielle des 10 et 24 avril 2022 par la loi du 28 mars 2021. Le calendrier des candidatures ne connaît pas de début certain -les postulants se font connaître quand ils le décident-  mais des dates butoir, conditionnées par la parution du décret de convocation des électeurs, soit  le 26 janvier 2022, et par la date du premier tour, directement issue des délais constitutionnels : la convocation ouvre la période d’envoi, et de réception – jusqu’au sixième vendredi précédant le premier tour à 18 heures [17] - des présentations et donc la qualité effective de  candidat, qui de se déduit de la liste publiée. Enfin, le calendrier médiatique, et au sein de celui-ci les règles applicables au secteur audiovisuel découlent des précédents. Celui de la possibilité de faire retirer des fake news a débuté le 1er janvier, comme la réglementation spécifique adressée à l’audiovisuel. 

II. Pluralisme des expressions, égalité des candidats

Le CSA hier, l’ARCOM aujourd’hui, sont appelés à réguler les temps d’expression - temps de parole et temps d’antenne - en tenant compte du fait qu’il n’y a pas juridiquement de candidats avant la publication de la liste par le Conseil constitutionnel, mais des compétiteurs dans le cadre d’un ou de plusieurs systèmes de sélection et d’autre part à organiser une campagne officielle. C’est dans ce cadre que l’on peut distinguer, en reprenant la distinction faite par les recommandations successives du CSA et désormais de l’ARCOM avec la recommandation n° 2021-03 du 6 octobre 2021 N° Lexbase : Z353181Q, trois périodes successives correspondant à une conquête de candidature ouverte, une conquête de la notoriété électorale limitée aux candidats, et une période de campagne officielle strictement réglementée.

En 2012, par exemple [18], ces trois périodes déterminaient l’application des règles suivantes : équité d’accès et des temps d'antenne avant la publication de la liste, et dans une seconde période, jusqu'à l'ouverture de la campagne officielle, égalité des temps de parole et équité des temps d'antenne, puis stricte égalité pendant celle-ci. L’application de ces règles s’avérait complexe et reléguait souvent pendant la deuxième période les candidats les moins exposés à des heures tardives et des émissions moins suivies et réduisait drastiquement les temps de chacun [19]. Si le streaming résout en partie ces difficultés, il ne les règle pas totalement. La recommandation du 7 septembre 2016 a modifié la règle pour cette deuxième période, déterminant une première période d’équité allant du 1er février 2017 jusqu'à la veille du jour de la publication de la liste des candidats, et une seconde période « d’équité dans des conditions d’accès à l’antenne comparables », allant toujours du jour de la publication de la liste des candidats jusqu'à la veille de l'ouverture de la campagne électorale. Deux difficultés ont surgi ; l'une à la comptabilisation d’une exposition de M Fillon qui lui était défavorable, l’autre à celle d’Emmanuel Macron « pour laquelle il n’existait pas de références antérieures en termes de représentativité » [20]. Il est vrai que la représentativité dans cette première phase fait référence à de multiples critères établis par la loi organique n° 2016-506 du 25 avril 2016, de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle N° Lexbase : L8263K78 : résultats électoraux précédents – inexistants – sondages, contribution au débat électoral – croissant au fur et à mesure de la campagne.

Le système retenu pour 2022 est identique à celui de 2017 et conduit donc à trois règles : équité des temps de parole comme des temps d’antenne dans la première période, équité renforcée par l’exigence de « conditions de programme comparables » pendant la deuxième période, égalité avec ces mêmes conditions durant la campagne électorale.

1. La conquête des candidatures, ou l’équité générale jusqu’au 7 mars 2022 

Si pour la recommandation de 2021, cette période a débuté au 1er janvier, cet encadrement juridique et temporel ne peut appréhender toutes les situations.  Cette phase est en effet celle pendant laquelle se manifestent des personnes « ayant l’idée…., « n’excluant pas …. » , laissant entendre ou supposer – on citera dans ce sens la publication de « qu’est-ce qu’un  chef » suivie par celle,  en octobre 2020 du troisième ouvrage du général Pierre de Villiers «  l’équilibre est un courage … : réparer la France », et plus encore l’exemple célèbre de la déclaration de Georges Pompidou le 17 janvier 1969 à Rome à un journaliste de l’AFP, ou encore la déclaration assortie d’une clause de renonciation de Michel Rocard le 19 octobre 1980, renonciation déclenchée par la déclaration de candidature de François Mitterrand. Tout est affaire de stratégie :  cette période n’est contrainte que par la phase limite de réception des 500 signatures au Conseil constitutionnel et de la publication de la liste du premier tour.

Le système de l’élection présidentielle ne fait pas d’abord appel à des structures partisanes, à des programmes, à des sondages. Il débute avec des personnes manifestant la volonté de se déclarer. Cette déclaration peut, certes, s’appuyer sur des organisations politiques ancrées dans le paysage politique, encore que l’élection de 2017 pour la première fois sous la Ve République, relègue les partis de gouvernement reposant sur des éléments classiques [21] : une structure locale, une représentation parlementaire, un socle idéologique, par le choix d’un candidat novateur qui ne s’appuie pas sur un « courant politique historiquement identifié » [22].

L’effet structurant de l’élection présidentielle sur les partis [23] s’efface alors plus encore derrière l’image personnelle des candidats, les courants d’opinion, les programmes et les idées qu’ils représentent. La conquête des 500 présentateurs relève donc d’une stratégie : les partis politiques – il y en a 499 à jour de leurs obligations en 2020 en France [24] - choisissent librement les modalités de désignation de leur candidat, ou de leur soutien par ralliement, ou du refus de soutien. Les primaires ne sont pas comme aux États-Unis, un passage obligé. La gauche socialiste les a privilégié pour les trois précédentes consultations, la droite pour la présente et la précédente, le parti Europe - écologie également à ces deux reprises. Les médias peuvent choisir dans le respect des règles générales d’exposition d’en rendre compte comme ils le souhaitent [25]. Les primaires ne sont pas considérées comme des dépenses en vue de l’élection [26] même si , « sous réserve de l’appréciation souveraine du juge de l’élection » , le Conseil d’État [27] a rappelé qu’ « il a été jugé, dans le cadre d’une élection primaire organisée par un parti politique en vue de l’investiture de son ou ses candidats, que les dépenses d’un candidat ayant eu pour but de promouvoir et de favoriser auprès des adhérents de son parti  politique sa candidature à l’investiture de ce parti ne sont pas engagées ou effectuées en vue de l’obtention des suffrages des électeurs ; par conséquent, elles n’ont pas à figurer au compte de campagne que ce candidat doit tenir en application de l’article L. 52-12 du Code électoral N° Lexbase : L7578LTT » (CE, 23 juillet 2009, n° 322425 N° Lexbase : A1419EKR) en distinguant cependant pour l’élection municipale entre primaires du parti et primaires ouvertes [28]. Mais une telle distinction ne s’appuie que sur « le sens de la position prise par le Conseil constitutionnel sur le guide établi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques en vue de l’élection présidentielle de 2012 ». Il n’est pas certain qu’elle établisse une ligne de partage entre congrès, primaires à inscription partisane ou primaire « populaire », d’assise plus large (467 000 personnes) même si cette procédure ne sert pas nécessairement à désigner un candidat. La communication se fait alors cependant devant le pays sur une base égalitaire entre les candidats, et confère une assise supplémentaire à ceux qui triomphent.   

Mais nombre de postulants, à ce stade, ne seront pas désignés par une primaire fermée soit qu’ils ne se rattachent pas à une formation politique préexistante – Emmanuel Macron en 2017, peut être Éric Zemmour en 2022 – soit que la formation qui les soutient ait choisi un mode de désignation interne – Jean Saint-Josse puis Frédéric Nihous pour « Chasse nature pêche et tradition » - soit encore que le parti en cause renvoie de facto ce choix à l’électeur – Jacques Chirac et Édouard Balladur en 1995. Pour les candidats qui ne disposent pas déjà d’une aura nationale, les « petits » candidats [29],  la collecte des parrainages – désormais retournés individuellement au Conseil constitutionnel par chaque signataire – est vitale, et dans ce cadre le traitement médiatique qui leur permet de se faire connaître auprès de 42 000 présentateurs potentiels l’est également. Nombre de candidats se plaignent souvent du faible écho médiatique qu’ils recueillent. Mais il ne suffit pas d’une revendication pour obtenir un droit. Les requêtes fondées sur une insuffisante couverture médiatique ne trouvent aucun écho contentieux.

Cette période préalable a cependant fait l’objet d’une réglementation progressive.  Le calendrier ainsi modifié en 2006 et confirmé depuis permet de mieux régler les problèmes liés à la durée de la « précampagne » qui n'a pas de statut juridique, mais qui permet aux candidats potentiels, y compris des candidatures fantaisistes, de réclamer, par exemple, un accès aux journaux télévisés ou aux émissions politiques – qu'ils n'obtiendraient pas en temps ordinaire – ou de se plaindre d'un traitement discriminatoire dans les conditions d'appel à collecte des présentations. Le Conseil rejette systématiquement de telles demandes d’une manière générale [30], et précisément pour l’élection présidentielle lorsqu’un requérant « reproche aux principaux moyens de communication audiovisuelle d'avoir insuffisamment fait état de sa candidature et d'avoir ainsi rendu plus difficile le recueil des présentations » [31].

Dans cette phase préliminaire mais déjà incluse dans la campagne, le CSA, puis la recommandation de l’ARCOM du 6 octobre 2021 ont défini les notions de candidat déclaré (« toute personne qui a manifesté publiquement sa volonté de concourir à l’élection, même en l’assortissant de conditions ») et de « candidat présumé » (toute personne qui recueille des soutiens publics et significatifs en faveur de sa candidature). Cette recommandation précise en outre : « Si le Président de la République est candidat déclaré ou présumé, toutes ses interventions relevant du débat politique sont, sauf circonstances exceptionnelles … prises en compte. Les interventions qui relèvent de l’exercice de sa charge ne sont pas prises en compte. Il en va de même des interventions qui relèvent de l’exercice de la présidence du Conseil de l’Union européenne, à l’exception de celles qui sont susceptibles, en fonction du contenu et du contexte, de relever du débat politique. ». Cette ligne de partage est en vigueur depuis 2009 [32]. Cette phase se termine avec la fin de l’enregistrement des formulaires de présentation et la parution de la liste des candidats dont le nombre a oscillé jusqu'ici entre 6 et 16.

Cette phase est la plus ouverte, puisque l’exigence d’équité demeure souple : il n’y a pas de certitude de candidatures.  

2. La conquête de l’électorat du 8 au 28 mars 2022

Cette seconde phase d’équité est mieux encadrée, par la référence supplémentaire aux « conditions d’accès à l’antenne comparables », dès lors que les candidats sont désormais officiellement connus. Pourtant elle peut encore recéler des incertitudes. En 2017, le Conseil d’État a jugé qu’un débat limité aux cinq candidats les plus notoires ne conduisait pas un déséquilibre incompatible avec le respect du principe d’équité renforcée [33] : le juge fait masse de l’exposition médiatique d’un candidat au cours de la première comme de la seconde période pour conclure qu’il n’y a pas de « déséquilibre incompatible » à ce principe.

La réglementation permet une telle sélection, de cinq candidats sur onze, en application des critères de représentativité : les résultats aux précédentes élections, les résultats des sondages et la contribution au débat électoral, le juge n’exerçant qu’un contrôle de proportionnalité pour ne sanctionner qu’un déséquilibre manifestement excessif entre les candidats. Toutefois, la contrainte est à ce stade beaucoup plus forte pour la programmation, puisqu’elle conduit à apprécier l’équité par tranches horaires : concrètement, la journée est divisée en quatre tranches.

3. La campagne officielle : l’égalité

Cette phase d’ égalité prévue depuis 1962, couvre la campagne électorale officielle, et la règle légale fait l’objet d’une transposition dans les recommandations de l’autorité de régulation pour aboutir à une contrainte plus stricte : « durant la campagne électorale, les éditeurs veillent, conformément au I bis de l’article 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 …, à ce que les temps de parole et les temps d’antenne accordés aux candidats et à leurs soutiens soient égaux dans des conditions de programmation comparables. En vue du second tour du scrutin, le principe d’égalité doit être respecté à compter du lundi suivant le premier tour jusqu’au vendredi inclus précédent le second tour » [34].

À cette contrainte, qui se resserre donc au fur et à mesure que s’approche l’élection, ce qui répond à une logique générale, au demeurant non vérifiée en 2017, selon laquelle l’effet de la propagande est de plus en plus marqué au fil du temps, s’ajoutent deux éléments : la réglementation des émissions officielles et la neutralisation des veilles et jours d’élection. Sur le premier point, en distinguant radio et télévisions du service public, et émissions courtes et longues, le régulateur [35] veille à ce que les émissions respectent la sincérité du débat sous le contrôle du juge administratif [36] ; si l’expression des intervenants est libre, elle ne peut se faire que dans le respect général de cette réglementation - évitant toute officialisation de l’image des candidats - et des droits des tiers. Est classiquement prohibé « tout moyen d'expression ayant pour objet ou pour effet de tourner en dérision d’autres candidats ou leurs représentants ». Les insertions vidéographiques sont possibles. Le Conseil constitutionnel retrouve ici son rôle général d’organisation en donnant nécessairement un avis sur le texte de la décision d’organisation. Entre les deux tours, l’électeur est accaparé, depuis 1974 et à l’exception notoire de 2002, par le débat entre les deux candidats, lieu de l’affrontement final dont les spectateurs ou auditeurs ne retiennent souvent qu’un ou deux éléments saillants : « Vous n’avez pas le monopole du cœur » en 1974, « vous êtes l’homme du passé … et vous l’homme du passif » en 1981, « moi Président … » en 2012. La stratégie de communication, autant que les programmes, est alors un élément fondamental. La neutralisation de la fin des campagnes, de droit commun, trouve ici à nouveau à s’appliquer : neutralisation absolue de la veille et du jour du scrutin, que la loi du 2 décembre 2019 étend à la prohibition de tenir des réunions, curieusement omise du champ de l’interdiction avant cette loi (C. elect., art. L. 49 N° Lexbase : L7607LTW) interdiction de formuler des arguments nouveaux à un moment tel que la réponse des adversaires est impossible  (C. elect., art. L. 48-2 N° Lexbase : L9882IPP) ou de diffuser de sondages pendant cette période de neutralisation [37].

Mais on imagine assez mal le Conseil constitutionnel annuler une élection au motif que des actions de propagande ne respecteraient pas ces prohibitions, surtout compte tenu du possible retrait de fake news en référé, qui trouvent en revanche à s’appliquer strictement aux élections de députés [38] .

Formidable tribune d’expression, la campagne pour l’élection présidentielle est un champ de liberté d’expression, surveillée de toute part, non dans son contenu, exception faite des émissions officielles, mais dans ses modalités, pour qu’aucun déséquilibre ne vienne rompre l’équité, ou l’égalité entre les candidats. La campagne électorale garantit ainsi la liberté de l’électeur de choisir entre plusieurs voix. 


[1] Après les dysfonctionnements constatés pour les élections régionales et départementales pour l’acheminement par un opérateur privé (doc Sénat n° 785, 2021 par FN Buffet), la décision d’internaliser la mise sous pli a été prise, pour un montant de 64,5 millions d’euros d’indemnités. S’y ajoutent les coûts d’acheminement non connus en loi de finances (doc AN n° 4524 ,annexe 3, p. 39, J. de Temmerman). Au total, l’élection présidentielle est budgétée à hauteur de 234 millions d’euros, contre 200 millions de coût constaté en 2017 (même source, pp. 27, 28).

[2] V. Une partie de campagne par R. Depardon, qui relate la campagne de Valéry Giscard d’Estaing et retour sur image JP Camby, Considérant n ° 2, 2020, p. 99.

[3] Cons. const., décision n° 2017-752 DC du 8 septembre 2017 N° Lexbase : A8755WQC.

[4] Cons . const., décision n° 2018-773 DC du 20 décembre 2018 N° Lexbase : A2418YRY.

[5] Cons. const., décision n° 2022-835 DC du 21 janvier 2002 N° Lexbase : A02317KR.

[6] Cons . const., décision n° 2018-773 DC du 20 décembre 2018, préc.

[7] Cons . const., décision n° 2012-233 QPC du 22 février 2021 N° Lexbase : A0369IDZ ; M. Verpeaux, La présentation des candidats à l'élection présidentielle : publicité ou anonymat ?, JCP éd. A, 12 mars 2012, n° 10-11, p. 21-25 ; P. Chrestia, Transparence et (est ?) démocratie, AJDA, 23 avril 2012, n° 15, p. 841-843 ; A. Roblot-Troizier, La validation des règles de publications des parrainages : entre habileté et résignation des juges, RFDA, mai-juin 2012, n° 3, p. 531-534 ; P. Blachèr, Droit électoral - Partis politiques [Chronique QPC (janvier-avril 2012)], LPA, 1er octobre 2012, n° 196, p. 14-15.

[8] Cons. const., décision n° 95-77 PDR du 9 avril 1995 N° Lexbase : A10827LN ; R. Ghévontian, La décision 'Néron' ou la fin d'une discussion juridique vieille de trente ans, RFDC, juillet-septembre 1995, n° 23, p. 573-576.

[9] Cons. const., décision n° 2018-773 DC du 20 décembre 2018 N° Lexbase : A2418YRY.

[10] CE, Ass., 30 octobre 1996, n° 177927 N° Lexbase : A1478APG, RFDA, 1997, p. 59 concl. Touvet, LPA, 7 mars 1997, p. 14, note Camby.

[11] Il n’appartient donc pas au juge judiciaire de se prononcer sur la dénomination d’une liste ou sur la validité d’une déclaration de candidature, qui constituent des actes préliminaires aux opérations électorales : Cons. const., décision n° 93-1243 AN du 22 septembre 1993 N° Lexbase : A7034AHY.

[12] Mise en place par le décret n° 2022-63 du 26 janvier 2022, relatif à la composition et au siège de la Commission nationale de contrôle institué par le décret n° 2001-213 du 8 mars 2001 N° Lexbase : L8487MAL.

[13] Le Conseil constitutionnel ne se reconnaît pas compétent : Cons. const. décision n° 2007-137 PDR du 5 avril 2007 N° Lexbase : A10867LS

[14] La Commission refuse  d'homologuer le matériel électoral de M. Schivardi se présentant comme le « candidat des maires », CE, ord. réf., 2 avril 2007, n° 304255 N° Lexbase : A9251DU8 ; v. J.-E. Schoettl, note LPA, 22 juin 2007, p. 10 ; v. sur une intervention en référé, JCP éd. A, 2 juillet 2007, n° 2176, note D. Biroste.

[15] V. note 1. doc Sénat n° 785 : « Au second tour, de l’aveu même des opérateurs, 26,6 % des électeurs n’ont reçu aucune propagande pour les élections départementales et 40,3 % pour les élections régionales, cette proportion se montant même à plus de 90 % dans plusieurs départements ».

[16] Addendum à l’instruction INTA1830120J relative à la tenue des listes électorales complémentaires du 21 novembre 2018 du 4 février 2021 : « Le régime de libre communicabilité ne s'applique qu'à la liste électorale en cours de validité (avis n° 20173429 du 8 février 2018 de la CADA)... Dans la mesure où les listes électorales ne sont plus arrêtées au 31 décembre, mais six semaines avant un scrutin (art. l. 30), il convient de considérer que la liste électorale communicable est la dernière liste arrêtée pour un scrutin ». Or, la liste est un document permanent et la validation d’une inscription dépend désormais d’une décision du maire dans les cinq jours du dépôt (C. elect., art. L. 18 N° Lexbase : L3668LK3) ;  v. R. Rambaud, AJDA, 18 novembre 2019.

[17] Soit le 4 mars.

[18] Recommandation n° 2011-3 du 30 novembre 2011 du CSA N° Lexbase : Z24275YL.

[19] « La règle d’égalité du temps de parole s’est traduite, en raison des contraintes éditoriales qu’elle implique, par une réduction du temps de parole de l’ensemble des candidats. » rapport annuel 2012 ; v aussi le rapport sur l’élection présidentielle de novembre 2012 qui propose de supprimer la période intermédiaire.

[20] CSA, rapport sur les campagnes électorales, avril 2018 p. 11.

[21]  V. J. La Palombara, Political parties and political development (1969), LaPalombara et Weiner, Myron scientifique.

[22] CSA, rapport précité note 20, p. 11, à tel point qu’une QPC portant sur les critères d’attribution des temps de parole pour la campagne des élections à l’Assemblée nationale doit tirer les conséquences de l’élection d’Emmanuel Macron alors qu’il n’y a pas de représentation parlementaire du parti (Cons. const., décision n° 2017-651 QPC du 31 mai 2017 N° Lexbase : A6643WER).

[23] Y. Poirmeur, Les partis politiques, LGDJ systèmes, 2014.

[24] CNCCFP, rapport d’activité 2020, p. 9.

[25] Les dépenses exposées dans ce cadre ne sont pas considérées comme des dépenses de campagne « en vue de l’élection », ce qui démontre qu’il ne s’agit pas d’une candidature mais bien d’une conquête de la candidature .

[26] CE, avis du 31 octobre 2013, sur les modalités d'imputation dans un compte de campagne des dépenses liées aux campagnes dans le cadre de primaires ouvertes organisées par des partis politiques, v. Courrier des maires, 9 déc. 2013, Primaires et comptes de campagne : l’avis du Conseil d'État :  « Dans le cas des élections primaires, si celles-ci sont organisées par un parti uniquement auprès de ses adhérents, les dépenses ne sont pas considérées comme réalisées en vue de l’obtention des suffrages des électeurs. Elles n’ont donc pas à figurer au compte de campagne du candidat » ; J.-M. Pastor, Dalloz, 2 décembre 2013 ; J.-P. Camby, LPA, 13 février 2014, n° 32, p. 6.

[27]  CE, avis n° 388003 du 31 octobre 2013 N° Lexbase : A10877LT, rendu public par le Gouvernement et diffusé le 24 novembre 2013 par le ministère de l’Intérieur.

[28]« Les dépenses faites par un candidat, lors d’une campagne en vue d’une élection primaire avant son investiture par un parti politique, ne peuvent s’ajouter, pour l’application de l’article L. 52-12 du Code électoral, aux dépenses de la campagne postérieure à cette investiture que pour autant que les premières dépenses puissent être regardées comme engagées ou effectuées en vue de l’obtention des suffrages des électeurs lors de l’élection, et non de l’obtention des suffrages des seuls adhérents du parti politique auquel appartient le candidat en vue de son investiture »,  avis précité, note 27.

[29] P. Jan, Pouvoirs n° 138, typologie des candidats.

[30] Cons. const., décision n° 2000-23 REF du 23 août 2000 N° Lexbase : A10857LR ; V. Maligner, Le contentieux des actes préparatoires aux référendums, AJDA, oct. 2000, n° 10, p. 4-14 ; J.-E. Schoettl, Le contentieux des actes préparatoires à un référendum : suite, LPA, 2000, p. 12.

[31] Cons. const., décisions du 7 avril 2002, n° 2002-106 PDR N° Lexbase : A10837LP et n° 2002-103 PDR N° Lexbase : A10847LQ, lequel « fait valoir qu'il a été l'objet, par voie de presse, de graves attaques destinées à dissuader les personnes ayant qualité pour présenter un candidat à l'élection du Président de la République de souscrire une présentation en sa faveur ; que les circonstances ainsi invoquées sont sans incidence sur la régularité de la décision par laquelle le Conseil constitutionnel a arrêté la liste des candidats à l'élection du Président de la République ».

[32] CE, 8 avril 2009, n° 311136 N° Lexbase : A9543EE8, RFDA, 2009, 1705 concl. de Salins, RD pub. n° 6. 1705 note J.-P. Camby et délibération n° 2009-60 21 juillet 2009 N° Lexbase : O9365ACT.

[33] CE 16 mars 2017, n° 408730 N° Lexbase : A3294UCY, AJDA, 2017 804, note R. Rambaud.

[34] Recommandation n° 202 -03 du 21 octobre 2021, préc.

[35] Décision CSA n° 2017- 183 du 22 mars 2017, relative aux conditions de production, de programmation et de diffusion des émissions de la campagne en vue de l'élection du Président de la République pour le premier et le second tour du scrutin N° Lexbase : X0899AS4.

[36] V. par exemple pour les élections européennes : CE, 20 mai 2019, n° 430796 N° Lexbase : A2675ZIW, la durée allouée aux candidats ne doit pas être « hors de proportion avec la participation de cette formation politique à la vie démocratique de la Nation constitutive d'une atteinte grave et manifestement illégale au caractère pluraliste de l'expression des courants de pensée et d'opinion ».  

[37] Loi n° 77-808 du 19 juillet 1977 relative à la publication et à la diffusion de certains sondages d'opinion, art. 11 N° Lexbase : L7776AIT.

[38] Cons. const., décision n° 2017-5029  AN du 18 décembre 2017 N° Lexbase : A9038WN3.

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Fiscalité du patrimoine

[Brèves] Déclaration ISF : vivre dans deux appartements distincts au même étage n’est pas caractéristique d’une situation de « concubinage notoire » !

Réf. : CA Paris, 24 janvier 2022, n° 20/11605 N° Lexbase : A24217KU

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par Marie-Claire Sgarra

Le 08 Février 2022

Dans le cadre d’une décision en matière d’ISF, la cour d’appel de Paris a jugé que le fait que deux personnes vivent dans des appartements distincts au même étage ne caractérise pas une situation de concubinage notoire ; le regroupement des deux appartements permettant la vente d'un ensemble immobilier d'une surface accrue caractérise au plus une communauté d'intérêts.

Les faits :

  • Monsieur B a déposé des déclarations d’ISF pour la période 2009 à 2014 ;
  • Monsieur C a déposé des déclarations d’ISF pour les années 2009 et 2010 ;
  • l’administration fiscale les a invités à souscrire des déclarations communes de 2009 à 2014 ;
  • elle a procédé à la taxation d'office de cette imposition pour les années 2009 à 2014, en considérant qu'ils constituent un foyer fiscal unique pour partager une vie commune et avoir une communauté d'intérêts, que révèlent une cohabitation continue depuis des années en dépit de la modification de leur résidence principale, l'acquisition de plusieurs biens en indivision et une convergence d'intérêts financiers dépassant, selon elle, le cadre de simples intérêts économiques communs depuis de nombreuses années et consistant au bénéfice réciproque d'assurances vie et au pouvoir d'encaisser des fonds ;
  • la réclamation élevée par les contribuables a été rejetée par décision de l'administration du 19 avril 2018.

Principes :

  • l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune est constituée par la valeur nette, au 1er janvier de l'année, de l'ensemble des biens, droits et valeurs imposables appartenant aux personnes visées à l'article 885 A (N° Lexbase : L0138IWZ) ainsi qu'à leurs enfants mineurs lorsqu'elles ont l'administration légale des biens de ceux-ci ; dans le cas de concubinage notoire, l'assiette de l'impôt est constituée par la valeur nette, au 1er janvier de l'année, de l'ensemble des biens, droits et valeurs imposables appartenant à l'un et l'autre concubins et aux enfants mineurs mentionnés au premier alinéa (CGI, art. 885 E N° Lexbase : L8780HLR) ;
  • le concubinage est une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple (C. civ., art. 515-8 N° Lexbase : L8525HWN).

L’administration fiscale a fait valoir différents éléments juridiques et de faits pour attester de la vie commune et d’une communauté d’intérêts :

  • résidence commune attestée depuis 1990 ;
  • plusieurs acquisitions immobilières en indivision ;
  • des impositions communes ;
  • des pouvoirs réciproques d'encaisser les fonds perçus lors de la vente d'un bien indivis ;
  • et des assurances vie désignant les intimés bénéficiaires réciproques.

Les deux requérants contestent ces impositions au motif que l'administration n'a pas démontré la communauté de vie qu'elle a invoquée pour asseoir ces impositions communes et que la condition de notoriété indispensable à la qualification du concubinage fait défaut.

Solution de la cour d’appel. Pour la cour, les éléments mis en lumière par l’administration fiscale reflètent au mieux une communauté d’intérêts mais pas une communauté de vie.

La cour d’appel confirme ainsi le jugement du tribunal judiciaire de Paris et prononce la décharge intégrale des droits rappelés et accessoires.

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Procédure civile

[Panorama] Panorama 2021 des arrêts de la Cour de cassation portant sur la procédure devant la cour d’appel (2de partie)

Lecture: 38 min

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par Etienne Vergès, Professeur à l’Université Grenoble Alpes, directeur scientifique de la revue Lexbase Droit privé et de l’ouvrage de procédure civile.

Le 14 Mars 2022

Mots-clés : délais « Magendie » • pouvoirs du CME • déclaration d’appel • déféré • effet dévolutif • chefs de jugements • écritures • procédure à bref délai

Nous poursuivons dans cette chronique notre tour d’horizon des décisions marquantes rendues en procédure civile au cours de l’année 2021. Ce panorama est consacré à la procédure devant la cour d’appel qui, en raison de sa très grande technicité, continue de susciter un vif contentieux. Au travers de cette étude qui dresse un tour d’horizon des décisions marquantes de la Cour de cassation rendues au cours de l’année 2021, nous verrons que les délais Magendie sont toujours présents, mais que les questions soulevées sont aujourd’hui très diversifiées. Elles concernent toutes les voies procédurales (avec ou sans représentation obligatoire, ordinaire ou à bref délai); elles questionnent les nouveaux pouvoirs du conseiller de la mise en état autant que la procédure du déféré. En somme, c’est tout le spectre de la procédure devant la cour d’appel qui occupe l’actualité jurisprudentielle de l’année 2021, que nous aborderons ici de façon thématique.


 

Sommaire

I. Effet dévolutif de l’appel et chefs de jugements

- Cass. civ. 2, 25 mars 2021, n° 20-12.037, F-P
- Cass. civ. 2, 4 février 2021, n° 19-23.615, F-P+I
- Cass. civ. 2, 20 mai 2021, deux arrêts, n° 20-13.210, F-P et n° 19-22.316, F-P
- Cass. civ. 2, 1er juillet 2021, n° 20-10.694, F-B

II. Délais « Magendie » (1) : les actes interruptifs des délais pour conclure

- Cass. civ. 2, 9 septembre 2021, n° 20-17.263, F-B
- Cass. civ. 2, 20 mai 2021, n° 20-13.912, F-P

III. Délais « Magendie » (2) : la force majeure permettant d’échapper aux sanctions

- Cass. civ. 2, 25 mars 2021, n° 20-10.654, F-P
- Cass. civ. 2, 2 décembre 2021, n° 20-18.732, F-B

IV. La notification des conclusions de l’appelant à l’intimé

- Cass. civ. 2, 25 mars 2021, n° 19-20.636, P
- Cass. civ. 2, 2 décembre 2021, n° 20-14.480, F-B
- Cass. civ. 2, 25 mars 2021, n° 18-13.940, F-P

V. Procédure à bref délai

- Cass. civ. 2, 1er juillet 2021, n° 20-14.449, F-B
- Cass. civ. 2, 2 décembre 2021, n° 20-18.122, F-B

VI. Écritures structurées

- Cass. civ. 2, 30 septembre 2021, n° 19-12.244, F-B

VII. Pouvoirs du conseiller de la mise en état

- Cass. civ. 2, avis, 3 juin 2021, n° 21-70.006, n° 15008, P

VIII. Déféré

- Cass. civ. 2, 2 décembre 2021, n° 20-18.312, F-B
- Cass. civ. 2, 4 mars 2021, pourvoi n° 19-15.695, FS-P

IX. Procédure sans représentation obligatoire

- Cass. civ. 2, 16 décembre 2021, n° 19-26.090, F-B

I. Effet dévolutif de l’appel et chefs de jugements - Cass. civ. 2, 25 mars 2021, n° 20-12.037, F-P N° Lexbase : A68084M4 ; Cass. civ. 2, 4 février 2021, n° 19-23.615, F-P+I N° Lexbase : A81614EY ; Cass. civ. 2, 20 mai 2021, deux arrêts, n° 20-13.210, F-P N° Lexbase : A25324SL et n° 19-22.316, F-P N° Lexbase : A25334SM ; Cass. civ. 2, 1er juillet 2021, n° 20-10.694, F-B N° Lexbase : A20054YW

La déclaration d’appel qui ne mentionne pas les chefs de jugement critiqués ne saisit pas la cour et elle ne peut être régularisée par les conclusions.

Lorsque l’appelant ne demande dans ses conclusions ni l’infirmation des chefs du dispositif du jugement ni son annulation, la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement.

Cette dernière solution ne s’applique immédiatement qu’à compter du 17 septembre 2020.

La réforme de 2017 a profondément modifié l’effet dévolutif de l’appel, puisque la dévolution ne s’opère plus par principe pour le tout. La cour d’appel n’est donc saisie (toujours par principe), que des chefs du jugement expressément visés dans la déclaration d’appel (CPC art. 562 N° Lexbase : L7233LEM). La Cour de cassation a rapidement tiré les conséquences de cette modification en jugeant que « lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas » (Cass. civ. 2, 30 janvier 2020, n° 18-22.528, FS-P+B+I N° Lexbase : A89403C4). Par conséquent, la cour d’appel n’est saisie d’aucun chef du dispositif du jugement (Cass. civ. 2, 2 juillet 2020, n° 19-16.954, F-P+B+I N° Lexbase : A56913QT).

Dans ces premiers arrêts, la Cour de cassation avait pris soin de préciser que « seul l’acte d’appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement ». Cette formule, un peu générale, laissait en suspens la question de la régularisation d’une déclaration d’appel mal rédigée. Dans l’arrêt du 25 mars 2021 (n° 19-23.615), la deuxième chambre civile vient tirer les conséquences logiques de la formule en affirmant expressément que « la déclaration d'appel, qui ne mentionne pas les chefs critiqués du jugement, ne peut être régularisée que par une nouvelle déclaration d'appel, formée dans le délai imparti à l'appelant pour conclure au fond ».

Cette solution s’explique par le fait que la déclaration d’appel qui ne mentionne pas les chefs de jugement attaquées est considérée par la Cour de cassation comme frappée par un vice de forme. Ce vice n’est donc régularisable, en suivant le parallélisme des formes, que par une nouvelle déclaration d’appel.

Concrètement, cela signifie que l’appelant qui prend conscience que sa déclaration d’appel est irrégulière et ne vise pas tous les chefs de jugement qu’elle souhaite critiquer doit saisir la cour par une nouvelle déclaration d’appel, non pas dans le délai de l’appel, mais dans le délai pour conclure.

Le formalisme de la saisine de la cour d’appel ne s’arrête malheureusement pas à la déclaration d’appel. Il concerne également les conclusions des parties. En effet, l’article 954 du Code de procédure civile N° Lexbase : L7253LED, qui définit le régime des écritures structurées en appel, dispose que les conclusions comprennent « l’énoncé des chefs de jugement critiqués » en plus de la discussion des prétentions et moyens. Toutefois, avec une certaine ambiguïté, l’article ajoute que les conclusions comprennent « un dispositif récapitulant les prétentions ». La question s’est posée de savoir si les prétentions formulées en appel sont les mêmes que celles présentées en première instance, ou si elles doivent comprendre également la demande d’infirmation des chefs de jugement.

La Cour de cassation a répondu à cette question dans un arrêt rendu le 17 septembre 2020, qui a été confirmé à plusieurs reprises au cours de l’année 2021 (Cass. civ. 2, 4 février 2021, n° 19-23.615, F-P+I ; Cass. civ. 2, 20 mai 2021, deux arrêts, n° 20-13.210, F-B et n° 19-22.316, F-B et Cass. civ. 2, 1er juillet 2021, n° 20-10.694, F-B). Dans ces arrêts, la deuxième chambre civile pose un principe selon lequel « si l'appelant ne demande dans le dispositif de ses conclusions ni l'infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l'anéantissement ni l'annulation du jugement, la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement ». La formule n’est pas très explicite. En effet, lorsqu’une partie formule en appel une prétention qui a été rejetée en première instance, on peut imaginer, au moins implicitement, qu’elle sollicite l’infirmation du jugement sur ce point. Telle n’est pourtant pas l’interprétation qu’en donne la Haute juridiction. Par exemple, dans l’un des arrêts rendus le 20 mai 2021, l’appelant demandait à la cour dans ses conclusions de dire et juger qu’un acte de cession de parts sociales était nul. Toutefois, il avait omis de préciser au préalable qu’il demandait l’infirmation du jugement entrepris. Pour la Cour de cassation, la cour d’appel n’était pas saisie d’une demande d’infirmation du jugement et elle ne pouvait, par conséquent, que le confirmer.

Ce formalisme, que l’on ne manquera pas de juger excessif et inutile, n’est pas inscrit littéralement dans le Code de procédure civile. Il est issu de l’interprétation que la Cour de cassation donne des articles 542 N° Lexbase : L7230LEI et 954 du Code de procédure civile depuis un arrêt du 17 septembre 2020. Dans cette décision, la première en ce sens publiée au bulletin, la Haute juridiction décide de reporter dans le temps l’effet de cette interprétation nouvelle. Elle juge ainsi que l’application de cette exigence formelle aux déclarations d’appel antérieures au 17 septembre 2020 priverait les appelants d’un droit au procès équitable. Cette application dans le temps a été réitérée par la suite dans les arrêts rendus en 2021.

On retiendra donc que pour toutes les déclarations d’appel postérieures au 17 septembre 2020, l’appelant qui souhaite obtenir l’infirmation de certains chefs de jugements doit, non seulement mentionner ces chefs dans sa déclaration d’appel, mais encore préciser dans ses conclusions qu’il demande à la cour d’infirmer le jugement sur tel ou tel chef.

II. Délais "Magendie" (1) : les actes interruptifs des délais pour conclure - Cass. civ. 2, 9 septembre 2021, n° 20-17.263, F-B N° Lexbase : A252744D ; Cass. civ. 2, 20 mai 2021, n° 20-13.912, F-P N° Lexbase : A25294SH)

Les conclusions qui ne comportent pas un rappel détaillé des prétentions de l’appel ne sont pas interruptives du délai de l’article 908 du Code de procédure civile N° Lexbase : L7239LET.

L’injonction de rencontrer un médiateur n’interrompt pas le délai pour conclure.

Depuis la première réforme de l’appel en 2010, on se pose fréquemment la question de savoir quels sont les actes, ou les évènements, qui permettent d’interrompre les délais pour conclure (de trois mois ou d’un mois selon la voie suivie par la procédure) qui s’imposent aux parties à peine de caducité ou d’irrecevabilité.

La première difficulté qui a surgi était celle du contenu des conclusions qui avaient pour effet d’interrompre ce délai. Dans un avis du 21 janvier 2013 N° Lexbase : A8267I3L, la Cour de cassation a précisé que pour interrompre le délai, les conclusions devaient soit déterminer l’objet du litige, soit soulever un incident de nature à mettre fin à l’instance. Le décret du 6 mai 2017 semble avoir restreint cette liste en évoquant uniquement, à l’article 910-1 du Code de procédure civile N° Lexbase : L7041LEI les conclusions « qui déterminent l’objet du litige ». Cette restriction a été confirmée par le Conseil d’Etat, lequel a considéré que les conclusions qui soulèvent une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou un incident mettant fin à l’instance doivent être spécialement adressées au conseiller de la mise en état (et non à la cour) et elles ne sont donc pas de nature à interrompre le délai pour conclure (CE, 13 novembre 2019, n° 412255, § 31 N° Lexbase : A4584ZYG).  

Interrompre le délai pour conclure n’est donc pas chose aisée et toutes conclusions transmises au conseiller de la mise en état ou à la cour ne possèdent pas nécessairement un effet interruptif. Dans son arrêt du 9 septembre 2021, la Cour de cassation a encore accru les contraintes pesant sur les plaideurs. Dans cette espèce, l’appelant avait conclu dans les temps impartis, mais ses conclusions comportaient un dispositif sommaire, qui se bornait à demander qu’une partie du jugement soit confirmée et que, « pour le surplus », la cour d’appel fasse droit à l’ensemble de ses demandes (celles qui avaient été rejetées en première instance). Les conclusions procédaient ainsi par renvoi à ce qui avait été demandé devant les premiers juges. L’irrégularité était manifeste, puisque l’article 954 du Code de procédure civile, qui définit le régime des écritures structurées en appel, impose que les prétentions des parties soient « récapitulées sous forme d’un dispositif ».

Mais cette irrégularité frappe le dispositif. Dès lors, la sanction n’est pas celle de la nullité pour vice de forme (qui nécessiterait la preuve d’un grief). De façon plus radicale, les conclusions qui ne détaillent pas les prétentions dans leur dispositif ne saisissent la cour d’aucune prétention. Partant de ce constat, la Cour de cassation juge que de telles conclusions ne permettent pas de mener à son terme un appel qu’elle qualifie d’« irrémédiablement dénué de toute portée pour son auteur ». Elle en déduit que les conclusions qui ne contiennent pas dans leur dispositif des prétentions sur le litige n’interrompent pas le délai de l’article 908 Code de procédure civile. Elle ajoute que cette règle ne résulte pas d’une interprétation nouvelle et qu’elle peut donc s’appliquer au litige qui lui est soumis.

Même si elle résulte d’un raisonnement logique (les conclusions ne saisissent pas la cour, elles n’ont donc pas d’effet interruptif), cette solution marque une rigueur toute particulière. Dans cet arrêt, la deuxième chambre civile se défend de faire preuve d’un formalisme excessif, mais il faut admettre qu’elle pousse ici le formalisme du code à ses extrêmes. En effet, les premières conclusions de l’appelant doivent contenir l’ensemble des prétentions sur le fond (CPC art. 910-4 N° Lexbase : L9354LTM). Toute prétention qui aurait été omise dans le premier jeu de conclusions est frappée d’irrecevabilité. Ainsi, l’appelant qui ne mentionne pas ses prétentions dans les premières conclusions ne peut les ajouter dans un jeu de conclusions responsives. Il perd tout espoir de soumettre à la cour d’appel ses prétentions et c’est pour cette raison que la Cour de cassation juge que ses conclusions ne sont pas interruptives. L’appel est alors caduc et l’instance prend fin de façon prématurée, puisqu’elle n’a aucune chance d’aboutir sur le fond.

En combinant le principe de concentration des prétentions en appel et le régime très formel des écritures structurées, la Haute juridiction impose aux plaideurs une rigueur extrême. On pourrait rétorquer que les parties ne sont pas privées de leur droit au juge. En cela, le formalisme n’est pas excessif, mais il faut admettre dans le même temps que ce formalisme fait l’objet d’une tolérance zéro.

Le second arrêt qui concerne les causes d’interruption des délais pour conclure aborde l’injonction de rencontrer un médiateur (Cass. civ. 2, 20 mai 2021, n° 20-13.912, F-P). Depuis la réforme de 2017, l’article 910-2 du Code de procédure civile N° Lexbase : L7042LEK dispose que la décision d'ordonner une médiation interrompt les délais impartis pour conclure et former appel incident. Ces délais courent à nouveau après l’expiration de la mission du médiateur. En l’espèce, le juge avait enjoint aux parties de rencontrer un médiateur (injonction prévue par l’article 22-1 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 N° Lexbase : L1139ATD). Cette procédure, que l’on désigne généralement par l’expression d’« envoi en médiation », vise à informer les parties sur l’objet et le déroulement de la médiation. En revanche, il ne s’agit pas d’une médiation au sens strict puisque les parties n’ont pas consenti à cette procédure.

L’auteur du pourvoi alléguait que la décision de la cour d’appel de retenir son affaire pour faire l’objet d’un envoi en médiation s’identifiait à une décision ordonnant une médiation. La Cour de cassation ne suit pas cette argumentation. Au contraire, elle affirme que seule la décision d’ordonner une médiation interrompt les délais pour conclure, alors qu’une « simple convocation » à une réunion d’information ne produit pas cet effet.

La portée de cette décision semble claire, mais elle laisse planer deux interrogations :

  • La première se trouve dans la motivation de la cour d’appel, à laquelle renvoie la Cour de cassation. La juridiction du second degré a précisé qu’il n’était pas démontré que les parties s’étaient accordées sur la nécessité de poursuivre la médiation à l’issue de la réunion d’information. La question se pose donc de savoir si la décision aurait été différente si les parties s’étaient engagées, à la suite de la réunion d’information, dans une procédure de médiation. Devrait-on alors considérer que l’injonction de rencontrer un médiateur marque le début de la procédure de médiation ? Doit-on, au contraire, considérer que les parties qui décident de poursuivre le processus amiable après la réunion d’information doivent attendre du juge qu’il ordonne la médiation en désignant formellement le médiateur ? Ni les textes ni la jurisprudence ne permettent de répondre clairement à cette question.
  • La seconde interrogation se trouve dans l’ambiguïté que recouvre le terme « médiation ». Selon le Code de procédure civile, la médiation s’entend au sens strict comme une procédure amiable qui se distingue de la conciliation. Selon la loi n° 95-125 du 8 février 1995, la médiation s’entend au sens large de « tout processus structuré, quelle qu'en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l'aide d'un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par le juge saisi du litige ». Cette définition large de la médiation, qui provient d’une Directive européenne (Directive 2008/52/CE, du 21 mai 2008 N° Lexbase : L8976H3T), englobe en droit interne à la fois la médiation et la conciliation. La question se pose donc, d’autant plus après l’arrêt commenté, de savoir si la désignation d’un conciliateur par la Cour d’appel, qui répond à la définition légale de la médiation, interrompt le délai pour conclure. L’arrêt commenté incite à penser que la Cour de cassation interprète l’article 910-2 du code de procédure civile au sens strict. Cela devrait la conduire à limiter à la seule médiation de l’article 131-1 [LXB=] du code précité, l’effet interruptif de prescription. Mais cette interprétation serait alors contra legem ou, plus précisément, conforme à la lettre du Code et contraire à la lettre de la loi du 8 février 1995.

Un tel imbroglio juridique ne se présentera peut-être pas en pratique. En effet, la pratique judiciaire veut qu’en procédure écrite, les juges utilisent la médiation plutôt que la conciliation, laquelle est réservée aux procédures orales. La question pourrait donc se résoudre ainsi, puisqu’en procédure orale, les délais pour conclure ne s’appliquent pas. Toujours est-il que la contradiction des textes ne facilite pas leur interprétation.

III. Délais "Magendie" (2) : la force majeure permettant d’échapper aux sanctions - Cass. civ. 2, 25 mars 2021, n° 20-10.654, F-P N° Lexbase : A67324MB ; Cass. civ. 2, 2 décembre 2021, n° 20-18.732, F-B N° Lexbase : A90947D8

Constitue un cas de force majeure en procédure civile, la circonstance non imputable au fait de la partie et qui revêt pour elle un caractère insurmontable.

La circonstance que l’appelant attend le rapport d’une expertise privée pour chiffrer les préjudices avant de conclure n’est pas un cas de force majeure.

La maladie de l’avocat de l’appelant n’est pas un cas de force majeure si ce dernier a bénéficié d’un support au sein de son cabinet.

L’article 910-3 du Code de procédure civile N° Lexbase : L7043LEL issu de la réforme de la procédure d’appel de 2017 dispose qu’en cas de force majeure, le président de la chambre ou le conseiller de la mise en état peut écarter l’application de la caducité et de l’irrecevabilité qui sanctionnent le non-respect des délais pour conclure.

Cette force majeure n’a pas été définie par le texte et étonnamment, depuis 2017, elle a donné lieu à un contentieux très léger devant la Cour de cassation (un seul arrêt portant sur la notion a été recensé avant 2021). Aussi c’est avec une certaine impatience que l’on attendait que la Cour de cassation prenne position sur cette notion sensible. C’est ce qu’elle a fait dans deux arrêts aussi importants qu’éclairants.

Ces deux arrêts, rendus respectivement les 25 mars et 4 décembre 2021, adoptent la même définition de la force majeure. Il s’agit, selon la Haute juridiction d’une « circonstance non imputable au fait de la partie et qui revêt pour elle un caractère insurmontable ». On retrouve ici deux des caractères bien connus de la force majeure empruntés au droit civil : l’extériorité et l’irrésistibilité.

L’extériorité s’entend dans son acception contemporaine, c’est-à-dire celle postérieure à la réforme du droit des contrats de 2016. L’évènement de force majeure doit échapper au contrôle de celui qui s’en prévaut. C’est ainsi que la Cour de cassation admet en filigrane, dans son arrêt du 2 décembre, que la maladie frappant l’avocat d’une partie peut présenter ce caractère. Il s’agit bien d’un évènement qui ne lui est pas imputable. Dans l’espèce ayant donné lieu à l’arrêt du 25 mars, la position de la Cour est moins évidente à interpréter. En l’espèce, l’appelant avait sollicité un expert pour l’aider à évaluer les postes de préjudices subis par son client. Sans évaluation précise, l’avocat ne pouvait pas formuler de prétentions réalistes. Compte tenu du fait que les prétentions en appel doivent être concentrées dans les premières conclusions, on comprend que l’avocat ait attendu le rapport de l’expert pour conclure. Toutefois, ce rapport n’a pas été remis dans les temps, et l’avocat qui l’attendait a lui-même remis ses conclusions au-delà du délai réglementaire. La Cour de cassation n’indique pas avec clarté que cette circonstance n’est pas imputable à l’appelant. Elle confirme l’arrêt d’appel selon lequel « l'appelant n'avait pas été placé dans l'impossibilité de conclure en raison d'une circonstance qui ne lui serait pas imputable ». Elle fusionne ainsi dans une même phrase l’examen des deux critères de la force majeure procédurale.

En effet, l’évènement de force majeure doit également présenter un caractère insurmontable, ce qui constitue une autre version de l’irrésistibilité. Dans la première espèce (arrêt du 2 décembre 2021), la maladie de l’avocat n’a pas été jugée insurmontable. En effet, il a été relevé que l’avocat avait bien été physiquement empêché de travailler. Toutefois, la cour d’appel a exigé de ce dernier qu’il démontre « que les effets de la caducité ne pouvaient être évités par des mesures appropriées ». Dans les faits, cette condition n’était pas satisfaite, car l’avocat travaillait dans un cabinet composé d’une trentaine de personnes, de sorte qu’un membre de ce cabinet était en mesure de le suppléer en cas d’empêchement. En effet, l’avocat avait adressé le lendemain du terme du délai des conclusions d’une trentaine de pages accompagnées de 269 pièces. La juridiction du fond en a déduit qu’il avait nécessairement bénéficié d’un support durant sa maladie. La Cour de cassation a validé cette analyse jugeant qu’aucun cas de force majeure n’était démontré par l’appelant.  Dans la seconde espèce (arrêt du 25 mars 2021), la Cour de cassation confirme une nouvelle fois l’analyse faite pas la Cour d’appel, laquelle avait estimé que l’attente d’un rapport d’expertise privé n’empêchait pas l’appelant de conclure. Selon la Haute juridiction, il était possible pour l’appelant de faire figurer le rapport dans le bordereau annexé à ses premières conclusions et de le joindre par la suite aux dernières conclusions.

Ces deux arrêts montrent que si la Cour de cassation apporte une définition à la force majeure, qui devrait permettre aux plaideurs de mieux cerner les situations qui justifient une dérogation aux délais pour conclure, les premiers arrêts rendus permettent également de constater que l’interprétation qui est faite de cette notion est, pour le moins, stricte. En aucun cas, cette définition ne laisse entrevoir un assouplissement dans la mise en œuvre des sanctions des délais «Magendie ».

IV. La notification des conclusions de l’appelant à l’intimé - Cass. civ. 2, 25 mars 2021, n° 19-20.636, P N° Lexbase : A68144MC

Comment calculer l’addition du délai de trois mois et du délai d’un mois laissé à l’appelant pour signifier ses conclusions à l’intimé qui n’a pas constitué avocat ?

Dans cette espèce, une partie avait relevé appel d’un jugement le 13 juillet. L’intimé n’ayant pas constitué avocat, l’appelant disposait d’un délai supplémentaire d’un mois, qui s’ajoutait à celui de trois mois, pour signifier ses conclusions à son adversaire (CPC, art. 911 N° Lexbase : L7242LEX). Il le fit le 14 novembre. L’appel fut déclaré caduc, la cour ayant considéré que les conclusions avaient été signifiées hors délai.

Devant la Cour de cassation, l’auteur du pourvoi développait une argumentation fondée sur l’addition de deux délais indépendants. Le premier délai, de trois mois (CPC, art. 908) expirait le 13 octobre. Le nouveau délai d’un mois (CPC, art. 911) débutait le jour suivant, soit le 14 octobre, et expirait donc le 14 novembre. Selon ce raisonnement, la signification faite le 14 novembre était dans les délais.

La Cour de cassation n’est pourtant pas convaincue. Selon elle, la prolongation de délai de l’article 911 permet à l’appelant de disposer d’un délai de quatre mois (en tout) suivant la déclaration d’appel pour signifier ses conclusions. Ce délai expirait donc bien le 13 novembre.

Cette décision est intéressante, car elle nous apprend que l’adjonction de plusieurs délais a pour résultat de former un seul nouveau délai qui court à partir du point de départ du premier délai. Les délais sont ainsi fusionnés. Ils ne sont pas indépendants les uns vis-à-vis des autres et ne s’enchaînent pas dans le temps.

L’appelant ne peut notifier ses conclusions à l’avocat de l’intimé avant que la constitution de ce dernier ne lui ait été notifiée.

Mais l’appelant, qui a été avisé par un confrère de sa constitution (même irrégulière), peut légitimement croire devoir lui notifier ses conclusions - Cass. civ. 2, 2 décembre 2021, n° 20-14.480, F-B N° Lexbase : A90957D9 ; Cass. civ. 2, 25 mars 2021, n° 18-13.940, F-P N° Lexbase : A67304M9.

La première décision (Cass. civ. 2, 2 décembre 2021, n° 20-14.480, F-B) pose une règle qui a du mal à convaincre, tant elle paraît marquée par un formalisme radical.

En l’espèce, l’appelant a notifié ses conclusions à l’avocat de l’intimé, avant de recevoir la notification de sa constitution. Ainsi, dans les faits, les conclusions de l’appelant ont été notifiées dans les délais à l’avocat de l’intimé qui s’est finalement constitué. La démarche semblait donc régulière.

Pourtant, les textes sont clairs, à défaut d’être tout à fait cohérents. Tant que l’avocat de l’intimé n’a pas notifié sa constitution à l’appelant, les conclusions de ces derniers doivent être signifiées à l’intimé lui-même (CPC. art. 911). La Cour de cassation précise ainsi que « seule la notification entre avocats rend opposable à l'appelant la constitution d'un avocat par l'intimé, à l'exclusion de tout autre acte ». Elle en déduit que la notification mal dirigée (vers l’avocat et non vers l’intimé) n’interrompt pas les délais des articles 908 et 911 du code précité et ce, même si l’avocat s’est bien constitué par la suite.

Une telle solution, aussi rigoureuse soit-elle, ignore que dans cette espèce, c’est bien l’avocat de l’intimé qui a reçu les conclusions, ce qui signifie que l’intimé était informé de l’appel et qu’il avait bien constitué avocat. On voit mal où se trouve ici l’atteinte aux droits de la défense qui justifierait que cette notification à l’avocat ne produise aucun effet.

L’erreur de l’avocat est donc lourdement sanctionnée. Il a cru un peu trop tôt que l’avocat de l’intimé serait bien celui à qui il s’adressait. Erreur fatale qui a envoyé l’appel de son client dans les oubliettes de la cour d’appel.

Heureusement, la Cour de cassation montre qu’elle est capable de sortir de l’excès de formalisme, dans des situations extrêmes. Dans l’espèce qui a donné lieu à la seconde décision (Cass. civ. 2, 25 mars 2021, n° 18-13.940, F-P), l’avocat que l’intimé avait choisi n’appartenait pas au Barreau du ressort de la Cour d’appel saisie. Il avait donc remis à la cour d’appel sa constitution pour le compte de l’intimé par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Il avait parallèlement informé l’appelant de sa constitution. Ce dernier lui avait donc adressé ses premières conclusions d’appel dans le temps de leur remise au greffe.

La difficulté provenait du fait que la constitution d’avocat de l’intimé était irrégulière. La cour d’appel a ainsi jugé que l’appelant n’avait pas été destinataire d’un acte de constitution par voie électronique d’un avocat et que l’envoi de conclusions par fax par l’avocat de l’intimé non régulièrement constitué ne pouvait suppléer le défaut de notification régulière de cette constitution.

La cour d’appel semblait ainsi suivre la voie du formalisme radical emprunté par la Cour de cassation. Par chance, et de façon surprenante, la Haute juridiction censure l’arrêt d’appel. Elle juge que lorsque la notification de la constitution d’avocat n’a pas été régulièrement faite, l’appelant satisfait à son obligation de notification de ses conclusions, soit en les signifiant à l’intimé, soit en les notifiant à l’avocat que celui-ci a constitué.

La solution est heureuse. Les avocats sont invités à se faire confiance et une constitution apparente (mais irrégulière) produit à l’égard de l’adversaire les mêmes effets qu’une constitution régulière. On apprécie la sagesse de la décision et le retour, aussi rare soit-il, à l’esprit du Code de procédure civile, lequel semble avoir été définitivement perdu en appel.

V. Procédure à bref délai

  • Dans la procédure à bref délai, lorsque l’appelant a remis au greffe ses conclusions avant l’avis de fixation à bref délai, le délai pour communiquer ses conclusions court tout de même à compter de cet avis - Cass. civ. 2, 1er juillet 2021, n° 20-14.449, F-B N° Lexbase : A21554YH.

Il arrive que les parties soient si diligentes qu’elles anticipent les actes de procédure. Tel est le cas dans cette affaire qui concerne l’appel contre un jugement du juge de l’exécution. L’appelant avait remis au greffe ses conclusions avant que l’affaire ne fasse l’objet d’un avis de fixation à bref délai. L’intimé n’ayant pas constitué avocat, l’appelant disposait d’un délai d’un mois supplémentaire pour lui signifier ses conclusions (CPC art. 905-2 N° Lexbase : L7036LEC et 911 N° Lexbase : L7242LEX). La question se posait de savoir quel était le point de départ de ce délai.

La cour d’appel a jugé que le délai d’un mois de l’article 911 du Code de procédure civile courrait à compter de la remise au greffe des conclusions, qui était antérieur à l’avis de fixation. Cette décision est cassée au profit d’une interprétation littérale des textes. Le délai d’un mois supplémentaire commence à courir à l’expiration du délai pour conclure (CPC, art. 911) et le délai pour conclure court à compter de l’avis de fixation de l’affaire à bref délai (CPC, art. 905-2) même si l’appelant a conclu plus tôt. Le point de départ du délai étendu (deux mois) et donc le même que celui du délai initial. Il s’agit de la date de réception par l’appelant de l’avis de fixation de l’affaire à bref délai.

  • Dans la procédure à bref délai, les parties doivent faire des diligences après l’avis de fixation de l’audience. Le délai de péremption n’est donc pas suspendu par la fixation - Cass. civ. 2, 2 décembre 2021, n° 20-18.122, F-B N° Lexbase : A90897DY.

Cette décision souligne le particularisme de la procédure à bref délai. En effet, dans une procédure ordinaire, la mise en état précède la fixation de l’affaire. Dès lors, à compter du jour où l’affaire est fixée pour être plaidée, les parties n’ont plus aucune diligence à accomplir. Elles doivent simplement attendre que la formation de jugement statue sur leurs prétentions. C’est pour cette raison que la Cour de cassation a jugé en 2020 (Cass. civ. 2, 30 janvier 2020, n° 18-25.012) que « le cours du délai de péremption de l'instance est suspendu, en l'absence de possibilité pour les parties d'accomplir des diligences de nature à accélérer le déroulement de l'instance, à compter de la date de la fixation de l'affaire pour être plaidée ». Dans cette décision, la deuxième chambre civile précise bien que le délai de péremption est suspendu, car les parties n’ont aucune possibilité d’accomplir des diligences.

Or, dans la procédure à bref délai, la temporalité est inversée. L’avis de fixation de l’audience à bref délai précède les autres actes : signification de la déclaration d’appel, remise et notification des conclusions. L’avis de fixation à bref délai ne marque donc pas la fin de la mise en état, mais au contraire, l’ouverture d’une période courte durant laquelle les parties doivent se montrer particulièrement diligentes. C’est pour cette raison que dans son arrêt du 2 décembre 2021, la Cour de cassation précise que la suspension du délai de péremption ne s’applique pas lorsque l’affaire est fixée à bref délai, dans laquelle les parties sont « invitées à la mettre en état pour qu’elle soit jugée ».

On retiendra comme enseignement plus général de cet arrêt que la suspension du délai de péremption n’a lieu que lorsque les parties sont dans l’impossibilité d’accomplir des diligences.   

VI. Écritures structurées - Cass. civ. 2, 30 septembre 2021, n° 19-12.244, F-B N° Lexbase : A046348N

La Cour de cassation rappelle que les prétentions doivent être rappelées dans le dispositif.

Cet arrêt mérite d’être signalé simplement, car il rappelle la rigidité de la règle énoncée à l’article 954 CPC, qui concerne les « écritures structurées ». Cette expression désigne les règles qui définissent la structure des conclusions dans la procédure écrite. La structuration des écritures forme une sorte de trame, à laquelle les avocats ne peuvent déroger. En particulier, les prétentions des parties, qui sont développées dans les motifs des conclusions, doivent être récapitulées dans le dispositif.

Dans l’espèce étudiée, l’une des parties soulevait devant la cour d’appel la nullité d’une requête qui avait été faite pas son adversaire dans le cadre d’une mesure d’instruction in futurum. Toutefois, elle avait omis de formaliser cette prétention dans le dispositif de ses conclusions. La sanction était inévitable et la Cour de cassation affirme ainsi que la cour d’appel n’était pas saisie de cette prétention.

VII. Pouvoirs du conseiller de la mise en état Cass. civ. 2, avis, 3 juin 2021, n° 21-70.006, n° 15008, P N° Lexbase : A29374UC

Les pouvoirs du conseiller de la mise en état sur les fins de non-recevoir sont limités par le respect de ce qui a été jugé en première instance.

Depuis le 1er janvier 2020, le juge de la mise en état est compétent pour statuer sur les fins de non-recevoir. Cette compétence est également conférée au conseiller de la mise en état, en raison de la référence générale de l’article 907 du Code de procédure civile N° Lexbase : L3973LUP, qui transpose à la procédure d’appel les règles de mise en état applicables devant le tribunal judiciaire.

Le conseiller de la mise en état est donc compétent pour statuer sur les fins de non-recevoir, précision faite que cette compétence est duale. D’une part, le conseiller de la mise en état possède la même compétence que le juge de la mise en état ; d’autre part le conseiller de la mise en état possède une compétence propre qui concerne spécifiquement la procédure d’appel, c’est-à-dire l’irrecevabilité de l’appel, des conclusions des articles 909 N° Lexbase : L7240LEU et 910 N° Lexbase : L7241LEW du Code de procédure civile et des actes de procédures de l’article 930-1 N° Lexbase : L7249LE9 du même code relatif à communication électronique. On pourrait ainsi dire que la première compétence est générale (toutes les fins de non-recevoir) et l’autre spéciale (les fins de non-recevoir spécifique à la procédure d’appel).

S’agissant de la compétence générale du conseiller de la mise en état, elle pose une difficulté particulière au regard de la concurrence qui pourrait s’exercer avec la cour d’appel elle-même. En effet, si le juge de la mise en état ou le tribunal judiciaire a pris une décision sur une fin de non-recevoir, l’appel contre cette décision est dévolu à la cour d’appel et non au conseiller de la mise en état. Pour cette raison, la Cour de cassation précise que « le conseiller de la mise en état ne peut connaître des fins de non-recevoir qui ont été tranchées par le juge de la mise en état, ou par le tribunal ». Sa compétence ne concerne donc que les fins de non-recevoir générales qui sont soulevées pour la première fois en appel.

Mais la deuxième chambre civile apporte une autre limite à la compétence du conseiller de la mise en état. En effet, lorsqu’une fin de non-recevoir est soulevée la première fois en appel une contradiction peut surgir entre ce qui a été tranché sur le fond en première instance (par le tribunal) et la fin de non-recevoir soulevée devant le conseiller de la mise en état. L’exemple typique est celui de la prescription. Si le CME déclare l’action prescrite, il remet en cause ce qui a été jugé au fond en première instance, et fait ainsi obstacle au droit des parties de voir examiner leur affaire en appel. Or, le conseiller de la mise en état n’est pas compétent pour infirmer ce qui a été tranché en première instance. Pour cette raison, la Cour de cassation est d’avis que le conseiller de la mise en état ne peut connaître des fins de non-recevoir qui, même si elles n’ont pas été tranchées en première instance, pourrait avoir des conséquences si elles étaient accueillies, de remettre en cause ce qui a été jugé au fond par le premier juge. La restriction est ici beaucoup plus grande, puisqu’un grand nombre de fins de non-recevoir ont pour effet de remettre en cause la décision au fond rendue en première instance, en particulier celles qui touchent le droit d’agir. Il est donc probable que la compétence générale du conseiller de la mise en état sur les fins de non-recevoir demeure limitée à des hypothèses marginales.

VIII. Déféré - Cass. civ. 2, 2 décembre 2021, n° 20-18.312, F-B N° Lexbase : A90917D3 ; Cass. civ. 2, 4 mars 2021, pourvoi n° 19-15.695, FS-P N° Lexbase : A00264K8

Les compétences limitées de la cour d’appel saisie d’un déféré

Ces deux arrêts montrent les limites de la saisine de la cour d’appel lorsqu’elle statue sur un déféré.

Le premier concerne une hypothèse un peu particulière d’un conseiller de la mise en état qui avait statué sur la caducité d’un appel alors que sa décision dépendait de l’irrecevabilité des conclusions en raison d’un défaut de qualité à agir. Au moment où il statuait, le conseiller de la mise en état n’était pas compétent pour statuer sur cette irrecevabilité (la fin de non-recevoir n’était pas comprise dans l’article 914 du Code de procédure civile N° Lexbase : L7247LE7 limitant à l’époque la compétence du conseiller de la mise en état). La Cour de cassation affirme ainsi que la cour d’appel, saisie d’un déféré, n’a pas plus de pouvoirs que le conseiller de la mise en état. Elle ne pouvait statuer sur l’irrecevabilité des conclusions pour défaut de qualité pour agir. Il fallait donc attendre que la cour soit saisie au fond, pour qu’elle puisse trancher cette question.

Le second arrêt concerne un déféré dans lequel l’appelant soumettait à la cour une prétention qu’il n’avait pas émise devant le conseiller de la mise en état. La deuxième chambre civile pose ici un principe strict d’immutabilité du litige, entre l’instance devant le conseiller de la mise en état et le déféré devant la cour d’appel. Elle affirme ainsi que « si de nouveaux moyens de défense peuvent être opposés à l'occasion du déféré pour contester l'ordonnance du conseiller de la mise en état, la cour d'appel, statuant sur déféré, ne peut connaître de prétentions qui n'ont pas été soumises au conseiller de la mise en état ».

IX. Procédure sans représentation obligatoire - Cass. civ. 2, 16 décembre 2021, n° 19-26.090, F-B N° Lexbase : A30287GA

Dans la procédure sans représentation obligatoire, seules les parties sont convoquées à l’audience, à l’exclusion de leur conseil.

Les arrêts rendus à propos de la procédure avec représentation obligatoire devant la cour d’appel sont si nombreux que l’on oublierait presque qu’il reste une procédure sans représentation obligatoire. L’arrêt du 16 décembre 2021 la rappelle à notre souvenir.

Dans cette procédure, une fois que la déclaration d’appel a été enregistrée, le greffier avise puis convoque le défendeur à l’audience prévue pour les débats par lettre recommandée avec avis de réception. Le demandeur est, lui, « avisé par tous moyens » de l’audience. La procédure étant sans représentation obligatoire, ces convocations et avis sont envoyés aux parties et non à leurs conseils.

Dans l’arrêt commenté, le demandeur avait formé appel par l’intermédiaire de son conseil et l’avis avait été envoyé à la partie, comme le prévoit l’article 937 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1431I8I. Il s’en était suivi que le demandeur ne s’était pas présenté, ni son conseil, le jour de l’audience. Dans son pourvoi, il reprochait à la cour d’avoir statué en son absence sans s’assurer que son conseil avait bien été convoqué à l’audience.

La Cour de cassation rejette le pourvoi en affirmant qu’« aucun texte n'impose qu'un avis doit être adressé au conseil du demandeur, qui a, lui-même, été destinataire de cet avis et a, dès lors, été mis en mesure de se présenter à l'audience et de faire valoir ses droits ».

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Responsabilité

[Brèves] Dommage corporel et point de départ de la prescription de l’action subrogatoire du FGAO : application de l’article 2226 du Code civil

Réf. : Cass. civ. 2, 20 janvier 2022, n° 20-15.717, F-P+B N° Lexbase : A79577IK

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par Claire-Anne Michel, Maître de conférences, Université Grenoble-Alpes, Centre de recherches juridiques (CRJ)

Le 02 Février 2022

► L’action subrogatoire du FGAO en remboursement des sommes versées à la victime d’un dommage corporel est soumise aux dispositions de l’article 2226 du Code civil ; la prescription commence à courir à compter de la consolidation du dommage initial ou aggravé.

Contexte et faits. Point de départ de la prescription, aggravation du dommage corporel et action subrogatoire, voilà de quoi susciter du contentieux. L’ancien article 2270-1 du Code civil N° Lexbase : L2557ABC, abrogé par la loi du 17 juin 2008 laissait place au doute. En effet, il se contentait de considérer que le délai de prescription commençait « à courir à compter du dommage ou de son aggravation ». Aussi la jurisprudence avait-elle considéré d’une part que c’est à compter de la consolidation que le délai court (Cass. civ. 2, 4 mai 2000, n° 97-21.731 N° Lexbase : A3529AUA) et d’autre part que l’action subrogatoire en remboursement des sommes versées à la victime par un organisme de sécurité sociale était soumise à cette disposition (Cass. civ. 2, 17 janvier 2013, n° 11-25.723 N° Lexbase : A4849I3Y). Intégrant la première des précisions jurisprudentielles, le nouvel article 2226 du Code civil N° Lexbase : L7212IAD, issu de la loi du 17 juin 2008, précise dorénavant que ce délai commence à courir « à compter de la consolidation du dommage initial ou aggravé ». Dans son arrêt en date du 20 janvier 2022, la Cour de cassation réitère les solutions admises par le passé mais sous l’empire de la loi nouvelle. Quelques précisions factuelles méritent néanmoins d’être relevées : le dommage de la victime d’un accident de la circulation, dont l’auteur n’était pas assuré, s’était aggravé à deux reprises et le fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO) avait exercé une action subrogatoire contre l’auteur du préjudice. Toute la question tenait au point de savoir si cette action était prescrite. La cour d’appel (CA, Aix-en-Provence, 6 février 2020, n° 19/01922 N° Lexbase : A51503D4) avait fixé ce point de départ au jour des paiements effectués par le fonds.

Solutions. La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel, mais procède à une substitution de motifs. Elle rappelle d’abord que « l’action en responsabilité, née d’un événement ayant entraîné le dommage corporel, se prescrit par dix ans à compter de la date de consolidation du dommage, initial ou aggravé, de la victime directe ou indirecte des préjudice ». Ce faisant, écho est fait au principe de l’article 2226 du Code civil. Elle précise, ensuite, que « l’action subrogatoire du FGAO en remboursement des sommes versées à la victime est soumise à la même règle ». Ainsi, l’action subrogatoire est calquée sur celle de la victime. Certes non précisée dans l’article 2226 du Code civil, la précision respecte la notion d’action subrogatoire.

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Santé et sécurité au travail

[Brèves] Responsabilité civile : immunité du médecin du travail salarié ayant agi dans les limites de sa mission et n’ayant pas commis de faute intentionnelle

Réf. : Cass. soc., 26 janvier 2022, n° 20-10.610, FS-B N° Lexbase : A53237KD

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N0287BZN

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par Lisa Poinsot

Le 02 Février 2022

► Le médecin du travail, en qualité de salarié, qui agit dans les limites de sa mission et ne commet pas de faute susceptible de revêtir une qualification pénale ou de procéder à une intention de nuire, peut invoquer l’immunité dont bénéficie le préposé pour ne pas engager sa responsabilité civile personnelle dans une action exercée à son encontre par un salarié de la même entreprise.

Faits et procédure. Un salarié est placé en arrêt maladie en 2002 puis est reconnu invalide en 2005 pour être enfin mis à la retraite à 60 ans en 2010. Il demande au tribunal de grande instance (aujourd’hui tribunal judiciaire) de condamner le médecin du travail salarié au versement d’une indemnité du préjudice pour le préjudice qu’il estime avoir subi.

La cour d’appel (CA Metz, 16 novembre 2017, n° 16/01491 N° Lexbase : A2497WZI) déclare sa demande irrecevable du fait que le médecin du travail, dès lors qu’il a la qualité de salarié de l’employeur et qu’il agit sans excéder les limites de sa mission, n’engage pas sa responsabilité civile personnelle. En tant que préposé, le médecin du travail bénéficie d’une immunité, sauf en ce qui concerne les actes d’harcèlement moral et celui de violation du secret professionnel. En conséquence, les juges du fond n’ont pas retenu l’existence d’une faute intentionnelle de la part du médecin du travail pour les faits reprochés par le salarié.

Le salarié forme dès lors un pourvoi en cassation en soutenant que le médecin du travail doit répondre personnellement de ses fautes, peu important qu’il soit salarié de l’employeur, surtout lorsqu’il commet une faute intentionnelle à l’origine du dommage, ce qui écarte l’argument de l’immunité du préposé.

La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi formé par le salarié sur le fondement de l’article 1384, alinéa 5 N° Lexbase : L1016KZN, devenu 1242, alinéa 5, du Code civil N° Lexbase : L0948KZ7. Elle considère que le médecin du travail salarié peut invoquer l’immunité due au préposé sauf pour les actes d’harcèlement moral et de violation du secret professionnel. Elle ajoute que ne sont pas des fautes intentionnelles susceptibles d’écarter l’immunité du préposé, le refus délibéré d’appliquer la procédure prévue par le Code du travail relative au constat de l’inaptitude, le compérage, l’aliénation de son indépendance professionnelle ou encore le défaut de soins.

Pour aller plus loin :

  • Il est de jurisprudence constante que l’employeur, en qualité de commettant, engage sa responsabilité civile pour toute faute non intentionnelle de la part du médecin du travail salarié qui agit dans le cadre de sa mission. Il en ressort une immunité en faveur du médecin du travail salarié : v. notamment Ass. plén., 25 février 2000, n° 97-17.398 N° Lexbase : A8154AG4 et n° 97-20.152 N° Lexbase : A8155AG7, Cass. soc., 30 juin 2015, n° 13-28.201, FS-P+B N° Lexbase : A5460NM8 et Cass. civ. 1, 9 novembre 2004, n° 01-17.908, FS-P+B N° Lexbase : A8043DDL ;
  • v. ÉTUDE : L’incidence de la faute dans la réalisation de l’accident de travail ou de la maladie professionnelle, La réparation de la faute intentionnelle de l’employeur ou de l’un de ses préposés, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E3137ETD.

 

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[Textes] La dernière étape de la réforme du droit des sûretés ?

Réf. : Décret n° 2021-1887, du 29 décembre 2021 N° Lexbase : L1955MAN ; décret n° 2021-1888, du 29 décembre 2021 N° Lexbase : L1938MAZ et décret n° 2021-1889, du 29 décembre 2021 N° Lexbase : L1967MA4

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N0259BZM

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par Stéphane Piédelièvre, Professeur à l’Université de Paris-Est

Le 09 Février 2022

Mots-clefs : Code de procédure civile • Code des procédures civiles d’exécution • consultation • formalités • inscription • radiation • mesures conservatoires • registre des sûretés mobilières • renouvellement • saisie-vente • saisie immobilière.

Les décrets du 29 décembre 2021 parachèvent la réforme du droit des sûretés. Ils mettent en place l’une de ses innovations les plus marquantes, à savoir un registre unique des publicités portant sur les sûretés mobilières et même plus largement sur certaines autres opérations mobilières. Ils permettent également d’adapter certains codes aux nouvelles règles instaurées.


 

1. Compte tenu de la distinction entre le domaine de la loi et du règlement, l’aboutissement de la réforme du droit des sûretés due à l’ordonnance (ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 N° Lexbase : L8997L7D) nécessitait un complément par voie réglementaire. Il en allait notamment ainsi de l’instauration d’un registre des publicités pour les sûretés mobilières. Pour une fois, ce complément ne s’est pas trop fait attendre, puisque trois décrets d’application ont été pris le 29 décembre 2021.

Peut-on alors parler de dernière étape de la réforme du droit des sûretés ? On aimerait pouvoir le croire, mais rien n’est moins certain pour au moins deux raisons. La première tient à ce qu’il faut attendre la loi de ratification pour être certain que la partie législative du droit des sûretés soit en quelque sorte définitive. L’exemple de la réforme du droit des contrats résultant de la l’ordonnance du 10 février 2016 (ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 N° Lexbase : L4857KYK) et les modifications dues à la loi de ratification (loi n° 2018-287 du 20 avril 2018 N° Lexbase : L0250LKH) qui s’ensuivirent conduit à la prudence. La seconde est due à la possible prochaine réforme du droit de la publicité foncière qui apparaît aujourd’hui nécessaire tant la matière a vieilli et n’est plus toujours adaptée à l’informatisation de cette matière. Il est certain qu’elle aurait nécessairement un impact sur l’inscription hypothécaire. Le droit des sûretés a besoin de stabilité et on peut espérer que tel soit bientôt le cas.

2. Les trois décrets du 29 décembre 2021 interviennent uniquement en matière de sûretés réelles, plus précisément celles mobilières et celles immobilières. Schématiquement, il existe deux grandes catégories de mesures. Les premières apparaissent comme des mesures de coordination qui permettent d’adapter les dispositions d’autres codes ou d’autres lois aux nouvelles dispositions issues de la réforme des sûretés. On peut citer à titre d’exemple les nombreux remplacements de l’expression privilèges immobiliers spéciaux par celle d’hypothèque légale spéciale. Il est aussi nécessaire de tenir compte de la nouvelle numérotation figurant dans le Code civil. Le résultat n’est pas toujours atteint. On trouve toujours ça et là certaines anciennes références. Les conséquences pratiques peuvent s’avérer importantes dans la mesure où l’on vise des dispositions désormais abrogées.

Les secondes sont plus de fond et sont donc plus intéressantes. Leur objectif est de pouvoir mettre en œuvre pratiquement certaines des nouvelles dispositions dues à la réforme du 15 septembre 2021. Ces mesures apparaissent comme un support nécessaire. La plus emblématique résulte de la création du registre des sûretés mobilières et autres opérations connexes (I). Mais en réalité sont également toutes aussi importantes sont les modifications substantielles apportées à certains codes (II).

I. La création du registre des sûretés mobilières

3. Pendant longtemps, il a existé une grande différence au plan de la publicité entre les immeubles et les meubles. Pour les premiers, une seule mesure de publicité est prévue : les informations sont centralisées auprès des services de la publicité foncière [1]. Le but de la publicité foncière est d’assurer la sécurité du commerce immobilier [2]. La publicité foncière apparaît d’autant plus nécessaire que notre système juridique pose en principe que le transfert de propriété s’opère par le seul échange des consentements. La convention des parties est seulement connue des contractants et par voie de conséquence les tiers l’ignorent. Or il est indispensable que les tiers, ou plus précisément que certains d’entre eux, aient la possibilité de connaître le statut juridique d’un immeuble, ne serait-ce que pour sauvegarder leurs droits. Le décret du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière a généralisé la publication des sûretés immobilières.

Les meubles n’avaient pas fait l’objet d’une publicité similaire. La raison tenait pour partie à l’idée de leur moindre importance économique, pour partie au fait qu’ils ne bénéficient pas d’une assise fixe et intangible, pour partie à la fréquence et à la rapidité des transactions dont ils sont l’objet et pour partie au rôle que la possession, et, plus particulièrement, l’article 2276 du Code civil N° Lexbase : L7197IAS joue en cette matière [3].

Pourtant, on s’aperçoit que la publicité s’est développée, de manière diversifiée, en matière mobilière. Certaines opérations portant sur des meubles corporels ont donné en effet lieu à l’accomplissement de formalités de publicité, ce qui exclut le jeu de l’article 2276 du Code civil. Tel a été le cas pour les navires [4], les bateaux [5] et les aéronefs [6]. La conséquence en est que ces différents biens peuvent faire l’objet d’une hypothèque. Il en va de même pour les opérations de crédit-bail mobilier qui doivent être publiées sur un registre ouvert à cet effet au greffe du tribunal de commerce [7]. Le développement des sûretés mobilières sans dépossession a accéléré ce phénomène.

L’une des mesures les plus marquantes en ce domaine a résulté de l’instauration d’un gage sans dépossession par l’ordonnance du 26 mars 2006, portant réforme du droit des sûretés (ordonnance n° 2006-346 N° Lexbase : L8127HHH). Le gage sans dépossession sera opposable aux tiers par la publicité qui en est faite, conformément au décret du 23 décembre 2006 (décret n° 2006-1384 N° Lexbase : L9636HT3) qui a créé un registre spécial tenu par le greffier du tribunal de commerce [8]. Il a également été créé un registre national des gages sans dépossession destinée à informer les tiers de l’existence d’un gage. Ce fichier est tenu par le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce.

4. L’ordonnance du 15 septembre 2021 a entendu centraliser la publicité en créant un registre des sûretés mobilières. Selon le rapport fait au Président de la République pour l’ordonnance du 15 septembre 2021, « les dispositions relatives à la publicité des sûretés mobilières, aujourd'hui inscrites dans différents codes (Code de commerce, Code des douanes, Code des transports, Code général des impôts, Code de la Sécurité sociale et Code de la construction et de l'habitation) et à différents niveaux de normes, sont harmonisées, ce qui permettra la mise en place par décret d'un registre unique des sûretés mobilières, conformément aux meilleurs standards internationaux ».

Cette règlementation relevait du pouvoir règlementaire. Tel est l’objet du décret n° 2021-1887 du 29 décembre 2021. Il a vocation à s’appliquer à la plupart des sûretés mobilières. Parmi les rares exceptions, on citera le gage portant sur les véhicules automobiles. Selon l’article 2338, alinéa 2, du Code civil N° Lexbase : L1165HIY, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2023, « sauf s’il est soumis à l’article 2342 N° Lexbase : L0202L8Y, le gage portant sur un véhicule terrestre à moteur ou une remorque immatriculés est publié par une inscription sur un registre tenu par l’autorité administrative dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État. L’inscription d’un tel gage fait obstacle à toute nouvelle inscription sur le même véhicule ».

Selon l’article 15, I, alinéa 1er du décret du 29 décembre 2021, ses dispositions entreront en vigueur que le 1er janvier 2023. Jusque-là les dispositions du décret du 23 décembre 2006 resteront en vigueur. L’article 15, I, alinéa 2 prévoit que celles relatives aux hypothèques maritimes et saisie de navires, aux inscriptions des droits réels sur les bateaux, à certaines dispositions relatives au gage sans dépossession notamment, entrent en vigueur dès le 1er janvier 2022.

5. Comme en matière de sûretés immobilières, la publication des sûretés mobilière sera souvent attributive de rang. Elle permettra de trancher certains conflits entre différentes garanties. On envisagera successivement l’inscription au registre des sûretés mobilières (A), la radiation des inscriptions (B), la consultation de ce registre (C) et quelques hypothèses particulières (D).

A. L’inscription au registre des sûretés mobilières

6. Sans être un décalque de l’inscription hypothécaire, l’inscription au registre des sûretés mobilières en emprunte certaines de ses caractéristiques. Pour produire leurs pleins effets, les différentes sûretés immobilières doivent faire l’objet de mesures de publicité. Comme l’avait indiqué Becqué : « l’inscription seule vivifie l’hypothèque » [9] . Il en ira de même pour les sûretés mobilières. Une autre caractéristique de l’inscription hypothécaire tient au formalisme qui est omniprésent. Avant de préciser le registre compétent (), les formalités nécessaires (), il importe de préciser les sûretés concernées (). Le coût de cette inscription sera fixé par un arrêté ministériel.

1°) Les sûretés concernées

7. Le décret du 29 décembre 2021 ne pose pas de catégories générales soumises à inscription auprès du registre des sûretés mobilières. Il préfère procéder par la technique de l’énumération qui présente l’avantage de la précision, mais qui présente l’inconvénient du risque toujours possible d’un oubli et celui d’une absence de possibilité d’évolution. Le contenu de cette énumération fait ressortir que l’inscription ne concerne pas uniquement les sûretés mobilières, mais qu’elle est également nécessaire pour d’autres opérations.

Selon l’article R. 521-2 du Code de commerce N° Lexbase : L5187MAD, « le registre régi par le présent chapitre assure la publicité :
1° Des gages sans dépossession à l’exception des gages mentionnés au second alinéa de l’article 2338 du Code civil ;
2° Des nantissements conventionnels de parts de sociétés civiles, de société à responsabilité limitée et de société en nom collectif ;
3° Du privilège du vendeur de fonds de commerce ;
4° Du nantissement du fonds de commerce ;
5° Des déclarations de créances en application de l’article L. 141-22 du Code de commerce N° Lexbase : L1124LBA ;
6° Des hypothèques maritimes à l’exclusion de celles qui portent sur les navires enregistrés au registre mentionné à l’article L. 5611-1 du Code des transports N° Lexbase : L6537ING ;
7° Des actes de saisie sur les navires à l’exclusion de ceux qui portent sur les navires enregistrés au registre mentionné à l’article L. 5611-1 du Code des transports ;
8° De tout acte ou jugement translatif, constitutif ou déclaratif de propriété ou de droits réels portant sur un bateau au sens de l’article L. 4111-1 du Code des transports N° Lexbase : L7548INU ;
9° Des hypothèques fluviales ;
10° Des actes de saisie de bateaux ;
11° Parmi les mesures d’inaliénabilité décidées par le tribunal en application des articles L. 626-14 N° Lexbase : L3327IC9 et L. 642-10 N° Lexbase : L3410ICB du présent code, de celles qui, le cas échéant, portent sur un bien ayant préalablement fait l’objet d’une inscription au présent registre conformément aux dispositions du premier alinéa des articles R. 626-25 N° Lexbase : L0948HZ7 et R. 642-12 N° Lexbase : L9348IC9 du même code ou, à défaut, de celles pour lesquelles les débiteurs sont inscrits au registre du commerce et des sociétés ainsi que de celles qui portent sur des biens d’équipement en application des articles R. 626-26 N° Lexbase : L0949HZ8 et R. 642-13 N° Lexbase : L9259ICW du même code ;
12° Des contrats portant sur un bien qui ont fait l’objet d’une publicité, conformément aux dispositions de l’article L. 624-10 du présent code N° Lexbase : L5569HDM et dans les conditions fixées par l’article R. 624-15 du même code N° Lexbase : L0915HZW ;
13° Du privilège du Trésor ;
14° Des privilèges de la Sécurité sociale et des régimes complémentaires prévus à l’article L. 243-5 du Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L0522L8T ;
15° Des warrants agricoles ;
16° Des opérations de crédit-bail en matière mobilière ».

2°) Le registre compétent

8. L’article R. 521-1 du Code de commerce N° Lexbase : L0736HZB dispose qu’« il est institué au niveau de chaque greffe compétent dans les conditions définies par l’article R. 521-5 N° Lexbase : L5190MAH, un registre dénommé “registre des sûretés mobilières et autres opérations connexes” dont l’objet est de centraliser leurs inscriptions ». L’article R. 521-4 N° Lexbase : L5189MAG dispose que ce registre est tenu sous forme électronique. Il est fait usage de la signature électronique qualifiée selon les exigences du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017 relatif à la signature électronique N° Lexbase : L9036LGR.

Reste à déterminer le greffier compétent. Il s’agit selon les cas de celui du tribunal de commerce, de celui du tribunal judiciaire statuant commercialement ou du tribunal mixte de commerce dans le ressort duquel le débiteur, ou le propriétaire du bien grevé s'il n'est pas le débiteur, est immatriculé à titre principal au registre du commerce et des sociétés.

Si le débiteur ou le propriétaire du bien grevé s'il n'est pas le débiteur n'est pas soumis à l'obligation d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés, l'inscription est portée sur le registre dans le ressort duquel est situé son siège ou à défaut son établissement principal ou, s'il n'existe ni siège, ni établissement principal, son lieu d'exercice de l'activité ou l'adresse de l'entreprise fixée au local d'habitation. S'il s'agit d'une personne physique dont la dette garantie a été contractée à titre non professionnel, l'inscription est portée sur le registre dans le ressort duquel est situé son domicile personnel.

À défaut d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés, de siège, d'établissement principal, de lieu d'exercice de l'activité ou de domicile personnel sur le territoire français, le greffier compétent est celui du tribunal de commerce de Paris.

3°) Les formalités

9. Il y a lieu de dissocier les formalités initiales (a), de celles modificatives (b).

a) Les formalités initiales

Comme en matière hypothécaire, la formalité d’inscription au registre des sûretés mobilières nécessite la remise d’un bordereau en cas de remise ou de transmission par voie postale ou électronique. Si le bordereau est établi sous format papier, deux exemplaires doivent être transmis.

L’article R. 521-6 du Code de commerce N° Lexbase : L5191MAI indique qu’il comprend les informations suivantes :
1° La catégorie d'inscription parmi celles énumérées à l'article R. 521-1 N° Lexbase : L0736HZB et sa date de constitution ou d'effet ;
2° La désignation du créancier, du débiteur ou du propriétaire du bien grevé s'il est différent du débiteur et leurs éléments d'identification, soit :
- pour une personne physique, ses prénoms, nom et adresse de l'établissement principal ou à défaut, du lieu d'exercice de l'activité ou l'adresse de l'entreprise fixée au local d'habitation, ou de son domicile personnel s'il s'agit d'une personne physique dont la dette garantie a été contractée à titre non professionnel ainsi que le cas échéant, son numéro unique d'identification complété, s'il y a lieu, par la mention RCS suivie du nom de la ville où se trouve le greffe où elle est immatriculée ;
- pour une personne morale, sa forme, sa dénomination sociale, l'adresse de son siège social ou à défaut, celle de l'établissement principal, et son numéro unique d'identification complété, s'il y a lieu, par la mention RCS suivie du nom de la ville où se trouve le greffe où elle est immatriculée ;
- pour le privilège de la Sécurité sociale visé à l'article L. 243-5 du Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L0522L8T, également, le numéro de matricule d'employeur ou de travailleur indépendant du débiteur, la référence de la créance concernée par l'inscription et la désignation et l'adresse de l'organisme créancier ;
- pour le privilège du Trésor donnant lieu à inscription au sens des articles 1929 quater du Code général des impôts (N° Lexbase : L8657LQP) et 379 bis du Code des douanes (N° Lexbase : L8776LQ4), la dénomination du poste comptable ou service assimilé gestionnaire et son adresse ;
- pour les opérations de crédit-bail en matière mobilière, les éléments d'identification concernant le crédit-bailleur et le crédit-preneur ; pour les contrats mentionnés à l'article R. 624-15, les éléments d'identification concernant le débiteur et le propriétaire du bien ;
3° L'élection de domicile dans un État membre de l'Union européenne par le créancier, la déclaration d'adresse valant élection de domicile pour les créanciers résidant au sein de l'Union européenne ;
4° En présence d'une créance garantie, le montant de cette créance garantie en principal ou de la somme des loyers pour les opérations de crédit-bail en matière mobilière, la date de son exigibilité ou les éléments permettant de la déterminer, le cas échéant, l'indication du taux des intérêts ; pour les créances futures, les éléments permettant de les déterminer ; pour le privilège du Trésor, le montant des sommes dues par un redevable à un même poste comptable ou service assimilé dans les conditions des articles 1929 quater du Code général des impôts et 379 bis du Code des douanes ; pour le privilège de la Sécurité sociale, le montant des sommes dues à l'organisme créancier ; pour le privilège du vendeur du fonds de commerce, les prix de la vente, établis distinctement pour le matériel, les marchandises et les éléments incorporels du fonds ;
5° La désignation du bien grevé avec l'indication des éléments permettant de l'identifier, notamment sa nature, son lieu de situation, sa marque, son numéro de série ou d'immatriculation. Lorsqu'il s'agit d'un ensemble de biens présents ou futurs, leur nature, qualité, et quantité.
Pour les sociétés dont les parts sociales sont nanties, les informations mentionnées au 2° s'agissant des personnes morales ainsi que le nombre de parts sociales nanties, leur valeur nominale et le cas échéant, l'indication que le créancier nanti a été agréé par la société ou les associés.
Lorsqu'il s'agit d'un fonds de commerce, sa désignation et celle de ses succursales avec l'indication précise des éléments qui les constituent et sont compris dans la vente ou le nantissement, la nature de leurs opérations et leur siège, sous réserve de tous autres renseignements propres à les faire connaître ; si la vente ou le nantissement s'étend à d'autres éléments du fonds de commerce que l'enseigne, le nom commercial, le droit au bail et la clientèle, ces éléments sont nommément désignés avec notamment la mention, pour les droits de propriété intellectuelle, des références du titre concerné ;
Le 5° n'est pas applicable au privilège du Trésor ni au privilège de la Sécurité sociale ;
6° Pour les gages sans dépossession, la catégorie à laquelle le bien affecté en garantie appartient, par référence à une nomenclature fixée par arrêté du garde des Sceaux, ministre de la Justice ;
7° Le cas échéant, la mention de l'existence d'un pacte commissoire, de l'interdiction pour le constituant d'aliéner les choses fongibles gagées dans les conditions prévues par l'article 2342 du Code civil, de l'indication qu'elles peuvent être déplacées, de l'action résolutoire visée au deuxième alinéa de l'article L. 141-6 du Code de commerce ou de toute autre disposition contractuelle particulière.
Les modalités d'établissement du bordereau sont fixées par arrêté ».

10. Des formalités supplémentaires sont prévues. Le requérant est tenu de joindre au bordereau l'original de l'acte constitutif de la sûreté s'il est sous seing privé, l'expédition s'il est authentique ou la copie de ces justificatifs. En cas de privilège du vendeur de fonds commerce, l'acte à remettre doit être l'original de l'acte de cession du fonds de commerce s'il est sous seing privé ou l'expédition s'il est authentique. Toutefois, cette règle ne s’applique pas aux déclarations de créance en cas d'apport du fonds de commerce à une société, ni aux privilèges du Trésor et de la Sécurité sociale ni aux opérations de crédit-bail en matière mobilière, ni aux contrats mentionnés à l'article L. 624-10.

L’article R. 521-9 du Code de commerce N° Lexbase : L5102MA9 envisage l’hypothèse où la cession d’un fonds de commerce contient des droits de propriété industrielle et que les nantissements de ces fonds comportent également de tels droits. En ce cas, le greffier délivre « un certificat d'inscription qui comprend les mentions suivantes :
1° La nature, la date et le numéro d'ordre de l'inscription effectuée au greffe ;
2° La forme et la date de l'acte de vente ou de l'acte constitutif du nantissement ;
3° L'identité et l'adresse du créancier nanti et du débiteur ;
4° La désignation du fonds de commerce ainsi que la nature et les références des titres de propriété intellectuelle concernés.
L’inscription à l'Institut national de la propriété industrielle du privilège résultant de la vente ou de la cession ou du nantissement visés au premier alinéa s'effectue par report du certificat d'inscription selon la nature des titres concernés :
1° Au registre national des brevets, au registre national spécial des logiciels ou au registre national des marques, dans les conditions prévues par les textes qui leur sont applicables ;
2° Au registre national des dessins et modèles, à la demande de l'une des parties à l'acte ».

11. Lorsqu’il reçoit les pièces, le greffier donne un numéro d’ordre à la demande d’inscription qui lui a été faite. Puis, il vérifie le caractère complet et régulier du dossier. Si tel est le cas, il procède à l’inscription en reportant sur le registre les informations figurant sur le bordereau ainsi que le numéro d’ordre et la date de l’inscription.  Cette inscription doit être effectuée dans un délai d’un jour franc ouvrable à compter de la réception de la demande. Si la complexité du dossier l’exige, le délai peut être porté à cinq jours. Le requérant doit alors en être informé. Il remet alors au requérant un récépissé comportant les mêmes informations que celles qu’il a inscrites. Si deux bordereaux avaient été déposés, il en restitue un.
L’inscription prend effet à la date à laquelle elle a été régulièrement accomplie.

12. L’inscription a une durée de vie limitée. Elle est en principe fixée à cinq ans. Elle peut toutefois être renouvelée, à condition que cette formalité ait été effectuée avant l’échéance prévue. Si tel est le cas, elle continue l’inscription initiale. Si tel n’est pas, l’inscription initiale est alors éteinte et elle disparaîtra. Le requérant pourra toujours reprendre une nouvelle inscription, mais celle-ci prendra effet uniquement au jour où elle aura été régulièrement accomplie.

L’article R. 521-12 N° Lexbase : L5105MAC prévoit que l’inscription produit effet dix ans pour le privilège du vendeur de fonds de commerce, le nantissement du fonds de commerce, les hypothèques maritimes et fluviales, quatre ans pour le privilège du Trésor, deux ans et six mois pour le privilège de la Sécurité sociale. L'inscription n'est pas renouvelable et la durée fixée par la décision du tribunal, pour la mesure d'inaliénabilité.

13. Il est possible que le greffier considère que le requérant ne lui a pas transmis un dossier complet. Dans ce cas, il refuse d’effectuer la formalité. Lorsque la demande du requérant est incomplète, dans le délai d’un jour franc, le greffier réclame les informations ou pièces manquantes qui sont fournies dans un délai de quinze jours à compter de cette réclamation. À la réception de ces informations ou pièces, le greffier procède à l'inscription dans le même délai.

En cas d’absence de régularisation ou de régularisation incomplète, le greffier prend une décision de refus d’inscription. Celle-ci doit être motivée, c’est-à-dire qu’elle doit indiquer les raisons du refus. Sa décision est alors notifiée au requérant dans un délai d’un jour franc par la remise contre récépissé, ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Elle peut également être effectuée par voie dématérialisée selon des modalités fixées par arrêté et à condition que le destinataire de la notification ait expressément consenti à ce mode de communication.

14. Le requérant bénéficie d’un recours contre la décision du greffier de refus d'inscription, de modification ou de radiation. Il est porté devant le président du tribunal dont dépend le greffier qui a opposé le refus. Ce recours est formé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée au greffe dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision. Il doit être motivé et comporter les pièces nécessaires. La même procédure s’applique pour les éventuelles autres contestations.

Le président de la juridiction ou le juge délégué à cet effet statue par une ordonnance qui est exécutoire de droit à titre provisoire. Elle est notifiée au requérant par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. L'acte de notification mentionne le délai et les modalités du recours ouvert à son encontre. Elle est susceptible d'appel dans un délai de quinze jours.
L'appel de l'ordonnance est formé, instruit et jugé comme en matière gracieuse. Toutefois, les parties sont dispensées du ministère d'avocat. Le greffier de la cour d'appel adresse une copie de l'arrêt au greffier chargé de la tenue du registre qui exécute la décision.

b) Les formalités modificatives

15. Il est toujours possible pour le requérant de modifier l’inscription initiale qu’il a prise. La procédure est voisine de celle existant pour l’inscription initiale. Selon l’article R. 521-13 du Code de commerce N° Lexbase : L5099MA4, elle « est formée auprès du greffier qui a procédé à l'inscription initiale, même en cas de déplacement du lieu d'immatriculation, du siège, de l'établissement principal, du lieu d'exercice de l'activité ou l'adresse de l'entreprise fixée au local d'habitation, ou du domicile personnel hors du ressort du tribunal dont dépend le greffier compétent au moment de l'inscription initiale ». Là encore elle s’opère par la remise de bordereaux et une nouvelle fois il est nécessaire de présenter l’acte. Cette dernière formalité n’est toutefois pas nécessaire en cas de renouvellement de l’inscription initiale. Une formalité supplémentaire est nécessaire en cas d’inscription auprès de l’INPI.

Si le dossier est complet, le greffier procède à la formalité modificative, en reportant sur le registre les modifications inscrites sur les bordereaux ainsi que la date de la formalité modificative. Il délivre au requérant un récépissé récapitulant les modifications ainsi que le numéro d'ordre de l'inscription initiale, la date de la formalité ou, lorsque deux bordereaux ont été remis, il restitue le bordereau restant sur lequel il appose le numéro de la formalité et sa date. L'inscription modificative prend effet à la date à laquelle elle a été régulièrement accomplie.

B. La radiation

16. Comme en matière hypothécaire, la durée de l’inscription sur le registre des sûretés mobilières est nécessairement temporaire, ne serait-ce que pour avoir des informations fiables. Cette durée est fixée par le requérant en tenant compte de l’article R. 521-12 du Code de commerce N° Lexbase : L5105MAC. Le principe est de cinq ans maximum. On rappellera également que le renouvellement de l’inscription est possible.

L’extinction peut résulter de l’écoulement du temps. On se trouve dans un système similaire à celui de la péremption en matière hypothécaire. Cependant, l’article R. 521-24 N° Lexbase : L5115MAP prévoit que le greffier radie d’office les inscriptions qui n’ont pas été renouvelées dans les délais légaux.  L’inscription disparaîtra alors. Le décret du 29 décembre 2021 a également prévu un système de radiation des inscriptions.

17. La procédure de radiation est à certains égards assez proche de celle qui existait lors de l’inscription sur le registre des sûretés mobilières. La demande de radiation d'inscription est formée auprès du greffier qui a procédé à l'inscription initiale même en cas de déplacement du lieu d'immatriculation, du siège, de l'établissement principal, du lieu d'exercice de l'activité ou l'adresse de l'entreprise fixée au local d'habitation, ou du domicile personnel hors du ressort du tribunal dont dépend le greffier compétent au moment de l'inscription initiale. Là encore, la formalité s’opère par la remise de bordereaux.

Il appartient au créancier inscrit qui sollicite la radiation d’en apporter la preuve. Hormis cette hypothèse, le requérant en justifie par la preuve de l'accord des parties, par une décision de justice passée en force de chose jugée ou par l'acte constatant la vente du bien grevé en application du livre II du Code des procédures civiles d'exécution, accompagné d'un récépissé justifiant du paiement du prix et d'une copie de l'extrait des inscriptions au registre faisant apparaître les inscriptions sur le bien, communiqué par l'huissier de justice chargé de la procédure de saisie mobilière. Est produit l'original de l'acte ou une expédition de la décision de justice passée en force de chose jugée ou la copie de ces justificatifs.

18. Lorsque le dossier est complet, le greffier procède à la radiation de l'inscription en mentionnant la formalité et sa date en marge de l'inscription. Il délivre au requérant un récépissé récapitulant les informations radiées ainsi que le numéro d'ordre de l'inscription initiale, la date de la formalité ou, lorsque deux exemplaires du bordereau ont été remis, il restitue le bordereau restant sur lequel il appose le numéro de la formalité et sa date. La radiation prend effet à la date à laquelle elle a été régulièrement accomplie.

L’article R. 521-23 dispose que l’inscription radiée ou périmée n’apparaît plus dans les résultats des demandes de consultation des registres. Cette solution est opportune pratiquement. Elle diffère de ce qui existe en matière hypothécaire, ce qui nuit à la lisibilité des états.

C. La consultation

19. Tout système de publicité joue nécessairement un rôle d’information. Le registre des sûretés mobilières ne déroge pas à ce principe. Les tiers doivent pouvoir avoir connaissance des différents renseignements relativement à un immeuble déterminé. Toute personne a la possibilité de connaître les différentes informations qui ont été publiées, sans avoir à justifier d’un intérêt particulier. Mais en pratique, les requérants ont presque toujours un intérêt à connaître la situation juridique d’un meuble.

Cette information se conçoit de deux manières : les tiers vont consulter directement les différents documents ou ils demandent des copies ou des extraits des différents actes publiés. Le droit français des sûretés mobilières, comme d’ailleurs celui de la publicité foncière a choisi le second système, celui des réquisitions écrites. La publicité est donc quérable.

Pour les sûretés immobilières, l’article 2443 du Code civil N° Lexbase : L0305L8S dispose que « les services chargés de la publicité foncière sont tenus de délivrer, à tous ceux qui le requièrent, copie ou extrait des documents, autres que les bordereaux d'inscription, qui y sont déposés dans la limite des cinquante années précédant celle de la réquisition, et copie ou extrait des inscriptions subsistantes ou certificat qu'il n'existe aucun document ou inscription entrant dans le cadre de la réquisition ». Son alinéa 2 ajoute qu’ils sont également tenus de délivrer sur réquisition, dans un délai de dix jours, des copies ou extraits du fichier immobilier ou certificat qu'il n'existe aucune fiche entrant dans le cadre de la réquisition.

20. Le décret du 29 janvier 2021 prévoit également la possibilité de connaître l’ensemble des formalités figurant sur le registre des sûretés immobilières. L’article R. 521-1 du Code de commerce prévoit qu’il est institué « sous la responsabilité du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce, un portail national accessible par le réseau internet permettant la consultation des informations inscrites dans les registres des sûretés mobilières tenus localement par chaque greffier ». Avant le 31 mars de chaque année, le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce remet au ministre de la Justice un rapport annuel de transparence relatif au fonctionnement du portail. Ce rapport contient des informations de nature économique, technique et opérationnelle dont le contenu sera précisé par arrêté du ministre de la Justice.

Ce portail est consultable gratuitement. Il permet de télécharger un document faisant apparaître l'absence d'inscription ou, en présence d'inscriptions, les informations inscrites dans les registres des sûretés mobilières tenus par chaque greffier ainsi que l'identification des greffiers qui tiennent ces registres.

21. L’article R. 521-32 N° Lexbase : L5198MAR prévoit que « pour la consultation, le requérant indique les éléments suivants :
1° Concernant le propriétaire du bien visé au 5° de l'article R. 521-6 ou, à défaut de bien, le débiteur :
a) S'il s'agit d'une personne physique commerçante : ses nom, prénom et le numéro unique d'identification complété par la mention RCS suivie du nom de la ville où se trouve le greffe où elle est immatriculée ;
b) S'il s'agit d'une personne physique non commerçante ou d'un constituant à titre non professionnel : ses nom, prénom et son adresse pertinente si elle est connue et, s'il y a lieu, son numéro unique d'identification ;
c) S'il s'agit d'une personne morale : sa forme, sa dénomination sociale, l'adresse de son siège ainsi que, le cas échéant, le numéro unique d'identification complété, s'il y a lieu, par la mention RCS suivie du nom de la ville où se trouve le greffe où elle est immatriculée ;
Pour les opérations de crédit-bail en matière mobilière, le requérant indique les informations requises concernant le crédit-preneur. Pour les contrats mentionnés à l'article L. 624-10, le requérant indique les informations requises concernant le débiteur.
2° Concernant l'opération : la catégorie d'inscription parmi celles listées à l'article R. 521-1 ;
3° Pour les gages sans dépossession : la catégorie à laquelle le bien appartient par référence à la nomenclature prévue au 6° de l'article R. 521-6.
Chaque consultation ne peut porter que sur une même personne et une ou plusieurs catégories d'inscription.
Pour la consultation des inscriptions portant sur les bateaux et les navires, le requérant peut renseigner uniquement le numéro d'identification ou d'immatriculation du bateau ou navire ».

Le greffier auprès duquel une des inscriptions mentionnées a été prise délivre sur simple demande un état mentionnant les numéros de ces inscriptions qu'il constate ainsi que leur date et le lieu de leur inscription. Cet état est daté et signé du greffier. Le greffier dans le registre duquel se trouve une ou plusieurs des inscriptions délivre, sur simple demande, l'état certifié des inscriptions inscrites à son registre mentionnant pour chacune toutes les informations inscrites. Chacune des demandes ne peut porter que sur une seule personne et une ou plusieurs catégories d'inscription parmi celles qui sont mentionnées à l'article R. 521-1.

D. Les hypothèses particulières

22. Quelques dispositions spécifiques ont été prévues notamment pour le warrant agricole (), pour les bateaux () et pour les navires ().

1°) Le warrant agricole

Le warrant agricole a été créé par une loi du 18 juillet 1898 plusieurs fois modifiée. Ces textes ont été intégrés dans le Code rural et de la pêche maritime [10]. Le principe est que les règles applicables à la publicité des sûretés mobilières s’appliquent à lui sous réserve de quelques dispositions spécifiques.

23. L’article L. 342-2 du Code rural et de la pêche maritime N° Lexbase : L0699LT3 prévoit que l’agriculteur, lorsqu'il ne sera pas propriétaire ou usufruitier de son exploitation, devra, avant tout emprunt aviser le propriétaire du fonds loué de la nature, de la valeur et de la quantité des marchandises qui doivent servir de gage pour l'emprunt, ainsi que du montant des sommes à emprunter. Cet avis devra être donné au propriétaire, usufruitier ou à leur mandataire légal désigné par l'intermédiaire du greffier du tribunal judiciaire dans le ressort duquel se trouvent les objets warrantés. La lettre d'avis sera remise au greffier, qui devra la viser, l'enregistrer et l'envoyer sous forme de pli d'affaires recommandé avec accusé de réception.

L’article R. 342-2 de ce même code N° Lexbase : L5211MAA indique que la lettre d'avis est remise par l'agriculteur au greffier du tribunal de commerce compétent pour procéder à l'inscription du warrant. Elle est remise ou transmise par voie postale ou électronique. Lorsque la lettre est établie sous format papier, il en est dressé deux exemplaires. À réception, le greffier attribue un numéro d'ordre à la lettre d'avis et l'inscrit au registre avec les informations figurant sur la lettre d'avis. Il adresse par lettre recommandée avec accusé de réception à l'agriculteur soit un récépissé daté contenant les informations contenues dans la lettre d'avis, soit, si la lettre a été établie sous format papier, une des lettres d'avis qu'il date et qu'il signe, en y apposant le numéro d'ordre.

Le greffier adresse une copie de ces documents, sous les mêmes formes, au propriétaire du fonds et à son usufruitier, ou à leur mandataire légal, à l'adresse indiquée par l'agriculteur. Le propriétaire de l'exploitation, son usufruitier ou leur mandataire légal forme opposition par lettre avec accusé de réception auprès du greffier du tribunal de commerce qui a envoyé la lettre d'avis. Dans son opposition, il mentionne le numéro d'ordre. Le greffier mentionne la date de l'opposition en marge de l'inscription de l'avis donné. Si le warrant n'a pas été publié dans les cinq années qui suivent la date d'envoi de la lettre d'avis, la mention de cette lettre et celle de l'opposition ou de l'absence d'opposition sont radiées du registre.

24. Lorsqu'il demande l'inscription du warrant, l'agriculteur communique au greffier le numéro d'ordre attribué à la lettre d'avis. Le greffier procède à l'inscription du warrant. Il mentionne, en plus des informations de droit commun de l'article R. 521-6 du Code de commerce, le cas échéant la date de l'envoi de l'avis au propriétaire ou usufruitier ainsi que l'opposition ou la non-opposition de leur part comme il est dit à l'article L. 342-4 ou le consentement du prêteur à ce qu'aucun avis ne soit donné au propriétaire ou usufruitier et la dispense accordée par l'emprunteur à l'escompteur et aux réescompteurs de donner avis de l'endossement réalisé à leur bénéfice. Lorsqu'il a été donné avis dans les conditions de l'article R. 342-2, le numéro d'ordre attribué à la lettre d'avis devient celui qui est attribué au warrant.

2°) Les bateaux

25. Pour les bateaux, le principe est que les règles applicables à la publicité des sûretés mobilières s’appliquent à lui sous réserve de quelques dispositions spécifiques. Les demandes d'inscription sont formées auprès du greffier du ressort du lieu d'immatriculation du bateau. Pour les hypothèques et les saisies, lorsque les bateaux sont en construction, elles sont formées auprès du greffier du ressort du lieu de la déclaration de mise en construction du bateau. La demande d'inscription d'un acte de saisie d'un bateau est formée par le saisissant. Celui-ci remet ou transmet une copie certifiée conforme par l'huissier du procès-verbal de saisie au greffier qui en transcrit le contenu sur le registre.

En cas de changement de greffe territorialement compétent, les inscriptions qui ne sont pas supprimées sont reportées d'office, avec mention de leurs dates respectives au registre tenu par le greffier nouvellement compétent. Celui-ci annexe à ces inscriptions les pièces qui y étaient rattachées.

26. Selon l’article R. 4124-2 du Code des transports N° Lexbase : L4386IWD, « la demande d'inscription d'un acte ou jugement translatif, constitutif ou déclaratif de propriété ou de droits réels autres que l'hypothèque est formée par le propriétaire du bateau. Il est formé une demande pour chaque bateau. Les informations requises à l'article R. 521-6 du Code de commerce correspondent aux informations suivantes :
1° Le nom ou la devise du bateau ;
2° Le numéro et la date de l'immatriculation du bateau ;
3° La date et la nature de l'acte ou de la décision de justice et, la désignation, si l'acte est authentique, de l'officier public, ou, s'il s'agit d'une décision de justice, de la juridiction dont elle émane ;
4° L'objet et les principaux éléments de l'acte ou de la décision de justice ;
5° Les nom, prénoms, domicile et nationalité des parties à l'acte ou à la décision de justice. S'agissant du propriétaire, les informations permettant son identification sont celles qui sont mentionnées au 2° et au 3° de l'article R. 521-6 du Code de commerce ».

L'acte ou la décision de justice à joindre au bordereau en application de l'article R. 521-7 du Code de commerce peut consister en un extrait de ces derniers s'il concerne plusieurs bateaux. Doit également être joint au bordereau un extrait du registre d'immatriculation ou le certificat d'immatriculation du bateau ou, s'il s'agit d'un bateau en construction, le récépissé en tenant lieu.

Le greffier reporte également sur le registre, les indications essentielles figurant sur l'extrait du registre d'immatriculation ou le certificat d'immatriculation produit à l'appui de l'inscription requise, soit le port en lourd du bateau, le type auquel il appartient, la puissance de la machine motrice ou, s'il s'agit d'un bateau en construction, les énonciations portées au récépissé de la déclaration.

3°) Les navires

27. Le décret du 29 septembre 2021 modifie certaines règles relatives aux hypothèques maritimes. Là encore, le principe est que les règles applicables à la publicité des sûretés mobilières s’appliquent à lui sous réserve de quelques dispositions spécifiques.

L'inscription initiale est portée dans le registre tenu par le greffier dans le ressort du lieu d'enregistrement du navire. Les demandes de formalité modificative et de radiation sont formées auprès du greffier qui a procédé à l'inscription initiale. Lorsque le navire est en construction, les demandes d'inscriptions d'hypothèque et de saisie sont formées auprès du greffier du ressort du lieu de l'enregistrement temporaire du navire. Il est formé une demande pour chaque navire.

Pour les navires enregistrés sur le registre dénommé « registre international français », les demandes d'inscription initiale, de modification et de radiation sont formées auprès du guichet unique du registre international français. En cas de transfert d'inscriptions d'hypothèque maritime ou de saisie de navire du registre international français vers le registre des sûretés mobilières, le guichet unique du registre international français en avise les créanciers inscrits ou saisissants. Il en avise également le greffier du tribunal de commerce compétent et lui transmet les bordereaux des inscriptions d'hypothèque maritime ou du procès-verbal de saisie du navire qui ne sont pas radiées. Il joint à son avis les justificatifs mentionnés aux articles R. 5114-25-1 du Code des transports N° Lexbase : L5334MAS et R. 521-7 et R. 521-14 N° Lexbase : L5106MAD du Code de commerce.

À réception, le greffier procède aux inscriptions dans le registre des sûretés mobilières. Pour chaque inscription, il attribue un numéro d'ordre et il reporte sur le registre les informations inscrites sur les bordereaux en ce compris les dates de l'inscription initiale et des éventuelles inscriptions modificatives ainsi que le numéro d'ordre. Il y annexe les justificatifs qui lui ont été remis par le registre international français.

En cas de transfert d'inscriptions d'hypothèque maritime ou de saisie de navire du registre des sûretés mobilières vers le registre international français, le greffier du tribunal de commerce accomplit les diligences réalisées par le guichet unique du registre international français prévues aux deux premiers alinéas du présent article. Le guichet unique du registre international français accomplit les diligences réalisées par le greffier du tribunal de commerce.

II. Les modifications substantielles apportées à certains codes

28. Selon ses auteurs, le décret n° 2021-1888 du 29 décembre 2021 pris en application de l’ordonnance du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés tire les conséquences au niveau réglementaire des modifications apportées dans le cadre de cette réforme s'agissant notamment de la réalisation des sûretés mobilières. Certaines modifications ne sont pas substantielles et n’amènent pas de commentaires particuliers. Il s’agit par exemple de faire disparaître le mot privilège purement et simplement soit de le remplacer par l’expression hypothèque légale spéciale. D’autres sont plus intéressantes dans la mesure où elles sont substantielles. Il en est ainsi de certaines modifications du Code de procédure civile (A) ou du Code des procédure civile d’exécution (B). L’article 7 du décret précise les dates d’entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions. Le principe est qu’elles sont entrées en vigueur à compter du 1er janvier 2022. Toutefois, celles relatives aux procédures de saisies entreront en vigueur à compter du 1er janvier 2023. De nombreuses dispositions s’appliqueront aux procédures engagées à compter de leur entrée en vigueur.

A. Les modifications du Code de procédure civile

29. Les modifications du Code de procédure civile concernent le chapitre jusque-là intitulé « La purge des hypothèques et privilèges par le tiers détenteur ». Il est rebaptisé « La purge des hypothèques par le tiers acquéreur ». Le décret a ici tenu compte de la disparition des privilèges immobiliers spéciaux et du remplacement de l’expression classique de tiers détenteur par celle de tiers acquéreur.

Certaines nouvelles dispositions sont des reprises de textes figurant initialement dans le Code civil, mais qui ont fait l’objet d’un transfert dans le Code de procédure civile en raison de leur nature réglementaire. Tel est le cas de l’ancien article 2478 du Code civil N° Lexbase : L6552HWL en grande partie repris dans l’article 1281-13 du Code de procédure civile N° Lexbase : L4493MAN.

Selon cette disposition, « Le tiers acquéreur fait procéder à la notification prévue à l’article 2464 du Code civil N° Lexbase : L0330L8Q par acte d'huissier de justice, aux domiciles élus par les créanciers dans leurs inscriptions.
Il annexe à l'acte :
1° Un extrait de son titre, contenant la date et la nature de l'acte, l'identité du vendeur ou du donateur, la nature et la situation de l'immeuble vendu ou donné, le prix de la vente, ou, s'il y a eu donation, l'évaluation de l'immeuble ;
2° Un extrait de la publication de l'acte de vente ou de l'acte de donation ;
3° Un état hypothécaire sommaire sur formalités faisant apparaître les charges réelles qui grèvent l'immeuble ;
4° Un état des inscriptions figurant sur le fichier national des gages sans dépossession du chef du débiteur saisi, ainsi que le cas échéant sur le registre spécial des warrants agricoles tenu par le greffier du tribunal judiciaire du lieu de situation de l'immeuble saisi.
L'acte est notifié aux créanciers ».

30. Il existe deux véritables nouveautés. La première résulte de l’instauration d’un cahier des conditions de vente. L’avant-projet d’ordonnance portant réforme du droit des sûretés expliquait s’être inspiré de la solution prévue par l’article R. 642-25 du Code de commerce N° Lexbase : L1621IUL lors de la vente des immeubles d’un débiteur soumis à une procédure de liquidation judiciaire.

L’article 1281-17-1 du Code de procédure civile N° Lexbase : L4498MAT prévoit que « Le créancier poursuivant établit un cahier des conditions de vente qui est déposé au greffe du tribunal judiciaire chargé de la vente. Il contient :
1° L’énonciation de l’ordonnance qui a fixé la date de la vente avec la mention de sa publication ;
2° La désignation de l’immeuble à vendre, l’origine de propriété, les servitudes grevant l’immeuble, les baux consentis sur celui-ci et le procès-verbal de description ;
3° La mention de la mise à prix, des conditions de la vente et des modalités de paiement du prix ».

31. La seconde apparaît comme une conséquence de la faculté de surenchère qui est désormais offerte à un créancier bénéficiant d’un gage sur un immeuble par destination, en application de l’article 2472 du Code civil N° Lexbase : L0333L8T. Selon l’avant-projet d’ordonnance portant réforme du droit des sûretés, « L’immeuble par destination est vendu aux enchères et le paiement du prix par l’adjudicataire entraîne la purge du gage. Le prix de vente est distribué en application des dispositions du code des procédures civiles d’exécution ; le gagiste comme les créanciers hypothécaires pourront à cette occasion faire valoir leur droit de préférence ».

L’article 1281-20 du Code de procédure N° Lexbase : L4501MAX dispose que « Lorsqu’un créancier titulaire d’une sûreté publiée sur un immeuble par destination forme surenchère, la vente est faite par un officier ministériel habilité par son statut à procéder à des ventes aux enchères publiques de meubles corporels et, dans les cas prévus par la loi, par des courtiers de marchandises assermentés.
Faute d’enchérisseur, ce créancier est déclaré adjudicataire pour le montant de la mise à prix.
Le versement du prix ou sa consignation et le paiement des frais de la vente purgent de plein droit l’immeuble par destination de toute sûreté.
La distribution du prix est réalisée en application des dispositions du titre III du livre III du Code des procédures civiles d’exécution ».

B. Les modifications du Code des procédures civiles d’exécution

32. Les modifications du Code des procédures civiles d’exécution sont les plus importantes. Il n’y pas lieu de s’en étonner tant cette matière apparaît comme la continuation de la mise en œuvre de sa sûreté par le créancier. Trois séries de modifications sont prévues. Les premières concernent les procédures d’exécution mobilières (), les deuxièmes la saisie immobilière () et les troisièmes les mesures conservatoires ().

1°) Les modifications des procédures d’exécution mobilières

33. Compte tenu de l’importance de certaines modifications intervenues pour les sûretés mobilières, il n’est pas étonnant que le Code des procédures civiles d’exécution fasse l’objet de nombreuses nouvelles dispositions.
Selon la notice précédent le décret du 29 décembre 2021, il est « introduit dans le livre II du Code des procédures civiles d'exécution une articulation nouvelle entre les procédures de saisie-vente mobilière et les sûretés inscrites sur le bien saisi, afin de permettre aux créanciers bénéficiaires de ces sûretés de participer à la distribution des deniers et à l'acquéreur d'obtenir un titre de propriété libre de tout droit. Il modifie en outre la procédure de saisie-appréhension pour permettre une meilleure prise en compte des particularités liées à la réalisation du gage garantissant une créance professionnelle ».

34. Plusieurs innovations sont prévues pour la procédure de saisie-vente. L’article R. 221-14-1 du Code des procédures civiles d’exécution N° Lexbase : L4646MAC prévoit que l'huissier de justice qui a procédé à la saisie des biens consulte le registre des sûretés mobilières et signifie le procès-verbal de saisie dans un délai de huit jours à compter de son établissement aux créanciers titulaires d'une sûreté publiée sur ces biens.

L’article R. 221-31 N° Lexbase : L1383IW7 relatif à la vente amiable du bien saisi est modifié afin de renforcer l’information des créanciers titulaires d’une créance sur ce bien. Désormais, il dispose que « l'information prévue au troisième alinéa de l'article L. 221-3 N° Lexbase : L9499I7X est faite par écrit et comporte le nom et l'adresse de l'acquéreur éventuel ainsi que le délai dans lequel ce dernier s'offre à verser le prix proposé.
L'huissier de justice communique ces indications au créancier saisissant et aux créanciers opposants par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Il les communique également aux créanciers titulaires d'une sûreté publiée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception reproduisant, en caractères très apparents, les deux alinéas qui suivent.
Chaque créancier dispose d'un délai de quinze jours à compter de la réception de la lettre pour prendre parti sur les propositions de vente amiable. En l'absence de réponse, il est réputé avoir accepté.
Chaque créancier titulaire d'une sûreté publiée doit également, dans le même délai, faire connaître à l'huissier de justice la nature et le montant de sa créance. À défaut, il perd le droit de concourir à la distribution des deniers résultant de la vente amiable, sauf à faire valoir ses droits sur un solde éventuel après la répartition.
À défaut de vente amiable, il ne peut être procédé à la vente forcée qu'après l'expiration du délai d'un mois prévu à l'article R. 221-30 N° Lexbase : L2275ITG, augmenté s'il y a lieu du délai de quinze jours imparti aux créanciers pour donner leur réponse ».

35. L’article R. 221-32 N° Lexbase : L2277ITI indique que le prix de la vente est versé entre les mains de l’huissier du créancier saisissant. Il délivre alors un récépissé auquel est annexé un extrait des inscriptions figurant sur le registre des sûretés mobilières. Le transfert de la propriété et la délivrance des biens sont subordonnés au paiement du prix. Il est procédé, sur justification du paiement du prix, à la radiation des inscriptions de sûretés prises sur les biens vendus du chef du débiteur saisi. À défaut de paiement dans le délai convenu, il est procédé à la vente forcée.

36. De nouvelles règles sont prévues en cas de vente forcée par l’article R. 221-36-1 N° Lexbase : L4649MAG. Le créancier saisissant qui fait procéder à l'enlèvement des biens en vue de leur vente forcée en informe, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, les créanciers titulaires d'une sûreté publiée sur les mêmes biens. À peine de nullité, cette lettre indique le nom et l'adresse de l'officier ministériel chargé de la vente et reproduit en caractères très apparents l'alinéa qui suit.

Chaque créancier, dans un délai de quinze jours à compter de la réception de la lettre, fait connaître à l'officier ministériel chargé de la vente la nature et le montant de sa créance au jour de l'enlèvement. À défaut de réponse dans le délai imparti, il perd le droit de concourir à la distribution des deniers résultant de la vente forcée, sauf à faire valoir ses droits sur un solde éventuel après répartition.

L’article R. 221-39 N° Lexbase : L2284ITR est modifié. En vertu de cette disposition, il est dressé acte de la vente. Cet acte contient la désignation des biens vendus, le montant de l'adjudication et l'énonciation déclarée des nom et prénoms des adjudicataires. Il y est annexé un extrait des inscriptions au registre des sûretés mobilières. Il est procédé, sur justification du paiement du prix, à la radiation des inscriptions de sûretés prises sur les biens vendus du chef du débiteur saisi.

37. Les règles relatives à la saisie appréhension font également l’objet de quelques retouches. Il s’agit de tenir compte des modifications réalisées par l’ordonnance du 15 septembre 2021 sur la réalisation simplifiée du gage. Selon l’article 2346 du Code civil N° Lexbase : L0200L8W, « à défaut de paiement de la dette garantie, le créancier peut poursuivre la vente du bien gagé. Cette vente a lieu selon les modalités prévues par le Code des procédures civiles d’exécution sans que la convention de gage puisse y déroger ».  Il est pourtant prévu, par l’alinéa 2 de l’article 2346, que lorsque le gage est constitué en garantie d’une dette professionnelle, le créancier peut faire procéder à la vente publique des biens gagés par un notaire, un huissier de justice, un commissaire-priseur judiciaire ou un courtier de marchandises assermenté, huit jours après une simple signification faite au débiteur et, le cas échéant, au tiers constituant du gage.

La partie réglementaire du Code des procédures civiles d’exécution tient compte de la volonté d’accélérer la procédure de réalisation du gage dans l’hypothèse prévue par l’article 2346, alinéa 2. Pour cette raison l’article R. 222-6 du CPCE N° Lexbase : L2312ITS dispose que « dans le cas particulier où le bien a été appréhendé pour être remis à un créancier gagiste, l'acte de remise ou d'appréhension vaut saisie sous la garde du créancier, et, sous réserve que le créancier n'ait pas demandé l'attribution judiciaire du gage, il est procédé à la vente forcée aux enchères publiques du bien gagé. Sauf si le créancier met en œuvre la procédure de réalisation simplifiée prévue par le second alinéa de l'article 2346 du Code civil, cette vente a lieu selon les modalités prévues aux articles R. 221-30 N° Lexbase : L2275ITG à R. 221-39.
Un acte est remis ou signifié au débiteur qui contient, à peine de nullité :
1° Une copie de l'acte de remise ou d'appréhension, selon le cas ;
2° L'indication du lieu où le bien est déposé ;
3° Le décompte distinct des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus ainsi que l'indication du taux des intérêts ;
4° Lorsque créancier ne met pas en œuvre la procédure de réalisation simplifiée prévue par le second alinéa de l'article 2346 du Code civil :
a) L'indication, en caractères très apparents, que le débiteur dispose d'un délai d'un mois pour procéder à la vente amiable du bien saisi conformément aux dispositions des articles R. 221-30 à R. 221-32 et la date à partir de laquelle, à défaut de vente amiable dans ce délai, il peut être procédé à la vente forcée aux enchères publiques ;
b) La reproduction des articles R. 221-30 à R. 221-32 ;
5° Lorsque créancier met en œuvre la procédure de réalisation simplifiée prévue par le second alinéa de l'article 2346 du Code civil :
a) La mention, en caractères très apparents, de la date de la signification effectuée en application du second alinéa de l'article 2346 du Code civil ;
b) La reproduction du second alinéa de l'article 2346 du Code civil ».

38. L’article R. 223-10 du Code des procédures civiles d’exécution N° Lexbase : L2341ITU envisage l’hypothèse de l’immobilisation d’un véhicule terrestre à moteur pour obtenir le paiement d’une somme d’argent lorsque le créancier décide de ne pas mettre en œuvre la procédure de réalisation de l’article 2346, alinéa 2, du Code civil.

Dans ce cas, « l'huissier de justice signifie au débiteur, huit jours au plus tard après l'immobilisation, un commandement de payer qui contient à peine de nullité :
1° La copie du procès-verbal d'immobilisation ;
2° Un décompte distinct des sommes réclamées, en principal, frais et intérêts échus ainsi que l'indication du taux des intérêts ;
3° L'avertissement qu'à défaut de paiement et passé le délai d'un mois pour vendre le véhicule à l'amiable conformément aux dispositions des articles R. 221-30 à R. 221-32, celui-ci est vendu aux enchères publiques ;
4° L'indication que les contestations sont portées, au choix du débiteur, devant le juge de l'exécution du lieu où il demeure ou du lieu d'immobilisation du véhicule ;
5° La reproduction des articles R. 221-30 à R. 221-32 ».

39. La procédure de distribution des deniers est aussi partiellement modifiée pour mieux tenir compte des différents créanciers. Selon l’article R. 251-5 N° Lexbase : L2380ITC, l'agent chargé de la vente procède au paiement des créanciers ayant mis en œuvre une mesure d'exécution forcée, des créanciers titulaires d'un gage constitué en garantie d'une dette professionnelle, et des créanciers titulaires d'une autre sûreté publiée dès lors qu'ils disposent d'un titre exécutoire. Il consigne auprès de la Caisse des dépôts et consignations les sommes revenant aux créanciers ayant pratiqué une saisie conservatoire ou titulaires d'une sûreté publiée et non mentionnés à l'alinéa précédent. Ces sommes sont payées aux premiers après signification d'un acte de conversion et aux seconds après obtention d'un titre exécutoire.

2°) Les modifications de la procédure d’exécution immobilière

40. L’une des nouveautés due à la réforme du droit des sûretés tient à la possibilité prévue par l’article 2334 du Code civil N° Lexbase : L0196L8R de gager des meubles immobilisés par destination. Le législateur a considéré que ces biens qui ont souvent une valeur considérable ne permettent pas à leur propriétaire de les mobiliser.

La notice précédant le décret du 29 décembre 2021 précise à cet égard qu’il convient de tirer les conséquences « de l'admission, à l’article 2334 du Code civil N° Lexbase : L0196L8R, du gage portant sur les meubles immobilisés par destination. Il prévoit les conditions de l'information du créancier disposant d'un tel gage ou d'un warrant agricole portant sur un meuble immobilisé par destination compris dans le périmètre d'une saisie immobilière, de son intervention à la procédure de saisie immobilière et précise les modalités de détermination de ses droits dans la distribution du prix, contrepartie de l'effet de purge de son inscription ».

41. Les articles R. 331-4 N° Lexbase : L4403MAC et R. 331-5 N° Lexbase : L4404MAD du Code des procédures civiles d’exécution réglementent la déclaration devant être effectuée par les créanciers titulaires d’une sûreté publiée sur un immeuble par destination.

Dans le mois suivant la publication du titre de vente, le créancier poursuivant, ou à défaut le créancier le plus diligent ou le débiteur, fait sommation aux créanciers titulaires d'une sûreté publiée sur un immeuble par destination d'avoir à déclarer leur créance. Cette sommation doit, à peine de nullité, contenir certaines mentions, à savoir :
« 1° la copie du commandement de payer valant saisie immobilière ;
2° La sommation d'avoir à déclarer les créances inscrites sur le bien saisi, en principal, frais et intérêts échus, avec l'indication du taux des intérêts moratoires, par acte d'avocat déposé au greffe du juge de l'exécution et accompagné de la copie du bordereau d'inscription ou tout élément justifiant d'une inscription au registre mentionné à l'article R. 521-1 du Code de commerce et à dénoncer le même jour ou le premier jour ouvrable suivant cette déclaration au créancier poursuivant et au débiteur, dans les mêmes formes ou par signification ;
3° La reproduction, en caractères très apparents, des articles L. 331-2 N° Lexbase : L5894IRQ et R. 331-5 ».

42. Le créancier titulaire de la garantie est tenu d’effectuer cette déclaration dans un délai de deux mois à compter de la sommation. Elle est effectuée par acte d'avocat déposé au greffe du juge de l'exécution et dénoncée le même jour ou le premier jour ouvrable suivant cette déclaration au créancier poursuivant et au débiteur, dans les mêmes formes ou par signification.

Là encore, il existe un formalisme prescrit à peine de nullité. La déclaration contient : 
« 1° Le montant des créances inscrites sur le bien saisi, en principal, frais et intérêts échus, avec l'indication du taux des intérêts moratoires ;
2° La copie du contrat constitutif de la sûreté, ainsi que toute précision utile permettant l'identification des biens sur lequel elle porte ;
3° La copie du bordereau d'inscription ou tout élément justifiant d'une inscription au registre mentionné à l'article R. 521-1 du Code de commerce ;
4° La copie du titre exécutoire constatant la créance, le cas échéant ».

43. Plusieurs nouvelles dispositions concernent la distribution, qu’elle soit amiable ou judiciaire.

En cas de distribution amiable en présence d’un seul créancier, la demande est notamment accompagnée d'un état hypothécaire certifié à la date de la publication du commandement de payer valant saisie, d'un état des inscriptions figurant sur le fichier national des gages sans dépossession (à compter du 1er janvier 2023 du registre des sûretés mobilières) du chef du débiteur saisi, ainsi que le cas échéant sur le registre spécial des warrants agricoles tenu par le greffier du tribunal judiciaire du lieu de situation de l'immeuble saisi certifié à la date de la publication du titre de vente.

Lorsqu’il existe une pluralité de créanciers pouvant faire valoir leurs droits, là encore il sera nécessaire de faire figurer un état des inscriptions figurant sur le fichier national des gages sans dépossession (à compter du 1er janvier 2023 du registre des sûretés mobilières) du chef du débiteur saisi, ainsi que le cas échéant sur le registre spécial des warrants agricoles tenu par le greffier du tribunal judiciaire du lieu de situation de l'immeuble saisi certifié à la date de la publication du titre de vente.

44. En cas de distribution judiciaire, l’article R. 333-2 du Code des procédures civiles d’exécution N° Lexbase : L4660MAT précise que lorsqu'il y a lieu de ventiler le prix de plusieurs immeubles vendus collectivement ou de déterminer la fraction du prix de vente correspondant à la valeur d'un immeuble par destination, le juge, à la demande des parties ou d'office, peut désigner un expert par ordonnance.

3°) La modification des mesures conservatoires

45. L’article 2320 du Code civil N° Lexbase : L0183L8B dispose que « la simple prorogation de terme, accordée par le créancier au débiteur principal, ne décharge pas la caution, qui peut, lorsque le terme initial est échu, payer le créancier et se retourner contre le débiteur, ou solliciter la constitution d’une sûreté judiciaire sur tout bien du débiteur à hauteur des sommes garanties sans avoir à démontrer de circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de sa créance. Lorsqu’il est fait droit à sa demande, l’article L. 511-4 du Code des procédures civiles d’exécution n’est pas applicable ». La partie règlementaire du Code des procédures civiles d’exécution devait être complétée pour permettre à la caution de demander dans cette hypothèse une mesure conservatoire, alors qu’elle n’en remplit pas les conditions.

Pour cette raison, il est ajouté un alinéa supplémentaire à l’article R. 511-7 en vertu duquel « lorsqu'il a été fait application de l'article 2320 du Code civil, le délai prévu au premier alinéa (celui prévoyant que le créancier non muni d’un titre exécutoire doit dans un délai d’un mois à compter de la mesure chercher à en obtenir un) court à compter du paiement du créancier par la caution ».


[1] J. et S. Piédelièvre, La publicité foncière, Defrénois, 2ème éd.

[2] Cette exigence ne peut être que très imparfaitement satisfaite lorsque les informations sont livrées par les parties elles-mêmes. Elle l’est de bien meilleure façon si les renseignements utiles sont consignés sur un registre public et accessible, tenu par une autorité neutre et objective, Ph. Simler et Ph. Delebecque, Les sûretés – La publicité foncière, Dalloz, 7ème éd., n° 851.

[3] V. H., L., J. Mazeaud et F. Chabas par Y. Picod, Sûretés – Publicité foncière, Montchrestien, 7ème éd., n° 642.

[4] La publicité est effectuée sur le registre des mutations en douane tenu par le receveur principal des douanes du port d’attache. L’un des particularismes de cette publicité résulte du fait que son défaut entraîne une inopposabilité particulièrement large. Les tiers pouvant s’en prévaloir sont toutes les personnes intéressées. V. S. Piédelièvre et D. Gency-Tandonnet, Droit des transports, LexisNexis, 2ème éd., 2019, n° 312.

[5] La publicité est effectuée sur un registre spécial tenu au greffe du tribunal de commerce du lieu d’immatriculation du bateau.

[6] La publicité est effectuée sur un registre tenu par le ministre en charge de l’aviation civile. V. S. Piédelièvre et D. Gency-Tandonnet, Droit des transports, préc., n° 237.

[7] V. E. Bey, De la publicité des opérations de crédit-bail immobilier, JCP éd. CI, 1973, 10869 ; E. Bey, De l’évolution de la publicité dans le crédit-bail , Gaz. Pal., 1984, II, doctr. 370. Tant que la publicité n’a pas été effectuée, le crédit-bailleur ne peut pas opposer son droit de propriété aux créanciers ou aux ayants cause à titre onéreux du crédit-preneur, par exemple : Cass. com., 20 mai 1986, Gaz. Pal., 1986, II, 607, note Bey ; Banque, 1986, 1029, obs. Rives-Lange.

[8] R.-L. Boffa, L’opposabilité du nouveau gage sans dépossession, D., 2007 1161.

[9] M. Planiol et G. Ripert par E. Becqué, Traité élémentaire de droit civil, Les sûretés réelles, LGDJ, t. 12, 2ème éd., n° 758.

[10] M.-A. Dupuis-Flandin, Le warrant agricole, une sûreté à redécouvrir, dans « Clés pour le siècle », Dalloz, 2000, p. 789.

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Voies d'exécution

[Brèves] Liquidation de l’astreinte : le contrôle par le juge de la proportionnalité entre le montant auquel l’astreinte est liquidée et l’enjeu du litige

Réf. : Cass. civ. 2, 20 janvier 2022, trois arrêts, n° 20-15.261, FS-B+R N° Lexbase : A79507IB ; n° 19-23.721, FS-B+R N° Lexbase : A79567II ; n° 19-22.435, FS-B+R N° Lexbase : A79547IG

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par Alexandra Martinez-Ohayon

Le 02 Février 2022

► La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, a rendu trois arrêts importants, en matière d’astreinte ; les Hauts magistrats énoncent pour la première fois que l’astreinte judiciaire étant de nature à porter atteinte à un intérêt substantiel du débiteur entre dans le champ d’application de la protection des biens garantie par le protocole n° 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales ; il en résulte que le juge qui statue sur la liquidation d'une astreinte provisoire doit apprécier le caractère proportionné de l'atteinte qu'elle porte au droit de propriété du débiteur au regard du but légitime qu'elle poursuit ; en conséquence, le juge doit procéder au contrôle de proportionnalité entre le montant de l’astreinte et l’enjeu du litige.

Les affaires. La première affaire (pourvoi n° 20-15.261), portait sur un litige opposant un syndicat à la SNCF, dans lequel un jugement assorti de l’exécution provisoire, confirmé par la cour d’appel avait ordonné à la défenderesse de mettre en œuvre les classements en position de rémunération supérieure d'un certain nombre d'agents au titre des années 2011 à 2013. Le jugement était assorti d'une astreinte provisoire de 1 000 euros par agent et par jour de retard, à compter d'un délai de deux mois suivant la signification du jugement et pendant deux mois. En 2018, le syndicat a saisi le juge de l’exécution en liquidation de l’astreinte.

Dans la seconde affaire (pourvoi n ° 19-23.721), des acquéreurs ayant acquis en 2008 une maison d’habitation se plaignant de désordres ont assigné leurs vendeurs, ainsi que l’agence immobilière devant le tribunal de grande instance. Les demandeurs, soupçonnant l’existence de vices cachés, liés à un incendie datant de 2002, ont saisi le juge de la mise en état, afin qu’il enjoigne l’assureur du bien au moment des faits, de produire les éléments utiles à la solution du litige. Par une première ordonnance rendue le 24 juin 2014, l’assureur a été enjoint de communiquer au tribunal, sous un délai de trente jours à compter de sa signification, l’ensemble des documents en sa possession relatifs au sinistre de l’incendie et son indemnisation. Cette décision n’ayant pas été suivie d’effet, par une seconde ordonnance rendue le 7 avril 2015, le juge de la mise en état, a renouvelé son injonction précisant que faute de communiquer les éléments sollicités, l’assureur serait redevable d’une astreinte de 1 000 euros par jour de retard. Le jugement au fond a été rendu le 19 mai 2017. Les demandeurs en mai 2018 ont assigné l’assureur devant le juge de l’exécution en liquidation de l’astreinte. La défenderesse a invoqué l’irrégularité de la signification de la seconde ordonnance du juge de la mise en état.

Dans la troisième affaire (pourvoi n° 19-22.435), par jugement, une SCI copropriétaire, avait été condamnée à détruire le cellier et cesser l’activité de toilettage pour chiens exercé sur place, sous astreinte, pour chaque obligation, de 100 euros par jour de retard dans un délai de trois mois à compter de la signification du jugement. Le jugement a été confirmé en toutes ses dispositions par la cour d’appel. La copropriétaire voisine du lot en question a assigné la SCI aux fins de liquidation de l’astreinte.

Décisions de la Cour de cassation. Dans les deux premières affaires, les Hauts magistrats retiennent les solutions précitées au visa de l'article L. 131-4 du Code des procédures civiles d'exécution N° Lexbase : L5818IRW, tel qu'interprété à la lumière de l'article 1 du protocole n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales N° Lexbase : L1625AZ9, avec une motivation pratiquement identique.

Après avoir rappelé qu’il résulte de la jurisprudence constante que le juge saisi d’une demande de liquidation d’astreinte ne peut se déterminer qu’au regard des seuls critères de l'article L .131-4 du code précité. Le juge peut cependant limiter le montant de l’astreinte au motif que :

- le montant sollicité par le créancier de l'astreinte serait excessif (Cass. civ. 2, 25 juin 2015, n° 14-20.073, F-D N° Lexbase : A9809NLU) ;
- qu’il serait trop élevé au regard des circonstances de la cause (Cass. civ. 2, 7 juin 2012, n° 10-24.967, F-D N° Lexbase : A3857IN8) ;
- ou il serait trop élevé au regard de la nature du litige (Cass. civ. 2, 30 janvier 2014, n° 13-10.255, F-D N° Lexbase : A4397MD9).

La Haute juridiction précise également que l’arrêt d’appel qui se référait au caractère « manifestement disproportionné » du montant a ainsi été cassé (Cass. civ. 2, 26 septembre 2013, n° 12-23.900, F-D N° Lexbase : A9476KLK), et également celui ayant réduit le montant de l'astreinte liquidée en se fondant sur « l'application du principe de proportionnalité » (Cass. civ. 2, 19 mars 2015, n° 14-14.941, F-D N° Lexbase : A1926NE3).

La Cour de cassation relève que dans aucune de ces affaires l'application de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et de son protocole n° 1 n'avait été invoquée.

Les deux arrêts sont cassés.

Dans la troisième affaire, la Cour de cassation adopte un raisonnement similaire en retenant que se trouve légalement justifié l'arrêt d'une cour d'appel qui, pour liquider l'astreinte à un certain montant, a pris en compte tant le comportement des débiteurs de l'obligation que les difficultés auxquelles ils s'étaient heurtés pour l'exécuter et s'est assurée, sans avoir à se référer aux facultés financières des débiteurs, que le montant de l'astreinte était raisonnablement proportionné à l'enjeu du litige.

En conséquence, le pourvoi est rejeté par la Cour de cassation.

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