Le Quotidien du 12 novembre 2020

Le Quotidien

Avocats/Accès à la profession

[Brèves] Passerelle «juriste d'entreprise» : la loi « Hoguet » ne permet pas à un agent immobilier d'être dispensé de la période de formation

Réf. : CA Colmar, 26 octobre 2020, n° 18/02468 (N° Lexbase : A95213YB)

Lecture: 4 min

N5125BYH

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par Marie Le Guerroué

Le 10 Novembre 2020

► Le décret du 27 novembre 1991 ne peut être considéré comme un texte de portée générale ; dès lors, la loi « Hoguet », par l'application de l'adage « Specialia generalibus derogant », ne permet pas à un agent immobilier d'être dispensé de la période de formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat (CA Colmar, 26 octobre 2020, n° 18/02468 N° Lexbase : A95213YB).

 

Faits/Procédure. Le conseil de l'Ordre de Colmar avait rejeté une demande d'admission à la prestation de serment et à l'inscription au tableau de l'Ordre des avocats car le demandeur n'était pas titulaire d'une maîtrise en droit ou d'un diplôme reconnu comme équivalant ne satisfaisant pas l'une des conditions impératives exigées par l'article 11 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 (N° Lexbase : L6343AGZ), pour accéder à la profession d'avocat. Le demandeur ne justifiait pas remplir les conditions posées par la jurisprudence pour revendiquer la qualité de juriste d'entreprise au sens de l'article 98-3° du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 (N° Lexbase : L8168AID). L’intéressé a interjeté appel de cette décision.

 

Expérience professionnelle. La cour note qu’il résulte de l’entretien auprès du rapporteur de la commission du Barreau, que l’appelant a été gérant minoritaire et cadre salarié d’une immobilière de 1995 à 2012, depuis 2014, qu’il est président d’une SAS (une agence immobilière) et associé à 49 % avec son fils, qu'en sa qualité de dirigeant de personnes morales et de titulaire de la carte professionnelle d'agent immobilier il travaillait 70 heures par semaine et se consacrait à mi-temps à diverses activités juridiques de conseil et rédaction d'actes ; le droit étant sa passion bien qu'il ne soit pas titulaire d'une maîtrise en droit mais seulement inscrit en Master 1 Droit des Affaires à l'Université Paris I pour les années universitaires 2016/2017 et 2017/2018.

 

Caractère dérogatoire de la loi « Hoguet » (non). L’appelant soutient que l'application de la loi « Hoguet » (loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce N° Lexbase : L7536AIX), par l'application de l'adage « Specialia generalibus derogant » (les règles spéciales dérogent aux règles générales), lui permet d'être dispensé de la période de formation. L'appelant utilise l'adage pour affirmer que la loi précité et son décret d'application supplantent les règles générales et donc la loi de 1971, notamment, en insérant à la suite de l'article 54 sur les juristes en entreprise, l'article 59 reconnaissant la 'qualité' de juriste aux titulaires exploitant cette profession réglementée. Toutefois, selon la cour, le décret du 27 novembre 1991 ne peut pas être considéré comme un texte de portée générale, l'argumentation de l’appelant ne peut donc être admise.


Qualité de juriste d’entreprise (non). Par application des dispositions l'article 98, 3°, du décret du 27 novembre 1991, sont dispensés de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat les juristes d'entreprise justifiant de huit ans au moins de pratique professionnelle au sein d'un service juridique d'une ou plusieurs entreprises, qui ont exercé leurs fonctions exclusivement dans un service spécialisé chargé dans l'entreprise des problèmes juridiques posés par l'activité de celle-ci. Or, l’appelant exerce les fonctions d'agent immobilier et dans le cadre de ses fonctions il n'est pas chargé de traiter des problèmes juridiques posés par l'activité des membres de son entreprise et ne traite que des problèmes juridiques extérieurs à l'entreprise qu'il gère. Il n'exerce pas ses fonctions au sein d'un service juridique spécialisé, à temps plein et dans le cadre d'un lien de subordination inhérent au contrat de travail. En sa qualité de gérant il ne peut revendiquer la qualité de juriste d'entreprise. Dans ces conditions, n'ayant pas la qualité de juriste d'entreprise il ne peut pas bénéficier de la dispense prévue à l'article 98, 3°, du décret du 27 novembre 1991.


Confirmation. La cour confirme la décision rendue par le conseil de l'Ordre de Colmar qui a rejeté la demande d'admission à la prestation de serment et à l'inscription au tableau de l'Ordre des avocats de l’appelant.

► Pour aller plus loin : V. ETUDE : Les passerelles, Les juristes d'entreprise dispensés de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat, in La profession d’avocat (N° Lexbase : E43313RT).

 

 

 

 

newsid:475125

Avocats/Honoraires

[Brèves] Règlements [d’honoraires] en famille

Réf. : Cass. civ. 2, 5 novembre 2020, n° 19-20.314, F-P+B+I (N° Lexbase : A521133E)

Lecture: 4 min

N5213BYQ

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par Marie Le Guerroué

Le 02 Décembre 2020

► N’inverse pas la charge de preuve, le premier président qui, en raison du contexte familial dans lequel l’assistance a été apportée, écarte la présomption selon laquelle le mandat est salarié lorsqu’il est exercé par une personne dans le cadre de sa profession habituelle et estime souverainement que les termes des courriels - émanant de l’ancien époux et invoqués par l’avocate - ne permettent pas d’établir que le mandat avait été confié à titre onéreux (Cass. civ. 2, 5 novembre 2020, n° 19-20.314, F-P+B+I N° Lexbase : A521133E).

Faits et procédure. Le défendeur naguère marié à la demanderesse (l’avocate), dont il avait divorcé en juillet 2017, avait confié à celle-ci, en 2003, la défense de ses intérêts et ceux de sa sœur dans un litige qui concernait la succession de leur père. Alors qu’aucune convention d’honoraires n’avait été conclue, l’avocate avait établi au mois de février 2016 une facture de ses diligences, dont elle n’avait pas obtenu le règlement de son ancien époux qui avait indiqué qu’aucun mandat à titre onéreux n’avait été confié à son ex-épouse. L’avocate avait saisi le Bâtonnier de son ordre d’une demande de fixation de ses honoraires.

  • Sur l’office du premier président

Moyen. L’avocate fait grief à l’arrêt de la débouter de toutes ses demandes tendant à la fixation de ses honoraires et à la condamnation de son ancien mari à leur paiement, alors que la procédure de contestation en matière d’honoraires et débours d’avocat concerne les seules contestations relatives au montant et au recouvrement des honoraires, de sorte qu’il n’appartient pas au juge de l’honoraire de se prononcer sur le caractère onéreux ou gratuit du mandat conclu entre l’avocat et son client ; qu’en se fondant, pour débouter la demanderesse de sa demande en fixation des honoraires dus par le défendeur sur le caractère prétendument gratuit du mandat litigieux, le premier président a excédé son office, en violation de l’article 174 du décret n° 91-1197, du 27 novembre 1991, organisant la profession d'avocat (N° Lexbase : L8168AID). 

Réponse de la Cour. Dès lors qu’il résulte de l’article 174 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 que la procédure de contestation en matière d’honoraires et débours d’avocats concerne les contestations relatives au montant et au recouvrement de leurs honoraires, il relève de l’office même du juge de l’honoraire de déterminer, lorsque cela est contesté, si les prestations de l’avocat ont été fournies ou non à titre onéreux. Partant, c’est sans excéder ses pouvoirs que le premier président a décidé que le mandat qui liait l’avocate au défendeur n’avait pas été donné à titre onéreux (v. aussi, Cass. civ. 2, 4 juin 2009, n° 08-14.294, F-D N° Lexbase : E37343RQ).

  • Sur la charge de la preuve

Ordonnance. Le premier président, après avoir relevé que les parties « étaient mariés lorsque [le mari] a[vait] demandé à son épouse de se charger de la défense de ses intérêts et de ceux de sa soeur, dans le cadre de la succession de son père », et pris ainsi en considération « le contexte des relations entretenues alors par les parties », en avait déduit qu’aucune rémunération n’avait été convenue entre elles.

Réponse de la Cour. C’est sans inverser la charge de la preuve que le premier président, écartant de la sorte, en raison du contexte familial dans lequel l’assistance avait été apportée, la présomption selon laquelle le mandat est salarié lorsqu’il est exercé par une personne dans le cadre de sa profession habituelle, puis estimant souverainement que les termes des courriels émanant du défendeur et invoqués par l’avocate ne permettaient pas d’établir que le mandat avait été confié à titre onéreux, a statué. Pour conclure à l’inexistence d’un mandat à titre onéreux, le premier président ne s’est ainsi fondé, ni sur l’absence entre les parties d’une convention d’honoraires, ou d’échanges relatifs à des honoraires de diligences, ni sur un pacte de quota litis qui aurait été conclu entre elles.

Rejet. La Cour rejette par conséquent le pourvoi.

 

Commentaire, à paraître, par G. Deharo, Lexbase Avocats, décembre 2020, n° 309.

Pour aller plus loin : ÉTUDE : Les honoraires, émoluments, débours et modes de paiement des honoraires, Les avantages d'une convention d'honoraires (N° Lexbase : E37343RQ) et Le droit de l'avocat à percevoir un honoraire (N° Lexbase : E37303RL) in La profession d’avocat, Lexbase.

 

newsid:475213

Contrats et obligations

[Brèves] Entretien d’une porte automatique : celui qui est en charge de sa maintenance est tenu d’une obligation de résultat en ce qui concerne la sécurité de l’appareil

Réf. : Cass. civ. 3, 5 novembre 2020, n° 19-10.857, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A521433I)

Lecture: 3 min

N5244BYU

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par Claire-Anne Michel, Maître de conférences, Université Grenoble-Alpes, Centre de recherches juridiques (CRJ)

Le 12 Novembre 2020

Celui qui est chargé de la maintenance d’une porte automatique est tenu d’une obligation de résultat en ce qui concerne la sécurité de l’appareil ; par conséquent, la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel qui avait considéré qu’il ne s’agissait que d’une obligation de moyens.

Faits et procédure. En dépit des incertitudes dont sa mise en œuvre est empreinte, la distinction des obligations de moyens et des obligations de résultat tient une place majeure dans la responsabilité contractuelle. Tel était le cas sous l’empire du droit antérieur à l’ordonnance du 10 février 2016, comme en témoigne l’arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation le 5 novembre 2020, mais tel devrait être également le cas sous l’empire des nouveaux textes (pour la discussion v. O. Deshayes, Th. Génicon et Y.-M. Laithier, Réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, LexisNexis, 2e éd., 2018, comm. art 1231-1). En l’espèce, à la suite du dysfonctionnement d’une porte automatique qui se situait dans une partie commune d’un immeuble, un locataire, qui avait voulu la fermer manuellement avait été blessé. Ce faisant, il assigna en réparation l’assureur du propriétaire de l’immeuble, lequel appela en garantie la société chargée de la maintenance de la porte. La cour d’appel (CA Chambéry, 15 mars 2018, n° 16/00440 N° Lexbase : A9862XGD), mit hors de cause la société, considérant que celle-ci était tenu d’une obligation de moyens « s’agissant des avaries survenant entre deux visites et sans lien avec l’une de ces visites ». Le pourvoi, quant à lui, considérait que la société, en charge de la maintenance et de l’entretien complet de la porte, assume une obligation de résultat en ce qui concerne la sécurité. La Cour de cassation devait donc se prononcer sur la nature de l’obligation en cause.

Solution. Cassant l’arrêt d’appel au visa de l’ancien article 1147 du Code civil (N° Lexbase : L1248ABT ; cf. désormais C. civ., art. 1231-1 N° Lexbase : L0613KZQ), reproduit dans le chapeau, elle considère que « celui qui est chargé de la maintenance d’une porte automatique d’accès à un parking est tenu d’une obligation de résultat en ce qui concerne la sécurité de l’appareil ». C’est ainsi une obligation de résultat qui est mise à la charge de la société en charge de l’entretien de la porte automatique et la formule employée n’est pas sans rappeler celle dont use la même chambre de la Cour de cassation s’agissant de l’entretien de l’ascenseur (Cass. civ. 3, 1er avril 2009, n° 08-10.070 N° Lexbase : A5177EEH, v. notamment D. Bakouche, obs. in Chron., Lexbase, Droit privé, n° 348, avril 2009 N° Lexbase : N0417BKN : « celui qui est chargé de la maintenance et de l’entretien complet d’un ascenseur est tenu d’une obligation de résultat en ce qui concerne la sécurité, la cour d’appel, qui n’a pas relevé que le dysfonctionnement de l’ascenseur était dû à une cause extérieure à l’appareil, a violé le texte susvisé »). Une telle solution confirme l’emprise de la qualification d’obligation de résultat dans le contrat d’entreprise lorsque l’entrepreneur est tenu d’une prestation matérielle (v. également, pour l’obligation incombant au garagiste, Cass. civ. 1, 14 février 2018, n° 16-25.228 N° Lexbase : A7655XDU). Par conséquent, sa responsabilité sera engagée dès lors qu’un dysfonctionnement sera caractérisé et que ce dysfonctionnement sera à l’origine du dommage. Peu importe que la société d’entretien n’ait pas été informée du dysfonctionnement, peu importe que le dysfonctionnement soit en lien avec la précédente visite de la société.

newsid:475244

Covid-19

[Brèves] Pas de suspension de la restriction temporaire de l’exercice du culte

Réf. : CE référé, 7 novembre 2020, n° 445825, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A918833P)

Lecture: 2 min

N5223BY4

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par Yann Le Foll

Le 10 Novembre 2020

Les restrictions portées à l’exercice du culte par les dispositions du décret du 29 octobre 2020, dans le cadre du confinement, ne portent pas atteinte à la liberté du culte ni au droit au respect de leur liberté personnelle, à la liberté d’aller et venir et à la liberté de réunion (CE référé, 7 novembre 2020, n° 445825, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A918833P).

Faits. Après le rétablissement de l’état d’urgence sanitaire sur l’ensemble du territoire national, le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020, prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire (N° Lexbase : L5637LYG), a restreint la possibilité de sortir de son domicile et interdit, notamment, les rassemblements y compris dans les lieux de culte. Des associations, fidèles et membres du clergé catholiques ont demandé au juge des référés du Conseil d’État de suspendre les dispositions de ce décret relatives à l’exercice des cultes.

Décision. Après avoir rappelé que la liberté de culte est une liberté fondamentale mais qui doit être conciliée avec l’impératif de protection de la santé, reconnu par la Constitution, le juge relève que la circulation du virus sur le territoire métropolitain s’est fortement amplifiée au cours des dernières semaines malgré les mesures déjà prises, et que les motifs de rassemblement autres que scolaires et professionnels ont par conséquent dû être limités. S’agissant des lieux de culte, en particulier, le juge des référés constate que le risque de contamination n’y est pas écarté et que les mesures de restriction, qui doivent faire l’objet d’un prochain réexamen, prendront fin, au plus tard, au terme de l’état d’urgence sanitaire, fixé à ce jour au 16 novembre.

Précision. La Haute juridiction précise plusieurs points.  Tout d’abord, l’ensemble des lieux de culte demeurent ouverts. Ensuite, les fidèles peuvent y participer aux enterrements et aux mariages dans la limite respective de trente et six personnes, mais également s’y rendre pour y exercer le culte à titre individuel, en particulier à l’occasion de leurs autres déplacements autorisés. Enfin, les ministres du culte peuvent librement y participer à des cérémonies religieuses, notamment pour en assurer la retransmission, et y recevoir individuellement les fidèles, de même qu’ils peuvent se rendre au domicile de ceux-ci (voir, pour une décision différente, CE référé, 18 mai 2020, n° 440366 N° Lexbase : A73243LT, n° 440361 N° Lexbase : A73233LS, n° 440512 N° Lexbase : A73253LU et n° 440519 N° Lexbase : A73263LW et lire L. Perez, La fermeture générale et absolue des bâtiments de culte est disproportionnée par rapport à l’objectif de protection de la santé publique durant l’épidémie de Covid-19 N° Lexbase : N3534BYK).

newsid:475223

Covid-19

[Brèves] Présentation du 4ème projet de loi de finances rectificative pour 2020

Réf. : Assemblée nationale, projet de loi de finances rectificative pour 2020, n° 3522

Lecture: 2 min

N5218BYW

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par Marie-Claire Sgarra

Le 10 Novembre 2020

Et de 4 ! Le Gouvernement a présenté en Conseil des ministres, le 4 novembre, son 4ème projet de loi de finances rectificative pour 2020.

Deux objectifs pour ce dernier rectificatif de l’année :

  • accompagner la fin de gestion budgétaire de l’exercice en cours,
  • assurer la mise en œuvre de la réponse d’urgence face à la crise sanitaire de la covid-19, dans la continuité des trois précédentes LFR de l’année.

Sur fond de covid, ce nouveau projet ne présente que des mesures liées aux conséquences économiques de la crise sanitaire.

Le texte réévalue la prévision de croissance pour 2020 à -11 % du PIB. Le déficit public atteindra 223 milliards d'euros. Le coût global de la crise du covid-19 pour les finances publiques en 2020 peut être estimé à 186 milliards d’euros, du fait des pertes de recettes induites par la contraction de l’activité, à hauteur de 100 milliards d’euros, et des mesures d’urgence mises en place, qui auront un impact de 86 milliards d’euros sur le solde public cette année.

L’ensemble des nouvelles mesures d’urgence mises en place dans ce quatrième budget rectificatif ont un impact sur le solde public de 20 milliards d’euros.

Comme dans son avis sur le PLF pour 2021, le Haut Conseil relève, dans son avis du 2 novembre 2020, le caractère non significatif de l'évaluation du solde structurel présentée par le Gouvernement qui s'établirait en 2020 à -0,6 point de PIB, en amélioration de 1,6 point de PIB par rapport à 2019 alors même que la situation des finances publiques est exceptionnellement dégradée cette année. Il estime que la référence à la loi de programmation des finances publiques de janvier 2018 est rendue caduque par la révision à la baisse qu'il serait nécessaire d'effectuer, en raison de la crise sanitaire, sur l'estimation de PIB potentiel pour 2020 figurant dans la LPFP. Par ailleurs, le calcul du solde structurel est rendu peu significatif par les conventions retenues par le Gouvernement pour classer en mesures ponctuelles et temporaires de nombreuses mesures de soutien.

Le Haut Conseil constate que le ratio de dette publique, à nouveau révisé à la hausse, s'établirait, en 2020, plus de 20 points au-dessus de son niveau d'avant-crise. Cette augmentation massive, résultant d'un choc aussi violent qu'inédit sur l'activité et de la réponse budgétaire apportée, intervient après une décennie quasi ininterrompue de hausse de la dette.

 

newsid:475218

Filiation

[Brèves] Adoption, par le conjoint du père, de l’enfant né par GPA à l’étranger : quid en l'absence de lien de filiation maternel ?

Réf. : Cass. civ. 1, 4 novembre 2020, deux arrêts, n° 19-50.042 (N° Lexbase : A418333C), et n° 19-15.739 (N° Lexbase : A418433D), FS-P+B+I

Lecture: 6 min

N5248BYZ

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 13 Novembre 2020

► Dans le cadre d’une demande d’adoption de l’enfant né par GPA à l’étranger par le conjoint du père, en l'absence de lien de filiation établi avec la femme ayant donné naissance à l'enfant, le droit français n'interdit pas le prononcé de l'adoption : 1° lorsque le droit étranger autorise la convention de gestation pour autrui ; 2° et que l'acte de naissance de l'enfant, qui ne fait mention que d'un parent, a été dressé conformément à la législation étrangère, en l'absence de tout élément de fraude.

Ces arrêts rendus le 4 novembre 2020 viennent apporter une nouvelle précision, dans le contentieux de la reconnaissance en France des liens de filiation des enfants nés de GPA à l’étranger et plus précisément dans le cadre d’une demande d’adoption de l’enfant né par GPA à l’étranger par le conjoint du père, dans l’hypothèse particulière de l'absence de lien de filiation établi avec la femme ayant donné naissance à l'enfant.

Deux affaires similaires. Dans les deux affaires, deux enfants étaient nés à l’étranger (en Inde dans la première affaire, et au Mexique dans la seconde), d’un père de nationalité française, ayant eu recours à une convention de gestation pour autrui. La transcription de l'acte de naissance établi à l'étranger ne mentionnait que le nom du père, en l’absence d’indication de la filiation maternelle ; L’époux du père avait formé une demande d'adoption plénière de l'enfant de son conjoint.

Deux décisions de la cour d’appel de Paris en sens contraire. Les affaires s’étaient poursuivies devant la cour d’appel de Paris qui s’était prononcée en sens contraire, les conseillers parisiens accueillant la demande d’adoption plénière par le conjoint du père dans la première affaire ; et rejetant la demande dans la seconde.

Dans la première affaire, les juges parisiens avaient retenu que le droit français n'interdit pas le prononcé de l'adoption par l'époux du père de l'enfant né à l'étranger de cette procréation lorsque le droit étranger autorise la convention de gestation pour autrui et que l'acte de naissance de l'enfant, qui ne fait mention que d'un parent, a été dressé conformément à la législation étrangère, en l'absence de tout élément de fraude. Ils avaient alors accueilli la demande d’adoption plénière, après avoir analysé que l'acte de naissance de l'enfant, qui mentionnait le père sans faire mention de la gestatrice, avait été établi conformément aux dispositions de la législation indienne et qu'il ne saurait donc être reproché au requérant un détournement ou une fraude.

Dans la seconde affaire, la cour d’appel de Paris avait au contraire rejeté la demande, au motif que rien ne permettait d'appréhender les modalités selon lesquelles la femme ayant accouché de l’enfant aurait renoncé de manière définitive à l'établissement de la filiation maternelle et qu'il en était de même du consentement de cette femme à l'adoption de l'enfant, par le mari du père. Les juges parisiens avaient estimé que, dans ces conditions, il ne pouvait être conclu que l'adoption sollicitée, exclusivement en la forme plénière et avec les effets définitifs qui s'attachaient à cette dernière, soit conforme à l'intérêt de l'enfant, qui ne pouvait s'apprécier qu'au vu d'éléments biographiques suffisants.

Décisions de la Cour de cassation. Saisie d’un pourvoi dans le cadre de chacune des deux affaires (pourvoi du procureur de la République dans la première affaire, du père et de son conjoint dans la seconde affaire), la Cour de cassation va se prononcer, pour chacune, en faveur des requérants à l’adoption.

La Haute juridiction rappelle, avant tout, que le recours à la gestation pour autrui à l'étranger ne fait pas, en lui-même, obstacle au prononcé de l'adoption, par l'époux du père, de l'enfant né de cette procréation, si les conditions légales de l'adoption sont réunies et si elle est conforme à l'intérêt de l'enfant (cf. Cass. civ. 1, 5 juillet 2017, n° 16-16.455, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A7471WLB ; cf. Adeline Gouttenoire, extrait de La GPA devant la Cour de cassation : dernier acte, article paru dans Lexbase, éd. priv., n° 708 N° Lexbase : N9619BW8).

Dans ce prolongement, la Cour de cassation, dans ses arrêts du 4 novembre 2020, vient édicter une nouvelle règle s’agissant de l'adoption, par l'époux du père, de l'enfant né d’une GPA à l’étranger, dans la situation de l'absence de lien de filiation établi avec la femme ayant donné naissance à l'enfant.

Elle approuve alors la règle énoncée par la cour d’appel dans la première affaire, selon laquelle le droit français n'interdit pas, dans ce cas, le prononcé de l'adoption par l'époux du père de l'enfant né à l'étranger de cette procréation, sous deux conditions :

  • que le droit étranger autorise la convention de gestation pour autrui ;
  • et que l'acte de naissance de l'enfant, qui ne fait mention que d'un parent, ait été dressé conformément à la législation étrangère, en l'absence de tout élément de fraude.

Dans cette affaire, elle s’en remet alors à l’analyse détaillée à laquelle avait procédé la cour d’appel qui, de ses constatations et énonciations, avait exactement que déduit l'acte de naissance de l'enfant avait été régulièrement dressé en application de la loi indienne (laquelle permettait bien le recours à la gestation pour autrui lors de la conception de l’enfant et de sa naissance) et qu'en l'absence de filiation maternelle établie en Inde, l'adoption était légalement possible.

Dans la seconde affaire, en revanche, la Haute juridiction censure la décision, reprochant à la cour de ne pas avoir recherché, comme il le lui était demandé, si les documents produits, et notamment l'autorisation donnée le 10 décembre 2015, par la direction générale du registre civil, à l'officier de l'état civil de la commune mexicaine afin qu'il établisse l'acte de naissance de l'enfant, ne démontraient pas que cet acte de naissance, comportant le seul nom du père, était conforme à la loi mexicaine, de sorte qu'en l'absence de lien de filiation établi avec la femme ayant donné naissance à l'enfant, l'adoption plénière était juridiquement possible.

Pour aller plus loin : cf. ETUDE : La gestation ou maternité pour autrui, in La filiation (dir. A. Gouttenoire), Lexbase (N° Lexbase : E4415EY8).

newsid:475248

Licenciement

[Brèves] Au salarié de démontrer que la rupture de son contrat de travail constitue une mesure de rétorsion à son action en justice

Réf. : Cass. soc., 4 novembre 2020, n° 19-12.367, FS-P+B+I (N° Lexbase : A518933L)

Lecture: 2 min

N5196BY4

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par Charlotte Moronval

Le 10 Novembre 2020

► Le seul fait qu'une action en justice exercée par le salarié soit contemporaine d'une mesure de licenciement ne fait pas présumer que celle-ci procède d'une atteinte à la liberté fondamentale d'agir en justice.

Faits et procédure. Des actions en justice sont engagées par deux salariés, portant sur la question de leur lieu de pause. Mis à pied à titre conservatoire puis licenciés pour faute grave au motif de la réalisation d'une collecte bilatérale interdite et dangereuse, ils décident de saisir la juridiction prud’homale en référé, soutenant que leur licenciement intervient en violation de la liberté fondamentale d’agir en justice. La cour d’appel estime qu’il n’a pas lieu à référé et rejette leurs demandes. Les salariés forment alors un pourvoi en cassation.

La solution. Enonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi. En effet, la cour d'appel a constaté :

  • que les actions en justice engagées portaient sur la question du lieu de pause, soit sur une question sans rapport avec le motif de licenciement ;
  • que la lettre de licenciement ne contenait pas de référence à ces actions en justice ;
  • que la procédure de licenciement avait été régulièrement suivie ;
  • que la lettre de notification du licenciement était motivée en ce qu'elle contenait l'exposé de faits circonstanciés dont il appartient à la seule juridiction du fond de déterminer s'ils présentent un caractère réel et sérieux notamment au regard de la pratique antérieure, des consignes et de la formation reçues et qu'enfin, pour avoir été inopiné, le contrôle terrain n'en était pas moins une pratique dans l'entreprise dont la déloyauté n'était pas en l'état manifeste s'agissant de celui subi par les deux salariés.

Il en résultait que le licenciement ne présentait pas de caractère manifestement illicite. La cour d’appel a donc, sans inverser la charge de la preuve et procédant à la recherche prétendument omise, exactement déduit l'absence d'un trouble manifestement illicite.

A retenir. Il appartient au salarié considérant que son licenciement a été motivé par son action en justice de rapporter la preuve de ce lien.

V. récemment Cass. soc., 30 septembre 2020, n° 19-10.633, F-D (N° Lexbase : A70363WI) : « lorsque les faits invoqués dans la lettre de licenciement caractérisent une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient au salarié de démontrer que la rupture de son contrat de travail constitue une mesure de rétorsion à une action en justice introduite pour faire valoir ses droits ».

Sur le sujet, v. ETUDE : La cause réelle et sérieuse de licenciement pour motif personnel, Le motif lié à une atteinte à une liberté fondamentale, in Droit du travail, Lexbase (N° Lexbase : E5015ZN3).

 

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Procédure civile

[Brèves] Compétence territoriale du juge statuant sur des mesures d’instruction et inopposabilité d’une clause attributive de compétence territoriale

Réf. : Cass. civ. 2, 22 octobre 2020, n° 19-14.849, F-P+B+I (N° Lexbase : A85843YL)

Lecture: 4 min

N5214BYR

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par Alexandra Martinez-Ohayon

Le 10 Novembre 2020

► Le juge territorialement compétent pour se prononcer sur une requête déposée en vertu des dispositions de l’article 145 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1497H49), est « le président du tribunal susceptible de connaître de l’instance au fond ou celui dans le ressort duquel les mesures d’instruction in futurum sollicitées doivent, même partiellement, être exécutées, sans que la partie requérante ne puisse opposer une clause attributive de compétence territoriale ».

Faits et procédure. Dans cette affaire, suspectant des faits de concurrence déloyale, les sociétés L et A, ont saisi le président du tribunal de commerce de Lyon sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile d'une demande de désignation d'un huissier de justice aux fins d'investigations aux domiciles respectifs de Monsieur X et de Madame Z, qui était alors la présidente de la société suspectée de concurrence déloyale.

Le pourvoi. Les demanderesses au pourvoi font grief à l’arrêt rendu le 7 février 2019, par la cour d'appel de Lyon rendu sur renvoi après cassation (Cass. civ. 2, 1er mars 2018, n° 16-27.592 N° Lexbase : A0612XGR), de confirmer l’ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce de Lyon le 13 janvier 2016 et de rétracter celle du 30 juin 2015, « avec annulation des mesures d’instruction réalisées par les huissiers instrumentaires et restitution des données collectées par les mêmes dans leurs différents lieux d’intervention ».

Dans un premier temps, les intéressées énoncent la violation par la cour d’appel des articles 42 (N° Lexbase : L1198H47), 48 (N° Lexbase : L1215H4R), 145 (N° Lexbase : L1497H49) et 493 (N° Lexbase : L6608H7U) du Code de procédure civile. Elles indiquent que le juge compétent pour statuer sur une requête fondée sur l’article 145 du Code de procédure civile est le président de la juridiction susceptible de connaître l’affaire au fond ou celui  devant lequel les mesures d’instructions in futurum sollicitées doivent, même de manière partielle, être exécutées. En l’espèce, le président du tribunal de commerce de Lyon avait retenu que sa juridiction n’était pas territorialement compétente pour statuer sur cette requête. Les demanderesses font valoir également dans l’argumentation du moyen que les sièges sociaux des sociétés défenderesses et le domicile du défendeur étaient situés en dehors de la juridiction saisie, mais qu’il ressortait de la clause attributive de juridiction insérée dans l’acte de cession que le tribunal de commerce de Lyon était susceptible de connaître de l’action au fond.

Dans un second temps, les demanderesses soutiennent qu’il y a violation de l’article 48 du Code de procédure civile, en invoquant l’opposabilité d’une clause attributive de compétence territoriale à une partie tierce au contrat dans laquelle elle est insérée, du fait qu’elle est connue de cette partie et acceptée par cette dernière. En l’espèce, il a été retenu que seules les sociétés étaient liées par cette clause attributive de juridiction, et que les sociétés A et L ne pouvaient exercer d’action en responsabilité pour non-respect de la clause de non-concurrence, et également une action en concurrence déloyale contre le défendeur en se fondant sur cette clause. Les défenderesses font valoir que le défendeur avait signé la convention en qualité de gérant, accompagnée d’un engagement exprès et personnel de non-concurrence, et qu’en conséquence, il avait connaissance de cette clause attributive de juridiction, et que cette dernière devait être considérée comme acceptée de sa part dans ses relations avec la société A.

Réponse de la Cour. Après avoir énoncé la solution précitée, aux visas des articles 42, 46 (N° Lexbase : L1210H4L), 145 et 493 du Code de procédure civile, la Cour suprême, relève que les mesures d’instructions n’avaient pas été exécutées dans le ressort du tribunal ayant ordonné les mesures d’instruction, et également que le siège social de la société défenderesse et le domicile du défendeur n’étaient pas situés dans son ressort. Bien plus, elle relève également que ni le fait dommageable ni le dommage allégué par les demanderesses ne se sont produits dans le ressort de cette juridiction. Enfin, la juridiction saisie était susceptible de connaître de l’affaire au fond en vertu d’une clause attributive de juridiction. En conséquence, les Hauts magistrats énoncent que c’est à bon droit que le président du tribunal saisi avait rétracté son ordonnance et annulé les mesures d’instruction ayant été exécutées par l’huissier de justice en raison de son incompétence territoriale.

Solution. Le pourvoi est rejeté par la Cour suprême.

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Propriété intellectuelle

[Brèves] Déchéance de marque : possibilité pour le titulaire de se prévaloir de l'atteinte portée à ses droits intervenus avant la déchéance

Réf. : Cass. com., 4 novembre 2020, n° 16-28.281, FS-P+B (N° Lexbase : A936733C)

Lecture: 5 min

N5204BYE

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par Vincent Téchené

Le 10 Novembre 2020

► La déchéance d'une marque, prononcée en application de l'article L. 714-5 du Code de la propriété intellectuelle (N° Lexbase : L3738ADS), ne produisant effet qu'à l'expiration d'une période ininterrompue de cinq ans sans usage sérieux, son titulaire est en droit de se prévaloir de l'atteinte portée à ses droits sur la marque qu'ont pu lui causer les actes de contrefaçon intervenus avant sa déchéance.

Faits et procédure. Le titulaire de la marque française semi-figurative « Saint Germain » pour désigner notamment les boissons alcooliques, ayant appris qu’une société distribuait une liqueur de sureau sous la dénomination « St-Germain », a assigné cette société ainsi que le fabriquant et un sous-traitant de ce dernier en contrefaçon de marque. Ayant été déchu de ses droits sur la marque « Saint Germain » pour les produits précités à compter du 13 mai 2011, par un arrêt, devenu irrévocable, rendu dans une autre instance le 11 février 2014, le titulaire de la marque a maintenu ses demandes pour la période non couverte par la prescription et antérieure à la déchéance, soit entre le 8 juin 2009 et le 13 mai 2011.

Le TGI de Paris (TGI Paris, 3ème ch., 16 janvier 2015, n° 12/10354 (N° Lexbase : A6545NAN) et à sa suite la cour d’appel (CA Paris, Pôle 5, 1ère ch., 13 septembre 2016, n° 15/04749 N° Lexbase : A6613RZX) ayant rejeté cette demande, le titulaire de la marque a formé un pourvoi en cassation.

Le 26 septembre 2018, la Cour de cassation (Cass. com., 26 septembre 2018, n° 16-28.281, FS-D  N° Lexbase : A1927X8U) a saisi la CJUE d'une question préjudicielle portant sur l'interprétation des articles 5 § 1, sous b), 10 et 12 de la Directive n° 2008/95 du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des États membres sur les marques (N° Lexbase : L7556IBH).

Décision.  La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel au visa des articles L. 713-3, b) (N° Lexbase : L3730ADI) et L. 714-5 du Code de la propriété intellectuelle, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019 (N° Lexbase : L5296LTC), tels qu'interprétés à la lumière des articles 5 § 1, sous b), 10 et 12 de la Directive n° 2008/95 du 22 octobre 2008.

Elle rappelle que le premier de ces textes interdit, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public, l'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement.

En outre, le second de ces textes sanctionne par la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n'en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l'enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la déchéance ne pouvant prendre effet avant l'expiration de ce délai.

Or, répondant à la question préjudicielle, la CJUE, par un arrêt du 26 mars 2020 (CJUE, 26 mars 20202, aff. C-622/18 N° Lexbase : A24873KC ; J. Dagher, L. Ghalié et J. Albe, Lexbase Affaires, mai 2020, n° 635 N° Lexbase : N3296BYQ), a dit pour droit que l'article 5, paragraphe 1, sous b), l'article 10, paragraphe 1, premier alinéa, et l'article 12, paragraphe 1, premier alinéa, de la Directive n° 2008/95, lus conjointement avec le considérant 6 de celle-ci, doivent être interprétés en ce sens qu'ils laissent aux États membres la faculté de permettre que le titulaire d'une marque déchu de ses droits à l'expiration du délai de cinq ans à compter de son enregistrement pour ne pas avoir fait de cette marque un usage sérieux dans l'État membre concerné pour les produits ou les services pour lesquels elle avait été enregistrée conserve le droit de réclamer l'indemnisation du préjudice subi en raison de l'usage, par un tiers, antérieurement à la date d'effet de la déchéance, d'un signe similaire pour des produits ou des services identiques ou similaires prêtant à confusion avec sa marque. À cet égard, la CJUE a précisé qu'il convenait d'apprécier, au cours de la période de cinq ans suivant l'enregistrement de la marque, l'étendue du droit exclusif conféré au titulaire, en se référant aux éléments résultant de l'enregistrement de la marque et non pas par rapport à l'usage que le titulaire a pu faire de cette marque pendant cette période.

Par conséquent, pour la Haute juridiction, la déchéance d'une marque, prononcée en application de l'article L. 714-5 du Code de la propriété intellectuelle, ne produisant effet qu'à l'expiration d'une période ininterrompue de cinq ans sans usage sérieux, son titulaire est en droit de se prévaloir de l'atteinte portée à ses droits sur la marque qu'ont pu lui causer les actes de contrefaçon intervenus avant sa déchéance.

Ainsi, relevant que, pour rejeter les demandes formées par le titulaire de la marque, l'arrêt d’appel retient que celui-ci ne justifie d'aucune exploitation de la marque depuis son dépôt et en déduit que, faute pour la marque d'avoir été mise en contact avec le consommateur, son titulaire ne peut arguer ni d'une atteinte à sa fonction de garantie d'origine, ni d'une atteinte portée au monopole d'exploitation conférée par ladite marque, ni encore d'une atteinte à sa fonction d'investissement, la Cour de cassation en concclut que la cour d'appel a violé les textes visés.

 

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