Le Quotidien du 18 octobre 2019

Le Quotidien

Aide juridictionnelle

[Brèves] Rétablissement de l'AJ : nul besoin que l'avocat soit mentionné comme ayant la qualité de partie dans l'ordonnance rectificative

Réf. : CA Paris, 4 octobre 2019, n° 15/00474 (N° Lexbase : A4728ZQ8).

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par Marie Le Guerroué

Le 17 Octobre 2019

► L'aide juridictionnelle ne peut être retirée que par une décision du bureau d'aide juridictionnelle au terme d'une procédure contradictoire ;

► La décision de retrait est susceptible de recours ;

► Les décisions du bureau d'aide juridictionnelle sont notifiées à l'intéressé, et les décisions prononçant l'admission à l'aide juridictionnelle sont notifiées à l'avocat ; nul besoin que celui-ci soit mentionné comme ayant la qualité de partie dans l'ordonnance rectificative.

Telles sont les précisions apportées par la cour d'appel de Paris dans un arrêt du 4 octobre 2019 (CA Paris, 4 octobre 2019, n° 15/00474 N° Lexbase : A4728ZQ8).

Procédure. Un client exposait avoir désigné une avocate pour l'assister dans un litige. Il avait demandé l'aide juridictionnelle à son bénéfice pour qu'elle l'assiste devant le tribunal de grande instance et avait signé une convention d'honoraires qui n'avait vocation à s'appliquer qu'en cas de retrait de l'aide juridictionnelle. A la suite du jugement lui ayant alloué une indemnisation, l'avocate lui avait demandé de régler ses honoraires sur la base de la convention d'honoraires, avait obtenu un retrait de l'aide juridictionnelle et la fixation de ses honoraires par le Bâtonnier. Par ordonnance rectificative non susceptible d'appel, la cour d'appel de Paris avait finalement rejeté la demande de retrait et rétabli l'aide juridictionnelle, Le client avait sollicité la réformation de la décision du Bâtonnier intervenue antérieurement à la décision rectificative précitée.

Dispositions textuelles. La cour d’appel rappelle les dispositions textuelles applicables (loi du 11 juillet 1991, art. 50, art. 51 N° Lexbase : L8607BBE ; décret du 19 décembre 1991, art. 71, art. 72, art. 74, art. 51, art. 52, art. 50, art. 57 et art. 60 N° Lexbase : L0627ATE, dans sa version antérieure au décret du 27 décembre 2016 N° Lexbase : L6131LNE). Elle précise qu’il résulte de ces dispositions que l'aide juridictionnelle ne peut être retirée que par une décision du bureau d'aide juridictionnelle au terme d'une procédure contradictoire, la décision de retrait étant en outre susceptible de recours. Il en résulte, également, que les décisions du bureau d'aide juridictionnelle sont notifiées à l'intéressé, et que les décisions prononçant l'admission à l'aide juridictionnelle sont notifiées à l'avocat.

Analyse. Or, en l'espèce, il ressort expressément de l'ordonnance rectificative produite aux débats, qu'un recours avait été formé à l'encontre de la décision du BAJ ayant décidé le retrait du bénéfice de l'aide juridictionnelle accordée. Il ressort, également, de cette décision, que le recours avait été porté conformément aux textes précités devant la magistrate, agissant par délégation du premier président et qu'il avait été statué par voie d'ordonnance. S'il est exact que cette ordonnance ne mentionne pas l’avocate en qualité de partie, cette ordonnance vise bien la décision, sur laquelle elle est mentionnée, ainsi que le numéro BAJ, de sorte qu'il n'est pas établi que cette décision ne lui a pas été régulièrement notifiée.
Infirmation. Le client qui bénéficie par conséquent de l'aide juridictionnelle totale, ne doit payer aucun honoraire. L'ordonnance du bâtonnier doit donc être infirmée (cf. l’Ouvrage «La profession d’avocat» N° Lexbase : E9683ETS).

 

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Droit des étrangers

[Brèves] Demande de carte de séjour et vérification de l’avis rendu par le collège de médecin : quels sont les pouvoirs du préfet ?

Réf. : CE 2° et 7° ch.-r., 9 octobre 2019, n° 422974, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6663ZQT)

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N0734BYT

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par Marie Le Guerroué

Le 16 Octobre 2019

► S'il appartient au préfet, lorsqu'il statue sur la demande de carte de séjour, de s'assurer que l'avis rendu par le collège de médecins l’a été conformément aux règles procédurales fixées par le CESEDA et par l'arrêté du 27 décembre 2016 (arrêté relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile N° Lexbase : L0166LC7), il ne saurait en revanche porter d'appréciation sur le respect, par le collège des médecins, des orientations générales définies par l'arrêté du 5 janvier 2017 (arrêté fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'OFII, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (N° Lexbase : L5754LC4), en raison du respect du secret médical qui interdit aux médecins de donner à l'administration, de manière directe ou indirecte, aucune information sur la nature des pathologies dont souffre l'étranger.

► S'il est saisi, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus, d'un moyen relatif à l'état de santé du demandeur, il appartient au juge administratif, lorsque le demandeur lève le secret relatif aux informations médicales qui le concernent en faisant état de la pathologie qui l'affecte, de se prononcer sur ce moyen au vu de l'ensemble des éléments produits dans le cadre du débat contradictoire et en tenant compte, le cas échéant, des orientations générales fixées par l'arrêté du 5 janvier 2017.

 

Telles sont, notamment, les solutions retenues par le Conseil d’Etat dans une décision du 7 juin 2018 (CE 2° et 7° ch.-r., 9 octobre 2019, n° 422974, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6663ZQT).

 

Faits/Procédure. En l’espèce, une ressortissante guinéenne née en 1977, était entrée pour la première fois en France en 2007. Il lui avait été délivré, en 2012, un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale", régulièrement renouvelé jusqu'au 6 octobre 2017. Le 7 août 2017, elle avait présenté une demande de renouvellement de son titre de séjour, en qualité d'étranger malade, sur le fondement des dispositions du 11° de 1'article L. 313-11 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, au vu de l'avis émis le 28 septembre 2017 par le collège de médecins de l'OFII, qui relevait notamment que l'intéressée pourrait bénéficier d'un traitement approprié en Guinée, le préfet des Pyrénées Atlantiques a, par un arrêté du 19 octobre 2017, refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Le tribunal administratif de Pau a annulé cet arrêté et par un arrêt du 7 juin 2018, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé par le préfet des Pyrénées-Atlantiques contre ce jugement (CAA Bordeaux, 7 juin 2018, n° 18BX00876 N° Lexbase : A4809XTB). Le ministre de l’Intérieur forme un pourvoi et demande au Conseil d’Etat d'annuler cet arrêt.

 

Pouvoirs du préfet. Le Conseil d’Etat énonce, d’abord, qu’en vertu des articles L. 313-11, R. 313-22 (N° Lexbase : L9728LAK), R. 313-23 (N° Lexbase : L4222LP3) du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le collège des médecins de l'OFII, dont l'avis est requis préalablement à la décision du préfet relative à la délivrance de la carte de séjour prévue au 11° de l'article L. 313-11, doit accomplir sa mission dans le respect des orientations générales définies par l'arrêté du ministre chargé de la Santé du 5 janvier 2017 et émettre son avis dans les conditions fixées par l'arrêté du 27 décembre 2016 des ministres chargés de l'Immigration et de la Santé. S'il appartient au préfet, lorsqu'il statue sur la demande de carte de séjour, de s'assurer que l'avis a été rendu par le collège de médecins conformément aux règles procédurales fixées par le CESEDA et par l'arrêté du 27 décembre 2016, il ne saurait en revanche porter d'appréciation sur le respect, par le collège des médecins, des orientations générales définies par l'arrêté du 5 janvier 2017, en raison du respect du secret médical qui interdit aux médecins de donner à l'administration, de manière directe ou indirecte, aucune information sur la nature des pathologies dont souffre l'étranger.

 

Office du juge. Le Conseil précise, ensuite, que si le juge administratif est saisi, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus, d'un moyen relatif à l'état de santé du demandeur, il lui appartient, lorsque le demandeur lève le secret relatif aux informations médicales qui le concernent en faisant état de la pathologie qui l'affecte, de se prononcer sur ce moyen au vu de l'ensemble des éléments produits dans le cadre du débat contradictoire et en tenant compte, le cas échéant, des orientations générales fixées par l'arrêté du 5 janvier 2017.

 

Illustration. Pour le Conseil d'Etat, en jugeant qu'il appartient à l'administration de démontrer que le collège des médecins de l'OFII a apprécié la situation en respectant les orientations générales fixées par l'arrêté ministériel du 5 janvier 2017 et notamment, lorsqu'est en cause comme en l'espèce une pathologie psychiatrique, qu'il a émis son avis en évaluant le risque pour le ressortissant étranger de voir réactiver ses troubles psychiatriques en cas de retour dans son pays d'origine la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit.

 

Annulation. La Haute juridiction administrative annule l’arrêt rendu par la cour administrative d’appel de Bordeaux.

 

 

 

newsid:470734

Entreprises en difficulté

[Brèves] Autorité de la chose jugée dans le cadre de la vérification des créances et demande en paiement formée par le débiteur contre le créancier

Réf. : Cass. com., 9 octobre 2019, n° 18-17.730, F-P+B (N° Lexbase : A0037ZRS)

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N0826BYA

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par Vincent Téchené

Le 16 Octobre 2019

► La contestation d’une créance déclarée, au cours de la procédure de vérification du passif, n'a pas le même objet que la demande en paiement d'une somme d'argent formée contre le créancier déclarant ;

► Dès lors, si le débiteur, à l'occasion de la contestation de la créance, ne s'est pas prévalu de la compensation avec ses propres créances, ce qu'il n'avait pas à faire, la demande en paiement de celles-ci, qui ne se heurte pas à l'autorité de la chose jugée dans le cadre de la vérification des créances, est recevable.

Tel est l’enseignement d’un arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 9 octobre 2019 (Cass. com., 9 octobre 2019, n° 18-17.730, F-P+B N° Lexbase : A0037ZRS).

L'affaire. En l’espèce, une société a fait l'objet, le 6 octobre 2009, d'une procédure de sauvegarde et a bénéficié d'un plan arrêté le 22 mars 2011. Un créancier a déclaré une créance au titre de différentes factures, pour un montant qui tenait compte d'une compensation avec diverses sommes dont elle était elle-même débitrice. La société débitrice et les organes de la procédure ont refusé la compensation et contesté la créance qui, par une ordonnance du 21 mars 2011, a été admise pour un montant inférieur à celui déclaré. La débitrice a alors assigné la créancière en paiement des sommes qu'elle estimait lui être dues. Cette dernière a soulevé la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée par la décision d'admission. L’arrêt d’appel ayant rejeté cette fin de non-recevoir, la créancière s’est pourvue en cassation.

La décision. La Cour de cassation rappelle que la déclaration d'une créance au passif d'un débiteur soumis à une procédure collective ne tend qu'à la constatation de l'existence, de la nature et du montant de la créance déclarée, appréciés au jour de l'ouverture de la procédure (v. déjà, Cass. com., 19 mai 2004, n° 01-15.741, F-D N° Lexbase : A2656DCD). Puis énonçant la solution précitée, elle rejette le pourvoi.

Précisions. Sur l’autorité de la chose jugée attachée à l’admission d’une créance au passif, la Cour de cassation a déjà jugé que l'action en paiement du liquidateur, partie à la procédure de vérification des créances, qui vise à contester la compensation opérée par une banque quand il lui incombait de soulever en temps utile l'ensemble des moyens tendant à cette fin, est irrecevable pour se heurter au caractère définitif de la chose jugée (Cass. com., 14 octobre 2008, n° 07-16.704, F-D N° Lexbase : A8050EAE ; lire N° Lexbase : N7494BHZ). Ici, le liquidateur aurait dû contester, dans le cadre de la procédure de vérification, la compensation qui a été opérée. Non-contestée, cette dernière ne peut plus être remise en cause en raison de l’autorité de la chose jugée. En revanche, si, comme en l’espèce, la compensation n’a pas opéré, faute pour le débiteur de s’en être prévalue, il peut agir en paiement contre le créancier qui est également son débiteur, puisque l’autorité de la chose jugée ne porte que sur le montant déclaré, en dehors, ici, de toute compensation (cf. l’Ouvrage «Entreprises en difficulté» N° Lexbase : E0514EXC).

newsid:470826

Internet

[Brèves] Publicité ciblée sur internet : le Conseil d'Etat rejette les recours contre le plan d'action de la CNIL

Réf. : CE, 9° et 10° ch.-r., 16 octobre 2019, n° 433069 (N° Lexbase : A3699ZRG)

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N0841BYS

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par Vincent Téchené

Le 07 Novembre 2019

► La décision de la CNIL d’engager une concertation pour définir les nouvelles modalités pratiques d’expression du consentement en matière de publicité ciblée, et de laisser aux acteurs du secteur une période d’adaptation pour s’y conformer est légale.

Tel est le sens d’un arrêt rendu par le Conseil d’Etat le 16 octobre 2019 (CE, 9° et 10° ch.-r., 16 octobre 2019, n° 433069 N° Lexbase : A3699ZRG).

L'affaire. Le «RGPD» (Règlement n° 2016/679 du 27 avril 2016 N° Lexbase : L0189K8I) et la loi du 6 janvier 1978 modifiée (loi n° 78-17 N° Lexbase : L8794AGS) ont renforcé les exigences attendues des acteurs numériques, qui doivent s’assurer que l’internaute consent explicitement à ce que des «cookies» ou d’autres traceurs soient déposés dans son ordinateur ou téléphone, à des fins de publicité ciblée, lorsqu’il consulte des sites internet.

Pour tenir compte de ce nouveau cadre juridique, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a adopté, en juillet 2019, une délibération explicitant les nouvelles règles de consentement en matière de publicité ciblée (CNIL, délibération n° 2019-093 du 4 juillet 2019 N° Lexbase : Z780538P). Elle a par ailleurs décidé d’engager une concertation en vue de définir, au premier trimestre 2020, les modalités pratiques de recueil du consentement. Elle a également indiqué que les acteurs du secteur, une fois ces modalités arrêtées, auraient six mois pour s’y conformer. Plusieurs associations ont attaqué ces décisions.

La décision. Le Conseil d’Etat rappelle tout d’abord que la CNIL, qui est une autorité administrative indépendante, dispose d’un large pouvoir d’appréciation dans l’exercice de ses missions. Il en déduit que la CNIL pouvait élaborer un tel plan d’action et le rendre public, afin de parvenir à un meilleur respect effectif du droit de la protection des données personnelles.

Le Conseil d’Etat juge ensuite que, dans le cadre de ce plan, le délai laissé aux acteurs du secteur pour se conformer aux règles qui seront publiées à l’issue de la concertation n’est pas illégal. Il estime en effet que cette tolérance vise à permettre aux acteurs concernés de s’approprier ces nouvelles règles, dont la CNIL a correctement explicité la teneur, et ainsi de respecter pleinement les exigences fixées par le «RGPD» à l’horizon de l’été 2020.

Le Conseil d’Etat estime enfin que la stratégie de la CNIL ne méconnaît pas le droit au respect de la vie privée car elle contribue à remédier aux pratiques prohibées de publicité ciblée, et n’empêchera pas la Commission de réaliser des contrôles pendant cette période transitoire, en sanctionnant le cas échéant les manquements les plus graves à ce nouveau cadre juridique.

newsid:470841

(N)TIC

[Brèves] Vidéosurveillance : pas de violation du droit à la vie privée des caissières de supermarché espagnoles filmées secrètement par des caméras de sécurité

Réf. : CEDH, 17 octobre 2019, Req. n° 1874/13 et 8567/13 (N° Lexbase : A3700ZRH)

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N0842BYT

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par Charlotte Moronval

Le 23 Octobre 2019

► La Cour considère que l’utilisation comme preuves des images obtenues par vidéosurveillance n’a pas porté atteinte au caractère équitable de la procédure en l’espèce. Rien ne permet à la Cour de remettre en cause les conclusions des juridictions internes en ce qui concerne la validité et la portée des accords transactionnels signés par les requérantes.

Telle est la solution dégagée par la Cour européenne des droits de l'Homme dans un arrêt rendu le 17 octobre 2019 (CEDH, 17 octobre 2019, Req. n° 1874/13 et 8567/13 N° Lexbase : A3700ZRH).

L’affaire. Ayant constaté des disparités entre les stocks du magasin et ses ventes, ainsi que des pertes pendant plus de cinq mois, le directeur d’un supermarché installa des caméras de vidéosurveillance visibles ou cachées. Peu après avoir installé les caméras, il montra à un représentant syndical des images de salariées participant à des vols de marchandises dans le magasin. Les salariées furent licenciées pour motif disciplinaire. Elles saisissent le juge du travail pour licenciement abusif, voyant en particulier dans le recours à la vidéosurveillance cachée une violation de leur droit à la vie privée et estimant que les enregistrements ne pouvaient être versés au dossier.

La procédure. Invoquant les articles 8 (N° Lexbase : L4798AQR) et 6, § 1 (N° Lexbase : L7558AIR), les requérantes estiment inéquitables le recours à une vidéosurveillance dissimulée et l’utilisation par les juridictions nationales des données ainsi obtenues aux fins de conclure à la légitimité de leurs licenciements.

Dans son arrêt de chambre du 9 janvier 2018 (CEDH, 9 janvier 2018, Req. n° 1874/13, lire N° Lexbase : N2166BXI), la Cour a conclu, par six voix contre une, à la violation de l’article 8 de la Convention et, à l’unanimité, à la non-violation de l’article 6, § 1. Le 28 mai 2018, le collège de la Grande Chambre a accepté la demande du gouvernement espagnol tendant à renvoyer l’affaire devant la Grande Chambre.

La solution. La Cour juge que les tribunaux espagnols avaient minutieusement mis en balance les droits des employées du supermarché et ceux de l’employeur, et qu’ils avaient examiné en détail la justification de la vidéosurveillance. Un des arguments des requérantes était qu’elles n’avaient pas été averties au préalable de leur mise sous surveillance, malgré une obligation légale, mais la Cour juge qu’une telle mesure était clairement justifiée en raison des soupçons légitimes d’irrégularités graves et des pertes constatées, considérant l’étendue et les conséquences de cette mesure. Les tribunaux internes avaient donc conclu, sans outrepasser leur marge d’appréciation, que cette surveillance était proportionnée et légitime (sur La mise en place du contrôle des salariés, cf. l’Ouvrage «Droit du travail» N° Lexbase : E1366Y9H).

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Pénal

[Brèves] Diffamation d’un survivant de l’Holocauste : condamnation de l’Autriche pour violation du droit au respect de la vie privée

Réf. : CEDH, 10 octobre 2019, Req. 4782/18, Lewit c/ Autriche (disponible uniquement en anglais)

Lecture: 3 min

N0770BY8

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par June Perot

Le 16 Octobre 2019

► L’absence de prise en compte dans le procès, de la question centrale portant sur le fait de savoir si un survivant d’un camp de concentration a été diffamé par un article, traduit une défaillance de la part des tribunaux autrichiens dans la protection des droits du requérants ;

► la Cour en conclut que les juridictions internes n’ont jamais réellement analysé ce qui était au cœur de l’action en diffamation formée par le requérant parce qu’elles n’ont pas minutieusement examiné la question de la qualité pour agir et la question de savoir si les propos en cause avaient la même portée ou une portée distincte au regard de l’article litigieux ; les tribunaux n’ont donc pas minutieusement examiné le problème qui avait porté atteinte.

Telle est la position adoptée par la Cour européenne des droits de l’Homme dans un arrêt de chambre rendu le 10 octobre 2019 (CEDH, 10 octobre 2019, Req. 4782/18, Lewit c/ Autriche (disponible uniquement en anglais).

Résumé des faits. Les faits de l’espèce concernaient un ressortissant autrichien, dernier survivant de l’Holocauste âgé de 96 ans, qui se plaignait d’avoir été diffamé par un périodique de droite et de ce que les juridictions internes n’aient pas protégé son droit à sa réputation. Le périodique en question avait publié un article dans lequel les personnes libérées du camp de concentration de Mauthausen étaient qualifiées de «meurtriers en masse», de «criminels» et de «fléaux». Une enquête pénale avait été ouverte visant l’auteur de l’article, classée sans suite. L’auteur de l'article avait, par la suite, réitéré ses propos. Le requérant et neuf autres survivants qui avaient tous été emprisonnés dans des camps de concentration et libérés en 1945, ont formé une action fondée sur la loi relative aux médias (Mediengesetz) contre le périodique et l’auteur des propos. Ces derniers ont été déboutés au motif que le nombre de personnes libérées du camp de Mauthausen (environ 20 000) était si important que les demandeurs ne pouvaient pas être individuellement touchés par les propos tenus dans l’article. Les demandeurs n’avaient donc, selon le tribunal, pas qualité pour agir. En cause d’appel, les demandeurs soutenaient qu’ils étaient au contraire reconnaissables, d’abord parce que seule une poignée d’anciens prisonniers de Mauthausen étaient encore en vie, et ensuite parce qu’ils étaient connus comme étant des survivants de l’Holocauste militants. Pour autant, la cour d’appel a rejeté l’appel. Le requérant a saisi la CEDH.

Violation de l’article 8 de la CESDH. Rappelant sa jurisprudence selon laquelle la vie privée de chaque membre d’un groupe peut être touchée par des stéréotypes négatifs ou des propos diffamatoires (CEDH, 15 mars 2012, Req. 4149/04, Aksu c/ Turquie N° Lexbase : A6792IEB), la Cour constate tout d’abord que le requérant et les autres anciens prisonniers de Mauthausen, en tant que survivants de l’Holocauste, constituent un groupe social. Elle estime donc que, si l’intéressé n’était pas désigné nommément dans l’article, pour autant, l’affaire relève de sa vie privée et l’article 8 de la Convention (N° Lexbase : L1372A9P) est applicable. La Cour rappelle que l’article 8 impose de ménager un juste équilibre entre des intérêts en conflit : ceux de l’individu et ceux de la société en général. Or, les juridictions internes ne se sont même pas livrées à un tel exercice dans le procès. Globalement, le requérant a été lésé dans son droit à la protection de sa vie privée parce que les tribunaux n’avaient pas statué adéquatement sur son action en diffamation.

newsid:470770

Procédure pénale

[Brèves] Garde à vue des mineurs : assistance de l’avocat et information du représentant légal

Réf. : Cass. crim., 16 octobre 2019, n° 19-81.084, FS-P+B+I (N° Lexbase : A3698ZRE)

Lecture: 4 min

N0840BYR

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par June Perot

Le 23 Octobre 2019

► Le IV de l’article 4 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 (N° Lexbase : L4662AGR), issue de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 (N° Lexbase : L1605LB3) prévoit que le mineur doit être assisté par un avocat dès le début de la garde à vue, dans les conditions prévues aux articles 63-3-1 (N° Lexbase : L4969K8K) à 63-4-3 du Code de procédure pénale ; il doit être immédiatement informé de ce droit ; lorsque le mineur n’a pas sollicité l’assistance d’un avocat, cette demande peut également être faite par ses représentants légaux, qui sont alors avisés de ce droit lorsqu’ils sont informés de la garde à vue en application du II du même article ; lorsque le mineur ou ses représentants légaux n’ont pas désigné d’avocat, le procureur de la République, le juge chargé de l’instruction ou l’officier de police judiciaire doit, dès le début de la garde à vue, informer par tout moyen et sans délai le bâtonnier afin qu’il en commette un d’office ;

► cette information vise à garantir l’assistance effective du mineur gardé à vue par un avocat, ainsi que le libre choix de l’avocat qui prodiguera cette assistance ; cette information est prévue dans l’intérêt du mineur placé en garde à vue et son absence entraîne la nullité du placement en garde à vue ;

► il en résulte qu’en rejetant la requête en annulation de la seconde audition du mineur, alors qu’il n’a pas été assisté par un avocat dès le début de sa garde à vue et que ses parents n’ont pas été informés qu’ils pouvaient lui en désigner un, la chambre de l’instruction a méconnu la règle énoncée ci-dessus.

C’est ainsi que statue la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 16 octobre 2019 (Cass. crim., 16 octobre 2019, n° 19-81.084, FS-P+B+I N° Lexbase : A3698ZRE ; v. en ce sens : Cass. crim., 20 décembre 2017, n° 17-84.017, F-P+B N° Lexbase : A0735W94).

Résumé des faits. Un mineur soupçonné d’avoir été impliqué dans une tentative d’assassinat en récidive (en tant que complice) a été placé en garde à vue. Informé de son droit d’être assisté par un avocat, il a refusé d’en bénéficier. Les enquêteurs ont informé sa mère, représentante légale, de son placement en garde à vue, mais ne l’ont pas avisée de ce qu’elle avait le droit de demander que son fils soit assisté d’un avocat. Le mineur a été entendu une première fois sans être assisté d’un avocat. A l’issue de cette première audition, le mineur a demandé l’assistance d’un avocat. L’OPJ a pris les mesures pour faire désigner un avocat commis d’office et le contacter. Cet avocat s’est alors entretenu avec le mineur et était présent lors de la seconde audition, le même jour. Mis en examen, le mineur a présenté devant la chambre de l’instruction une requête en annulation de la procédure, soutenant que ses auditions en garde à vue avaient été effectuées en méconnaissance de ses droits à l’assistance et au choix d’un avocat.

La chambre de l’instruction a annulé la première audition. Elle a rejeté la demande d’annulation de la seconde audition, au motif que l’intéressé avait été assisté, au cours de celle-ci, comme il l’avait demandé, par un avocat commis d’office, l’irrégularité consistant à ne pas avoir informé ses parents de leur droit de choisir un avocat, étant sans incidence devant le choix exprimé par le mineur lui-même, qui l’emporte sur la volonté de ses parents, seulement subsidiaire, selon l’article 4 de l’ordonnance de 1945. Un pourvoi a été formé.

Cassation. Reprenant le principe susvisé, la Haute juridiction prononce une cassation avec renvoi, pour que la chambre de l’instruction de renvoi détermine l’étendue de l’annulation (cf. l’Ouvrage «Procédure pénale», Le droit de se défendre soi-même ou de choisir son avocat N° Lexbase : E1771EU7).

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Retraite

[Brèves] Absence de prise en compte de la contrepartie financière d’une clause de non-concurrence versée postérieurement à la liquidation de la retraite

Réf. : Cass. civ. 2, 10 octobre 2019, n° 18-20.849, F-P+B+I (N° Lexbase : A0147ZRU)

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par Laïla Bedja

Le 16 Octobre 2019

► Selon l'article R. 351-10 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L6876ADZ), la pension de retraite liquidée n’est pas susceptible d’être révisée pour tenir compte des versements afférents à une période postérieure à la date à laquelle a été arrêté le compte de l’assuré pour l’ouverture de ses droits à pension ;

ainsi, les cotisations attachées à la contrepartie d’une clause de non-concurrence dont le versement s’est poursuivi un an après la liquidation de la retraite ne peuvent être prises en compte dans le calcul des droits à pension de l’assuré.

Telle est la solution retenue par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 10 octobre 2019 (Cass. civ. 2, 10 octobre 2019, n° 18-20.849, F-P+B+I N° Lexbase : A0147ZRU).

L’affaire. Ayant obtenu la liquidation de ses droits à retraite personnelle à effet du 1er janvier 2013, un retraité a demandé la prise en compte, pour le calcul du montant de sa pension et l’augmentation de la surcôte qui lui a été allouée, des cotisations attachées à la contrepartie d’une clause de non-concurrence dont le versement s’est poursuivi un an après la liquidation de sa retraite. Il conteste devant la juridiction de Sécurité sociale le refus opposé à cette demande par la caisse d’assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT).

Le moyen du pourvoi. Débouté en appel de sa demande (CA Bourges, 28 juin 2018, n° 17/00067 N° Lexbase : A2703XUN), il forme un pourvoi en cassation. Selon lui, les cotisations se rapportant à la contrepartie financière d'une clause de non-concurrence dont le droit a été acquis par l'assuré antérieurement à la liquidation de la pension doivent être prises en compte pour le calcul de celle-ci, peu important la date de leur versement.

La solution. Enonçant la solution précitée, la Haute juridiction rejette ce dernier.

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