La lettre juridique n°694 du 6 avril 2017

La lettre juridique - Édition n°694

Avocats/Procédure

[Brèves] Représentation devant les chambres sociales des cours d'appel : non-application des règles de postulation

Réf. : CA Pau, 23 mars 2017, n° 16/04357 (N° Lexbase : A0376UGZ)

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N7525BWM

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par Anne-Laure Blouet Patin

Le 08 Avril 2017

Dès lors que la représentation devient obligatoire et la procédure écrite devant les chambres sociales des cours d'appel, l'article 5 de la loi du 31 décembre 1971 (N° Lexbase : L6343AGZ) trouve à s'y appliquer sans que le maintien d'une représentation par défenseurs syndicaux constitue un argument pertinent propre à écarter le principe de la postulation dès lors que les règles de la postulation et des limitations territoriales ne s'appliquent pas que dans le cadre du monopole général d'assistance de l'avocat. Aucune disposition légale n'instaure à ce jour une exception à ce principe et certainement pas la loi du 6 août 2015 (N° Lexbase : L4876KEC) qui a simplement étendu le périmètre de la postulation au ressort de chaque cour d'appel.
Tel est le rappel opéré par la cour d'appel de Pau, dans une ordonnance rendue le 23 mars 2017 (CA Pau, 23 mars 2017, n° 16/04357 N° Lexbase : A0376UGZ).
Cette position est contraire à celle adoptée par un arrêt récent de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, rendu le 24 février 2017 (CA Aix-en-Provence, 24 février 2017, n° 16/20625 N° Lexbase : A5439TP7) aux termes de laquelle les nouvelles dispositions de la loi du 6 août 2015 n'ont ni pour objet, ni pour effet d'étendre, à compter du 1er août 2016, les règles de postulation prévues par l'article 5 de la loi du 31 décembre 1971 aux procédures d'appel devant la chambre sociale de la cour d'appel (cf. l’Ouvrage "La profession d'avocat" N° Lexbase : E7425E9U).

newsid:457525

Avocats/Périmètre du droit

[Brèves] Relaxe du gérant de "Demander Justice" confirmée en cassation

Réf. : Cass. crim., 21 mars 2017, n° 16-82.437, FS-D (N° Lexbase : A6957UEE)

Lecture: 2 min

N7532BWU

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par Anne-Laure Blouet Patin

Le 07 Avril 2017

Les activités de "Demander Justice" ne constituent ni des actes de représentation, ni des actes d'assistance, actes que l'article 4 de la loi n° 71-1139 du 31 décembre 1971 (N° Lexbase : L6343AGZ) réserve aux avocats devant les juridictions et les organismes juridictionnels ou disciplinaires de quelque nature que ce soit.
Ainsi statue la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 21 mars 2017 (Cass. crim., 21 mars 2017, n° 16-82.437, FS-D N° Lexbase : A6957UEE).
On se souvient que, par décision du TGI en date du 13 mars 2014, le gérant d'une société à qui il était reproché, sans être régulièrement inscrit au barreau, d'avoir assisté ou représenté des parties devant les juridictions ou organismes juridictionnels en mettant en place un site "demanderjustice.com" et un autre site "saisirlesprud'hommes.com", destiné moyennant rémunération à réaliser les formalités de saisine de ces juridictions, avait été relaxé (TGI Paris, 30ème ch., 13 mars 2014, n° 13248000496 N° Lexbase : A9855MHH). La cour d'appel de Paris avait conclu également à la relaxe (CA Paris, Pôle 5, 12ème ch., 21 mars 2016, n° 14/04307 N° Lexbase : A9825RA7).
Pour renvoyer le prévenu des fins de la poursuite, l'arrêt d'appel relevait que les déclarations de saisine des juridictions étaient établies et validées informatiquement par le client lui-même, qu'elles étaient à son seul nom et comportaient sa seule signature ; s'il s'agissait d'actes judiciaires emportant saisine d'une juridiction, il n'était nulle part mentionné que la société agissait pour le compte et au nom de ces personnes, le nom de cette société n'apparaissant nulle part dans ce document, ni même d'ailleurs, son logo : aucun mandat tacite ne pouvait être recherché. Le rôle de la société était purement matériel, permettant la transmission informatique des documents numériques à un centre de traitement postal, puis, après impression et mise sous pli, leur envoi physique au greffe de la juridiction. Les juges ajoutaient, concernant la mission d'assistance, que la société n'avait pas assisté, ni même accompagné, un de ses clients à l'audience et que la seule mise à disposition par cette société à ses clients de modèles-type de lettres de mise en demeure par contentieux, d'un logiciel libre, édité par le ministère de la Justice, permettant de déterminer par défaut la juridiction territorialement compétente correspondant au domicile du défendeur, et de modèles Cerfa de déclarations de saisine des juridictions, ne saurait constituer l'assistance juridique que peut prêter un avocat à son client, à défaut de la prestation intellectuelle syllogistique consistant à analyser la situation de fait qui lui est personnelle pour y appliquer ensuite la règle de droit abstraite correspondante.
La Haute juridiction fait siens des motifs de la cour d'appel et rejette les pourvois de l'Ordre des avocats de Paris et du CNB (cf. l’Ouvrage "La profession d'avocat" N° Lexbase : E0989E9I).

newsid:457532

Bancaire

[Brèves] Contrat de prêt : sur la validité de la clause d'indexation prévoyant la révision du taux d'intérêt en fonction des variations du taux de change entre l'euro et une monnaie étrangère

Réf. : Cass. civ. 1, 29 mars 2017, 2 arrêts n° 15-27.231, FS-P+B+I (N° Lexbase : A6069UMQ) et n° 16-13.050, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A6072UMT)

Lecture: 2 min

N7566BW7

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par Vincent Téchené

Le 08 Avril 2017

La clause d'indexation prévoyant la révision du taux d'intérêt d'un prêt en fonction des variations du taux de change entre l'euro et une monnaie étrangère risquant d'avoir pour effet d'augmenter le montant du capital restant dû et, ainsi, la durée d'amortissement du prêt, ou les mensualités, sans plafond, lors des dernières années, il incombe au juge de rechercher d'office, notamment, si le risque de change ne pèse pas exclusivement sur l'emprunteur et si, en conséquence, la clause litigieuse n'a pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au détriment du consommateur et serait donc, à ce titre, abusive. Tel est l'enseignement de deux arrêts rendus par la première chambre civile de la Cour de cassation le 29 mars 2017 (Cass. civ. 1, 29 mars 2017, 2 arrêts n° 15-27.231, FS-P+B+I N° Lexbase : A6069UMQ et n° 16-13.050, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A6072UMT).
Ces deux affaires concernaient des prêts libellés en francs suisses et remboursables en euros dont une clause prévoyant la révision du taux d'intérêt en fonction des variations du taux de change. Dans les deux cas, les cours d'appel ont jugé régulière la clause d'indexation et rejeté les demandes en responsabilité et indemnisation formées par l'emprunteur.
La Cour de cassation censure les arrêts d'appel au visa de l'article L. 132-1 du Code de la consommation (N° Lexbase : L6710IMH), devenu L. 212-1 du même code (N° Lexbase : L3278K9B). Elle rappelle que la CJUE a dit pour droit que le juge national est tenu d'examiner d'office le caractère abusif d'une clause contractuelle dès qu'il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet et que, lorsqu'il considère une telle clause comme étant abusive, il ne l'applique pas, sauf si le consommateur s'y oppose (CJCE, 4 juin 2009, aff. C-243/08 N° Lexbase : A9620EHR). Et, aux termes du texte susvisé, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Ainsi, selon la Cour :
- dans le premier cas, selon le contrat, toute dépréciation de l'euro par rapport au franc suisse avait pour conséquence d'augmenter le montant du capital restant dû et, ainsi, la durée d'amortissement du prêt d'un délai maximum de cinq ans ;
- dans le second cas, selon le contrat, les mensualités étaient susceptibles d'augmenter, sans plafond, lors des cinq dernières années.
Par conséquent, il incombait au juge de rechercher d'office, notamment, si le risque de change ne pesait pas exclusivement sur l'emprunteur et si, en conséquence, la clause litigieuse n'avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au détriment du consommateur (cf. l’Ouvrage "Droit bancaire" N° Lexbase : E1015ATR).

newsid:457566

Concurrence

[Brèves] Compétence exclusive des juridictions spécialisées et de la cour d'appel de Paris en matière de pratiques anticoncurrentielles : la Cour de cassation amende sa jurisprudence

Réf. : Cass. com., 29 mars 2017, deux arrêts, n° 15-17.659, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A6067UMN) et n° 15-24.241, FS-P+B+I (N° Lexbase : A6068UMP)

Lecture: 2 min

N7456BW3

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par Vincent Téchené

Le 06 Avril 2017

A l'instar de ce que retient, en application de l'article R. 311-3 du COJ (N° Lexbase : L6510IAD), la deuxième chambre civile de la Cour de cassation lorsqu'un appel est formé devant une cour d'appel dans le ressort de laquelle ne se trouve pas la juridiction ayant rendu la décision attaquée (Cass. civ. 2, 9 juillet 2009, n° 06-46.220, FS-P+B N° Lexbase : A7198EIG), la Chambre commerciale juge, depuis plusieurs années, que, la cour d'appel de Paris étant seule investie du pouvoir de statuer sur les recours formés contre les décisions rendues dans les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du Code de commerce (N° Lexbase : L7575LB8), la méconnaissance de ce pouvoir juridictionnel exclusif est sanctionnée par une fin de non-recevoir, de sorte qu'est irrecevable l'appel formé devant une autre cour d'appel (Cass. com., 24 septembre 2013, n° 12-21.089, F-P+B N° Lexbase : A9414KLA), et que cette fin de non-recevoir doit être relevée d'office (Cass. com., 31 mars 2015, n° 14-10.016, F-P+B N° Lexbase : A0915NGY) ; cette règle a été appliquée à toutes les décisions rendues dans les litiges relatifs à l'article L. 442-6, même lorsqu'elles émanaient de juridictions non spécialement désignées.
Cette dernière solution est source, pour les parties, d'insécurité juridique quant à la détermination de la cour d'appel pouvant connaître de leur recours, eu égard aux termes mêmes de l'article D. 442-3 du Code de commerce (N° Lexbase : L9159IEX) ; elle conduit en outre au maintien de décisions rendues par des juridictions non spécialisées, les recours formés devant les autres cours d'appel que celle de Paris étant déclarés irrecevables, en l'état de cette jurisprudence. Il apparaît donc nécessaire d'amender cette jurisprudence, tout en préservant l'objectif du législateur de confier l'examen des litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 à des juridictions spécialisées.
Il convient donc de retenir qu'en application des articles L. 442-6, III, et D. 442-3, seuls les recours formés contre les décisions rendues par les juridictions du premier degré spécialement désignées sont portés devant la cour d'appel de Paris, de sorte qu'il appartient aux autres cours d'appel, conformément à l'article R. 311-3 du COJ, de connaître de tous les recours formés contre les décisions rendues par les juridictions situées dans leur ressort qui ne sont pas désignées par le second texte ; il en est ainsi même dans l'hypothèse où celles-ci auront, à tort, statué sur l'application du premier, auquel cas elles devront relever, d'office, l'excès de pouvoir commis par ces juridictions en statuant sur des demandes qui, en ce qu'elles ne relevaient pas de leur pouvoir juridictionnel, étaient irrecevables.
Tel est le principe énoncé par la Cour de cassation dans deux arrêts du 29 mars 2017 (Cass. com., 29 mars 2017, deux arrêts, n° 15-17.659, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A6067UMN et n° 15-24.241, FS-P+B+I N° Lexbase : A6068UMP).

newsid:457456

Cotisations sociales

[Brèves] Conformité du versement transport au principe d'égalité devant la loi et les charges publiques

Réf. : Cons. const., décision n° 2016-622 QPC du 30 mars 2017 (N° Lexbase : A4589UPN)

Lecture: 2 min

N7462BWB

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par Charlotte Moronval

Le 06 Avril 2017

Ne méconnaît pas le principe d'égalité devant la loi et les charges publiques le paragraphe I de l'article L. 2333-70 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L9245I3S), dans sa rédaction résultant de la loi n° 2009-1674 du 30 décembre 2009, de finances rectificative pour 2009 (N° Lexbase : L1817IGE), relatif au versement destiné aux transports. Telle est la solution retenue par le Conseil constitutionnel dans une décision rendue le 30 mars 2017 (Cons. const., décision n° 2016-622 QPC du 30 mars 2017 N° Lexbase : A4589UPN).
Dans cette affaire, le Conseil constitutionnel a été saisi le 30 décembre 2016 par le Conseil d'Etat (CE 3° et 8° ch.-r., 28 décembre 2016, n° 403900, inédit N° Lexbase : A4943S3H) d'une QPC posée à l'occasion d'un litige portant sur une délibération instituant le versement destiné aux transports. Cette QPC portait sur la conformité au principe d'égalité devant la loi et les charges publiques du paragraphe I de l'article L. 2333-70 du Code général des collectivités territoriales. Les requérants soulevaient, d'une part, une différence de traitement injustifiée entre les employeurs autorisés à assurer le transport collectif de leurs salariés jusqu'à leur lieu de travail et ceux qui, notamment en raison d'un plan de prévention des risques technologiques, ne le seraient pas. Ils estimaient, d'autre part, que le législateur méconnaissait l'étendue de sa compétence en ne fixant pas, au 2°, les conditions auxquelles est subordonné le remboursement du versement destiné aux transports lorsque les salariés sont employés à l'intérieur des périmètres d'urbanisation des villes nouvelles ou de certaines zones d'activité industrielle ou commerciale.
En énonçant la solution susvisée, le Conseil constitutionnel déclare le paragraphe I de l'article L. 2333-70 du Code général des collectivités territoriales conforme à la Constitution. Bien que ces dispositions établissent une différence de traitement, celle-ci est fondée sur la différence de situation existant entre, d'une part, les employeurs qui organisent le logement de leurs salariés sur le lieu de travail ou qui prennent en charge intégralement et à titre gratuit leur transport collectif et, d'autre part, ceux qui ne supportent aucune de ces charges. En instituant cette différence de traitement, le législateur s'est fondé sur des critères objectifs et rationnels, en rapport direct avec l'objet des dispositions contestées, qui est de tenir compte du fait que certains salariés n'ont pas à utiliser les transports publics collectifs, grâce à la politique conduite par leurs employeurs. Par ailleurs, le Conseil constitutionnel écarte le grief tiré de l'incompétence négative du législateur, ce moyen ne pouvant être soulevé que dans le cas où la méconnaissance par le législateur de sa propre compétence affecte par elle-même un droit ou une liberté que la Constitution garantit (cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" N° Lexbase : E3881AUB).

newsid:457462

Droit des étrangers

[Manifestations à venir] Le droit de l'asile en situation d'afflux massif : tensions et ambiguïtés

Lecture: 1 min

N7482BWZ

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par Marie Le Guerroué

Le 06 Avril 2017

Les jeudi 13 et vendredi 14 avril 2017 à l'Université de Clermont Auvergne se tiendra un colloque organisé par l'Ecole de Droit sur le thème suivant : "Le droit de l'asile en situation d'afflux massif : tensions et ambiguïtés".
  • Programme

Jeudi 13 avril 2017

14h30 : Accueil des participants par Christine Bertrand, Doyen de l'Ecole de droit (Université Clermont Auvergne)

14h40 : Introduction par Alexis Marie (Université Clermont Auvergne)

Le cadre général de l'afflux massif : un droit spécial ? sous la présidence de Julian Fernandez (Université Paris II - Panthéon Assas)

Le cadre international

15h : ONU et afflux massif, par Julien Cazala (Université d'Orléans)

15h20 : Principe de non-refoulement et afflux massif, par Hélène Raspail (Université du Maine)

15h40 : Approches et actions du HCR face à l'afflux massif, par Rolince Mbungo (UNHCR Paris, Administrateur Associé de Protection)

16h : Echanges et pause

Les cadres régionaux

16h40 : La Convention de l'Union africaine de 1969 et l'afflux massif, par Bérangère Taxil (Université d'Angers)

17h : L'Union européenne et l'afflux massif, par Corinne Balleix (Chargée de mission sur la politique migratoire européenne au ministère des Affaires étrangères)

L'éligibilité

17h20 : L'éligibilité des demandeurs d'asile fuyant des conflits armés, par Isabelle Moulier (Université Clermont Auvergne)

17h40 : Echanges

Vendredi 14 avril 2017

Gérer ou accueillir, sous la présidence de Mélanie Albaret (Université Clermont Auvergne)

9h : L'OFPRA "hors les murs", par Marie Salord (OFPRA, Chef de la division des affaires juridiques européennes et internationales)

9h20 : La solidarité des Etats membres à l'épreuve de l'afflux massif, par Thibaut Fleury-Graff (Université Rennes 1)

9h40 : Les palliatifs au sous-dimensionnement du dispositif d'accueil, par Karine Parrot (Université de Cergy-Pontoise)

10h : Echanges

10h20 : Pause

Retours d'expériences

10h40 : Calais, par Véronique Njo (HCR, Chargée de protection)

11h : Les Hotspots, par Darius Tavassoli (HCR, Chargé de protection)

11h20 : Un centre d'accueil et d'orientation (CAO), par Gérard Dubois (Maire de Pessat-Villeneuve)

11h40 : Echanges

Endiguer ou protéger ? sous la présidence de Christine Bertrand (Université Clermont Auvergne)

14h30 : De la réinstallation à l'externalisation, par Caroline Lantero (Université Clermont Auvergne)

14h50 : Les mineurs non-accompagnés, par Florian Aumond (Université de Poitiers)

15h10 : Echanges

  • Lieu

Ecole de Droit

Amphithéâtre Trudaine

41, Boulevard François Mitterrand

Clermont - Ferrand

newsid:457482

Droit rural

[Jurisprudence] Charge et risque de la preuve des conditions requises pour le bénéfice du salaire différé

Réf. : Cass. civ. 1, 4 janvier 2017, 2 arrêts, n° 15-26.392 (N° Lexbase : A4870S3R), et n° 15-29.015 (N° Lexbase : A4804S3C), F-D

Lecture: 5 min

N7506BWW

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par Franck Roussel, Docteur en droit, Chargé d'enseignement à l'Université de Bordeaux

Le 06 Avril 2017

Le contrat de travail à salaire différé a pour objet de dédommager le descendant d'un exploitant agricole (1) pour sa participation désintéressée à l'exploitation familiale dirigée par l'ascendant exploitant (C. rur., art. L. 321-13 et s. N° Lexbase : L1398IZS) (2). Le bénéfice de ce droit de créance d'origine légale est subordonné à plusieurs conditions (C. rur., art. L. 321-13, al. 1er). Ainsi, seul le descendant qui est âgé de plus de dix-huit ans au début de la période de participation à l'exploitation est admis à bénéficier d'un contrat de travail à salaire différé (3). Outre cette condition d'âge minimum (4), la loi requiert du créancier une participation qualifiée à l'exploitation agricole dont il s'agit (cf. l’Ouvrage "Droit rural" N° Lexbase : E9739E9L). En effet, seule une participation directe et effective du descendant aux travaux de mise en valeur du domaine agricole familial est de nature à lui permettre de revendiquer le droit de créance prévu par le Code rural et de la pêche maritime (5). Enfin, pour pouvoir valablement se prévaloir du droit au salaire différé, le descendant ne doit pas avoir été associé aux bénéfices et aux pertes de l'exploitation (6), ni avoir reçu de salaire en argent en contrepartie de sa collaboration (7) (cf. l’Ouvrage "Droit rural" N° Lexbase : E9740E9M). La preuve de ces deux dernières conditions pouvant se révéler délicate dès lors que les faits correspondants peuvent remonter à plusieurs dizaines d'années, on mesure sans mal l'importance que revêt la question classique de la charge et du risque de la preuve en la matière. A cet égard, la loi précise seulement que "la preuve de la participation à l'exploitation agricole dans les conditions définies aux articles L. 321-13 à L. 321-18 pourra être apportée par tous moyens" (C. rur., art. L. 321-19, al. 1er N° Lexbase : L3788AEZ). La preuve dont il s'agit incombe alors, conformément aux articles 9 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1123H4D) et 1353 du Code civil (N° Lexbase : L1013KZK) (8), au descendant qui agit en reconnaissance et en paiement de la créance de salaire différé. Tout au plus, afin de faciliter l'administration de la preuve de la participation à l'exploitation du descendant dans les conditions requises par la loi, l'article L. 321-19, alinéa 2, du Code rural et de la pêche maritime dispose-t-il que "les parties pourront effectuer chaque année une déclaration à la mairie, laquelle devra être visée par le maire qui en donnera récépissé" (cf. l’Ouvrage "Droit rural" N° Lexbase : E9741E9N).

En revanche, on pourrait davantage hésiter à se prononcer a priori sur l'identité de celui à qui incombe, dans le procès civil de revendication d'une créance de salaire différé, la preuve de l'absence d'association aux résultats de l'exploitation et de rémunération du descendant. En effet, il est classique de souligner la difficulté qu'il y a d'établir, comme ici, la preuve d'un fait négatif. L'évolution de la jurisprudence sur ce point précis est à cet égard remarquable. Ainsi, dans un premier temps, la Cour de cassation a estimé que la preuve de l'absence d'association aux résultats de l'exploitation et de rémunération devait être rapportée par le défendeur à l'action en reconnaissance et paiement de la créance de salaire différé (9). Suivant cette analyse, il revenait donc seulement au descendant de l'exploitant agricole d'établir sa participation directe et effective à l'exploitation. Il bénéficiait ainsi d'une présomption simple d'absence d'association aux résultats de l'exploitation et de rémunération, laquelle devait être combattue activement par les défendeurs à l'action.

Toutefois, cette analyse n'est plus celle qui est retenue par les Hauts magistrats. En effet, depuis un revirement de jurisprudence opéré par un arrêt en date du 3 mars 1987, la Cour de cassation considère désormais, de manière plus conforme au droit commun, que "c'est à celui qui se prétend bénéficiaire d'un contrat de travail à salaire différé d'apporter la preuve qu'il remplit les conditions légales et notamment qu'il n'a reçu aucune contrepartie pour sa collaboration à l'exploitation" (10). Il a d'ailleurs été jugé que cette exigence, qui ne constitue qu'une illustration du principe général de droit selon lequel c'est à celui qui réclame le bénéfice d'un droit de justifier qu'il remplit les conditions pour ce faire, n'est pas contraire à l'exigence d'un procès équitable posée par l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (N° Lexbase : L7558AIR) (11). L'appréciation des juges du fond est ainsi souveraine en la matière, sous réserve d'un contrôle léger par la Cour de cassation.

L'analyse de la jurisprudence récente montre toutefois que cette solution, pourtant bien établie, fait l'objet d'une application contrastée devant les juridictions du fond. Les deux arrêts rapportés, rendus par la première chambre civile de la Cour de cassation le 4 janvier 2017, illustrent le propos. Ainsi, dans la première décision (n° 15-26.392), les Hauts magistrats refusent-ils d'accueillir le moyen en cassation dirigé par le descendant contre l'arrêt attaqué dans la mesure où, sous le couvert de griefs non fondés, il s'agissait seulement de remettre en discussion, devant la Cour de cassation, les appréciations de la cour d'appel ayant souverainement estimé que le prétendu créancier de salaire différé ne démontrait pas qu'il n'avait pas reçu de rémunération pour sa collaboration, ni qu'il n'avait pas été associé aux bénéfices et aux pertes de l'exploitation.

Dans le second arrêt en revanche (n° 15-29.015), les juges du second degré avaient cru pouvoir accueillir favorablement la revendication d'une créance de salaire différé par le descendant, aux motifs que les attestations produites par ses cohéritiers étaient trop imprécises pour établir qu'il avait personnellement profité des fruits de l'exploitation agricole familiale, qu'il n'était pas démontré qu'il ait perçu le produit de la vente de lait d'animaux en pacage durant la période où il avait été aide familial et qu'il avait reçu par ailleurs diverses subventions. Selon eux, il pouvait en effet en être déduit que la participation du descendant à l'exploitation n'avait donné lieu à aucune contrepartie permettant d'exclure la gratuité de sa participation. Ainsi motivée, la décision attaquée ne pouvait échapper à la censure. La Cour de cassation la prononce effectivement, pour violation de la loi, sur le visa des articles L. 321-13 du Code rural et de la pêche maritime et 1315, devenu 1353 du Code civil. En effet, suivant les Hauts magistrats, la cour d'appel ne pouvait statuer comme elle l'a fait, dès lors qu'il incombait au descendant de démontrer qu'il n'avait pas reçu de rémunération pour sa collaboration, ni n'avait été associé aux bénéfices et aux pertes de l'exploitation. Faute pour le descendant d'établir cette preuve, les juges du second degré auraient dû au contraire rejeter sa prétention.

Pour terminer, il faut souligner que la portée de la confirmation prétorienne selon laquelle c'est sur celui qui prétend à un salaire différé que pèse le risque du défaut de preuve des conditions requises par la loi dépasse le seul droit processuel. Ainsi, cette règle ne doit pas être perdue de vue par le notaire lorsqu'il est appelé à rédiger un acte opérant la transmission préparée de l'exploitation agricole ou le règlement de la succession d'un ascendant exploitant agricole. En effet, il lui revient, le cas échéant, d'exiger de celui des cohéritiers qui prétendrait bénéficier, à cette occasion, d'un contrat de travail à salaire différé qu'il établisse activement la preuve qu'il a bien participé directement et effectivement à l'exploitation dans les conditions prévues par l'article L. 321-13, alinéa 1er, du Code rural et de la pêche maritime après ses 18 ans révolus et qu'il n'a pas été associé aux bénéfices et aux pertes de l'exploitation, ni n'a reçu de salaire en argent en contrepartie de sa collaboration (12). Quoi que l'on en dise, cette dernière preuve, négative, n'est pas insurmontable en pratique. En effet, il faut, mais il suffit que le descendant rapporte la preuve de faits positifs qui rendent le fait négatif vraisemblable. Tel sera le cas, par exemple, s'il produit tous ses relevés bancaires, lesquels ne font apparaître aucun versement de salaire. Par ailleurs, les obligations administratives, sociales, comptables et fiscales qui pèsent sur les exploitations agricoles s'agissant de l'emploi de la main-d'oeuvre familiale devraient également faciliter, en pratique, la tâche du descendant en ce domaine. A défaut de pouvoir rapporter une telle preuve et/ou en cas de contentieux né et persistant entre les cohéritiers sur le sujet, le notaire ne pourra alors que renvoyer le descendant à se pourvoir en justice à cet effet, en l'informant précisément du poids du risque du défaut de la preuve des conditions requises par la loi en la matière.


(1) Ou, dans le cas de prédécès de celui-ci, ses enfants vivants ou représentés (C. rur., art. L. 321-14, al. 1er N° Lexbase : L3783AET), ainsi que, le cas échéant, son conjoint (C. rur., art. L. 321-15 N° Lexbase : L3784AEU et L. 321-16 N° Lexbase : L3785AEW).
(2) Sur la question générale, v. not. Dict. Perm. Entr. Agr., V° Salaire différé, p. 1081 s., Mise à jour 180 (date d'arrêt des textes : 12 janvier 2015) ; J.-Cl. Civil Code, art. 831 à 834 : fasc. 40 par F. Roussel, n° 1, p. (4) ; 5, 2013 - Rép. civ. Dalloz, V° Partage (4° modes d'attribution spécifiques) par C. Brenner, n° 295 s., p. 42 s. ; janvier 2009.
(3) V. Cass. civ. 1, 13 avril 2016, n° 15-17.316, F-P+B (N° Lexbase : A6811RI4).
(4) Cette condition ne se confond pas avec l'âge de la majorité en vigueur lors de la participation à l'exploitation, v. Cass. civ. 1, 2 avril 2008, n° 07-10.217 (N° Lexbase : A7681D7M), RD rur., 2008, comm. 101, note F. Roussel.
(5) V. Cass. civ. 1, 22 octobre 2002, n° 00-22.428, FS-P+B (N° Lexbase : A3382A3N), Bull. civ. I, n° 241 (exécution de tâches ménagères : refus du bénéfice du salaire différé) ; Cass. civ. 1, 10 juin 1980, n° 79-12.117 (N° Lexbase : A9282CGU), Bull. civ. I, n° 180 (réalisation de simples activités de jardinage : refus du bénéfice du salaire différé).
(6) V. Cass. civ. 1, 28 novembre 1966, n° 65-10.245 (N° Lexbase : A7212UWZ), Bull. civ. I, n° 525 (exploitation en société de fait par l'ascendant et le descendant : refus du bénéfice du salaire différé).
(7) V. Cass. civ. 1, 11 février 1997, n° 95-13.304 (N° Lexbase : A2834CRE), RD rur., 1998, p. 208, n° 3, obs. F. Roussel (affiliation du descendant en qualité d'aide familial : absence de présomption de paiement d'un salaire).
(8) C. civ., art. 1315 anc.
(9) V. not. Cass. civ. 1, 6 février 1962, n° 60-11.490 (N° Lexbase : A1149UTQ), Bull. civ. I, n° 85 ; Cass. civ. 1, 28 novembre 1966, n° 65-11.676 (N° Lexbase : A7211UWY), Bull. civ. I, n° 520 ; Cass. civ. 1, 28 juin 1972, n° 71-12.154 (N° Lexbase : A3409CKH), Bull. civ. I, n° 173 ; Cass. civ. 1, 14 octobre 1981, n° 79-15.946 (5ème moyen) (N° Lexbase : A4576CHX), Bull. civ. I, n° 296.
(10) V. Cass. civ. 1, 3 mars 1987, n° 85-16.354 (N° Lexbase : A6621AAH), Bull. civ. I, n° 84 ; D., 1987, p. 321, note A. Breton ; RTDCiv., 1988, p. 159, obs. J. Patarin ; jurisprudence constante.
(11) V. Cass. civ. 1, 17 octobre 2000, n° 98-22.046 N° Lexbase : A7788AHW), Bull. civ. I, n° 249 ; RTDCiv., 2001, p. 406, obs. J. Patarin.
(12) A cet égard, il convient de bien souligner que l'inscription du descendant auprès de la mutualité sociale agricole (MSA) en qualité d'aide familial ou d'associé d'exploitation est insuffisante à établir, à elle seule, une participation directe, effective et gratuite à l'exploitation familiale (v. Cass. civ. 1, 13 avril 2016, n° 15-17.316 préc.). En effet, cet élément ne constitue, tout au plus, qu'un simple indice parmi d'autres (v. F. Roussel, obs. préc. sous Cass. civ. 1, 11 février 2017). Il doit ainsi être complété par la production de tous écrits, témoignages, aveux et autres présomptions, en sorte de pouvoir emporter, le cas échéant, la conviction d'un juge saisi de la difficulté.

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Expropriation

[Chronique] Chronique de droit de l'expropriation - Avril 2017

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par Pierre Tifine, Professeur à l'Université de Lorraine (UFR Droit, économie et administration de Metz), directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition publique, directeur adjoint de l'IRENEE

Le 06 Avril 2017

Lexbase Hebdo - édition publique vous propose, cette semaine, de retrouver la chronique d'actualité de droit de l'expropriation rédigée par Pierre Tifine, Professeur à l'Université de Lorraine et directeur adjoint de l'Institut de recherches sur l'évolution de la Nation et de l'Etat (IRENEE). Elle traitera tout d'abord des conditions de mise eu oeuvre de la procédure spéciale d'expropriation en vue de la résorption de l'habitat insalubre (CE 9° et 10° ch.-r., 18 janvier 2017, n° 383374, mentionné aux tables du recueil Lebon). Elle revient ensuite sur les particularités du contentieux de l'expropriation concernant les règles de péremption de l'instance relatives à la procédure de fixation des indemnités (Cass. civ. 3, 19 janvier 2017, n° 15-27.382, FS-P+B). Enfin sont évoquées les conséquences du principe du contradictoire dans la procédure d'appel concernant le contentieux des jugements indemnisant les personnes expropriées (Cass. civ. 3, 23 février 2017, n° 15-28.832, F-D).
  • La circonstance que certains des lots concernés par la procédure d'expropriation ne sont pas à usage d'habitation ne saurait faire obstacle à la mise en oeuvre de la procédure d'expropriation prévue par l'article 13 de la loi du 10 juillet 1970 (CE 9° et 10° ch.-r., 18 janvier 2017, n° 383374, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A3259S9L)

La loi n° 70-612 du 10 juillet 1970, tendant à faciliter la suppression de l'habitat insalubre ([LXB=L2048A4M)]), dite loi "Vivien", a instauré une procédure simplifiée d'expropriation, sans enquête préalable ni arrêté de cessibilité. Ces dispositions ont été récemment abrogées et recodifiées à droit constant aux articles L. 511-1 (N° Lexbase : L8042I4M) et suivants de Code de l'expropriation par l'ordonnance n° 2014-1345 du 6 novembre 2014, relative à la partie législative du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique (N° Lexbase : L7867I47). Ce sont toutefois les dispositions de la loi de 1970 qui sont applicables dans la présente affaire.

Selon ces dispositions, la procédure spéciale d'expropriation en vue de la suppression de l'habitat insalubre est susceptible de concerner principalement deux types d'immeubles : ceux qui sont déclarés insalubres à titre irrémédiable en application de l'article L. 1331-29 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L7787LCE) ; et ceux à usage total ou partiel d'habitation qui ont fait l'objet d'un arrêté de péril en application de l'article L. 511-2 du Code de la construction et de l'habitation (N° Lexbase : L3229KWI) et assorti d'une ordonnance de démolition ou d'interdiction définitive d'habiter.

En outre, peuvent aussi être concernés "les immeubles qui ne sont eux-mêmes ni insalubres, ni impropres à l'habitation, lorsque leur expropriation est indispensable à la démolition d'immeubles insalubres ou d'immeubles menaçant ruine, ainsi que des terrains où sont situés les immeubles déclarés insalubres ou menaçant ruine lorsque leur acquisition est nécessaire à la résorption de l'habitat insalubre, alors même qu'y seraient également implantés des bâtiments non insalubres ou ne menaçant pas ruine".

Si ces dispositions, qui figurent aujourd'hui au 3° de l'article L. 511-1 du Code de l'expropriation, sont supposées s'appliquer "à titre exceptionnel", le Conseil d'Etat n'avait jamais eu l'occasion, jusqu'à présent, de se prononcer sur leur champ d'application. Les rares décisions rendues par des juridictions du fond prônent une interprétation plutôt restrictive de ces dispositions. Certes, le tribunal administratif de Paris a eu l'occasion de considérer qu'était légal un arrêté préfectoral autorisant "l'expropriation de toutes les parcelles comprises dans le périmètre d'un îlot d'insalubrité dès lors que les immeubles qui ne sont pas insalubres constituent de par leur situation à l'intérieur dudit îlot un obstacle à la démolition des immeubles insalubres ou à l'aménagement de l'îlot" (1). Les juges vont néanmoins contrôler que les immeubles concernés sont bien "indispensables" à la démolition d'immeubles déclarés insalubres ou menaçant ruine, ce caractère devant être démontré par l'expropriant (2). Il a été jugé sur ce point que le fait qu'un immeuble est enclavé entre deux immeubles insalubres n'est pas lui-même de nature à révéler que son expropriation était indispensable à la démolition des immeubles voisins (3). Notons toutefois, sur ce point, qu'il n'est plus expressément exigé, contrairement à ce que prévoyait la rédaction initiale de la loi "Vivien" que les terrains concernés soient "contigus ou voisins" d'immeubles insalubres ou menaçant ruine. On voit mal, toutefois, comment l'expropriation d'un immeuble ni insalubre, ni impropre à l'habitation, pourrait être indispensable à une opération de résorption de l'habitat insalubre sans être "contigu ou voisin" à ces immeubles.

En l'espèce, le problème soumis au Conseil d'Etat porte sur l'articulation entre les dispositions des actuels 1° et 2°, d'une part, et 3° de l'article L. 511-1 du Code de l'expropriation. La requérante considère que l'immeuble dont elle est propriétaire n'étant pas à usage d'habitation, celui-ci ne saurait être exproprié au titre de la procédure d'expropriation dérogatoire du droit commun visant à la résorption de l'habitat insalubre. De fait, les 1° et 2° de l'actuel article L. 511-1 ne visent que les immeubles à usage d'habitation, ce qui est tout à fait cohérent au regard de l'objet de la procédure. Il restait toutefois à savoir si le 3° du même article, qui permet, comme on l'a vu, d'exproprier des immeubles ni insalubres ni impropres à l'habitation indispensables à l'opération projetée, pouvait s'appliquer également à des immeubles qui ne sont pas à usage d'habitation. Si le texte ne le mentionne pas expressément, les juges du Conseil d'Etat considèrent que le fait que certains des lots concernés par la procédure d'expropriation ne seraient pas à usage d'habitation ne saurait faire obstacle à la mise en oeuvre de la procédure d'expropriation initialement prévue par l'article 13 de la loi du 10 juillet 1970. L'hypothèse aujourd'hui visée par le 3° de l'article L. 511-1 doit donc être envisagée de façon autonome : elle a vocation à permettre -à la marge- d'exproprier des immeubles de toute nature, ni insalubres ni menaçant ruine, dès lors que leur expropriation est une condition nécessaire à la mise en oeuvre de la procédure décrite par les articles L. 511-1 et suivants du Code de l'expropriation.

  • Appel d'un jugement de fixation de l'indemnité d'expropriation et péremption de l'instance (Cass. civ. 3, 19 janvier 2017, n° 15-27.382, FS-P+B N° Lexbase : A7141S9D)

Dans un arrêt du 19 janvier 2017, la troisième chambre civile de la Cour de cassation revient sur les particularités du contentieux de l'expropriation concernant les règles de péremption de l'instance. Plus précisément, elle détermine le moment à partir duquel les parties ne sont plus tenues d'accomplir de diligences permettant d'éviter l'extinction de l'instance d'appel.

Rappelons tout d'abord que la péremption d'instance, qui est visée par l'article 386 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L2277H44), est un mécanisme qui a pour effet d'éteindre l'instance lorsque, pendant un délai de deux ans, les parties n'ont accompli aucune diligence.

En l'espèce, en l'absence d'accord amiable entre une société et une commune, celle-ci avait saisi le juge de l'expropriation en vue de la fixation de l'indemnité d'expropriation dont elle est le bénéficiaire. La commune avait fait appel du jugement le 7 septembre 2010.

L'article R. 13-49 du Code de l'expropriation alors applicable (N° Lexbase : L3177HLA) (4), précisait que l'appelant devait, à peine de déchéance, déposer ou adresser son mémoire et les documents qu'il entend produire au greffe de la chambre dans un délai de deux mois à dater de l'appel.

Selon ce même article, l'intimé devait, à peine d'irrecevabilité, déposer ou adresser son mémoire en réponse et les documents qu'il entend produire au greffe dans le mois de la notification du mémoire de l'appelant.

Ces dispositions du Code de l'expropriation avaient été respectées en l'espèce. La commune avait en effet déposé son mémoire le 4 novembre 2010, lequel avait été notifié par le greffe le 9 novembre 2010 à la société et au commissaire du Gouvernement. La société, quant à elle, avait posté un mémoire le 3 décembre 2010, enregistré par ce greffe le 6 décembre 2010. La commune avait ensuite posté un deuxième mémoire le 22 décembre 2010 et elle avait accompli ses dernières diligences le 8 novembre 2011 par l'envoi de pièces postées le 9 novembre 2011. L'instance avait ensuite été radiée le 13 décembre 2011, dans l'attente du résultat des procédures en cours devant les juridictions administratives.

Par un mémoire en date du 12 décembre 2013 -soit plus de deux ans après ses dernières diligences- la commune avait sollicité le rétablissement de l'instance. Toutefois, dans l'arrêt attaqué en date du 22 septembre 2015, la cour d'appel de Versailles avait constaté la péremption de l'instance (CA Versailles, 22 septembre 2015, n° 13/09227 N° Lexbase : A4867NPX).

Certes, les mémoires avaient été déposés dans les délais prescrits, et dès lors les parties n'avaient normalement plus à accomplir de diligences de nature à faire progresser l'instance, la direction de celle-ci relevant alors du juge. Il en résultait que l'instance ne pouvait, en principe, faire l'objet d'une péremption pour défaut d'accomplissement de diligences pendant deux ans. Il doit toutefois en aller autrement, selon la cour d'appel, quand une radiation a été prononcée. Celle-ci n'ayant pas d'effet interruptif, la péremption n'avait donc été interrompue que par les dernières diligences de la commune constituées par l'envoi de pièces adressées le 9 novembre 2011. Dés lors, pour la cour d'appel, l'instance était bien périmée, ce qui avait conduit la commune à se pourvoir en cassation.

Le raisonnement de la cour d'appel est censuré par la Cour de cassation qui considère qu'en matière de procédure d'expropriation, dès lors que les parties ont déposé leurs écritures dans les délais, elles n'ont plus à accomplir de diligences pour éviter la péremption de l'instance. Cette solution est conforme à la jurisprudence antérieure de la Cour de cassation, qui avait censuré le raisonnement d'une cour d'appel qui avait prononcé la péremption d'instance "alors qu'elle avait constaté que les parties avaient déposé leurs écritures dans les délais impartis par l'article R. 13-49 du Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, et alors, qu'après l'expiration de ces délais, la direction de la procédure échappait aux parties, qui n'avaient plus à accomplir de diligence de nature à faire progresser l'instance" (5). Notons enfin que si cette solution s'applique dans le cadre d'un premier appel, elle n'a pas vocation à être mise en oeuvre, en revanche, lorsque c'est la cour d'appel de renvoi qui est saisie après cassation du jugement de fixation des indemnités (6).

  • Principe du contradictoire et procédure d'appel dans le contentieux des jugements indemnisant les personnes expropriées (Cass. civ. 3, 23 février 2017, n° 15-28.832, F-D N° Lexbase : A2440TP3)

Dans un arrêt du 23 février 2017, la Cour de cassation effectue un rappel utile des règles applicables au dépôt des mémoires des parties dans le cadre de la procédure d'appel des jugements fixant les indemnités d'expropriation. Comme en première instance, la procédure d'appel sur ces jugements est une procédure écrite, la cour d'appel statuant sur des mémoires.

Ce ne sont pas les dispositions de l'article 954 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L0386IGE) qui ont ici vocation à s'appliquer, mais celles spécifiques de l'article R. 13-49 du Code de l'expropriation alors en vigueur qui définissent les conditions d'échange des mémoires. Selon ces dispositions, "l'appelant doit, à peine de déchéance, déposer ou adresser son mémoire et les documents qu'il entend produire au secrétariat de la chambre dans un délai de deux mois à dater de l'appel". Il s'agit là d'une formalité substantielle dont le non accomplissement doit être relevé d'office par la cour d'appel. Quant à l'intimé, il doit "déposer ou adresser son mémoire en réponse et les documents qu'il entend produire au secrétariat de la chambre dans le mois de la notification du mémoire de l'appelant". Ces dispositions ont été considérées par la Cour de cassation comme n'étant pas incompatibles avec le droit à un procès équitable garanti aux termes de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme (N° Lexbase : L7558AIR) (7).

On notera ici que ces dispositions applicables à la présente affaire n'ont pas été reprises exactement à l'identique par le nouvel article R. 311-26 du Code de l'expropriation (N° Lexbase : L2157I7Z) entré en vigueur le 1er janvier 2016. En effet, désormais, l'appelant dispose d'un délai de trois mois pour déposer ses conclusions et les documents qu'il entend produire, l'inobservation de ce délai étant désormais sanctionné par la caducité de la déclaration d'appel. Quant à l'intimé, il lui appartient, à peine d'irrecevabilité, de déposer les conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant.

Dans la présente affaire, l'arrêt attaqué avait fixé le prix d'acquisition par une société d'un bien immobilier appartenant à une SCI, sur la cession duquel il avait exercé son droit de préemption. La cour d'appel avait déclaré irrecevables le mémoire de la SCI du 29 septembre 2014, ainsi que son mémoire n° 3 avec les pièces nouvelles jointes au motif qu'ils auraient été présentés hors délai (CA Paris, Pôle 2, 1ère ch., 8 octobre 2015, n° 15/01655 N° Lexbase : A8340NSP).

En principe, les développements nouveaux contenus dans un mémoire complémentaire déposé hors délai sont irrecevables alors même que le mémoire principal a été déposé dans les deux mois de l'appel (8). Cependant, alors même qu'ils sont présentés hors délai, les éléments complémentaires soulevés en réplique au mémoire de la partie intimée doivent être examinés par le juge (9). Par ailleurs, après le délai de deux mois, l'exproprié à toujours la possibilité de déposer un mémoire additionnel pour modifier sa demande ou fournir d'autres éléments à la cour (10). Or, en l'espèce, les juges d'appel avaient omis de rechercher si les mémoires litigieux ne contenaient pas des éléments complémentaires, en réplique au mémoire de la commune ou aux conclusions du commissaire du Gouvernement, qui auraient été recevables. Au visa de l'article 16 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1133H4Q), la Cour de cassation considère que la cour d'appel de Paris à violé le principe du contradictoire en omettant de solliciter les observations préalables des parties sur ce moyen relevé d'office.


(1) TA Paris, 13 juillet 1973, Brion, Tables, p. 667.
(2) CAA Versailles, 9 juin 2011, n° 10VE00176 (N° Lexbase : A7209UWW).
(3) CAA Bordeaux, 5ème ch., 26 janvier 2009, n° 07BX00243 (N° Lexbase : A8189ELU).
(4) Ces dispositions sont actuellement codifiées à l'actuel article R. 311-26 du Code de l'expropriation (N° Lexbase : L2157I7Z).
(5) Cass. civ . 3, 26 janvier 2011, n° 09-71.734, FS-P+B (N° Lexbase : A8549GQP), Bull. civ. III, n° 13, AJDI, 2012. 93, chron. S. Gilbert, BICC, 2011, n° 608, AJCT, 2011, p. 197, obs. L. Foresti.
(6) Cass. civ. 3, 25 septembre 2013, n° 12-22.079, FS-P+B (N° Lexbase : A9469KLB).
(7) Cass. civ. 3, 13 avril 2005, n° 04-70.069; FS-P+B (N° Lexbase : A8807DHN), Bull. civ. III, 2005, n° 92, RD imm., 2005, p. 269, chron. C. Morel ; Cass. civ. 3, 19 mai 2015, n° 13-26.879, F-D (N° Lexbase : A5380NI4), Bull. civ. III, 2014, n° 30, AJDA, 2014, p. 1420, Dr. 2014, comm. 124, nos obs..
(8) Cass. civ. 3, 25 novembre 1998, n° 97-70132, publié au bulletin (N° Lexbase : A0111CKC), AJDI, 1999, p. 531, obs. C. Morel, Bull. civ. III, n° 224, RD imm., 1999, n° 1, p. 74, chron. C. Morel et F. Donnat.
(9) Cass. civ. 3, 27 mai 1999, n° 98-70.030, inédit au bulletin (N° Lexbase : A1579C4A), D., 1999, inf. rap. p. 179, RD imm., 1999, n° 3, p. 390, chron. C. Morel, AJDI, 1999, p. 1146, note M. Huyghe, Bull. civ. III, 1999, n° 137 ; Cass. civ. 3, 9 juin 1999, n° 98-70.112, publié au bulletin (N° Lexbase : A7866CGG), Bull. civ. III, 1999, n° 137, AJDI, 1999, p. 1146, obs. M. Huyghe, D., 1999, inf. rap. p. 179, RD imm., 1999, p. 390, chron. C. Morel et B. Ribadeau-Dumas ; Cass. civ. 3, 23 novembre 2005, n° 04-70.101, FS-D (N° Lexbase : A7605DLA).
(10) Cass. civ., 3, 29 janvier 2007, avis n° 0070003 (N° Lexbase : A1143UTI).

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Fiscalité des entreprises

[Brèves] Absence de déclaration de son résultat par une société membre d'un groupe fiscal intégré : aucune conséquence sur la détermination du résultat de l'ensemble du groupe

Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 31 mars 2017, n° 393253, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A0464UTD)

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par Jules Bellaiche

Le 12 Avril 2017

L'absence de déclaration de son résultat, bénéficiaire ou déficitaire, par une société membre d'un groupe fiscal intégré ne saurait, à elle seule, faire obstacle à sa prise en compte dans la détermination du résultat d'ensemble par la société mère du groupe. Telle est la solution retenue par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 31 mars 2017 (CE 9° et 10° ch.-r., 31 mars 2017, n° 393253, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A0464UTD). En l'espèce, une société filiale, membre du groupe fiscal intégré dont la société mère requérante, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant, en matière d'impôt sur les sociétés, sur les exercices clos en 2003, 2004 et 2005, à l'issue de laquelle lui a été adressée une proposition de rectification datée du 30 juin 2006. Le 9 mars 2007, une proposition de rectification a été notifiée à la société mère, tirant les conséquences sur le résultat d'ensemble du groupe, au titre de ces trois exercices, des rectifications ainsi apportées aux résultats de la filiale. Cette proposition, à laquelle était jointe la proposition de rectification du 30 juin 2006, refusait en outre la prise en compte, dans le résultat d'ensemble de l'exercice clos le 30 juin 2006 du déficit réalisé au titre de cet exercice par la filiale, au seul motif que cette société n'avait pas déposé de déclaration de résultat au titre de cet exercice.
Pour la Haute juridiction, qui à donné raison à la société requérante, en jugeant que l'administration avait pu légalement refuser la prise en compte de ce déficit dans le résultat d'ensemble du groupe, alors qu'elle n'avait pas rectifié au préalable le résultat de la société filiale au titre de l'exercice 2006, la cour a commis une erreur de droit au regard du principe dégagé (CAA Bordeaux, 7 juillet 2015, n° 14BX00067 N° Lexbase : A1142UTH) .

newsid:457539

Fonction publique

[Brèves] Effet interruptif de prescription d'une lettre informant l'agent de l'intention de l'administration de récupérer les sommes lui ayant été indûment versées

Réf. : CE 2° et 7° ch.-r., 31 mars 2017, n° 405797, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A5997UWZ)

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N7492BWE

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par Yann Le Foll

Le 07 Avril 2017

Tant la lettre par laquelle l'administration informe un agent public de son intention de répéter une somme versée indûment qu'un ordre de reversement ou un titre exécutoire interrompent la prescription de deux ans à la date de leur notification. Ainsi statue le Conseil d'Etat dans un avis rendu le 31 mars 2017 (CE 2° et 7° ch.-r., 31 mars 2017, n° 405797, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A5997UWZ).
Les règles fixées par l'article 37-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations (N° Lexbase : L0420AIE), sont applicables à l'ensemble des sommes indûment versées par des personnes publiques à leurs agents à titre de rémunération, y compris les avances et, faute d'avoir été précomptées sur la rémunération, les contributions ou cotisations sociales. En l'absence de toute autre disposition applicable, les causes d'interruption et de suspension de la prescription biennale instituée par les dispositions de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 sont régies par les principes dont s'inspirent les dispositions du titre XX du livre III du Code civil.
Il en résulte le principe précité (cf. l’Ouvrage "Fonction publique" N° Lexbase : E9666EPP).

newsid:457492

Huissiers

[Jurisprudence] Le créancier titulaire d'un titre exécutoire notarié peut en requérir un second, judiciaire, pour la même créance. Et alors ?

Réf. : Cass. civ. 1, 1er mars 2017, n° 15-28.012, F-P+B (N° Lexbase : A0014TSC)

Lecture: 8 min

N7468BWI

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par Jean-Jacques Bourdillat, Docteur en droit, Juriste consultant au Cridon-Lyon, Chargé de cours à l'Université Lumière-Lyon 2

Le 06 Avril 2017

La première chambre civile de la Cour de cassation retient que l'acte notarié, bien que constituant un titre exécutoire, ne revêt pas les attributs d'un jugement et aucune disposition légale ne fait obstacle à ce qu'un créancier dispose de deux titres exécutoires pour la même créance. Au prononcé de l'arrêt de rejet ici rapporté, dirigé vers le solennel Bulletin, rendu le 1er mars 2017 par la première chambre civile, et -surtout- à la connaissance du motif de ce rejet, les praticiens du droit, qu'ils soient banquiers (en premier), avocats, huissiers de justice et -aussi- notaires, se sont immédiatement projetés un peu plus d'une année en arrière.

Par trois arrêts rendus le même jour, le 18 février 2016 (Cass. civ. 2, 18 février 2016, trois arrêts, n° 15-13.945 N° Lexbase : A4582PZQ, n° 15-13.991 N° Lexbase : A4561PZX et n° 15-15.778 N° Lexbase : A4586PZU, FS-P+B), c'était la deuxième chambre civile qui assénait déjà par trois fois la même sentence. La même sentence avec ce même motif qu'elle voulait ériger en règle jurisprudentielle. Ce que jugeait là la deuxième chambre, la première le reprend aujourd'hui à son compte, de sorte que, le principe nous paraît fermement posé (I). En statuant de la sorte, la Cour régulatrice donne, selon nous, une ligne directrice on ne peut plus claire que tous les acteurs de la procédure devront suivre (II).

Au préalable, rappelons et exposons les données chronologiques de fait et de droit qu'avait à connaître cette fois la Haute juridiction, car si le motif du rejet est resté le même un an après, la matière processuelle à traiter n'était pas tout à fait la même.

Le 23 octobre 2006, un prêt immobilier est reçu par un acte notarié, consenti par un établissement bancaire et financier au profit d'un particulier qui désire acquérir un appartement en l'état futur d'achèvement. L'acte authentique sera revêtu de la formule exécutoire et vaudra donc titre exécutoire notarié. Le premier incident de paiement non régularisé du prêt date du 5 novembre 2010, en foi de quoi, on ne peut mieux avisé et conseillé, l'établissement prêteur assigne sa débitrice défaillante en paiement dès le 2 mars 2011 devant le tribunal de grande instance de Gap. Il s'évince des pièces accessibles, que le recours à cette voie d'action a lieu "en l'état notamment de l'incertitude de la validité de l'acte notarié". Nonobstant cette instance pendante devant cette juridiction, et en exécution du titre exécutoire notarié précité, la banque fait procéder le 21 juin 2013 à une saisie-attribution. La débitrice saisie engage alors une contestation devant le juge de l'exécution de Gap. A titre principal, et parmi d'autres griefs, elle soulève la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de son prêteur. Cette prétention ne prospère pas et est rejetée par un jugement du 6 novembre 2014. Par un arrêt du 17 novembre 2015 (CA Grenoble, 17 novembre 2015, n° 14/05358 N° Lexbase : A2575NXN), la cour d'appel de Grenoble, statuant comme juge de l'exécution du second degré, rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action après avoir opéré une simple substitution de motifs que nous écartons ici. Pour la formation grenobloise, l'acte introductif d'instance diligenté par l'établissement prêteur afin d'obtenir un second titre exécutoire a été interruptif de la prescription biennale de l'ancien article L. 137-2 du Code de la consommation (N° Lexbase : L7231IA3). La débitrice éconduite poursuit sa ligne de défense devant les Juges suprêmes. Aux termes de l'arrêt rapporté, ces derniers la rejettent pour le motif que nous connaissons. A notre tour, répétons-le : l'acte notarié, bien que constituant un titre exécutoire, ne revêt pas les attributs d'un jugement et aucune disposition légale ne fait obstacle à ce qu'un créancier dispose de deux titres exécutoires pour la même créance.

I - Pour ceux qui, peut-être, jusqu'au début de ce mois pouvaient encore ne pas être convaincus de la jurisprudence qu'avait fixé la deuxième chambre civile dans sa série d'arrêts du 18 février 2016, la messe est aujourd'hui dite. C'est désormais un principe on ne peut mieux posé, et même fermement posé, qui veut que rien, en droit, interdise au créancier titulaire d'un titre exécutoire notarié d'en requérir un second, par la voie judiciaire, pour la même créance.

A titre liminaire, notons que les processualistes auront vite relevé le double caractère, pertinent et judicieux, de l'orientation qui fut fait du pourvoi formé contre l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble statuant comme juge de l'exécution. L'ultime recours est dirigé vers la première chambre civile, alors que, chacun le sait, l'affaire pouvait être attribuée à la connaissance de la deuxième chambre.

Postulant -sans en avoir bien sûr la certitude- que ce choix de la première chambre fut stratégique, c'est-à-dire volontaire et délibéré, la décision, rendue le 1er mars 2017, ne peut en avoir que plus de poids sur la solution rappelée. Au-delà du fait que nous étions déjà pleinement assuré du bien-fondé -de droit- de la position adoptée l'an dernier par la deuxième chambre civile, l'orientation permet de savoir que, désormais, les deux formations de la Haute juridiction sont sur la même fréquence.

De la même façon, en statuant avec la motivation que nous savons, la première chambre clarifie la décision qu'elle avait prise au travers d'un arrêt de rejet qu'elle avait rendu le 16 octobre 2013 (Cass. civ. 1, 16 octobre 2013, n° 12-21.917, F-P+B N° Lexbase : A0985KNS) et dont certains avaient pu croire que la détention d'un titre exécutoire notarié par le créancier interdisait à ce dernier de venir devant le juge afin d'obtenir un titre de condamnation. Pour autant, saisir le juge pour faire spécialement liquider une créance assise par un titre exécutoire notarié, comme c'était alors le cas, est une chose, et saisir le même juge pour obtenir un titre de condamnation en est une autre. A ceux qui, peut-être, verront dans l'arrêt de ce 1er mars un revirement de la première chambre civile, nous ne jetterons pas la pierre, et nous objecterons seulement que si les deux espèces soumises à la même formation se ressemblaient, à y regarder de plus près, les questions de fond à régler étaient fort dissemblables. A supposer qu'hier il ait pu y avoir doute ou ambiguïté sur la portée de la décision naguère prononcée, aujourd'hui, le voile est complètement levé. Et il importe peu de savoir si, en premier, ce sont les arrêts rendus par la deuxième chambre civile le 18 février 2016 qui ont commencé de le soulever.

En raison, et est-il nécessaire de le rappeler comme le font les deux chambres civiles de notre Cour suprême, de ce qu'un titre exécutoire notarié "ne revêt pas les attributs d'un jugement", rien n'interdit maintenant au créancier porteur du premier de ces titres d'attraire son débiteur devant le juge judiciaire pour obtenir un autre titre de ce dernier pour, le cas échéant ensuite, poursuivre si ce n'est un recouvrement forcé, du moins, pour commencer, un recouvrement amiable. L'ordre public -ou un certain ordre public- n'en sera-t-il pas renforcé ? Nous en sommes persuadés. De la même façon, ne nous trouvons-nous pas avec une parfaite illustration du procès équitable ? La même réponse positive s'impose : au débiteur qui peut à tout instant -ou presque- contester la régularité et donc la portée de l'acte notarié devant son juge naturel, son créancier peut aussi à tout instant -ou presque- prendre le même chemin afin de requérir un titre qui bénéficie de l'autorité puis de la force de chose jugée. Une chose jugée que ne possède jamais une chose contractée.

II. - Nous en sommes d'autant plus persuadés que si quelques-uns (chagrins ou non) ont pu lire dans les arrêts du 18 février 2016 l'expression selon laquelle cette jurisprudence, soit au mieux, venait porter secours à certains titres exécutoires notariés, soit au pire, ramenait (rabaissait ?) ceux-là en second rang, il échet de mettre l'accent sur le fait que, dans la décision rapportée, et dès le début du litige, il était su et rappelé, jusque dans cet arrêt de rejet, que l'instance interruptive de prescription engagée le 2 mars 2011 devant le juge judiciaire, l'était "en l'état notamment de l'incertitude de la validité de l'acte notarié qui constituait un titre exécutoire notarié". Dit autrement, et quand bien même l'une des causes de saisine du juge par le créancier serait le risque d'invalidité du titre conventionnel revêtu de la formule exécutoire, la voie judiciaire reste et demeure ouverte. La Haute juridiction, notons-le, ne trouve rien de particulier à redire à ce moyen qui, pour certains, aurait pu avoir un effet dirimant. Mais, d'ailleurs, en quoi cela aurait-il pu être dirimant ? Difficile de répondre à une telle question avec des arguments non seulement de droit, mais encore convaincants.

En apportant sa pierre à l'édifice avancé en premier par la deuxième chambre civile le 18 février 2016, la première chambre contribue à son tour à participer à la fonction régulatrice qui échoit à la Cour suprême. A chacun maintenant d'en tirer les justes conséquences.

Nous n'aborderons pas la question de l'application de ce qui doit être acquis par les juridictions du fond. Face à des cas identiques à ceux qui furent soumis à chacune des deux Hautes formations, à quoi bon résister sur le respect d'une règle de droit consacrée par la jurisprudence et qui a le mérite de la clarté ? Les juridictions de première instance s'exposeraient à être infirmées par les juges d'appel ; et si ces derniers entendaient prendre une voie jurisprudentielle divergente, ils s'exposeraient à une censure certaine. En statuant comme elle l'a fait un peu plus d'une année après son homologue, la première chambre civile a sinon confirmé et explicité sa jurisprudence du 16 octobre 2013, du moins évité une contradiction de point de vue entre ces deux juridictions et écarté la nécessité de réunir une chambre mixte.

Du point de vue des parties, c'est-à-dire de façon plus précise du point de vue de ses défenseurs, chacune d'entre elles sait on ne peut mieux aujourd'hui ce qu'elle doit faire afin de garantir au mieux leurs défenses et leurs intérêts.

Du côté du créancier déjà titulaire d'un titre exécutoire notarié, libre à celui-là de solliciter un titre judiciaire lorsque la nécessité apparaîtra. A ceux qui, à tort, crurent voire poindre une espèce de déclin du titre exécutoire notarié, et penser que tout titre exécutoire notarié devrait conduire à un passage obligatoire par la case Palais, il n'y a pas de souci à avoir. Les dossiers, dans lesquels la nécessité d'un second titre fait jour, sont des épiphénomènes aisément identifiables par les praticiens avisés. Ainsi que nous le voyons ici au travers de l'arrêt rapporté, ces hypothèses sont parfaitement connues et n'ayons pas de scrupule à les qualifier, aujourd'hui, d'isolées.

Du côté du débiteur, ses droits à un procès équitable non seulement demeurent, mais aussi, nous l'avons dit, sont étroitement renforcés par le biais de la saisine du juge judiciaire. Partant de là, à lui de ne pas avancer, ni soutenir de vains moyens qui, aujourd'hui sont voués à un échec certain. Si déjà toute défense est par définition et par nature responsable, une défense concentrée sur des moyens judicieux -et pourquoi pas novateurs- pourra porter sa pleine efficacité et ne fera pas naître de faux espoirs.

Enfin, et ce serait une faute de l'oublier, n'omettons pas l'exercice de parfaite pédagogie auquel l'huissier de justice requis pourra être exposé au profit du débiteur à condition qu'il en soit parfaitement averti au préalable. L'arrêt rapporté en est un bon exemple. Au côté de l'assignation en justice pour obtenir un second titre exécutoire, retenons, comme ici, l'hypothèse de l'exécution. Voici un débiteur qui a été partie contractante à un acte notarié, revêtu de la formule exécutoire. Ensuite de cet acte, et parfois plusieurs années après, son créancier l'assigne devant une formation pour obtenir sa condamnation pour la même créance. Alors que l'affaire demeure toujours pendante devant la formation de jugement, le titre exécutoire notarié ressort et est mis à exécution... Dur, dur, parfois que le droit et ses arcanes qui veut donc qu'on soit exécuté -au sens de nos voies d'exécution- avant même d'être condamné. Face au questionnement légitime du débiteur, l'huissier instrumentaire pourra toujours se réfugier derrière cette formule d'actualité : "Et alors ? " Ici comme là, ce sera fort court comme réponse et pas forcément convaincant. Mais au moins ici, l'explication de droit existe. Elle existe et tient.

newsid:457468

Procédure pénale

[Brèves] Du contrôle de la mesure de garde à vue par la chambre de l'instruction

Réf. : Cass. crim., 28 mars 2017, n° 16-85.018, FP-P+B+R+I (N° Lexbase : A6075UMX)

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par Aziber Seïd Algadi

Le 06 Avril 2017

Il incombe à la chambre de l'instruction de contrôler que la mesure de garde à vue remplit les exigences de l'article 62-2 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L9627IPA) et, dans l'exercice de ce contrôle, elle a la faculté de relever un autre critère que celui ou ceux mentionnés par l'officier de police judiciaire. Telle est la solution d'un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation, rendu le 28 mars 2017 (Cass. crim., 28 mars 2017, n° 16-85.018, FP-P+B+R+I N° Lexbase : A6075UMX).
En l'espèce, dans le cadre d'une enquête préliminaire, Mme Y, maire, de même que trois autres personnes, a, sur convocation des enquêteurs, été placée en garde à vue le 16 juin 2015, pour, selon le procès-verbal de notification, permettre l'exécution des investigations impliquant sa participation ou sa présence et garantir sa présentation devant le procureur de la République. Elle a été entendue, avant que, le soir même, la garde à vue ne soit levée, puis reprise le lendemain matin. Dans la journée du 17 juin 2015, l'intéressée a été confrontée à l'une des autres personnes gardées à vue, puis présentée, avec celles-ci, au procureur de la République, qui a requis l'ouverture d'une information. Mise en examen le même jour du chef de soustraction, détournement ou destruction de bien d'un dépôt public par le dépositaire ou l'un de ses subordonnés et placée sous contrôle judiciaire, Mme Y a déposé une requête en nullité de pièces de la procédure, notamment de celles relatives à sa garde à vue et des actes subséquents. Pour rejeter ces requêtes et dire la garde à vue régulière, la cour d'appel a énoncé que cette mesure était justifiée par l'objectif d'empêcher d'éventuelles concertations dont l'une a eu lieu avant que la garde à vue ne soit levée, pour la nuit, et que le fait que les autres n'ont été organisées que le lendemain n'est pas significatif de ce que les auditions réalisées auraient pu, avec la même efficacité, être menées en dehors de toute coercition. Les juges ont ajouté qu'au vu des données recueillies au cours de l'enquête, le procureur de la République pouvait, avant même le début des gardes à vue, considérer comme possible que certaines des personnes entendues lui soient déférées, et que ce magistrat a effectivement décidé à la fin de la mesure d'ouvrir une information et de présenter les personnes déférées à un juge d'instruction. Ils ont conclu que la garde à vue était logique et nécessaire et que ces mesures ont pu valablement être décidées au regard des 1°, 2° et 5° de l'article 62-2 précité.
La Cour de cassation confirme la décision ainsi rendue car, relève-t-elle, en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que la mesure de garde à vue était l'unique moyen de parvenir à l'un au moins des objectifs prévus par l'article 62-2 du Code de procédure pénale, la chambre de l'instruction a justifié sa décision (cf. l’Ouvrage "Procédure pénale" N° Lexbase : E4293EUK).

newsid:457448

Procédures fiscales

[Brèves] Notion de délai raisonnable en matière de réclamations pour les contestations relatives à l'assiette de l'imposition et au recouvrement

Réf. : CE Sect., 31 mars 2017, n° 389842, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A0457UT4)

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N7478BWU

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par Jules Bellaiche

Le 06 Avril 2017

Le délai raisonnable en matière de réclamations, s'agissant des contestations relatives à l'assiette de l'imposition et celles relatives au recouvrement, ne peut excéder un an. Telle est la solution retenue par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 31 mars 2017 (CE Sect., 31 mars 2017, n° 389842, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A0457UT4). En l'espèce, l'administration a assujettis les requérants à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 1987 et 1989, lesquelles ont été mises en recouvrement le 30 septembre 1991. A la suite de deux réclamations adressées les 31 décembre 1992 et 24 mars 1993, ils ont obtenu deux dégrèvements partiels en octobre 1993. En août 2011, ils ont formé une nouvelle réclamation à l'encontre des impositions laissées à leur charge, cette fois-ci rejetée. A partir de cette situation, la Haute juridiction a établi un principe attendu lié à la sécurité juridique.
La réclamation prévue à l'article R. 190-1 du LPF (N° Lexbase : L3075HPL) doit être introduite dans le délai prévu par les articles R. 196-1 (N° Lexbase : L6486AEX) et R. 196-2 (N° Lexbase : L6472AEG) de ce livre, prolongé, sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le contribuable, d'un an. Dans cette hypothèse, le délai de réclamation court à compter de l'année au cours de laquelle il est établi que le contribuable a eu connaissance de l'existence de l'imposition. S'agissant de la réclamation préalable prévue à l'article L. 281 du LPF (N° Lexbase : L8541AE3), relative au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics, si la notification de la décision ne comporte pas les mentions prévues par l'article R. 421-5 du Code de justice administrative (N° Lexbase : L3025ALM) ou si la preuve de la notification de cette décision n'est pas établie, le contribuable doit adresser sa réclamation dans un délai raisonnable à compter de la date à laquelle l'acte de poursuite lui a été notifié ou de celle à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance. Sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le contribuable, ce délai ne peut excéder un an.
Dès lors, au cas présent, les requérants ont eu connaissance des impositions mises à leur charge au titre des années 1987 et 1989 respectivement, au plus tard, les 24 mars 1993 et 31 décembre 1992, dates de leurs deux réclamations préalables. Ils pouvaient, compte tenu du principe dégagé, former leur nouvelle réclamation dans un délai qui expirait le 31 décembre 1996 pour l'imposition de l'année 1987 et le 31 décembre 1995 pour l'imposition de l'année 1989. La réclamation adressée à l'administration fiscale le 10 août 2011 était, en conséquence, tardive et donc, la demande enregistrée en 2012 au tribunal administratif était irrecevable .

newsid:457478

Responsabilité

[Brèves] Appréciation de l'atteinte à la dignité d'un médecin filmé en caméra-cachée

Réf. : Cass. civ. 1, 29 mars 2017, n° 15-28.813, FS-P+B+I (N° Lexbase : A6071UMS)

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par June Perot

Le 18 Avril 2017

La liberté de la presse et le droit à l'information du public autorisent la diffusion de l'image de personnes impliquées dans un événement d'actualité ou illustrant avec pertinence un débat d'intérêt général, dans une forme librement choisie, sous la seule réserve du respect de la dignité de la personne humaine. Telle est la solution dégagée par la première chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 29 mars 2017 (Cass. civ. 1, 29 mars 2017, n° 15-28.813, FS-P+B+I N° Lexbase : A6071UMS, à rapprocher de : Cass. crim., 30 mars 2016, n° 15-82.039, F-P+B N° Lexbase : A7045RIR).
Dans cette affaire, un reportage consacré à l'histoire d'une jeune femme qui avait fait croire, pendant plusieurs années, sur internet, qu'elle était atteinte d'affections graves, avait été diffusé. Le reportage comportait une séance filmée en caméra-cachée, au cours de laquelle deux journalistes, se faisant passer, l'un pour une amie de celle-ci, l'autre, pour son compagnon, consultaient M. G., médecin généraliste, auquel ladite jeune femme s'était adressée à plusieurs reprises. Invoquant une atteinte portée au droit dont il dispose de son image, M. G. a assigné la société de la chaîne, en réparation du préjudice en résultant. En première instance, les juges du fond avaient condamné la société éditrice à payer 2 000 euros à M. G. Le tribunal a d'abord retenu que le reportage incriminé ne relevait pas de sa vie privée, mais de son activité professionnelle et que la violation du droit à l'image n'était pas caractérisée dans la mesure où le visage du médecin était flouté en permanence et sa voix modifiée. La société éditrice de la chaîne télévisée a interjeté appel. En cause d'appel, pour décider que l'atteinte au droit à l'image de M. G. était injustifiée et lui allouer es dommages-intérêts, l'arrêt a retenu que la séquence litigieuse était précédée et suivie d'un commentaire en voix off de nature à dévaloriser la personne ainsi montrée au public et que, s'il était constant que le sujet était effectivement un sujet de société en ce qu'il a pour but de prévenir le public des dérives découlant de l'utilisation du réseau internet, cette présentation de l'image de M. G. comme étant le médecin qui s'est laissé berner par sa patiente n'était pas, dans la forme qui a été adoptée, utile à l'information des téléspectateurs (CA Metz, 6 octobre 2015, n° 13/03366 N° Lexbase : A7132NSX). La société éditrice a formé un pourvoi. La Haute juridiction, énonçant la solution précitée au visa des articles 9 (N° Lexbase : L3304ABY) et 16 (N° Lexbase : L1687AB4) du Code civil et 10 de la CEDH (N° Lexbase : L4743AQQ), censure l'arrêt d'appel, mais seulement en ce qu'il dit que M. G. a souffert d'une atteinte à son droit à l'image et subi un préjudice inhérent à cette atteinte et en ce qu'il condamne la société éditrice. Elle considère en effet que le reportage litigieux n'a pas porté atteinte à la dignité du médecin filmé en caméra-cachée (cf. l’Ouvrage "Responsabilité civile" N° Lexbase : E4095ETT).

newsid:457587

Droit pénal du travail

[Brèves] Conformité à la Constitution des dispositions relatives à la contribution spéciale devant être versée par l'employeur d'un étranger non autorisé à exercer une activité salariée en France

Réf. : Cons. const., décision n° 2016-621 QPC du 30 mars 2017 (N° Lexbase : A4588UPM)

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par Blanche Chaumet

Le 06 Avril 2017

Est conforme à la Constitution le premier alinéa de l'article L. 8253-1 du Code du travail (N° Lexbase : L0191IWY), dans sa rédaction résultant de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012, de finances pour 2013 (N° Lexbase : L7971IUR), qui oblige l'employeur d'un étranger non autorisé à exercer une activité salariée en France à acquitter une contribution spéciale. Telle est la solution dégagée par le Conseil constitutionnel dans une décision rendue le 30 mars 2017 (Cons. const., décision n° 2016-621 QPC du 30 mars 2017 N° Lexbase : A4588UPM).
Le Conseil constitutionnel a été saisi (CE, 1° et 6° ch.-r., 28 décembre 2016, n° 404240, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A4945S3K) d'une QPC relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 8253-1 du Code du travail, dans sa rédaction issue de la loi de finances pour 2013.
Les sociétés requérantes soutenaient que ces dispositions, qui n'excluent pas leur application cumulative avec celles de l'article L. 8256-2 du Code du travail (N° Lexbase : L9230K4M) et permettent ainsi qu'un employeur soit poursuivi et sanctionné deux fois pour les mêmes faits, sont contraires aux principes de nécessité et de proportionnalité des délits et des peines.
Pour rappel, outre les sanctions prévues aux articles L. 8253-1 et L. 8256-2, en vertu des articles L. 8256-3 (N° Lexbase : L2136KG9) et L. 8256-7 (N° Lexbase : L7795I34) du même code, la peine peut être assortie de peines complémentaires, comme l'interdiction d'exercer pour une durée de cinq ans au plus, l'exclusion des marchés publics, la confiscation ainsi que, pour les personnes morales, la dissolution.
En énonçant la règle susvisée, le Conseil constitutionnel précise que les sanctions pécuniaires pouvant être prononcées contre l'employeur d'étrangers non autorisés à travailler, sur le fondement des dispositions contestées et de l'article L. 8256-2 du Code du travail, sont comparables dans leur montant. En revanche, le juge pénal peut condamner l'auteur d'une telle infraction à une peine d'emprisonnement ou, s'il s'agit d'une personne morale, à une peine de dissolution, ainsi qu'à plusieurs peines complémentaires. Il en résulte que les faits prévus et réprimés par les articles précités doivent être regardés comme susceptibles de faire l'objet de sanctions de nature différente. Par conséquent, le grief tiré de la méconnaissance du principe de nécessité et de proportionnalité des peines doit être écarté (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E7323ESZ).

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Urbanisme

[Brèves] Application de la règle de constructibilité limitée : prise en compte de la proximité du projet avec des constructions existantes situées dans les parties urbanisées de la commune

Réf. : CE 1° et 6° ch.-r., 29 mars 2017, n° 393730, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6218UNM)

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par Yann Le Foll

Le 11 Avril 2017

L'application de la règle de constructibilité limitée, selon laquelle les constructions ne peuvent être autorisées dès lors que leur réalisation a pour effet d'étendre la partie actuellement urbanisée de la commune, implique la prise en compte de la proximité du projet avec des constructions existantes situées dans les parties urbanisées de la commune. Ainsi statue le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 29 mars 2017 (CE 1° et 6° ch.-r., 29 mars 2017, n° 393730, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6218UNM).
Par un arrêté en date du 10 janvier 2011, un maire a opposé, au nom de la commune, un refus à la demande de permis d'aménager présentée par pour la réalisation d'un projet de lotissement en vue de la construction de vingt-cinq logements sur un terrain cadastré section. Par un jugement du 5 décembre 2013, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande tendant à l'annulation de cet arrêté. La commune se pourvoit en cassation contre l'arrêt ayant annulé ce jugement (CAA Marseille, 9ème ch., 24 juillet 2015, n° 14MA00533 N° Lexbase : A5129NQZ) et l'arrêté du 10 janvier 2011. Selon le Conseil d'Etat, la cour a pu se fonder sur la proximité immédiate du projet avec des constructions existantes situées dans les parties urbanisées de la commune, ainsi que sur la vocation de la zone, pour déterminer si le terrain d'assiette du projet se trouve à l'intérieur des parties urbanisées de la commune pour l'application de l'article L. 111-1-2 du Code de l'urbanisme alors en vigueur (N° Lexbase : L7223ACI).
Toutefois, en ne recherchant pas si la réalisation du projet de lotissement soumis à autorisation avait pour effet d'étendre le périmètre de la partie urbanisée de la commune, compte tenu en particulier du nombre et de la densité des constructions projetées, la cour a commis une erreur de droit (cf. l’Ouvrage "Droit de l'urbanisme" N° Lexbase : E0825E9G).

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