La lettre juridique n°653 du 5 mai 2016

La lettre juridique - Édition n°653

Éditorial

Preuve par SMS d'une reconnaissance de dette : rien de neuf, mais encore fallait-il le savoir

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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la publication

Le 11 Mai 2016


La presse et des blogs se sont faits l'écho de la solution d'un arrêt de la cour d'appel de Grenoble, du 5 avril 2016, admettant qu'un SMS puisse faire la preuve d'une reconnaissance de dette entre anciens concubins. Une fois encore, la presse généraliste ou le quidam du net peinent à discerner la portée véritable d'une règle de droit ou d'une décision jurisprudentielle.

Rapidement, en octobre 2011, une jeune femme, en couple avec son "amoureux" -la précision lexicale romantique revêt ici une certaine importance- souhaitait acheter une voiture d'occasion, pour la somme de 4 000 euros. Ne disposant pas des fonds nécessaires, elle demanda à son compagnon de lui "avancer" la somme en question. Le bon homme s'exécuta et sa demoiselle put acquérir le véhicule de son coeur. Malheureusement, l'histoire d'amour tourne court en août 2012 ; et en 2013, Monsieur demande à son ex. de lui rembourser la somme. Il invoque un prêt, elle évoque un don manuel. Il est vrai qu'en matière de reconnaissance de dette, le régime de la preuve est en principe des plus stricts. En vertu de l'article 1341 du Code civil, il doit être passé acte devant notaire ou sous signatures privées de toutes choses excédant la somme de 1 500 euros. Cette règle reçoit exception, en application de l'article 1348 du Code civil, notamment lorsque l'une des parties n'a pas eu la possibilité matérielle ou morale de se procurer une preuve littérale de l'acte juridique. La preuve testimoniale est alors admise. Il peut encore être dérogé à l'existence d'une preuve littérale, en application de l'article 1347 du Code civil, lorsqu'il existe un commencement de preuve par écrit, c'est-à-dire un acte émanant du débiteur poursuivi et rendant vraisemblable le fait allégué.

Or, les relations intimes liant les parties ont pu empêcher l'amoureux de se procurer un écrit et permettent de retenir, comme preuve de l'engagement de Mademoiselle, les propres déclarations de celle-ci. Justement, le demandeur avait conservé deux SMS de celle-ci ; le premier dans lequel elle lui demandait s'il était "toujours prêt à [lui] avancer et qu'[elle le] rembourse petit à petit" ; le second où elle lui demandait un "relevé" pour lui "faire des virements sur [son] compte", reconnaissant, selon la cour, de façon claire et explicite, l'existence d'un prêt de 4 000 euros qu'elle s'engageait à rembourser.

Premièrement, le fait qu'un SMS soit admis à titre de preuve, ou simplement de commencement de preuve par écrit, n'est pas une nouvelle. Le 23 mai 2007, la Chambre sociale de la Cour de cassation décidait que, si l'enregistrement d'une conversation téléphonique privée, effectué à l'insu de l'auteur des propos invoqués, est un procédé déloyal rendant irrecevable en justice la preuve ainsi obtenue, il n'en est pas de même de l'utilisation par le destinataire des messages écrits téléphoniquement adressés, dits SMS, dont l'auteur ne peut ignorer qu'ils sont enregistrés par l'appareil récepteur. Ce faisant, elle emboîtait le pas à la Chambre criminelle qui acceptait déjà le SMS à titre de preuve d'un fait contraventionnel ou délictueux, en rappelant, le 7 février 2007 puis le 30 septembre 2009, que la preuve d'appels téléphoniques malveillants réitérés en vue de troubler la tranquillité d'autrui pouvait être rapportée par la production de SMS. Finalement, la première chambre civile, dans un arrêt en date du 17 juin 2009, a, également, admis la recevabilité des SMS comme preuve dans la procédure de divorce pour faute, malgré la facilité déconcertante pour tout un chacun de falsifier ce type de communication, comme le soulignait déjà nos auteurs dans le commentaire de ces décisions respectives. Et la cour d'appel de Dijon, le 6 juillet 2012, reconnaissait qu'un SMS témoignant de la nouvelle orientation sexuelle d'un époux pouvait valoir preuve d'une faute dans le cadre de la vie commune des époux, désormais en instance de divorce.

Mais jusque-là, force est de constater que, si le SMS était admis à titre de preuve, c'était de la preuve d'une faute, dont il s'agissait. Le pas vers une reconnaissance de dette, la preuve d'un engagement portant effets contractuels, pouvait ne pas s'avérer aussi simple. Après tout, la Haute juridiction semblait beaucoup plus encline, le 8 février 2011, à écarter le SMS quand il s'agissait de respecter les droits de la défense du salarié, notamment quand il convenait de déterminer la date certaine de sa convocation à un entretien préalable à un licenciement.

Mais, la cour d'appel de Grenoble ne s'embarrasse pas de ces considérations et accepte le SMS comme moyen de preuve d'un prêt entre concubins.

Ah... Deuxièmement, dans un arrêt rendu le 20 septembre 2012, la cour d'appel de Paris avait, déjà, fait preuve d'une certaine souplesse quant à l'établissement de la preuve écrite de la remise de fonds par une personne soutenant avoir prêté de l'argent à son compagnon. Alors que l'ex-compagnon faisait valoir que les fonds (d'un montant total de 16 000 euros) lui avaient été remis à titre de cadeau d'anniversaire, l'ex-compagne faisait valoir que les liens amoureux très forts qu'elle nourrissait à l'égard du débiteur constituaient un empêchement moral à solliciter un écrit. L'argument est accueilli par la cour qui, faisant application des articles 1341 et 1348 du Code civil, retient que le tribunal a justement considéré qu'en raison des liens unissant les parties, qui duraient depuis deux années au moment de la remise des fonds, la créancière s'était trouvée dans l'impossibilité morale de se procurer une preuve écrite du prêt invoqué. La cour retient également que le SMS formulé dans les termes suivants "et mtnt tu fais kom si je t t eski8é parce ce je te dois d l argent" constitue un commencement de preuve par écrit du prêt dès lors que l'ex-compagnon ne contestait pas en être l'auteur. Dans ces conditions, la cour avait estimé que l'ex-compagne était fondée à soutenir qu'elle avait remis à son ex-compagnon la somme de 16 000 euros à titre de prêt.

D'où l'utilité d'un accès à une base de données jurisprudentielles des plus complètes : à la lumière des centaines de questions sur le sujet, posées sur les blogs et les réseaux sociaux, comme 80 % des avocats français, ayant accès à la documentation Lexbase, vous avez sans doute la possibilité d'apporter un éclairage rigoureux sur la question.

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Avocats

[Jurisprudence] La preuve numérique et le principe de délicatesse de l'avocat

Réf. : Cass. civ. 1, 17 mars 2016, n° 15.14.557, F-P+B (N° Lexbase : A3449Q8A)

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par Olivia Baldes, Docteur en droit, qualifié Maître de conférences

Le 05 Mai 2016

La délicatesse ressortant naturellement de la sensibilité de l'être est également un principe essentiel à l'exercice de la profession d'avocat. Ainsi, l'avocat doit être constamment guidé par ce principe dans ses rapports avec ses clients, les autres professionnels du droit ou encore ses confrères. Aussi, manque au principe de délicatesse, l'avocat qui prend connaissance de messages couverts par le secret des correspondances dès lors qu'ils figuraient sur une messagerie personnelle quel qu'en soit le contenu et en les produisant devant la commission de conciliation. Tel est l'apport d'un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 17 mars 2016. En l'espèce, un avocat prenait connaissance de mails échangés entre ses deux collaboratrices via leur messagerie "gmail" alors que l'ordinateur professionnel de l'une d'entre elles était resté allumé sur sa boite de réception électronique. A la lecture des mails injurieux, l'avocat prenait la décision de mettre fin à leur contrat de collaboration libérale.

Celles-ci ont alors porté l'affaire devant les instances ordinales. Dès la phase de conciliation, l'avocat produisait pour les besoins de sa défense les mails consultés. L'une d'elles saisissait aussitôt la commission de déontologie à propos de la production desdits mails.

Une poursuite disciplinaire à l'initiative du Bâtonnier de l'Ordre des avocats au barreau de Paris était ouverte reprochant à l'avocat d'avoir produit des documents couverts par le secret des correspondances, et ainsi manqué aux principes essentiels de la profession d'avocat définis à l'article 1.3 du RIN (N° Lexbase : L1523KZG).

La cour d'appel de Paris ayant, par arrêt du 22 janvier 2015 (CA Paris, Pôle 2, 1ère ch., 22 janvier 2015, n° 14 /01680 N° Lexbase : A9097M9S), déclaré l'avocat coupable d'avoir manqué au principe de délicatesse, celui-ci a formé un pourvoi en cassation.

L'avocat soulève plusieurs arguments au soutien de son pourvoi.

Il argue, d'abord, que le caractère professionnel de l'ordinateur, outil informatique mis à la disposition de la collaboratrice confère à la messagerie consultée par le biais de cet outil un caractère également professionnel. Cette messagerie consultée par l'outil informatique dans le cadre de la collaboration doit donc être analysée comme une annexe professionnelle, étant relevé par ailleurs que la collaboratrice laissant sa messagerie et l'ordinateur ouvert consentait à sa consultation par les membres du cabinet.

Par suite, l'avocat soutient que la production d'un courriel ne suppose l'accord du collaborateur ou à défaut une autorisation judiciaire que si le contenu du courriel relève de la vie privée de ce dernier. Or, il considère que les mails produits relèvent de la sphère professionnelle des collaboratrices n'étant pas davantage accompagnés de la mention "personnel".

Enfin, il retient que constitue une atteinte au principe de l'égalité des armes résultant du droit à un procès équitable garanti par l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (N° Lexbase : L7558AIR) le fait d'interdire à une partie de faire la preuve d'un élément de fait essentiel au succès de ses prétentions.

Face à ces arguments, la Haute juridiction (1) revient non seulement sur la nature privée de l'adresse électronique des collaboratrices conférant à tous leurs messages un caractère personnel et révélant, dans le même temps l'indifférence de l'outil informatique par lequel l'accès est fait (I) mais également sur le principe déontologique de délicatesse inhérent à la profession et venant supplanter les principes classiques applicables en la matière (II).

I - Le caractère nécessairement privé de l'adresse électronique professionnelle de l'avocat collaborateur

Dans un premier temps, la Cour de cassation revient sur la nature privée de l'adresse "gmail" mise à la disposition des internautes par la société Google conférant non seulement un caractère personnel à l'ensemble des mails échangés via cette adresse par les collaboratrices mais mettant également en relief l'indifférence du support via lequel l'adresse peut être consultée.

En effet, il ressort de l'arrêt qui nous occupe, que c'est bien la nature privée de la messagerie qui confère son caractère aux courriels échangés et non le support informatique. Peu important que les mails soient consultés via l'outil informatique mis à la disposition des collaborateurs par le cabinet. Dès lors, l'usage de l'ordinateur professionnel ne confère pas à l'ensemble des opérations effectuées via cet outil un caractère nécessairement professionnel.

Au soutien de sa prétention, l'avocat évoquait un arrêt de la Chambre sociale du 16 mai 2013 (2) qui a retenu que les courriels adressés et reçus par le salarié à l'aide de l'outil informatique mis à la disposition par l'employeur, pour les besoins de son travail, sont présumés avoir un caractère professionnel en sorte que l'employeur est en droit de les ouvrir hors la présence de l'intéressé, sauf si le salarié les identifie comme personnels. On retiendra, toutefois, qu'il s'agit, dans cet arrêt, à la différence de l'arrêt commenté, d'une adresse électronique mise à la disposition du salarié par l'employeur. Il est donc tout à fait cohérent de considérer l'ensemble de cette messagerie comme étant professionnelle et comme nécessaire d'apposer par le salarié la mention "personnel" aux correspondances dont il souhaite voir revêtir ce caractère.

Cette jurisprudence ne trouve pas écho dans notre affaire et ce d'autant, ainsi que le soulève le conseil de discipline, que les collaboratrices ne sont pas salariées du cabinet.

A ce titre, il paraît essentiel de revenir sur le statut particulier de l'avocat collaborateur qui jouit d'une double casquette. Libéral, il conserve une latitude certaine pour la gestion de ses dossiers personnels, mais se trouve lié, dans la pratique, aux consignes du cabinet d'accueil pour la gestion des dossiers internes.

On observe que certaines confusions ressortent de ce statut ambigu notamment quant à l'usage et la propriété des outils informatiques utilisés pour les besoins de la profession.

Classiquement, le contrat de collaboration permet à l'avocat collaborateur d'user des outils informatiques du cabinet mais avec cette particularité que le cabinet d'accueil doit également laisser un temps suffisant au collaborateur pour gérer sa clientèle propre et lui permettre d'user de ces mêmes outils informatiques dans ce cadre (3). La frontière entre ce qui appartient en propriété au cabinet d'accueil et l'usage que le collaborateur peut en faire est mince et sera définie en fonction des principes essentiels de la profession.

Un arrêt tout aussi récent de la Cour de cassation (4) en date du 6 avril 2016 est venu mettre en opposition l'usage qui peut être fait de l'outil informatique mis à la disposition du collaborateur pour ses besoins personnels et les utilisations abusives de cet outil appartenant au cabinet d'accueil par le collaborateur. Ainsi, l'insertion dans l'ordinateur d'un logiciel de gestion de dossiers, qui plus est, sans l'accord de la société civile professionnelle (SCP), est une immixtion portant atteinte au droit de propriété du cabinet d'accueil.

Une frontière se dessine peu à peu entre la propriété de l'appareil, l'usage professionnel pour les besoins du cabinet qui en est fait par le collaborateur et l'usage personnel par ce dernier communément admis.

Au fil de la jurisprudence, on relève que l'appareil appartient au cabinet d'accueil ; le collaborateur ne devant pas porter atteinte à ce droit. L'usage professionnel de l'outil informatique pour les besoins du cabinet par le collaborateur reste accessible au cabinet d'accueil. En revanche, l'usage à des fins professionnelles privées ou strictement privées de l'outil informatique par le collaborateur relève de sa sphère intime et son accès nécessite l'accord de ce dernier.

Si propriété et usage ne doivent pas être confondus par l'avocat collaborateur, ce dernier détient également un droit de propriété sur ses propres outils informatiques en ceux compris sa messagerie professionnelle personnelle.

Aussi, dès lors que la messagerie électronique est considérée comme privée, le collaborateur n'a pas à rajouter la mention "personnel" aux mails transmis. Le caractère privé de la messagerie s'étend à l'ensemble des correspondances échangées via cet outil quand bien même l'accès à cette messagerie passerait par l'ordinateur du cabinet d'accueil.

Enfin, le fait que la collaboratrice ait laissé sa boite mail privée ouverte, et donc visible et accessible de tous, ne permet pas d'en déduire le consentement de la personne quant à la consultation de sa boite électronique privée.

Son inattention est, en tout état de cause, couverte par le principe de délicatesse, principe essentiel de la profession.

II - Les droits de la défense de l'avocat lors de l'instance ordinale soumis au principe de délicatesse

L'avocat précise devant le conseil de discipline que c'est un tiers qui lui aurait remis les échanges de mails de ses collaboratrices. Ainsi, l'avocat n'aurait pas directement consulté les courriels et ne les aurait produits que pour les besoins de sa défense.

Si le caractère déloyal de l'obtention de la preuve peut, dans certains cas, être légitimé par les besoins de la défense (5), il semblerait que la qualité d'avocat de l'agent poursuivi ait ici induit la solution retenue.

En l'espèce, on observera que ce n'est pas le caractère purement déloyal dans l'obtention de la preuve qui est mis en exergue, mais plutôt la provenance douteuse de cette preuve.

D'ailleurs, le débat ne porte pas sur la question de savoir si l'avocat a consulté lui même les messages privés sur l'ordinateur mis à la disposition de la collaboratrice. En fait, il ressort de l'arrêt que le conseil de discipline retenait que "la provenance frauduleuse" de tels mails devait être relevée par l'avocat qui devait dès lors s'abstenir de les produire pour les besoins de sa défense. Il ressort de l'arrêt que c'est bien la qualité d'avocat qui impose avec davantage de rigueur l'observation du respect du secret des correspondances et de la vie privée.

En effet, au delà de ces principes classiques de secret des correspondances et de vie privée, l'avocat est soumis à des principes liés à l'exercice de sa profession énoncés à l'article 3 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005, relatif aux règles de déontologie de la profession d'avocat (N° Lexbase : L6025IGA), repris in extenso dans le RIN à l'article 1.3 tel que le principe de délicatesse, de confraternité et de loyauté.

La déontologie à laquelle est soumis l'avocat regroupe un ensemble de règles qu'il se doit de suivre en toute circonstance. En ce sens, la faute disciplinaire ou déontologique n'est ni une faute pénale, ni une faute civile et revêt ses propres caractéristiques emprunt de moralité et d'éthique. Son régime suit également ces spécificités.

Ainsi, cet arrêt est l'occasion de rappeler que les principes essentiels de la profession, et en l'espèce, plus particulièrement, le principe de délicatesse supplante les droits de la défense de l'avocat qui, plus qu'un métier, est un état qui "veut son homme tout entier" disait Loisel.

La délicatesse à laquelle est soumis l'avocat dans ses rapports devient plus subtile que le principe de loyauté procédurale auquel est soumis tout justiciable.

Reste que la question qui pouvait se poser est celle de savoir si les collaboratrices ne manquaient pas, non plus, aux principes de la profession en injuriant par des échanges de mail, sur leur lieu de travail, l'avocat et le cabinet avec lequel elles étaient liées par un contrat de collaboration.

En tout état de cause, l'avocat qui souhaiterait se constituer une preuve informatique et éviter toute difficulté quant à la question de l'admissibilité de ce mode de preuve se devrait de solliciter, au préalable, l'autorisation de la juridiction d'accéder aux courriels de ses collaborateurs en application de l'article 145 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1497H49) soit dans le cadre d'une ordonnance sur requête permettant d'éviter dans un premier temps une procédure contradictoire, soit dans le cadre d'un référé probatoire.


(1) cf. l’Ouvrage "La profession d'avocat" (N° Lexbase : E6573ETM) 
(2) Cass. soc., 16 mai 2013, n° 12-13.372, F-D (N° Lexbase : A5008KDT).
(3) A titre d'information, le contrat de collaboration est aujourd'hui le plus souvent accompagné d'une clause rédigée en ces termes : "pour le cas où [CAB] conserverait dans la mémoire de ses ordinateurs, la trace et/ou le contenu des correspondances électroniques reçues et/ou expédiées par [COL], tant dans le cadre de son activité professionnelle pour les dossiers du Cabinet que pour sa clientèle personnelle ou à titre privé, il s'interdira formellement d'utiliser ou d'invoquer le contenu de l'une quelconque des correspondances privées ou afférentes à l'un des dossiers personnels de [COL], et ce à quelque titre que ce soit. En cas de rupture du contrat de collaboration, [CAB] remettra à [COL] les fichiers de correspondances et dossiers personnels en format électronique et détruira toute copie de ces fichiers sur ses ordinateurs". Extrait du site www.avocatparis.org géré par l'Ordre des avocats de Paris qui donne un exemple de contrat de collaboration portant cette mention.
(4) Cass. civ. 1, 6 avril 2016, n° 15-17.475, F-P+B (N° Lexbase : A1592RCX).
(5) Le principe de loyauté de la preuve, principe non défini en droit, n'est pas uniforme et s'applique de manière différente selon les matières. Aussi, il semble pouvoir être écarté d'une part s'il apparaît que l'atteinte ainsi portée reste équilibrée au regard du droit à la preuve et proportionnée aux intérêts protégés, d'autre part, si la preuve ainsi obtenue a pu être discutée contradictoirement. CEDH, 10 octobre 2006, Req. 7508/02 (N° Lexbase : A6919DRP) ; CEDH, 13 mai 2008, Req. 65097/01 (N° Lexbase : A4987D89).

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Avocats

[Jurisprudence] La preuve numérique et le principe de délicatesse de l'avocat

Réf. : Cass. civ. 1, 17 mars 2016, n° 15.14.557, F-P+B (N° Lexbase : A3449Q8A)

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par Olivia Baldes, Docteur en droit, qualifié Maître de conférences

Le 05 Mai 2016

La délicatesse ressortant naturellement de la sensibilité de l'être est également un principe essentiel à l'exercice de la profession d'avocat. Ainsi, l'avocat doit être constamment guidé par ce principe dans ses rapports avec ses clients, les autres professionnels du droit ou encore ses confrères. Aussi, manque au principe de délicatesse, l'avocat qui prend connaissance de messages couverts par le secret des correspondances dès lors qu'ils figuraient sur une messagerie personnelle quel qu'en soit le contenu et en les produisant devant la commission de conciliation. Tel est l'apport d'un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 17 mars 2016. En l'espèce, un avocat prenait connaissance de mails échangés entre ses deux collaboratrices via leur messagerie "gmail" alors que l'ordinateur professionnel de l'une d'entre elles était resté allumé sur sa boite de réception électronique. A la lecture des mails injurieux, l'avocat prenait la décision de mettre fin à leur contrat de collaboration libérale.

Celles-ci ont alors porté l'affaire devant les instances ordinales. Dès la phase de conciliation, l'avocat produisait pour les besoins de sa défense les mails consultés. L'une d'elles saisissait aussitôt la commission de déontologie à propos de la production desdits mails.

Une poursuite disciplinaire à l'initiative du Bâtonnier de l'Ordre des avocats au barreau de Paris était ouverte reprochant à l'avocat d'avoir produit des documents couverts par le secret des correspondances, et ainsi manqué aux principes essentiels de la profession d'avocat définis à l'article 1.3 du RIN (N° Lexbase : L1523KZG).

La cour d'appel de Paris ayant, par arrêt du 22 janvier 2015 (CA Paris, Pôle 2, 1ère ch., 22 janvier 2015, n° 14 /01680 N° Lexbase : A9097M9S), déclaré l'avocat coupable d'avoir manqué au principe de délicatesse, celui-ci a formé un pourvoi en cassation.

L'avocat soulève plusieurs arguments au soutien de son pourvoi.

Il argue, d'abord, que le caractère professionnel de l'ordinateur, outil informatique mis à la disposition de la collaboratrice confère à la messagerie consultée par le biais de cet outil un caractère également professionnel. Cette messagerie consultée par l'outil informatique dans le cadre de la collaboration doit donc être analysée comme une annexe professionnelle, étant relevé par ailleurs que la collaboratrice laissant sa messagerie et l'ordinateur ouvert consentait à sa consultation par les membres du cabinet.

Par suite, l'avocat soutient que la production d'un courriel ne suppose l'accord du collaborateur ou à défaut une autorisation judiciaire que si le contenu du courriel relève de la vie privée de ce dernier. Or, il considère que les mails produits relèvent de la sphère professionnelle des collaboratrices n'étant pas davantage accompagnés de la mention "personnel".

Enfin, il retient que constitue une atteinte au principe de l'égalité des armes résultant du droit à un procès équitable garanti par l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (N° Lexbase : L7558AIR) le fait d'interdire à une partie de faire la preuve d'un élément de fait essentiel au succès de ses prétentions.

Face à ces arguments, la Haute juridiction (1) revient non seulement sur la nature privée de l'adresse électronique des collaboratrices conférant à tous leurs messages un caractère personnel et révélant, dans le même temps l'indifférence de l'outil informatique par lequel l'accès est fait (I) mais également sur le principe déontologique de délicatesse inhérent à la profession et venant supplanter les principes classiques applicables en la matière (II).

I - Le caractère nécessairement privé de l'adresse électronique professionnelle de l'avocat collaborateur

Dans un premier temps, la Cour de cassation revient sur la nature privée de l'adresse "gmail" mise à la disposition des internautes par la société Google conférant non seulement un caractère personnel à l'ensemble des mails échangés via cette adresse par les collaboratrices mais mettant également en relief l'indifférence du support via lequel l'adresse peut être consultée.

En effet, il ressort de l'arrêt qui nous occupe, que c'est bien la nature privée de la messagerie qui confère son caractère aux courriels échangés et non le support informatique. Peu important que les mails soient consultés via l'outil informatique mis à la disposition des collaborateurs par le cabinet. Dès lors, l'usage de l'ordinateur professionnel ne confère pas à l'ensemble des opérations effectuées via cet outil un caractère nécessairement professionnel.

Au soutien de sa prétention, l'avocat évoquait un arrêt de la Chambre sociale du 16 mai 2013 (2) qui a retenu que les courriels adressés et reçus par le salarié à l'aide de l'outil informatique mis à la disposition par l'employeur, pour les besoins de son travail, sont présumés avoir un caractère professionnel en sorte que l'employeur est en droit de les ouvrir hors la présence de l'intéressé, sauf si le salarié les identifie comme personnels. On retiendra, toutefois, qu'il s'agit, dans cet arrêt, à la différence de l'arrêt commenté, d'une adresse électronique mise à la disposition du salarié par l'employeur. Il est donc tout à fait cohérent de considérer l'ensemble de cette messagerie comme étant professionnelle et comme nécessaire d'apposer par le salarié la mention "personnel" aux correspondances dont il souhaite voir revêtir ce caractère.

Cette jurisprudence ne trouve pas écho dans notre affaire et ce d'autant, ainsi que le soulève le conseil de discipline, que les collaboratrices ne sont pas salariées du cabinet.

A ce titre, il paraît essentiel de revenir sur le statut particulier de l'avocat collaborateur qui jouit d'une double casquette. Libéral, il conserve une latitude certaine pour la gestion de ses dossiers personnels, mais se trouve lié, dans la pratique, aux consignes du cabinet d'accueil pour la gestion des dossiers internes.

On observe que certaines confusions ressortent de ce statut ambigu notamment quant à l'usage et la propriété des outils informatiques utilisés pour les besoins de la profession.

Classiquement, le contrat de collaboration permet à l'avocat collaborateur d'user des outils informatiques du cabinet mais avec cette particularité que le cabinet d'accueil doit également laisser un temps suffisant au collaborateur pour gérer sa clientèle propre et lui permettre d'user de ces mêmes outils informatiques dans ce cadre (3). La frontière entre ce qui appartient en propriété au cabinet d'accueil et l'usage que le collaborateur peut en faire est mince et sera définie en fonction des principes essentiels de la profession.

Un arrêt tout aussi récent de la Cour de cassation (4) en date du 6 avril 2016 est venu mettre en opposition l'usage qui peut être fait de l'outil informatique mis à la disposition du collaborateur pour ses besoins personnels et les utilisations abusives de cet outil appartenant au cabinet d'accueil par le collaborateur. Ainsi, l'insertion dans l'ordinateur d'un logiciel de gestion de dossiers, qui plus est, sans l'accord de la société civile professionnelle (SCP), est une immixtion portant atteinte au droit de propriété du cabinet d'accueil.

Une frontière se dessine peu à peu entre la propriété de l'appareil, l'usage professionnel pour les besoins du cabinet qui en est fait par le collaborateur et l'usage personnel par ce dernier communément admis.

Au fil de la jurisprudence, on relève que l'appareil appartient au cabinet d'accueil ; le collaborateur ne devant pas porter atteinte à ce droit. L'usage professionnel de l'outil informatique pour les besoins du cabinet par le collaborateur reste accessible au cabinet d'accueil. En revanche, l'usage à des fins professionnelles privées ou strictement privées de l'outil informatique par le collaborateur relève de sa sphère intime et son accès nécessite l'accord de ce dernier.

Si propriété et usage ne doivent pas être confondus par l'avocat collaborateur, ce dernier détient également un droit de propriété sur ses propres outils informatiques en ceux compris sa messagerie professionnelle personnelle.

Aussi, dès lors que la messagerie électronique est considérée comme privée, le collaborateur n'a pas à rajouter la mention "personnel" aux mails transmis. Le caractère privé de la messagerie s'étend à l'ensemble des correspondances échangées via cet outil quand bien même l'accès à cette messagerie passerait par l'ordinateur du cabinet d'accueil.

Enfin, le fait que la collaboratrice ait laissé sa boite mail privée ouverte, et donc visible et accessible de tous, ne permet pas d'en déduire le consentement de la personne quant à la consultation de sa boite électronique privée.

Son inattention est, en tout état de cause, couverte par le principe de délicatesse, principe essentiel de la profession.

II - Les droits de la défense de l'avocat lors de l'instance ordinale soumis au principe de délicatesse

L'avocat précise devant le conseil de discipline que c'est un tiers qui lui aurait remis les échanges de mails de ses collaboratrices. Ainsi, l'avocat n'aurait pas directement consulté les courriels et ne les aurait produits que pour les besoins de sa défense.

Si le caractère déloyal de l'obtention de la preuve peut, dans certains cas, être légitimé par les besoins de la défense (5), il semblerait que la qualité d'avocat de l'agent poursuivi ait ici induit la solution retenue.

En l'espèce, on observera que ce n'est pas le caractère purement déloyal dans l'obtention de la preuve qui est mis en exergue, mais plutôt la provenance douteuse de cette preuve.

D'ailleurs, le débat ne porte pas sur la question de savoir si l'avocat a consulté lui même les messages privés sur l'ordinateur mis à la disposition de la collaboratrice. En fait, il ressort de l'arrêt que le conseil de discipline retenait que "la provenance frauduleuse" de tels mails devait être relevée par l'avocat qui devait dès lors s'abstenir de les produire pour les besoins de sa défense. Il ressort de l'arrêt que c'est bien la qualité d'avocat qui impose avec davantage de rigueur l'observation du respect du secret des correspondances et de la vie privée.

En effet, au delà de ces principes classiques de secret des correspondances et de vie privée, l'avocat est soumis à des principes liés à l'exercice de sa profession énoncés à l'article 3 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005, relatif aux règles de déontologie de la profession d'avocat (N° Lexbase : L6025IGA), repris in extenso dans le RIN à l'article 1.3 tel que le principe de délicatesse, de confraternité et de loyauté.

La déontologie à laquelle est soumis l'avocat regroupe un ensemble de règles qu'il se doit de suivre en toute circonstance. En ce sens, la faute disciplinaire ou déontologique n'est ni une faute pénale, ni une faute civile et revêt ses propres caractéristiques emprunt de moralité et d'éthique. Son régime suit également ces spécificités.

Ainsi, cet arrêt est l'occasion de rappeler que les principes essentiels de la profession, et en l'espèce, plus particulièrement, le principe de délicatesse supplante les droits de la défense de l'avocat qui, plus qu'un métier, est un état qui "veut son homme tout entier" disait Loisel.

La délicatesse à laquelle est soumis l'avocat dans ses rapports devient plus subtile que le principe de loyauté procédurale auquel est soumis tout justiciable.

Reste que la question qui pouvait se poser est celle de savoir si les collaboratrices ne manquaient pas, non plus, aux principes de la profession en injuriant par des échanges de mail, sur leur lieu de travail, l'avocat et le cabinet avec lequel elles étaient liées par un contrat de collaboration.

En tout état de cause, l'avocat qui souhaiterait se constituer une preuve informatique et éviter toute difficulté quant à la question de l'admissibilité de ce mode de preuve se devrait de solliciter, au préalable, l'autorisation de la juridiction d'accéder aux courriels de ses collaborateurs en application de l'article 145 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1497H49) soit dans le cadre d'une ordonnance sur requête permettant d'éviter dans un premier temps une procédure contradictoire, soit dans le cadre d'un référé probatoire.


(1) cf. l’Ouvrage "La profession d'avocat" (N° Lexbase : E6573ETM) 
(2) Cass. soc., 16 mai 2013, n° 12-13.372, F-D (N° Lexbase : A5008KDT).
(3) A titre d'information, le contrat de collaboration est aujourd'hui le plus souvent accompagné d'une clause rédigée en ces termes : "pour le cas où [CAB] conserverait dans la mémoire de ses ordinateurs, la trace et/ou le contenu des correspondances électroniques reçues et/ou expédiées par [COL], tant dans le cadre de son activité professionnelle pour les dossiers du Cabinet que pour sa clientèle personnelle ou à titre privé, il s'interdira formellement d'utiliser ou d'invoquer le contenu de l'une quelconque des correspondances privées ou afférentes à l'un des dossiers personnels de [COL], et ce à quelque titre que ce soit. En cas de rupture du contrat de collaboration, [CAB] remettra à [COL] les fichiers de correspondances et dossiers personnels en format électronique et détruira toute copie de ces fichiers sur ses ordinateurs". Extrait du site www.avocatparis.org géré par l'Ordre des avocats de Paris qui donne un exemple de contrat de collaboration portant cette mention.
(4) Cass. civ. 1, 6 avril 2016, n° 15-17.475, F-P+B (N° Lexbase : A1592RCX).
(5) Le principe de loyauté de la preuve, principe non défini en droit, n'est pas uniforme et s'applique de manière différente selon les matières. Aussi, il semble pouvoir être écarté d'une part s'il apparaît que l'atteinte ainsi portée reste équilibrée au regard du droit à la preuve et proportionnée aux intérêts protégés, d'autre part, si la preuve ainsi obtenue a pu être discutée contradictoirement. CEDH, 10 octobre 2006, Req. 7508/02 (N° Lexbase : A6919DRP) ; CEDH, 13 mai 2008, Req. 65097/01 (N° Lexbase : A4987D89).

newsid:452487

Bancaire

[Brèves] Réforme du régime juridique des bons de caisse

Réf. : Ordonnance n° 2016-520 du 28 avril 2016, relative aux bons de caisse (N° Lexbase : L8503K73)

Lecture: 2 min

N2497BWE

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Le 05 Mai 2016

Une ordonnance, publiée au Journal officiel du 29 avril 2016 (ordonnance n° 2016-520 du 28 avril 2016, relative aux bons de caisse N° Lexbase : L8503K73), procède à la modernisation du régime juridique applicable aux bons de caisse et aux adaptations nécessaires pour permettre l'intermédiation de ces titres sur les plateformes de financement participatif des conseillers en investissements participatifs (CIP) et des prestataires de services d'investissement (PSI). La section 1 de l'ordonnance précise les dispositions communes applicables aux bons de caisse. Les bons de caisse sont des titres nominatifs et non négociables délivrés en contrepartie d'un prêt. Les bons offerts au public, en contrepartie d'un prêt, ne peuvent pas être émis sous une forme anonyme, à ordre ou au porteur, ou en séries conférant des droits de créance identiques pour une même valeur nominale (sauf exception introduite en section 2), ce qui distingue ces instruments des valeurs mobilières (ils ne sont pas fongibles). Les bons de caisse sont inscrits au nom de leur propriétaire dans un registre tenu par l'émetteur. En principe, ils sont souscrits directement auprès de l'émetteur, sans intermédiation. Seules les personnes physiques et les sociétés ayant établi le bilan de leur troisième exercice commercial (à l'exclusion des sociétés de financement), ainsi que les établissements de crédit quelle que soit leur forme juridique, peuvent émettre ces bons, qui ne peuvent être souscrits à plus de cinq années d'échéance. Lors de la souscription ou de l'achat d'un bon de caisse, le certificat d'inscription dans le registre remis au propriétaire doit comporter un certain nombre de mentions obligatoires. Enfin, l'ordonnance tire toutes les conséquences des modalités simplifiées de cession de créance introduites par l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations (N° Lexbase : L4857KYK) : la cession sera constatée par écrit et opposable au débiteur après notification. La section 2 de l'ordonnance procède aux aménagements nécessaires lorsque les bons de caisse font l'objet d'une intermédiation (ils sont alors nommés minibons). Seules les sociétés par actions et les sociétés à responsabilité limitée qui ont établi le bilan de leur troisième exercice commercial, et dont le capital est intégralement libéré, peuvent émettre des minibons. Ceux-ci sont proposés au public sur la plateforme internet d'un CIP et d'un PSI répondant aux exigences fixées par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers, et dans la limite d'un montant calculé sur une période de douze mois et fixé par décret. Les minibons sont assortis d'un taux conventionnel fixe, plafonné, et ils sont amortissables dans des conditions définies par décret. Les nouvelles dispositions prévues par cette ordonnance entrent en vigueur le 1er octobre 2016.

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Baux commerciaux

[Jurisprudence] Le repentir du bailleur, acte pouvant être interruptif de la péremption d'instance

Réf. : Cass. civ. 2, 7 avril 2016, n° 15-13.108, P+B (N° Lexbase : A1683RCC)

Lecture: 10 min

N2574BWA

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par Julien Prigent, Avocat à la cour d'appel de Paris, Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Baux commerciaux"

Le 05 Mai 2016

Dès lors que le bailleur a signifié un acte de repentir alors que le preneur avait déjà notifié son intention de libérer les lieux, ledit acte a interrompu le délai de péremption de l'instance. Tel est l'enseignement d'un arrêt de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation du 7 avril 2016. En l'espèce, un locataire avait fait assigner, le 13 août 2005, devant un tribunal de commerce, le propriétaire de locaux à usage commercial qui lui avaient été donnés à bail afin de restitution d'une certaine somme au titre d'une augmentation illégale des loyers et d'un excédent de charges. Le 14 juin 2006, il avait fait délivrer au bailleur une demande de renouvellement du bail. Le 13 septembre 2006, le bailleur avait signifié au locataire un refus de renouvellement du bail commercial. Le 2 janvier 2007, le locataire avait saisi le juge de la mise en état d'une demande d'expertise pour vérifier les demandes successives de révision des loyers, vérifier les charges communes de l'immeuble et les appels de charges ponctuels adressés par le propriétaire et procéder à l'apurement des comptes. Par ordonnance du 3 mai 2007, le juge de la mise en état avait nommé un expert pour procéder à une mesure d'expertise comptable.

Le 31 octobre 2007, le locataire avait assigné le propriétaire, sur le fondement de l'article L. 145-17, I, 1° du Code de commerce (N° Lexbase : L5745AIM) en contestation du refus de renouvellement du bail sans indemnité d'éviction. Par ordonnance du 10 janvier 2008, le juge de la mise en état avait ordonné, avant dire droit, une autre mesure d'expertise pour procéder au calcul de l'indemnité d'occupation et, éventuellement, de l'indemnité d'éviction. L'expert avait déposé son rapport le 22 juin 2009. Par ordonnance du 8 avril 2010, le juge de la mise en état avait ordonné la radiation de la procédure. Le rapport d'expertise comptable avait été déposé le 18 mai 2010.

Par acte extra-judiciaire du 31 mai 2011, le locataire avait notifié au propriétaire sa volonté de quitter les lieux avec restitution des clés le 30 septembre 2011. Le 30 juin 2011, le propriétaire lui avait fait notifier un acte dit "de repentir", sur le fondement de l'article L. 145-58 du Code de commerce (N° Lexbase : L5786AI7).

Le 3 mai 2012, le locataire avait, par voie de conclusions, demandé la condamnation du propriétaire au paiement d'une certaine somme au titre de l'indemnité d'éviction. Le propriétaire a soulevé par conclusions d'incident, la péremption de l'instance. Le juge de la mise en état, approuvé par la cour d'appel (1), avait rejeté le moyen tiré de la péremption. Le propriétaire s'est alors pourvu en cassation. La Haute juridiction rejette le pourvoi.

I - Sur le droit à l'indemnité d'éviction et le repentir

Si le bailleur est toujours libre de refuser le renouvellement d'un bail commercial venu à expiration, ce renouvellement ne pouvant lui être imposé (2), l'article L. 145-14 du Code de commerce (N° Lexbase : L5742AII) prévoit qu'il doit, dans ce cas, régler au preneur, qui peut prétendre à un "droit au renouvellement", une indemnité d'éviction (3). L'indemnité d'éviction est "égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement" (C. com., art. L. 145-14).

Toutefois, le bailleur pourra refuser le renouvellement sans être tenu au paiement d'une indemnité d'éviction si le locataire ne remplit pas les conditions prévues par le statut des baux commerciaux à cet effet. Il s'agira alors d'un congé portant dénégation du droit au renouvellement, par exemple, pour défaut d'immatriculation (C. com., art. L. 145-1 N° Lexbase : L2327IBS). Le bailleur ne sera pas non plus tenu de régler une indemnité d'éviction s'il justifie d'un "motif grave et légitime" à l'encontre du locataire sortant (C. com., art. L. 145-17 N° Lexbase : L5745AIM). Il s'agira d'une violation par le locataire de ses obligations, suffisamment grave pour justifier la perte du droit au renouvellement.

Dans l'arrêt rapporté, le bailleur avait notifié un congé portant refus de renouvellement sans indemnité d'éviction au visa, semble-t-il, des dispositions de l'article L. 145-17 du Code de commerce. Le locataire avait contesté ce congé. S'il s'avère que le motif du congé est erroné, ce dernier mettra néanmoins fin au bail mais ouvrira droit au preneur au paiement d'une indemnité d'éviction (4).

Dans l'espèce ayant donné lieu à l'arrêt du 7 avril 2016, le juge de la mise en état avait ordonné une expertise avant dire droit pour évaluer le montant de l'indemnité d'occupation et "éventuellement" de l'indemnité d'éviction. Il semblerait, en conséquence, qu'il ait été jugé que les motifs du congé n'étaient pas justifiés et que le preneur avait droit à une indemnité d'éviction.

Le statut des baux commerciaux offre, par ailleurs, au bailleur la faculté d'échapper au paiement de l'indemnité d'éviction. L'article L. 145-58 du Code de commerce dispose en effet que "le propriétaire peut, jusqu'à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle la décision est passée en force de chose jugée, se soustraire au paiement de l'indemnité". L'exercice de ce droit n'a pas à être motivé. Il pourra être exercé, par exemple, si l'indemnité d'éviction est trop élevée pour le bailleur.

Cependant, le droit de repentir "ne peut être exercé qu'autant que le locataire est encore dans les lieux et n'a pas déjà loué ou acheté un autre immeuble destiné à sa réinstallation" (C. com., art. L. 145-58).

Dans l'arrêt rapporté, après le dépôt du rapport d'expertise judiciaire le 22 juin 2009, le locataire avait notifié au bailleur par acte extrajudiciaire du 31 mai 2011, son intention de quitter les lieux avec restitution des clés le 30 septembre 2011. Cette notification pouvait mettre en péril le droit de repentir du bailleur qui avait néanmoins, le 30 juin 2011, notifié un acte dit de "repentir" sur le fondement des dispositions de l'article L. 145-58 du Code de commerce.

C'est cependant sur le terrain du principe même du droit au paiement d'une indemnité d'éviction en raison d'une péremption soulevée par le bailleur que s'est orienté le débat.

II - Sur la péremption

Aux termes de l'article 386 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L2277H44), "l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans".

L'intérêt pour le bailleur de soulever la péremption d'instance réside certainement dans les conséquences de cette dernière. Si la constatation de l'extinction de l'instance et du dessaisissement de la juridiction ne met pas obstacle à l'introduction d'une nouvelle instance, c'est toutefois à la condition que "l'action [ne soit] pas éteinte par ailleurs" (C. proc. civ., art. 385 N° Lexbase : L2273H4X). Or, ce risque est important, notamment pour les actions fondées sur une disposition du statut des baux commerciaux, en raison du court délai de prescription de deux ans (C. com., art. L. 145-60 N° Lexbase : L8519AID).

Il faut rappeler en effet que "la péremption [...] emporte [...] extinction de l'instance sans qu'on puisse jamais opposer aucun des actes de la procédure périmée ou s'en prévaloir" -nous soulignons- (C. proc. civ., art. 389 N° Lexbase : L2282H4B). En conséquence, les actes initialement interruptifs de la prescription de l'action objet de l'instance périmée se trouvent rétroactivement anéantis. L'article 2243 du Code civil (N° Lexbase : L7179IA7) en tire les conséquences en précisant que "l'interruption est non avenue si le demandeur [...] laisse périmer l'instance".

Dans l'arrêt rapporté, il n'était pas discuté que lorsque le locataire avait formé sa demande de fixation et de paiement d'une indemnité d'éviction, son action n'était pas prescrite.

Il peut être rappelé que "l'effet interruptif de la prescription résultant d'une action en justice se prolonge jusqu'à ce que le litige trouve sa solution" (5), la Cour de cassation complétant cette solution en précisant "dès lors qu'il n'existe aucune circonstance permettant de regarder l'interruption comme non avenue". Cette règle est désormais formulée à l'article 2242 du Code civil (N° Lexbase : L7180IA8) qui dispose que "l'interruption résultant de la demande en justice produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance".

Le délai de prescription était donc interrompu tant que l'instance se prolongeait, même si une ordonnance de radiation était intervenue le 8 avril 2010. L'article 377 du Code de procédure civile dispose que "en dehors des cas où la loi le prévoit, l'instance est suspendue par la décision qui [...] radie l'affaire [...]" et la Cour de cassation a précisé que la radiation est sans effet sur la poursuite de l'interruption par l'introduction de l'instance (6).

Toutefois, cette interruption de la prescription perdurait sous réserve d'une péremption.

Il peut être également rappelé, au préalable, que pour prévenir une atteinte à l'autorité de la chose jugée, il a été considéré que "l'ensemble des dispositions définitives et des dispositions avant dire droit qui statuent sur les conséquences ou l'exécution des premières, forme un tout indivisible, de sorte que l'instance toute entière échappe à la péremption" (7). Ainsi, il a été jugé que la disposition d'un arrêt de cour d'appel consacrant le droit au paiement d'une indemnité d'éviction et la disposition avant dire droit qui a pour objet de permettre à la cour de statuer sur les conséquences de la première forment un tout indivisible, de sorte que l'instance toute entière échappe à la péremption (8). En l'espèce, cependant, la décision ordonnant une expertise était une ordonnance du juge la mise en état. Cet aspect n'a, en tout état de cause, pas été abordé dans la décision rapportée, la question posée étant relative au caractère interruptif ou non de la péremption de l'exercice par le bailleur de son repentir.

Selon le moyen du pourvoi annexé à l'arrêt, la cour d'appel avait considéré que le délai de péremption avait commencé à courir à compter de l'ordonnance du 10 janvier 2008 ordonnant une expertise, délai interrompu à la suite de la transmission d'un dire dans le cadre de l'expertise par le conseil du locataire le 22 juillet 2009, puis par la notification par le même au conseil du bailleur d'un bordereau de pièces le 10 février 2010. Moins de deux années s'étant écoulée entre chaque événement l'instance n'était pas périmée. Bien que le rapport relatif à la fixation de l'indemnité d'éviction ait été déposé le 22 juin 2009, aucune demande judiciaire relative à l'indemnité d'éviction ne semble avoir été notifiée avant le 3 mai 2012. Toutefois, la cour d'appel a considéré que la signification par le bailleur de son droit de repentir, le 30 juin 2011, avait interrompu le délai de péremption, de nouveau interrompu ensuite moins d'un an plus tard par la notification des conclusions du locataire.

Le Code de procédure civile ne définit pas les diligences qui sont de nature à interrompre le délai de péremption. Dans le cadre de la détermination de ces diligences, la Cour de cassation a pu viser celles "de nature à faire progresser l'instance" (9) ou constituées "d'un acte qui fait partie de l'instance et est destiné à la continuer" (10).

L'exercice par le bailleur de son repentir peut être difficilement considéré comme un acte qui en lui-même est de nature à faire progresser l'instance en fixation de l'indemnité d'éviction. Dès lors que ce droit, s'il peut encore être exercé, provoque le renouvellement du bail, il n'y a plus lieu en principe à la fixation de l'indemnité d'éviction. La fixation judiciaire de l'indemnité d'occupation, pour la période située entre la date d'effet du congé et le renouvellement du bail, restera, en revanche, en principe d'actualité.

La situation est différente si le bailleur ne peut plus exercer son repentir puisque en théorie, le locataire restera créancier de l'indemnité d'éviction.

La Cour de cassation a approuvé la cour d'appel d'avoir décidé que la notification par le bailleur de son repentir était une diligence au sens de l'article 386 du Code de procédure civile.

Elle prend, toutefois, le soin de relever la chronologie des faits, à savoir que le repentir avait été signifié alors que le locataire avait déjà notifié son intention de libérer les lieux. L'effet interruptif du repentir pourrait donc résulter du fait qu'il ne peut plus être exercé. Le fait que le locataire ait pris ses dispositions pour quitter les lieux, si cela est avéré, peut en effet faire obstacle à l'exercice du droit de repentir. Son droit à l'indemnité d'éviction pouvait donc subsister. Cependant, il peut apparaître difficile de voir dans le repentir, même s'il ne peut plus être exercé, un acte permettant de faire progresser l'instance. A tout le moins, comme l'avait relevé les juges du fond, cet acte est en lien est en rapport avec la procédure et il conditionne le sort des demandes objet de l'instance dont la péremption est soulevée.

(1) CA Bordeaux, 2 décembre 2014, n° 13/03455 (N° Lexbase : A7453M4S).
(2) Cass. com., 2 juillet 1963, n° 61-11.486, publié (N° Lexbase : A2829AUC).
(3) Cass. civ. 3, 8 février 2006, n° 04-17.898, FS-P+B (N° Lexbase : A8448DMT), Bull. civ. III, n° 26.
(4) Cass. civ. 3, 1er avril 1998, n° 96-14.638 (N° Lexbase : A2710ACD) et Cass. civ. 3, 1er février 1995, n° 93-14.808 (N° Lexbase : A7767ABB).
(5) Cass. civ. 1, 24 juin 1997, n° 95-15.273 (N° Lexbase : A6570AHS).
(6) Cass. civ. 1, 10 avril 2013, n° 12-18.193, F-P+B+I (N° Lexbase : A9962KBL), E. Vergès, Lexbase, éd. priv., 2013, n° 528 (N° Lexbase : N7102BT9).
(7) Cass. civ. 2, 4 mars 1987, n° 85-17.815 (N° Lexbase : A6687AAW) ; Cass. civ. 3, 14 octobre 1992, n° 90-21.096 (N° Lexbase : A3285ACN).
(8) CA Grenoble, 30 septembre 2009, n° 05/00982 (N° Lexbase : A9866E3S).
(9) Cass. civ. 2, 15 mai 2014, n° 13-17.294, F-P+B (N° Lexbase : A5603ML4) ; Cass. civ. 2, 18 janvier 2007, n° 05-21.034, FS-P+B (N° Lexbase : A6221DTL).
(10) Cass. civ. 2, 4 mars 2004, n° 02-12.516, F-P+B (N° Lexbase : A4032DBX).

newsid:452574

Congés

[Brèves] Non-respect du délai d'un mois pour demander une prolongation de congé parental d'éducation : absence de cause réelle et sérieuse de licenciement

Réf. : CA Versailles, 12 avril 2016, n° 15/02970 (N° Lexbase : A5323RC7)

Lecture: 1 min

N2508BWS

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Le 06 Mai 2016

Pour être constitutive d'une cause réelle et sérieuse de licenciement, le retard d'information de la prolongation d'un congé parental d'éducation de la salariée à son employeur doit revêtir un caractère fautif, autrement qu'à raison du non-respect du délai d'un mois prévu à l'article L. 1225-51 du Code du travail (N° Lexbase : L0956H9B). Telle est la solution dégagée par la cour d'appel de Versailles dans un arrêt rendu le 12 avril 2016 (CA Versailles, 12 avril 2016, n° 15/02970 N° Lexbase : A5323RC7).
En l'espèce, Mme D., engagée par la société X, a bénéficié d'un congé parental pour la période du 20 juillet 2013 au 29 avril 2014, son employeur lui ayant rappelé que, si elle souhaitait prolonger ce congé parental, elle devrait la prévenir de son souhait, un mois avant la date prévue pour sa reprise. Son congé parental ayant pris fin le 29 avril 2014, sans qu'elle ait formulé de demande de prolongation de ce congé, et n'ayant, à cette date, pas repris son poste, la société lui a notifié son licenciement pour cause réelle et sérieuse le 16 juin suivant, en raison de son "abandon de poste". La société lui reprochait de n'avoir pas repris son poste le 30 avril 2014 et de ne l'avoir que tardivement prévenue de sa demande de prolongation de congé parental, le 19 mai 2014, bien que la salariée ait précisé à cette date à son employeur que son retard était due à l'absence de réponse de la part de la CAF.
Déboutée de ses prétentions pour contester son licenciement devant le conseil de prud'hommes, elle a interjeté appel.
En énonçant la règle susvisée, la cour d'appel fait droit à sa demande, considérant que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E0181ETU).

newsid:452508

Consommation

[Brèves] Publication au Journal officiel du décret relatif aux obligations d'information sur les sites comparateurs en ligne

Réf. : Décret n° 2016-505, du 22 avril 2016, relatif aux obligations d'information sur les sites comparateurs en ligne (N° Lexbase : L8189K7G)

Lecture: 1 min

N2486BWY

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Le 05 Mai 2016

A été publié au Journal officiel du 24 avril 2016, le décret n° 2016-505 du 22 avril 2016 (N° Lexbase : L8189K7G), relatif aux obligations d'information sur les sites comparateurs en ligne. Ses dispositions sont en vigueur à compter du 1er juillet 2016. Il concerne toute personne dont l'activité consiste en la fourniture d'information en ligne permettant la comparaison des prix et des caractéristiques de biens et de services. Il fixe les modalités et conditions d'application de l'article L. 111-6 du Code de la consommation (N° Lexbase : L1888KGZ) qui met une obligation d'information loyale, claire et transparente à la charge de ces personnes. Il précise le type d'activité de comparaison soumis aux obligations d'information, détaille le contenu de ces obligations et, en application de l'article 20 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004, pour la confiance dans l'économie numérique (N° Lexbase : L2600DZC), oblige le responsable du site à afficher le caractère publicitaire d'une offre référencée à titre payant et dont le classement dépend de la rémunération perçue. Le décret est pris pour l'application de l'article 147 de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, relative à la consommation (N° Lexbase : L7504IZX). Le Code de la consommation est ainsi complété par les articles D. 111-5 (N° Lexbase : L8243K7G), D. 111-6 (N° Lexbase : L8244K7H), D. 111-7 (N° Lexbase : L8245K7I), D. 111-8 (N° Lexbase : L8246K7K) et D. 111-9 (N° Lexbase : L8247K7L), qui prévoient que la fourniture d'informations en ligne permettant la comparaison des prix et des caractéristiques de biens et de services s'entend de l'activité de sites comparant des biens et des services et permettant, le cas échéant, l'accès aux sites de vente de ces biens ou de fourniture de ces services.

newsid:452486

Contrats et obligations

[Jurisprudence] L'abandon apparent de la distinction du dol principal et du dol incident par la Cour de cassation

Réf. : Cass. com., 30 mars 2016, n° 14-11.684, FS-P+B (N° Lexbase : A1626RBT)

Lecture: 6 min

N2509BWT

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par David Bakouche, Agrégé des Facultés de droit, Professeur à l'Université Paris-Sud (Paris XI), Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Responsabilité civile"

Le 05 Mai 2016

De la lettre de l'article 1116 du Code civil (N° Lexbase : L1204AB9), aux termes duquel "le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté", on déduit que le contrat n'est annulable qu'à la condition que le dol ait déterminé le consentement. La doctrine classique distingue ce dol de "celui qui, pratiqué dans le cours d'une négociation déjà entamée, n'a pas fait naître chez l'une des parties l'intention de contracter, et n'a eu pour résultat que de l'amener à accepter des conditions plus avantageuses" (1). Alors que le premier, dol principal, aurait déterminé le contractant à contracter, le second, dol incident, ne recouvrirait que les hypothèses dans lesquelles les manoeuvres pratiquées incidemment à une opération qui aurait été conclue sans cela n'avaient ni pour but, ni pour effet de faire naître chez l'autre partie l'intention de contracter, mais seulement de l'amener à accepter des conditions auxquelles elle n'aurait pas souscrit si elle n'avait pas été circonvenue. Par suite, contrairement au dol principal, qui entraînerait la nullité du contrat, le dol incident, ou accidentel (2), serait seulement sanctionné par des dommages et intérêts. Cette distinction, apparemment "très nette" (3), a cependant été contestée, particulièrement lorsque le dol a conduit sa victime à accepter un prix auquel elle n'aurait pas autrement consenti. Ripert et Boulanger l'avaient ainsi condamnée au motif que "la volonté d'acquérir ne prend une valeur juridique que si elle est la volonté d'acquérir moyennant un prix déterminé" (4), de telle sorte qu'on ne saurait qualifier de dol incident celui qui a seulement déterminé l'acceptation de certaines clauses du contrat : le dol incident serait en réalité aussi déterminant que le dol principal. Ces objections ont été reprises par une partie de la doctrine moderne qui dénonce le caractère artificiel de la distinction, faisant essentiellement valoir qu'il serait psychologiquement irréaliste de prétendre distinguer entre la volonté de contracter, abstraitement considérée, et la volonté concrète de contracter à telles ou telles conditions (5). Et ces auteurs en déduisent que le dol incident doit permettre l'annulation du contrat si celle-ci est demandée : il suffirait d'observer que le demandeur aurait traité à des conditions différentes s'il avait connu la réalité. Un récent arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation en date du 30 mars 2016, à paraître au Bulletin, semble leur avoir donné raison. En l'espèce, à l'occasion d'une cession de parts sociales, le cessionnaire, soutenant que son consentement avait été vicié par des manoeuvres dolosives, a assigné le cédant en annulation de la cession, restitution du prix versé et paiement de dommages-intérêts. Les juges du fond ayant fait droit à cette demande, le cédant s'est pourvu en cassation, faisant valoir que la nullité d'une convention ne peut être prononcée qu'en cas de dol principal ou déterminant, lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que, sans elles, l'autre partie n'aurait pas contracté. Aussi bien soutenait-il qu'en prononçant la nullité du contrat de cession de parts sociales alors que le cessionnaire, s'il avait eu connaissance de l'ensemble des faits reprochés au cédant au moment de l'acquisition de l'entreprise, en aurait certainement revu les modalités d'acquisition, la cour d'appel, qui aurait ainsi caractérisé un dol incident et non principal, n'aurait pas tiré les conséquences de ses constatations et aurait violé l'article 1116 du Code civil. La Cour de cassation rejette le pourvoi, au motif "qu'ayant constaté que les consorts X avaient, par une hausse massive des prix de vente, donné une image trompeuse des résultats atteints par la société cédée au cours des mois ayant précédé la cession, et qu'ils avaient dissimulé à la société Z les informations qu'ils détenaient sur l'effondrement prévisible du chiffre d'affaires réalisé avec au moins deux des principaux clients de l'entreprise, la cour d'appel, qui a souverainement retenu que ces éléments étaient déterminants pour le cessionnaire, lequel n'avait pas été mis en mesure d'apprécier la valeur de la société cédée et ses perspectives de développement et n'aurait pas accepté les mêmes modalités d'acquisition s'il avait eu connaissance de la situation exacte de cette société, n'a pas méconnu les conséquences légales de ses constatations en décidant que les réticences dolosives imputables aux cédants entraînaient la nullité de la cession".

On passera assez vite sur le fait que la méprise portait sur la rentabilité économique de l'opération, dans la mesure où elle n'est pas sanctionnée sur le terrain de l'erreur, en tant que vice du consentement régi par les articles 1109 (N° Lexbase : L1197ABX) et 1110 (N° Lexbase : L1198ABY) du Code civil, mais sur celui du dol, et donc de l'article 1116. Alors en effet qu'il apparaît discutable que l'absence de rentabilité économique puisse constituer, en tant que telle, un cas d'erreur pris en considération par le droit (6), on conçoit parfaitement qu'elle puisse être sanctionnée, aux conditions banales dans lesquelles on admet que le consentement a été surpris par dol, lorsque l'inexactitude des données chiffrées fournies lors de la conclusion du contrat est établie (7) et que l'intention de tromper est démontrée (8). Venons-en donc à l'essentiel.

Longtemps, la jurisprudence s'est plutôt montrée favorable à la notion de dol incident, rejetant ainsi des demandes en nullité pour dol au motif que les manoeuvres litigieuses n'avaient pas eu pour conséquence de tromper le cocontractant au point que celui-ci n'aurait pas contracté du tout s'il n'avait pas été induit en erreur, mais admettant que la victime, qui aurait contracté à des conditions différentes si elle n'avait pas été trompée, puisse légitimement prétendre à des dommages et intérêts (9). Il y avait donc bien, à côté du dol principal, un dol incident qui, à la différence du premier, n'autorisait pas la nullité du contrat : n'altérant "pas vraiment" le consentement puisque la victime aurait de toute façon conclu le contrat (10), il justifiait toutefois l'octroi de dommages et intérêts afin de réparer le préjudice qu'elle a subi dès lors que ce préjudice trouve sa cause dans la faute commise par l'auteur des manoeuvres déloyales. Cette position nous avait paru justifiée en ce qu'elle permettait de rendre compte de la réalité du processus de formation du contrat, dont on sait bien qu'il repose sur une distinction fondamentale selon que l'accord porte sur les éléments essentiels du contrat ou sur des éléments non essentiels, autrement dit accessoires ou secondaires (11). Dans certaines hypothèses, la tromperie émanant de l'un des contractants n'a certes pas, à proprement parler, déterminé chez l'autre partie l'intention de contracter, mais l'a tout de même manifestement conduite à accepter certaines clauses accessoires ou secondaires qu'elle n'aurait pas accepté telles quelles si elle avait connu la réalité. Et si l'on conçoit, ce qui semble difficilement contestable, que c'est précisément l'accord sur les seuls éléments essentiels qui révèle le motif déterminant de l'engagement, alors on imagine mal qu'on puisse considérer, comme le font pourtant les partisans de la confusion du dol principal et du dol incident, que le dol doive toujours pouvoir entraîner la nullité du contrat, que l'erreur provoquée par les manoeuvres porte sur des éléments essentiels ou accessoires de l'accord (12).

Mais depuis quelques années, une tendance a pu se faire sentir dans le sens d'une remise en cause de la distinction du dol principal et du dol incident. Le premier coup fut tiré par un arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation du 22 juin 2005 ayant admis la nullité de la vente d'un immeuble de grande hauteur au motif du défaut d'information sur la réalité des charges financières inhérentes à la sécurisation de ce type de bâtiment et sur sa situation particulière au regard de la règlementation le concernant, là même où elle constatait que l'acquéreur "aurait à tout le moins acquis à un prix inférieur s'il avait connu la situation exacte" (13) : puisqu'il faudrait en déduire que "le dol incident ne se résout plus uniquement en dommages-intérêts et ouvre, comme le dol principal, la voie de l'annulation du contrat", l'arrêt sonnerait le glas d'une "distinction artificielle" en soumettant les deux catégories de dol à un régime unique (14). C'est ensuite un arrêt de la Chambre commerciale, en date du 7 juin 2011, qui aurait plus gravement encore que le précédent entamé l'utilité de la notion de dol incident, la Cour de cassation rejetant la demande en réparation du préjudice subi par l'acquéreur d'un fonds de commerce de pharmacie qui s'estimait victime d'un dol par réticence du vendeur concernant la qualification exacte d'un salarié dont le contrat de travail avait été repris lors de la cession du fonds, et ce au motif qu'il n'était établi ni l'intention du cédant de tromper le cessionnaire, "ni le caractère déterminant de l'information litigieuse sur les conditions de la vente" (15). M. Laithier, dans ses observations, estime en effet que "puisqu'il admet que l'allocation de dommages-intérêts soit refusée au motif que le dol n'est pas déterminant, alors que le principal intérêt attaché à la qualification de dol incident est précisément de ne pas avoir à établir ce caractère", l'arrêt aurait neutralisé la distinction du dol principal et du dol incident.

En admettant la nullité du contrat alors qu'il paraissait établi que l'errans aurait tout de même contracté s'il n'avait pas été trompé par son cocontractant, mais qu'il l'aurait fait à des conditions différentes, l'arrêt du 30 mars 2016 semble bien confirmer cette orientation, encore qu'il soit relevé que les éléments dans l'ignorance desquels il avait été tenu "étaient déterminants pour le cessionnaire" (16). Ce faisant, la Cour de cassation anticipe sur l'application de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 (N° Lexbase : L4857KYK) portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations : le futur article 1130 du Code civil (N° Lexbase : L0842KZ9), applicable aux contrats conclus à partir du 1er octobre 2016, dispose que "l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes", l'article 1131 (N° Lexbase : L0829KZQ) précisant, quant à lui, que "les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat".


(1) Sur l'existence "d'un malentendu sur le caractère déterminant du dol incident", v. G. Marty et P. Raynaud, op. cit. ; Contrats, conc., consom. 2003, comm. 153, obs. L. Leveneur. - Contra, Cass. civ. 1, 22 décembre 1954 : D. 1955, jurispr. p. 254.
(2) L. Leveneur, obs. préc..
(3) F. Terré et Y. Lequette, in GAJC., n° 145.
(4) D. Bakouche, La prétendue inconsistance de la distinction du dol principal et du dol incident, JCP éd. G, 2012, 851.
(5) Cass. civ. 3, 22 juin 2005, n° 04-10.415, FS-P+B (N° Lexbase : A8368DIR).
(6) D. Mazeaud in RDC, 2008, p. 1118.
(7) Cass. com., 7 juin 2011, n° 10-13.622 (N° Lexbase : A4879HTU) : RDC, 2011, p. 1148, obs. Y.-M. Laithier ; Contrats, conc., consom. 2011, comm. 208, obs. L. Leveneur ; Droit et patrimoine, 2012, n° 211, p. 67, obs. Ph. Stoffel-Munck.
(8) X. Boucobza et Y.-M. Serinet, A propos de l'erreur sur la rentabilité, in Mél. D. R. Martin, Lextenso LGDJ, 2015, p. 85 et s..
(9) Cass. civ. 3, 22 juin 2005, n° 04-10.415, préc. : RDC, 2005, p. 1025, obs. Ph. Stoffel-Munck ; Cass. com., 12 juin 2012, n° 11-19.047 (N° Lexbase : A8868INR) ; Cass. com., 25 juin 2013, n° 12-20.815, FS-P+B (N° Lexbase : A8368DIR) ; Cass. com., 12 mai 2015, n° 14-12.473, F-D (N° Lexbase : A8650NHT), jugeant que "l'erreur du cessionnaire sur la valeur des titres sociaux, dès lors qu'elle a été provoquée par une manoeuvre du cédant, peut justifier l'annulation de l'acte de cession pour dol".
(10) Sur l'exigence d'une dissimulation volontaire : Cass. com., 7 octobre 2014, n° 13-10.431, F-D (N° Lexbase : A2035MYZ) ; Cass. com., 12 mai 2015, n° 14-12.473, F-D, préc. ; Cass. civ. 3, 7 avril 2016, n°15-13.064 (N° Lexbase : A1565RCX), qui relève que "la preuve n'était pas rapportée d'une violation intentionnelle du manquement de la société A. à son obligation précontractuelle d'information, ayant déterminé M. et Mme X à contracter", ce dont la cour d'appel "a pu [...] déduire que la réticence dolosive invoquée par les acquéreurs n'était pas caractérisée".
(11) Cass. civ. 1, 11 juillet 1977 : D., 1978, jurispr, p. 155, note C. Larroumet ; Cass. com., 23 novembre 1982, n° 81-10.802, F-D (N° Lexbase : A3284CZN) : RTDCom. 1983, p. 220, obs. J. Derruppé.
(12) C. Aubry et C. Rau, Cours de droit civil français, 6e éd., T. IV, par E. Bartin, § 343 bis.
(13) G. Baudry-Lacantinerie et L. Barde, Traité théorique et pratique de droit civil, 3ème éd., T. I, n° 116.
(14) C. Beudant, Cours de droit civil français, 2ème éd. par R. Beudant et P. Lerebours-Pigeonnière, T. VIII, par G. Lagarde, n° 142.
(15) Traité de droit civil, T. II, n° 185.
(16) J. Ghestin in D., 1972, jurispr., p. 653, et son Traité de droit civil, La formation du contrat: LGDJ, 3ème éd., n° 576 ; G. Marty et P. Raynaud, Droit civil, Les obligations, T. 1 : Sirey, 2ème éd., n° 156 ; J. Flour, J.-L. Aubert et E. Savaux, Droit civil, Les obligations, T. 1 : Sirey, 12ème éd., n° 214 ; A. Bénabent, Droit civil, Les obligations, Domat-Montchrestien, 12ème éd., n° 89.

newsid:452509

Cotisations sociales

[Brèves] Non transmission de la question prioritaire de constitutionnalité relative à la contribution sociale de solidarité des sociétés

Réf. : Deux arrêts, CA Paris, Pôle 6, 12ème ch., 7 avril 2016, n° 15/04722 (N° Lexbase : A3915RCY) et n° 15/04725 (N° Lexbase : A4111RCA)

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N2450BWN

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Le 11 Mai 2016

Le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que dans l'un et l'autre cas la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit, que les opérateurs taxés soient différents ou que les taxes n'aient pas le même objet. La question de la double imposition est rejetée dès lors que la Contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) ne taxe pas deux fois sur la même opération et ce pour toutes les entreprises. Telle est la solution retenue par la cour d'appel de Paris dans deux arrêts rendus le 7 avril 2016 (CA Paris, Pôle 6, 12ème ch., 7 avril 2016, deux arrêts, n° 15/04722 N° Lexbase : A3915RCY et n° 15/04725 N° Lexbase : A4111RCA).
Dans cette affaire, la société S. a saisi le 6 mai 2013 le TASS de Paris d'une demande de remboursement de la contribution sociale de solidarité des sociétés et de la contribution additionnelle (ci-après C3S) de l'année 2010, pour un montant total de 20 899 688 euros, pour la première espèce, et de l'année 2009, pour un montant total de 1 540 599 euros, pour la seconde espèce. Le tribunal rejetant sa demande, la société a interjeté appel et a posé une question prioritaire de constitutionnalité. Selon la société, les dispositions des articles L. 245-13 (N° Lexbase : L9726INK), L. 651-3 (N° Lexbase : L8662KUD) et L. 651-5 (N° Lexbase : L9683I3Z) du Code de la Sécurité sociale, relatives à l'assiette de la C3S, s'appliquent aux opérateurs de réseau, catégorie apparue postérieurement aux lois instaurant cette contribution, alors que, le chiffre d'affaires généré au titre de l'interconnexion est issu de relations contractuelles obligatoires et conduit à ce que ce chiffre d'affaires soit imposé successivement entre les mains de chacun des deux opérateurs, que le législateur a prévu en faveur d'autres opérateurs des règles particulières de détermination de l'assiette imposable, et que pour l'ensemble des taxes sectorielles spécifiques au secteur des communications électroniques, le législateur a exclu ces prestations de l'assiette des taxes pourtant assises sur le chiffre d'affaires réalisé. La société soutient qu'il y a une rupture d'égalité devant les charges publiques et constate une double imposition.
En vain. Enonçant la solution précitée, la cour d'appel de Paris décide de ne pas transmettre la question prioritaire de constitutionnalité relative à la C3S.

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Douanes

[Brèves] Régime des franchises douanières : cas du transfert de résidence d'un pays tiers à un Etat membre

Réf. : CJUE, 27 avril 2016, aff. C-528/14 (N° Lexbase : A2444RL4)

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N2515BW3

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Le 12 Mai 2016

Selon l'article 3 du Règlement (CE) n° 1186/2009 du Conseil, du 16 novembre 2009, relatif à l'établissement du régime communautaire des franchises douanières (N° Lexbase : L0276IGC), "Sont admis en franchise de droits à l'importation les biens personnels importés par des personnes physiques qui transfèrent leur résidence normale dans le territoire douanier de l'Union". Ainsi, aux fins de l'application de cet article, une personne physique ne saurait disposer, de façon concomitante, d'une résidence normale à la fois dans un Etat membre et dans un pays tiers. Par conséquent, dans le cas où un contribuable a, dans un pays tiers, tant des attaches personnelles que des attaches professionnelles et, dans un Etat membre, des attaches personnelles, il convient, afin de déterminer si la résidence normale de l'intéressé se situe dans le pays tiers, d'accorder, lors de l'appréciation globale des éléments de fait pertinents, une importance particulière à la durée du séjour de la personne concernée dans ce pays tiers. Telle est la solution retenue par la CJUE dans un arrêt rendu le 27 avril 2016 (CJUE, 27 avril 2016, aff. C-528/14 N° Lexbase : A2444RL4). En l'espèce, jusqu'au 1er mars 2008, le requérant a résidé et travaillé aux Pays-Bas. Du 1er mars 2008 au 1er août 2011, il a travaillé au Qatar, où un logement a été mis à sa disposition par son employeur. Le requérant avait des attaches tant professionnelles que personnelles dans ce pays tiers. Son épouse a continué à habiter et à travailler aux Pays-Bas. Elle lui a rendu visite six fois pour des séjours d'une durée totale de 83 jours. Au cours de la période considérée, le requérant a passé 281 jours en dehors du Qatar, pendant lesquels il a rendu visite à son épouse, à ses enfants majeurs et à sa famille aux Pays-Bas et est parti en vacances dans d'autres Etats. En vue de son retour aux Pays-Bas, le requérant a alors demandé que lui soit octroyée une autorisation d'importer ses biens personnels depuis le Qatar dans l'Union en franchise de droits à l'importation. Cette demande lui a été refusée, par décision de l'inspecteur des impôts, au motif qu'il n'y avait pas de transfert de sa résidence normale aux Pays-Bas, au sens du droit de l'Union. En effet, il aurait conservé sa résidence normale dans cet Etat membre pendant la durée de son séjour au Qatar, de sorte que sa résidence normale ne se serait jamais située dans ce pays tiers. Pour la CJUE, il convient de relever que le Règlement n° 1186/2009 accorde une importance particulière à la durée du séjour de la personne concernée dans le pays tiers en cause. Ainsi, selon l'article 5, paragraphe 1, de ce Règlement, seules peuvent bénéficier de la franchise douanière les personnes qui ont eu leur résidence normale hors du territoire douanier de l'Union depuis au moins douze mois consécutifs. Ce qui est le cas en l'espèce.

newsid:452515

Électoral

[Brèves] Publication des lois de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle et aux élections

Réf. : Loi organique n° 2016-506 du 25 avril 2016 (N° Lexbase : L8263K78) et loi n° 2016-508 du 25 avril 2016 (N° Lexbase : L8264K79)

Lecture: 2 min

N2490BW7

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Le 05 Mai 2016

Ont été publiées au Journal officiel du 26 avril 2016, la loi organique n° 2016-506 du 25 avril 2016 (N° Lexbase : L8263K78), de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle et la loi n° 2016-508 du 25 avril 2016 (N° Lexbase : L8264K79), de modernisation de diverses règles applicables aux élections. Par ses décisions n° 2016-729 DC (N° Lexbase : A9209RKB) et n° 2016-730 DC (N° Lexbase : A9210RKC) du 21 avril 2016, le Conseil constitutionnel s'était prononcé sur ces deux lois dont il avait été saisi par le Premier ministre. Concernant la loi organique de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle, il l'a jugée conforme à la Constitution, avec toutefois une réserve d'interprétation. En effet, il a en particulier jugé conformes les nouvelles règles relatives aux modalités de présentation des candidats à l'élection présidentielle. Les "parrainages" devront désormais être adressés au Conseil constitutionnel exclusivement par voie postale. Il est précisé néanmoins dans une réserve que cette exigence ne s'oppose pas à ce que le Conseil constitutionnel puisse, le cas échéant, prendre en compte des circonstances de force majeure ayant gravement affecté les conditions d'expédition et d'acheminement des parrainages dans les jours précédant l'expiration du délai de présentation des candidats. Les dispositions imposant la publication des noms des élus "parrains" au fur et à mesure de leur réception, au moins deux fois par semaine, sont également conformes, ainsi que la règle imposant de rendre publics les noms de tous les parrains. La règle du principe d'équité, qui remplace le principe d'égalité, en matière audiovisuelle est jugée conforme. La décision a relevé que la loi organique a entendu favoriser, dans l'intérêt des citoyens, la clarté du débat électoral, tout en accordant aux opérateurs audiovisuels une liberté accrue dans le traitement de l'information en période électorale. Elle a aussi relevé que la diversité des opérateurs du secteur audiovisuel s'est renforcée et qu'il existe, en outre, d'autres modes de diffusion qui contribuent à l'information des citoyens en période électorale. La différence de traitement entre les candidats qui peut en résulter est justifiée par le motif d'intérêt général de clarté du débat électoral et est en rapport direct avec l'objet de la loi. Dès lors, les dispositions imposant l'application du principe d'équité ne sont donc pas contraires au principe d'égalité devant le suffrage. Enfin, les critères de la "représentativité des candidats" et de la "contribution de chaque candidat à l'animation du débat électoral" que le Conseil supérieur de l'audiovisuel est chargé d'appliquer sont considérés comme appropriés. S'agissant de la loi de modernisation de diverses règles applicables aux élections, le Conseil constitutionnel a jugé qu'elle a été adoptée selon une procédure conforme à la Constitution.

newsid:452490

Fiscalité des entreprises

[Brèves] Assiette de la contribution additionnelle à l'IS : exclusion du rachat par une société de ses propres parts ou actions

Réf. : CE 3° et 8° s-s-r., 20 avril 2016, n° 396578, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A1234RKW)

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N2517BW7

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Le 06 Mai 2016

Ne peuvent être inclus dans l'assiette de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés (CGI, art. 235 ter ZCA N° Lexbase : L3946KW3) des rachats par une société de ses propres parts ou actions. Telle est la solution rendue par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 20 avril 2016 (CE 3° et 8° s-s-r., 20 avril 2016, n° 396578, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A1234RKW). En l'espèce, plusieurs sociétés bancaires requérantes ont demandé le renvoi d'une QPC sur la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du premier alinéa du I de l'article 235 ter ZCA du CGI (assiette de la contribution) au regard du 6° de l'article 112 du CGI (N° Lexbase : L5412I3T), relatif au rachat par une société de ses propres parts ou actions. Cependant, la Haute juridiction n'a pas transmis cette question pour défaut de caractère sérieux. En effet, selon elle, pour apprécier ce caractère sérieux, il fallait s'attacher à examiner la disposition contestée en tenant compte de l'interprétation du 6° de l'article 112 du CGI donnée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 20 juin 2014 (Cons. const., 20 juin 2014, n° 2014-404 QPC N° Lexbase : A6294MRK, qui a jugé contraire à la Constitution le 6° de l'article 112 du CGI, imposant au seul régime des plus-values les gains de rachat d'actions par la société émettrice), interprétation qui s'est imposée jusqu'à l'entrée en vigueur des dispositions de l'article 88 de la loi du 29 décembre 2014, de finances rectificative pour 2014 (loi n° 2014-1655 N° Lexbase : L2844I7H). Dès lors, compte tenu de cette interprétation, les sommes ou valeurs attribuées aux associés ou actionnaires au titre du rachat de leurs parts ou actions ne peuvent être regardées, quelle que soit la procédure de rachat, comme entrant dans l'assiette de la contribution additionnelle. En outre, en décidant que le rachat par une société de ses parts ou actions n'entrait pas dans l'assiette de la contribution, le Conseil d'Etat a également annulé sa référence au sein de l'instruction BOI-IS-AUT-30 .

newsid:452517

Fiscalité internationale

[Le point sur...] L'exit tax à la française, une frontière fiscale de dissuasion

Lecture: 10 min

N2525BWG

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par François Stifani, Avocat au barreau de Grasse, Karim Berthet, Docteur en droit fiscal international et Philippe Létienne, Doctorant en droit privé

Le 05 Mai 2016

L'exit tax est présentée comme une mesure susceptible de corriger les effets des principes de liberté d'aller et venir ; de liberté d'installation et de liberté de circulation des capitaux ; lesquels assurent la fluidité de l'économie mais peuvent être également néfastes en raison de profondes disparités socio-économiques et de l'attractivité de fiscalités privilégiées (affaire des "Panama papers"). Véritable chape fiscale des contribuables français qui souhaitent s'implanter ailleurs dans le paysage européen, tout en s'appuyant sur la doctrine administrative (QE n° 12686 de M. Christophe-André Frassa, JO Sénat du 31 juillet 2015, réponse publ. 10 mars 2016, p. 958, 14ème législature N° Lexbase : L2494K7I, v. Lexbase, éd. fisc., n° 648, 2016 N° Lexbase : N1951BW8) pour la définition expresse des titres concernés par l'imposition immédiate, l'exit tax est codifiée à l'article 167 bis du CGI (N° Lexbase : L1784IZ4).

En clair, le contribuable qui transfère son domicile fiscal à l'étranger est assujetti à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux. Or, si la France n'est plus attractive sur un plan économique, est-ce que des mesures de dissuasion fiscales peuvent raisonnablement suffire à retenir ses propres assujettis ?

D'autant qu'une mise en perspective du système actuel met en lumière que faute d'harmonisation des législations fiscales en Europe, outre des délocalisations, viennent s'ajouter des expatriations plus ou moins effectives en vue de rechercher "des cieux fiscaux plus cléments" (N. Melot et M. Buchet, L'attractivité de la fiscalité portugaise pour les personnes physiques, La revue fiscale du patrimoine, n° 3, mars 2016, étude 7).

L'exit tax, codifiée à maintes reprises, est donc le fruit de l'orthodoxie française, visant à contrebalancer un manque d'attractivité patent de l'Etat, par le verrouillage du départ de ses contribuables sous couvert d'un objectif d'intérêt général (I). Face à l'ardeur de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) qui pointe des contradictions flagrantes de l'exit tax avec les libertés posées par le marché unique, la France fut contrainte de remanier le dispositif pour préserver sa souveraineté de levée de l'impôt et maintenir un protectionnisme fiscal tolérable (II).

I - Une captivité fiscale originelle abandonnée

L'adage "fructus augent hereditatem" (les fruits accroissent l'hérédité) fut éludé lors de l'instauration de la taxation des plus-values latentes en cas de transfert du domicile fiscal hors de France (loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998, de finances pour 1999, art. 24 N° Lexbase : L1137ATB). Les mesures nationales entendent contrer l'évasion fiscale et détricoter des montages artificiels, en pénalisant les ressortissants qui souhaitent prendre avantage d'un "forum fiscal" entre Etats membres, à l'instar d'un "forum shopping" dans les règles des conflits de lois.

Survivance de l'entêtement fiscal français, "phoenix renaissant de son bûcher communautaire" pour certains commentateurs, la CJUE n'a eu de cesse de tirer à boulets rouges sur l'exit tax (Emilie Bokdam-Tognetti, Maître des requêtes au Conseil d'Etat, Portée et limites des exit tax : quelques enseignements jurisprudentiels, chron., RJF, 2013).

Par ailleurs, l'entier système doit reposer sur "une raison" (CJCE, 11 mars 2004, aff. C-9/02 N° Lexbase : A5001DBT) voire "des raisons" "impérieuses d'intérêt général" (CJUE, 29 novembre 2011, aff. C-371/10 N° Lexbase : A0292H39). Or, en réalité, la Commission des finances de l'Assemblée nationale l'a conçu pour "éviter une forme d'évasion fiscale" qui aboutit aujourd'hui à "faire fuir les start-up" (proposition de loi n° 2646 visant à abroger l'exit tax - 11 mars 2015, compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle sur le tabac).

En effet, les juridictions européennes prennent majoritairement appui sur la liberté d'établissement qui a un "caractère fondamental" (CJCE, 21 juin 1974, aff. C-2/74 N° Lexbase : A7281AH7) et qui a pour corollaire une égalité de traitement entre les contribuables des Etats membres. A défaut de ladite égalité, tant l'entrée que la sortie du territoire français seront entravées du fait de la non-attractivité d'un Etat fiscalement dissuasif.

L'abrogation cinglante de la première mouture d'exit tax fait écho à une décision de la CJCE, "Hughes de Lasteyrie du Saillant" pour motif de contrariété de la liberté d'établissement (article 52 du Traité CE devenu article 43 du Traité de Rome) avec les modalités d'imposition des plus-values de valeurs mobilières : "le principe de la liberté d'établissement [...] doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à ce qu'un Etat membre institue, à des fins de prévention d'un risque d'évasion fiscale, un mécanisme d'imposition des plus-values non encore réalisées" (CJCE, 11 mars 2004, aff. C-9/02, préc.).

Les conclusions de l'Avocat général soulignent à juste titre que "le Gouvernement français ne conteste pas l'existence d'une entrave et concentre ses observations sur la question d'éventuelles justifications à celle-ci". C'est sur ce point que l'adaptation du nouveau régime tentera une consolidation artificielle au droit européen. Mais "face aux changements perpétuels du dispositif [...] se pose la question de son efficacité en pratique" (L. Faulcon, "Exit tax", encore de nouveaux aménagements..., Lexbase, éd. fisc., n° 559, 2014 N° Lexbase : N0853BU7), car la lutte contre l'évasion fiscale peut être effective via des mesures moins astreignantes ou restrictives.

En toute logique, le Conseil d'Etat, se calquant sur le positionnement précité, "est donc fondé, par ce moyen, à demander l'annulation pour excès de pouvoir des dispositions du décret n° 99-590 du 6 juillet 1999 (N° Lexbase : L5391G9K) en tant qu'elles ont trait à l'application à ces contribuables des dispositions dudit article 167 bis du CGI" (CE, 9° et 10° s-s-r., 10 novembre 2004, n° 211341, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A7339AX4).

A contrario, manipulant sciemment le concept, le Conseil d'Etat écarte d'un revers de manche l'invocation de la liberté d'aller et venir, puisque c'est le transfert de résidence qui est en cause. Autrement dit, l'atteinte s'essouffle car elle ne frappe pas intrinsèquement la liberté de circulation des personnes et des capitaux mais stricto sensu le transfert du domicile fiscal d'un ressortissant (CE 3° s-s., 19 septembre 2011, n° 346012, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A9824HX7). Une certaine tempérance prend place en lien avec la réécriture du dispositif d'exit tax.

En pratique, le fait générateur de l'imposition est le transfert et les conditions de déclenchement du dispositif pour les membres du même foyer fiscal tiennent compte de seuils, du patrimoine des redevables et de leur résidence fiscale. Il s'agit soit d'une détention d'"au moins 50 % des bénéfices sociaux d'une société", soit d'un patrimoine en valeurs mobilières et droits sociaux qui "excède 800 000 euros" à compter du 1er janvier 2014 (CGI, art. 167 bis).

Or, auparavant, les seuils étaient respectivement fixés à 1 % et 1,3 million d'euros, ce qui indique un abaissement fort du seuil correspondant au patrimoine en valeurs mobilières et droits sociaux, ainsi qu'une augmentation du seuil de détention des bénéfices sociaux d'une société, et in fine traduit un échec du dispositif, qui a nécessité un réaménagement profond.

Un simple dégrèvement en cas notamment de retour en France, ou un sursis de paiement (CE 3° et 8° s-s-r., 12 juillet 2013, n° 359994, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A8324KI7) est envisageable si le contribuable transfert son domicile fiscal dans un état tiers à l'EEE (Espace économique européen), mais encore faut-il qu'il en fasse une demande expresse (imprimé de déclaration n° 2074-ETD) et qu'il apporte des garanties suffisantes (LPF, R. 277-1 N° Lexbase : L6603IEB et s.) car il s'agit d'une simple faculté. Nous pensons que la poursuite des obligations déclaratives pendant la période de résidence à l'étranger parachève l'imbroglio du dispositif français.

Reste que l'idée d'un recouvrement immédiat d'une imposition, sans possibilité de report nous semble disproportionnée, faute de cohérence fiscale (CJUE, 18 juillet 2013, aff. C-261/11 N° Lexbase : A0851KKQ).

L'orthodoxie française de rétention fiscale qui reposait sur une présomption malsaine d'évasion fiscale a dû s'adapter, se nourrissant de la substantifique moelle du marché unique. Habilement, le dispositif français est actuellement présenté comme une gêne et non comme une entrave aux libertés d'établissement et de circulation, il est conforme mais non adapté.

II - Une contrainte fiscale actuelle tolérée

L'arrêt précité rendu par la CJUE du 29 novembre 2011 marque un tournant majeur, tout en confirmant la possibilité d'une exit tax pour les personnes morales, en posant qu'"à l'égard d'une réglementation d'un Etat membre visant à imposer les plus-values générées sur son territoire, la situation d'une société constituée selon la législation dudit Etat membre qui transfère son siège dans un autre Etat membre est similaire à celle d'une société constituée également selon la législation du premier Etat membre".

L'intention du législateur est savamment précisée pour éviter toute intempérance européenne. Le champ d'application du dispositif est cantonné "aux seuls droits sociaux et valeurs mobilières relevant du régime d'imposition des plus-values mobilières des particuliers", "les parts de sociétés ou groupements à prépondérance immobilière relèvent du régime d'imposition des plus-values immobilières, ne sont donc pas placées dans le champ d'application de l'exit tax" (Réponse du secrétariat d'Etat, QE n° 12686, JO Sénat, 10 mars 2016, p. 958, préc.).

En conséquence, un système européanisé d'exit tax tend à colorer les systèmes nationaux, la Commission européenne ayant publié le 28 janvier 2016 une proposition de Directive à cet effet, intégrant une "imposition à la sortie au sein de l'Union" (proposition de Directive du Conseil, établissant des règles pour lutter contre les pratiques d'évasion fiscale qui ont une incidence directe sur le fonctionnement du marché intérieur, 28 janvier 2016, COM/2016/26 final).

Et pourtant, les restes d'imprégnation du formalisme français et de la rigueur qui en découle persistent dans l'idée même d'imposer préventivement le contribuable (s'il restait en France, les plus-values litigieuses ne seraient imposables qu'après leur réalisation), pour contrer le droit futur d'imposer une plus-value qui appartiendra à l'Etat de résidence car "l'Etat d'imposition de la plus-value s'entend de celui dont le contribuable était résident au moment de sa réalisation" (CE 10° s-s., 2 mars 2015, n° 354932, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A9136NCD).

Autre exemple, la durée de domiciliation à l'étranger pour bénéficier d'une exemption a presque doublé (de 8 à 15 ans, loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013, de finances pour 2014, art. 17 N° Lexbase : L7405IYW), ce qui conforte la lourdeur sus évoquée. Par ailleurs, la mise en place d'un "fichier automatisé des exilés fiscaux" n'y arrange rien. Bien au contraire, elle est source de dérives car rien ne garantit la protection des données archivées "pendant trois ans" et/ou leur effacement a posteriori (arrêté du 8 avril 2015, JORF n° 0105 du 6 mai 2015, p. 7755, texte n° 5 N° Lexbase : L5189I8P).

Le droit fiscal français est présenté en conformité avec la jurisprudence de la CJUE (à l'instar du droit allemand : CJUE, 23 janvier 2014, aff. C-164/12 N° Lexbase : A9843KZL) puisqu'"il n'y avait pas de violation de l'article 63 TFUE (libre circulation des capitaux) (N° Lexbase : L2713IP8) en présence d'une imposition sur les plus-values latentes, sous réserve que l'Etat membre intéressé soit effectivement dans l'impossibilité de taxer les plus-values lors de leur réalisation effective et que concernant le recouvrement immédiat d'une telle imposition, un tel recouvrement est proportionnel pour autant que l'obligation de constituer des garanties bancaires soit fixée en fonction du risque réel de non-recouvrement de l'impôt dû" (K. Berthet, L'évolution de la lutte contre les paradis fiscaux : Europe, Etats-Unis, Larcier, 2015, p. 130, § 306).

L'absence d'une fiscalité européenne globale qui nourrit les disparités entre Etats est une forme de rupture d'égalité devant l'impôt en Europe. L'exit tax à la française n'a de sens que si elle mute en une exit tax européenne. Divisés, les dispositifs nationaux affaiblissent la coopération fiscale unitaire entre Etats. Une réorganisation complète du système de prélèvement de l'impôt ne serait pas inenvisageable en-soi.

Les réformateurs européens et nationaux pourraient tout aussi bien, à terme, envisager une verticalité de l'impôt, par le biais de chaque administration fiscale nationale, qui agirait au nom et pour le compte de l'Union européenne, à l'instar de ce qui se fait déjà à un échelon inférieur en France entre les communes et l'Etat ou sur un autre modèle, fédéral, de l'Allemagne avec ses fameux länder... En revanche, l'idée d'une exit tax globalisée, chapotée par une entité mondiale nous semble utopique du seul fait de la concurrence naturelle entre Etats qui s'accentue de par leurs distances, d'où l'idée d'une exit tax de proximité.

L'effet dissuasif est consolidé par le régime du report d'imposition : "les reports d'imposition des plus-values [...] à la date du transfert du domicile hors de France sont rétablis de plein droit" (CAA Versailles, 27 mai 2015, n° 12VE02942 N° Lexbase : A1489NM4). En d'autres termes, l'article 167 bis du CGI met fin purement et simplement au report en raison du transfert du domicile fiscal hors de France, ce qui en fait un choix parfois impossible, le contribuable étant alors "un détenu fiscal".

Au surplus, si le dispositif intègre un opportunisme fiscal présupposé, il élude les cas d'invocations du droit à la vie privée. La pratique nous enseigne que le déclenchement d'un transfert peut avoir une origine autre que fiscale, tel que "l'exil pour les familles de confession juive à la suite des évènements dramatiques du début de l'année 2015" (L. Ribes et R. Gaudet, "L'exit tax" français est-il euro-compatible ?, Petites affiches, 30 septembre 2015, n° 195, p. 7). Est-ce à dire que le dispositif en cause est amoral lorsque l'exil familial forcé produit les mêmes effets fiscaux que l'exil opportuniste d'optimisation ?

Le bilan de l'exit tax est peu flatteur, le rapporteur général du projet de loi de finances pour 2016, M. Albéric de Montgolfier, précisa lors de l'examen en commission que "l'exit tax n'a pas suffi à contrecarrer ce phénomène [d'expatriation] : le dernier rapport annuel sur l'exil fiscal a mis en évidence une augmentation du nombre de départs et surtout du montant de base imposable ainsi perdu par l'Etat" (projet de loi de finances pour 2016, examen en Commission réunie le 12 novembre 2015, articles additionnels après l'article 2 quinquies).

De manière générale, il semblerait que la tendance soit à davantage de pragmatisme au risque de se heurter à des contradictions qui résultent de la distance qui peut exister entre des effets d'annonce (simple projet d'abrogation de l'exit tax) et les réalités économiques (flux continu des départs). Nous pouvons légitimement espérer le retrait définitif de ces dispositions qui, comme toute mesure de dissuasion, incite à l'évasion...

En tout état de cause, si l'exit tax reste une mesure française instaurée à l'origine contre l'évasion des capitaux des redevables français à l'impôt, force est de constater que la frontière fiscale qui entoure ce dispositif est de plus en plus perméable au point que la question de son maintien se pose ; d'où la percée que nous préconisons d'un réel système d'exit tax de l'Union pour poser la première pierre de l'édifice d'une frontière fiscale commune.

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Fonction publique

[Brèves] Publication de la loi relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires

Réf. : Loi n° 2016-483 du 20 avril 2016, relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires (N° Lexbase : L7825K7X)

Lecture: 2 min

N2481BWS

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Le 05 Mai 2016

La loi n° 2016-483 du 20 avril 2016, relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires (N° Lexbase : L7825K7X), a été publiée au Journal officiel du 21 avril 2016. Elle renforce de façon substantielle la prévention des conflits d'intérêts dans la fonction publique. Ainsi, l'agent qui pense se trouver dans une telle situation doit saisir son supérieur hiérarchique. La nomination dans un emploi qui le justifie est subordonnée à la transmission préalable par le fonctionnaire d'une déclaration de ses intérêts à l'autorité investie du pouvoir de nomination. Le fonctionnaire exerçant des responsabilités en matière économique ou financière devra prendre des dispositions pour que les instruments financiers qu'il possède à titre privé soient gérés, pendant la durée de ses fonctions, dans des conditions excluant tout droit de regard de sa part. Par ailleurs, la loi étend la protection statutaire dont bénéficient certains fonctionnaires lanceurs d'alerte. Un fonctionnaire ne pourra pas être sanctionné pour avoir dénoncé, de bonne foi, un conflit d'intérêts aux autorités judiciaires ou administratives. La protection fonctionnelle du fonctionnaire reçoit une nouvelle rédaction. Le champ de cette garantie statutaire bénéficie d'une double extension. D'une part, elle s'applique désormais aux proches de tout fonctionnaire lorsqu'ils sont victimes d'agression du fait des fonctions de ce dernier ou pour engager une action contre ses agresseurs. D'autre part, les faits qui ouvrent droit à la protection fonctionnelle sont étendus, conformément à la jurisprudence aux actes de harcèlement et aux "atteintes volontaire à l'intégrité physique de l'agent". La procédure disciplinaire est réformée. Désormais, aucune procédure disciplinaire ne pourra être engagée au-delà d'un délai de trois ans à compter du jour où l'administration a eu connaissance des faits passibles de sanction. La loi contient aussi de multiples dispositions relatives à l'exemplarité des employeurs publics, comme l'égalité entre hommes et femmes, l'amélioration de la situation des contractuels, l'amélioration du dialogue social. Citons enfin comme thématiques abordées par la loi la suppression de la position hors cadres, la possibilité, dans la fonction publique de l'Etat, de recruter des contractuels en CDI en l'absence de corps de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes, ou la suppression de la situation de réorientation professionnelle (à ce sujet, lire N° Lexbase : N2482BWT).

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Fonction publique

[Textes] Loi du 20 avril 2016, relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires : encore un texte portant diverses dispositions relatives à la fonction publique

Réf. : Loi n° 2016-483 du 20 avril 2016, relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires (N° Lexbase : L7825K7X)

Lecture: 16 min

N2482BWT

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par Olivier Dord, Professeur agrégé de droit public, Université Paris Ouest - Nanterre La Défense (CRDP)

Le 05 Mai 2016

A l'occasion du trentième anniversaire de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires (N° Lexbase : L6938AG3), qui constitue le Titre Ier du statut général de la fonction publique, le Gouvernement dépose le 17 juillet 2013 devant l'Assemblée nationale un projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires. Il s'agit pour lui "de reconnaître dans la loi l'exemplarité dont les fonctionnaires font preuve au service de l'intérêt général et du redressement du pays". Deux ans et demi plus tard, ce projet est enfin adopté par les deux Assemblées après accord en commission mixte paritaire le 29 mars 2016 et la loi publiée au Journal officiel du 21 avril 2016. Issu d'un compromis par défaut, le contenu du texte a perdu en cohérence ce qu'il a gagné en longueur. L'ambition initiale de modernisation (harmonisation des procédures disciplinaires entre les trois versants) ou de simplification (fusion de la commission de déontologie et de la Haute autorité pour le pluralisme de la vie publique) s'est essoufflée au profit d'une kyrielle de dispositions relatives à la déontologie, au régime statutaire des fonctionnaires, au fonctionnement des juridictions administratives et financières et même à la procédure administrative contentieuse. In fine, la loi du 20 avril 2016 ressemble à un texte portant diverses dispositions relatives à la fonction publique. De façon didactique, la présentation des principaux apports de ce texte touffu suit, sauf exceptions, les thèmes dans l'ordre dans lequel ils sont abordés dans la loi. I - Les obligations déontologiques renforcées par le statut général

A - La codification des principales obligations jurisprudentielles

De façon symbolique, la loi du 20 avril 2016 donne une nouvelle rédaction à l'article 25 de la loi du 13 juillet 1983 qui ouvre son chapitre IV désormais intitulé "Des obligations et de la déontologie". Dégagés par la jurisprudence du Conseil d'Etat, les principes déontologiques inhérents à l'exercice d'une fonction publique restent absents des statuts généraux successifs depuis 1946. Ils sont enfin codifiés dans le Titre Ier de l'actuel statut. Le premier alinéa de l'article 25 rappelle désormais que chaque fonctionnaire exerce ses fonctions "avec dignité, impartialité, intégrité et probité". Les alinéas suivants consacrent les obligations de neutralité et de laïcité et évoquent leurs conséquences pour les agents et les usagers : l'interdiction de manifester, en service, leurs opinions religieuses est à la charge des premiers ; l'égalité de traitement et le respect de leur liberté de conscience et de leur dignité bénéficient aux seconds. L'article 25 confirme aussi que le chef de service doit veiller au respect de ces principes dans les services placés sous son autorité. Conformément à la jurisprudence "Jamart" (1), il peut aussi préciser ces principes en les adaptant aux missions particulières d'un service. 

B - Le renforcement de la prévention des conflits d'intérêts

Reprenant certaines propositions du rapport de la Commission Sauvé (2), les articles 25 bis à 25 quinquies nouveaux de la loi "Déontologie" renforcent de façon substantielle la prévention des conflits d'intérêts dans la fonction publique. Selon l'étude d'impact du projet de loi, il s'agit d'ériger chaque fonctionnaire en premier gardien des principes déontologiques inhérents à l'exercice d'une fonction publique. Le I de l'article 25 bis lui impose désormais de "veille[r] à faire cesser immédiatement ou à prévenir les situations de conflit d'intérêts dans lesquelles il se trouve ou pourrait se trouver". A cette fin, la notion juridique de conflit d'intérêts est définie en reprenant les termes de l'article 2 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013, relative à la transparence de la vie publique (N° Lexbase : L3622IYS) (3). Au surplus, les obligations du fonctionnaire qui est confronté à une situation de conflit d'intérêts sont précisées. Notamment, celui qui pense se trouver dans une telle situation doit saisir son supérieur hiérarchique. Il revient à ce dernier de confier, le cas échéant, le traitement du dossier ou l'élaboration de la décision à une autre personne (article 25 bis -II). Des obligations déontologiques et de prévention des conflits d'intérêts comparables sont énoncées pour les militaires et insérées dans le Code de la Défense (C. déf., art. L. 4122-3 N° Lexbase : L8010K7S et s.).

Le dispositif de lutte contre les conflits d'intérêts dans la fonction publique est complété par l'instauration d'obligations déclaratives renforcées pour les fonctionnaires objectivement exposés à un risque de conflit d'intérêts. Un décret en Conseil d'Etat détermine les catégories d'agents ou d'emplois concernés, en fonction tant de leur niveau hiérarchique que de la nature des fonctions exercées. Le non-respect de ses obligations est justiciable de sanctions pénales (article 25 sexies)

En premier lieu, un nouvel article 25 ter subordonne la nomination dans un emploi qui le justifie à la transmission préalable par le fonctionnaire d'une déclaration de ses intérêts à l'autorité investie du pouvoir de nomination. Dès la nomination du fonctionnaire, cette déclaration est transmise par l'autorité de nomination à l'autorité hiérarchique dont l'agent relève pour ses nouvelles fonctions. Dans le cas ou l'autorité hiérarchique ne peut apprécier si le fonctionnaire se trouve en situation de conflit d'intérêts, elle transmet sa déclaration d'intérêts à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique instituée par la loi du 11 octobre 2013 précitée. Si elle constate un conflit d'intérêts, la Haute Autorité adresse une recommandation à l'autorité hiérarchique qui l'a saisie. Il revient à cette dernière de prendre les mesures nécessaires pour mettre fin au conflit d'intérêts ou d'enjoindre au fonctionnaire de faire cesser cette situation dans un délai qu'elle fixe. Enfin, au titre du IV de l'article 25 ter, la déclaration d'intérêt ne comporte, en principe, aucune mention des opinions ou des activités politiques, syndicales, religieuses ou philosophiques de l'intéressé. Elle est annexée au dossier du fonctionnaire selon des modalités garantissant sa confidentialité.

En deuxième lieu, le nouvel article 25 quater impose au fonctionnaire exerçant des responsabilités en matière économique ou financière et dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifient de prendre toutes dispositions pour que les instruments financiers qu'il possède à titre privé soient gérés, pendant la durée de ses fonctions, dans des conditions excluant tout droit de regard de sa part. Le fonctionnaire justifie des mesures prises auprès de la Haute Autorité.

En dernier lieu, selon le nouvel article 25 quinquies, le fonctionnaire nommé dans un emploi qui le justifie adresse au président de la Haute Autorité, dans un délai de deux mois suivant sa nomination, une déclaration de situation patrimoniale concernant la totalité de ses biens propres ainsi que, le cas échéant, ceux de la communauté ou les biens indivis. Dans les deux mois qui suivent la cessation de ses fonctions, le même fonctionnaire adresse une nouvelle déclaration de situation patrimoniale au président de la Haute Autorité. Cette dernière apprécie alors la variation de la situation patrimoniale de l'intéressé. La déclaration de situation patrimoniale n'est ni versée au dossier du fonctionnaire, ni communicable aux tiers.

En matière de cumuls d'activités, l'obligation pour le fonctionnaire de se consacrer entièrement au service de l'intérêt général est consacrée à l'article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983. Outre les interdictions déjà imposées, il est dorénavant aussi proscrit aux fonctionnaires de cumuler, avec l'exercice d'un emploi à temps complet donnant lieu à un service à temps plein : la création ou la reprise de toute entreprise privée, ou impliquant l'affiliation au régime d'auto-entrepreneur ; l'occupation d'un autre emploi permanent à temps complet. L'autorisation d'accomplir un service à temps partiel pour créer ou reprendre une entreprise n'est plus accordée de plein droit. Elle peut l'être sous réserve des nécessités du service et compte tenu des possibilités d'aménagement de l'organisation du travail, pour une durée maximale de deux ans renouvelable un an, après examen de la commission de déontologie.

C - L'insertion de la commission de déontologie dans le statut général

De façon générale, la loi "Déontologie" a un double impact sur la commission de déontologie de la fonction publique. Au plan formel, l'article 87 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993, relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques (N° Lexbase : L8653AGL), est abrogé. Ses dispositions figurent désormais dans le nouvel article 25 octies de la loi du 13 juillet 1983. Au plan matériel, la commission voit ses compétences étendues au-delà du contrôle du pantouflage des agents publics dans le secteur privé au profit d'une supervision plus générale de la déontologie dans les trois versants de la fonction publique.

La compétence générale attribuée à la commission de déontologie est désormais en pleine adéquation avec son nom. Selon le nouvel article 25 octies de la loi du 13 juillet 1983, en effet, elle "est placée auprès du Premier ministre pour apprécier le respect des principes déontologiques inhérents à l'exercice d'une fonction publique". Plus précisément la loi du 20 avril 2016 lui confère une compétence consultative nouvelle en matière de respect des obligations déontologiques énoncées par le statut général. Sur saisine de l'administration, elle rend un avis sur les projets de texte, élaborés pour l'application des articles 6 ter A (lanceurs d'alerte crimes et délits), 25 à 25 ter (déclarations d'intérêts), 25 quater (déclarations de patrimoine), 25 septies (interdiction des cumuls) et 28 bis (référent déontologue). Elle émet aussi, de sa propre initiative, des recommandations sur l'application de ces articles. Elle formule enfin, sur saisine de l'administration, des recommandations sur l'application de ces mêmes articles à des situations individuelles.

En matière de contrôle du départ des agents publics dans le secteur privé, la commission voit ses attributions à la fois simplifiées et renforcées. La nouvelle loi met fin à la distinction entre les cas de saisine obligatoire et les cas de saisine facultative afin de réduire l'incertitude sur le fondement de la saisine de la commission et de renforcer l'exhaustivité du contrôle des pantouflages. Désormais, la saisine préalable de la commission est obligatoire pour tout fonctionnaire qui cesse définitivement ou temporairement ses fonctions ou, le cas échéant, pour l'autorité dont il relève dans son corps ou dans son cadre d'emplois d'origine (art. 25 octies-III). Au surplus, la commission apprécie désormais, pour chaque dossier dont elle est saisie, si l'activité privée que projette d'exercer le fonctionnaire risque de porter atteinte au fonctionnement normal, à l'indépendance, à la neutralité du service ou à tout autre principe déontologique cité à l'article 25 de la loi du 13 juillet 1983 (ex-contrôle "déontologique") ou de placer l'intéressé en situation de commettre l'infraction prévue à l'article 432-13 du Code pénal (N° Lexbase : L3748IYH) (ex-contrôle "pénal"). Enfin, le champ des activités privées contrôlées est étendu. La formulation retenue vise dorénavant "tout organisme ou toute entreprise exerçant son activité dans un secteur concurrentiel conformément aux règles de droit privé". Selon l'étude d'impact, entrent désormais dans le champ du contrôle les entreprises privées disposant d'un monopole (RTE-EDF transport) ou des entités telles que l'ADEME ou la Caisse des dépôts et consignations. Enfin l'article 25 octies renforce la portée des avis rendus par la commission. Désormais, les avis d'incompatibilité mais aussi les avis de compatibilité avec réserves lient l'employeur public et s'imposent à l'agent.

D - L'aide à la déontologie

A titre particulier, la loi étend le champ de la protection statutaire dont bénéficient certains fonctionnaires lanceurs d'alerte. Après le harcèlement moral et sexuel et les crimes et délits, les situations de conflits d'intérêts sont prises en compte. Selon l'article 6 ter A modifié de la loi du 13 juillet 1983, un fonctionnaire ne peut pas être sanctionné pour avoir dénoncé, de bonne foi, un conflit d'intérêts aux autorités judiciaires ou administratives. En outre, aucune mesure qui viendrait freiner sa carrière ne peut être prise à son encontre. Le témoignage de mauvaise foi, avec l'intention de nuire ou avec la connaissance au moins partielle de l'inexactitude des faits rendus publics ou diffusés est en revanche pénalement puni.

De façon plus générale, la loi donne désormais à tout fonctionnaire le droit de consulter un référent déontologue. Celui-ci est chargé d'apporter tout conseil utile afin de faire respecter les obligations et des principes déontologiques consacrés dans la loi du 13 juillet 1983. Cette fonction de conseil s'exerce sans préjudice de la responsabilité et des prérogatives du chef de service. Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités et critères de désignation des référents déontologues.

E - Les dispositions relatives aux membres des juridictions administratives et financières

La déontologie des membres des juridictions administratives et financières fait l'objet de dispositions particulières. Celles-ci sont insérées, pour les premières, dans le Code de justice administrative et, pour les secondes, dans le Code des juridictions financières. Elles confortent les mécanismes existants comme les chartes et les collèges de déontologie.S'agissant des membres du Conseil d'Etat, l'article L. 131-2 modifié du Code de justice administrative (N° Lexbase : L8078K7C) précise désormais, en vertu de la jurisprudence constitutionnelle (4), qu'ils exercent leurs fonctions "en toute indépendance". De façon plus générale, la loi "Déontologie" conforte les mécanismes de prévention existants comme les chartes et les collèges de déontologie. Elles imposent aussi des obligations renforcées à leurs membres. Doit notamment être citée la conception extensive du devoir de réserve qui résulte de la formulation selon laquelle leurs membres doivent s'abstenir "de tout acte ou comportement à caractère public incompatible avec la réserve que leur imposent leurs fonctions". La remise d'une déclaration d'intérêts à leur autorité hiérarchique est en outre généralisée pour l'ensemble des membres des juridictions administratives et financières. Enfin, lors de leur prise et leur cessation de fonctions, le vice-président du Conseil d'Etat et les présidents de section, le premier président de la Cour des comptes, les présidents de chambre et les procureurs financiers, ainsi que tous les chefs de juridiction adressent une déclaration de situation patrimoniale au président de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

En dehors de la déontologie, la loi introduit plusieurs autres modifications notables pour les juridictions administratives ou financières. Des conseillers d'Etat en service extraordinaire peuvent désormais être nommés pour exercer des fonctions juridictionnelles. À la Cour des comptes, il est créé des conseillers maîtres et des conseillers référendaires en service extraordinaire. Au plan sémantique, la loi parfait la juridictionnalisation de certaines appellations. Ainsi la formule "magistrats des tribunaux et cours administratives d'appel" est généralisée dans le Code de justice administrative. Au Conseil d'Etat, les sous-sections deviennent des chambres. La loi comporte aussi quelques innovations en matière procédurale. Il est désormais possible d'attribuer des litiges en premier et dernier ressort aux cours administratives d'appel. Un référé peut être examiné par une formation composée de trois juges.

II - La modernisation des droits et obligation des fonctionnaires

A - La mobilité des fonctionnaires

Afin de rendre plus lisible les outils qui favorisent la mobilité des fonctionnaires, trois modifications principales sont introduites. En premier lieu, le régime des positions statutaires est simplifié. Elles passent de six à quatre. La position hors-cadre est supprimée. Idem pour celle d'accomplissement du service national et des activités de réserve qui devient un congé de la position d'activité. Le nouvel article 12 bis de la loi du 13 juillet 1983 dispose désormais : "Le fonctionnaire est placé dans une des positions suivantes : 1° Activité ; 2° Détachement ; 3° Disponibilité ; 4° Congé parental". En second lieu, certaines modalités de la position d'activité sont réformées et harmonisées entre les trois versants. Inutilisé et décrié, le dispositif de réorientation professionnelle des fonctionnaires de l'Etat introduit en 2009 est abrogé. La mise à disposition fait l'objet d'une nouvelle réforme. Elle est désormais possible auprès d'un groupement d'intérêt public, d'une institution ou d'un organe de l'Union européenne ou d'un Etat étranger. Le périmètre de la mise à disposition au sein d'organismes contribuant à la mise en oeuvre d'une politique publique doit être circonscrit par décret en Conseil d'Etat. Enfin, la possibilité de déroger à l'obligation de remboursement de la mise à disposition d'un fonctionnaire est étendue aux versants territorial et hospitalier de la fonction publique.

B - L'extension du champ de la protection fonctionnelle

L'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 relatif à la protection fonctionnelle du fonctionnaire reçoit une nouvelle rédaction. Le champ de cette garantie statutaire bénéficie d'une double extension. D'une part, elle s'applique désormais aux proches de tout fonctionnaire lorsqu'ils sont victimes d'agression du fait des fonctions de ce dernier ou pour engager une action contre ses agresseurs. Sont concernés le conjoint, le concubin ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité du fonctionnaire, ses enfants et ses ascendants directs. Il s'agit de la généralisation d'une situation que la loi réservait jusque-là à certaines catégories d'agents publics (policiers, gendarmes, agents pénitentiaires). D'autre part, les faits qui ouvrent droit à la protection fonctionnelle sont étendus, conformément à la jurisprudence aux actes de harcèlement et aux "atteintes volontaire à l'intégrité physique de l'agent". En outre, la protection fonctionnelle concerne aussi désormais le fonctionnaire entendu en qualité de témoin assisté, placé en garde à vue ou qui se voit proposer une mesure de composition pénale. Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions et les limites de la prise en charge des frais engagés par la collectivité publique.

C - La réforme de la procédure disciplinaire

Du projet initial de modernisation et d'harmonisation des procédures disciplinaires dans les trois versants de la fonction publique, il ne reste que deux éléments d'inégale importance. À titre principal, la loi met fin à l'imprescriptibilité traditionnelle de l'action disciplinaire. L'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 prévoit désormais qu'aucune procédure disciplinaire ne peut être engagée au-delà d'un délai de trois ans à compter du jour où l'administration a eu connaissance des faits passibles de sanction. Cette prescription de l'action disciplinaire permet de sécuriser à la fois la situation des fonctionnaires et les poursuites engagées par l'employeur public à propos de faits anciens. En cas de poursuites pénales exercées à l'encontre du fonctionnaire, ce délai est toutefois interrompu jusqu'à la décision définitive de la justice judiciaire.

A titre secondaire, la loi clarifie la situation du fonctionnaire suspendu qui fait l'objet de poursuites pénales. Désormais, après quatre mois de suspension sans qu'aucune décision de l'autorité disciplinaire ne soit intervenue, le fonctionnaire qui ne fait l'objet d'aucune poursuite pénale est rétabli dans ses fonctions. Il en est de même en cas de poursuites pénales sauf si les mesures prises par l'autorité judiciaire ou l'intérêt du service s'y opposent. Si l'agent poursuivi pénalement n'est pas rétabli, la loi offre une alternative nouvelle à l'employeur public. L'agent peut être affecté provisoirement, sous réserve de l'intérêt du service, dans un emploi compatible avec les mesures judiciaires dont il fait l'objet. Il peut aussi être détaché d'office, à titre provisoire, dans un autre corps ou cadre d'emplois pour occuper un emploi compatible avec de telles mesures. L'autorité judiciaire et la commission administrative paritaire sont informées du changement de situation du fonctionnaire.

III - De l'exemplarité des employeurs publics

A - L'égalité entre hommes et femmes

La loi du 20 avril 2016 favorise une nouvelle fois l'égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités professionnelles et sociales. Trois secteurs sont concernés. D'une part, la commission de déontologie de la fonction publique comprend un nombre égal de femmes et d'hommes. D'autre part, les listes de candidats aux élections professionnelles seront composées d'un nombre de femmes et d'hommes correspondant à la part de femmes et d'hommes représentés au sein de l'instance concernée. En outre, les conseils supérieurs et le conseil commun de la fonction publique sont désormais également soumis aux règles de la représentation équilibrée des femmes et des hommes.

B - L'amélioration de la situation des contractuels

De façon autant paradoxale que didactique, la loi du 20 avril 2016 introduit dans le Titre Ier du statut général des fonctionnaires un nouvel article 32 consacré aux agents contractuels. Ce terme se substitue à celui de "non-titulaires". Il rappelle que ces agents non titulaires sont recrutés après appréciation de leur aptitude à exercer les fonctions à pourvoir. Il précise aussi le périmètre des droits et obligations énoncées par la loi du 13 juillet 1983 qui leur sont applicables : les garanties du chapitre II, le I de l'article 23 bis (décharges de service) et le chapitre IV relatif aux obligations et à la déontologie sauf son article 30.

Sur le fond, la loi prolonge de deux ans, jusqu'au 12 mars 2018, le "plan Sauvadet" de lutte contre la précarité issu de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012, relative à l'accès à l'emploi titulaire (N° Lexbase : L3774ISL). Les conditions d'accès à ce dispositif sont améliorées.

Enfin, la possibilité pour les emplois permanents de l'Etat et de ses établissements publics de déroger à la règle de leur occupation de principe par un fonctionnaire est confortée. Cette dérogation vise les emplois publics qui requièrent des qualifications professionnelles particulières indispensables à l'exercice de leurs missions spécifiques et pour lesquelles il n'existe pas de corps de fonctionnaires. Elle est désormais accordée pour une durée déterminée, à l'issue de laquelle sa justification doit être de nouveau examinée. En revanche, les agents désormais recrutés sur ces emplois le sont par contrat à durée indéterminée.

C - L'amélioration du dialogue social

A l'initiative du Gouvernement, la loi du 20 avril 2016 modifie les modalités de calcul de la règle de l'accord majoritaire dans les négociations sociales. Il prévoit que, pour déterminer le seuil des 50 %, seuls sont pris en compte les suffrages exprimés en faveur des organisations syndicales habilitées à négocier et à signer un accord, c'est-à-dire celles disposant d'au moins un siège dans l'organisme de consultation concerné.

IV - Les dispositions relatives à la fonction publique territoriale

Il convient de réunir dans ce dernier point certaines des nombreuses dispositions relatives à la fonction publique territoriale. Comme toujours, cette dernière a fait l'objet d'une attention particulière de la part du Sénat lors des débats parlementaires. Les principaux apports sont les suivants. Tout d'abord, sur le modèle de l'Etat, il est créé dans chaque collectivité territoriale ou établissement public des commissions consultatives paritaires. Elles connaissent des décisions individuelles prises à l'égard des agents contractuels et de toute question d'ordre individuel concernant leur situation professionnelle. Elles sont présidées par l'autorité territoriale et par un magistrat de l'ordre administratif lorsqu'elles siègent en tant que conseil de discipline. Ensuite, les centres de gestion de la fonction publique territoriale, qui assurent depuis 1984 une partie de la gestion des ressources humaines des collectivités territoriales, sont dotés de deux compétences obligatoires nouvelles : le secrétariat des commissions consultatives paritaires et la fonction de référent déontologue. Ils voient en outre l'exercice de leurs compétences facultatives sécurisé. La nouvelle rédaction de l'article 25 de la loi du 26 janvier 1984 précise ainsi que "les centres de gestion peuvent assurer toute tâche administrative et des missions d'archivage, de numérisation, de conseils en organisation et de conseils juridiques, à la demande des collectivités et établissements". Ensuite, la loi du 20 avril 2016 introduit une dégressivité de la rémunération des fonctionnaires momentanément privés d'emploi. Celle-ci s'étend de moins 5 % chaque année à partir de la troisième année jusqu'au moins 50 % la douzième année. La prise en charge sur le long terme des agents victimes d'incidents de carrière constitue en effet une charge financière lourde pour les collectivités dont ils sont issus. Enfin, la période d'inscription sur les listes des lauréats d'un concours de la territoriale est portée à quatre ans afin de lutter contre le phénomène des "reçus-collés".

La loi du 20 avril 2016 requiert une vingtaine de décrets d'application. Au titre de l'article 38 de la Constitution (N° Lexbase : L0864AHH), elle autorise également le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures relatives, notamment, au statut des membres des juridictions administratives et financières, à la modernisation des conditions d'affectations de certains fonctionnaires et, pour la énième fois, à l'adoption de la partie législative d'un Code général de la fonction publique.


(1) CE, 7 février 1936, n° 43321 (N° Lexbase : A8004AY4).
(2) Commission de réflexion pour la prévention des conflits d'intérêts dans la vie publique, Pour une nouvelle déontologie de la vie publique, 26 janvier 2011.
(3) "Au sens de la présente loi, constitue un conflit d'intérêts toute situation d'interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou paraître influencer l'exercice indépendant, impartial et objectif de ses fonctions".
(4) Cons. const., décision n° 80-119 DC du 22 juillet 1980 (N° Lexbase : A8015ACT), Rec., p. 46.

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Mineurs

[Brèves] Publication au JO du protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant établissant une procédure de présentation de communications

Réf. : Décret n° 2016-500 du 22 avril 2016, portant publication du protocole facultatif à la convention relative aux droits de l'enfant établissant une procédure de présentation de communications (N° Lexbase : L8193K7L)

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N2488BW3

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Le 05 Mai 2016

Le décret n° 2016-500 du 22 avril 2016 (N° Lexbase : L8193K7L), paru au Journal officiel le 24 avril 2016, porte publication du protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant (CIDE) (N° Lexbase : L6807BHL). Le protocole a été adopté à New-York le 19 décembre 2011 et signé par la France le 20 novembre 2014. Il prévoit l'habilitation du Comité des droits de l'enfant à s'acquitter des fonctions prévues audit protocole. Le Comité, pourra, par exemple, à tout moment soumettre à l'urgente attention de l'Etat partie une demande tendant à ce qu'il prenne les mesures provisoires qui s'avèrent nécessaires dans des circonstances exceptionnelles pour éviter qu'un préjudice irréparable ne soit causé à la victime ou aux victimes des violations alléguées (article 6). Le Comité, dans l'exercice de ses fonctions, sera guidé par l'intérêt supérieur de l'enfant et prendra en considération les droits et l'opinion de l'enfant, en accordant à celle-ci le poids voulu en fonction de l'âge et du degré de maturité de l'enfant (article 2). Le protocole vient, également, préciser la procédure de présentation de communications relatives à la violation par un Etat partie de l'un des droits énoncés dans la Convention précitée, dans le protocole facultatif à la Convention, concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants ou encore dans le protocole facultatif à la Convention, concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés (article 5 à 12). Par ailleurs, le protocole prévoit la procédure d'enquête applicable en cas de violation graves ou systématiques (article 13). Le protocole est entré en vigueur le 7 avril 2016. Le Comité ne sera compétent qu'à l'égard des violations commises postérieurement à cette date.

newsid:452488

Contrats et obligations

[Jurisprudence] L'abandon apparent de la distinction du dol principal et du dol incident par la Cour de cassation

Réf. : Cass. com., 30 mars 2016, n° 14-11.684, FS-P+B (N° Lexbase : A1626RBT)

Lecture: 6 min

N2509BWT

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par David Bakouche, Agrégé des Facultés de droit, Professeur à l'Université Paris-Sud (Paris XI), Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Responsabilité civile"

Le 05 Mai 2016

De la lettre de l'article 1116 du Code civil (N° Lexbase : L1204AB9), aux termes duquel "le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté", on déduit que le contrat n'est annulable qu'à la condition que le dol ait déterminé le consentement. La doctrine classique distingue ce dol de "celui qui, pratiqué dans le cours d'une négociation déjà entamée, n'a pas fait naître chez l'une des parties l'intention de contracter, et n'a eu pour résultat que de l'amener à accepter des conditions plus avantageuses" (1). Alors que le premier, dol principal, aurait déterminé le contractant à contracter, le second, dol incident, ne recouvrirait que les hypothèses dans lesquelles les manoeuvres pratiquées incidemment à une opération qui aurait été conclue sans cela n'avaient ni pour but, ni pour effet de faire naître chez l'autre partie l'intention de contracter, mais seulement de l'amener à accepter des conditions auxquelles elle n'aurait pas souscrit si elle n'avait pas été circonvenue. Par suite, contrairement au dol principal, qui entraînerait la nullité du contrat, le dol incident, ou accidentel (2), serait seulement sanctionné par des dommages et intérêts. Cette distinction, apparemment "très nette" (3), a cependant été contestée, particulièrement lorsque le dol a conduit sa victime à accepter un prix auquel elle n'aurait pas autrement consenti. Ripert et Boulanger l'avaient ainsi condamnée au motif que "la volonté d'acquérir ne prend une valeur juridique que si elle est la volonté d'acquérir moyennant un prix déterminé" (4), de telle sorte qu'on ne saurait qualifier de dol incident celui qui a seulement déterminé l'acceptation de certaines clauses du contrat : le dol incident serait en réalité aussi déterminant que le dol principal. Ces objections ont été reprises par une partie de la doctrine moderne qui dénonce le caractère artificiel de la distinction, faisant essentiellement valoir qu'il serait psychologiquement irréaliste de prétendre distinguer entre la volonté de contracter, abstraitement considérée, et la volonté concrète de contracter à telles ou telles conditions (5). Et ces auteurs en déduisent que le dol incident doit permettre l'annulation du contrat si celle-ci est demandée : il suffirait d'observer que le demandeur aurait traité à des conditions différentes s'il avait connu la réalité. Un récent arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation en date du 30 mars 2016, à paraître au Bulletin, semble leur avoir donné raison. En l'espèce, à l'occasion d'une cession de parts sociales, le cessionnaire, soutenant que son consentement avait été vicié par des manoeuvres dolosives, a assigné le cédant en annulation de la cession, restitution du prix versé et paiement de dommages-intérêts. Les juges du fond ayant fait droit à cette demande, le cédant s'est pourvu en cassation, faisant valoir que la nullité d'une convention ne peut être prononcée qu'en cas de dol principal ou déterminant, lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que, sans elles, l'autre partie n'aurait pas contracté. Aussi bien soutenait-il qu'en prononçant la nullité du contrat de cession de parts sociales alors que le cessionnaire, s'il avait eu connaissance de l'ensemble des faits reprochés au cédant au moment de l'acquisition de l'entreprise, en aurait certainement revu les modalités d'acquisition, la cour d'appel, qui aurait ainsi caractérisé un dol incident et non principal, n'aurait pas tiré les conséquences de ses constatations et aurait violé l'article 1116 du Code civil. La Cour de cassation rejette le pourvoi, au motif "qu'ayant constaté que les consorts X avaient, par une hausse massive des prix de vente, donné une image trompeuse des résultats atteints par la société cédée au cours des mois ayant précédé la cession, et qu'ils avaient dissimulé à la société Z les informations qu'ils détenaient sur l'effondrement prévisible du chiffre d'affaires réalisé avec au moins deux des principaux clients de l'entreprise, la cour d'appel, qui a souverainement retenu que ces éléments étaient déterminants pour le cessionnaire, lequel n'avait pas été mis en mesure d'apprécier la valeur de la société cédée et ses perspectives de développement et n'aurait pas accepté les mêmes modalités d'acquisition s'il avait eu connaissance de la situation exacte de cette société, n'a pas méconnu les conséquences légales de ses constatations en décidant que les réticences dolosives imputables aux cédants entraînaient la nullité de la cession".

On passera assez vite sur le fait que la méprise portait sur la rentabilité économique de l'opération, dans la mesure où elle n'est pas sanctionnée sur le terrain de l'erreur, en tant que vice du consentement régi par les articles 1109 (N° Lexbase : L1197ABX) et 1110 (N° Lexbase : L1198ABY) du Code civil, mais sur celui du dol, et donc de l'article 1116. Alors en effet qu'il apparaît discutable que l'absence de rentabilité économique puisse constituer, en tant que telle, un cas d'erreur pris en considération par le droit (6), on conçoit parfaitement qu'elle puisse être sanctionnée, aux conditions banales dans lesquelles on admet que le consentement a été surpris par dol, lorsque l'inexactitude des données chiffrées fournies lors de la conclusion du contrat est établie (7) et que l'intention de tromper est démontrée (8). Venons-en donc à l'essentiel.

Longtemps, la jurisprudence s'est plutôt montrée favorable à la notion de dol incident, rejetant ainsi des demandes en nullité pour dol au motif que les manoeuvres litigieuses n'avaient pas eu pour conséquence de tromper le cocontractant au point que celui-ci n'aurait pas contracté du tout s'il n'avait pas été induit en erreur, mais admettant que la victime, qui aurait contracté à des conditions différentes si elle n'avait pas été trompée, puisse légitimement prétendre à des dommages et intérêts (9). Il y avait donc bien, à côté du dol principal, un dol incident qui, à la différence du premier, n'autorisait pas la nullité du contrat : n'altérant "pas vraiment" le consentement puisque la victime aurait de toute façon conclu le contrat (10), il justifiait toutefois l'octroi de dommages et intérêts afin de réparer le préjudice qu'elle a subi dès lors que ce préjudice trouve sa cause dans la faute commise par l'auteur des manoeuvres déloyales. Cette position nous avait paru justifiée en ce qu'elle permettait de rendre compte de la réalité du processus de formation du contrat, dont on sait bien qu'il repose sur une distinction fondamentale selon que l'accord porte sur les éléments essentiels du contrat ou sur des éléments non essentiels, autrement dit accessoires ou secondaires (11). Dans certaines hypothèses, la tromperie émanant de l'un des contractants n'a certes pas, à proprement parler, déterminé chez l'autre partie l'intention de contracter, mais l'a tout de même manifestement conduite à accepter certaines clauses accessoires ou secondaires qu'elle n'aurait pas accepté telles quelles si elle avait connu la réalité. Et si l'on conçoit, ce qui semble difficilement contestable, que c'est précisément l'accord sur les seuls éléments essentiels qui révèle le motif déterminant de l'engagement, alors on imagine mal qu'on puisse considérer, comme le font pourtant les partisans de la confusion du dol principal et du dol incident, que le dol doive toujours pouvoir entraîner la nullité du contrat, que l'erreur provoquée par les manoeuvres porte sur des éléments essentiels ou accessoires de l'accord (12).

Mais depuis quelques années, une tendance a pu se faire sentir dans le sens d'une remise en cause de la distinction du dol principal et du dol incident. Le premier coup fut tiré par un arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation du 22 juin 2005 ayant admis la nullité de la vente d'un immeuble de grande hauteur au motif du défaut d'information sur la réalité des charges financières inhérentes à la sécurisation de ce type de bâtiment et sur sa situation particulière au regard de la règlementation le concernant, là même où elle constatait que l'acquéreur "aurait à tout le moins acquis à un prix inférieur s'il avait connu la situation exacte" (13) : puisqu'il faudrait en déduire que "le dol incident ne se résout plus uniquement en dommages-intérêts et ouvre, comme le dol principal, la voie de l'annulation du contrat", l'arrêt sonnerait le glas d'une "distinction artificielle" en soumettant les deux catégories de dol à un régime unique (14). C'est ensuite un arrêt de la Chambre commerciale, en date du 7 juin 2011, qui aurait plus gravement encore que le précédent entamé l'utilité de la notion de dol incident, la Cour de cassation rejetant la demande en réparation du préjudice subi par l'acquéreur d'un fonds de commerce de pharmacie qui s'estimait victime d'un dol par réticence du vendeur concernant la qualification exacte d'un salarié dont le contrat de travail avait été repris lors de la cession du fonds, et ce au motif qu'il n'était établi ni l'intention du cédant de tromper le cessionnaire, "ni le caractère déterminant de l'information litigieuse sur les conditions de la vente" (15). M. Laithier, dans ses observations, estime en effet que "puisqu'il admet que l'allocation de dommages-intérêts soit refusée au motif que le dol n'est pas déterminant, alors que le principal intérêt attaché à la qualification de dol incident est précisément de ne pas avoir à établir ce caractère", l'arrêt aurait neutralisé la distinction du dol principal et du dol incident.

En admettant la nullité du contrat alors qu'il paraissait établi que l'errans aurait tout de même contracté s'il n'avait pas été trompé par son cocontractant, mais qu'il l'aurait fait à des conditions différentes, l'arrêt du 30 mars 2016 semble bien confirmer cette orientation, encore qu'il soit relevé que les éléments dans l'ignorance desquels il avait été tenu "étaient déterminants pour le cessionnaire" (16). Ce faisant, la Cour de cassation anticipe sur l'application de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 (N° Lexbase : L4857KYK) portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations : le futur article 1130 du Code civil (N° Lexbase : L0842KZ9), applicable aux contrats conclus à partir du 1er octobre 2016, dispose que "l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes", l'article 1131 (N° Lexbase : L0829KZQ) précisant, quant à lui, que "les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat".


(1) Sur l'existence "d'un malentendu sur le caractère déterminant du dol incident", v. G. Marty et P. Raynaud, op. cit. ; Contrats, conc., consom. 2003, comm. 153, obs. L. Leveneur. - Contra, Cass. civ. 1, 22 décembre 1954 : D. 1955, jurispr. p. 254.
(2) L. Leveneur, obs. préc..
(3) F. Terré et Y. Lequette, in GAJC., n° 145.
(4) D. Bakouche, La prétendue inconsistance de la distinction du dol principal et du dol incident, JCP éd. G, 2012, 851.
(5) Cass. civ. 3, 22 juin 2005, n° 04-10.415, FS-P+B (N° Lexbase : A8368DIR).
(6) D. Mazeaud in RDC, 2008, p. 1118.
(7) Cass. com., 7 juin 2011, n° 10-13.622 (N° Lexbase : A4879HTU) : RDC, 2011, p. 1148, obs. Y.-M. Laithier ; Contrats, conc., consom. 2011, comm. 208, obs. L. Leveneur ; Droit et patrimoine, 2012, n° 211, p. 67, obs. Ph. Stoffel-Munck.
(8) X. Boucobza et Y.-M. Serinet, A propos de l'erreur sur la rentabilité, in Mél. D. R. Martin, Lextenso LGDJ, 2015, p. 85 et s..
(9) Cass. civ. 3, 22 juin 2005, n° 04-10.415, préc. : RDC, 2005, p. 1025, obs. Ph. Stoffel-Munck ; Cass. com., 12 juin 2012, n° 11-19.047 (N° Lexbase : A8868INR) ; Cass. com., 25 juin 2013, n° 12-20.815, FS-P+B (N° Lexbase : A8368DIR) ; Cass. com., 12 mai 2015, n° 14-12.473, F-D (N° Lexbase : A8650NHT), jugeant que "l'erreur du cessionnaire sur la valeur des titres sociaux, dès lors qu'elle a été provoquée par une manoeuvre du cédant, peut justifier l'annulation de l'acte de cession pour dol".
(10) Sur l'exigence d'une dissimulation volontaire : Cass. com., 7 octobre 2014, n° 13-10.431, F-D (N° Lexbase : A2035MYZ) ; Cass. com., 12 mai 2015, n° 14-12.473, F-D, préc. ; Cass. civ. 3, 7 avril 2016, n°15-13.064 (N° Lexbase : A1565RCX), qui relève que "la preuve n'était pas rapportée d'une violation intentionnelle du manquement de la société A. à son obligation précontractuelle d'information, ayant déterminé M. et Mme X à contracter", ce dont la cour d'appel "a pu [...] déduire que la réticence dolosive invoquée par les acquéreurs n'était pas caractérisée".
(11) Cass. civ. 1, 11 juillet 1977 : D., 1978, jurispr, p. 155, note C. Larroumet ; Cass. com., 23 novembre 1982, n° 81-10.802, F-D (N° Lexbase : A3284CZN) : RTDCom. 1983, p. 220, obs. J. Derruppé.
(12) C. Aubry et C. Rau, Cours de droit civil français, 6e éd., T. IV, par E. Bartin, § 343 bis.
(13) G. Baudry-Lacantinerie et L. Barde, Traité théorique et pratique de droit civil, 3ème éd., T. I, n° 116.
(14) C. Beudant, Cours de droit civil français, 2ème éd. par R. Beudant et P. Lerebours-Pigeonnière, T. VIII, par G. Lagarde, n° 142.
(15) Traité de droit civil, T. II, n° 185.
(16) J. Ghestin in D., 1972, jurispr., p. 653, et son Traité de droit civil, La formation du contrat: LGDJ, 3ème éd., n° 576 ; G. Marty et P. Raynaud, Droit civil, Les obligations, T. 1 : Sirey, 2ème éd., n° 156 ; J. Flour, J.-L. Aubert et E. Savaux, Droit civil, Les obligations, T. 1 : Sirey, 12ème éd., n° 214 ; A. Bénabent, Droit civil, Les obligations, Domat-Montchrestien, 12ème éd., n° 89.

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Procédure pénale

[Brèves] Publication d'un décret relatif au traitement des états et mémoires des frais de justice

Réf. : Décret n° 2016-479, du 18 avril 2016, relatif au traitement des états et mémoires des frais de justice (N° Lexbase : L7675K7E)

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Le 05 Mai 2016

A été publié au Journal officiel du 20 avril 2016, le décret n° 2016-479, du 18 avril 2016, relatif au traitement des états et mémoires des frais de justice (N° Lexbase : L7675K7E). Le nouveau texte généralise l'expérimentation mise en place par le décret n° 2014-461 du 7 mai 2014, relatif aux frais de justice et à l'expérimentation de la dématérialisation des mémoires de frais (N° Lexbase : L1319I3A) et assure une actualisation des dispositions du Code de procédure pénale, du Code de procédure civile et du Code de l'organisation judiciaire. Il prévoit la dématérialisation de toutes les étapes du circuit des frais de justice (établissement des états et des mémoires de frais, application des contrôles dans le cadre des procédures de certification, paiement des frais). Il attribue à l'ordonnateur secondaire la mise en paiement des frais de justice, le régisseur n'intervenant plus que pour le versement d'indemnités aux jurés, témoins et parties civiles. Enfin, il modifie les modalités de paiement des examens de garde à vue et des levées de corps.
Le texte entre en vigueur le 21 avril 2016. Toutefois, les dispositions relatives au nouveau circuit de traitement et de paiement des mémoires de frais de justice s'appliquent à compter du 1er mai 2016. Les revalorisations tarifaires prendront effet à la date prévue par l'arrêté d'application auquel renvoie le décret.

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Procédure pénale

[Brèves] Publication d'un décret relatif au traitement des états et mémoires des frais de justice

Réf. : Décret n° 2016-479, du 18 avril 2016, relatif au traitement des états et mémoires des frais de justice (N° Lexbase : L7675K7E)

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Le 05 Mai 2016

A été publié au Journal officiel du 20 avril 2016, le décret n° 2016-479, du 18 avril 2016, relatif au traitement des états et mémoires des frais de justice (N° Lexbase : L7675K7E). Le nouveau texte généralise l'expérimentation mise en place par le décret n° 2014-461 du 7 mai 2014, relatif aux frais de justice et à l'expérimentation de la dématérialisation des mémoires de frais (N° Lexbase : L1319I3A) et assure une actualisation des dispositions du Code de procédure pénale, du Code de procédure civile et du Code de l'organisation judiciaire. Il prévoit la dématérialisation de toutes les étapes du circuit des frais de justice (établissement des états et des mémoires de frais, application des contrôles dans le cadre des procédures de certification, paiement des frais). Il attribue à l'ordonnateur secondaire la mise en paiement des frais de justice, le régisseur n'intervenant plus que pour le versement d'indemnités aux jurés, témoins et parties civiles. Enfin, il modifie les modalités de paiement des examens de garde à vue et des levées de corps.
Le texte entre en vigueur le 21 avril 2016. Toutefois, les dispositions relatives au nouveau circuit de traitement et de paiement des mémoires de frais de justice s'appliquent à compter du 1er mai 2016. Les revalorisations tarifaires prendront effet à la date prévue par l'arrêté d'application auquel renvoie le décret.

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[Brèves] Publication d'un décret relatif au traitement des états et mémoires des frais de justice

Réf. : Décret n° 2016-479, du 18 avril 2016, relatif au traitement des états et mémoires des frais de justice (N° Lexbase : L7675K7E)

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Le 05 Mai 2016

A été publié au Journal officiel du 20 avril 2016, le décret n° 2016-479, du 18 avril 2016, relatif au traitement des états et mémoires des frais de justice (N° Lexbase : L7675K7E). Le nouveau texte généralise l'expérimentation mise en place par le décret n° 2014-461 du 7 mai 2014, relatif aux frais de justice et à l'expérimentation de la dématérialisation des mémoires de frais (N° Lexbase : L1319I3A) et assure une actualisation des dispositions du Code de procédure pénale, du Code de procédure civile et du Code de l'organisation judiciaire. Il prévoit la dématérialisation de toutes les étapes du circuit des frais de justice (établissement des états et des mémoires de frais, application des contrôles dans le cadre des procédures de certification, paiement des frais). Il attribue à l'ordonnateur secondaire la mise en paiement des frais de justice, le régisseur n'intervenant plus que pour le versement d'indemnités aux jurés, témoins et parties civiles. Enfin, il modifie les modalités de paiement des examens de garde à vue et des levées de corps.
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Rupture du contrat de travail

[Jurisprudence] La remise tardive d'un bulletin de salaire n'est plus nécessairement sanctionnée par l'octroi de dommages et intérêts

Réf. : Cass. soc., 13 avril 2016, n° 14-28.293, FS-P+B+R (N° Lexbase : A6796RIK)

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par Christophe Radé, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale

Le 05 Mai 2016

Après vingt années d'une sévérité excessive, la Chambre sociale de la Cour de cassation serait-elle sur le point de réviser sa jurisprudence concernant la violation par l'employeur d'un certain nombre d'obligations considérées jusqu'à présent comme causant nécessairement un préjudice aux salariés ? C'est ce qu'on peut penser à la lecture d'un arrêt rendu le 13 avril 2016 et promis à une large publicité, dans lequel la Haute juridiction affirme, de manière inédite, que "l'existence d'un préjudice et l'évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond qui peuvent écarter la demande en condamnation de l'employeur pour remise tardive de divers documents de fin de contrat, dès lors que le salarié n'apporte aucun élément pour justifier le préjudice allégué". Cette solution, qui rompt avec une jurisprudence ancienne (I), doit être saluée (II), et sa portée précisée (III).
Résumé

L'existence d'un préjudice et l'évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond qui peuvent écarter la demande en condamnation de l'employeur pour remise tardive de divers documents de fin de contrat, dès lors que le salarié n'apporte aucun élément pour justifier le préjudice allégué.

I - Retour à la normale : l'existence du préjudice ne se présume pas

Contexte juridique. La Chambre sociale de la Cour de cassation a développé depuis les années 1990 une politique jurisprudentielle très favorable aux salariés consistant à imposer aux juges du fond la condamnation des employeurs à payer des dommages et intérêts en réparation de violation de certaines de leurs obligations, considérant que celles-ci causaient "nécessairement" un préjudice au salarié qu'il convenait de réparer, les juges appréciant souverainement le quantum de ces dommages et intérêts.

Cette jurisprudence s'est illustrée s'agissant du paiement du salaire à terme (1), de la mention des motifs du licenciement (2), de la priorité de réembauche dans la lettre de licenciement pour motif économique (3) ou de la mention des critères d'ordre du licenciement (4), de l'information du salarié sur la convention collective applicable dans l'entreprise (5), du fait d'exécuter une clause de non-concurrence illicite (6), de l'existence d'un harcèlement moral (7), de la violation par l'employeur de son obligation de sécurité de résultat (8), de la fermeture de l'entreprise pendant un mouvement de grève, faute de situation d'insécurité (9), du non-respect par l'employeur des procédures conventionnelles en matière disciplinaire (10), du "manquement de l'employeur à son obligation d'informer le salarié dont il rompt le contrat de travail de ses droits en matière de droit individuel à la formation" (11), du "défaut d'examen périodique par le médecin du travail" (12), du respect des temps de repos quotidiens (13), de l'obligation d'instaurer une réserve de participation (14) ou encore de l'"obligation de paiement d'une rémunération au moins égale au SMIC" (15).

Cette affirmation valait également, jusqu'à présent, s'agissant de l'obligation faite à l'employeur de remettre les documents de fin de contrat au salarié, qu'il s'agisse du certificat de travail ou de l'attestation Pôle emploi en cas de remise tardive (16).

Dernièrement, dans deux arrêts rendus en septembre 2014, la Chambre sociale de la Cour de cassation avait d'ailleurs cassé des arrêts d'appel qui avaient refusé d'indemniser un salarié qui avait fondé une demande en réparation du préjudice causé par la remise tardive d'une attestation ASSEDIC, au motif que "la délivrance tardive d'une attestation destinée aux ASSEDIC et d'un certificat de travail cause nécessairement au salarié un préjudice que le juge doit réparer" (17).

Ce sont ces solutions qui se trouvent très certainement remises en cause par cet arrêt en date du 13 avril 2016, et qui concernait notamment la remise tardive de bulletins de salaires, et qui se trouve promis à une large publicité.

Les faits. Un salarié avait saisi la juridiction prud'homale d'une demande de remise de bulletins de salaire et de réparation du préjudice causé par ce retard. Son employeur les lui avait remis pendant la phase de conciliation, et le salarié, qui avait maintenu ses demandes, avait été débouté par le conseil de prud'hommes qui avait considéré qu'il "ne rapportait aucun élément sur le préjudice qu'il aurait subi".

Le salarié contestait ce jugement dans le cadre de son pourvoi, considérant que "la non-délivrance ou la délivrance tardive des certificats de travail et bulletins de paie cause nécessairement un préjudice que le juge doit réparer, le salarié n'ayant pas à en prouver la réalité" (18).

Il n'aura pas gain de cause devant la Cour de cassation, la Chambre sociale affirmant que "l'existence d'un préjudice et l'évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond", et que "le conseil de prud'hommes, qui a constaté que le salarié n'apportait aucun élément pour justifier le préjudice allégué, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision".

Un revirement important. La solution pourrait sembler anodine, et aller de soi, tant il semble normal de considérer que sans préjudice il ne saurait y avoir de responsabilité civile, et qu'il appartient aux juges du fond de déterminer si le demandeur établit la preuve de ses allégations en matière de dommage (19).

Pourtant, ne nous y trompons pas, c'est bien à un infléchissement sensible de sa jurisprudence que nous convie la Chambre sociale de la Cour de cassation, comme le confirme la mention de publication de l'arrêt qui sera commenté au rapport annuel de la Cour de cassation.

II - Un revirement opportun

Une évolution souhaitable. Ce changement d'analyse doit être salué, tant les solutions antérieures ne pouvaient satisfaire, tant sur un plan juridique que pratique.

Retour à l'orthodoxie juridique. Juridiquement, tout d'abord, la Cour de cassation confondait, à dessein, la violation de l'obligation et l'existence d'un préjudice, la seconde découlant automatiquement de la première (20). Cette thèse, qui pourrait être défendue en matière de responsabilité contractuelle pour des raisons qui tiennent à l'objet même du contrat qui est d'apporter au créancier des garanties pour l'avenir (21), doit être écartée par la jurisprudence civile qui subordonne toute condamnation du débiteur à la preuve que l'inexécution a causé un dommage au créancier. Elle n'est, en toute hypothèse, pas soutenable lorsque la responsabilité civile du fautif naît de la violation d'une obligation légale. Dans cette hypothèse, qui se rattache logiquement au schéma de la responsabilité civile extracontractuelle, l'octroi de dommages et intérêt suppose la preuve que la faute a causé un préjudice à la "victime", préjudice sans lequel aucune réparation n'est possible, et dont l'existence dépend de considérations de fait, et donc, logiquement, du pouvoir d'appréciation souverain des juges du fond. Leur imposer de réparer le préjudice sans avoir même la possibilité d'en discuter l'existence était plus que contestable.

Retour à plus d'équité. En pratique, ensuite, la solution admise antérieurement préjugeait du caractère dommageable de la violation de la règle et de l'impact dissuasif de la sanction pour les entreprises. Or, il ne s'agit ici que d'un double préjugé qui peut se révéler très éloigné de la réalité : le salarié peut n'avoir subi aucune espèce de préjudice, parfois même, il ignorait qu'un de ses droits avait été bafoué et ne l'apprenait que dans le cabinet de son conseil ; l'entreprise peut avoir commis une simple erreur matérielle, de bonne foi, et n'avoir donc pas besoin d'un rappel à l'ordre pour l'avenir, ni d'ailleurs de conduire ses procédures sous la menace puisqu'il n'est pas dans ses intentions de se soustraire à ses obligations. La "sanction", car c'est alors bien de cela dont il s'agit, tombe alors aveuglément, sans véritable logique ni justification, et vient seulement enrichir le salarié, si tant est d'ailleurs que la somme attribuée excède l'euro symbolique.

En permettant aux juges du fond de considérer que la violation de la règle de délivrance des documents de fin de contrat à l'expiration du préavis n'a pas causé de dommage au salarié et ne peut donner lieu à aucune réparation particulière, la Cour de cassation effectue donc un salutaire retour à la normale.

III - Une portée à confirmer

Portée du revirement. Reste à déterminer la portée de ce revirement, dont on peut seulement affirmer avec certitude qu'il vaut pour la remise tardive des bulletins de paie et du certificat de travail.

Il vaut certainement aussi pour l'attestation Pôle emploi, également remise à la fin du contrat, et pour laquelle on mesure d'ailleurs plus facilement quel retard elle peut entraîner dans l'ouverture des droits.

Une portée a priori large. La généralité de la formule employée ("l'existence d'un préjudice et l'évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond") ainsi que la mention au rapport annuel de la décision suggèrent une portée large qui pourrait donc voir la Cour de cassation renoncer à cette jurisprudence considérant que telle ou telle violation cause "nécessairement un préjudice" au salarié qu'il convient de réparer. Il conviendra, bien entendu, de suivre avec attention les prochaines décisions rendues par la Haute juridiction pour en avoir la confirmation.

Deux remarques complémentaires doivent, toutefois, être faites.

Sort des obligations de payer. La première concerne toutes les obligations de payer qui pèsent sur l'employeur, et dont on peut considérer que la violation cause effectivement et nécessairement un préjudice au salarié, au moins au titre du retard donnant lieu au versement de dommages et intérêts moratoires (22). Il en va ainsi de l'obligation faite à l'employeur de verser au salarié, tenu par une obligation de non-concurrence, une indemnité compensatrice, mais aussi de payer le salarié au moins une fois par mois, de respecter le minimum légal ou conventionnel, de régler les heures supplémentaires, de constituer une réserve de participation, ou de payer tel ou tel accessoire de la rémunération. Dans cette hypothèse, et même à admettre que la Cour de cassation laisserait les juges du fond statuer sur l'existence d'un préjudice (23), celui-ci serait établi de manière quasiment automatique dès lors que le salarié l'invoquerait, puisqu'il n'a pas perçu ce qu'il devait et que le préjudice résulte du non paiement de sommes ayant, en principe, un caractère alimentaire. Mais pour les autres hypothèses où le salarié se voit reconnaître des droits, notamment procéduraux, le revirement pourrait s'appliquer pleinement et les salariés qui prétendent avoir subi un préjudice en raison de la non-convocation à une visite médicale, ou des règles impératives en matière de durée du travail, pourraient, désormais, devoir en rapporter la preuve effective.

Sort des sanctions automatiques. La seconde interrogation concerne la portée de ce revirement sur d'autres solutions où le quantum de réparation est prévu de manière forfaitaire par le législateur, qu'il s'agisse des sommes prévues en cas de licenciement injustifié, ou de manquement procédural de l'employeur. On sait que la fixation d'un plancher répond à un objectif de sanction de l'entreprise. Jusqu'à présent, la Cour de cassation avait, par exemple, considéré comme injustifié le licenciement du salarié lorsque sa lettre de licenciement ne comportait pas l'énoncé précis du ou des motifs de la rupture du contrat, ou était prononcé sans le respect de garanties procédurales substantielles, comme la consultation d'une instance conventionnelle, même chargée de rendre un simple avis, pour en déduire que la violation des règles devait donner lieu automatiquement à l'attribution de dommages et intérêts pour défaut de cause réelle et sérieuse. Dans ces hypothèses, peut-on espérer que la Cour de cassation considèrera que l'attribution des indemnités en cause (généralement l'indemnité correspondant au moins aux salaires des six derniers mois) sera subordonnée à la preuve que le salarié a effectivement subi un préjudice lié à la violation de ces règles, et que le juge pourrait, considérant, par exemple, que le salarié connaissait les motifs de la rupture de son contrat, alors que la lettre était insuffisamment motivée, ou que la commission de discipline instaurée par l'accord collectif applicable dans l'entreprise n'a pas été saisie mais que le salarié ne prouve pas en quoi ce manquement lui aurait causé un préjudice, le débouter de ses demandes au motif qu'il ne rapporte pas avoir subi de préjudice ?

A l'heure où l'on discute beaucoup sur une simplification vertueuse du droit du travail et sur la suppression des contraintes qui pèsent inutilement sur les entreprises, ne serait-il pas temps, comme le fait la Cour de cassation dans cette affaire, d'en finir avec un certain formalisme tatillon, et inutilement coûteux pour les entreprises ?


(1) Cass. soc., 5 novembre 2014, n° 13-17.831, F-D (N° Lexbase : A9236MZ4).
(2) Cass. soc., 20 janvier 1993, n° 91-41931, publié (N° Lexbase : A3812AAG), RJS, 1993, n° 249.
(3) Cass. soc., 7 mai 1998, n° 96-40.382, inédit (N° Lexbase : A1455CPL); Cass. soc., 25 avril 2007, n° 05-44.236, F-D (N° Lexbase : A0227DWC).
(4) Cass. soc., 7 juillet 1999, n° 97-43.140, inédit (N° Lexbase : A2845CP3).
(5) Cass. soc., 19 mai 2004, n° 02-44.671, FS-P+B (N° Lexbase : A2016DCN).
(6) Depuis Cass. soc., 11 janvier 2006, n° 03-46.933, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A3385DMC). Dernièrement Cass. soc., 13 janvier 2016, n° 14-10.641, F-D (N° Lexbase : A9360N33)
(7) Cass. soc., 6 mai 2014, n° 12-25.253, F-D (N° Lexbase : A9222MKR).
(8) Cass. soc., 11 juillet 2012, n° 11-11.709, F-D (N° Lexbase : A8271IQE).
(9) Cass. soc., 17 décembre 2013, n° 12-23.006, FS-P+B (N° Lexbase : A7271KS4).
(10) Cass. soc., 4 décembre 2013, n° 12-23.930, F-P+B (N° Lexbase : A8317KQ4) : "l'utilisation par l'employeur d'une sanction en violation des dispositions conventionnelles applicables causait nécessairement un préjudice au salarié dont elle a apprécié souverainement le montant".
(11) Cass. soc., 14 octobre 2015, n° 14-16.104, F-D (N° Lexbase : A5916NTB).
(12) Cass. soc., 27 janvier 2016, n° 14-17.912, F-D (N° Lexbase : A3367N7T).
(13) Cass. soc., 23 mai 2013, n° 12-13.015, F-D (N° Lexbase : A9112KDT) ; Cass. soc., 17 février 2016, n° 13-28.791, F-D (N° Lexbase : A4601PZG).
(14) Cass. soc., 9 mars 2016, n° 14-11.837, FS-P+B (N° Lexbase : A1824Q7P) et les obs. de S. Tournaux, Lexbase, éd. soc., n° 648, 2016 (N° Lexbase : N1905BWH).
(15) Cass. soc., 17 mars 2016, n° 14-22.121, F-D (N° Lexbase : A3579Q83).
(16) Cass. soc., 19 avril 2000, n° 98-41.205, inédit (N° Lexbase : A9036AGR) ; Cass. soc., 7 mars 2012, n° 10-20.174, F-D (N° Lexbase : A3807IEQ) et les obs. de G. Auzero, Lexbase, éd. soc., n° 485, 2012 (N° Lexbase : N1916BT7) : "l'inexécution par l'employeur de son obligation de délivrer au salarié une attestation destinée à l'ASSEDIC, indiquant le motif exact de la rupture du contrat de travail, tel qu'il ressort de la prise d'acte du salarié, cause nécessairement à celui-ci un préjudice" ; Cass. soc., 18 juin 2014, n° 13-16.848, FS-D (N° Lexbase : A5987MR8) : la cour d'appel, qui est censurée, avait considéré que, "si des mentions erronées dans l'attestation destinée à l'organisme de gestion de l'assurance chômage sont d'une manière générale de nature à causer un préjudice au salarié, il n'est pas établi que le salarié, qui n'a pas demandé la rectification de cette attestation à l'employeur et a attendu plus de cinq années après le licenciement pour en tirer moyen indemnitaire, a subi un préjudice" ; Cass. soc., 21 janvier 2015, n° 13-25.675, F-D (N° Lexbase : A2588NA4) : remise 15 jours après l'expiration du préavis ; Cass. soc., 4 février 2015, n° 13-18.168, F-D (N° Lexbase : A2399NBH) : remise d'un document non conforme ayant entraîné un refus de prise en charge par Pôle emploi.
(17) Cass. soc., 17 septembre 2014, n° 13-18.850, F-D (N° Lexbase : A8508MWZ) et les obs. de S. Tournaux, Lexbase, éd. soc., n° 585, 2014 (N° Lexbase : N3847BUZ) ; Cass. soc., 29 septembre 2014, n° 13-13.661, FS-P+B (N° Lexbase : A7965MXB) et les obs. de S. Tournaux, Lexbase, éd. soc., n° 587, 2014 (N° Lexbase : N4184BUI).
(18) Le demandeur faisait également valoir que les documents de fin de contrat sont quérables (en ce sens, Cass. soc., 26 mars 2014, n° 12-27.028, FS-D N° Lexbase : A2484MIT) et que seule l'assignation en justice établit avec certitude la demande du salarié. La Cour n'a pas répondu sur ce point car, dans cette affaire, le salarié aurait dû se voir remettre les documents dans l'entreprise à l'expiration du préavis.
(19) Sur la preuve du dommage en matière de responsabilité contractuelle, notre fasc. Droit à réparation. Conditions de la responsabilité contractuelle. Dommage, JCl, Responsabilité civile, fasc. 170, 8-1999, 12 p., mise à jour 01/2015.
(20) Critiquant les solutions antérieures, S. Tournaux avait écrit : "Si l'on peut donc en déduire que la remise de documents est jugée comme constituant une obligation de résultat à la charge de l'employeur, que la seule inexécution suffit à caractériser son manquement sans que la preuve d'un comportement fautif soit nécessaire, cela n'explique pas davantage en quoi la preuve de l'existence d'un préjudice serait superflue", préc..
(21) Sur cette discussion, notre fasc., préc..
(22) On sait, toutefois, que, sauf preuve d'un préjudice particulier, le créancier d'une obligation contractuelle ne peut cumuler le bénéfice d'une majoration du principal de l'intérêt légal, en cas de retard, et de dommages et intérêts moratoires. Dernièrement Cass. soc., 9 juillet 2015, n° 14-12.779, FS-P+B (N° Lexbase : A7590NM3).
(23) Sans préjuger de la demande portant sur l'attribution proprement dite de l'avantage, qui n'est pas une demande en réparation d'un préjudice mais en exécution forcée d'une obligation de payer, ce qui est donc très différent.

Décision

Cass. soc., 13 avril 2016, n° 14-28.293, FS-P+B+R (N° Lexbase : A6796RIK).

Rejet (CPH Lisieux, 3 décembre 2013).

Textes : C. civ., art. 1147 (N° Lexbase : L1248ABT) et C. trav., art. R. 1234-9 (N° Lexbase : L2561I3A).

Mots clef : bulletin de salaire ; remise tardive ; indemnisation du salarié

Lien base : (N° Lexbase : E9999ES7)

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