La lettre juridique n°536 du 18 juillet 2013 : Procédure civile

[Chronique] Chronique de procédure civile - Juillet 2013

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par Etienne Vergès, Professeur à l'Université de Grenoble, membre de l'Institut universitaire de France

le 18 Juillet 2013

Lexbase Hebdo - édition privée vous propose, cette semaine, de retrouver la chronique trimestrielle d'actualité en procédure civile réalisée par Etienne Vergès, agrégé des facultés de droit et Professeur à l'Université de Grenoble II, membre de l'Institut universitaire de France. Dans la première partie de sa chronique, l'auteur revient en détail sur un arrêt rendu le 9 avril 2013 par la première chambre civile de la Cour de cassation, qui constitue un arrêt de principe sur un droit processuel fondamental, à savoir le droit d'accès à un tribunal (Cass. civ. 1, 9 avril 2013, n° 11-27.071, FP-P+B+R+I). La seconde partie constitue un sommaire des décisions importantes, rendues au cours du mois de juin 2013 : sur l'indépendance de l'expert judiciaire (Cass. civ. 2, 27 juin 2013, 2 arrêts, n° 12-60.608, et n° 13-60.025) ; sur le calcul du taux de ressort en appel en cas de condamnation à une obligation de faire (Cass. civ. 2, 6 juin 2013, n° 12-20.062, F-P+B) ; et sur la procédure d'appel (Cass. Avis, 3 juin 2013, n° 15011 P ; Cass. civ. 2, 27 juin 2013, n° 12-20.529, FS-P+B) I - Le droit d'accès à un tribunal et le délai pour exercer l'action en justice : un arrêt de principe sur un droit processuel fondamental (Cass. civ. 1, 9 avril 2013, n° 11-27.071, FP-P+B+R+I N° Lexbase : A8063KBA)

"Le droit à un tribunal, dont le droit d'accès concret et effectif constitue un aspect, n'est pas absolu, les conditions de recevabilité d'un recours ne peuvent toutefois en restreindre l'exercice au point qu'il se trouve atteint dans sa substance même".

Le droit d'accès à un tribunal est consacré par de nombreux textes qui protègent les droits fondamentaux. Pourtant, rares sont les arrêts de la Cour de cassation qui visent précisément ce principe et lui font jouer un rôle de contrôle de conformité de la loi au regard de la CESDH.

Dans l'arrêt étudié, la Cour de cassation était saisie d'une question relative au droit de l'action sociale et des familles et plus particulièrement au délai accordé aux grands-parents pour contester une décision de placement de leur petit-fils. En l'espèce, un enfant, né sans filiation paternelle établie, avait fait l'objet d'un placement à sa naissance. Quelques mois après, sa mère était décédée et un procès-verbal de recueil de l'enfant par l'aide sociale à l'enfance en vue de son admission en qualité de pupille de l'Etat a été établi à la suite de ce décès. Le président du conseil général avait alors admis l'enfant comme pupille de l'Etat par arrêté rendu le même jour. L'article L. 224-8 du Code de l'action sociale et des familles (N° Lexbase : L5365DKW) prévoit que cet arrêté peut faire l'objet d'un recours dans les trente jours à compter de sa date, par les parents de l'enfant, ses alliées et toute personne justifiant d'un lien avec lui. C'est ce que fit la grand-mère de l'enfant, mais cette dernière forma son recours après l'expiration du délai.

La cour d'appel déclara le recours irrecevable et la procédure a alors pris un tour complexe. A la suite d'un pourvoi, la Cour de cassation a rendu un premier arrêt le 6 juin 2012 mettant en oeuvre une procédure QPC (1). La Haute juridiction a alors saisi le Conseil constitutionnel de la question de savoir si la procédure de l'article L. 224-8 du Code de l'action sociale et des familles était conforme à la Constitution. Le juge constitutionnel se prononça par une décision du 27 juillet 2012 (2), dans laquelle il déclarait cette disposition contraire à la Constitution et il reportait son abrogation au 1er janvier 2014 pour laisser au législateur le temps de remédier à la déclaration d'inconstitutionnalité. La décision d'inconstitutionnalité reposait sur une violation de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen (N° Lexbase : L1363A9D) et plus particulièrement sur une atteinte au droit au recours.

C'est dans un tel contexte que l'affaire fut renvoyée une nouvelle fois devant la première chambre civile de la Cour de cassation (3). Celle-ci se trouvait dans une situation inconfortable, puisqu'elle devait trancher une affaire au regard d'une disposition contraire à la Constitution, alors que cette disposition n'avait pas encore été abrogée. Elle a résolu cette difficulté en ayant recours à la CESDH. Au visa de l'article 6, elle a rappelé le principe général selon lequel, "si le droit à un tribunal, dont le droit d'accès concret et effectif constitue un aspect, n'est pas absolu, les conditions de recevabilité d'un recours ne peuvent toutefois en restreindre l'exercice au point qu'il se trouve atteint dans sa substance même". De ce principe général, elle a déduit que ce droit d'accès à la justice fait l'objet d'une atteinte caractérisée lorsque "le délai de contestation d'une décision, tel que celui prévu par l'article L. 224-8 du Code de l'action sociale et des familles, court du jour où la décision est prise non contradictoirement et que n'est pas assurée l'information des personnes admises à la contester".

En conséquence, elle a cassé l'arrêt d'appel qui avait déclaré le recours irrecevable, car la grand-mère de l'enfant placé n'avait pas été informée, en temps utile, de l'arrêté du président du conseil général et de la faculté de contester cet acte.

Cette décision est très riche en enseignements. Elle montre, si cela était nécessaire, que les droits processuels fondamentaux trouvent à s'appliquer dans les contentieux les plus techniques, mais également que la combinaison des principes constitutionnels et de ceux de la CESDH, permet à la Cour de cassation de mettre en oeuvre ces droits fondamentaux de façon concrète et rapide.

- Le droit au juge, fondement de la décision

Le droit au juge est un principe consacré par la CEDH depuis un célèbre arrêt "Golder c/ RU" du 21 février 1975 (4). Dans cet arrêt, elle a déduit de l'article 6 CESDH (N° Lexbase : L7558AIR), l'existence d'un droit d'accès au juge alors même que ce droit n'était pas expressément prévu par la Convention. En droit interne, le Conseil constitutionnel a consacré progressivement le droit au juge, d'abord dans une décision de 1993 (5). Il a rattaché le droit à un recours à l'article 16 de la DDHC, qui prévoit de façon générale un principe de "garantie des droits". En d'autres termes, le droit au juge constitue une garantie de mise en oeuvre des droits substantiels. Plus précisément, dans une importante décision de 1996 (6), le Conseil a considéré qu'"il ne doit pas être porté d'atteintes substantielles au droit des personnes intéressées d'exercer un recours effectif devant une juridiction". Cette formule est essentielle, car elle définit l'étendue du droit au juge et ouvre des possibilités de dérogations.

Comme tous les grands principes du droit processuel, le droit au juge a donné lieu à de très nombreuses applications techniques, tant dans la jurisprudence européenne que dans les décisions du Conseil constitutionnel. Le contenu du principe apparaît à la fois riche et complexe.

Par exemple, c'est sur le fondement du droit au juge que la CEDH examine la validité de la renonciation au droit d'agir en justice (7), ou encore qu'elle condamne un Etat qui refuse d'octroyer à un mouvement religieux la personnalité juridique lui permettant d'exercer l'action en justice (8). Le droit d'agir en justice comprend également le droit à une assistance juridique, à une aide financière (sous condition de ressource), le droit d'obtenir une décision de justice ou encore le droit à l'exécution de cette décision. Mais la CEDH admet des limites au droit d'agir en justice. C'est le cas de la prescription par exemple, qui ferme l'accès au juge pour assurer la sécurité juridique (9), ou encore des privilèges et immunités de juridictions, qui assurent la stabilité des relations internationales et le bon fonctionnement des organisations internationales (10).

Le Conseil constitutionnel a également mis en oeuvre le principe à plusieurs reprises. Par exemple, il a jugé que le droit d'exercer un recours juridictionnel effectif doit être assuré dès qu'une personne fait l'objet d'une sanction qui a le caractère d'une punition. Cette solution a été appliquée principalement en matière pénale (11), mais également s'agissant de sanctions qui peuvent avoir un caractère civil plus prononcé (coupure de l'accès internet) (12). Autre exemple, le Conseil constitutionnel admet que des autorités non juridictionnelles puissent délivrer des actes ayant un effet exécutoire, mais à la condition que le débiteur dispose d'un recours effectif tant sur le bien-fondé desdits titres que sur l'obligation de payer ou sur le déroulement de la procédure d'exécution forcée (13). Comme dans la jurisprudence européenne, le droit au recours ne revêt pas de caractère absolu. Par exemple, le législateur peut refuser d'accorder aux mineurs la suspension d'une prescription, dès lors que durant la minorité, les droits de l'enfant pouvaient être exercés en justice par l'intermédiaire du représentant légal (14).

- Le droit au juge et l'atteinte substantielle dans la décision QPC du Conseil constitutionnel

Le droit au juge doit se comprendre dans sa dimension de droit fondamental, c'est-à-dire comme un principe dont l'application est fonction du critère de proportionnalité. C'est pour cette raison que les juridictions supérieures utilisent le concept de l'atteinte substantielle. La CEDH juge de façon constante depuis l'arrêt "Philis c/ Grèce" (15) que le droit d'accès à la justice ne constitue pas un droit absolu, mais qu'il "peut donner lieu à des limitations, lesquelles ne sauraient cependant restreindre l'accès ouvert à l'individu d'une manière ou à un point tels que le droit s'en trouve atteint dans sa substance même". La solution est la même dans la jurisprudence constitutionnelle (16) et dans l'affaire étudiée, le Conseil constitutionnel a rendu sa décision QPC en rappelant qu'il résultait de l'article 16 DDHC qu'il ne doit pas être porté d'atteintes substantielles au droit des personnes intéressées d'exercer un recours effectif devant une juridiction" (cons. 4).

La notion d'atteinte substantielle au droit d'accès en justice est vague et les juridictions supérieures l'appliquent au cas par cas. S'agissant de l'article L. 224-8 du Code de l'action sociale et des familles, le Conseil constitutionnel a jugé que l'arrêté du président du conseil général ne pouvait être notifié à l'ensemble des personnes disposant d'un droit d'agir, car la disposition en cause avait conféré la qualité pour agir à une liste de personnes non limitative (les parents, alliés et personnes justifiant d'un lien avec l'enfant). Dès lors, les formalités d'information étaient réduites. Sans donner d'indication précise le Conseil constitutionnel a reproché au législateur de ne n'avoir pas défini "les cas et conditions dans lesquels celles des personnes qui présentent un lien plus étroit avec l'enfant sont effectivement mises à même d'exercer ce recours". C'est cette carence qui a constitué l'atteinte substantielle au droit fondamental. Toutefois, le Conseil constitutionnel dispose d'outils limités pour mettre fin à l'inconstitutionnalité. S'il avait abrogé l'article L. 224-8 du Code de l'action sociale et des familles, il aurait fait disparaître dans le même temps le recours contre l'arrêté. L'atteinte au droit au juge aurait été plus grave. Pour cette raison, l'abrogation a été reportée au 1er janvier 2014. En revanche, cette solution ne permettait pas à la Cour de cassation de faire cesser l'atteinte au droit au juge dans l'affaire qui lui était soumise.

- La cessation de l'atteinte substantielle par la Cour de cassation

Comme elle en a désormais l'habitude, la Cour de cassation a utilisé la CESDH pour relayer la décision d'inconstitutionnalité. En se fondant sur l'article 6 de la Convention, elle a affirmé que "si le droit à un tribunal, dont le droit d'accès concret et effectif constitue un aspect, n'est pas absolu, les conditions de recevabilité d'un recours ne peuvent toutefois en restreindre l'exercice au point qu'il se trouve atteint dans sa substance même". La Cour de cassation s'inscrit ainsi dans le courant jurisprudentiel initié par la CEDH et le Conseil constitutionnel. Cette formule donne une portée particulière à l'arrêt, car la Cour de cassation ne l'a utilisé que très rarement dans le passé (17). On sent ici, non seulement le signe d'un arrêt de principe, mais également la volonté d'inscrire la décision dans un contrôle de conformité de la loi française vis-à-vis de la CESDH.

La Cour de cassation relève ensuite plusieurs éléments qui permettent de caractériser l'atteinte substantielle au droit d'accès concret et effectif à un tribunal : l'arrêté n'a pas été rendu de façon contradictoire ; les personnes admises à le contester n'en ont pas été informées et enfin, le délai pour contester cette décision court à compter de sa date (et non pas à compter de sa publication (18)).

Ce qui fait la force de la Cour de cassation dans cet arrêt, c'est qu'en utilisant l'outil de la cassation, elle déclare implicitement recevable l'action en justice de la grand-mère ; et cette recevabilité n'est apparemment soumise à aucune condition de délai. En effet, le délai de l'article L. 224-8 est neutralisé par la Cour de cassation, car il porte une atteinte substantielle au droit d'accès au juge. La Cour corrige ainsi l'atteinte au droit au juge, sans toucher à l'ensemble de l'article critiqué, mais simplement en excluant de la disposition, la règle relative au délai d'exercice du recours. Mais la Cour de cassation ne pose aucun autre délai, ni aucune modalité d'information des personnes liées à l'enfant. Elle n'apporte ainsi qu'une correction imparfaite au problème soulevé par l'espèce. Et surtout, elle n'améliore pas l'information des personnes liées à l'enfant. Sans une réforme de l'article L. 224-8 du Code de l'action sociale et des familles, la Cour de cassation devra juger au cas par cas, le temps pris par un demandeur pour exercer le recours, au regard des conditions dans lesquelles ce demandeur aura été informé de l'admission de l'enfant en qualité de pupille de l'Etat (19).

En définitive, l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 9 avril 2013 est exemplaire à plusieurs titres. D'abord, il contribue au renforcement des droits fondamentaux de la procédure dans la jurisprudence de la Cour de cassation, ensuite, il montre que les limitations à l'accès à la justice font l'objet d'un examen de plus en plus attentif par la Cour de cassation, enfin, il se situe dans ce nouveau courant d'interprétation qui conduit la Cour de cassation à statuer in concreto lorsqu'elle est saisie d'une question qui met en jeu des droits fondamentaux, et à faire jouer la balance des intérêts en présence (20). En revanche, l'arrêt montre une nouvelle fois les limites du contrôle de conformité de la loi à la CESDH. La Cour de cassation peut neutraliser une disposition de la loi française, mais elle n'est pas en mesure de la réécrire lorsque cela s'avère nécessaire.

II - Sommaire des arrêts importants

La jurisprudence parue depuis la dernière chronique de procédure civile est particulièrement abondante. Il est ainsi proposé une analyse rapide des arrêts les plus importants.

  • Indépendance de l'expert judiciaire - relation d'affaire avec un assureur - critères du défaut d'indépendance

- Cass. civ. 2, 27 juin 2013, n° 13-60.025, F-P+B (N° Lexbase : A3891KIX)

Pour être inscrits sur la liste des experts d'une cour d'appel, les techniciens doivent offrir des garanties d'indépendance vis-à-vis des futurs plaideurs. Dans cette affaire, un expert inscrit sur la liste (dans la catégorie architecture/ingénierie) avait formé un pourvoi contre la décision de l'assemblée générale des magistrats du siège de ne pas le réinscrire.

La Cour de cassation confirme la décision de l'assemblée générale en relevant que l'expert réalisait 80 % de son activité pour un assureur privé et 20 % pour la juridiction. Il avait ainsi créé "une relation d'affaire susceptible d'interférer avec son activité d'expert judiciaire" et la Haute juridiction a pu en déduire que cette relation "était incompatible avec l'indépendance nécessaire à l'accomplissement de missions judiciaires d'expertise au sens des dispositions de l'article 2.6° du décret du 23 décembre 2004".

- Cass. civ. 2, 27 juin 2013, n° 12-60.608, F-P+B (N° Lexbase : A3889KIU)

Dans cette affaire jugée le même jour, un médecin avait sollicité son inscription sur la liste des experts de la cour d'appel ; inscription qui lui avait été refusée au motif qu'il exerçait son activité, "en tout ou en partie, pour le compte de sociétés d'assurances".

Cette fois, la Cour de cassation annule la décision de l'assemblée générale des magistrats du siège au motif que le fait qu'un candidat "ait réalisé des missions d'expertise pour des sociétés d'assurances ne constitue pas, en soi, l'exercice d'une activité incompatible avec l'indépendance nécessaire à l'exercice de missions judiciaires d'expertise".

La distinction avec l'espèce précédente est nette. D'une part, le médecin exerçait son activité pour plusieurs compagnies d'assurances, d'autre part, la part d'activité exercée pour ces compagnies vis-à-vis de son activité globale n'était pas connue. Il n'était donc pas possible d'établir une "relation d'affaire" de nature à nuire à l'indépendance de l'expert.

  • Appel - calcul du taux de ressort en cas de condamnation à une obligation de faire (Cass. civ. 2, 6 juin 2013, n° 12-20.062, F-P+B N° Lexbase : A3274KGD)

L'arrêt rendu le 6 juin 2013 est intéressant car il tranche une difficulté d'application dans le calcul du taux de ressort. En l'espèce, deux cadres dirigeants avaient convenu de se répartir à parts égales les actions d'une société dont ils avaient repris la direction. L'un des dirigeants ayant acquis seul 125 000 actions de cette société, l'autre agit en justice pour obtenir la cession de la moitié de ces actions. Le demandeur avait évalué la valeur de ces actions à 1 euro. Les juges du fond avaient rejeté sa demande dans un jugement qualifié "en dernier ressort".

L'associé débouté interjeta tout de même appel de cette décision, mais son recours fut jugé irrecevable, car, selon les juges d'appel, le taux de ressort de 4 000 euros n'avait pas été atteint.

La Cour de cassation casse cette décision et dans un attendu très clair, elle affirme que "toute demande tendant à la condamnation du défendeur à l'exécution d'une obligation de faire constitue en elle-même une demande indéterminée". Elle en déduit que le taux de ressort ne pouvait pas être appliqué à cette demande, qui par nature était indéterminée et se voyait appliquer l'article 40 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1192H4W) (21).

  • Procédure d'appel - Les délais du décret "Magendie" ne s'appliquent pas à la procédure dite "courte" ou "à bref délai" (Cass. Avis, 3 juin 2013, n° 15011 P N° Lexbase : A2155KHB)

Un nouvel avis de la Cour de cassation était sollicité pour savoir si le circuit court de l'article 905 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L0374IGX) -qui prévoit que le président de la chambre fixe l'audience "à bref délai" dans plusieurs hypothèses- était soumis aux dispositions relatives aux délais pour conclure (3 mois pour l'appelant, 2 mois pour l'intimé).

La Cour de cassation répond clairement que :

"Les dispositions des articles 908 (N° Lexbase : L0162IPP) à 911 du Code de procédure civile ne sont pas applicables aux procédures fixées selon les dispositions de l'article 905 du même code".

En d'autres termes, les délais fixés par la nouvelle procédure d'appel ne s'appliquent par lorsque le président de la chambre fixe l'audience à bref délai.

Cet avis confirme une solution rendue le 13 mai 2013 (Cass. civ. 2, 16 mai 2013, n° 12-19.119 N° Lexbase : A5179KD8) dans laquelle la Cour de cassation avait exclu l'application des délais du décret "Magendie" à une procédure d'appel contre une ordonnance de référé (il s'agit d'un des trois cas visés par l'article 905).

  • Procédure d'appel - Le délai pour signifier les conclusions d'appel aux parties qui n'ont pas constitué avocat (Cass. civ. 2, 27 juin 2013, n° 12-20.529, FS-P+B N° Lexbase : A2974KIY)

La combinaison des délais du décret "Magendie" n'est pas toujours aisée. Pour rappel, l'appelant dispose d'un délai de 3 mois à compter de la déclaration d'appel pour conclure (C. pr. civ., art. 908) et d'un mois supplémentaire pour signifier les conclusions aux parties qui n'ont pas constitué avocat (C. pr. civ., art. 911 N° Lexbase : L0351IT8).

Dans cette affaire, l'appelant avait conclu dans les délais, mais il avait signifié ses conclusions plus d'un mois après avoir déposé ses conclusions au greffe de la cour d'appel. La question se posait alors de savoir si le délai pour signifier les conclusions (C. pr. civ., art. 911) courait à compter du dépôt des conclusions ou à compter de l'expiration du délai de 3 mois pour conclure (C. pr. civ., art. 908).

La Cour de cassation fait une stricte application de l'article 911 du Code de procédure civile (qui d'ailleurs était explicite à ce sujet). Elle affirme ainsi que :

"l'appelant dispose d'un délai d'un mois, courant à compter de l'expiration du délai de trois mois prévu pour la remise de ses conclusions au greffe, pour les signifier aux parties qui n'ont pas constitué avocat".

Le délai de signification aux parties qui n'ont pas constitué avocat est donc invariablement de 4 mois à compter de la déclaration d'appel.


(1) Cass. QPC, 6 juin 2012, n° 11-27.071, FS-P+B+I (N° Lexbase : A4080ING).
(2) Cons. const., décision n° 2012-268 QPC du 27 juillet 2012 (N° Lexbase : A0584IR3).
(3) Pour un commentaire de cette décision, orienté autour des questions de droit de la famille, Y. Favier, Pupilles de l'Etat : une réforme désormais urgente, JCP éd. G, 2013, 700.
(4) CEDH, 21 février 1975, Req. 4451/70 (N° Lexbase : A1951D7E), série A, n° 18, AFDI, 1975, 330, note R. Pelloux.
(5) Cons. const., 13 août 1993, décision n° 93-325 DC (N° Lexbase : A8285ACT), RFDA, 1993, p. 871.
(6) Cons. const., 9 avril 1996, décision n° 96-373 DC (N° Lexbase : A8338ACS).
(7) Par exemple, CEDH, 16 décembre 1992, Req. 87/1991/339/412, Geouffre de la Pradelle c/ France, n° 253-B (N° Lexbase : A6547AWE).
(8) CEDH, 16 décembre 1997, Req. 143/1996/762/963 (N° Lexbase : A7745AWR).
(9) CEDH, 22 octobre 1996, Req. 36-37/1995/542 (N° Lexbase : A8348AW4), Justices 1997-5, p. 199.
(10) CEDH 18 février 1999, Req. 26083/94 (N° Lexbase : A7659AWL), RTDH, 2000, p. 77.
(11) Cons. const., décision n° 2010-38 QPC du 29 septembre 2010 (N° Lexbase : A4883GA4) (à propos de l'amende forfaitaire).
(12) Cons. const., décision n° 2006-540 DC du 27 juillet 2006, loi "DAVDSI" (N° Lexbase : A5780DQ7).
(13) Cons. const., décision n° 99-416 DC du 23 juillet 1999, loi portant création d'une couverture maladie universelle (N° Lexbase : A8782ACA).
(14) Cons. const., décision n° 2012-256 QPC du 18 juin 2012 (N° Lexbase : A8705INQ), à propos de la prescription des créances contre les personnes publiques.
(15) CEDH, 27 août 1991, Req. 12750/87 (N° Lexbase : A6541IBU).
(16) Cf. Cons. const., 9 avril 1996, décision n° 96-373 DC (N° Lexbase : A8338ACS).
(17) On relève seulement quatre arrêts dans lesquels la Cour de cassation utilise la formule et aucun de la première chambre civile : Cass. civ. 2, 9 avril 2009, n° 07-20.193 F-D (N° Lexbase : A0993EGU) ; Cass. civ. 2, 7 avril 2001, n° 10-18.784, F-D (N° Lexbase : A3621HNG) ; Cass. civ. 2, 10 janvier 2013, n° 11-13.248 (N° Lexbase : A0778I39) et Cass. soc., 16 décembre 2009, n° 08-44.886, F-D (N° Lexbase : A7221EP7).
(18) Publication qui n'est d'ailleurs pas prévue par les textes.
(19) Cf. en ce sens E. Dreyer, Recevabilité d'un moyen "CEDH" développé pour la première fois devant la Cour de cassation, JCP éd. G, 2013, 699.
(20) Le critère de l'atteinte substantielle rejoint ici celui de la proportionnalité.
(21) L'appel est par principe recevable à l'égard des demandes indéterminées.

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