La lettre juridique n°534 du 4 juillet 2013 : Baux commerciaux

[Chronique] Chronique d'actualité jurisprudentielle en droit des baux commerciaux

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par Julien Prigent, avocat à la cour d'appel de Paris, Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Baux commerciaux"

le 04 Juillet 2013

Lexbase Hebdo - édition affaires vous propose de retrouver, cette semaine, une chronique de droit des baux commerciaux revenant sur les dernières décisions en la matière, réalisée par Julien Prigent, avocat à la cour d'appel de Paris et Directeur scientifique de l’Ouvrage "baux commerciaux". Ce dernier a choisi de revenir sur trois arrêts rendus par la troisième chambre civile de la Cour de cassation. Dans le premier, en date du 5 juin 2013 et promis aux honneurs du Bulletin, la Haute juridiction retient, en matière de bail dérogatoire, l'absence de conséquence de l'inaction du bailleur après la délivrance d'un congé (Cass. civ. 3, 5 juin 2013, n° 12-19.634, FS-P+B). Dans le deuxième arrêt commenté, rendu le 11 juin 2013, également publié au Bulletin, la Cour régulatrice énonce que la demande tendant à la reconnaissance du statut des baux commerciaux est soumise au délai de prescription biennale de l'article L. 145-60 du Code de commerce qui court à compter de la conclusion du contrat, même s'il a été tacitement reconduit (Cass. com., 11 juin 2013, n° 12-16.103, F-P+B). Enfin, le dernier arrêt de cette chronique, rendu le 18 juin 2013, est l'occasion pour la troisième chambre civile de rappeler que lorsque la loi réduit la durée d'une prescription, la prescription réduite commence à courir, sauf disposition contraire, du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure, de sorte que la demande de restitution de charges indument réglées par le preneur et relatives à un exercice antérieur à plus de cinq ans à compter de la demande de restitution ne sont pas nécessairement prescrites en application de l'ancien article 2277 du Code civil (Cass. civ. 3, 23 avril 2013, n° 11-27.798, F-D).
  • Bail dérogatoire : de l'absence de conséquence de l'inaction du bailleur après la délivrance d'un congé (Cass. civ. 3, 5 juin 2013, n° 12-19.634, FS-P+B N° Lexbase : A3320KG3)

Solution

A suffisamment manifesté sa volonté de ne pas voir le preneur rester dans les lieux et bénéficier d'un bail commercial de droit commun, le bailleur qui, avant le terme du bail, donne congé à son locataire pour cette date, la renonciation du bailleur à son droit de demander au preneur de quitter les lieux ne pouvant se déduire de son silence ou de son inaction postérieure.

Faits

En l'espèce, un bailleur avait consenti un bail dérogatoire à compter du 1er septembre 2003 pour se terminer le 30 juin 2005. Par acte du 27 mai 2005, le bailleur avait délivré congé au preneur pour le terme du bail. Le locataire était demeuré dans les lieux et après échec des négociations en vue de la conclusion d'un bail commercial de droit commun, le preneur a assigné le bailleur en reconnaissance du bénéfice d'un bail soumis au statut. Les juges du fond ayant accueilli cette demande (CA Aix-en-Provence, 24 février 2012, n° 09/23503 N° Lexbase : A2716IDX), le bailleur s'est pourvu en cassation.

Observations

Les parties à un bail soumis de plein droit au statut des baux commerciaux peuvent décider, lors de l'entrée dans les lieux du preneur, de déroger aux dispositions de ce statut à la condition que la durée totale du bail ou des baux successifs ne soit pas supérieure à deux ans (C. com., art. L. 145-5 N° Lexbase : L2320IBK). Si, à l'expiration de cette durée, le preneur reste et est laissé en possession, il s'opère, à compter du premier jour suivant le terme du bail dérogatoire (Cass. civ. 3, 25 novembre 1975, n° 74-13.075 N° Lexbase : A7109AGE ; Cass. civ. 3, 25 juin 2003, n° 02-12.545 N° Lexbase : A9843C83) un nouveau bail soumis au statut des baux commerciaux.

Le loyer du bail commercial qui se crée par l'effet de la loi à l'issue d'un ou des baux dérogatoires doit, à défaut d'accord entre les parties, être fixé au montant de la valeur locative, sans qu'il soit nécessaire de justifier d'un motif de déplafonnement (Cass. civ. 3, 14 décembre 2005, n° 05-12.587, FS-P+B+I N° Lexbase : A9536DLR ; Cass. civ. 3, 5 février 2008, n° 06-21.999, F-D N° Lexbase : A7241D4X).

Le bailleur peut également se prévaloir de la création d'un bail commercial à l'issue d'un bail dérogatoire (Cass. civ. 3, 24 novembre 2004, n° 03-12.605, FS-P+B N° Lexbase : A0339DEB). Si, en revanche, il souhaite s'opposer à la création d'un tel bail, il lui appartient de manifester, avant le terme convenu (Cass. civ. 3, 24 novembre 1999, n° 96-13.484 N° Lexbase : A8637AHD), sa volonté de ne pas poursuivre sa relation contractuelle avec le locataire (Cass. civ. 3, 4 mai 2010, n° 09-11.840, F-D N° Lexbase : A0732EXE), aucune clause du bail ne pouvant avoir pour effet de dispenser le bailleur de faire connaître au preneur son opposition à son maintien dans les lieux en cours d'exécution du bail (Cass. civ. 3, 4 mai 2010, n° 09-11.840, préc.). La preuve de la volonté de ne pas voir le preneur laisser en possession des lieux incombe alors au bailleur (Cass. civ. 3, 27 juin 1990, n° 88-16.424 N° Lexbase : A7841AGI).

Dans l'arrêt rapporté, le bailleur avait, au regard de cette jurisprudence, effectué les diligences nécessaires pour faire obstacle à la création d'un bail commercial puisqu'il avait manifesté sa volonté de voir le preneur partir en lui délivrant un congé antérieurement au terme du bail dérogatoire pour cette dernière date. Toutefois, un délai de plus de vingt mois s'était écoulé entre la fin des pourparlers entre les parties sur la conclusion d'un nouveau bail et la date à laquelle le bailleur avait été assigné par le preneur. Ce dernier prétendait, en conséquence, que cette inaction était constitutive d'un accord tacite du bailleur sur son maintien dans les lieux.

La Cour de cassation rejette cette argumentation en précisant que "la renonciation à un droit ne se déduit pas de la seule inaction ou du silence de son titulaire". Il est, en effet, de jurisprudence constante que la renonciation à un droit, si elle peut être tacite, ne doit pas être équivoque (voir, par exemple, Cass. civ. 1, 29 mai 2013, n° 12-17.952, F-D N° Lexbase : A9512KEZ ; Cass. civ. 3, 23 novembre 2010, n° 09-68.685, F-D N° Lexbase : A7579GLB). L'inaction du bailleur est équivoque car il paraît difficile d'y voir avec certitude l'expression d'une volonté de renoncer au congé préalablement notifié.

Dans une espèce similaire cependant, la Cour de cassation, dans un arrêt inédit, avait approuvé les juges du fond qui avaient jugé qu'un nouveau bail soumis au statut s'était créé à l'issue d'un bail dérogatoire, alors même que le bailleur avait, par deux lettres adressées au preneur avant le terme du dernier en date des baux dérogatoires, manifesté une opposition de principe au maintien dans les lieux du preneur et annoncé différentes diligences aux fins d'une reprise des locaux à ce terme (Cass. civ. 3, 28 juin 2011, n° 10-19.236, F-D N° Lexbase : A6413HU3). Les faits ayant donné lieu à cette décision justifiaient, peut-être, cette solution, la Cour de cassation ayant relevé que le bailleur souhaitait, en réalité, amener le preneur à un accord sur les modalités d'une poursuite de leurs relations contractuelles et qu'il n'avait, d'ailleurs, accompli aucune des diligences annoncées.

Il semblerait, en conséquence, que si l'inaction ou le silence du bailleur ne peut à elle seule, si un congé a été notifié avant la fin du bail, valoir renonciation du bailleur à ce congé, il n'est pas exclu, en fonction des raisons motivant cette inaction, qu'elle puisse être considérée comme valant accord du bailleur sur le maintien dans les lieux du preneur. La prudence impose donc au bailleur de solliciter rapidement le départ du preneur après le terme du bail.

  • Sur la prescription de l'action en requalification d'un contrat de location-gérance (Cass. com., 11 juin 2013, n° 12-16.103, F-P+B N° Lexbase : A5785KGD)

Solution

La demande tendant à la reconnaissance du statut des baux commerciaux est soumise au délai de prescription biennale de l'article L. 145-60 du Code de commerce (N° Lexbase : L8519AID) qui court à compter de la conclusion du contrat, même s'il a été tacitement reconduit.

Faits

Par contrat d'une durée d'un an renouvelable par tacite reconduction, une société avait donné son fonds de commerce, dépendant de locaux indivis, en location-gérance. Estimant que le contrat était, en réalité, un bail commercial, le "locataire-gérant" avait fait assigner les propriétaires et le "loueur" pour obtenir sa requalification. Les juges du fond ayant considéré que sa demande était irrecevable, comme prescrite en application de l'article L. 145-60 du Code de commerce (CA Bordeaux, 2ème ch., 14 novembre 2011, n° 08/04737 N° Lexbase : A9038IR8), il s'est pourvu en cassation.

Observations

1 - Sur le principe de la requalification d'un contrat de location-gérance en bail commercial

Le contrat de location-gérance est une convention par laquelle le propriétaire ou l'exploitant d'un fonds de commerce ou d'un établissement artisanal en concède totalement ou partiellement la location à un gérant qui l'exploite à ses risques et périls (C. com., art. L. 144-1 N° Lexbase : L5716AIK). Le bail commercial se distingue du contrat de location-gérance en ce que l'objet du premier est constitué d' "un immeuble bâti", tandis que le second porte sur un fonds de commerce, "bien meuble incorporel" (Cass. com., 16 février 1993, n° 91-13.277 N° Lexbase : A5618ABP). Le contrat de location-gérance ne peut, en principe, être qualifié de sous-location, dès lors "la jouissance des locaux n'est que la conséquence accessoire et nécessaire" (Cass. civ. 3, 19 mars 2008, n° 07-11.805, FS-P+B N° Lexbase : A4905D7S).

Le statut des baux commerciaux, applicable aux baux portant sur un immeuble dans lequel est exploité un fonds appartenant au preneur, n'est donc pas en principe applicable au contrat de location-gérance, le locataire-gérant n'étant pas propriétaire du fonds de commerce (Cass. com., 21 mars 1995, n° 93-11.868 N° Lexbase : A1118ABZ).

Toutefois, si aucun fonds de commerce n'est en réalité donné à bail, le contrat de location-gérance pourra être requalifié de bail commercial (Cass. civ. 3, 17 juin 1975, n° 74-10.605 N° Lexbase : A7098AGY). A ainsi pu être qualifié de sous-location le contrat dénommé "contrat de location-gérance" qui ne portait en réalité "ni sur la clientèle du magasin, ni sur les éléments corporels de ce fonds de commerce, ni sur le nom commercial" (Cass. civ. 3, 10 mai 2001, n° 99-18.235, inédit N° Lexbase : A3972ATB).

Dans l'arrêt rapporté, le "locataire-gérant" avait assigné les propriétaires indivis, puis le "loueur" afin de voir requalifier le contrat dénommé "location-gérance" en bail commercial. La cour d'appel avait rejeté sa demande, non en tant qu'elle était mal fondée, mais en raison de son irrecevabilité du fait d'une prescription.

2 - Sur la prescription de l'action en requalification

Les actions exercées en vertu du chapitre V du Code de commerce, relatif aux baux commerciaux, se prescrivent par deux ans (C. com., art. L. 145-60 N° Lexbase : L8519AID).

Il peut être soutenu que l'action tendant à voir restituer à un contrat dénommé "location-gérance" sa véritable qualification de bail commercial est une action qui repose sur l'application des articles L. 145-1 (N° Lexbase : L2327IBS) ou L. 145-2 du Code de commerce (N° Lexbase : L5741ISG) qui déterminent le champ d'application du statut des baux commerciaux.

Elle serait, en conséquence, soumise au délai de prescription de l'article L. 145-60 du Code de commerce. C'est en ce sens que s'est prononcée la Cour de cassation dans un arrêt du 29 octobre 2008 (Cass. civ. 3, 29 octobre 2008, n° 07-16.185, FS-D N° Lexbase : A0591EBI). Dans l'espèce ayant donné lieu à cette décision, les parties avaient signé deux baux dérogatoires (C. com., art. L. 145-5 N° Lexbase : L2320IBK) successifs puis, aux termes du second, un contrat de location-gérance. Le "loueur" avait ensuite notifié un congé au "locataire-gérant" puis assigné ce dernier en expulsion. Le "locataire-gérant" avait reconventionnellement sollicité la requalification du contrat de "location-gérance" en bail commercial. La Cour de cassation l'avait débouté de sa demande au motif qu'elle était prescrite dans la mesure où elle avait été formée plus de deux ans après la date d'effet du contrat.

A propos de la requalification en bail commercial d'un contrat dénommé par les parties "bail professionnel", la Cour de cassation a expressément précisé que la demande de requalification du preneur (formée par voie d'action), en vertu de l'article L. 145-2, 1° du Code de commerce était prescrite dès lors que l'action avait été engagée plus de deux ans après la date de signature et d'effet du contrat (Cass. civ. 3, 23 novembre 2011, n° 10-24.163, FS-P+B N° Lexbase : A0082H3G ; cf. nos obs. in Chronique d'actualité de droit des baux commerciaux, Lexbase Hebdo n° 278 du 5 janvier 2012 - édition affaires N° Lexbase : N9511BS3).

Cette solution n'est pas exempte de critiques.

La question se pose en effet de savoir si l'action en requalification s'exerce réellement sur le fondement d'une disposition du statut des baux commerciaux et s'il peut être admis de retenir la date de signature ou d'effet de la convention litigieuse alors que certains droits, au demeurant d'ordre public, dont le droit au renouvellement, ne naîtront que postérieurement (voir notamment, P.-H. Brault, Loyers et copr., 2012, étude n° 11 et J. Monéger, AJDI, 2012, p. 266).

La solution a pourtant été ensuite réaffirmée expressément à propos d'un contrat qualifié de "location-gérance" par un arrêt de la Cour de cassation du 22 janvier 2013 (Cass. civ. 3, 22 janvier 2013, n° 11-22.984, F-D N° Lexbase : A8768I37). Les parties avaient signé un contrat de location-gérance que le "loueur" avait dénoncé pour son terme contractuel. Le "locataire-gérant" l'avait alors assigné "en requalification de contrat en bail commercial". Les juges du fond, approuvé par la Cour de cassation, avaient jugé cette demande irrecevable en tant que prescrite, au motif que "la demande tendant à la reconnaissance du statut des baux commerciaux est soumise à la prescription biennale et que le délai court à compter de la conclusion du contrat". La Haute cour avait relevé que cette prescription était encourue dans la mesure où l'existence d'un contrat postérieur entre les parties (par l'effet d'une tacite reconduction selon le premier moyen annexé à l'arrêt) n'était pas établie.

Toujours à propos de la requalification d'un contrat de location-gérance, l'arrêt rapporté du 11 juin 2013 rappelle cette règle : "la demande qui tend à la reconnaissance du statut des baux commerciaux est soumise à la prescription biennale de l'article L. 145-60 du Code de commerce et ce délai court à compter de la conclusion du contrat". Le preneur agissait, en l'espèce, par voie d'action.

La Cour de cassation rejette également l'argument du "crédit-preneur", qui consistait à soutenir que le délai de prescription ne devait pas courir à compter de la conclusion du contrat initial, mais de sa dernière reconduction tacite. D'un point de vue logique, l'argument était en effet discutable car contradictoire avec la demande de requalification en bail commercial qui aurait conduit, si elle avait été accueillie, à rejeter toute tacite reconduction avant l'expiration d'une durée de neuf ans (C. com., art. L. 145-12 N° Lexbase : L5733IS7).

La question se pose de savoir si la soumission de l'action en requalification d'un contrat de location-gérance en bail commercial ne devrait pas être écartée dans deux hypothèses. Celle, tout d'abord, d'une fraude aux droits du preneur. Il pourrait être, en effet, refusé au bailleur de se prévaloir de la prescription qui a couru contre le preneur, à titre de sanction d'une fraude (cf., Cass. civ. 3, 8 avril 2010, n° 08-70.338, FS-P+B N° Lexbase : A5821EU7, qui précise que la fraude commise lors de la conclusion de baux dérogatoires successifs interdit au bailleur de se prévaloir de la renonciation du preneur au droit à la propriété commerciale ; cf. nos obs. De la fraude en matière de bail dérogatoire, Lexbase Hebdo n° 392 du 22 avril 2010 - édition privée N° Lexbase : N9499BN7). Celle, ensuite, où le preneur invoquerait à son profit, et à titre d'exception, l'existence d'un bail commercial pour s'opposer à une demande contraire du bailleur en vertu de l'adage "quae temporalia sunt ad agendum, perpetua sunt ad excipendium" (voir, à propos d'une demande du preneur tendant à voir reconnaître à son profit un bail commercial à l'issue d'un bail dérogatoire : Cass. civ. 3, 1er juin 1994, n° 92-12.186, N° Lexbase : A8034CKR).

  • Sur l'application dans le temps des anciennes dispositions de l'article 2277 du Code civil (Cass. civ. 3, 18 juin 2013, n° 11-28.466, F-D (N° Lexbase : A2044KH8)

Solution

Lorsque la loi réduit la durée d'une prescription, la prescription réduite commence à courir, sauf disposition contraire, du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. En conséquence, la demande de restitution de charges indument réglées par le preneur et relatives à un exercice antérieur à plus de cinq ans à compter de la demande de restitution ne sont pas nécessairement prescrites en application de l'ancien article 2277 du Code civil (N° Lexbase : L2564ABL).

Faits

En l'espèce, le propriétaire d'un local commercial donné à bail, après avoir délivré au preneur un commandement visant la clause résolutoire, l'a assigné en résiliation de bail, expulsion et paiement d'une indemnité d'occupation. A titre reconventionnel, le preneur a demandé l'annulation du commandement et la restitution de loyers et charges indûment versés. Les juges du fond ayant jugé cette demande comme prescrite (CA Paris, Pôle 5, 3ème ch., 5 octobre 2011, n° 09/24741 N° Lexbase : A1963H7T), le preneur s'est pourvu en cassation.

Observations

L'article 2277 du Code civil (N° Lexbase : L2564ABL), avant sa modification par la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005, de programmation pour la cohésion sociale N° Lexbase : L6384G49), disposait que : "se prescrivent par cinq ans les actions en paiement :
Des salaires ;
Des arrérages des rentes perpétuelles et viagères et de ceux des pensions alimentaires ;
Des loyers et des fermages ;
Des intérêts des sommes prêtées,
et généralement de tout ce qui est payable par année ou à des termes périodiques plus courts
".

La Cour de cassation avait précisé que "si l'action en paiement de charges locatives, accessoires aux loyers, se prescrit par cinq ans, l'action en répétition des sommes indûment versées au titre de ces charges, qui relève du régime spécifique des quasi-contrats, n'est pas soumise à la prescription abrégée de l'article 2277 du Code civil" (Cass. mixte, 12 avril 2002, n° 00-18.529, publié N° Lexbase : A0398AZR).

La loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005, de programmation pour la cohésion sociale, en complétant l'article 2277 du Code civil (N° Lexbase : L5385G7L), a expressément soumis à la prescription quinquennale "les actions en répétition des loyers, des fermages et des charges locatives".

Dans l'arrêt rapporté, la cour d'appel avait considéré que la demande de restitution d'un trop-versé de charges formée le 24 mars 2006 ne pouvait concerner des charges relatives à l'exercice 1999 exigible à compter du 1er janvier 2000 compte tenu d'une prescription.

La Cour de cassation censure cette solution en rappelant que "lorsque la loi réduit la durée d'une prescription, la prescription réduite commence à courir, sauf disposition contraire, du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure" (cf., dans le même sens, Cass. civ. 3, 21 janvier 2009, n° 07-18.533, FS-P+B N° Lexbase : A6380ECB).

La loi du 18 janvier 2005 devant être considérée comme ayant réduit le délai de prescription, dès lors qu'avant son entrée en vigueur, le délai de prescription, tel qu'appréhendé par la jurisprudence, était de droit commun, soit trente ans, le nouveau délai de cinq ans devait courir à compter de l'entrée en vigueur de cette loi sans que la durée total excède trente ans.

En conséquence, même si l'année 1999 était prise en considération, le délai de prescription de l'action relative à la restitution de charges n'aurait dû expirer sous l'empire de la loi ancienne que trente ans plus tard. L'entrée en vigueur de la loi nouvelle a réduit ce délai à cinq ans à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi du 18 janvier 2005, dans la mesure où plus de cinq ans restaient à courir sur la base de l'ancien délai. La demande formée en 2006, interruptive de prescription, pouvait donc valablement concerner des charges antérieures de plus de cinq ans à cette demande.

Il doit être rappelé que l'article 2277 du Code civil a été abrogé par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile et que, désormais, le délai de cinq ans est le délai de prescription de droit commun des actions personnelles et mobilières (C. civ., art. 2244 N° Lexbase : L7184IAC).

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