Le Quotidien du 13 janvier 2020 : Agent immobilier

[Brèves] La société Airbnb, non soumise à l’exigence de détention d’une carte professionnelle d’agent immobilier

Réf. : CJUE, 19 décembre 2019, aff. C‑390/18 (N° Lexbase : A4742Z87)

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[Brèves] La société Airbnb, non soumise à l’exigence de détention d’une carte professionnelle d’agent immobilier. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/56028642-breves-la-societe-airbnb-non-soumise-a-lexigence-de-detention-dune-carte-professionnelle-dagent-immo
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par Anne-Lise Lonné-Clément

le 08 Janvier 2020

► La France ne peut exiger d’Airbnb qu’elle dispose d’une carte professionnelle d’agent immobilier, faute d’avoir notifié cette exigence à la Commission conformément à la Directive 2000/31 sur le commerce électronique (N° Lexbase : L8018AUI).

C’est en ce sens que s’est prononcée la Cour de justice de l’Union européenne, dans son arrêt de Grande chambre rendu le 19 décembre 2019 (CJUE, 19 décembre 2019, aff. C‑390/18 N° Lexbase : A4742Z87).

L’affaire s’inscrivait dans le cadre d’une procédure pénale introduite en France, faisant suite à une plainte avec constitution de partie civile déposée contre Airbnb Ireland par l’Association pour un hébergement et un tourisme professionnels (AHTOP), qui soutenait que cette société ne se contentait pas de mettre en relation deux parties grâce à la plate-forme éponyme, mais qu’elle exerçait une activité d’agent immobilier sans détenir de carte professionnelle, violant ainsi la loi «Hoguet», applicable en France aux activités des professionnels de l’immobilier (loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 (N° Lexbase : L7536AIX). Pour sa part, Airbnb Ireland faisait valoir que la Directive 2000/31 s’opposait, en tout état de cause, à cette réglementation.

Le juge d’instruction du tribunal de grande instance de Paris a, alors, décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

1° Les prestations fournies en France par Airbnb Ireland par le canal d’une plateforme électronique exploitée depuis l’Irlande bénéficient-elles de la liberté de prestation de services prévue par l’article 3 de la Directive 2000/31 ?

2° Les règles restrictives relatives à l’exercice de la profession d’agent immobilier en France, édictées par la loi «Hoguet», sont‑elles opposables à Airbnb Ireland ?

♦ S’agissant de la première question relative à la qualification du service d’intermédiation fourni par Airbnb Ireland, la CJUE retient qu’un service d’intermédiation qui a pour objet, au moyen d’une plate-forme électronique, de mettre en relation, contre rémunération, des locataires potentiels avec des loueurs professionnels ou non professionnels proposant des prestations d’hébergement de courte durée, tout en fournissant également un certain nombre de prestations accessoires à ce service d’intermédiation, doit être qualifié de «service de la société de l’information» relevant de la Directive 2000/31 sur le commerce électronique.

La Cour a, en effet, rappelé que, si un service d’intermédiation satisfait aux conditions visées à l’article 1er, paragraphe 1, sous b), de la Directive 2015/1535 (N° Lexbase : L7234KHE), auquel renvoie l’article 2, sous a), de la Directive 2000/31, il constitue en principe un «service de la société de l’information», distinct du service subséquent auquel il se rapporte. Toutefois, il doit en aller autrement s’il apparaît que ce service d’intermédiation fait partie intégrante d’un service global dont l’élément principal est un service relevant d’une autre qualification juridique.

En l’espèce, la Cour a considéré qu’un service d’intermédiation tel que celui fourni par Airbnb Ireland remplissait ces conditions sans que la nature des liens existant entre le service d’intermédiation et la prestation d’hébergement justifie d’écarter la qualification de «service de la société de l’information » dudit service d’intermédiation et, partant, l’application à celui-ci de la Directive 2000/31.

Pour souligner le caractère dissociable que présente un tel service d’intermédiation par rapport aux prestations d’hébergement auxquelles il se rapporte, la Cour a relevé, en premier lieu, que ce service ne tend pas uniquement à la réalisation immédiate de telles prestations mais consiste pour l’essentiel en la fourniture d’un instrument de présentation et de recherche des logements mis à la location, facilitant la conclusion de futurs contrats de location. Dès lors, ce type de service ne saurait être considéré comme constituant le simple accessoire d’un service global d’hébergement.

En deuxième lieu, la Cour a souligné qu’un service d’intermédiation tel que celui fourni par Airbnb Ireland n’est aucunement indispensable à la réalisation de prestations d’hébergement, les locataires et les loueurs disposant de nombreux autres canaux à cet effet, dont certains existent de longue date.

En troisième lieu, la Cour a relevé qu’aucun élément du dossier n’indiquait qu’Airbnb fixerait ou plafonnerait le montant des loyers réclamés par les loueurs ayant recours à sa plateforme.

La Cour a encore précisé que les autres prestations proposées par Airbnb Ireland ne permettent pas de remettre en cause ce constat, ces diverses prestations étant simplement accessoires au service d’intermédiation fourni par cette société. En outre, elle a indiqué que, ni ce service d’intermédiation ni les prestations accessoires proposés par Airbnb Ireland ne permettent d’établir l’existence d’une influence décisive exercée par cette société sur les services d’hébergement auxquels se rapporte son activité, s’agissant tant de la détermination des prix des loyers réclamés que de la sélection des loueurs ou des logements mis en location sur sa plate-forme.

♦ Concernant la seconde question, de savoir si la réglementation de la loi «Hoguet» est opposable à Airbnb Ireland, la Cour européenne répond par la négative, en considérant qu’un particulier peut s’opposer à ce que lui soient appliquées, dans le cadre d’une procédure pénale avec constitution de partie civile, des mesures d’un Etat membre restreignant la libre prestation des services de la société de l’information, qu’il fournit à partir d’un autre Etat membre, lorsque lesdites mesures n’ont pas été notifiées conformément à l’article 3, paragraphe 4, sous b), second tiret, de la même Directive

La Cour a relevé que le fait que ladite loi soit antérieure à l’entrée en vigueur de la Directive 2000/31 ne saurait avoir eu pour conséquence de libérer la France de son obligation de notification. Elle a, ensuite, considéré que ladite obligation, qui constitue une exigence procédurale de nature substantielle, doit se voir reconnaître un effet direct. Elle en a déduit que la méconnaissance, par un Etat membre, de son obligation de notification d’une telle mesure peut être invoquée par un particulier dans le cadre non seulement de poursuites pénales dirigées contre lui, mais également d’une demande indemnitaire formée par un autre particulier s’étant constitué partie civile.

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