La lettre juridique n°457 du 13 octobre 2011 : Fiscalité du patrimoine

[Chronique] Chronique de fiscalité du patrimoine - Octobre 2011

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par Frédéric Subra, avocat associé et Mathieu Le Tacon, avocat of counsel au sein du cabinet Delsol Avocats

le 21 Octobre 2014

Lexbase Hebdo - édition fiscale vous propose, cette semaine, de retrouver la chronique d'actualité en fiscalité du patrimoine réalisée par Frédéric Subra, avocat associé et Mathieu Le Tacon, avocat of counsel au sein du cabinet Delsol Avocats. En premier lieu, nos auteurs analysent une décision du Conseil constitutionnel qui déclare contraire à la Constitution l'article 2 de la loi du 14 juillet 1819, relative à l'abolition du droit d'aubaine et de détraction. Cet article institue le droit de prélèvement dans les successions au profit d'un héritier français. La censure du juge constitutionnel porte sur le caractère discriminatoire de cette disposition qui réserve aux seuls français le bénéfice de ce régime, en excluant les résidents de France étrangers (Cons. const., décision n° 2011-159 QPC du 5 août 2011). Ensuite, est étudiée une décision du Conseil d'Etat qui invalide la méthode de calcul simplifiée retenue par l'administration fiscale pour déterminer le crédit d'impôt auquel a droit un contribuable français percevant des revenus d'origine allemande. En effet, cette méthode simplifiée a pour effet de calculer un crédit d'impôt légèrement supérieur à ce que la méthode légale prévoit (CE 8° et 3° s-s-r., 26 juillet 2011, n° 308679, publié au recueil Lebon). Enfin, une décision rendue par le Conseil d'Etat et relative à la validation de l'article 164 C du CGI portant sur l'imposition forfaitaire que doivent supporter les personnes non résidentes de France sur l'immeuble qu'elles détiennent en France est traitée. Ce dispositif ancien est entré en vigueur avant que le droit communautaire n'impose aux Etats membres le respect de la libre circulation des capitaux. Dès lors, il n'entre pas dans ses prévisions et ne peut être censuré sur cette base (CE 9° et 10° s-s-r., 28 juillet 2011, n° 322672, publié au recueil Lebon).
  • Quand le Conseil constitutionnel remonte le temps : le droit de prélèvement dans les successions au profit d'un héritier français est contraire à la Constitution (Cons. const., décision n° 2011-159 QPC du 5 août 2011 N° Lexbase : A9239HW4)

La question prioritaire de constitutionnalité peut jouer comme une machine à remonter le temps et conduire le Conseil constitutionnel à apprécier la constitutionnalité de dispositions fort anciennes.

La décision n° 2011-159 QPC du 5 août 2011 en est la parfaite illustration.

A l'origine, une disposition du droit des successions, adoptée il y a près de 200 ans : l'article 2 de la loi du 14 juillet 1819, relative à l'abolition du droit d'aubaine et de détraction, qui a institué un droit de prélèvement dans la succession au profit d'un héritier français, en même temps qu'elle abrogeait le droit d'aubaine et de détraction (1).

L'objet de la loi du 14 juillet 1819 était de permettre aux étrangers de transmettre et de recevoir, dans le cadre d'une succession, de la même manière que les français, quand bien même l'Etat dont l'étranger était ressortissant n'assurait pas la réciproque aux défunts ou aux héritiers français (i.e. : absence de condition liée à une réciprocité diplomatique).

Toutefois, afin de préserver les héritiers français qui pourraient se voir restreindre -du fait de l'application de la loi étrangère- dans les droits qui leur sont garantis par le droit successoral français, l'article 2 de la loi du 14 juillet 1819 disposait que, "dans le cas de partage d'une même succession entre des cohéritiers étrangers et français, ceux-ci prélèveront sur les biens situés en France une portion égale à la valeur des biens situés en pays étranger dont ils seraient exclus, à quelque titre que ce soit, en vertu des lois et coutumes locales".

Précisé par la jurisprudence civile, l'exercice du droit de prélèvement est -tel que toujours en vigueur de nos jours- subordonné à la réunion de quatre conditions :
- premièrement, il est attaché à la qualité de français, celle-ci s'appréciant au jour de l'ouverture de la succession (Cass., chambre des requêtes, 10 mai 1937) ;
- deuxièmement, le cohéritier français doit avoir été exclu de tout ou partie de la succession par la loi successorale étrangère pour pouvoir exercer le prélèvement ;
- troisièmement, le cohéritier français défavorisé par la loi étrangère doit venir à la succession d'après la loi française, qu'il soit conservatoire ou non. En revanche, il ne peut bénéficier du droit de prélèvement s'il intervient à la succession comme légataire, ou par le jeu de la loi étrangère (en ce sens Cass. civ. 1, 7 décembre 2005, n° 02-15.418, FS-P+B+I+R N° Lexbase : A9087DL7) ;
- quatrièmement, le droit de prélèvement peut jouer quand bien même il n'y aurait que des cohéritiers français à la succession (Cour de cassation, chambre civile, 27 avril 1868, n° 80).

C'est cette disposition qui était portée à la censure des juges de la rue de Montpensier aux motifs d'une violation du principe d'égalité prévu à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen (N° Lexbase : L1370A9M) et du droit de propriété garanti par l'article 17 de la même Déclaration (N° Lexbase : L1364A9E).

Le premier motif a suffi au Conseil constitutionnel pour censurer la disposition contestée.

De manière constante, le Conseil constitutionnel juge que "le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit" (voir notamment Cons. const., décision n° 97-388 DC du 23 mars 1997 N° Lexbase : A8440ACL).

Appliquant ce considérant de principe, les juges de la rue de Montpensier ont censuré à plusieurs reprises des dispositifs reposant sur une différence de traitement entre nationaux et étrangers, que ce soit le régime de cristallisation des pensions militaires (Cons. const., décision n° 2010-I QPC du 28 mai 2010 N° Lexbase : A6283EXY), les règles d'élection pour la désignation de représentants du personnel (Cons. const., décision n° 2011-128 QPC du 6 mai 2011 N° Lexbase : A7887HPS) ou l'attribution de la carte de combattant (Cons. const., décision n° 2010-18 QPC du 23 juillet 2010 N° Lexbase : A9195E4C).

La décision ici considérée fournit une nouvelle illustration de ce principe : dès lors que l'article 2 de la loi du 14 juillet 1819 avait pour objet de protéger les droits des héritiers au regard du droit français des successions, elle ne pouvait réserver son application aux seuls cohéritiers français sans méconnaître le principe d'égalité. Celui-ci impose, en effet, qu'héritiers français et étrangers accueillant une succession soumise au droit français, et aux impôts français, sans que le droit étranger ne privilégie les seconds, puissent bénéficier des mêmes règles. Autrement dit, dans une situation identique, l'ensemble des cohéritiers, quelle que soit leur nationalité, devaient pouvoir bénéficier du prélèvement institué par l'article 2 de la loi du 14 juillet 1819. Tel n'étant pas le cas, la sanction pour inconstitutionnalité était inévitable.

Auparavant, le Conseil constitutionnel apporte une précision intéressante : une règle de conflit de loi fondée sur un critère de nationalité ne méconnaît pas le principe d'égalité devant la loi. Cette solution doit être saluée : il est en effet de l'objet même d'une règle de conflit de lois adoptée par un Etat que de fixer les règles applicables à ses ressortissants ou à son territoire. Juger le contraire reviendrait à priver le législateur de toute compétence pour fixer les règles de droit international qui préservent l'application de la loi française. Fort heureusement, le Conseil constitutionnel défend ici la souveraineté de notre législateur tout en assurant pour l'avenir l'égalité entre cohéritiers étrangers et français venant à une succession soumise au droit et à la fiscalité français.

  • Le Conseil d'Etat invalide la méthode de calcul simplifiée retenue par l'administration fiscale pour déterminer le crédit d'impôt auquel a droit un contribuable français percevant des revenus d'origine allemande (CE 8° et 3° s-s-r., 26 juillet 2011, n° 308679, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A8254HWM)

Par son arrêt n° 308679 du 26 juillet 2011, le Conseil d'Etat a rendu une importante décision relative aux modalités de calcul du crédit d'impôt imputable sur l'impôt français pour éviter la double imposition des revenus en application des conventions internationales.

Cette affaire, rendue à propos de l'interprétation des dispositions de la Convention franco-allemande (Convention France-Allemagne, signée à Paris le 21 juillet 1959 N° Lexbase : L6660BH7), revêt en réalité une portée plus large en ce qu'elle devrait logiquement s'appliquer à l'ensemble des autres conventions fiscales conclues par la France qui prévoient une élimination de la double imposition pour les résidents de France par l'octroi d'un crédit d'impôt égal au montant de l'impôt français calculé à raison du revenu de source étrangère.

Au cas particulier, l'administration fiscale avait formé un pourvoi en cassation à l'encontre de deux arrêts identiques de la cour administrative d'appel de Nancy (CAA Nancy, 2ème ch., 28 juin 2007, n° 05NC00771, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A2488DXG), qui avaient confirmé deux jugements rendus par le tribunal administratif de Nancy ayant prononcé la réduction des cotisations d'impôt sur le revenu 1999 et 2000 d'un couple de résidents français dont l'époux percevait des salaires et des bénéfices industriels et commerciaux d'origine allemande.

Le litige portait, en l'espèce, sur les modalités de calcul du crédit d'impôt français afférent à ces revenus de source allemande, et plus précisément encore sur les modalités de calcul des revenus nets de source allemande.

Rappelons, en effet, qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 20 de la Convention fiscale franco-allemande du 21 juillet 1959, modifiée par les avenants du 9 juin 1969 et 28 septembre 1989, la double imposition des résidents de France percevant des revenus de source allemande et qui y sont imposables en application des dispositions de la Convention est évitée par l'octroi d'un crédit d'impôt égal au montant de l'impôt français correspondant à ces revenus.

Cette méthode dite "de l'imputation" a, tout d'abord, été commentée par l'instruction administrative du 19 mars 1993 (BOI 14 B-2-93 N° Lexbase : X6126ACU), commentant les dispositions de l'avenant à la Convention Franco-allemande signé le 28 septembre 1989, qui définit au numéro 63 la notion "d'impôt français correspondant à ces revenus" utilisée au paragraphe 2 de l'article 20 de la Convention comme suit :

"Le 'montant de l'impôt français correspondant à ces revenus' désigne :
-... lorsque l'impôt dû à raison de ces revenus est calculé par application d'un barème progressif, le produit du montant des revenus nets considérés par le taux résultant du rapport entre l'impôt effectivement dû à raison du revenu net global imposable selon la législation française et le montant de ce revenu net global
.

Dans une instruction complémentaire du 23 avril 1999 (BOI 14 B-2-99 N° Lexbase : X9813AIB), l'administration avait apporté les précisions suivantes pour tenir compte de "difficultés d'interprétation pour la prise en compte des charges déductibles du revenu global" :
"les revenus nets catégoriels qui proviennent d'Allemagne et qui, selon la Convention, sont également imposables en France lorsqu'ils reviennent à un résident de France, contribuent aux charges déductibles du revenu global comme tous les autres revenus du foyer en proportion des revenus nets considérés par rapport à l'ensemble du revenu brut global de ce foyer".

Il conviendrait donc en principe d'imputer sur le revenu net catégoriel de source allemande considéré retenu au numérateur de ce rapport une quote-part de ces charges déterminée comme suit :
Revenu net catégoriel - (charges du revenu global x revenu net catégoriel de source allemande sur revenu brut global)

Compte tenu de la complexité de ce mode de calcul, il convient, à titre de règle pratique, de faire abstraction des charges du revenu global à la fois au numérateur et au dénominateur du rapport utilisé pour déterminer le crédit d'impôt égal au montant de l'impôt français et, par conséquent, de retenir le revenu brut global au dénominateur dudit rapport conformément à l'exemple de calcul qui figure aux numéros 70 à 73 de l'instruction du 19 mars 1993 déjà citée".

Dans sa décision rendue le 26 juillet 2011, le Conseil d'Etat a, tout d'abord, rappelé que, pour calculer le montant des revenus nets de source allemande conformément aux dispositions de l'article 13 du CGI (N° Lexbase : L1050HLH), une part des charges déductibles du revenu global doit être imputée sur ces revenus, à proportion de leur part dans le revenu global avant déduction des charges.

De façon tout à fait rigoureuse, la Haute juridiction a jugé qu'en conséquence la cour administrative d'appel de Nancy avait commis une erreur de droit en jugeant que le crédit d'impôt imputable sur l'impôt français devait être fixé à un montant correspondant au produit du montant des revenus nets de source allemande par le rapport existant entre, d'une part, l'impôt qui serait dû à raison du revenu net global imposable selon la législation française et, d'autre part, le montant de ce revenu net global, sans mentionner que le montant des revenus de source allemande devait être diminué d'une part des charges déductibles du revenu global calculée au prorata de la part de ces revenus dans le revenu brut global.

Statuant ensuite au fond, le Conseil d'Etat a souligné que la méthode simplifiée de calcul explicitée par l'instruction précitée du 23 avril 1999 (et appliquée dans l'exemple de calcul figurant aux paragraphes 70 à 73 de l'instruction précitée du 19 mars 1993) aboutissait à un crédit d'impôt légèrement supérieur à celui résultant de la méthode de calcul ci-dessus rappelée.

Dès lors, les Hauts magistrats ont considéré que les jugements rendus par le tribunal administratif de Nancy devaient être annulés et les contribuables concernés rétablis aux rôles de l'impôt sur le revenu 1999 et 2000.

Il résulte ainsi de cette jurisprudence que la méthode simplifiée de calcul du crédit d'impôt prévue par la doctrine administrative est écartée par le Conseil d'Etat et l'instruction correspondante pourrait, dans ces conditions, être rapportée par l'administration fiscale.

Rappelons que cette solution devrait être applicable à l'ensemble des autres conventions fiscales conclues par la France prévoyant une élimination de la double imposition pour les résidents de France par l'octroi d'un crédit d'impôt égal au montant de l'impôt français calculé à raison du revenu de source étrangère.

Selon l'instruction précitée du 23 avril 1999, il s'agirait des conventions conclues avec les pays suivants : Afrique du Sud (Convention France - Afrique du Sud signée à Paris le 8 novembre 1993 N° Lexbase : L6657BHZ), Autriche (Convention France - Autriche signée à Vienne le 26 mars 1993 N° Lexbase : L6665BHC), Bahreïn (Convention France - Bahrein signée à Manama le 10 mai 1993 N° Lexbase : L5147IED), Bolivie (Convention France - Bolivie signée à La Paz le 15 décembre 1994 N° Lexbase : L6671BHK), Bulgarie (Convention France - Bulgarie signée à Sofia le 14 mars 1987 N° Lexbase : L6673BHM), Canada (Convention France - Canada signée à Paris le 2 mai 1975 N° Lexbase : L6675BHP), Congo (Convention France - Congo signée à Brazzaville le 27 novembre 1987 N° Lexbase : L6680BHU), Corée du Sud (Convention France - Corée signée à Paris le 19 juin 1979 N° Lexbase : L6681BHW), Côte d'Ivoire (Convention France - Côte d'Ivoire signée à Abidjan le 6 avril 1966 N° Lexbase : L6682BHX), Emirats Arabes Unis (Convention France - Emirats Arabes Unis signée à Abou Dhabi le 19 juillet 1989 N° Lexbase : L6686BH4), Espagne (Convention France - Espagne signée à Madrid le 10 ocotbre 1995 N° Lexbase : L6689BH9), Etats-Unis (Convention France - Etats-Unis signée à Paris le 31 août 1994 N° Lexbase : L5151IEI), Israël (Convention France - Israël signée à Jérusalem le 31 juillet 1995 N° Lexbase : L6705BHS), Japon (Convention France - Japon signée à Paris le 3 mars 1995 N° Lexbase : L6709BHX), Koweït (Convention France - Koweït signée à Koweït le 7 février 1982 N° Lexbase : L6712BH3), Inde (Convention France - Inde signée à Paris le 29 septembre 1992 N° Lexbase : L5152IEK), Islande (Convention France - Islande signée à Reykjavík le 29 août 1990 N° Lexbase : L6704BHR), Italie (Convention France - Italie signée à Venise le 5 octobre 1989 N° Lexbase : L6706BHT), Malte (Convention France - Malte signée à La Valette le 25 juillet 1977 N° Lexbase : L6721BHE), Mexique (Convention France - Mexique signée à Mexico le 7 novembre 1991 N° Lexbase : L6724BHI), Nigeria (Convention France - Nigeria signée à Paris le 27 février 1990 N° Lexbase : L5154IEM), Norvège (Convention France - Norvège signée à Paris le 19 décembre 1980 N° Lexbase : L6731BHR), Oman (Convention France - Oman signée à Paris le 1er juin 1989 N° Lexbase : L5156IEP), Pakistan (Convention France - Pakistan signée à Paris le 15 juin 1994 N° Lexbase : L6734BHU), Qatar, Sénégal (Convention France - Sénégal signée à Paris le 29 mars 1974 N° Lexbase : L6759BHS), Suède (Convention France - Suède signée à Stockholm le 8 juin 1994 N° Lexbase : L6758BHR), Suisse (Convention France - Suisse signée à Paris le 9 septembre 1966 N° Lexbase : L6752BHK), Venezuela (Convention France - Vénézuela signée à Caracas le 7 mai 1992 N° Lexbase : L6767BH4), Viêt-nam (Convention France - Vietnam signée à Hanoi le 10 février 1993 N° Lexbase : L6766BH3) et Zimbabwe (Convention France - Zimbabwe signée à Paris le 15 décembre 1993 N° Lexbase : L6769BH8).

  • L'article 164 C du CGI n'entre pas dans les dispositions communautaires relatives à la libre circulation des capitaux, le juge n'a donc pas à rechercher s'il instaure une discrimination fondée sur la nationalité (CE 9° et 10° s-s-r., 28 juillet 2011, n° 322672, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A8292HWZ)

L'article 164 C du CGI (N° Lexbase : L2839HLQ) pose le principe d'une imposition forfaitaire à l'impôt sur le revenu des non résidents français qui disposent en France d'une ou plusieurs habitations.

Cette imposition forfaitaire est susceptible de s'appliquer lorsque l'intéressé ne dispose pas de revenus de source française ou lorsque ses revenus de source française sont inférieurs à la base d'imposition forfaitaire.

En pratique toutefois, la portée effective de ce dispositif est réduite du fait des très importantes exceptions qu'il comporte puisque, notamment, y échappent les personnes domiciliées dans un des nombreux Etats ou territoires ayant conclu avec la France une convention relative aux doubles impositions.

Dans ce cadre, rappelons que la particularité de la Convention liant la France et Monaco depuis le 18 mai 1963 (Convention France - Monaco, signée à Paris le 18 mai 1963 N° Lexbase : L6726BHL) est de pas avoir pour objet d'éviter les doubles impositions entre les deux pays mais de régler des problèmes de voisinage liés notamment à la différence des régimes fiscaux, génératrice de distorsions dans les domaines économique et financier.

Il en résulte que les personnes domiciliées à Monaco disposant d'une ou plusieurs habitations en France sont susceptibles de se voir appliquer les dispositions de l'article 164 C du CGI.

Tel était le cas, dans l'affaire ayant donné lieu à la décision commentée d'un couple germano-libanais qui s'était vu notifier un redressement d'impôt sur le revenu français à raison de la disposition d'une habitation sur la commune de Vallauris (Alpes-maritimes).

Ayant contesté ce redressement devant les juridictions administratives, la cour administrative d'appel de Marseille avait, dans une décision du 30 septembre 2008 (CAA Marseille, 4ème ch., 30 septembre 2008, n° 06MA00613, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A0261EBB), annulé le jugement du tribunal administratif de Nice qui avait, pour sa part, confirmé lesdits redressements.

La cour administrative d'appel avait, en effet, considéré que l'article 164 C était contraire au principe de liberté de circulation des capitaux, initialement posé par le paragraphe 1 de l'article 73 B du Traité instituant la Communauté européenne et aujourd'hui codifié à l'article 63 du Traité de fonctionnement de l'Union européenne (N° Lexbase : L2713IP8).

Le Conseil d'Etat, dans son arrêt précité du 27 juillet 2011, casse la décision rendue par la cour administrative d'appel de Marseille en rappelant que le principe communautaire de liberté de circulation des capitaux ne porte pas atteinte à l'application, aux pays tiers, des restrictions existant le 31 décembre 1993 en vertu du droit national ou du droit communautaire en ce qui concerne les mouvements de capitaux à destination ou en provenance de pays tiers, lorsqu'ils impliquent des investissements directs, y compris les investissements immobiliers.

Au cas particulier, et ainsi que le relève la Haute juridiction, les dispositions de l'article 164 C du CGI font partie de l'ordre juridique français de manière ininterrompue depuis leur création par l'article 7 de la loi du 29 décembre 1976, modifiant les règles de territorialité et les conditions d'imposition des français de l'étranger ainsi que des autres personnes non domiciliées en France (loi n° 76-1234 du 29 décembre 1976 N° Lexbase : L8856IEQ).

L'affaire a donc été renvoyée devant la cour administrative d'appel de Marseille pour y être à nouveau jugée.


(1) Le droit d'aubaine était un privilège du roi de France qui pouvait hériter de tous les biens d'un étranger résidant en France. Le droit de détraction accordait au monarque le pouvoir de distraire une partie de la succession qu'il autorisait à un étranger de recueillir.

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