Le Quotidien du 18 octobre 2019 : Pénal

[Brèves] Diffamation d’un survivant de l’Holocauste : condamnation de l’Autriche pour violation du droit au respect de la vie privée

Réf. : CEDH, 10 octobre 2019, Req. 4782/18, Lewit c/ Autriche (disponible uniquement en anglais)

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N0770BY8

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[Brèves] Diffamation d’un survivant de l’Holocauste : condamnation de l’Autriche pour violation du droit au respect de la vie privée. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/54113470-breves-diffamation-dun-survivant-de-lholocauste-condamnation-de-lautriche-pour-violation-du-droit-au
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par June Perot

le 16 Octobre 2019

► L’absence de prise en compte dans le procès, de la question centrale portant sur le fait de savoir si un survivant d’un camp de concentration a été diffamé par un article, traduit une défaillance de la part des tribunaux autrichiens dans la protection des droits du requérants ;

► la Cour en conclut que les juridictions internes n’ont jamais réellement analysé ce qui était au cœur de l’action en diffamation formée par le requérant parce qu’elles n’ont pas minutieusement examiné la question de la qualité pour agir et la question de savoir si les propos en cause avaient la même portée ou une portée distincte au regard de l’article litigieux ; les tribunaux n’ont donc pas minutieusement examiné le problème qui avait porté atteinte.

Telle est la position adoptée par la Cour européenne des droits de l’Homme dans un arrêt de chambre rendu le 10 octobre 2019 (CEDH, 10 octobre 2019, Req. 4782/18, Lewit c/ Autriche (disponible uniquement en anglais).

Résumé des faits. Les faits de l’espèce concernaient un ressortissant autrichien, dernier survivant de l’Holocauste âgé de 96 ans, qui se plaignait d’avoir été diffamé par un périodique de droite et de ce que les juridictions internes n’aient pas protégé son droit à sa réputation. Le périodique en question avait publié un article dans lequel les personnes libérées du camp de concentration de Mauthausen étaient qualifiées de «meurtriers en masse», de «criminels» et de «fléaux». Une enquête pénale avait été ouverte visant l’auteur de l’article, classée sans suite. L’auteur de l'article avait, par la suite, réitéré ses propos. Le requérant et neuf autres survivants qui avaient tous été emprisonnés dans des camps de concentration et libérés en 1945, ont formé une action fondée sur la loi relative aux médias (Mediengesetz) contre le périodique et l’auteur des propos. Ces derniers ont été déboutés au motif que le nombre de personnes libérées du camp de Mauthausen (environ 20 000) était si important que les demandeurs ne pouvaient pas être individuellement touchés par les propos tenus dans l’article. Les demandeurs n’avaient donc, selon le tribunal, pas qualité pour agir. En cause d’appel, les demandeurs soutenaient qu’ils étaient au contraire reconnaissables, d’abord parce que seule une poignée d’anciens prisonniers de Mauthausen étaient encore en vie, et ensuite parce qu’ils étaient connus comme étant des survivants de l’Holocauste militants. Pour autant, la cour d’appel a rejeté l’appel. Le requérant a saisi la CEDH.

Violation de l’article 8 de la CESDH. Rappelant sa jurisprudence selon laquelle la vie privée de chaque membre d’un groupe peut être touchée par des stéréotypes négatifs ou des propos diffamatoires (CEDH, 15 mars 2012, Req. 4149/04, Aksu c/ Turquie N° Lexbase : A6792IEB), la Cour constate tout d’abord que le requérant et les autres anciens prisonniers de Mauthausen, en tant que survivants de l’Holocauste, constituent un groupe social. Elle estime donc que, si l’intéressé n’était pas désigné nommément dans l’article, pour autant, l’affaire relève de sa vie privée et l’article 8 de la Convention (N° Lexbase : L1372A9P) est applicable. La Cour rappelle que l’article 8 impose de ménager un juste équilibre entre des intérêts en conflit : ceux de l’individu et ceux de la société en général. Or, les juridictions internes ne se sont même pas livrées à un tel exercice dans le procès. Globalement, le requérant a été lésé dans son droit à la protection de sa vie privée parce que les tribunaux n’avaient pas statué adéquatement sur son action en diffamation.

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