La lettre juridique n°418 du 25 novembre 2010 : Contrats administratifs

[Doctrine] Chronique de droit interne des contrats publics - Novembre 2010

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par François Brenet, Professeur de droit public à l'Université Paris VIII Vincennes Saint-Denis

le 20 Octobre 2011

Lexbase Hebdo - édition publique vous propose, cette semaine, de retrouver la chronique d'actualité de droit interne des contrats publics, rédigée par François Brenet, Professeur de droit public à l'Université Paris VIII Vincennes Saint-Denis et Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition publique. Sera étudié, tout d'abord, l'arrêt par lequel le Conseil d'Etat écarte une loi de validation de contrats irrégulièrement conclus au motif qu'elle n'était pas justifiée par un impérieux motif d'intérêt général (CE Contentieux, 10 novembre 2010, n° 314449, publié au recueil Lebon). Dans la deuxième décision commentée, la Haute juridiction énonce que la notification du référé précontractuel au pouvoir adjudicateur n'est pas prescrite à peine d'irrecevabilité (CE 2° et 7° s-s-r., 10 novembre 2010, n° 341132, mentionné dans les tables du recueil Lebon). Enfin, l'arrêt "France Agrimer" (CE 2° et 7° s-s-r., 10 novembre 2010, n° 340944, mentionné dans les tables du recueil Lebon) précise les conditions de l'articulation entre référé précontractuel et référé contractuel.
  • Inconventionnalité de la validation législative d'une délégation de service public : l'impérieux motif d'intérêt général doit être examiné en fonction des circonstances de l'affaire (CE Contentieux, 10 novembre 2010, n° 314449, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A8898GGN)

Par l'arrêt "Commune de Palavas-les-Flots, Commune de Lattes" du 10 novembre 2010, la Section du contentieux du Conseil d'Etat affirme sa volonté d'exercer un contrôle très serré sur les lois de validation intervenant en matière contractuelle. Dans la présente espèce, l'article 101-VII de la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006, sur l'eau et les milieux aquatiques (N° Lexbase : L9269HTH), avait validé rétroactivement les contrats conclus par les communes et leurs groupements avant le 10 juin 1996 pour la gestion des services publics d'eau et d'assainissement, dans la mesure où leur irrégularité résulterait de l'absence de caractère exécutoire, à la date de conclusion, de la délibération autorisant leur signature. La date retenue par le législateur ne devait rien au hasard, puisqu'elle correspondait à la date de lecture de l'avis contentieux "Préfet de la Côte-d'Or" (1) par lequel le Conseil d'Etat avait précisément affirmé que "l'absence de transmission de la délibération autorisant le maire à signer un contrat avant la date à laquelle le maire procède à sa conclusion entraîne l'illégalité dudit contrat ou, s'agissant d'un contrat privé, de la décision de signer le contrat" et que "les décisions de les signer ne peuvent être régularisés ultérieurement par la seule transmission au préfet de la délibération du conseil municipal".

Le contrat à l'origine de l'affaire était un contrat d'affermage du service public de la distribution d'eau et avait été conclu en violation des règles posées par la jurisprudence "Préfet de la Côte-d'Or". Par deux jugements du 18 février 2005, le tribunal administratif de Montpellier avait tiré toutes les conséquences de cette illégalité en déclarant le contrat nul et en rejetant les demandes indemnitaires formulées par le délégataire de service public, tant sur le terrain contractuel que quasi-contractuel. Mais l'intervention en cours d'instance de l'article 101-VII de la loi du 30 décembre 2006 a alors changé la donne, car cette disposition a procédé à la validation rétroactive de tels contrats. Saisie en appel, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé (2) les deux jugements du tribunal administratif de Montpellier au motif que le contrat litigieux avait bien été validé et ne pouvait donc pas être déclaré nul pour le motif tiré de l'absence de caractère exécutoire, à la date de sa signature, de la délibération autorisant cette signature. Elle a, également, procédé au règlement du litige opposant le délégataire à la personne publique délégante en se plaçant sur le terrain contractuel, ce qui était tout à fait logique si l'on admettait la validation législative du contrat. Saisi d'un recours en cassation, la Section du contentieux du Conseil d'Etat casse l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille au motif que la validation législative n'était pas conforme aux exigences de l'article 6 § 1 de la CESDH (N° Lexbase : L7558AIR).

Comme chacun sait, une validation législative ne peut être admise selon la Cour européenne des droits de l'Homme que si elle est justifiée par d'impérieux motifs d'intérêt général. L'exigence de tels motifs se justifie aisément, car la loi de validation porte une atteinte évidente et manifeste au droit à un procès équitable et l'affaire en cause devant le Conseil d'Etat suffit à le montrer puisque l'intervention de la validation législative modifie totalement le règlement du litige né entre les contractants. Il reste que le Conseil d'Etat exerce, en l'espèce, un contrôle très serré sur le motif d'intérêt général invoqué. Le législateur avait soutenu que la validation rétroactive des contrats concernés par la jurisprudence "Préfet de la Côte-d'Or" se justifiait au regard de la nécessité d'assurer la continuité du service public. Le juge administratif se serait certainement contenté d'un tel motif en d'autres temps, mais il va plus loin en examinant ce motif, non pas objectivement, mais à la lumière des circonstances de l'affaire. Or, celle-ci trouvait sa source dans un différend opposant le délégant à son délégataire et, plus précisément, dans la contestation de la résiliation du contrat d'affermage prononcée par la personne publique le 31 décembre 1999 (3). C'est dire que la validation rétroactive opérée par la loi du 31 décembre 2006 concernait un contrat qui ne liait plus les parties au moment où elle est intervenue. La continuité du service public ne pouvait donc pas, en ce qui concerne le contrat litigieux, tout au moins, être invoquée pour justifier la validation législative.

Pour autant, et c'est le second apport de l'arrêt, l'inconventionnalité de la validation législative ne fait pas obstacle à ce que le litige soit réglé sur le terrain contractuel. C'est là l'une des conséquences du célèbre arrêt "Commune de Béziers" (4). Lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat. Ce n'est seulement dans l'hypothèse où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif, notamment, aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, que le juge doit écarter le contrat et ne peut donc régler le litige sur le terrain contractuel. L'absence de transmission de la délibération autorisant l'exécutif à signer le contrat d'affermage constitue, de toute évidence, un vice affectant les conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement. Mais, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, ce seul vice ne saurait être regardé comme d'une gravité telle que le juge doive écarter le contrat et que le litige qui oppose les parties ne doive pas être tranché sur le terrain contractuel. Réglant l'affaire au fond, le Conseil d'Etat écarte un à un les moyens invoqués par les communes requérantes pour juger, au final, qu'elles doivent verser, en application des clauses du contrat, une indemnité représentative de la fraction non amortie des équipements financés par le fermier, soit, en l'espèce, une indemnité d'un montant de près de 1,3 millions d'euros.

  • Contentieux des contrats administratifs : la notification du référé précontractuel au pouvoir adjudicateur n'est pas prescrite à peine d'irrecevabilité (CE 2° et 7° s-s-r., 10 novembre 2010, n° 341132, mentionné dans les tables du recueil Lebon N° Lexbase : A8948GGI)

Bien que récente (5), l'histoire du référé précontractuel est couronnée de succès. Le nombre de référés précontractuels est, en effet, en croissance régulière et, surtout, il occupe aujourd'hui une place de tout premier plan dans le contentieux des contrats administratifs. Tout d'abord, parce qu'il est la voie de recours privilégiée pour contraindre les personnes publiques à respecter leurs obligations en matière de publicité et de mise en concurrence. Ensuite, parce qu'il a façonné le droit des contrats administratifs dans son ensemble en contribuant à mieux différencier les délégations de service public des marchés publics ou les délégations de service public des conventions domaniales. Plus fondamentalement, le référé précontractuel a fait office de "laboratoire d'essais à l'indispensable réforme des procédures d'urgence intervenue par la loi du 30 juin 2000" (loi n° 2000-597, relative au référé devant les juridictions administratives N° Lexbase : L0703AIU) (6), puis à la création plus récente du référé contractuel par l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009, relative aux procédures de recours applicables aux contrats de la commande publique (N° Lexbase : L1548IE3).

Ce bilan d'ensemble, largement positif, ne doit pas laisser croire que l'institution puis l'utilisation du référé précontractuel se sont faites sans anicroche. Du point de vue de la mécanique même de cette procédure, il est rapidement apparu que les règles initialement fixées devaient être modifiées. L'on se souvient, en effet, que les textes avaient institué, à peine d'irrecevabilité, une procédure de réclamation obligatoire préalable à la saisine du juge du référé de la personne publique tenue au respect d'obligations de publicité et de mise en concurrence. Cette obligation a rapidement été contestée car elle a servi d'avertisseurs aux personnes publiques et à leurs futurs cocontractants qui, pour faire obstacle au référé précontractuel, n'avaient alors qu'à procéder à la signature de leur contrat. De la même façon, la pratique de la course à la signature a été encouragée par la jurisprudence du Conseil d'Etat. Parce que le référé précontractuel ne peut être exercé que jusqu'à la signature du contrat (7), le juge administratif a considéré que la requête en référé précontractuel devenait sans objet si la signature du contrat intervenait en cours d'instance, soit devant le juge du fond, soit devant le juge de cassation (8), et cela sans que l'irrégularité de la signature puisse modifier la situation (9).

Du point de vue de la pratique, on sait, également, que l'accès au juge du référé précontractuel a été très et, certainement trop, largement admis. Contrairement à la lettre et à l'esprit des dispositions textuelles (10) qui commandaient d'en faire un recours subjectif visant à protéger un requérant ayant un intérêt à conclure le contrat et susceptible d'être lésé un manquement à une obligation de publicité et de mise en concurrence, la jurisprudence a progressivement transformé le référé précontractuel en une sorte de recours objectif fait à un contrat.

Les textes et la jurisprudence sont venus corriger ces lacunes et ont puissamment contribué à transformer le référé précontractuel. L'obligation de réclamation préalable a, en effet, été supprimée et la loi du 30 juin 2000 a doté le juge des référés précontractuels du pouvoir d'enjoindre de différer la signature du contrat pour un délai maximum de vingt jours. Le risque de course à la signature a, ainsi, considérablement diminué sans pour autant être totalement anéanti (11). C'est la raison pour laquelle l'ordonnance du 7 mai 2009 et le décret n° 2009-1456 du 27 novembre 2009, relatif aux procédures de recours applicables aux contrats de la commande publique (N° Lexbase : L9773IEP), transposant la Directive (CE) 2007/66 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2007 (N° Lexbase : L7337H37), dite Directive "recours", ont imposé un double délai de suspension. Obligation est faite aux pouvoirs adjudicateurs de respecter un délai d'au moins seize jours (lequel est réduit à onze jours en cas de transmission électronique à l'ensemble des candidats) entre la date d'envoi de la notification de la décision d'attribution du contrat et la date de sa conclusion.

Par ailleurs, la suspension de la signature du contrat est automatique à compter de la saisine du juge des référés précontractuels. Elle n'est plus enfermée dans un délai maximal de vingt jours mais vaut, désormais, jusqu'à notification de la décision juridictionnelle au pouvoir adjudicateur. Enfin, la jurisprudence "Smirgeomes" du 3 octobre 2008 (12) a posé en principe que le juge des référés précontractuels devait "rechercher si l'entreprise qui le saisit se prévaut de manquements qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles de l'avoir lésée ou risquent de la léser, fût-ce de façon indirecte en avantageant une entreprise concurrente". Comme le note Laurent Richer, le juge "introduit un critère d'utilité du recours pour son auteur", et celle-ci est "appréciée soit en fonction de la phase à laquelle est parvenue la procédure de passation, soit en référence à la portée du moyen invoqué".

L'arrêt "Ministre de la Défense" du 10 novembre 2010 s'inscrit donc dans un contexte de renforcement et de resserrement du référé précontractuel. Son apport est double et se situe tant du point de vue de l'application qu'il fait de la jurisprudence "Smirgeomes", que de la précision qu'il apporte en ce qui concerne la portée de l'obligation faite par le décret du 27 novembre 2009 au requérant de notifier son recours au pouvoir adjudicateur.

Sur le premier point, l'arrêt confirme très nettement le critère de l'utilité du recours pour le requérant. En l'espèce, le directeur de l'infrastructure de la défense à Cayenne avait lancé un appel public à la concurrence en vue de la passation d'un marché de rénovation de logements. Il avait alors écarté la candidature de la société X au motif qu'elle avait manqué à certaines de ses obligations dans le cadre de l'exécution d'un précédent marché. Le juge des référés précontractuels du tribunal administratif de Cayenne a, alors, annulé cette décision au motif que le pouvoir adjudicateur ne pouvait pas écarter cette candidature en se fondant sur ce seul motif ; il lui appartenait, au contraire, de procéder à un examen des garanties offertes par cette société postérieurement au marché au cours duquel elle a rencontré des difficultés. Ce raisonnement pouvait se défendre dans une certaine mesure si l'on songe qu'il est assez injuste de continuer à faire peser sur un candidat ses erreurs ou difficultés du passé sans vérifier si sa situation s'est améliorée par la suite. Le Conseil d'Etat le censure, cependant, pour erreur de droit, et cela au nom d'une application rigoureuse mais logique de la jurisprudence "Smirgeomes". La Haute juridiction considère, en effet, qu'il appartenait au juge des référés précontractuels de rechercher si les manquements invoqués étaient susceptibles de léser la société X. Or, tel n'était précisément pas le cas en l'espèce, car la société avait été placée en redressement judiciaire et n'était donc pas recevable à soumissionner à un marché dont l'exécution s'étendait au-delà de la période d'observation admise par le jugement l'autorisant à poursuivre son activité. Parce qu'elle n'était pas recevable à soumissionner, la société n'était donc pas susceptible d'être lésée par l'irrégularité qu'elle avait invoquée devant le juge des référés précontractuels du tribunal administratif de Cayenne.

Le présent arrêt est, également, intéressant en ce qu'il précise la portée de l'obligation désormais faite par l'article R. 551-1 du Code de justice administrative (N° Lexbase : L9813IE8), dans sa rédaction issue du décret du 27 novembre 2009 (lequel a prolongé l'ordonnance du 7 mai 2009), à l'auteur d'un référé précontractuel de notifier son recours au pouvoir adjudicateur. La doctrine avait hésité sur cette question et d'éminents spécialistes avaient cru pouvoir affirmer que cette notification devait sans doute être comprise comme prescrite à peine d'irrecevabilité du référé précontractuel (13). Le juge administratif retient une solution contraire et manifeste, ainsi, son souci de préserver les droits du requérant. C'est, en effet, "dans l'intérêt de l'auteur du référé" que ces dispositions ont été adoptées, plus précisément afin d'éviter que le marché contesté ne soit prématurément signé par le pouvoir adjudicateur resté dans l'ignorance de l'introduction d'un recours. Si le requérant ne notifie pas son recours au pouvoir adjudicateur, c'est en fin de compte qu'il accepte de prendre le risque d'une signature anticipée. Et si ce risque ne se réalise pas, il n'y a donc pas lieu de rejeter son recours comme étant irrecevable.

  • Articulation entre référé précontractuel et référé contractuel : recevabilité du référé contractuel consécutif à un référé précontractuel déclaré irrecevable en raison de la signature du contrat par le pouvoir adjudicateur en violation du délai prévu par l'article 80 du Code des marchés publics (N° Lexbase : L9824IEL) (CE 2° et 7° s-s-r., 10 novembre 2010, n° 340944, mentionné dans les tables du recueil Lebon A8947GGH)

L'arrêt "France Agrimer" constitue, sauf erreur, l'une si ce n'est la première décision du Conseil d'Etat relative au référé contractuel mis en place par l'ordonnance du 7 mai 2009.

Les circonstances de l'affaire méritent d'être rappelées car celle-ci constitue une illustration parfaite des possibilités de combinaison entre le référé précontractuel et le référé contractuel. En l'espèce, un établissement national avait lancé une procédure d'appel d'offres en vue de l'attribution d'un marché public de fournitures de produits alimentaires, marché décomposé en 92 lots. La société X avait présenté une offre et avait été avisée, au cours de la procédure, que le volume de ses offres devait être modifiée pour 8 lots. Elle a alors refusé de modifier ses offres, lesquelles n'ont donc pas été retenues. L'établissement a, alors, commis une erreur en notifiant sa décision à une société homonyme, de sorte que la société X n'a jamais été avisée du rejet des offres qu'elle avait refusé de modifier. Tout juste a-t-elle été informée du fait qu'elle avait été déclarée attributaire d'un autre lot. En l'absence de notification pour les 8 lots, elle a, alors, saisi le juge des référés précontractuels, et c'est au cours de l'instance qu'elle a appris que les 8 lots pour lesquels elle était candidate avaient finalement été attribués. Dans un nouveau mémoire, elle a demandé au juge d'annuler les marchés en cause, demande relevant non plus du référé précontractuel, mais du référé contractuel. Par une ordonnance du 9 juin 2010 (14), le juge des référés du tribunal administratif de Montreuil a rejeté comme irrecevables les conclusions présentées au titre du référé précontractuel mais a fait droit, partiellement, aux conclusions présentées au titre du référé contractuel.

Saisi de cette ordonnance, le Conseil d'Etat apporte les précisions suivantes. Il rappelle, tout d'abord, la règle selon laquelle un demandeur ayant exercé un référé précontractuel ne peut pas, en principe, poursuivre son action en exerçant un référé contractuel. Cette interdiction est, cependant, conditionnée (CJA, art. L. 551-14 N° Lexbase : L1603IE4). Elle ne vaut, en effet, que si le pouvoir adjudicateur (ou l'entité adjudicatrice) a respecté la suspension automatique prévue par l'article L. 551-4 du Code de justice administrative (N° Lexbase : L1601IEZ), à savoir la suspension de la signature du contrat à compter de la saisine du juge des référés précontractuels et jusqu'à la notification de sa décision au pouvoir adjudicateur, et s'est conformé à la décision rendue par le juge des référés précontractuels. Le Conseil d'Etat ajoute une hypothèse supplémentaire à ces deux cas légaux de succession des référés précontractuel et contractuel. Celle-ci concerne la situation dans laquelle le pouvoir adjudicateur signe le contrat sans respecter les délais prévus à l'article 80 du Code des marchés publics (il a, en effet, obligation de respecter un délai de 16 jours entre la notification du rejet de leur offre aux candidats évincés et la signature du marché, ce délai étant réduit à 11 jours en cas de notification par voie électronique) et où le demandeur, dans ces délais, saisit le juge des référés précontractuels et voit ses conclusions rejetées pour irrecevabilité. Dans la présente espèce, la société X était donc en droit d'exercer un référé contractuel après que le référé précontractuel ait été déclaré irrecevable du fait de la signature des marchés publics litigieux par l'établissement national.

François Brenet, Professeur de droit public à l'Université Paris VIII Vincennes Saint-Denis et Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition publique


(1) CE Contentieux, 10 juin 1996, n° 176873 (N° Lexbase : A0022API).
(2) CAA Marseille, 7ème ch., 17 janvier 2008, n° 05MA01089 (N° Lexbase : A4448D7U).
(3) Les clauses du contrat permettaient à la personne publique de dénoncer le contrat à l'issue de la première période contractuelle de dix ans ou à l'issue de la première période de prolongation de cinq ans.
(4) CE Ass., 28 décembre 2009, n° 304802 (N° Lexbase : A0493EQC), AJDA, 2010, p. 142, chron. S.-J. Liéber et D. Botteghi, RFDA, 2010, p. 506, concl. E. Glaser, p. 519, note D. Pouyaud.
(5) Faut-il rappeler que le référé précontractuel nous vient du droit communautaire. Il est le fruit de la transposition en droit interne par les lois n° 92-10 du 4 janvier 1992, relative aux recours en matière de passation de certains contrats et marchés de fournitures et de travaux (N° Lexbase : L6995GTA) et n° 93-1416 du 29 décembre 1993 (N° Lexbase : L8331INU) des Directives (CE) 89/665 du 21 décembre 1989 (N° Lexbase : L9939AUN) (pour les marchés des recours traditionnels) et 92/13 du 25 février 1992 (N° Lexbase : L7561AUL) (pour les secteurs dits exclus, c'est-à-dire les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des télécommunications), dites Directives "recours".
(6) C. Bergeal et F. Lénica, Contentieux des marchés publics, Le Moniteur, 2ème édition, 2010, p. 125.
(7) CE, Section, 3 novembre 1995, n° 157304 (N° Lexbase : A6724AND), Rec. CE, p. 394, RFDA, 1995, p. 1077, concl. C. Chantepy, AJDA, 1995, p. 946, chron. J.-H. Stahl et D. Chauvaux.
(8) CE, Section, 3 novembre 1995, n° 152650 (N° Lexbase : A6671ANE), Rec. CE, p. 145.
(9) CE 2° et 7° s-s-r., 7 mars 2005, n° 270778 (N° Lexbase : A2105DHG), Rec. CE, p. 96, AJDA, 2005, p. 1298, note S. Hul, CJEG, 2005, p. 386, note R. Vandermeeren, D., 2005, p. 2732, note J. Martin, JCP éd. A, 2005, 1202, note F. Linditch, RFDA, 2005, p. 1094, note M.-C. Vincent-Legoux.
(10) CJA, art. L. 551-10 (N° Lexbase : L1610IED).
(11) Pensons à l'hypothèse d'une signature intervenant après le délai de suspension maximal de 20 jours et avant que le juge des référés précontractuels n'ait pu se prononcer sur le fond de l'affaire.
(12) CE, Section, 3 octobre 2008, n° 305420 (N° Lexbase : A5971EAE), Rec. CE, p. 324, concl. B. Dacosta, AJDA, 2008, p. 2161, chron. E. Geffray et S.-J. Liéber, RFDA, 2008, p. 1128, concl. B. Dacosta, note P. Delvolvé.
(13) En ce sens, C. Bergeal et F. Lénica, Contentieux des marchés publics, préc., p. 112.
(14) TA Montreuil, 9 juin 2010, n° 1005246 (N° Lexbase : A8159GHN).

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