La lettre juridique n°978 du 21 mars 2024 : Congés

[Brèves] Congés payés et arrêts maladie : zoom sur l'avis rendu par le Conseil d’État

Réf. : CE, avis, 11 mars 2024, n° 408112 N° Lexbase : A01452WB

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N8780BZ9

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par Lisa Poinsot

le 20 Mars 2024

Le 11 mars, le Conseil d’État a rendu un avis portant sur la mise en conformité des dispositions du Code du travail en matière d’acquisition de congés pendant les périodes d’arrêt maladie.

Contexte juridique. Interrogé par le Gouvernement lors d’une demande d’avis portant sur la mise en conformité des dispositions du Code du travail en matière d’acquisition de congés pendant les périodes d’arrêt maladie, le Conseil d’État s’est penché sur les points suivants :

  • acquisition dans la limite de quatre semaines de congés payés pour les salariés en arrêt maladie d’origine non professionnelle ;
  • acquisition pour le passé dans la limite de quatre semaines de congés payés pour les salariés en arrêt maladie non professionnelle et fixation de cette règle dans la loi ;
  • délai de report des congés payés inférieur à quinze mois ;
  • point de départ du délai de report des congés payés acquis au titre de l’arrêt maladie ;
  • délais de report différents selon que les congés payés ont été acquis avant l’arrêt maladie ou au titre de l’arrêt maladie ;
  • application rétroactive de la durée maximale de report des congés ;
  • possibilité d’extinction par une loi de validation des contentieux de salariés au titre des congés qui auraient dû être générés pour les arrêts maladie passés.

Acquisition de congés payés pendant l’arrêt maladie. Le projet d’amendement prévoit une acquisition différenciée de congés pour les arrêts maladie d’origines professionnelle et non-professionnelle.

Le Conseil d’État considère que cette distinction ne méconnaît pas le principe constitutionnel d’égalité ni le principe de discrimination. Il propose néanmoins une limite d’acquisition de quatre semaines de congés payés pour les salariés en arrêt de travail d’origine non professionnelle.

Limitation de cette acquisition à quatre semaines. Le Conseil d’État propose que le droit aux congés payés soit toutefois limité à quatre semaines (vingt-quatre jours ouvrables) par an, même si un salarié en arrêt maladie pour une année entière aurait pu prétendre à plus. 

Pour le Conseil d’État, cette limitation est conforme au droit de l'Union européenne, qui exige un minimum de quatre semaines de congés payés annuels pour tous les travailleurs.

En pratique, sauf dispositions conventionnelles contraires, le salarié absent en raison d’une maladie d’origine non professionnelle pendant moins de deux mois continuera de ne pas acquérir de congés payés. L’acquisition ne sera rétablie qu’à partir du troisième mois d’arrêt maladie.

Le projet d’amendement ne peut avoir d’effet rétroactif pour les périodes antérieures au 1er décembre 2009.

Report de quinze mois et point de départ du délai de report. Pour le Conseil d’État, la durée de report de quinze mois est suffisamment substantielle. Il n’est pas possible de fixer un délai de report inférieur. Cette durée doit faire l’objet d’une information de la part de l’employeur auprès du salarié à son retour d’arrêt maladie. La date de la délivrance de cette information est la date du point de départ du délai de report des congés payés acquis.

En pratique, pour les congés payés acquis avant l’arrêt maladie ou au cours de l’arrêt maladie, la période de report débute lorsque le salarié est informé de ses droits, sauf pour les longs arrêts maladie (les salariés qui ne sont pas revenus avant le terme de la période de report perdent leurs droits).

Rétroactivité des mesures. La rétroactivité des mesures sera limitée à trois ans.

En pratique, seuls les arrêts maladie survenus depuis 2020 peuvent ouvrir droit à une demande de congés payés supplémentaires, dans la limite de quatre semaines par an. Les périodes d'arrêt maladie antérieures à 2020 ne donneront pas lieu à un recours pour l'acquisition de congés payés supplémentaires.

Prescription et forclusion. Pour éviter les accumulations illimitées de congés lorsque la maladie s’étend sur plusieurs périodes de référence, le Conseil d’État propose l’instauration d’un délai de forclusion de deux ans à compter de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, applicable même en l’absence de démarche d’information de l’employeur pour les actions introduites par les salariés encore en poste.

Sur la question de la possible extinction par une loi de validation des contentieux, le Conseil d’État estime qu’une telle loi sera susceptible de violer les dispositions du droit de l’Union européenne. Néanmoins, plusieurs dispositions législatives pourraient être envisagées, concernant la période du 1er décembre 2009 à la date d’entrée en vigueur de la loi nouvelle, afin de se confirmer au droit de l’Union européenne.

Il est ainsi envisagé d’établir que la prescription soit acquise pour les salariés ayant quitté leur entreprise depuis plus de trois ans.

Conséquences en entreprise :

  • pour le salarié, il s’agit d’une évolution importante assurant ainsi une meilleure protection de ses droits en conformité aux dispositions européennes ;
  • pour l’employeur, il faut adapter les pratiques de gestion des congés payés, mais aussi les coûts pour courir les périodes antérieures et intégrer le changement des règles de calcul pour l’avenir.

Pour aller plus loin :

  • pour un récapitulatif des différentes positions judiciaires, lire L. Poinsot, Congés payés pendant les arrêts maladie : limiter légalement leur acquisition est conforme à la Constitution, Lexbase Social, février 2024, n° 974 N° Lexbase : N8385BZL ;
  • v. infographies, INFO603, Les congés payés, Droit social N° Lexbase : X7382CNQ ; INFO769, Calculer les jours de congés payés acquis N° Lexbase : X3897CQE ; INFO770, Calculer les jours de congés payés acquis en cas de présence incomplète N° Lexbase : X3901CQK ; INFO771, Calculer les jours de congés payés acquis : tableau d'équivalence N° Lexbase : X3900CQI, Ressources humaines (RH) 
  • v. formulaires, MDS0049, Lettre de l'employeur refusant une demande de congés payés N° Lexbase : X3221AKI ; MDS0050, Lettre de demande de report de congés payés prévu par accord collectif  N° Lexbase : X3222AKK ; MDS0051, Demande par le salarié de prise de congés payés anticipés non acquis N° Lexbase : X3223AKL ; MDS0062, Lettre de demande de report de congés payés jusqu'au départ en congé pour création d'entreprise ou sabbatique N° Lexbase : X3234AKY, Droit social ;
  • v. fiche pratique, FP248, Accorder aux salariés leurs congés payés, Droit social - RH  N° Lexbase : X3560CQW ; 
  • lire Ch. Willmann, Acquisition de droits ou exercice des droits à congés payés : des risques judiciaires, en attendant une réforme législative, Lexbase Social, octobre 2023, n° 960 N° Lexbase : N7062BZL ;
  • lire aussi P. Pomerantz et P. Lopes, Congés payés et maladie : quels impacts et quelles solutions à la suite des arrêts du 13 septembre 2023 ?, Lexbase Social, octobre 2023, n°9 60 N° Lexbase : N7070BZU ;
  • v. ÉTUDE : Les congés payés annuels, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E0003ETB ;
  • v. ÉTUDE : L’incidence de la maladie non professionnelle sur le contrat de travail, Les effets de la suspension du contrat pour maladie sur les congés, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E3213ET8.

 

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