La lettre juridique n°960 du 12 octobre 2023 : Procédure pénale/Audience criminelle

[Focus] L’intervention du jury criminel : un principe constitutionnel ?

Lecture: 1 heure, 7 min

N7046BZY

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

[Focus] L’intervention du jury criminel : un principe constitutionnel ?. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/100615805-cite-dans-la-rubrique-b-procedure-penaleaudience-criminelle-b-titre-nbsp-i-lintervention-du-jury-cri
Copier

par Benjamin Fiorini, Maître de conférences en droit privé et sciences criminelles à l’Université Paris 8

le 18 Octobre 2023

Le 20 septembre 2023, la Chambre criminelle, dans des arrêts remarqués, a décidé de transmettre au Conseil constitutionnel quatre questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) que nous avions proposées dans un article publié dans cette même revue. Deux de ces questions visent à remettre en cause les cours criminelles départementales en ce qu’elles violent le « principe d’intervention du jury » mentionné par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 86-213 du 3 septembre 1986.  Le présent article expose un argumentaire enrichi venant en soutien de la thèse d’une constitutionnalisation du jury criminel.


 

Pour tous les défenseurs du jury populaire de cour d’assises, les deux arrêts rendus par la Chambre criminelle de la Cour de cassation le 20 septembre 2023 ont un goût de victoire [1]. En transmettant au Conseil constitutionnel quatre questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) que nous avions proposées dans cette même revue [2], les juges du quai de l’Horloge ont mis les cours criminelles départementales sur la sellette. Le Conseil constitutionnel dispose désormais de trois mois pour statuer sur ces questions.

D’abord, il devra déterminer si les cours criminelles départementales violent le principe constitutionnel d’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun (tel est l’objet des deux premières QPC). Ensuite, il devra vérifier si les règles de vote sur la culpabilité et la peine applicables devant les cours criminelles départementales, moins favorables aux accusés que celles prévalant devant les cours d’assises, sont conformes au principe d’égalité des citoyens devant la loi garanti par l’article 6 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen du 26 août 1789 (tel est l’objet des deux dernières QPC).

Les lignes qui vont suivre se focaliseront uniquement sur les deux premières QPC, qui tendent à conférer au principe d’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun une valeur constitutionnelle.  En effet, nous allons montrer que ce principe remplit toutes les conditions requises pour être qualifié de principe fondamental reconnu par les lois de la République ou PFRLR (Chapitre 1.). Toutefois, si le juge constitutionnel venait à lui refuser ce statut, il devrait vraisemblablement le qualifier de principe à valeur constitutionnelle ou PVC (Chapitre 2.).

Chapitre 1. La thèse de l’intervention du jury comme principe fondamental reconnu par les lois de la République

La Constitution de la Vème République française du 4 octobre 1958 ne fait nullement référence au jury populaire. Contrairement à de nombreux pays européens et extra-européens, la France ne fait donc pas expressément de l’intervention des jurés en matière criminelle un principe constitutionnel. Pour autant, un tel principe pourrait être reconnu par le juge constitutionnel en tant que principe fondamental reconnu par les lois de la République (PFRLR).

Les PFRLR sont évoqués par le Préambule de Constitution du 27 octobre 1946, qui fait partie intégrante du bloc de constitutionnalité. Son premier alinéa dispose que le peuple français « réaffirme solennellement les droits et les libertés de l’Homme et du citoyen consacrés par la Déclaration des droits de 1789 et les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République. »

Depuis 1971, le Conseil constitutionnel (et dans une moindre mesure, le Conseil d’État [3]) utilise cette disposition pour constitutionnaliser certains principes qui, pourtant, ne sont pas clairement mentionnés dans la lettre de la Constitution. Toutefois, la reconnaissance d’un PFRLR est un phénomène rare. En l’état de sa jurisprudence, le Conseil constitutionnel n’en a reconnu que onze  : la liberté d’association (1971) [4] ; le respect des droits de la défense (1976) [5] ; la liberté individuelle (1977) [6] ; la liberté d’enseignement (1977)  [7] ; la liberté de conscience (1977) [8] ; l’indépendance de la juridiction administrative (1980)[9] ; l’indépendance des professeurs des universités (1984) [10] ; la compétence de la juridiction administrative dans les contentieux relatifs à l’annulation ou à la réformation des actes administratifs (1987) [11] ; les attributions conférées à l’autorité judiciaire en matière de protection de la propriété privée immobilière (1989) [12] ; le principe selon lequel, en matière de justice pénale des mineurs, la répression de la criminalité des mineurs doit comporter un élément éducatif (2002) [13] ; certaines dispositions législatives et réglementaires propres aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle (2011) [14]. Onze PFRLR identifiés en plus de cinquante ans de jurisprudence constitutionnelle : autant dire que la consécration d’un nouveau principe serait une innovation majeure !

Comme nous l’avions exposé dans notre précédent article, la seule occurrence, pour le moment, où le Conseil constitutionnel a eu l’occasion de se prononcer sur l’intervention du jury criminel en tant que principe constitutionnel est sa décision n° 86-213 du 3 septembre 1986, portant sur la loi relative à la lutte contre le terrorisme et aux atteintes à la sûreté de l'État N° Lexbase : A8139ACG [15]. Cette loi a institué les cours d'assises spécialement composées en matière de terrorisme, lesquelles comportent exclusivement des magistrats professionnels, à l’instar des cours criminelles départementales. Dans leur saisine, les soixante sénateurs requérants invoquaient le « principe de l'intervention du jury en matière criminelle » pour s'opposer à la création de ces cours d'assises sans jury – sans toutefois qualifier ce principe de PFRLR, précision très importante pour le raisonnement qui va suivre. Le Conseil a répondu à cet argument de la manière suivante :

« 10. Considérant que les infractions criminelles énumérées à l'article 706-16 nouveau ne sont justiciables de la cour d'assises composée selon les termes de l'article 698-6 qu'autant qu'il est établi qu'elles sont en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur ; qu'ainsi, à s'en tenir au seul texte de l'article 706-16 nouveau, l'exception apportée au principe de l'intervention du jury a un caractère limité ; que l'argument invoqué par les auteurs de la saisine manque par suite en fait. » 

Comme l’a relevé en 1996 le Haut comité consultatif sur la procédure de jugement en matière criminelle, il s'ensuit que le Conseil constitutionnel, s'il n'a pas explicitement érigé le principe d'intervention du jury au rang des PFRLR, n’a pas non plus écarté cette hypothèse, réservant cette question pour l’avenir [16]. La lecture du compte-rendu de la séance du Conseil [17]  montre que cette position intermédiaire est le résultat d'un compromis entre celui qui présidait alors l’institution, à savoir l’ancien garde des Sceaux Robert Badinter – selon lequel l'intervention du jury pour juger les crimes de droit commun constitue un « principe constitutionnel et républicain » [18] –, et le doyen Georges Vedel qui soutenait la thèse inverse. 

Or, il apparaît que la reconnaissance de l’intervention en tant que PFRLR, en plus d’être souhaitable pour notre justice et précieuse pour notre démocratie, est juridiquement possible. En effet, d’après la jurisprudence du Conseil constitutionnel, trois conditions cumulatives doivent être réunies pour qu’un principe soit intégré aux PFRLR : la première tient à l’importance et à l’objet du principe (Section I.), la deuxième à sa consécration par un texte républicain antérieur à 1946 (Section II.), la troisième à son application continue (Section III.). Nous allons démontrer que ces trois conditions sont réunies s’agissant de l’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun, ce qui pourrait déboucher sur l’inconstitutionnalité des dispositions fixant la composition des cours criminelles départementales (Section IV.).

Section I. Première condition de reconnaissance d’un PFRLR : une règle « importante » concernant « les droits et libertés fondamentaux », « la souveraineté nationale » ou « l’organisation des pouvoirs publics »

Pour être reconnu en tant que PFRLR, le principe invoqué doit énoncer une règle revêtant une « importance » suffisante [19] concernant « les droits et libertés fondamentaux », « la souveraineté nationale » ou encore « l’organisation des pouvoirs publics » [20]. En bref, il doit s’agir d’un principe qui intéresse la vie de la Nation et qui constitue davantage qu’une simple tradition.

Or, le jury populaire concerne la procédure criminelle de manière générale, puisqu’il influe sur la composition des juridictions chargées de juger les crimes. De ce fait, son intervention intéresse directement les « droits et libertés fondamentaux » et « l’organisation des pouvoirs publics », comme l’exige le Conseil constitutionnel.

En outre, selon une tradition républicaine bien ancrée, le jury, traduction du droit d’être jugé par ses pairs, est considéré à la fois comme une garantie en faveur de l’accusé et comme un bienfait pour les libertés publiques et individuelles. Ces qualités associées au jury furent constamment réaffirmées tout au long de notre histoire républicaine.

Ainsi, le 20 mars 1790, dans une annexe aux travaux de l’Assemblée nationale constituante qui donnèrent naissance au jury criminel français, le député Duport, dont le projet fut retenu, expose que l’institution du jury est « le Palladium de la liberté publique, comme elle l’est de la liberté individuelle, parce que de simples citoyens décident le fait dans chaque affaire » [21]. Le 11 janvier 1791, au cours des mêmes travaux, le député Thouret décrit le jury comme une « création du génie de la liberté, objet du culte politique des peuples libres, palladium de toutes les Constitutions fondées sur la reconnaissance des droits et de la dignité des hommes » [22].

Le 17 juin 1793, lors d’une séance à la Convention, Cambacérès évoque en ces termes la nécessité de garantir le jugement par jury dans la future Constitution de l’an I : « ceux qui ont quelque habitude de notre législation actuelle connaissent la facilité avec laquelle les jurés ont été établis au criminel, et les avantages que la société retire de cette institution salutaire » [23]

Le 23 juin 1795, Boissy d’Anglas, présentant au nom de la commission des Onze le projet qui deviendra la Constitution de l’an III, donne à la Convention nationale les précisions suivantes : « [e]n nous occupant de la justice criminelle, nous n’avons eu garde de porter la moindre atteinte à la sublime institution des jurés, dont la théorie a été si heureusement confirmée par l’application des principes qui en sont à la base […] ; nous l’avons considérée comme le palladium de la liberté, comme un des plus grands bienfaits que la Révolution ait pu procurer aux Français » [24].

Le 28 juillet 1848, après une longue période d’éclipse républicaine, l’Assemblée nationale discute du projet de Constitution qui fondera la IIème République. Le citoyen Leroux dépose alors sur le bureau de l’Assemblée nationale, au nom du comité de la justice et de la législation civile et criminelle, un projet de décret débutant comme  suit : « Après une révolution qui vient d’ébranler les bases de l’organisation sociale, et au moment où toutes nos institutions vont être soumises à un rigoureux examen, le Gouvernement a jugé nécessaire d’appeler d’abord votre attention sur celle du jury, qui est la sauvegarde de l’ordre public et de nos libertés » [25].  Quelques jours plus tard, le 7 août 1848, le citoyen Crémieux invoque « le droit sacré du jury » [26].

Ces prises de paroles, pleines de force et de conviction, montrent qu’en plus d’intéresser des domaines relevant du champ des PFRLR, l’intervention du jury en matière criminelle ne saurait être considérée comme une simple tradition (comme le soutiendra probablement le Gouvernement), mais bien comme la vigoureuse affirmation de valeurs profondément républicaines.

La première condition posée par le juge constitutionnel pour qualifier un principe de PFRLR est donc remplie. La règle prévoyant l’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun pourrait donc être constitutionnalisée, sous réserve que les deux autres conditions soient également remplies.

Section II. Deuxième condition de reconnaissance d’un PFRLR : l’existence d’une base textuelle républicaine antérieure à 1946

Tout PFRLR doit avoir une base textuelle prenant sa source dans une ou plusieurs lois, de nature constitutionnelle ou non, édictées sous un régime républicain antérieur à 1946 [27]. Il faut donc qu’une ou plusieurs lois aient affirmé le principe en question, pour que celui-ci trouve sa place dans le club très fermé des PFRLR.

Avant de démontrer que cette condition est plus que remplie en l’occurrence (II.), il convient de déterminer les législations antérieures à 1946 pouvant être qualifiées de « républicaines » (I.).

I. Détermination des législations « républicaines »

Afin de vérifier si cette deuxième condition est remplie, une première étape consiste à distinguer les régimes républicains de ceux qui ne le sont pas, seuls les premiers entrant dans le champ d’analyse des PFRLR.

C’est ainsi que peuvent assurément être exclues du périmètre de notre étude les lois adoptées sous les régimes suivants :

  • le Premier Empire (18 mai 1804 – 6 avril 1814) ;
  • la Première Restauration (6 avril 1814 – 20 mars 1815) ;
  • les Cent Jours (20 mars 1815 – 7 juillet 1815) ;
  • la Seconde Restauration (7 juillet 1815 – 9 août 1830)  ;
  • la Monarchie de Juillet (9 août 1830 – 24 février 1848) ;
  • le régime de Vichy (10 juillet 1940 – 20 août 1944).

L’exclusion paraît également concerner le Consulat (9 novembre 1799 – 18 mai 1804). En effet, la majorité des constitutionnalistes, au premier rang desquels figure le doyen Louis Favoreu, considère que ce régime ne saurait être pris en compte pour dégager ou écarter des PFRLR, en raison de sa nature davantage impériale que républicaine [28].  En attestent les dispositions de l’article premier du titre premier de l’Acte additionnel aux Constitutions de l’Empire, en date du 22 avril 1815, qui dénient expressément au Consulat le caractère républicain en lui attribuant un caractère impérial : « Les Constitutions de l’Empire, nommément l’acte constitutionnel du 22 frimaire an VIII (13 décembre 1799), les sénatus-consultes des 14 et 16 thermidor an X (2 et 4 août 1799), et celui du 28 floréal an XII (18 mai 1804), seront modifiées par les dispositions qui suivent. Toutes les autres dispositions sont maintenues. » D’ailleurs, jamais le Conseil constitutionnel ne s’est fondé sur une loi issue de ce régime pour reconnaître ou écarter un PFRLR. Pour autant, il n’a jamais explicitement tranché ce débat.

À noter enfin qu’à travers sa jurisprudence, le Conseil constitutionnel semble avoir estimé que la période comprise entre la Révolution de 1789 et la Constitution de la Ière République française, quoique monarchique, pouvait entrer dans le domaine de recherche des PFRLR[29].

Il s’ensuit qu’en l’état de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, seules les lois adoptées sous les régimes suivants peuvent être prises en compte pour dégager un PFRLR :

  • la période comprise entre l’institution de la première Assemblée nationale constituante et l’avènement de la Ière République (9 juillet 1789 – 21 septembre 1789) ;
  • la Ière République –  Convention et Directoire (21 septembre 1792 – 9 novembre 1799)
  • la IIème République (24 février 1848 – 2 décembre 1802) ;
  • la IIIème République (4 septembre 1870 – 10 juillet 1940) :
  •  le Gouvernement provisoire de la République française (3 juin 1944 – 27 octobre 1946) [30].

Malgré la réticence de la doctrine majoritaire, la législation du Consulat sera également examinée, le juge constitutionnel n’ayant pas explicitement écarté cette période de son prisme d’analyse.

II. L’existence de nombreux textes républicains consacrant le principe d’intervention du jury en matière criminelle

Le moins que l’on puisse dire est que les dispositions législatives et constitutionnelles républicaines ayant consacré le principe d’intervention du jury criminel ne manquent pas. Pour commencer, soulignons que ce principe fut consacré par de nombreuses Constitutions.

En effet, ce principe apparaît au chapitre V, article 9 de la Constitution du 3 et 4 septembre 1791, qui prévoit qu’ « [e]n matière criminelle, nul citoyen ne peut être jugé que sur une accusation reçue par les jurés, ou décrétée par le corps législatif, dans le cas où il lui appartient de poursuivre l’accusation. – Après l’accusation admise, le fait sera reconnu et déclaré par des jurés […]. »

Le même principe se retrouve à l’article 96 de la Constitution du 6 messidor An I (24 juin 1793), qui dispose qu’ « [e]n matière criminelle, nul citoyen ne peut être jugé que sur une accusation reçue par les jurés ou décrétée par le corps législatif. – Les accusés ont des conseils choisis parmi eux, ou nommés d’office. – L’instruction est publique. – Le fait et l’intention sont déclarés par un jury de jugement. – La peine est appliquée par un tribunal criminel. »

Deux années plus tard, l’article 237 de la Constitution du 5 fructidor An III (22 août 1795) reconduit le principe en matière criminelle : « Un premier jury déclare si l’accusation doit être admise ou rejetée : le fait est reconnu par un second jury, et la peine déterminée par la loi est appliquée par les tribunaux criminels. »

L’article 62 de la Constitution du 22 frimaire An VIII (13 décembre 1799), qui fonde le Consulat, consacre également l’intervention du jury (nous mentionnons cette disposition dans l’hypothèse fragile où le Conseil constitutionnel considérerait la législation consulaire comme revêtant un caractère républicain, même si cela irait à l’encontre de la doctrine majoritaire) : « En matière de délit emportant peine afflictive ou infamante, un premier jury admet ou rejette l’accusation : si elle est admise, un second jury reconnaît le fait […]. »

Enfin, il faut tenir compte des dispositions de l’article 82 de la Constitution de la IIème République du 4 novembre 1848 : « Le jury continuera à être appliqué en matière criminelle. »

Outre ces consécrations constitutionnelles, il est remarquable que le Code d’instruction criminelle, dans sa version en vigueur sous la IIIème République, a toujours prévu l’intervention du jury de cour d’assises pour juger les crimes de droit commun. En effet, l’article 231, al. 1 du Code d’instruction criminelle, issu de la loi du 17 juillet 1856 et prenant place dans un titre II intitulé « Des affaires qui doivent être soumises au jury », contenait les dispositions suivantes : « Si le fait est qualifié de crime par la loi, et que la cour trouve des charges suffisantes pour motiver la mise en accusation, elle ordonnera le renvoi du prévenu aux assises. »

Il en va de même à la Libération, l’ordonnance n° 45-764 du 20 avril 1945, adoptée par le Gouvernement provisoire de la République française, ayant reconduit le système du jury pour juger l’ensemble des crimes de droit commun. L’article 231 du Code d’instruction criminelle est ainsi demeuré applicable jusqu’à et applicable jusqu’à l’entrée en vigueur du Préambule de 1946 – et même jusqu’à l’adoption du Code de procédure pénale en 1958.

Les sources textuelles consacrant le principe d’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun étant abondantes, la deuxième condition pour le hisser au rang de PFRLR est parfaitement remplie ; il ne reste qu’à examiner la dernière.

Section III. Troisième condition de reconnaissance d’un PFRLR : l’absence d’exception au principe antérieurement à 1946

Troisième et dernière condition : le principe doit avoir fait l’objet d’une application continue sous l’ensemble des régimes républicains antérieurs à 1946, sans qu’aucune discontinuité ne puisse être recensée. Pour rejoindre la confrérie des PFRLR, il faudrait donc que le principe d’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun n’ait jamais été remis en cause par les législations républicaines antérieures à la IVème République.

Il s’ensuit que toutes les exceptions au principe intervenues postérieurement à 1946 ne sauraient être prises en compte (I.). Or, nous allons démontrer que tout au long de l’histoire républicaine antérieure à 1946, les seules exceptions au principe d’intervention du jury pour juger les crimes ont concerné les crimes politiques, les crimes militaires et les crimes commis par les membres du gouvernement, mais jamais les crimes de droit commun (II.).

I. L’absence de prise en compte des exceptions postérieures à 1946

Comme nous l’avons déjà souligné, d’après la jurisprudence constitutionnelle, seules les législations antérieures à 1946 sont susceptibles de fonder la reconnaissance ou la mise à l’écart d’un PFRLR. Autrement dit, les exceptions postérieures à 1946 ne comptent pas [31].

Il s’ensuit que les cours d’assises spécialement composées, c’est-à-dire siégeant sans jurés, instituées depuis le dernier quart du XXème siècle pour juger certaines infractions limitativement énumérées, ne peuvent être appréhendées comme des exceptions qui empêcheraient la constitutionnalisation du jury criminel. Ne sauraient donc invalider l’hypothèse d’un PFRLR les cours d’assises spécialement composées jugeant :

  • certains crimes contre les intérêts fondamentaux de la Nation commis en temps de paix (loi n° 82-621, du 21 juillet 1982 [32]) [33] ;
  • les crimes commis par les militaires dans l’exercice de leur service sur le territoire de la République en temps de paix, s’il existe un risque de divulgation d’un secret de la défense nationale (loi n° 82-621, du 21 juillet 1982, modifiée par la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011) [34] ;
  • les crimes terroristes (loi n° 86-120, du 9 septembre 1986) [35] ;
  • les crimes liés au trafic de stupéfiants (loi n° 92-1336, du 16 décembre 1992 [36]) [37] ;
  • les crimes ayant trait à la prolifération d’armes de destruction massive et de leurs vecteurs (loi n° 2011-266, du 14 mars 2011 [38]) [39].

À noter d’ailleurs que la plupart de ces crimes, comme nous le verrons plus loin, ne sont pas des crimes « de droit commun. » Conséquemment, ces exceptions à l’intervention du jury seraient de toute façon inopérantes pour écarter l’hypothèse d’un PFRLR.

II. L’absence d’exception antérieure à 1946

Comme nous l’avons expliqué précédemment, les législations devant être étudiées à l’aune des PFRLR sont celles adoptées par les régimes suivants : la période comprise entre la Révolution de 1789 et l’institution de la Convention nationale ; la Ière République (entendue comme comprenant la Convention et Directoire) ; la IIème République ; la IIIème République ; le Gouvernement provisoire de la République française.

Il s’agit désormais de mener une enquête historique pour vérifier si, sous l’un de ces régimes, exception a été faite au principe d’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun. Si tel était le cas, cela pourrait empêcher la reconnaissance de l’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun en tant que PFRLR. Le conditionnel est toutefois de rigueur, puisqu’une légère exception au principe pourrait ne pas suffire à empêcher une telle reconnaissance. Seul le juge constitutionnel peut en décider.

Or, en analysant scrupuleusement les législations relatives au jury criminel adoptées sous les régimes précités, la vérité éclate aux yeux : jamais le principe d’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun n’a fait l’objet de la moindre exception. Jamais !

Dans cette affirmation lourde de conséquences, tous les mots ont leur importance. Cela vaut notamment pour l’expression « crimes de droit de commun » (A.), ainsi que pour la notion d’« intervention du jury » (B.).

A. Des exceptions à l’intervention du jury antérieures à 1946 ne concernant pas les « crimes de droit commun »

L’expression « crime de droit commun » désigne les crimes (c’est-à-dire, les infractions les plus graves) donnant lieu à l’application des règles de fond et de procédure ordinaires [40]. Cette expression est donc doublement excluante, puisqu’elle ne recouvre ni les délits – infractions de moindre gravité –, ni les crimes donnant habituellement lieu à des procédures spéciales.

Selon la doctrine, les crimes de droit commun s’opposent ainsi à cinq autres catégories d’infraction :

  • les délits de presse qui, en plus de ne pas constituer des crimes au sens juridique du terme, obéissent à des procédures particulières ;
  • les crimes militaires, c’est-à-dire notamment ceux commis par les militaires dans l’exercice de leur service [41] ;
  • les crimes politiques, définis comme ceux « qui menacent le régime ou les institutions politiques d’un pays» [42]. Les crimes sont politiques soit objectivement en ce qu’ils portent frontalement atteinte à l’ordre public ou à l’État[43], soit subjectivement en ce que leurs auteurs sont animés par un mobile politique [44]. Par exemple, constituent des crimes objectivement politiques ceux prévus au Titre I du Livre IV du Code pénal, ceux-ci étant d’ailleurs puni de la détention criminelle [45] ;
  • les crimes terroristes. En effet, la doctrine relève que si les infractions terroristes ne sont plus considérées, en droit positif, comme des infractions politiques, elles ne sauraient davantage être appréhendées comme des crimes de droit commun. Les auteurs estiment que les infractions terroristes constituent, désormais, une catégorie « sui generis » [46] (aussi qualifiée de « délits politiques sans nom ») [47] qui se distingue à la fois de la catégorie des crimes politiques et de celle des crimes de droit commun.
  • les crimes commis par les membres du pouvoir exécutif dans l’exercice de leurs fonctions.

Ces précisions sont déterminantes, puisque l’examen minutieux des lois adoptées sous l’ensemble des régimes républicains antérieurs à 1946 révèle que si le jury a parfois été écarté du jugement de certaines infractions, ces mesures ont toujours concerné l’une des cinq catégories exceptionnelles précitées. En revanche, s’agissant des crimes de droit commun, aucune dérogation au principe d’intervention du jury ne peut être répertoriée.

Nous ne croyons pas utile de dresser la liste exhaustive des lois ayant dispensé le jury de connaître les délits de presse, les crimes militaires et les crimes commis par les membres du gouvernement dans l’exercice de leurs fonctions ; par leur objet même, qui ne prête point à discussion, ces lois ne peuvent aucunement constituer des exceptions au principe d’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun. On remarquera seulement que les législations républicaines ont parfois consacré l’intervention du jury pour juger les crimes politiques [48], les délits de presse [49] et même les crimes militaires [50], ce qui montre l’importance attachée à l’institution du jury dans notre tradition républicaine.

En revanche, la liste complète des lois républicaines dispensant le jury d’intervenir pour d’autres types de crimes, qui s’avèrent être tous de nature politique, doit être rigoureusement établie et clairement explicitée. Par souci d’exhaustivité, nous mentionnerons également les lois d’exception adoptées sous le Consulat, bien que ce régime, ainsi que nous l’avons expliqué précédemment, ne puisse être considéré comme républicain aux yeux de la plupart des constitutionnalistes. Au total, ce travail va nous conduire à examiner huit lois d’exception : six adoptées dans la continuité de la Révolution de 1789 (1), et deux adoptées sous la IIIème République (2).

1) Les lois d’exception en matière de crimes politiques adoptées dans la continuité de la Révolution de 1789.

Comme le relèvent Frédéric Desportes et Francis Le Gunhec, « [l]a nécessité de protéger la République naissante conduisit les révolutionnaires à multiplier les infractions politiques dans le Code pénal de 1791 », étant précisé que « sur les 150 infractions prévues par le code, 82 étaient de nature politique. » Les deux auteurs ajoutent que « [s]ous la Terreur s’élabora un droit pénal politique qui, dans le mépris absolu des droits de l’homme proclamés quelques années plus tôt, confia à des juridictions d’exception (dont la plus célèbre est sans conteste le Tribunal révolutionnaire institué par le décret du 1er septembre 1793), le soin d’envoyer à l’échafaud les « suspects » et les autres « ennemis du peuple » » [51]. Autrement dit, de nombreux crimes furent perçus à cette époque comme revêtant un caractère politique.

C’est précisément dans ce contexte de politisation des crimes que s’inscrivent les six premières lois que nous allons examiner : quatre ont été adoptées sous la Convention ou le Directoire (a), et deux sous le Consulat (b).

  1. Les lois d’exception en matière de crimes politiques adoptées sous la Convention et le Directoire

Premièrement, le décret du 9 octobre 1792 organisait le jugement des émigrés pris arme à la main ou qui avaient servi contre la France, par des commissions militaires composées de cinq personnes désignées par l’état-major, mais dépourvues de jurés [52]. Le but explicite de ce décret était d’appliquer promptement les dispositions du décret du 9 novembre 1791 prévoyant l’application de la peine de mort aux émigrés qui, au 1er janvier 1792, n’auraient pas déposé les armes. Ce dernier décret accuse les émigrés de « tramer contre la Constitution », et dispose dans son article 1er que « Les Français rassemblés au-delà des frontières du royaume, sont dès ce moment, déclarés suspects de conjuration contre la France » [53].  Il en résulte que les émigrés concernés par ce décret étaient perçus comme s’attaquant directement au régime politique en place. Leur crime était donc, à l’évidence, considéré par le législateur comme objectivement et subjectivement politique.

Deuxièmement, le décret du 19 mars 1793 permettait à des commissions militaires et aux tribunaux criminels ordinaires de « juger révolutionnairement » – c’est-à-dire sans jury et sans recours – « ceux qui sont ou seront prévenus d’avoir pris part aux révoltes ou émeutes contre-révolutionnaires, qui ont éclaté ou qui éclateraient à l’époque du recrutement dans les différents Départements de la République, et ceux qui auraient pris ou prendraient la cocarde blanche, ou tout autre signe de rébellion », lesquels sont déclarés « hors-la-loi » [54]. Comme beaucoup d’auteurs l’ont relevé, il s’agissait d’une procédure « politique » [55] dont le but était de réprimer des crimes objectivement et subjectivement politiques, en ce qu’ils ciblaient frontalement l’ordre établi. Ces crimes ne peuvent donc être considérés comme des crimes de droit commun.

Troisièmement, le décret du 22 nivôse an II (11 janvier 1794) autorisait les tribunaux révolutionnaires provinciaux à juger sans jurés les crimes contre-révolutionnaires, politiques par essence, s’ils en recevaient l’ordre par un représentant en mission [56]. Il s’agissait incontestablement de crimes objectivement et subjectivement politiques.

Quatrièmement, la loi du 29 nivôse an VI (18 janvier 1798) donnait temporairement compétence à des conseils de guerre permanents sans jurés pour juger des faits de brigandage commis par un rassemblement d’au moins trois personnes. Par le biais de cette loi, le Directoire entendait lutter contre les bandes de brigands en « état de guerre contre la société », formulation qui figure à deux reprises dans l’exposé des motifs fait par le rapporteur Girot-Pouzol devant le Conseil des Anciens. Plus précisément, après avoir affirmé que « les rassemblements qui infestent les routes mettent la République en péril », il soutient qu’ « il faut, pour éviter l’anarchie, que la dictature de la loi soit établie sur les brigands ; c’est le moyen le plus sûr d’empêcher qu’ils n’établissent sur la société la dictature de leur crime » [57]. En outre, il faut relever qu’en raison de son caractère exceptionnel, l’application de cette loi était initialement limitée à un an, « c’est-à-dire au temps nécessaire pour arrêter et réprimer tous ces crimes. » Transparaît ainsi clairement l’idée selon laquelle le brigandage, en cette époque, était perçu comme une menace directe pour la stabilité de l’ordre social et des institutions, ce qui en fait, dans ce contexte précis, un crime objectivement politique. Un auteur note d’ailleurs que cette loi « semble avoir été employée contre un brigandage plus politique : elle a été l’outil de la répression de l’an VII » [58]. Un autre auteur conclut que « pour les autorités directoriales, les bandes de brigands sont des contre-révolutionnaires » ; il ajoute que « le brigand est désormais jugé au même titre qu’un prisonnier de guerre ou qu’un traître à la nation. Il devient en quelque sorte un citoyen de seconde zone » [59] . À l’évidence, les crimes visés par cette loi ne sont pas appréhendés, dans le contexte de l’époque, comme des crimes de droit commun. D’ailleurs, il ne s’agit pas ici du seul moment de notre histoire républicaine où ce type d’infractions a été considéré comme revêtant un caractère politique. Par exemple, la loi du 10 mars 1927 relative à l’extradition des étrangers, dans son article 5, conférait un caractère politique aux actes de « barbarie odieuse » ou de « vandalisme » commis au cours d’une insurrection ou d'une guerre civile, faits pouvant être rapprochés de ceux visés par la présente loi.

b. Les lois d’exception en matière de crimes politiques adoptées sous le Consulat

Cinquièmement, la loi consulaire du 18 pluviôse an IX (7 février 1801) attribuait l’appréciation de nouveaux faits de brigandages et de vagabondage, pour une durée limitée, à des tribunaux spéciaux sans jurés [60]. Les motifs de cette loi ont été exposés au Corps Législatif par Portalis – indiquant qu’elle visait à punir ceux chez lesquels « l’esprit de faction et de haine contre la République se joint à l’esprit de brigandage » [61] – avant que Duveyrier n’en fasse le rapport devant l’assemblée générale du Tribunat. À travers ce rapport, l’adoption de la loi a été présentée par le gouvernement comme nécessaire pour lutter contre « ceux qui sont, non pas en guerre sourde et fortuite, mais en guerre ouverte et permanente contre le pacte social. » La loi visait ceux qui « combattent […] le régime établi », « ces monstres [qui] se sont placés, non pas seulement hors de l’empire des lois ordinaires, nos pas seulement hors du pacte social et de la société, mais hors de l’humanité » ; ceux qui « doivent être poursuivis, moins encore comme des méchants que comme des ennemis. ». Le rapporteur Duveyrier ajoute : « Peut-on ne pas conclure que cette organisation audacieuse du désordre met l’ordre public dans un danger réel et pressant, et que les lois ordinaires sont impuissantes contre des forfaits qui s’élancent avec tant d’impudence au-dessus des crimes ordinaires ? » [62]. Ainsi, les motifs ayant conduit à l’adoption de cette loi montrent clairement que le législateur voyait ces crimes non pas comme des « crimes ordinaires », mais comme des crimes revêtant un caractère objectivement politique, en ce qu’ils constituaient un péril mortel pour le régime en place. La procédure mise en œuvre est d’ailleurs présentée comme « un mode extraordinaire de poursuite et de jugement » répondant à une situation d’une gravité exceptionnelle : « La République entière se soulève de toutes parts contre un poison domestique, une cause inférieure de destruction, une vaste conspiration de brigandage et de crimes, qui menace la liberté publique dans ses plus précieuses garanties […] C’est comme un remède indispensable à ce mal extrême, que le gouvernement propose l’établissement momentané des tribunaux criminels spéciaux. » C’est pourquoi l’article 31 de la loi prévoit que « le tribunal spécial demeurera révoqué de plein droit, deux ans après la paix générale. » Cette limitation temporelle illustre, là encore, le caractère exceptionnel de cette procédure, qui doit être appréhendée dans le contexte des périls intérieurs et extérieurs qui menaçaient alors la France.

Il convient de rappeler que cette loi ayant été adoptée sous le Consulat, régime que la majorité des constitutionnalistes jugent davantage impérial que républicain, elle ne devrait vraisemblablement pas être prise en compte par le Conseil constitutionnel s’interrogeant sur l’existence d’un PFRLR. Toutefois, si une telle prise en compte devait avoir lieu, cette loi ne saurait être appréhendée comme une exception au principe d’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun, puisque dans son contexte d’adoption et de mise en application, elle ne visait aucunement des crimes de droit commun, mais bien des crimes objectivement politiques.

Sixièmement, la loi du 23 floréal an X (19 mai 1802) donnait compétence à de nouveaux tribunaux spéciaux sans jurés pour juger des crimes tels que le faux en écriture et les incendies volontaires [63]. Au nom du Gouvernement, le rapporteur BERLIER présentait cette loi comme un complément apporté à la loi du 18 pluviôse an IX (7 février 1801), rendu nécessaire par la prolifération de certains crimes, notamment les faux : « c’est avec peine, citoyens Législateurs, que le gouvernement réclame et attend de vous cette mesure complétive de celle que vous adoptâtes le 18 pluviôse an IX. » Il ajoutait : « Vous n’exigerez pas davantage que je justifie cette proposition par les principes du droit commun, tandis qu’il ne s’agit que d’examiner s’il faut en sortir : la justice de la mesure est dans le besoin même de mettre un frein à cette multitude de faussaires qui inondent et menacent la société, et s’il s’élevait quelques voix qui réclamassent l’application des principes propres aux temps ordinaires, je leur répondrais par les raisons qui, dans une matière semblable, déterminèrent votre décret du 18 pluviôse. » Pour marquer cette continuité entre les deux lois, il mentionnait ces « hordes de brigands qui, tremblants aujourd’hui devant la force publique, semblent n’avoir suspendu le cours de leur assassinat que pour tourmenter la société par d’autres crimes, singulièrement celui de faux. C’est dans ce dernier retranchement qu’il faut les atteindre ; il le faut surtout à une époque où les faux de toute espèce semblent lutter contre la paix. » Il décrivait les nouveaux tribunaux spéciaux qu’il propose comme « une institution passagère », et les dispositions qui les organisaient comme des « mesures extraordinaires » visant la catégorie d’infractions « qui menace le plus essentiellement l’ordre social. » S’agissant des incendies volontaires qui, dans certaines circonstances, relevaient également de la compétence de ces tribunaux spéciaux, le rapporteur BERLIER insistait sur le fait que les incendies concernés en sont « l’espèce qui menace le plus essentiellement la société toute entière. » [64] L’ensemble de ces motifs, qui insistent sur la complémentarité entre la présente loi et celle du 18 pluviôse an IX (7 février 1801), confèrent aux crimes visés, commis dans un tel contexte, un caractère objectivement politique.

Là encore, il faut insister sur le fait que cette loi ayant été adoptée sous le Consulat, elle ne devrait pas, selon la plupart des constitutionnalistes, être prise en compte par le Conseil constitutionnel pour écarter un PFRLR. Quoiqu’il en soit, cette loi ne constitue aucunement une exception au principe d’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun, l’exposé des motifs montrant sans ambiguïté qu’elle ne visait point des crimes de droit commun, mais des crimes politiques aux yeux du législateur.

2) Les lois d’exception en matière de crimes politiques adoptées sous la IIIème République

Septièmement, doit être mentionnée la « loi scélérate » du 28 juillet 1894 ayant pour objet de réprimer les menées anarchistes, adoptée sous la IIIème République. Par cette loi, les tribunaux correctionnels se virent chargés de juger les infractions de provocation au vol, meurtre, pillage, incendie, aux crimes et délits contre la sûreté extérieure de l'État et de provocation des militaires à la désobéissance, à condition qu’elles soient commises dans un but de propagande anarchiste [65]. Ainsi, il s’agissait clairement de réprimer des infractions subjectivement politiques, c’est-à-dire dont les auteurs étaient animés par un mobile politique.

Huitièmement, toujours sous la IIIème République, l’article 12 de la loi constitutionnelle du 16 juillet 1875 dispose que le Sénat peut être constitué en Haute Cour de justice pour juger toute personne prévenue d’attentat commis contre la sûreté de l’État, y compris des particuliers [66]. Une fois de plus, il s’agissait donc de réprimer des infractions objectivement politiques, en ce qu’elles visaient directement le régime en place. Cette loi, mentionnée par le doyen Vedel dans son échange avec le président Badinter en 1986, ne saurait donc être appréhendée comme une exception au principe selon lequel le jury intervient pour juger les crimes de droit commun.

À la lueur de ces explications, il apparaît clairement que chacune de ces lois d’exception n’avait qu’un seul et unique but : faciliter la répression des ennemis du régime. Sous l’empire des lois républicaines antérieures à 1946, la justice criminelle sans jury, quand elle ne servait pas à réprimer les délits de presse, les crimes militaires ou les crimes commis par les membres du pouvoir exécutif dans l’exercice de leurs fonctions, a toujours été un instrument de répression des crimes politiques. En revanche, jamais elle n’a servi à réprimer les crimes de droit commun. Aussi, aucune des exceptions susmentionnées n’est de nature à porter atteinte au principe selon lequel le jury doit intervenir pour juger ces crimes.

Il convient maintenant de s’intéresser aux lois ayant modifié les modalités d’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun, sans pour autant remettre en cause le principe de cette intervention.

B. Des lois modifiant la procédure sans remettre en cause « l’intervention du jury » pour juger les crimes de droit commun

Deux catégories de « fausses exceptions » au principe d’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun doivent être mentionnées : d’une part, les lois relatives à la compétence, à la composition et au fonctionnement du jury (1), et d’autre part, les lois procédant à la correctionnalisation de certains crimes de droit commun (2).

1) Les lois relatives à la compétence, à la composition et au fonctionnement du jury

Dans son échange précité avec le président Badinter, le doyen Vedel, pour justifier sa réticence à reconnaître l’intervention du jury comme PFRLR, arguait de l’instabilité historique de cette institution. En effet, au cours de l’histoire républicaine, le jury a subi de nombreuses modifications :

  • dans sa compétence. Par exemple, l’appréciation des délits de presse et des crimes politiques fut parfois confiée au jury, et lui fut parfois retirée. De même, si le jury, pendant très longtemps, a exclusivement statué sur la culpabilité, il est désormais associé à la détermination de la peine, depuis une loi du 5 mars 1932 ;
  • dans sa composition. En effet, si le service de jury fut parfois réservé à de riches propriétaires, il fut parfois ouvert sans condition de ressources, par exemple à travers la loi du 2 nivôse an II (22 décembre 1793). De même, il est vrai qu’au cours de l’histoire, l’établissement de la liste des jurés fut confié successivement aux élus, à l’administration, puis au hasard du tirage au sort ;
  • dans son fonctionnement. Ainsi, si le jury, pendant très longtemps, a délibéré sur la culpabilité hors la présence des juges professionnels, la loi du 25 novembre 1941, validée à la Libération par l’ordonnance n° 45-764 du 20 avril 1945 adoptée par le Gouvernement provisoire de la République française, associe désormais les jurés aux magistrats pour délibérer sur la culpabilité et la peine. À noter, d’ailleurs, que si cette innovation a pris corps sous le régime de Vichy, elle n’a été que la mise en œuvre des préconisations émises en 1938 par la commission Matter, sous la IIIème République[67].

Pour autant, ces modifications procédurales ne sauraient faire obstacle à la reconnaissance du PFRLR invoqué. En effet, ces évolutions ne remettent aucunement en cause la continuité de « l’intervention » du jury pour juger les crimes de droit commun, indépendamment de sa forme ou de ses attributions précises, qui restent librement fixées par le législateur. A minima, il faut reconnaître que le jury, depuis son institution consécutive à la Révolution, est toujours intervenu pour statuer sur la culpabilité concernant les crimes de droit commun.

En raisonnant par analogie, il est d’ailleurs remarquable que le Conseil constitutionnel ait déjà reconnu par le passé des PFRLR dont les modalités de mise en œuvre, pourtant, avaient considérablement varié au cours du temps. Tel est le cas, par exemple, du respect des droits de la défense, ou encore de la liberté individuelle, qui n’ont pas toujours eu les mêmes implications au cours de notre histoire républicaine.

2) Les lois procédant à la correctionnalisation de certains crimes de droit commun

Pour terminer, soulignons que plusieurs textes, au cours de l’histoire républicaine, ont procédé à la correctionnalisation de certains crimes de droit commun. Tel fut notamment le cas, sous la IIIème République, de l’avortement (loi du 27 mars 1923) [68] et de la bigamie (loi du 19 février 1933) [69].

À l’évidence, ces dispositions ne font point exception au principe d’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun, puisque ce ne sont plus des faits considérés comme des crimes, mais comme des délits, qui sont confiés aux tribunaux correctionnels.

Au contraire, le fait que le législateur, confronté à la réticence des jurés à condamner certains faits, ait préféré correctionnaliser ces faits plutôt que de maintenir leur qualification criminelle tout en confiant leur jugement à une juridiction sans jury, tend à démontrer le caractère sacré, dans notre tradition républicaine, de l’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun.

En outre, il faut souligner que la reconnaissance de l’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun en tant que PFRLR n’empêcherait pas au législateur de confier le jugement de certains faits, aujourd’hui revêtus d’une qualification criminelle, à un tribunal correctionnel (sans jury), à condition toutefois de prévoir pour ces faits une peine délictuelle. L’idée maîtresse est que les infractions de droit commun les plus graves, c’est-à-dire les crimes, requièrent l’intervention du jury.

Il faut d’ailleurs noter que jusqu’alors, l’institution du jury a joué un rôle politique essentiel pour inciter le législateur à moduler la répression de certaines infractions. Ainsi, la loi du 27 mars 1923 correctionnalisant l’avortement s’explique en grande partie par la réticence des jurés à condamner ce type de faits, en raison de peines encourues qu’ils jugeaient trop sévères [70]. Le constat est similaire pour la loi du 19 février 1933 correctionnalisant la bigamie [71]. Voici une preuve supplémentaire, s’il en était besoin, que le jury populaire est une institution souveraine au service des libertés.

Section IV. Conclusion : l’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun remplit toutes les conditions pour être reconnue en tant que PFRLR

En résumé, un PFRLR est un principe essentiel consacré par le législateur républicain, touchant aux « droits et libertés fondamentaux », à la « souveraineté nationale » ou à l’ « organisation des pouvoirs publics », et qui a reçu une application continue jusqu’à l’adoption du Préambule de la Constitution de 1946.

Or, une analyse objective de l’ensemble des constitutions et législations républicaines adoptées depuis 1789 montre que ces trois conditions sont parfaitement remplies par le principe d’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun. Par conséquent, le Conseil constitutionnel, s’il décidait de s’en tenir aux critères jusqu’alors dessinés par sa propre jurisprudence, pourrait être amené à ériger ce principe d’intervention au rang des PFRLR.

Douze ans après la reconnaissance du dernier, l’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun serait le douzième PFRLR consacré par le juge constitutionnel, douze comme le nombre de jurés formant le premier jury de jugement à la Révolution… Le symbole serait sublime !

Cette reconnaissance du principe d’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun en tant que PFRLR entraînerait nécessairement l’abrogation des dispositions organisant la compétence et le fonctionnement des cours criminelles départementales, qui jugent aujourd’hui sans jurés environ 57% des crimes de droit commun qui relevaient jusqu’alors de la compétence des cours d’assises.

Chapitre 2. La thèse de l’intervention du jury comme principe à valeur constitutionnelle

De façon subsidiaire, dans l’hypothèse où le Conseil constitutionnel ne reconnaîtrait pas l’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun en tant que PFRLR, il pourrait, en répondant favorablement à la deuxième QPC, consacrer l'existence d'un principe à valeur constitutionnelle selon lequel l'intervention du jury est le droit commun du jugement criminel.

Ce principe, distinct du premier, consisterait à affirmer que la majorité des crimes doivent être jugés par un jury populaire. De façon exceptionnelle, il resterait donc possible de confier le jugement de certains crimes à des juridictions criminelles sans jury, à condition toutefois que ces exceptions revêtent un caractère limité et soient justifiées par la poursuite de certains objectifs.

Nous démontrerons que ce principe, qui semble d’ores et déjà reconnu par la jurisprudence constitutionnelle (Section I), devrait emporter l’abrogation des dispositions organisant la compétence et le fonctionnement des cours criminelles départementales (Section II).

Section I. La reconnaissance du « principe d’intervention du jury » par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 86-213 du 3 septembre 1986

Le principe selon lequel l’intervention du jury est le droit commun du jugement des crimes, quoique sa valeur exacte n’ait pas encore été fixée, semble directement s’évincer de la décision précitée n° 86-213 rendue par le Conseil constitutionnel le 3 septembre 1986. Pour rappel, afin de valider les dispositions instituant les cours d’assises spécialement composées en matière de terrorisme, le Conseil constitutionnel s’est exprimé de la sorte :

« 10. Considérant que les infractions criminelles énumérées à l'article 706-16 nouveau ne sont justiciables de la cour d'assises composée selon les termes de l'article 698-6 qu'autant qu'il est établi qu'elles sont en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur ; qu'ainsi, à s'en tenir au seul texte de l'article 706-16 nouveau, l'exception apportée au principe de l'intervention du jury a un caractère limité ; que l'argument invoqué par les auteurs de la saisine manque par suite en fait. » 

À travers cette formule, le Conseil reprend à son compte le principe d'intervention du jury soulevé par les sénateurs requérants, tout en estimant qu'il n'est pas violé en raison de la compétence restreinte des cours d'assises spécialement composées en matière de terrorisme. Cela laisse entendre qu’a contrario, ce principe serait bafoué si un nombre significatif de crimes étaient soustraits à la compétence du jury.

La reconnaissance d’un tel principe serait conforme à l’interprétation doctrinale de la décision du 3 septembre 1986. Ainsi, dans sa thèse intitulée L’avenir du jury criminel, William ROUMIER relève qui si le Conseil constitutionnel n’a pas explicitement consacré le principe d’intervention du jury en tant que PFRLR, il a toutefois « posé pour principe que l’institution du jury constitue le droit commun du jugement en matière criminelle » [72]. De même, dans le rapport DENIAU en date de 1996, le Haut comité consultatif sur la procédure de jugement en matière criminelle relève que la décision du 3 septembre 1986 « permet d’établir que le Conseil considère l’institution du jury comme la procédure normale de jugement en matière criminelle » [73].

Pour rappel, l’expression « principe d’intervention du jury », qui figure dans le dixième considérant de la décision n° 86-213 du 3 septembre 1986, est la résultante d’un compromis entre le président Badinter et le doyen Vedel : tandis que le premier souhaitait voir l’intervention du jury pour juger les crimes de droit commun reconnu en tant que PFRLR, le second ne le souhaitait pas, sans pour autant condamner un tel principe. Par cette formule, comme le souligna Pierre Joxe lors de la séance, « le Conseil marque sa fidélité à la notion de jury et de jurés populaires », sans pour autant trancher la question du PFRLR qui ne lui était pas posée [74]. Il est donc raisonnable d’estimer que par cette formule, le Conseil constitutionnel, en 1986, a entendu a minima faire de l’intervention du jury criminel un principe à valeur constitutionnelle, tout en réservant pour l’avenir la question de sa reconnaissance en tant que PFRLR.

L’intervention du jury criminel semble donc constituer, à tout le moins, un principe à valeur constitutionnelle. Or, de par leur champ de compétence matérielle extrêmement large, les cours criminelles départementales s’inscrivent en totale contradiction vis-à-vis de ce principe.

Section II. Le « principe d’intervention du jury » violé par les cours criminelles départementales

Selon l’étude d’impact ayant précédé la loi n° 2019-222, du 23 mars 2019, de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice N° Lexbase : L6740LPC, les cours criminelles départementales sont désormais compétentes pour juger 57 % des affaires criminelles [75]. Cette estimation est proche du constat effectué par le comité d’évaluation et de suivi de la cour criminelle qui, dans son rapport d’octobre 2022, constate que dans les départements d’expérimentation, le champ de compétence des cours criminelles départementales représente 55 % des condamnations prononcées par les cours d’assises entre 2015 et 2018, atteignant même 67 % dans certains départements [76].

Sans que la liste soit exhaustive, il sera rappelé que les cours criminelles départementales sont compétentes pour connaître des crimes punis de quinze ou vingt ans de réclusion criminelle commis par des majeurs hors récidive. En retenant pour principal critère de compétence celui de la peine encourue, le législateur a ainsi offert aux cours criminelles départementales une compétence très large, concernant la majorité des crimes prévus par le Code pénal. Voici une liste non exhaustive des crimes concernés :

Il s’ensuit que la cour criminelle départementale est devenue la juridiction criminelle de principe pour juger les crimes, au mépris du principe d’intervention du jury pourtant reconnu par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 86-213 du 3 septembre 1986.

À ce titre, la cour criminelle se distingue clairement des autres cours d’assises spécialement composées dont les jurés sont exclus, lesquelles disposent d’une compétence restreinte pour juger exclusivement :

  • certains crimes contre les intérêts fondamentaux de la Nation commis en temps de paix (loi n° 82-621 du 21 juillet 1982) [77] ;
  • les  crimes commis par les militaires dans l’exercice de leur service sur le territoire de la République en temps de paix, s’il existe un risque de divulgation d’un secret de la défense nationale (loi n° 82-621 du 21 juillet 1982, modifiée par la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011) [78] ;
  • les crimes terroristes (loi n° 86-120 du 9 septembre 1986) [79] ;
  • les crimes liés au trafic de stupéfiants (loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992) [80] ;
  • les crimes ayant trait à la prolifération d’armes de destruction massive et de leurs vecteurs (loi n° 2011-266 du 14 mars 2011) [81].

Il faut d’ailleurs souligner que ces exceptions, très limitées, au principe d’intervention du jury pour juger les crimes, ont toujours eu pour source deux motifs : d’une part, le risque de pression sur les jurés ; d’autre part, la protection du secret de la défense nationale. En effet, la lecture des travaux parlementaires permet de constater que :

  • l'éviction des jurés des cours d’assises spécialement composées pour juger les crimes d’atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation visait à éviter « le risque de divulgation de secrets de la défense nationale » [82].
  • l'éviction des jurés des cours d’assises spécialement composées pour juger les crimes terroristes a été dictée par le souci d’ « éviter toute prise aux  pressions sur les personnes chargées du jugement des terroristes. Or, ces pressions pourraient être parfois particulièrement sensibles sur les jurés des cours d’assises qui ne disposent pratiquement que de faibles protections légales et matérielles » [83] ; 
  • l'éviction des jurés des cours d’assises spécialement composées pour juger les crimes liés aux trafics de stupéfiants trouvait sa justification en ce que « pour le jugement d’affaires de ce type, un jury populaire risque d’être trop vulnérable aux manipulations, pressions et menaces des trafiquants puissants, organisés et sans scrupules » [84] ;
  • l'éviction des jurés des cours d’assises spécialement composées pour juger les crimes de prolifération d’armes de destruction massive et de leurs vecteurs a notamment été justifiée par le souci  d’« écarter tout risque de pression ou de menace sur des jurés populaires de la part de réseaux criminels internationaux puissants, parfois susceptibles d'être en lien avec des groupes terroristes » [85].
  • l'éviction des jurés des cours d’assises spécialement composées pour juge les crimes commis par les militaires dans l’exercice de leur service sur le territoire de la République en temps de paix, n’est justifiée que s’il existe « un risque de divulgation d’un secret de la défense nationale » [86].

Ainsi, en plus d’être cantonnées à des infractions très limitées en nombre, ces exceptions au principe d’intervention du jury criminel sont exclusivement guidées par deux objectifs alternatifs : la protection des jurés et la protection des secrets de la défense nationale.

Or, la cour criminelle départementale, en plus d’avoir un champ de compétence matérielle important au point d’excéder celui de la cour d’assises, ne répond à aucun de ces deux objectifs.

Il apparaît donc que les cours criminelles départementales violent le principe d’intervention du jury, déjà énoncé par la jurisprudence constitutionnelle et qui constitue a minima un principe à valeur constitutionnelle, en ce qu’elle font du jugement par jury l’exception en matière criminelle. Au surplus, leur création ne répond à aucun impératif jusqu’alors considéré comme justifiant l’éviction du jury criminel. Si le Conseil constitutionnel affirmait clairement que l’intervention du jury est un principe à valeur constitutionnelle, l’abrogation des dispositions relatives aux cours criminelles départementales devrait en découler.

 

[1] Cass. crim., QPC, 20 septembre 2023, n° 23-84.320 N° Lexbase : A83471HM et n° 23-90.010 N° Lexbase : A83911HA.

[2] B. Fiorini, Le jury, « Dieu merci » ! Cinq propositions de QPC pour lutte contre les cours criminelles départementales, Lexbase pénal, juin 2023.

[3] Le Conseil d’État a dégagé un unique PFRLR, selon lequel l’État français doit refuser d’extrader l’étranger dont l’extradition est demandée dans un but politique (1996) : CE, Ass., 3 juillet 1996, M. Koné.

[4] Cons. const., décision n° 71-44 DC, du 16 juillet 1971, Loi complétant les dispositions des articles 5 et 7 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association, cons. 2 N° Lexbase : A7886AC3.

[5] Cons. const., décision n° 76-70 DC, du 2 décision 1976, Loi relative au développement et à la prévention des accidents du travail, cons. 2 N° Lexbase : A7934ACT.

[6] Cons. const., décision n° 76-75 DC, du 12 janvier 1977, Loi autorisant la visite des véhicules en vue de la recherche et de la prévention des infractions pénales, cons. 1 N° Lexbase : A7954ACL.

[7] Cons. const., décision n° 77-87 DC, du 23 novembre 1977, Loi complémentaire à la loi n° 59-1557 du 31 décembre 1959 modifiée par la loi n° 71-400 du 1er juin 1971 et relative à la liberté de l'enseignement, cons. 3.

[9] Cons. const., décision n° 80-119 DC, du 22 juillet 1980, Loi portant validation d'actes administratifs, cons. 6 N° Lexbase : A8015ACT.

[10] Cons. const., décision n° 83-165 DC, du 20 janvier 1984, Loi relative à l'enseignement supérieur, cons. 20 N° Lexbase : A8085ACG.

[11] Cons. const., décision n° 86-224 DC, du 23 janvier 1987, Loi transférant à la juridiction judiciaire le contentieux des décisions du Conseil de la concurrence, cons. 15 N° Lexbase : A8153ACX.

[12] Cons. const., décision n° 89-256 DC, du 25 juillet 1989, Loi portant dispositions diverses en matière d'urbanisme et d'agglomérations nouvelles, cons. 16 N° Lexbase : A8198ACM.

[13] Cons. const., décision n° 2002-461 DC, du 29 août 2002, Loi d'orientation et de programmation pour la justice, cons. 26 N° Lexbase : A2314AZQ.

[14] Cons. const., décision n° 2011-157 QPC du 5 août 2011, Société SOMODIA, cons. 4 N° Lexbase : A9237HWZ.

[15] Cons. const., décision n° 86-213 DC, du 3 septembre 1986, Loi relative à la lutte contre le terrorisme et aux atteintes à la sûreté de l'État N° Lexbase : A8139ACG.

[16] Synthèse du rapport du Haut comité consultatif sur la procédure de jugement en matière criminelle, p. 22 : « On peut estimer que, ce faisant, le Conseil a plus réservé sa position qu’il n’a rejeté l’idée d’un principe fondamental reconnu par les lois de la République en la matière » [en ligne].

[17] Le compte-rendu est accessible en ligne.

[18] Cons. const., séance du 2 et 3 septembre 1986, p. 46. 

[19] Cons. const., décision n° 98-407 DC, du 14 janvier 1999, Loi relative au mode d'élection des conseillers régionaux et des conseillers à l'Assemblée de Corse et au fonctionnement des Conseils régionaux, cons. 9 N° Lexbase : A8778AC4.

[20] Cons. const., décision n° 2013-669 DC, du 17 mai 2013, Loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, cons. 21 N° Lexbase : A4431KDH.

[21] Archives Parlementaires de 1787 à 1860, 1ère série, tome XII, Deuxième annexe à la séance de l’Assemblée nationale constituante du 29 mars 1790, Moyens d’exécution pour les jurés au criminel et au civil, rédigés en article. Par M. Duport, député de Paris, p. 436 [en ligne].

[22] Archives Parlementaires de 1787 à 1860, 1ère série, tome XXII, Assemblée nationale constituante, séance du mardi 11 janvier 1791, au matin, p. 129 [en ligne].

[23] Archives Parlementaires de 1787 à 1860, 1ère série, tome LXVI, Convention nationale, séance du lundi 17 juin 1793, au matin, p. 597 [en ligne].

[24] Projet de Constitution pour la République française et discours préliminaire, prononcé par M. Boissy d’Anglas au nom de la commission des Onze, Convention nationale, séance du 5 messidor an III (23 juin 1795), p. 58 [en ligne].

[25] Compte-rendu des séances de l’Assemblée nationale, tome 2ème, séance du 28 juillet 1848, p. 708 [en ligne].

[26] Compte-rendu des séances de l’Assemblée nationale, tome 2ème, séance du 7 août 1848, p. 930 [en ligne].

[27] Cons. const., décision n° 88-244 DC, du 20 juillet 1988, Loi portant amnistie, cons. 12 N° Lexbase : A8180ACX.

[28] V. sur ce point : L. Favoreu, Les principes fondamentaux reconnus par les Lois de la Républiquein B. Mathieu et M. Verpeaux (dir.), La République en droit français, Economica, 1996, p. 234 ; M.-H. Fabre, ibid., p. 37 ; L. Sponchiado, De l’usage des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République dans le débat sur le mariage des personnes de même sexe, RFDC 2013, n° 96, p. 965.

[29] Cons. const., décision n° 86-224 DC, du 23 janvier 1987, Loi transférant à la juridiction judiciaire le contentieux des décisions du Conseil de la concurrence, cons. 15 N° Lexbase : A8153ACX.

[30] Cons. const., décision n° 97-393 DC, du 18 décision 1997, Loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, cons. 29 N° Lexbase : A8444ACQ.

[31] V. par ex : Cons. const, décision n° 89-254, du 2 juillet 1989, Loi modifiant la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités d'application des privatisations, cons. 13 N° Lexbase : A8197ACL.

[32] Loi n° 82-621, du 21 juillet 1982, relative à relative à l'instruction et au jugement des infractions en matière militaire et de sûreté de l'État et modifiant les codes de procédure pénale et de justice militaire N° Lexbase : C30227BK.

[33] C. proc. pén., art. 702 N° Lexbase : L0574LTG.

[35] V C. proc. pén., art. 706-25 N° Lexbase : L3176LSG et 698-6.

[36] Loi n° 92-1336, du 16 décembre 1992, relative à l'entrée en vigueur du nouveau Code pénal et à la modification de certaines dispositions de droit pénal et de procédure pénale rendue nécessaire par cette entrée en vigueur N° Lexbase : L9786IE8.

[37] V. C. proc. pén., art. 706-27 N° Lexbase : L4109AZ9 et 698-6.

[38] Loi n° 2011-266, du 14 mars 2011, relative à la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs N° Lexbase : L5065IPB.

[39] V. C. proc. pén., art. 706-174 N° Lexbase : L7452IPP et 698-6.

[40] R. Merle et A. Vitu, Traité de droit criminel. Droit pénal général, Cujas, 1988, n° 375 : « L’infraction de droit commun est celle qui est soumise aux règles de fond, de compétence judiciaire ou de procédure généralement applicables aux crimes, aux délits ou aux contraventions. »

[41] B. Bouloc, Droit pénal général, Dalloz, 24e éd., 2013, p. 194. – J. Pradel, Droit pénal général, 20e éd., Cujas, 2014, p. 275 : « Faut-il également considérer comme militaires les infractions de droit commun commises par un militaire ? […] La réponse est affirmative ». –  F. Desportes et F. Le Gunehec, Droit pénal général, 16e éd., Economica, 2009, p. 109 : « Aux infractions militaires au sens strict peuvent être assimilées les infractions de droit commun commises dans l’exécution du service par les militaires ».

[42] X. Pin, Droit pénal général, Dalloz, 2023, n° 45.

[43] C. Le Roux, L’infraction politique, L’Harmattan, 2018, p. 33 : « Une des théories dégagées concernant la définition de l’infraction politique tient à une conception objective. Cette conception s’attache à l’objet ou au résultat même de l’infraction commise, faisant abstraction du mobile du délinquant. L’infraction politique est alors réduite à celle qui porte atteinte à l’existence ou à l’organisation de l’État. ». – V. en ce J.-J. Lemouland, Les critères jurisprudentiels de l’infraction politique, RSC 1988, p. 16 ; B. Bouloc, Droit pénal général, préc., p. 188 : « Si l’on définit l’infraction politique par son objet – le critère est objectif – l’on traite alors comme politique toute infraction portant atteinte à l’organisation et au fonctionnement des pouvoirs publics, soit à un intérêt politique de l’État, soit à un droit politique des citoyens […] ». – V. aussi X. Pin, Droit pénal général, préc., n° 46 : l’une des techniques permettant de déduire la nature politique d’une infraction « consiste à relever l’objet politique de l’infraction qui de porter atteinte à l’organisation politique du pays : ce critère fait apparaître des infractions politiques par nature. Il en est ainsi des infractions prévues par le Code électoral, et la jurisprudence y a même inclus, un temps, les délits de presse ».

[44] C. Le Roux, L’infraction politique, préc., pp. 33-34 : « Contrairement à la conception objective, la conception subjective de l’infraction politique propose de s’intéresser non pas à l’objet même de l’infraction, mais aux raisons animant l’auteur. Cette démarche est donc centrée sur le sujet, sur le délinquant, et seront alors considérées comme politiques les infractions commises avec un mobile politique. Dans cette conception, les infractions de droit commun pourront être qualifiées de politiques, si l’analyse des mobiles du délinquant révèle un dessin politique. » – V. en ce sens : S. Jacopin, Droit pénal général, Bréal, 3e éd., p. 73 ; F. Desportes, F. Le Gunehec, Droit pénal général, Economica, 2009, n° 152 ; Bernard Bouloc, Droit pénal général, préc., p. 188.

[45] Art. 411-2, 411-3, 411-4, 411-6, 411-9 et 412-1 à 412-8 du Code pénal. – V. X. Pin, Droit pénal général, préc., n° 46 : « Les principales infractions politiques sont contenues dans le Code électoral et dans le Livre IV du Code pénal. Crimes ou délits contre la Nation, l’État et la paix publique, mais pas uniquement ».

[46] O. Cahn et J. Alix, Terrorisme et infraction politique : quel intérêt de prolonger la disputatio ?, Mare & Martin, 2021, pp. 217-314 : « La loi du 22 juillet 1992 fait du terrorisme une catégorie d’infraction sui generis, non politiques, même si elles sont insérées parmi les crimes et délits contre l’État, la nation et la paix publique […] ».

[47] O. Beaud, entretien avec R. Théry, Revue de droit d’Assas, Projet, n° 19, 2019, p. 13.

[48] V. par exemple l’article 83 de la Constitution de la IIème République du 4 novembre 1848 : « La connaissance de tous les délits politiques et de tous les délits commis par la voie de la presse appartient exclusivement au jury. »

[49] Ibid.

[50] Par exemple, la loi du 29 octobre 1790 créant les cours martiales fondait la justice militaire sur un système de double jury (d’accusation et de jugement). La présence du jury de jugement fut conservée au sein des tribunaux criminels militaires révolutionnaires par la loi du 12 mai 1793. Elle fut ensuite maintenue dans les tribunaux criminels militaires, par la loi du 3 pluviôse an II (22 janvier 1794).

[51] F. Desportes et F. Le Gunehec Droit pénal général, préc., p. 93.

[52] J.-B. Duvergier, Collection complète des lois, décrets, ordonnances, règlements, et avis du Conseil d’État, depuis 1788 jusqu’à et y compris 1824, tome V, 1825, p. 22 [en ligne].

[53] J. Teste-Lebeau, Code des émigrés, condamnés et déportés révolutionnairement, Première partie, 1825, p. 10 [en ligne].

[54] J.-B.Duvergier, Collection complète des lois, décrets, ordonnances, règlements, et avis du Conseil d’État, depuis 1788 jusqu’à et y compris 1824, préc., pp. 253-254 [en ligne].

[55] C. Gau-Cabée, Le Tribunal criminel de l’Aude et la répression politique de l’an II : un exemple de Terreur dévoyée, in G. Sicard (dir.), Justice et politique : la Terreur dans la Révolution française, Presse de l’Université Toulouse Capitole, 1997, pp. 177-187.  Un autre auteur observe que les contre-révolutionnaires concernés pas ce décret étaient considérés comme des « non-citoyens » : B. Battais, La justice militaire en temps de paix, Thèse Angers, 2015, p. 24 [en ligne].

[56] Collection du Louvres, in-4°, tome 17, p. 186. Mentionné par J.-B. Duvergier, Collection complète des lois, décrets, ordonnances, règlements, et avis du Conseil d’État, depuis 1788 jusqu’à et y compris 1824, tome VI, 1825, p. 481 [en ligne].

[57] Gazette nationale ou Le Moniteur universel, 25 janvier 1798, p. 507 [en ligne].

[58] C. Ledent, Voleurs ou révoltés ? Un réseau de brigands brabançons devant la justice française (1799-1804), Presses universitaires de Louvain, pp. 27-38.

[59] Bruno Roman, Lutter contre le brigandage à la fin du Directoire : la loi des otages (Messidor An VII – Brumaire An VIII), Annales historiques de la Révolution française, 2021, n° 4, pp. 9 et 11.

[60] J.-B. Duvergier, Collection complète des lois, décrets, ordonnances, règlements, et avis du Conseil d’État, depuis 1788 jusqu’à et y compris 1824, tome XII, 1826, p. 386 [en ligne].

[61] J.-G. Locré, La législation civile, commerciale, et criminelle de la France, ou commentaires et compléments des codes français, tome XXVII, 1831, spéc. pp. 250-251 [en ligne].

[62] Ibid., spéc. pp. 255, 258, 263 et 272 [en ligne].

[63] J.-B. Duvergier, Collection complète des lois, décrets, ordonnances, règlements, et avis du Conseil d’État, depuis 1788 jusqu’à et y compris 1824, tome XIII, 1826, p. 429 [en ligne].

[64] J.-G. Locré, La législation civile, commerciale, et criminelle de la France, ou commentaires et compléments des codes français, tome XXIX, 1831, spéc. pp. 42-49 [en ligne].

[65] Loi du 28 juillet 1894 ayant pour objet de réprimer les menées anarchistes, article 1er.

[66] Loi constitutionnelle du 16 juillet 1875, art. 12, al. 3 : « Le Sénat peut être constitué en Cour de justice par un décret du Président de la République, rendu en Conseil des ministres, pour juger toute personne prévenue d'attentat contre la sûreté de l'État. » 

[67] R. Vouin, Le destin de la cour d’assises française, in Le jury face au droit pénal, Journées J. Dabin, Bruxelles, E. Bruylant, 1967, pp. 136-138 : « cette loi de 1941 n’a pas été improvisée sous l’effet des circonstances. Cette loi de 1941 provient d’un projet établi avant-guerre et qui demeurait depuis 1938 dans les cartons ministériels. Il suffit de dire qu’il s’agit d’un projet de la commission Paul MATTER pour qu’on voie bien que cette loi n’a rien à voir avec les tendances de Vichy en politique intérieure, ni avec la guerre et l’occupation. […] Nous pouvons affirmer, et même dire avec force, que cette loi du 25 novembre 1941 n’est pas le résultat de circonstances d’ordre politique. Elle a été prise en la forme sans débats parlementaires et selon une procédure législative simplifiée. Mais quant au fond, c’est une loi de 1938, en réalité, qui a été adoptée en 1941 et confirmée en 1945. »

[68] Loi du 27 mars 1923 modifiant l’article 317 du code pénal relatif à l’avortement.

[69] Loi du 19 février 1933 modifiant l’article 340 du code pénal relatif à la bigamie.

[70] J.-Y. Le Naour, C. Valenti, Histoire de l’avortement, Le Seuil, 2003, p. 123 : « la plupart des jurys d’assises font preuve d’une coupable indulgence et, trouvant trop sévères les peines prévues par la loi, préfèrent acquitter les prévenus, même en cas de crime avéré. »

[71] F. Cahen, Gouverner les mœurs. La lutte contre l’avortement en France (1890-1950), Ined Éditions, 2016, pp. 137-179 : « La correctionnalisation légale, en matière de bigamie notamment, est pensée à la Belle Époque comme un moyen de destituer définitivement des juridictions populaires à la mansuétude coupable. » 

[72] W. Roumier, L’avenir du jury criminel, LGDJ, 2003, p. 79.

[73] Synthèse du rapport du Haut comité consultatif sur la procédure de jugement en matière criminelle, p. 22.

[74] Cons. const., constitutionnel, séance du 2 et 3 septembre 1986, p. 50.

[75] Etude d’impact, projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, pp. 362-363 [en ligne].

[76] Rapport d’évaluation et de suivi de la cour criminelle départementale, octobre 2022, pp. 8-10 [en ligne].

[77] C. proc. pén., art. 702 N° Lexbase : L0574LTG.

[78] V. C. proc. pén., art. 697, 697-1, 698-6 et 698-7.

[79] V C. proc. pén., art. 706-25 et 698-6.

[80] V. C. proc. pén., art. 706-27 et 698-6.

[81] V. C. proc. pén., art. 706-174 [et 698-6.

[82] Assemblée nationale, 2ème séance du 14 avril 1982, p. 1129 [en ligne].

[83] Sénat, rapport n° 457 de P. Masson, annexé au procès-verbal de la séance du 16 juillet 1986,  p. 11 [en ligne].

[84] Assemblée nationale, 2ème séance du 2 juillet 1992, p. 2752 [en ligne].

[85] Exposé des motifs, loi n° 2011-266 du 14 mars 2021 relative à la lutte contre la prolifération d’armes de destruction massive et de leurs vecteurs [en ligne].

[86] C. proc. pén., art. 697-1, al. 3 N° Lexbase : L4031IRQ.

newsid:487046

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.