Le Quotidien du 3 juillet 2023

Le Quotidien

Baux commerciaux

[Brèves] Droit de préférence du locataire : exclusion des locaux à usage industriel

Réf. : Cass. civ. 3, 29 juin 2023, n° 22-16.034, FS-B N° Lexbase : A4970979

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N6129BZZ

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par Vincent Téchené

Le 05 Juillet 2023

► Les locaux à usage industriel sont exclus du champ d'application de l'article L. 145-46-1 du Code de commerce. Au sens de ce texte, doit être considéré comme à usage industriel tout local principalement affecté à l'exercice d'une activité qui concourt directement à la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers et pour laquelle le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre est prépondérant.

Faits et procédure. Les propriétaires indivis d'un ensemble immobilier l'ont donné à bail commercial à une société. Par acte reçu le 31 août 2017 par un notaire, les bailleurs ont vendu les biens loués. Invoquant une atteinte au droit de préférence dont elle bénéficiait, la locataire a, le 5 octobre 2017, assigné les cédants et la société cessionnaire en annulation de la vente et indemnisation de son préjudice.

La cour d’appel (CA Orléans, 10 mars 2022, n° 20/01235 N° Lexbase : A05687Q4) ayant rejeté les demandes de la locataire, cette dernière a formé un pourvoi en cassation.

La question qui se posait ici était de savoir si les dispositions de l’article L. 145-46-1 N° Lexbase : L4529MBD s’appliquent à un local industriel.

Décision. La Cour de cassation y répond par la négative. Après avoir rappelé les termes des articles L. 145-1 N° Lexbase : L9695L79 et L. 145-46-1, ce dernier visant les locaux à usage commercial ou artisanal, elle précise que les locaux à usage industriel se trouvent donc exclus du champ d'application de ce texte.

Mais la Haute juridiction va plus loin et prend le soin de définir le local à usage industriel.

Elle relève, dans un premier temps, qu’il résulte des travaux parlementaires de la loi « Pinel » (loi n° 2014-626, du 18 juin 2014 N° Lexbase : L4967I3D) que le projet de loi initial prévoyait l'instauration d'un droit de préférence en cas de vente d'un local à usage commercial, industriel ou artisanal. Mais deux amendements excluant les locaux industriels du champ d'application du droit susvisé ont été adoptés, sans qu'il soit possible de déterminer les motifs de cette exclusion. 

Elle se réfère alors, dans un second temps, à la jurisprudence administrative. Ainsi, le Conseil d'État a-t-il  jugé que, au sens des articles 44 septies N° Lexbase : L6940LZ3 (CE, 3°-8° s.-sect. réunies, 28 février 2007, n° 283441, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A4283DU8), 244 quater B N° Lexbase : L7453MAB (CE, 9e ch., 13 juin 2016, n° 380490 N° Lexbase : A7755RSZ) et 1465 N° Lexbase : L5750MA9 (CE, 9° s.-sect., 3 juillet 2015, n° 369851 N° Lexbase : A5801NMS) du CGI, ont un caractère industriel les entreprises exerçant une activité qui concourt directement à la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers et pour laquelle le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre est prépondérant.

La Cour retient alors que les critères ainsi dégagés sont opérants, au regard de l'objet de l'article L. 145-46-1 précité, pour délimiter la portée de l'exclusion des locaux à usage industriel du droit de préférence.

Elle en conclut qu’au sens de l'article L. 145-46-1 du Code de commerce, doit être considéré comme à usage industriel tout local principalement affecté à l'exercice d'une activité qui concourt directement à la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers et pour laquelle le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre est prépondérant.

En l’espèce, les locaux loués étaient notamment destinés à un usage de fabrication d'agglomérés et l'extrait du registre du commerce et des sociétés de la locataire mentionnait les activités de « pré-fabrication de tous éléments de construction à base de terre cuite plancher murs et autres » ainsi que de « fabrication de hourdis, blocs et pavés béton ». Dès lors, la cour d’appel a pu en déduire que le local donné à bail n'était pas à usage commercial ou artisanal au sens de l'article L. 145-46-1 du Code de commerce. La Cour rejette en conséquence le pourvoi.

Observations. Si l’exclusion des locaux industriels ne faisait guère débat, leur définition permet de circonscrire le champ d’application du texte. Il convient de noter que c’est la première fois que la Cour de cassation en donne une définition.

Par ailleurs, on notera que la question de l’application du droit de préférence aux bureaux n’a pas encore été tranchée par la Cour de cassation. Des cours d’appel ont toutefois précisé que s'il est admis que les bureaux à usage professionnel doivent être exclus du droit de préemption, en revanche, les bureaux abritant une activité commerciale sont considérés comme des locaux à usage commercial, tel étant le cas de locaux dans lesquels est exercée une activité d’administrateur de biens (CA Paris, 5-3, 1er décembre 2021, n° 20/00194 N° Lexbase : A83177DE, V. Téchené, Lexbase Affaires, décembre 2021, n° 669 N° Lexbase : N9811BYZ ; CA Rennes, 11 janvier 2022, n° 20/01661 N° Lexbase : A92307HC, V. Téchené, Lexbase Affaires, janvier 2022, n° 702 N° Lexbase : N0110BZ4).

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les obligations du bailleur du bail commercial, Le champ d'application du droit de préférence du locataire en cas de vente d'un local commercial, in Baux commerciaux, (dir. J. Prigent), Lexbase N° Lexbase : E4282E7Q.

 

newsid:486129

Droit des étrangers

[Brèves] Pas d’exécution d’un décret d’extradition de l’étranger risquant de subir des traitements inhumains et dégradants en raison d'une grave pathologie diagnostiquée après son édiction

Réf. : CE, 2°-7° ch. réunies, 19 juin 2023, n° 469722, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A094394P

Lecture: 1 min

N6090BZL

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par Yann Le Foll

Le 30 Juin 2023

La circonstance que l'exécution d'un décret d'extradition exposerait un étranger à des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa santé ainsi qu'au risque de subir des traitements inhumains et dégradants au sens de l'article 3 de la CESDH N° Lexbase : L4764AQI en raison d'une grave pathologie survenue après l'intervention du décret est de nature à faire obstacle à l'exécution du décret d'extradition.

Faits. Les circonstances invoquées par l’intéressé ont conduit la deuxième chambre de la section du contentieux du Conseil d'État à ordonner une mesure d'instruction aux fins d'obtenir des autorités turques des garanties permettant d'assurer que l'intéressé ne serait pas exposé à des risques exceptionnels eu égard à son état de santé.

En réponse aux demandes formulées par les autorités françaises, les autorités turques se sont bornées à fournir des informations générales sur le suivi médical des détenus en Turquie.

Décision. Les éléments ainsi apportés ne sont pas assez précis pour donner l'assurance que l’intéressé serait traité, en détention, de manière compatible avec son grave état de santé.

Dans ces conditions, le décret d'extradition ne peut pas être mis à exécution et donner lieu à la remise de l'intéressé aux autorités turques.

Rappel. Dans un cas de figure similaire, le fait qu’un étranger a épousé un ressortissant français postérieurement à l'arrêté de reconduite à la frontière fait obstacle à l'exécution de la mesure (CE, 21 mars 2001, n° 208541 N° Lexbase : A2193ATE).

 

newsid:486090

Libertés publiques

[Brèves] Neutralité religieuse pendant les matches de football : validation du règlement de la FFF

Réf. : CE, 2°-7° ch. réunies, 29 juin 2023, n° 458088, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A4969978

Lecture: 2 min

N6130BZ3

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par Yann Le Foll

Le 05 Juillet 2023

► L’interdiction du port de « tout signe ou tenue manifestant ostensiblement une appartenance politique, philosophique, religieuse ou syndicale » pendant les matchs de football est adaptée et proportionnée.

Faits. La Fédération française de football interdit, par l’article 1er de ses statuts, « tout port de signe ou tenue manifestant ostensiblement une appartenance politique, philosophique, religieuse ou syndicale », ainsi que « tout acte de prosélytisme ou manœuvre de propagande », à l’occasion de compétitions ou de manifestations organisées par la fédération ou en lien avec elle. La Ligue des droits de l’Homme et deux associations ont demandé au Conseil d'État d’annuler cette interdiction.

Position CE. Le principe de neutralité du service public s’applique aux fédérations sportives qui sont en charge d’un service public. Leurs agents et plus largement toutes les personnes sur lesquelles elles ont autorité doivent s’abstenir de toute manifestation de leurs convictions et opinions personnelles (CE, 3 mai 2000, n° 217017 N° Lexbase : A9574AGP).

Cette obligation de neutralité s’applique également à toutes les personnes sélectionnées dans une des équipes de France lors des manifestations et compétitions auxquelles elles participent.

Il est également de la responsabilité de ces fédérations de déterminer les règles de participation à leurs compétitions ou manifestations sportives, y compris en matière de tenue et d’équipement afin d’assurer la sécurité des joueurs et le respect des règles du jeu.

Si les licenciés ne sont pas soumis, contrairement aux agents des fédérations et aux joueurs des équipes de France, à l’obligation de neutralité, les règles de participation édictées par ces fédérations peuvent limiter leur liberté d’expression de leurs opinions et convictions pour garantir le bon fonctionnement du service public et la protection des droits et libertés d’autrui.

Décision. Pour garantir le bon déroulement des matchs de football et éviter tout affrontement ou confrontation, la FFF pouvait donc édicter l’interdiction contestée, cette interdiction étant adaptée et proportionnée.

newsid:486130

QPC

[Brèves] Petit rappel concernant les conditions de recevabilité des QPC

Réf. : Cass. civ. 3, 22 juin 2023, n° 23-40.006, FS-B, QPC N° Lexbase : A148894U

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N6117BZL

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 30 Juin 2023

► Les questions prioritaires de constitutionnalité ne sont recevables qu’en ce qu'elles allèguent la violation de dispositions constitutionnelles (Constitution, DDHC) ; ne sont dès lors pas recevables les question alléguant la violation de dispositions de la CESDH ;
de plus, pour être recevables, encore faut-il que les questions précisent, de manière explicite, en quoi la disposition législative critiquée porterait atteinte aux principes constitutionnels.

C’est dans ces conditions que la Cour de cassation a estimé, dans une décision en date du 22 juin 2023, qu’étaient irrecevables les questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) qui lui avaient été transmises par un tribunal paritaire des baux ruraux, à l’encontre des dispositions de l'article L. 322-9 du Code de l'environnement N° Lexbase : L7863K94.

Énoncé des QPC. En l’espèce, les questions posées par le requérant dans son mémoire distinct, déposé devant le tribunal paritaire des baux ruraux, étaient ainsi rédigées :

« - Le principe du statut d'ordre public du fermage agricole est-il un principe fondamental reconnu par les lois de la République ?
- Le cas échéant, les dispositions de l'article L. 322-9 du Code de l'environnement sont-elles conformes à ce principe ?
- Les dispositions de l'article L. 322-9 du code de l'environnement sont-elles conformes aux droits et libertés que la Constitution garantit, spécifiquement les articles 4 N° Lexbase : L1368A9K, 13 N° Lexbase : L1360A9A et 17 N° Lexbase : L1364A9E de la déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, l'article premier du protocole additionnel n° 1 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, les articles 6 N° Lexbase : L7558AIR, 8 N° Lexbase : L4798AQR et 13 N° Lexbase : L4746AQT de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ? ».

Toutefois, par jugement du 29 mars 2023, sans pour autant refuser de transmettre une partie de ces questions pour l'un des motifs prévus par les articles 23-1 et 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel N° Lexbase : L0276AI3, le tribunal paritaire des baux ruraux avait transmis des questions prioritaires de constitutionnalité ainsi rédigées :

« Le principe du statut d'ordre public du fermage agricole est-il un principe fondamental reconnu par les lois de la République ? Le cas échéant, les dispositions de l'article L. 322-9 du code de l'environnement sont-elles conformes à ce principe fondamental reconnu par les lois de la République compte tenu des valeurs qu'il protège ? »

Si les questions posées peuvent être reformulées par le juge à l'effet de les rendre plus claires ou de leur restituer leur exacte qualification, il n'appartient pas au juge d'en modifier l'objet ou la portée. Dans une telle hypothèse, il y a lieu de considérer que la Cour de cassation est régulièrement saisie et se prononce sur le renvoi des questions prioritaires de constitutionnalité telles qu'elles ont été soulevées dans le mémoire distinct produit devant la juridiction qui les lui a transmises.

Recevabilité des questions prioritaires de constitutionnalité. La Cour de cassation relève, en premier lieu, que les questions prioritaires de constitutionnalité ne sont pas recevables en ce qu'elles allèguent la violation des articles 6, 8 et 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 1er du premier Protocole additionnel à cette Convention.

En second lieu, les autres questions, dès lors qu'elles n'explicitent pas ce que recouvrirait le « principe du statut d'ordre public du fermage agricole », ni ne précisent les droits conférés par le statut du fermage, tel qu'institué par le titre Ier du livre IV du Code rural et de la pêche maritime, dont le fermier entend se prévaloir, et dès lors qu'elles ne précisent pas en quoi la disposition législative critiquée porterait atteinte aux principes constitutionnels garantis par les articles 4, 13 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, ne permettent pas à la Cour de cassation d'en vérifier le sens et la portée.

Ces questions prioritaires de constitutionnalité sont donc irrecevables.

newsid:486117

Sociétés

[Brèves] Révocation d’un administrateur : l’introduction d’une action en justice n’est pas une faute grave

Réf. : Cass. com., 21 juin 2023, n° 21-21.875, F-B N° Lexbase : A982793D

Lecture: 5 min

N6030BZD

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par Perrine Cathalo

Le 30 Juin 2023

► Il résulte de l'article 6, § 1, de la CESDH que le droit d'agir en justice constitue une liberté fondamentale. Il s'ensuit que la révocation pour faute du dirigeant ou de l'administrateur d'une société ne saurait, sauf à porter atteinte à cette liberté fondamentale, être fondée sur la circonstance que ce dirigeant ou cet administrateur a introduit une action en justice à l'encontre de la société. Il importe peu, à cet égard, que cette action ait été déclarée non fondée.

Faits et procédure. Une personne physique a créé une société A et une société B, à laquelle elle a apporté l’intégralité des titres qu’elle détenait dans le capital social de la société A.

Quatre personnes physiques ont créé une société C, dont ils en étaient les administrateurs.

La société B a apporté l’intégralité des titres de la société A qu’elle détenait à la société C et a reçu, en contrepartie, des actions de cette société au prix nominal d'1 euro ainsi que des bons de souscription d’actions.

Le 17 décembre 2013, la société B a consenti à trois des quatre administrateurs de la société C une promesse unilatérale de vente par laquelle elle s’engageait à leur céder l’ensemble des titres qu’elle détenait dans le capital de la société C en cas de révocation de ses fonctions du quatrième administrateur.

Le 18 août 2016, soutenant avoir été victime d’un dol, ce dernier a assigné la société C en nullité du traité d’apport et de la promesse de vente qu’il avait conclus. Par un jugement irrévocable du 19 avril 2018, ses demandes ont été déclarées irrecevables.

Le 30 août 2016, l’assemblée générale de la société C a décidé la révocation pour faute grave de ses fonctions de directeur général et d’administrateur.

L’administrateur révoqué et la société B ont assigné la société C en annulation de cette décision. Un administrateur de la société C et la société qu’il dirige sont intervenus volontairement à l’instance et ont sollicité, à titre reconventionnel, la mise en œuvre de la promesse unilatérale de vente que leur avait consentie la société B.

Par décision du 1er juin 2021, la cour d’appel de Chambéry (CA Chambéry, 1er juin 2021, n° 18/01002 N° Lexbase : A65534TU) a rejeté les demandes de l’administrateur révoqué et dit que la mise en œuvre de la promesse unilatérale de vente portera sur l’intégralité des titres de la société C détenus par la société B à un prix par titre égal au prix unitaire de souscription.

L’administrateur révoqué et la société B ont formé un pourvoi devant la Cour de cassation.

Décision. La Haute juridiction censure l’arrêt d’appel en ce qui concerne la révocation de l'administrateur et qui constitue le point essentiel de l'arrêt. 

La Cour affirme non seulement que le droit d’agir en justice constitue une liberté fondamentale, au sens de l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, mais encore que la révocation pour faute du dirigeant ou de l’administrateur d’une société ne saurait, sauf à porter atteinte à cette liberté fondamentale, être fondée sur la circonstance que ce dirigeant ou cet administrateur a introduit une action en justice à l’encontre de la société. Il importe peu, à cet égard, que cette action ait été déclarée non fondée.

Or, en l’espèce, la Chambre commerciale constate que le procès-verbal de l’assemblée générale du 30 août 2016, révoquant pour faute grave le demandeur, mentionne que l’assignation qu’il a délivrée en annulation des actes de la société C, fondée sur des allégations de dol et rejetée par le tribunal de commerce, est constitutive d’une faute grave de la part d’un mandataire en ce qu’elle est susceptible de créer un préjudice grave à la société.

Le raisonnement de la cour d’appel est donc censuré.

On relèvera par ailleurs que s'agissant de la mise en œuvre de la promesse unilatérale, la Cour de cassation approuve la cour d'appel qui a refusé de qualifier la clause litigieuse de clause léonine. En effet, les juges du fond ont retenu que la clause litigieuse avait pour objet la cession d’actions à un prix déterminé en cas de départ du promettant de la société C dans des hypothèses que cette clause énonçait, peu important que le prix de cession soit égal au prix de souscription des actions, de sorte que cette clause ne constituait pas un moyen de fixer une répartition des bénéfices et des pertes.

Pour aller plus loin : v. commentaire de Ph. Duprat, Lexbase Affaires n° 763,  à paraître le 6 juillet 2023. 

 

newsid:486030

Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

[Brèves] Appréciation de la conformité à la Constitution des sanctions pour factures non conformes

Réf. : Cons. const., décision n° 2023-1054 QPC, du 16 juin 2023 N° Lexbase : A0993938

Lecture: 3 min

N6061BZI

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par Maxime Loriot, Notaire Stagiaire - Doctorant en droit international privé à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Le 30 Juin 2023

► Par une décision rendue le 16 juin 2023, le Conseil constitutionnel était amené à trancher une question prioritaire de constitutionnalité portant sur la conformité à la Constitution de l’article 1737, II du CGI.

Selon l’article 289 du Code général des impôts N° Lexbase : L4136MGB, tout assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée est tenu de s’assurer qu’une facture est émise pour les opérations qu’il énumère. Cette facture doit comporter certaines mentions portant sur les éléments d’identification des parties, les données concernant les biens livrés ou les services rendus, et celles relatives à la détermination de la taxe.

Pour les prestations de services comprenant l’exécution de travaux immobiliers fournies à des particuliers, l’article 290 quinquies du même Code N° Lexbase : L5617HLM prévoit qu’elles font l’objet d’une note qui mentionne le nom et l’adresse des parties, la nature et la date de l’opération effectuée ainsi que le montant de son prix et celui de la taxe.

Rappel des faits et procédure

  • Une société a formulé une QPC devant le Conseil constitutionnel, considérant que  l’article 1737, II du CGI méconnaîtrait le principe de proportionnalité des peines prévu par l’article 8 de la DDHC. En effet, l’amende de 15 euros sanctionnant toute omission ou inexactitude dans une facture pourrait s’appliquer de manière cumulative alors même que le manquement ne serait pas intentionnel.
  • Par ailleurs, elle ajoute que concernant les factures d’un montant individuel inférieur à 60 euros, le plafonnement de l’amende au quart de leur montant n’aurait aucun lien avec la nature de l’infraction constatée.

Question de droit. Les dispositions de l’article 1737, II du CGI sanctionnant d’une amende fiscale les omissions ou inexactitudes constatées dans une facture ou un document en tenant lieu méconnaissent-elles le principe de proportionnalité des peines prévu par l’article 8 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen ?

Solution

Le Conseil constitutionnel rejette le grief tiré de la méconnaissance du principe de proportionnalité des peines et déclare conforme à la Constitution l’article 1737, II du CGI.

Les juges rappellent d’une part qu’en sanctionnant d’une amende fiscale les manquements aux règles de facturation, le législateur a entendu réprimer des comportements visant à faire obstacle, d’une part, au contrôle des comptabilités tant du vendeur que de l’acquéreur d’un produit ou d’une prestation de services et, d’autre part, au recouvrement des prélèvements auxquels ils sont assujettis. Ce faisant, il a poursuivi l’objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude fiscale.

D’autre part, les dispositions contestées punissent d’une amende forfaitaire d’un montant de 15 euros chaque omission ou inexactitude constatée dans une facture et prévoient, en cas de pluralité d’omissions ou inexactitudes affectant la même facture, un plafonnement du montant total des amendes égal à 25 % du montant qui y est ou aurait dû y être mentionné. Le législateur a instauré une action qui n’est pas manifestement disproportionnée au regard de la gravité des manquements qu’il a entendu réprimer.

En conséquence, il résulte de ce qui précède que même en cas de cumul d’amendes sanctionnant des manquements affectant plusieurs factures, les dispositions contestées ne méconnaissent pas le principe de proportionnalité des peines.

newsid:486061

Télétravail

[Brèves] Télétravail et accident du travail : attention au moment et au lieu de l’accident !

Réf. : CA Amiens, 15 juin 2023, n° 22/00474 N° Lexbase : A932793T ; CA Saint Denis de La Réunion, 4 mai 2023, n° 22/00884 N° Lexbase : A84699U9

Lecture: 4 min

N6043BZT

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par Lisa Poinsot

Le 30 Juin 2023

Constitue un accident du travail, un événement ou une série d'événements survenus à des dates certaines par le fait ou à l'occasion du travail, dont il est résulté une lésion corporelle ou d'ordre psychologique, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci.

Faits. Dans une première affaire (n° 22/00474), la salariée est victime d’un accident à son domicile. Alors qu’elle remonte les escaliers de son sous-sol aménagé en bureau dans le cadre du télétravail, après avoir débadgé à 16h01, elle tombe à 16h02 dans ces escaliers. Elle prévient son employeur le jour même de l’accident à 17h33.

La salariée argue que son accident aurait été pris en charge si elle n’avait pas été en télétravail et que celui-ci est survenu dans la minute qui a suivi la fin de sa journée de travail.

Dans une seconde affaire (n° 22/00884), alors que le salarié commence à télétravailler, la connexion internet s’est interrompue. Il se rend alors sur la voie publique afin de comprendre d’où vient cette panne. Le poteau électrique, dont les câbles distendus ont été tirés par un véhicule, tombe sur le salarié.

Le salarié soutient être sorti pour les besoins de son activité professionnelle, d'autant qu'il résulte de ses fonctions de cadre d'accompagner les salariés dans leurs difficultés de nature informatique, et que l'accident s'est déroulé sur le lieu du travail et dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail.

Ils établissent, chacun, une déclaration d’accident du travail. Or, la prise en charge de l’accident au titre de la législation sur les risques professionnels leur est refusée.

Ils saisissent chacun le tribunal judiciaire afin de contester ce refus.

Rappel. En matière de télétravail, la règle relative à l’accident du travail s’applique de la même manière. En principe, l’accident survenu sur le lieu où est exercé le télétravail pendant l’exercice de l’activité professionnelle du télétravailleur est présumé être un accident de travail. Toutefois, si la présomption d’imputabilité ne s’applique pas, il appartient au salarié de prouver que l’accident a un lien avec son activité professionnelle. Il faut donc vérifier :

  • l’application de la présomption d’imputabilité ;
  • à défaut, la preuve par le salarié du caractère professionnel de l’accident.

    La solution. Énonçant la solution susvisée, les cours d’appel d’Amiens et de Saint-Denis de La Réunion écartent le caractère professionnel de l’accident en application notamment de l’article L. 411-1 du Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L5211ADD et de l’article L. 1222-9 du Code du travail N° Lexbase : L2077MA8.

    La cour d’appel d’Amiens déduit des faits et de leur temporalité que l’accident s’est produit en dehors de l’exercice de l’activité professionnelle du télétravailleur. En effet, il n’est pas contesté que l’accident a eu lieu après le pointage de fin de journée, de sorte que la salariée n’était plus sous la subordination de son employeur. La présomption d’imputabilité de l’accident au travail ne peut s’appliquer.

    À noter. Les seules déclarations de la salariée concernant l’accident ne peuvent pas permettre d’apporter la preuve de la matérialité du fait accident, de sa survenance par le fait ou à l’occasion du travail et du lien de causalité entre les lésions et le fait accidentel.

    La cour d’appel de Saint-Denis de La Réunion relève que le salarié a cessé sa mission pour motif personnel, aucune obligation ne lui ayant été faite par son employeur de trouver l’origine de la panne ou de renseigner utilement l’opérateur téléphonique. En outre, lors de l’accident, le salarié ne se trouvait pas sous l’aire d’autorité de son employeur, dès lors qu’il ne relevait pas de sa mission inhérente au contrat de travail d’identifier l’origine de la panne informatique.

    Pour aller plus loin :

    • lire B. Fieschi, Télétravail et accidents du travail, Lexbase Social, novembre 2020, n° 842 N° Lexbase : N5118BY9 ;
    • v. fiche pratique, Comment recourir au télétravail ?, Droit du travail N° Lexbase : N9475BX9 ;
    • v. aussi infographie, INFO098, Télétravail, Droit social N° Lexbase : X9543AP7 ;
    • v. formulaire, MDS005, Contrat de télétravailleur (pour un salarié embauché directement pour exercer une activité sous la forme du télétravail), Droit du travail N° Lexbase : X5808APS ;
    • v. ÉTUDE : La définition de l’accident du travail, Le principe de la présomption d’imputabilité, in Droit de la protection sociale, Lexbase N° Lexbase : E95553WS.

     

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