Le Quotidien du 28 juin 2023

Le Quotidien

Avocats/Honoraires

[Brèves] Règlement des honoraires d’avocat par l’ex-époux pour son ex-épouse : incompétence du juge de l’honoraire

Réf. : CA Paris, 9 juin 2023, n° 21/00400 N° Lexbase : A167493E

Lecture: 2 min

N6068BZR

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par Marie Le Guerroué

Le 29 Juin 2023

► Le juge de l'honoraire est compétent pour statuer sur les honoraires réclamés par un avocat à son propre client, mais il n'a pas le pouvoir de statuer sur la mise en œuvre d'une convention signée entre un avocat et un tiers ; et ce, même si l'avocat de l’époux a reconnu auprès de sa consœur que son client réglerait les honoraires dus par son épouse.

Faits et procédure. Des époux, en procédure de divorce, étaient défendus par leurs avocats respectifs. Une décision du bureau d'aide juridictionnelle avait attribué à l’épouse le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale et avait désigné son avocate en cette qualité dans le cadre d'une procédure participative en vue de trouver une solution amiable en matière de divorce. L’avocate soutient que, sa cliente étant démunie, il avait été convenu que ce serait l’époux qui réglerait les honoraires dus par son épouse. Elle conclut qu'elle n'a jamais sollicité le versement de ses honoraires auprès de celui-ci, dont elle n'a jamais été le conseil, mais qu'elle sollicite le paiement d'un honoraire convenu selon accord sur le fondement de l'article 1103 du Code civil N° Lexbase : L0822KZH.

L’ex-époux forme un recours auprès du Premier président de la cour d'appel de Paris à l'encontre de la décision rendue le 29 juin 2021 par le Bâtonnier de l'Ordre des avocats du barreau de Paris, qui a fixé à la somme de 15 000 euros HT le montant total des honoraires dus à l’avocate.

Réponse de la cour d’appel. Le juge de l'honoraire est compétent pour statuer sur les honoraires réclamés par un avocat à son propre client, mais n'a pas le pouvoir de statuer sur la mise en œuvre d'une convention signée entre un avocat et un tiers. Même si l'avocat de l’époux a reconnu auprès de sa consœur que son client réglerait les honoraires dus par son épouse, la mise en œuvre de cet engagement relève du pouvoir du juge du fond et non du pouvoir du juge de l'honoraire.

La cour infirme, par conséquent la décision entreprise en ce qu'elle a statué sur une demande en paiement d'honoraires dirigés contre un tiers.

 

newsid:486068

Commercial

[Brèves] Vente commerciale : quel est le point de départ du délai de prescription ?

Réf. : Cass. com., 14 juin 2023, n° 21-14.841, F-B N° Lexbase : A79879ZT

Lecture: 3 min

N5946BZA

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par Perrine Cathalo

Le 27 Juin 2023

► Aux termes de l'article 2224 du Code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits permettant de l'exercer ; par conséquent, doit être approuvé l'arrêt qui, après avoir énoncé que selon l'article L. 441-3 du Code de commerce, dans sa rédaction alors applicable, la facture mentionne la date à laquelle le règlement doit intervenir et retenu que, la facture litigieuse mentionnant au titre du paiement une certaine date, la créance du vendeur était exigible à compter de celle-ci, fixe le point de départ du délai de prescription à cette date d'exigibilité fixée par le vendeur lui-même.

Faits et procédure. Ayant vendu 22,5 tonnes de harengs surgelés à la société A, la société B a confié l’acheminement de la marchandise à un commissionnaire de transport, la société C, qui en a confié le transport de Pologne vers la France à la société D, assurée par la société E.

N’ayant pas reçu livraison de la marchandise, remise le 24 avril 2013 par erreur à une société F, l’acheteur a refusé de payer la facture émise le 19 avril 2013 par le vendeur.

Après avoir indemnisé le vendeur, qui, par acte subrogatoire du 15 avril 2016, lui a cédé son droit d’agir contre la société D, la société C a assigné cette dernière en responsabilité devant une juridiction lituanienne, laquelle a retenu la responsabilité du transporteur.

Les sociétés D et E ont versé à la société C certaines sommes en exécution de la décision lituanienne.

Le 20 avril 2018, soutenant être subrogées dans les droits du vendeur de la marchandise, les sociétés D et E ont assigné l’acheteur, qui avait entre-temps acquis le fonds de commerce de la société F, en paiement de la facture du 19 avril 2013 et, subsidiairement, en revendication de la marchandise.

Par décision du 6 octobre 2020, la cour d’appel de Paris (CA Paris, 6 octobre 2020, n° 19/10607 N° Lexbase : A88653XM) a déclaré l’action en paiement prescrite et irrecevable.

Les sociétés D et E ont formé un pourvoi devant la Cour de cassation.  

Décision. La Haute juridiction rejette le pourvoi.

Pour ce faire, elle énonce le principe de l’article 2224 du Code civil N° Lexbase : L7184IAC, selon lequel les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

Sur ce point, la Chambre commerciale rappelle qu’il résulte de l'article L. 441-3 du Code de commerce N° Lexbase : L3423MHA, dans sa rédaction alors applicable, que la facture mentionne la date à laquelle le règlement doit intervenir. En l’espèce, la Cour de cassation constate, comme les juges du fond avant elle, que la facture litigieuse mentionne au titre du paiement la date du 19 avril 2013.

Dès lors, la Cour de cassation juge que c’est à bon droit que la cour d’appel a retenu que la créance du vendeur était exigible à compter de cette date, à laquelle il avait lui-même fixé l’éligibilité de sa facture.

newsid:485946

Contentieux de la Sécurité sociale

[Brèves] Pas de nouvelle convocation de la partie non comparante lorsque la première convocation a été faite par lettre recommandée remise à son destinataire

Réf. : Cass. civ. 2, 22 juin 2023, n° 21-19.248, F-B N° Lexbase : A148994W

Lecture: 1 min

N6067BZQ

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par Laïla Bedja

Le 27 Juin 2023

► Il résulte de l’article R. 142-10-3, I, du Code de la Sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2018-928, du 29 octobre 2018, qu'une nouvelle convocation de la partie non comparante ne s'impose pas lorsque la première convocation a été faite par lettre recommandée remise à son destinataire.

Les faits et procédure. Un cotisant a formé opposition à une contrainte décernée par l’Urssaf devant une juridiction chargée du contentieux de la Sécurité sociale.

Ce dernier n’a pas comparu à l’audience et le tribunal judiciaire a rejeté son recours. Ce dernier a alors formé un pourvoi en cassation selon le moyen notamment que si la partie convoquée par lettre simple ne comparaît pas, le greffe la convoque à nouveau par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. En statuant au fond dès la première audience sans l’avoir convoqué à nouveau, par lettre recommandée avec accusé de réception, le tribunal judiciaire a violé l'article R. 142-10-3 du Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L6591LM3.

La décision. Énonçant la solution précitée, la Haute juridiction rejette le pourvoi. Ayant constaté que le cotisant avait été convoqué par lettre recommandée dont l’accusé réception était revenu signé, le tribunal, qui a retenu l’affaire sans procéder à une nouvelle convocation, s’est conformé aux dispositions de l’article R. 142-10-3, I, du Code de la Sécurité sociale.

newsid:486067

Contrats administratifs

[Brèves] Passation d’une concession de services : un trop grand choix offert aux candidats dans l’organisation de l’activité nuit au principe d’égalité de traitement de ceux-ci

Réf. : TA Paris, 8 juin 2023, n° 2309069 N° Lexbase : A2047939

Lecture: 4 min

N5968BZ3

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par Yann Le Foll

Le 27 Juin 2023

► Un trop grand choix offert aux candidats dans l’organisation de l’activité faisant l’objet d’une concession de services nuit au principe d’égalité de traitement et de transparence de la procédure.

Faits. Était ici demandée l’annulation de la procédure de passation lancée par le Sénat en vue de l’attribution d’une concession ayant pour objet l’exploitation des terrains de tennis situés dans le Jardin du Luxembourg.

Rappel. Aux termes de l’article L. 3111-1 du Code de la commande publique N° Lexbase : L8490LQI, « La nature et l’étendue des besoins à satisfaire sont déterminées avant le lancement de la consultation en prenant en compte des objectifs de développement durable dans leurs dimensions économique, sociale et environnementale ».

Les concessions sont soumises aux principes de liberté d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, qui sont des principes généraux du droit de la commande publique. Pour assurer le respect de ces principes, la personne publique doit apporter aux candidats à l’attribution d’une concession, avant le dépôt de leurs offres, une information suffisante sur la nature et l’étendue des besoins à satisfaire. Il lui appartient à ce titre d’indiquer aux candidats les caractéristiques essentielles de la concession.

Faits. Le titulaire de la concession devait, aux termes des documents de consultation, assurer l’organisation, le développement et la promotion d’une pratique et d’un enseignement du tennis inscrits dans la vie locale et largement ouverts au public  et, notamment, réserver aux associations sportives du Sénat 25 % des créneaux disponibles pour l’utilisation des courts de tennis, à la pratique libre du tennis, 35 % des créneaux restants et à l’enseignement du tennis au maximum 65 % des créneaux restants. 

La société Paris Tennis, dont l’offre pour l’attribution de la concession a été rejetée, a demandé l’annulation de la procédure de passation.

Position TA. La juge du référé précontractuel, tout d’abord, rappelle que la personne publique devait apporter aux candidats à l’attribution d’une concession, avant le dépôt de leurs offres, une information suffisante sur la nature et l’étendue des besoins à satisfaire et indiquer aux candidats les caractéristiques essentielles de la concession (CE, 2°-7° ch. réunies, 6 novembre 2020, n° 437946, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A009634C).

Elle relève, ensuite, s’agissant du l’organisation de l’enseignement du tennis, que les candidats étaient autorisés à choisir entre la location de l’ensemble des créneaux à des tiers, l’utilisation de ces créneaux par leur propre école de tennis, ou bien une organisation mixte avec l’utilisation d’une partie des créneaux par leur école de tennis et la location des créneaux restants à des tiers.

Elle considère que le choix offert aux candidats sur l’organisation de l’enseignement du tennis ne leur permettait pas de présenter des offres comparables au regard des trois critères de jugement des offres définis par le pouvoir adjudicateur dans le règlement de la consultation, soit l’intérêt du projet pour le Jardin du Luxembourg et les usagers des terrains de tennis, la robustesse de l’offre financière et la qualité de l’organisation de l’exploitation.

Décision TA. La juge du référé précontractuel en conclut, qu’en laissant aux candidats un tel choix sur l’organisation de l’enseignement du tennis, le Sénat n’a pas prévu des modalités d’examen des offres garantissant l’égalité de traitement des candidats et la transparence de la procédure et annule la procédure de passation de la concession.

Précision. A l’inverse, concernant la validité d’un critère de jugement des offres relatif aux coûts supplémentaires induits pour l’autorité concédante par d’éventuelles prestations complémentaires, le Conseil d’Etat a légitimement pu constater que les dispositions de l’article L. 3111-1 du Code de la commande publique sur la définition des besoins en matière de commande publique étaient respectées (CE, 2°-7° ch. réunies, 26 février 2020, n° 436428, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A49143G4 et lire le commentaire de J. Abrassart N° Lexbase : N3105BYN).

newsid:485968

Covid-19

[Brèves] Confinement : un État ne peut conditionner l’indemnisation à l’imposition d’une mesure émanant de ses propres autorités

Réf. : CJUE, 15 juin 2023, aff. C-411/22, Thermalhotel Fontana Hotelbetriebsgesellschaft mbH N° Lexbase : A097593I

Lecture: 3 min

N5979BZH

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par Laïla Bedja

Le 27 Juin 2023

► L'indemnisation, financée par l'État, qui est accordée aux travailleurs salariés pour les préjudices patrimoniaux causés par l'entrave à leur activité professionnelle durant leur confinement en tant que personnes malades ou suspectées d'être malades de la Covid-19 ou d'être contaminées par celle-ci ne constitue pas une « prestation de maladie », visée à l’article 3, §1, a) du Règlement n° 883/2004, et ne relève donc pas du champ d'application de ce Règlement ;

Les articles 45 TFUE et 7 du Règlement n° 492/2011, du 5 avril 2011, s’opposent à la réglementation d’un État membre en vertu de laquelle l’octroi d’une indemnisation pour le manque à gagner subi par les travailleurs en raison d’un confinement ordonné à la suite d’un résultat positif au test de dépistage de la Covid-19 est subordonné à la condition que l’imposition de la mesure de confinement soit ordonnée par une autorité de cet État membre au titre de cette réglementation.  

Les faits et procédure. Le litige oppose l’établissement Thermalhotel Fontana à l’autorité administrative autrichienne au sujet du refus de cette dernière d’indemniser l’établissement pour le manque à gagner subi par ses employés pendant les périodes de confinement à leurs domiciles respectifs en Slovénie et Hongrie, imposées en lien avec la pandémie de Covid-19 par les autorités compétentes de ces États membre. Les salariés avaient été testés positifs à la Covid-19 et confinés à leur domicile en Slovénie et Hongrie en application du droit local. Durant leur confinement, l’hôtel a continué à verser leur rémunération aux employés concernés conformément au droit du travail autrichien.

S’estimant subrogé dans le droit à indemnisation de ses employés du fait du versement de leur salaire, l’hôtel a sollicité de l’autorité administrative autrichienne pertinente l’indemnisation du manque à gagner subi par ses employés durant lesdites périodes, en application de l’EpiG (loi autrichienne applicable). Les demandes ont été rejetées par l’autorité administrative.

La Cour administrative autrichienne a décidé de surseoir à statuer en attendant que la Cour se prononce sur la question de savoir si l’indemnisation accordée aux salariés pendant leur confinement constitue une « prestation de maladie » au sens du règlement portant sur la coordination des systèmes de Sécurité sociale (Règlement n° 883/2004 N° Lexbase : L7666HT4) et, donc, si cette indemnisation relève du champ d’application de ce Règlement. Si tel était le cas, la juridiction de renvoi estime que, conformément à ces dispositions, les autorités autrichiennes devraient tenir compte d’une décision de confinement émanant des autorités des autres États membres comme si elle avait été prise par une autorité nationale.

Dans la négative, la juridiction de renvoi demande si le principe de la libre circulation des travailleurs, reflété aux articles 45 TFUE N° Lexbase : L2693IPG et 7 du Règlement n° 492/2011 N° Lexbase : L3701IQ7, s’oppose à la réglementation d’un État membre qui conditionne l’octroi de l’indemnisation à ce que la mesure de confinement ait été imposée par le même État membre.

La décision. La Cour répond aux questions en formulant les réponses précitées.

newsid:485979

Fiscalité du patrimoine

[Brèves] Déclaration d’ISF et respect des droits de la défense du contribuable

Réf. : Cass. com., 1er juin 2023, n° 21-19.311, FS-B N° Lexbase : A63879XT

Lecture: 4 min

N5992BZX

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par Maxime Loriot, Notaire Stagiaire - Doctorant en droit international privé à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

Le 27 Juin 2023

► Par un arrêt rendu le 1er juin 2023, la Chambre commerciale de la Cour de cassation était amenée à apprécier un litige relatif à l’étendue des pouvoirs de l’administration fiscale relatif aux demandes d’éclaircissements ou de justifications en matière d’ISF.

Rappel des faits et procédure :

  • un contribuable monégasque est porteur de 99,9 % des parts d’une société civile immobilière française. À cet effet, il souscrit chaque année une déclaration au titre de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) ;
  • à la suite d’un contrôle, l’administration fiscale a demandé au contribuable la fourniture de justificatifs relatifs au passif déclaré sous l’intitulé « capital non libéré ». Face à l’absence de réponse de celui-ci, elle lui a adressé une proposition de rectification au titre des années 2012 à 2014 ;
  • le contribuable a assigné l’administration fiscale afin d’obtenir la décharge des impositions et pénalités contestées. En première instance, les juges du fond ont débouté le contribuable de ses prétentions. Par conséquent, celui-ci a interjeté appel ;
  • en appel, la cour d’appel d’Aix-en-Provence (CA Aix-en-Provence, 11 mai 2021, n° 18/16830 N° Lexbase : A47204RA) a débouté le requérant de ses prétentions. Elle a notamment estimé que les dispositions de l’article L. 23 A du LPF N° Lexbase : L9087LKR ne faisaient pas obstacle à la mise en œuvre de la procédure de contrôle prévue par l’article L10, eu égard à son caractère facultatif. Dès lors, elle en déduit une absence de détournement de procédure et d’irrégularité de la procédure d’imposition.
  • en conséquence, le contribuable a formé un pourvoi en cassation. Au soutien de ses prétentions, il faisait notamment valoir que la Cour d’appel aurait méconnu l’article L. 10 du LPF N° Lexbase : L3156KWS, L. 23 du même Code et l’article 768 du CGI N° Lexbase : L8137HLX dès lors que le passif déductible de l’assiette de l’ISF pouvait être justifié par tous modes de preuves. Ainsi, il estimait que la preuve pouvait être valablement rapportée par le biais de la production du grand livre de la SCI faisant état d’un capital non libéré.

Question de droit. Était posée à la Chambre commerciale de la Cour de cassation la question suivante : L’erreur consistant pour l'administration à fonder sa demande sur l'article L. 10 du LPF, au lieu de l'article L. 23 A du même Livre, emporte-t-elle décharge des droits mis en recouvrement à la suite d’une rectification de la déclaration d’ISF?

Solution

La Chambre commerciale de la Cour de cassation rend un arrêt de rejet. Elle rappelle tout d’abord que l’administration a la faculté de demander aux redevables de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) tous renseignements, justifications ou éclaircissements relatifs aux déclarations qu’ils ont souscrites sur le fondement de l’article L. 10 du LPF.

Toutefois, c'est sur le fondement de l'article L. 23 A du même Livre qu'elle doit, si elle l'estime nécessaire, leur adresser une demande d'éclaircissements et de justifications portant sur la composition de l'actif et du passif de leur patrimoine ou sur le caractère insuffisant de la réponse à cette demande.

Or, en l’espèce, si selon l’administration fiscale la preuve de l'existence d'une dette a bien été rapportée par la production de la page du bilan de la SCI correspondante, il restait à l'administration de s'assurer que cette dette n'avait pas déjà été prise en compte dans la valorisation de la SCI, soit en la mettant au passif de la SCI, soit en minorant l’actif.

Les juges de la Haute Cour en déduisent que la production d’un extrait du grand livre général portant la somme litigieuse sous l’intitulé « capital non libéré », ne permettait pas de procéder à un examen global de la situation comptable de la SCI.

newsid:485992

Notaires

[Brèves] Cession à 1euro du droit de présentation d’un office notarial nouvellement créé : le risque d’une nullité absolue

Réf. : Cass. civ. 1, 7 juin 2023, n° 21-16.833, FS-B N° Lexbase : A69159YR

Lecture: 3 min

N5994BZZ

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par Claire-Anne Michel, Maître de conférences, Université Grenoble-Alpes, Centre de recherches juridiques (CRJ)

Le 27 Juin 2023

► La convention de présentation conclue entre deux diplômés notaires alors que le cédant a bénéficié de la création d’un office et n’a jamais exercé la profession et que le cessionnaire n’était pas en rang utile pour pouvoir bénéficier d’une telle création est illicite, la convention est nulle de nullité absolue, le ministre de la Justice peut donc la demander.

C’est à l’aune d’une cession de droit de présentation liant deux notaires que s’est posée une question de droit des obligations mêlant ordre public et théorie des nullités.

Faits et procédure. En l’espèce, un diplômé notaire fut tiré au sort pour bénéficier de la création d’un office mais, ne souhaitant pas exercer, il céda à un autre diplômé notaire, qui n’avait pas eu sa chance, son droit de présentation moyennant le prix d’un euro. Face au silence du ministère de la Justice à qui le cessionnaire demandait sa nomination, ce dernier avait saisi les juridictions administratives, lesquelles avaient sursis à statuer tant que les juridictions judiciaires ne s’étaient pas prononcées sur la licéité de la convention. Celles-ci avaient non seulement relevé la contrariété à l’article 1162 du Code civil N° Lexbase : L0884KZR mais également prononcé la nullité du traité de cession.

Solution. S’agissant du moyen tiré de la violation de l’article 1162 du Code civil, la Cour de cassation casse l’arrêt au visa de cette disposition. Elle considère que l’article 52 de la loi du 6 août 2015 vise à permettre à des candidats notaires de s’installer librement « dans la limite d’un rythme de création recommandé, et qui doit être compatible avec une augmentation progressive du nombre de professionnels dans la zone concernée, afin de ne pas bouleverser les conditions d’activités des offices existants ». Elle rappelle en outre qu’en présence d’un nombre de demandes pour une zone géographique déterminée supérieure aux candidatures, un tirage au sort est effectué. Or, le notaire cessionnaire avait déposé une demande portant sur un office créé à Paris, mais n’était pas en rang utile pour bénéficier d’une telle création. Par conséquent, la cession en cause lui permettait ainsi de détourner la procédure. En effet, à l’absence de rang utile, s’ajoutaient des considérations propres au cédant qui n’avait reçu aucun client, instrumenté aucun acte depuis sa prestation de serment, pas plus qu’ouvert un compte à la Caisse des dépôts et consignations et avait enfin fait part à la Chambre des notaires de son souhait de renoncer à s’installer comme notaire. Aussi la convention contrevenait-elle « aux dispositions d’ordre public ayant pour objet de prévoir des modalités de départage entre demandes disposant, en vertu de la loi, d’un égal droit à être nommé », elle était donc illicite.

Mais s’agissait-il d’une nullité absolue ou d’une nullité relative ? C’est alors au nouvel article 1179 du Code civil N° Lexbase : L0899KZC, faisant application de la théorie moderne des nullités, qu’il fallait faire appel. La Cour de cassation considère que la règle violée est une règle ayant pour « objet la sauvegarde de l’intérêt général », la nullité était donc absolue. Ce faisant, le ministre de la Justice pouvait exercer l’action en nullité, celle-ci étant ouverte à toute personne justifiant d’un intérêt (C. civ., art. 1180 N° Lexbase : L0898KZB).

Sur l’autre moyen concernant la dispense de l’État en matière de représentation par avocat, v. M. Le Guerroué, brève à paraître dans la revue Lexbase Avocats, n° 338, 6 juillet 2023 N° Lexbase : N5914BZ3.

newsid:485994

Procédure pénale

[Brèves] Délibérations de la cour d’assises : l’interdiction de conserver l’argumentation des parties est conforme à la constitution

Réf. : Cass. crim., 21 juin 2023, n° 22-87.423, F-B N° Lexbase : A7327947

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N6060BZH

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par Adélaïde Léon

Le 27 Juillet 2023

► Est conforme à la Constitution l’article 347 du Code de procédure pénale qui prévoit que le président conserve, en vue de la délibération, la décision de renvoi et, en cas d’appel, l’arrêt rendu par la cour d’assises ayant statué en premier ressort ainsi que la feuille de motivation qui l’accompagne. Ces documents conservés n’émanent ni du ministère public ni des parties mais constituent des actes des juridictions d’instruction et de jugement. Les dispositions en cause sont la conséquence du caractère oral des débats devant la cour d’assises.

Rappel de la procédure. Reconnu coupable de viols et agressions sexuelles aggravées un individu a été condamné par la cour d’assises de l’Isère à douze ans de réclusion criminelle et une interdiction définitive d’activité en lien avec les mineurs.

L’intéressé a formé un pourvoi contre cet arrêt de condamnation ainsi que contre l’arrêt de prononçant sur les intérêts civils.

À cette occasion, l’accusé a présenté une question prioritaire de constitutionnalité.

Motifs de la QPC. La question portait sur la conformité de l’article 347 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L1482MA7 à la Constitution et plus spécifiquement aux droits de la défense et au droit à un procès équitable, garantis par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 N° Lexbase : L1363A9D.

L’article 347 organise la clôture des débats devant la cour d’assises et prévoit notamment que le président conserve en vue de la délibération la décision de renvoi et, en cas d’appel, l’arrêt rendu par la cour d’assises ayant statué en premier ressort ainsi que la feuille de motivation qui l’accompagne.

La QPC présentée par l’accusé portait sur le fait de savoir si ces dispositions n’étaient pas contraires aux droits de la défense et au droit à un procès équitable en ce qu’elles interdisent au président de conserver également une trace écrite de l’argumentation de la défense établie par celle-ci et notamment une critique de la motivation de première instance dont la défense sollicite qu’elle soit conservée par la cour d’assises pendant le délibéré ?

En d’autres termes, dans le cas d’un arrêt de condamnation, les droits de la défense ne seraient-ils par lésés par le fait que la cour d’assises conserve, lors de la délibération, cette décision rendue en premier ressort sans disposer de l’argumentation critique de la défense ?

Décision. La Chambre criminelle refuse de renvoyer la QPC au Conseil constitutionnel au motif que la question ne présente pas un caractère sérieux.

La Cour rappelle que le président de la cour d’assises conserve la décision de renvoi ainsi que la décision rendue en premier ressort et la feuille de motivation qui l'accompagne, lorsque la juridiction statue en appel, que cet appel concerne une décision de condamnation ou d'acquittement.

La Haute juridiction souligne également qu’au cours de la délibération, la cour d’assises peut, si elle l’estime nécessaire, examiner une pièce de la procédure. Le dossier, conservé entre les mains du greffier, est alors transporté dans la salle des délibérations pour être rouvert en présence du ministère public et des avocats des parties.

Une fois les débats clos, les dispositions en cause interdisent à la cour d’assises de conserver au cours de la délibération tout document résumant une argumentation qui lui serait remise, et ce, qu’il s’agisse de la défense, du ministère public ou de la partie civile. Dès lors, le principe d’égalité des droits entre les parties est respecté.

La Chambre criminelle estime que la disposition en cause ne méconnaît pas non plus les droits de la défense, qui, lors des débats devant la cour d’assises, prend la parole en dernier.

La Cour rappelle que les seuls documents conservés sont des actes des juridictions d’instruction et de jugement, dont il est donné connaissance à l’ouverture des débats devant la cour d’assises et dont le contenu est débattu tout au long de l’audience.

Pour la Chambre criminelle, les dispositions contestées sont ni plus ni moins que la conséquence du caractère oral des débats devant la cour d’assises et ne méconnaissent aucun droit ni aucune liberté protégée par la Constitution.

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Régimes matrimoniaux

[Brèves] Liquidation-partage : absence de fixation de la date de jouissance divise = recevabilité de la demande de réévaluation d’une créance ou récompense

Réf. : Cass. civ. 1, 21 juin 2023, n° 21-24.851, FS-B N° Lexbase : A983793Q

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 28 Juin 2023

► La décision qui se prononce sur une récompense calculée selon le profit subsistant, sans fixer la date de jouissance divise, est dépourvue de l'autorité de chose jugée sur l'évaluation définitive de cette récompense ;
► il en est de même concernant la décision qui se prononce sur une créance d'un époux à l'encontre de l'indivision au titre de dépenses de conservation, sans fixer la date de jouissance divise.

Les solutions ainsi dégagées dans l’arrêt rendu le 21 juin 2023 méritent une attention particulière en ce qu’elles révèlent toute l’importance de la fixation de la date de jouissance divise en matière de liquidation-partage, en mettant en évidence les conséquences de l’absence de fixation de cette date, à savoir la recevabilité des demandes de réévaluation des récompenses ou créances alors fixées.

Dans cette affaire, un jugement du 15 janvier 2003 avait prononcé le divorce des époux, mariés sans contrat préalable. Un jugement définitif en date du 26 août 2011 avait été rendu dans le cadre des opérations de comptes, liquidation et partage de leurs intérêts patrimoniaux.

L’époux avait par la suite engagé une nouvelle procédure concernant les opérations de liquidation-partage, par laquelle il demandait notamment, d’une part la réévaluation d'une récompense fixée à son profit au titre d'un solde de prêt ayant financé des travaux ; d’autre part la réévaluation d'une créance fixée à son profit envers l'indivision post-communautaire.

La cour d’appel de Rennes avait déclaré ces demandes irrecevables, au regard de l’autorité de la chose jugée, au motif que le jugement du 26 août 2011 avait définitivement statué sur la valeur de ces créance et récompense.

L’époux obtient finalement gain de cause devant la Cour suprême, qui censure la décision des juges rennais, au visa des articles 829 N° Lexbase : L9961HNA, et 1351, devenu 1355 N° Lexbase : L1011KZH, du Code civil, combinés d’une part, avec l’article 1469, alinéas 1 et 3, du même code N° Lexbase : L1606AB4 à propos de l’évaluation de la récompense, et d’autre part l’article 815-13, alinéa 1er, à propos de l’évaluation de la créance de l’époux sur l’indivision post-communautaire.

En effet, pour rappel, l’article 829 du Code civil dispose « En vue de leur répartition, les biens sont estimés à leur valeur à la date de la jouissance divise telle qu'elle est fixée par l'acte de partage, en tenant compte, s'il y a lieu, des charges les grevant. Cette date est la plus proche possible du partage. Cependant, le juge peut fixer la jouissance divise à une date plus ancienne si le choix de cette date apparaît plus favorable à la réalisation de l'égalité. »

Par ailleurs, pour l’évaluation des récompenses entre époux, aux termes de l’article 1469, alinéas 1 et 3 : « la récompense est, en général, égale à la plus faible des deux sommes que représentent la dépense faite et le profit subsistant. Elle ne peut être moindre que le profit subsistant quand la valeur empruntée a servi à acquérir, à conserver ou à améliorer un bien qui se retrouve, au jour de la liquidation, dans le patrimoine emprunteur. Si le bien acquis, conservé ou amélioré a été aliéné avant la liquidation, le profit est évalué au jour de l'aliénation ; si un nouveau bien a été subrogé au bien aliéné, le profit est évalué sur ce nouveau bien.

Enfin, selon l’article 1351, devenu 1355, du Code civil, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement.

Selon la Haute juridiction, il en résulte que la décision qui se prononce sur une récompense calculée selon le profit subsistant sans fixer la date de jouissance divise est dépourvue de l'autorité de chose jugée sur l'évaluation définitive de cette récompense.

L’arrêt est donc censuré en ce qu’il avait déclaré irrecevable la demande tendant à la réévaluation de la récompense au titre du remboursement d'un emprunt afférent à un immeuble commun, au motif que le jugement du 26 août 2011 avait définitivement statué sur la valeur de cette récompense, alors que, comme le relève la Haute juridiction, le jugement du 26 août 2011 n'avait pas fixé la date de la jouissance divise.

De la même manière, s’agissant de l’évaluation d'une créance envers une indivision (en l’espèce, indivision post-communautaire), la Haute juridiction vise l’article 815-13, alinéa 1er, du Code civil N° Lexbase : L1747IEG selon lequel : « Lorsqu'un indivisaire a avancé de ses deniers les sommes nécessaires à la conservation d'un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l'équité et eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l'aliénation.

C’est donc pareillement, au visa des articles 829, 815-13, alinéa 1er, et 1351, devenu 1355, du Code civil, que la Haute juridiction censure l’arrêt en ce qu’il avait déclaré irrecevable la demande de l’époux tendant à la réévaluation d'une créance à son profit envers l'indivision post-communautaire au titre du remboursement d'emprunts souscrits pour l'acquisition d'un immeuble commun, au motif que le jugement du 26 août 2011 avait définitivement statué sur la valeur de cette créance, alors que, comme le relève la Cour suprême, le jugement du 26 août 2011 n'avait pas fixé la date de la jouissance divise.

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