Le Quotidien du 16 décembre 2021

Le Quotidien

Actualité judiciaire

[A la une] Claude Guéant, des ors de la République aux 9 m² d’une cellule de la prison de la Santé

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N9829BYP

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par Vincent Vantighem

Le 21 Décembre 2021

Son avocat l’avait prévenu une semaine auparavant. « J’avais reçu un courrier m’indiquant que la Justice mettait à exécution la décision... », détaille sobrement Philippe Bouchez El Ghozi. Claude Guéant a donc pris ses responsabilités. Et lundi 13 décembre, aux alentours de 9h, il s’est présenté de lui-même à la maison d’arrêt de la Santé (Paris, 14e arrondissement) pour être incarcéré.

            Ancien préfet, ancien directeur général de la police nationale, ancien secrétaire général de l’Élysée, ancien ministre de l’Intérieur : à 76 ans, celui que l’on surnommait « Le Cardinal » ou encore « Le vice-président » du temps de sa superbe auprès de Nicolas Sarkozy savait bien que s’il ne déferait pas à la convocation, c’est encadré de deux policiers et les menottes aux poignets qu’il risquait de devoir intégrer sa cellule individuelle. À l’intérieur ? Un lit dur, une douche, un W.C., un téléviseur et un téléphone fixe duquel il ne peut composer que quatre numéros préalablement « validés » par l’administration pénitentiaire. Comme n’importe quel détenu, finalement...

            Il n’imaginait sans doute pas ça en 2002 quand il s’est mis à piocher, tous les mois pendant deux ans, dans une enveloppe de billets. À l’époque, Claude Guéant était directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy au ministère de l’Intérieur. C’est là qu’il a décidé de remettre au goût du jour une pratique ancestrale pourtant interdite quelques années plus tôt par Lionel Jospin quand celui-ci était à Matignon. Celle des « primes en liquide », comme l’ont surnommée les médias. Le principe était simple : tous les mois, le directeur de la police nationale livrait une enveloppe de 10 000 euros en billets au cabinet du ministre de l’Intérieur. Le grisbi devait servir à rémunérer des indics’, à financer des missions de surveillance ou des investigations ordonnées en direct par le ministre et, donc, sous les radars habituels. Sauf que Claude Guéant s’est servi dans l’enveloppe. 5 000 euros tous les mois. Évidemment sans aucune déclaration au fisc. Quant au reste, il était disséminé auprès de trois de ses plus proches collaborateurs d’alors.

De l’or, une montre de luxe et une assurance-vie

            Personne n’en a rien su jusqu’à ce que la Justice décide de perquisitionner son domicile dans le cadre d’une autre affaire, celle du prétendu financement libyen de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007. C’est là qu’ils ont découvert des factures pour du mobilier payé en liquide… C’est là, donc, que Claude Guéant n’a eu d’autre choix que de reconnaître les faits… En 2017, la sanction pour « détournement de fonds publics » est tombée : deux ans de prison dont un an avec sursis, 75 000 euros d’amende et 210 000 euros de dommages et intérêts à régler solidairement avec ses coprévenus. Il a bien déposé un pourvoi en cassation. Mais celui-ci a été rejeté en 2019.

            Et depuis, l’ancienne éminence grise de la droite sarkozyste galère à payer ses dettes. Et c’est pour cela qu’il a été embastillé à la Santé. Chaque mois, une retenue de 3 000 euros sur sa retraite de 5 500 euros sert à régler ses comptes. Mais, selon un rapport récent de la chambre de l’application des peines, il dispose de « sources de revenus complémentaires » et aurait pu « régler davantage » et « plus tôt ». Le 9 novembre, après avoir réexaminé sa situation, la Justice a donc décidé de révoquer une partie de son sursis (trois mois) et une partie de la liberté conditionnelle dont il avait bénéficié lors de sa condamnation (six mois). Trois et six qui font neuf : voilà l’ancien ministre condamné à passer neuf mois en cellule. Mais pour en arriver là, la Justice n’a pas eu besoin de calculatrice. Elle a juste mis en avant le fait que Claude Guéant avait récemment vendu de l’or, une montre et récupéré des fonds d’une assurance-vie, pour justifier sa décision d’incarcération.

L’ombre d’une condamnation dans l’affaire dite « des sondages de l’Élysée »

            Une décision qui rend Philippe Bouchez El Ghozi très amer. « Contrairement à ce qui a été dit, Claude Guéant est complètement étranglé financièrement. Il lui reste 1 622 euros par mois pour vivre. Il ne peut pas payer un euro de plus. Ce n’est pas possible ! » Les fonds de son assurance-vie ? Il s’en est servi pour aider ses deux enfants qui sont, selon lui, dans une « situation dramatique », selon sa défense. Quant au produit de la vente de l’or et de la montre de luxe, il a servi à payer une femme de ménage qu’il n’avait pas « le courage » de licencier.

            Mais la Justice, elle, ne veut pas croire qu’un grand commis de l’État, qui a émargé pendant une bonne décennie à plus de 8 000 euros mensuels, soit aujourd’hui fauché comme les blés. Le problème, c’est qu’il ne peut pas, non plus, compter sur la vente de son appartement parisien situé dans le 16e arrondissement. Pas plus que sur celle de sa résidence secondaire dans le Maine-et-Loire. Les deux biens ont fait l’objet de saisies conservatoires dans le cadre de la procédure sur le prétendu financement libyen… « Je vous assure qu’il n’a plus rien. C’est triste et dramatique », lâche Philippe Bouchez El Ghozi.

            « Triste » car Claude Guéant ambitionnait de passer les fêtes de Noël en famille et qu’il sera sans doute seul en cellule pour réveillonner. « Dramatique » car sa situation illustre à quel point il a été abandonné par toute la Sarkozie en l’espace de moins de dix ans. Lundi, quand la nouvelle est tombée, pas un seul ancien responsable politique de l’UMP n’a pris la peine de prendre la parole pour le défendre et dénoncer sa situation.         

            Son salut viendra peut-être de ses amis non-politiques. « J’ai été contacté par plusieurs de ses proches qui tentent de réunir la somme qu’il doit encore à la Justice – environ 115 000 euros – afin de l’aider à sortir de prison », explique ainsi son avocat. Encore faudrait-il qu’un juge d’application des peines soit sensible à cet argument maintenant que la Justice a estimé qu’il avait « menti » sur ses ressources. À moins que Claude Guéant ne parvienne finalement à convaincre que son état est « incompatible » avec sa détention. Alors qu’il fêtera ses 77 ans en janvier 2022, l’ancien ministre est sujet à des problèmes de santé, notamment cardiaques. « Selon ses propres médecins, il ne peut pas être détenu », assure Philippe Bouchez El Ghozi. Il pourrait donc réclamer une expertise médicale afin de convaincre la Justice de cela.

            Dans le cas contraire, Claude Guéant devra partager son quotidien de détenus avec d’autres célèbres prisonniers de la Santé. Le chanteur Jean-Luc Lahaye, récemment mis en examen pour « viols sur mineurs ». Ou encore l’ancien maire (UMP) de Draveil (Essonne), Georges Tron, lui aussi, condamné pour « viols ». C’est peut-être en leur compagnie qu’il passera donc les prochains mois. Et qu’il découvrira alors la décision que lui réserve la 32e chambre du tribunal judiciaire de Paris dans l’affaire dite « des sondages de l’Élysée ». Considéré comme le pivot de ce dossier lors du procès qui vient de s’achever, Claude Guéant a vu le parquet alourdir ses réquisitions à son encontre après avoir appris « l’évolution de sa situation financière ». C’est désormais une peine d’un an de prison ferme et de 10 000 euros d’amende qui a été réclamée contre lui. Sur ce sujet, la décision sera connue le 21 janvier.

newsid:479829

Contrats et obligations

[Brèves] Point de départ de l’action paulienne : la publication de l’acte frauduleux fait courir le délai de prescription

Réf. : Cass. civ. 3, 8 décembre 2021, n° 20-18.432, FS-B (N° Lexbase : A46157EN)

Lecture: 3 min

N9817BYA

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par Claire-Anne Michel, Maître de conférences, Université Grenoble-Alpes, Centre de recherches juridiques (CRJ)

Le 15 Décembre 2021

► En présence d’un acte frauduleux publié au service de la publicité foncière, cette publication fait courir le délai de prescription de l’action en inopposabilité exercée sur le fondement de l’action paulienne.

Faits et procédure. Hier (C. civ. anc. art. 1167 N° Lexbase : L1269ABM), comme aujourd’hui (C. civ. art. 1341-2 N° Lexbase : L0672KZW), le législateur ne dit mot de la prescription de l’action paulienne. Aussi est-il revenu à la jurisprudence de préciser la nature de l’action ou encore le point de départ de la prescription. Si l’arrêt rendu le 8 décembre 2021 procède à certains rappels, il apporte également une précision.

En l’espèce, après s’être portée caution mais avant d’être appelée en paiement, une personne avait consenti à ses enfants une donation-partage de la nue-propriété d’un immeuble d’habitation lui appartenant. Quelques années plus tard, et après la mise en liquidation judiciaire du débiteur, le créancier assigna la caution en inopposabilité de la donation-partage, action que la cour d’appel considéra comme étant prescrite (CA Caen, 2 avril 2020, n° 18/02906 N° Lexbase : A66923K3).

Quel est le point de départ de la prescription ? Là résidait tout l’enjeu du débat : est-ce le jour de la publicité de l’acte au service de la publicité foncière ou le jour de la connaissance effective du créancier de l’existence de l’acte ?

Solution. L’arrêt rendu le 8 décembre 2021 par la troisième chambre civile de la Cour de cassation rejette le pourvoi. Il procède à des rappels de solutions désormais acquises. D’une part, l’action paulienne est de nature personnelle et est donc soumise à l’application de l’article 2224 du Code civil (N° Lexbase : L7184IAC). En conséquence, la prescription quinquennale court à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître l’existence des faits lui permettant de l’exercer. D’autre part et quant au point de départ de la prescription, l’arrêt rappelle une solution initiée il y a peu (Cass. civ. 3, 12 novembre 2020, n° 19-17.156, FS-P+B+I N° Lexbase : A524534Z) : « lorsque la fraude du débiteur a empêché le créancier d’exercer son action […], le point de départ […] est reporté au jour où il a effectivement connu l’existence de l’acte en fraude de ses droits ». Mais ce report est-il concevable lorsque l’acte est soumis à publicité et que la publication est intervenue ? À cet égard, la Cour de cassation apporte une précision : « l’acte de donation-partage ayant été régulièrement porté à la connaissance des tiers du fait de sa publication au service de la publicité foncière […], [le créancier] était réputé avoir connaissance de son existence dès cette date ». Ainsi, en présence d’un acte soumis à publicité et de régularité de la publication, il ne saurait y avoir report du point de départ de la prescription.

newsid:479817

Électoral

[Brèves] Bulletins de vote ne comportant pas le titre de la liste : la nullité n’est pas automatique !

Réf. : CE, 3° et 8° ch.-r., 10 décembre 2021, n° 454363, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A83347EE)

Lecture: 2 min

N9776BYQ

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par Yann Le Foll

Le 15 Décembre 2021

► Des bulletins ne comportant pas le titre de la liste ne sauraient entraîner leur nullité de manière automatique dès lors qu’ils comportent une désignation de la liste suffisamment précise et dépourvue d'ambiguïté pour les électeurs.

Faits. Le requérant demande au Conseil d'État d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées les 20 et 27 juin 2021 en vue de l'élection des membres du conseil régional de Normandie. Il soutient que les bulletins de vote déposés en faveur de la liste conduite par un candidat ne doivent pas être pris en compte dans le résultat du dépouillement au motif qu'ils ne comportaient pas le titre « Normandie Terre d'Avenir » de cette liste. 

Rappel. Aux termes de l'article L. 66 du Code électoral (N° Lexbase : L5163IZA) : « Les bulletins ne contenant pas une désignation suffisante [...] n'entrent pas en compte dans le résultat du dépouillement ». Ainsi, l'absence des noms des candidats au mandat de conseiller communautaire sur plusieurs bulletins de vote litigieux peut, compte tenu du faible écart de voix entre les listes, être de nature à altérer la sincérité du scrutin justifiant l’annulation de celui-ci (CE, 2° et 7° ch.-r., 4 février 2021, n° 443446, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A81734EG).

Position CE. Il résulte toutefois de l'instruction que ces bulletins comportaient les nom et prénom du candidat désigné tête de liste régionale et ceux de chacun des candidats composant cette dernière, répartis par section départementale et dans l'ordre de présentation, et qu'ils précisaient le nom des partis politiques nationaux soutenant cette même liste.

Par suite, ces bulletins comportaient une désignation de la liste suffisamment précise et dépourvue d'ambiguïté pour les électeurs. Ils ne peuvent dès lors être regardés comme étant, par eux-mêmes, nuls. Il n'est par ailleurs ni établi, ni même allégué que l'omission de l'intitulé de la liste serait constitutive d'une manœuvre. 

Décision. Dans ces conditions, les suffrages émis au moyen des bulletins litigieux doivent être regardés comme valablement exprimés.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les élections parlementaires, Le manque d'information claire sur l'intention de vote, in Droit électoral, (dir. P. Tifine), Lexbase (N° Lexbase : E2019A8B).

newsid:479776

Entreprises en difficulté

[Brèves] Extension de procédures : condition à la jonction des procédures de liquidation judiciaire ouvertes après résolution du plan

Réf. : Cass. com., 8 décembre 2021, n° 20-17.766, FS-B (N° Lexbase : A46247EY)

Lecture: 4 min

N9806BYT

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par Vincent Téchené

Le 15 Décembre 2021

► Lorsqu'une procédure de redressement judiciaire a été étendue à d'autres débiteurs en application de l'article L. 621-2, alinéa 2, du Code de commerce (N° Lexbase : L0357LTE), et qu'un même plan a été arrêté en faveur des débiteurs soumis à la procédure unique, l'extension de procédure cesse lorsque ce plan est résolu ;

Si la jonction des procédures de liquidation judiciaire ouvertes après la résolution du plan peut être prononcée, c'est à la condition de caractériser l'existence d'une confusion des patrimoines par des faits postérieurs au jugement arrêtant le plan.

Faits et procédure. Un jugement du 15 octobre 2004 a ouvert le redressement judiciaire d’une société, lequel a été, par trois jugements du 5 novembre 2004, étendu, en raison de la confusion de leurs patrimoines, à une société civile ainsi qu'à deux personnes physiques. Un plan de continuation commun a été arrêté le 5 août 2005. Ce plan a été résolu par un jugement du 17 décembre 2010 qui a prononcé la liquidation judiciaire de chacune des débitrices. Le liquidateur a assigné la société débitrice initiale et les trois personnes auxquelles la procédure avait été étendue en jonction des procédures de liquidation judiciaire.

L'arrêt d’appel, rendu sur pourvoi après cassation (Cass. com., 26 janvier 2016, n° 14-17.672, 14.25.541, 14.28.826 et 14.28.856, F-P+B N° Lexbase : A3396N7W ; P.-M. Le Corre, in Chron., Lexbase Affaires, février 2016, n° 455 N° Lexbase : N1415BWC) ayant constaté la confusion de leurs patrimoines et ordonné la jonction des liquidations judiciaires, les débitrices ont formé un pourvoi en cassation.

Pourvoi. Au soutien de leur pourvoi, elles faisaient valoir que l'extension de procédure résultant de la confusion des patrimoines cesse avec le jugement prononçant la résolution du plan. Ainsi, la juridiction qui envisage d'étendre la procédure collective après la résolution du plan de redressement doit constater une nouvelle confusion des patrimoines et, par conséquent, constater des événements corroborant cette confusion postérieurs à la résolution du plan.

Décision. La Cour de cassation rejette le pourvoi. Elle énonce donc que lorsqu'une procédure de redressement judiciaire a été étendue à d'autres débiteurs en application de l'article L. 621-2, alinéa 2, du Code de commerce, et qu'un même plan a été arrêté en faveur des débiteurs soumis à la procédure unique, l'extension de procédure cesse lorsque ce plan est résolu. Si la jonction des procédures de liquidation judiciaire ouvertes après la résolution du plan peut être prononcée, c'est à la condition de caractériser l'existence d'une confusion des patrimoines par des faits postérieurs au jugement arrêtant le plan.

Par conséquent, le moyen, qui postule que la nouvelle confusion des patrimoines ne pourrait résulter que d'événements postérieurs à la résolution du plan, n'est pas fondé (sur cet arrêt, v. les obs. de E. Le Corre-Broly, Lexbase Affaires, décembre 2021, n° 699 N° Lexbase : N9759BY4).

Observations. La Cour de cassation avait déjà précisé qu’en cas de résolution du plan de redressement et d'ouverture d'une seconde procédure de liquidation judiciaire, les relations financières anormales justifiant l'extension ne peuvent être antérieures à la première procédure de redressement (Cass. com., 16 octobre 2012, n° 11-23.086, F-P+B N° Lexbase : A7150IUD ; P.-M. Le Corre, in Chron., Lexbase Affaires, octobre 2012, n° 317 N° Lexbase : N4505BTZ). Lorsque la liquidation judiciaire est ouverte après résolution d'un plan de redressement, il est question d'ouverture d'une nouvelle procédure et non pas d'une simple conversion de procédure. La Cour de cassation le rappelle pour en tirer cette conséquence que seuls des faits postérieurs à l'ouverture de la première procédure en l'occurrence l'ouverture, mais antérieurs à l'ouverture de la seconde procédure, peuvent justifier l'extension de la procédure de liquidation judiciaire.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : L'ouverture des procédures par extension, Les limites temporelles à l'introduction de l'action en extension de la procédure collectivein Entreprises en difficulté, (dir. P.-M. Le Corre), Lexbase (N° Lexbase : E8680ETN).

 

newsid:479806

Protection sociale

[Brèves] Adaptation des ressources prises pour l'accès à la complémentaire santé solidaire et simplification du renouvellement de ces contrats

Réf. : Décret n° 2021-1642, du 13 décembre 2021, simplifiant l'accès à la protection complémentaire en matière de santé prévue à l'article L. 861-1 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L9616L9Z)

Lecture: 1 min

N9816BY9

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par Laïla Bedja

Le 15 Décembre 2021

► Un décret du 13 décembre 2021, publié au Journal officiel du 15 décembre 2021, porte adaptation des ressources prises pour l'accès à la complémentaire santé solidaire et simplification du renouvellement de ces contrats.

Il adapte ainsi les modalités de prise en compte des ressources pour la détermination de l'éligibilité à la complémentaire santé solidaire, en modifiant notamment les périodes de référence des revenus professionnels ou des prestations sociales pris en compte et en excluant certaines ressources particulières. Les dispositions relatives aux modalités de prise en compte des versements des pensions et obligations alimentaires entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2023.

Le texte ouvre également le bénéfice de la complémentaire santé solidaire aux enfants mineurs du foyer d'un demandeur et permet aux autres membres d'un foyer de continuer à être couverts par cette protection au décès du bénéficiaire (CSS, art. R. 861-16-5 N° Lexbase : L9130LQ9).

Le décret prévoit qu'un enfant majeur âgé de moins de vingt-cinq ans intégrant le foyer de son parent qui dispose d'un contrat de complémentaire santé solidaire en cours peut devenir un ayant-droit du demandeur principal (CSS, art. R. 861-16-5).

Enfin, le décret simplifie les conditions de renouvellement d'un contrat de complémentaire santé solidaire en dispensant dans certains cas le bénéficiaire de la transmission de plusieurs documents (CSS, art. R. 861-16-2, III N° Lexbase : L9127LQ4). Cette disposition entre en vigueur le 1er avril 2022.

newsid:479816

Voies d'exécution

[Jurisprudence] L’indivisibilité de l’appel en matière de saisie immobilière : la vigilance s’impose

Réf. : Cass. civ. 2, 2 décembre 2021, n° 20-15.274, F-B (N° Lexbase : A90977DB)

Lecture: 12 min

N9772BYL

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par Frédéric Kieffer, Avocat au Barreau de Grasse, Membre du Conseil de l’Ordre, Président d’honneur de l’AAPPE

Le 16 Décembre 2021


Mots clés : saisie immobilière • appel • créanciers inscrits • défaut • déclaration de créance • indivisibilité

En matière de saisie immobilière, l’appel de l'une des parties à l'instance devant le juge de l'exécution doit être formé contre toutes les parties à l'instance, à peine d'irrecevabilité de l'appel et la procédure de saisie immobilière étant indivisible tous les créanciers inscrits à la date de publication du commandement de payer doivent être appelés en la cause, quand bien même n’auraient-ils pas déclaré leur créance dans les délais.


 

Les faits et la procédure

Une banque poursuit la saisie immobilière d’un bien en vertu de la copie exécutoire d’un acte notarié. La partie saisie élève des contestations et, par jugement d’orientation du 3 octobre 2018, le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Quimper déboute la banque.

Cette dernière interjette appel de ce jugement à l’encontre de la partie saisie et du seul créancier inscrit ayant déclaré sa créance, sans attraire en cause d’appel les créanciers inscrits non déclarants.

La partie saisie soutient qu’en raison de l’indivisibilité de la procédure de saisie immobilière, l’appel formé par la banque serait irrecevable, la banque ayant omis certains créanciers inscrits dans sa déclaration d’appel.

Suivant arrêt du 2 juillet 2019, la cour d’appel de Rennes (CA Rennes, 2 juillet 2019, n° 18/07072 N° Lexbase : A4756ZHM) déclare l’appel recevable retenant que les créanciers omis dans la déclaration d’appel n’ayant pas déclaré leurs créances, ils sont déchus de leur sûreté pour la distribution du prix de vente et par voie de conséquence, le principe d’indivisibilité ne doit pas leur être appliqué ce qui rend l’appel recevable.

Dans le même arrêt, la cour d’appel infirme le jugement d’orientation, fixe la créance du poursuivant, ordonne la vente forcée et renvoie celle-ci devant le juge de l’exécution quimpérois.

La partie forme un pourvoi, lequel a donné lieu à l’arrêt commenté.

Rappel des modalités de l’appel du jugement d’orientation

Ce commentaire donne l’occasion de rappeler les règles régissant l’appel du jugement d’orientation en reprenant les principaux arrêts de la Cour de cassation sur le sujet.

Tout d’abord, il faut préciser que l’appel contre le jugement d’orientation est formé, instruit et jugé selon la procédure à jour fixe et uniquement sous cette forme (CPCEx, art. R. 322-19 N° Lexbase : L2438ITH).

En effet, la Cour de cassation a jugé que l’appel qui n’est pas formé selon les dispositions des articles 917 (N° Lexbase : L0969H4N) et suivants du Code de procédure civile, en application des articles R. 322-7 (N° Lexbase : L2426ITZ) et R. 322-19 du Code des procédures civiles d’exécution était irrecevable (Cass. civ. 2, 7 septembre 2017, n° 16-19.202, F-D N° Lexbase : A1179WR4 ; Cass. civ. 2, 25 septembre 2014, n° 13-19.000, FS-P+B N° Lexbase : A3338MXW).

Ensuite, la partie qui entend relever appel du jugement d’orientation doit former une déclaration d’appel (Cass. civ. 2, 19 mars 2015, n° 14-11.120, F-D N° Lexbase : A1917NEQ), déposer une requête afin d’être autorisée à assigner à jour fixe dans les huit jours de la déclaration d’appel (Cass. civ. 2, 19 octobre 2017, n° 16-24.140, F-D N° Lexbase : A4436WW9 ; Cass. civ. 2, 26 septembre 2019, n° 15-24.702, F-D N° Lexbase : A0347ZQW).

La requête, pour être autorisé à assigner à jour fixe doit contenir les conclusions au fond et les pièces (Cass. civ. 2, 7 avril 2016, n° 15-11.042, F-P+B (N° Lexbase : A1482RCU).

Lorsque dans l’ordonnance, contra legem, le premier président fixe un délai pour la délivrance de l’assignation à jour fixe, le non-respect de ce délai non prévu par les textes n’entraîne pas l’irrecevabilité de l’appel (Cass. civ. 2, 10 novembre 2016, n° 15-11.407, FS-P+B (N° Lexbase : A9100SG7).

Par ailleurs, un second appel, formé dans le délai légal est possible et recevable, même si le premier appel ne respectant pas le formalisme de la procédure à jour fixe a été déclaré irrecevable (Cass. civ. 2, 7 septembre 2017, n° 16-16.847, FS-P+B N° Lexbase : A1136WRI).

Enfin et surtout, en la matière, la Cour de cassation affirme avec constance l’indivisibilité de la procédure de saisie immobilière que ce soit pour la recevabilité du pourvoi (Cass. civ. 2, 13 novembre 2014, n° 14-11.986,F-P+B N° Lexbase : A2939M3A ; Cass. civ. 2, 3 septembre 2015, n° 14-17.027, F-D N° Lexbase : A4883NN8) ou pour l’appel (Cass. civ. 2, 2 juin 2016, n° 15-19.435, F-D N° Lexbase : A8621RRQ) :

« Mais attendu que la cour d'appel a exactement retenu qu'en application de l'article 553 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L6704H7G), dans une procédure de saisie immobilière l'indivisibilité s'applique à tous les créanciers, poursuivants ou autres, de sorte que l'appel de l'une des parties à l'instance devant le juge de l'exécution doit être formé par déclaration d'appel dirigée contre toutes les parties à cette instance »

Ainsi, l’appel doit être formé à l’encontre de tous les créanciers inscrits : même s’il s’agit d’un appel limité à la seule contestation du montant de la créance du créancier poursuivant (Cass. civ. 2, 21 février 2019, n° 17-31.350, F-P+B N° Lexbase : A8802YYN) et qu’aucune prétention n’est formée à l’encontre des créanciers non intimés, peu important que l’appel soit limité à certains chefs du dispositif et que les créances du ou des créanciers non intimés soient probablement éteintes (Cass. civ. 2, 1er février 2018, n° 16-25.122, F-D N° Lexbase : A4861XCZ ; Cass. civ. 2, 7 décembre 2017, n° 16-23.745, F-D N° Lexbase : A1162W78).

L’une des conséquences de cette indivisibilité est la caducité de la déclaration d’appel lorsque l’une des parties intimées n’a été assignée qu’après la date fixée pour l’audience dans l’ordonnance autorisant l’assignation à jour fixe par application de l’article 992 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1186H4P) (Cass. civ. 2, 1er février 2018, n° 16-25.122, F-D N° Lexbase : A4861XCZ).

En cas d’oubli, l’article 552 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L6703H7E) offre une soupape de sécurité :

« En cas de solidarité ou d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel formé par l'une conserve le droit d'appel des autres, sauf à ces dernières à se joindre à l'instance.Dans les mêmes cas, l'appel dirigé contre l'une des parties réserve à l'appelant la faculté d'appeler les autres à l'instance ».

Car en cas d’indivisibilité l’article 553 (N° Lexbase : L6704H7G) du même code dispose que :

« En cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel de l'une produit effet à l'égard des autres même si celles-ci ne se sont pas jointes à l'instance ; l'appel formé contre l'une n'est recevable que si toutes sont appelées à l'instance ».

De la combinaison de ces deux textes, il en résulte que si l’appelant a omis de faire figurer une partie dans sa déclaration d’appel, il pourra y remédier par voie de déclaration séparée, même après l’expiration des délais à la condition bien sûr que ce soit avant que le juge ne statue (Cass. civ. 2, 10 janvier 2019, n° 17-27.060, F-D N° Lexbase : A9770YSN ; Cass. civ. 2, 2 juillet 2020, n° 19-14.855, F-P+B+I N° Lexbase : A56523QE).

Ainsi, en cas d’indivisibilité, il a été jugé que : « la seconde déclaration d’appel formée par l’appelant pour appeler à la cause les parties omises dans la première déclaration d’appel régularise l’appel, sans créer une nouvelle instance, laquelle demeure unique » (Cass. civ. 2, 19 novembre 2020, n° 19-16.009, F-P+B+I N° Lexbase : A945134S).

Plus récemment, la Cour de cassation est venue préciser les modalités de cette régularisation (Cass. civ. 2, 15 avril 2021, n° 19-21.803 N° Lexbase : A79634PM, A. Martinez-Ohayon, Saisie immobilière – appel du jugement d’orientation : conditions de validité de la régularisation de l’appel interjeté uniquement à l’encontre du créancier poursuivant en omettant d’intimer les créanciers inscrits, Lexbase, Droit privé, avril 2021, n° 863 N° Lexbase : N7276BY7) en retenant que la seconde déclaration d'appel formée par l'appelant pour appeler à la cause les parties omises dans la première déclaration d'appel régularise l'appel, sans créer une nouvelle instance, laquelle demeure unique ; dès lors, lorsque l'instance est valablement introduite selon la procédure à jour fixe, la première déclaration d'appel ayant été précédée ou suivie d'une requête régulière en autorisation d'assigner à jour fixe, laquelle n'a pour objet que de fixer la date de l'audience, la seconde déclaration d'appel n'implique pas que soit présentée une nouvelle requête.

Autrement indiqué, il est inutile de présenter une seconde requête pour être autorisé à assigner à jour fixe lorsqu’elle a été présentée dans les formes et délais à la suite de la première déclaration d’appel ; en cas d’omission d’un intimé dans une instance indivisible soumise à la procédure à jour fixe, il suffira de former une seconde déclaration d’appel et d’assigner à jour fixe pour la date d’audience donnée dans l’ordonnance.

Ce panorama de la jurisprudence de la Cour de cassation en matière d’appel du jugement d’orientation lorsqu’une partie à la saisie immobilière a été omise dans la déclaration d’appel permet de mieux comprendre la solution retenue par la Cour de cassation dans cet arrêt du 2 décembre 2021.

La solution de l’arrêt

La Cour de cassation rappelle les dispositions des articles 553 du Code de procédure civile et R. 322-6 du CPCEx (N° Lexbase : L2425ITY), soit d’une part l’indivisibilité qui impose que l’appel soit formé à l’encontre de toutes les parties, à peine d’irrecevabilité de l’appel, et d’autre part que les créanciers inscrits sont parties à la procédure.

De ce constat, la cour d’appel pouvait-elle considérer que les créanciers inscrits qui n’avaient pas déclaré leur créance encourraient la perte du bénéfice de leur sûreté (CPCEx, art. L. 331-2 N° Lexbase : L5894IRQ), et que par voie de conséquence, le principe d’indivisibilité ne devait pas leur être appliqué ce qui rendait l’appel recevable ?

À juste titre, la Cour de cassation répond par la négative en retenant que :

« En statuant ainsi, alors que les créanciers inscrits étant admis à faire valoir leurs droits sur la répartition du prix de vente, en application de l'article L. 331-1 du code des procédures civiles d'exécution, quand bien même ils auraient perdu le bénéfice de leur sûreté pour défaut de déclaration de leur créance, la procédure demeure indivisible à leur égard peu important qu'ils aient omis de déclarer leur créance, la cour d'appel a violé les textes susvisés ».

La cour d’appel a tout simplement perdu de vue que, même non déclarant, même déchu du bénéfice de sa sûreté, le créancier inscrit est invité à « actualiser » sa créance et il reste admissible à faire valoir ses droits sur la répartition du prix de vente (CPCEx, art. L.331-1 N° Lexbase : L5893IRP), il reste donc partie à la procédure.

C’est donc en toute logique qu’elle casse l’arrêt de la cour d’appel de Rennes, sans renvoi puisque l’irrecevabilité de l’appel rend inutile tout renvoi.

En effet, le juge de l’exécution avait débouté la banque et puisque l’appel formé à l’encontre de ce jugement est irrecevable, la procédure de saisie immobilière a pris fin avec le jugement du juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Quimper, il était donc inutile de désigner une cour de renvoi.

En conclusion, il est permis de s’interroger sur l’entêtement du créancier poursuivant, car, plutôt que d’affirmer que la déchéance de la sûreté rendait inutile la présence des créanciers inscrits non déclarant, pour tenter de justifier la recevabilité de son appel malgré l’absence de certains créanciers inscrits, le poursuivant aurait dû utiliser les nombreuses soupapes de sécurité que lui offraient les articles 552 et 553 du Code de procédure civile et les nombreux arrêts de la deuxième chambre civile, car, en procédure d’appel, les filets de rattrapage sont si rares, qu’il est malheureux de ne pas s’emparer de ceux qui nous tendent les mains.

Apport pratique de l’arrêt :

Dans le cadre de la procédure de saisie immobilière, le caractère indivisible de la procédure impose de former appel contre toutes les parties, notamment tous les créanciers inscrits, même non déclarants ; à défaut l’appelant s’expose à voir son appel déclarer irrecevable. Aussi, même si le créancier n’a pas constitué avocat, n’a pas déclaré sa créance, s’est désisté voire a précisé que sa créance était éteinte, il sera prudent de former appel à son encontre pour sécuriser la régularité du recours.

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