Le Quotidien du 13 octobre 2020

Le Quotidien

Droit pénal général

[Brèves] Maltraitance animale : l’abandon prolongé d’animaux dans des conditions insalubres suffit à caractériser le délit

Réf. : CA Orléans, 6 octobre 2020, n° 18/00160 (N° Lexbase : A95433WD)

Lecture: 3 min

N4853BYE

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par Adélaïde Léon

Le 15 Octobre 2020

► La constitution de l’infraction de sévices graves ou actes de cruauté envers les animaux prévue à l’article 521-1 du Code pénal (N° Lexbase : L3431HTA) n’exige pas nécessairement la réalisation d’actes de cruauté ou de sévices actifs ;

L’abandon d’animaux, sur une période suffisamment longue et dans des conditions particulièrement insalubres, suffit à caractériser le délit.

Rappel des faits. Une femme a été poursuivie pour des faits de maltraitance animale sur des chients, des chats, un rat, des pigeons, un poney, un canard, des poules, des perruches et un hamster. Le tribunal correctionnel a déclaré l’intéressée coupable d’avoir, étant gardien éleveur ou détenteur d’animaux domestiques ou d’animaux sauvages apprivoisés ou captifs, privé ces animaux de nourriture, d’abreuvement mais également de soins, d’avoir utilisé un lieu et un mode de détention inadapté pouvant être cause de souffrance ou blessure, d’avoir détenu des chiens sans procéder à leur identification et d’avoir abandonné ces animaux pendant plusieurs jours.

La prévenue, le ministère public et la SPA ont interjeté appel de ce jugement.

Après avoir déclaré les appels recevables, la cour d’appel a ordonné un supplément d’information afin que soit réalisé un examen psychiatrique de la prévenue.

La prévenue estimait s’être correctement occupé des animaux, expliquait se rendre quotidiennement auprès d’eux, les conduire régulièrement chez le vétérinaire et justifiait son absence dans les lieux par divers évènements notamment un dégât des eaux et des problèmes de chauffage. Elle soutenait que les animaux morts retrouvés sur place avaient succombés à des maladies. Enfin, elle relève que l’élément moral des infractions n’était pas établi en ce qu’il exige des sévices ou actes de cruauté accomplis avec le dessein de provoquer la souffrance ou la mort.

Le rapport du psychiatre déclarait la prévenue exempte de trouble susceptible d’abolir ou d’altérer son discernement et le contrôle de ses actes. La clarté de sa conscience, l’absence de trouble psychiatrique ou cognitif majeur la rendait donc accessible à une sanction pénale.

Décision. La cour d’appel retient que la prévenue avait délibérément maintenu des animaux dans des conditions inadaptées ou pouvant être cause de souffrance ou blessure, les privant par ailleurs de nourriture, d’abreuvement et de soins. Les juges constatent que l’état physiologique de plusieurs de ces animaux était fortement dégradé et que certains étaient morts. La cour souligne par ailleurs que la prévenue ne satisfait pas à son obligation de permettre l’identification de tous les chiens découverts et que les pièces produites ne montrent pas de suivi vétérinaire régulier.

La cour d’appel précise que l’article 521-1 du Code pénal qui incrimine les « sévices graves ou actes de cruauté envers les animaux » n’exige pas nécessairement des actes de cruauté ou de sévices. En l’espèce, elle retient que l’abandon d’animaux, sur une période suffisamment longue et dans des conditions particulièrement insalubres, suffit à caractériser le délit. La cour confirme donc le jugement de première instance quant à la déclaration de culpabilité.

S’agissant de la peine, elle infirme le jugement pour adapter le montant de l’amende aux revenus de la prévenue (cinq amendes contraventionnelles de cinquante euros chacune) et, constatant que cette dernière n’a pas la capacité d’appréhender les responsabilités qui sont les siennes concernant l’accueil d’animaux, prononce à titre de peine principale l’interdiction définitive de détenir des animaux et la confiscation de ceux visés en procédure en confirmant leur remise à la SPA.

newsid:474853

Accident du travail - Maladies professionnelles (AT/MP)

[Brèves] Agression d’un conducteur de bus : l’employeur aurait dû avoir conscience du risque d’agression physique

Réf. : Cass. civ. 2, 8 octobre 2020, n° 18-25.021, FS-P+B+I (N° Lexbase : A05513XP)

Lecture: 3 min

N4860BYN

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par Laïla Bedja

Le 12 Octobre 2020

► Le manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l’employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d’une faute inexcusable lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

Les faits. Un salarié a été victime, le 31 juillet 2008, d’une agression physique, à bord de l’autobus qu’il conduisait. La caisse primaire d’assurance maladie ayant pris en charge cet accident au titre de la législation professionnelle, le salarié a saisi une juridiction de Sécurité sociale d’une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur.

La cour d’appel. Pour dire que la connaissance par l’employeur d’un danger antérieurement à l’accident n’est pas établie et rejeter la demande en reconnaissance de la faute inexcusable du salarié, l’arrêt retient qu’au jour de l’accident, seules quatre agressions en vingt mois avaient été signalées sur la ligne. Les juges du fond relèvent que si, à l’évidence, le salarié souhaitait changer de ligne, il ne justifie pas avoir signalé à son employeur les injures, humiliations et menaces dont il faisait état dans son courrier du 29 juillet 2008, faits distincts de l’agression qui s’est réalisée. Par ailleurs, ils ajoutent qu’aucun élément ne permet de démontrer qu’avant cette date, l’employeur connaissait ce danger particulier d’agression, et que, des attestations produites, il ressort que dès que la direction a été informée de son souhait de changer de ligne, elle a recherché à le remplacer, le 30 juillet, mais n’a trouvé personne, les autres collègues refusant. Enfin, l’arrêt précise que, si le document unique d’évaluation des risques répertorie bien le risque d’agression lors de la vente et du contrôle des titres de transports et le risque de stress lié à la présence de public, aucune réunion du CHSCT n’alerte sur ce danger particulier d’agression avant l’accident, que ce n’est que dans le procès-verbal de réunion du CHSCT du 5 février 2009 qu’il est mentionné un projet de vidéo-surveillance et que ce système sera effectivement mis en place, début 2013, pour l’ensemble des véhicules de transport de la société.

Cassation. Énonçant la solution précitée, la Haute juridiction casse et annule l’arrêt rendu par les juges du fond en violation des articles L. 452-1 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L5300ADN), L. 4121-1 (N° Lexbase : L8043LGY) et L. 4121-2 (N° Lexbase : L6801K9R) du Code du travail. Alors qu’il résultait de ses constatations que l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du risque d’agression physique auquel étaient exposés les conducteurs, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes précités.

Pour en savoir plus : V. ÉTUDE : L’incidence de la faute dans la réalisation de l’accident de travail ou de la maladie professionnelle, La faute inexcusable lorsque l'employeur aurait dû avoir conscience du danger, in Droit du travail, Lexbase (N° Lexbase : E3147ETQ)

 

newsid:474860

Électoral

[Brèves] Demande de radiation d’un électeur par un membre de la commission administrative statuant sur les contestations relatives à même la liste électorale : irrecevabilité du recours

Réf. : Cass. civ. 2, 1er octobre 2020, n° 20-60.249, F-P+B+R+I (N° Lexbase : A50003W4)

Lecture: 2 min

N4838BYT

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par Yann Le Foll

Le 07 Octobre 2020

► Nul ne pouvant être juge et partie, les membres de la commission administrative spéciale instituée par le II de l’article 189 de la loi n° 99-209 organique du 19 mars 1999, relative à la Nouvelle-Calédonie (N° Lexbase : L6333G9G), qui ont statué en matière de révision de la liste électorale spéciale à l’élection des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie, prévue au I du même texte, ne peuvent exercer un recours contentieux contre les décisions de cette commission (Cass. civ. 2, 1er octobre 2020, n° 20-60.249, F-P+B+R+I N° Lexbase : A50003W4).

Faits. Le demandeur, devenu majeur le 24 septembre 2019, a été inscrit le 2 mars 2020 sur la liste électorale spéciale à l’élection des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie, prévue par le I de l’article 189 de la loi n° 99-209 organique du 19 mars 1999, sur décision de la commission administrative spéciale, instituée par le II du même texte. Par requête enregistrée au greffe du tribunal le 12 mai 2020, deux personnes déclarant agir « [e]n la qualité de tiers électeurs de la ville de Nouméa, membres des commissions administratives spéciales », ont sollicité la radiation de l’intéressé de cette liste.

Décision. Pour déclarer recevable la demande présentée aux fins de radiation de la liste électorale spéciale établie dans la commune de Nouméa, le jugement énonce que « les demandeurs, présents à l’audience, ont justifié de leur qualité de tiers électeur ». En statuant ainsi, alors qu’il ressortait des éléments de la procédure que les intéressés étaient membres de la commission administrative spéciale ayant procédé à l’inscription contestée, le tribunal a violé les articles L. 20 (N° Lexbase : L0450LTT) et R. 225 (N° Lexbase : L5229A7S) du Code électoral. Ce faisant, la Cour de cassation a appliqué à la Nouvelle-Calédonie un principe qu’elle a récemment posé, selon lequel les membres de la commission de contrôle prévue par l’article L. 19 du Code électoral (N° Lexbase : L0449LTS), ne peuvent saisir le tribunal judiciaire de contestations relatives à la liste électorale sur laquelle cette commission exerce ses attributions (Cass. civ. 2, 12 juin 2020, n° 20-60.143, F-P+B+I N° Lexbase : A53603NT).

Pour aller plus loin : Le recours contre la décision de refus d'inscription ou de radiation prise par le maire in Droit électoral, Lexbase (N° Lexbase : E4778ZBL).

newsid:474838

Licenciement

[Brèves] PSE : incompétence du juge judiciaire pour suspendre la mise en œuvre d’un projet de projet de restructuration et de compression des effectifs

Réf. : Cass. soc., 30 septembre 2020, n° 19-13.714, F-P+B+I (N° Lexbase : A41403WA)

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N4784BYT

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par Charlotte Moronval

Le 07 Octobre 2020

► Les décisions prises par l’autorité administrative saisie d’une demande de validation ou d’homologation d’un PSE, ainsi que la régularité de la procédure de licenciement collectif, ne peuvent faire l'objet d'un litige distinct de celui relatif à la décision de validation ou d’homologation relevant de la compétence, en premier ressort, du tribunal administratif, à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux ; ne relèvent donc pas de la compétence du juge judiciaire, les demandes du comité d'entreprise et du syndicat tendant à ce qu’il soit enjoint à la société de suspendre sous astreinte la fermeture de magasins et toute mise en œuvre du projet de restructuration avant l’achèvement de la consultation des instances représentatives du personnel relative au projet de restructuration et au projet de licenciement collectif pour motif économique donnant lieu à l’établissement d’un plan de sauvegarde de l’emploi.

Faits. La direction d’une société convoque son CHSCT et son CE pour deux réunions, en diffusant à cette occasion un document d’information sur un projet de réorganisation de l’entreprise prévoyant la fermeture de 21 magasins. Était également remis un projet d’accord collectif relatif à un PSE annonçant le licenciement de 2227 salariés en CDI et le non-renouvellement du CDD de 35 salariés. Se prévalant de la violation par l’employeur de son obligation de consulter les instances représentatives du personnel préalablement à toute mise en oeuvre d’un projet de restructuration, le CE de la société, le CHSCT et un syndicat ont saisi le juge des référés du tribunal de grande instance aux fins de suspension sous astreinte de la fermeture de magasins et de toute mise en œuvre du projet de restructuration avant l’achèvement de la consultation des instances représentatives du personnel.

Procédure. Ces demandes ont été « déclarées irrecevables devant les juridictions de l’ordre judiciaire ». L’autorité administrative, saisie par le CE sur le fondement des dispositions de l’article L. 1233-57-5 du Code du travail (N° Lexbase : L0642IX3), a enjoint à la société notamment de suspendre sa réorganisation pendant la période déterminée de la procédure d'information-consultation, afin de se conformer à la règle de procédure prévue en matière de PSE. La société a par la suite renoncé à la poursuite de son projet de restructuration. Le comité d'entreprise et le syndicat font grief à l'arrêt de la cour d’appel (CA Paris, Pôle 5, 5ème ch., 31 janvier 2019, n° 14/23022 N° Lexbase : A7243YUS) de confirmer l'ordonnance du président du tribunal de grande instance en ce qu'elle déclare irrecevable devant les juridictions de l'ordre judiciaire l'ensemble de leurs demandes principales aux fins de suspension sous astreinte de la fermeture de magasins et de toute mise en oeuvre du projet de restructuration,

La solution. Enonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi.

En savoir plus. Sur la jurisprudence en la matière, v. ETUDE : Le plan de sauvegarde de l’emploi, La compétence des juridictions judiciaires après la loi du 14 juin 2013, in Droit du travail, Lexbase (N° Lexbase : E1056E9Y).

 

newsid:474784

Procédure administrative

[Brèves] Refonte de l'application « Télérecours » (modalités de transmission des requêtes et mémoires par voie électronique)

Réf. : Décret n° 2020-1245, du 9 octobre 2020, relatif à l'utilisation des téléprocédures devant le Conseil d'État, les cours administratives d'appel et les tribunaux administratifs et portant autres dispositions (N° Lexbase : L4283LYB)

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N4862BYQ

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par Yann Le Foll

Le 14 Octobre 2020

► Le décret n° 2020-1245 du 9 octobre 2020 relatif à l'utilisation des téléprocédures devant le Conseil d'État, les cours administratives d'appel et les tribunaux administratifs et portant autres dispositions (N° Lexbase : L4283LYB) a été publié au Journal officiel du 11 octobre 2020.

Objet : le décret simplifie, précise et complète les dispositions du Code de justice administrative relatives aux téléprocédures applicables aux avocats et aux administrations (application « Télérecours », obligatoire pour les administrations et les avocats à compter du 1er janvier 2017, voir décret n° 2016-1481, du 2 novembre 2016, relatif à l’usage des téléprocédures devant les juridictions administratives N° Lexbase : L9754LAI) et aux personnes privées (particuliers, entreprises, associations) sans avocat (application « Télérecours citoyens »).

Personnes concernées : l’utilisation de « Télérecours » sera dorénavant obligatoire, exception des recours des communes de moins de 3 500 habitants faits sans avocat et ceux des personnes de droit privé non chargées de la gestion permanente d’un service public et faits sans avocat.

Nouvelles dispositions : les utilisateurs de cette application devront transmettre un fichier par pièce jointe. Les fichiers transmis devront comporter un intitulé comprenant un numéro dans un ordre continu et croissant et, sauf à recourir à la génération automatique de l'inventaire détaillé par l'application, un libellé décrivant leur contenu de manière suffisamment explicite.

La sanction des erreurs non régularisées dans le libellé des pièces jointes est assouplie puisqu'elles ne conduisent plus à l'irrecevabilité de la requête ou à la mise à l'écart de l'ensemble du mémoire, mais seulement à la mise à l'écart de la pièce mal libellée (pour des erreurs concernant l’utilisation de l’application, voir notamment CE 2° et 7° ch.-r., 14 juin 2019, n° 420861, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A6066ZEE).

L'indication des nom et domicile du requérant dans l'application « Télérecours » ou dans le téléservice « Télérecours citoyens » vaudra dorénavant indication de ces mentions dans la requête. Enfin, la possibilité de demander la délivrance d'une copie papier de la décision rendue, en complément de la notification faite par l'application « Télérecours » ou « Télérecours citoyens », est supprimée pour les personnes ayant utilisé cette application ou ce téléservice.

Entrée en vigueur : le décret entre en vigueur le 1er janvier 2021, à l'exception des dispositions des premier et troisième alinéas des articles R. 414-5 (N° Lexbase : L1662LKR) et R. 611-8-5 (N° Lexbase : L1668LKY) du Code de justice administrative, dans leur rédaction résultant du présent décret, qui entrent en vigueur le 1er juin 2021.

newsid:474862

Procédure civile

[Brèves] Saisine de deux cours d’appel distinctes : la validité du second appel sous certaines conditions !

Réf. : Cass. civ. 2, 1er octobre 2020, n° 19-11.490, FS-P+B+I (N° Lexbase : A49893WP)

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N4801BYH

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par Alexandra Martinez-Ohayon

Le 07 Octobre 2020

► La saisine irrégulière d’une cour d’appel territorialement incompétente, fait encourir une irrecevabilité à l’appel, mais elle n’interdit pas à son auteur de former un second appel, même sans désistement préalable de son premier appel, à la double condition que le délai d’appel ne soit pas expiré et que l’irrecevabilité du premier appel ne soit pas prononcée.

Faits et procédure. Dans cette affaire, un particulier a interjeté un premier appel devant la cour d’appel de Paris d’un jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nanterre. Le lendemain, ce dernier a interjeté un second appel devant la cour d’appel de Versailles. Le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Paris a déclaré irrecevable l’appel formé devant sa juridiction. La partie intimée a déféré à la cour d’appel de Versailles l’ordonnance rendue par le conseiller de la mise en état l’ayant déboutée de sa demande tendant à l’irrecevabilité de la déclaration d’appel formée devant la cour d’appel de Versailles.

Le pourvoi. Le demandeur au pourvoi fait grief à l’arrêt rendu le 29 novembre 2018 par la cour d'appel de Versailles (CA Versailles, 29 novembre 2018, n° 18/03052 N° Lexbase : A5015YN3), d’avoir violé les articles 30 (N° Lexbase : L1167H4Y), 31 (N° Lexbase : L1169H43), 543 (N° Lexbase : L6694H73), 546 (N° Lexbase : L6697H78), et 911-1 (N° Lexbase : L7243LEY) du Code de procédure civile, en infirmant l’ordonnance rendue par le conseiller de la mise en état, et en déclarant irrecevable son appel. L’intéressé énonce que, dans le cas où une partie forme un appel devant une cour d’appel territorialement incompétente, elle est recevable, tant que le délai d’appel n’est pas expiré, à former un second appel devant la juridiction territorialement compétente. Il rajoute que le désistement de l’appel initial n’est pas une condition de la recevabilité du second appel,. En ce sens la deuxième chambre civile de la Cour de cassation s’était prononcée par un arrêt du 2 juillet 2020 (Cass. civ. 2, 2 juillet 2020, n° 19-14.086, F-P+B+I N° Lexbase : A56583QM). En l’espèce, le second appel avait été interjeté devant la cour d’appel de Versailles, et l’irrecevabilité du premier appel n’avait pas été prononcée, de plus que le délai d’appel n’était pas expiré. L’intéressé démontre que du fait que l’irrecevabilité du premier appel était encourue, il avait intérêt à agir.

Réponse de la Cour. Avant d’énoncer la solution précitée, les Hauts magistrats ont introduit leur raisonnement en indiquant qu’il ressort de l’article 546 du Code de procédure civile que le droit d’appel appartient à toute partie qui y a intérêt, et que la partie qui a régulièrement saisi une cour d’appel d’un premier appel formé contre un jugement n’est pas recevable à réitérer un appel du même jugement, contre le même intimé ; et l’article 911-1 du même code énonce quant à lui que la partie dont l’appel a été déclaré irrecevable n’est plus recevable à former un appel principal contre le même jugement et à l’égard de la même partie. La Cour Suprême relève que pour déclarer irrecevable l’appel, la cour d’appel de Versailles retient que le salarié après avoir introduit un premier recours, avait présenté un même recours contre la même décision le lendemain, relevant que son conseil avait écrit à la cour d’appel initialement saisie en indiquant une erreur de saisine et sollicitant de cette juridiction de tirer toutes les conséquences de cette déclaration d’appel. Les juges d’appel ont déduit du fait que l’appelant avait omis de se désister du premier appel, qu'il n’avait pas d’intérêt à agir.

Solution. Le raisonnement est censuré par la Cour suprême qui casse en toutes ses dispositions l’arrêt d’appel, relevant que la saisine initiale avait été effectuée dans le ressort d’une cour d’appel territorialement incompétente de sorte qu’il était incompétent, et également que cette irrégularité n’avait été prononcée que postérieurement à la formation du second appel.

 

newsid:474801

Sociétés

[Brèves] Responsabilité des associés majoritaires à l’égard d’un minoritaire en raison d’une collusion frauduleuse

Réf. : Cass. com., 30 septembre 2020, n° 18-22.076, F-P+B (N° Lexbase : A70353WH)

Lecture: 3 min

N4822BYA

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par Vincent Téchené

Le 07 Octobre 2020

► L'existence d'une collusion frauduleuse d’associés majoritaires au détriment d’un minoritaire est de nature à engager leur responsabilité civile ;

Tel peut être le cas lorsqu’une opération d’apport orchestrée par les majoritaires a conduit, par la sous-évaluation de la société et l'octroi corrélatif d’actions nouvelles à l’un d’eux, à priver illégitimement l’associé minoritaire, d’une partie de ses droits en diluant sa participation au capital de la société.

Faits et procédure. Le fondateur d’une SA, entreprise de production et de commercialisation de rhum, et propriétaire d’un fonds de commerce de distribution de spiritueux est décédé le 23 septembre 1968, laissant pour lui succéder ses trois enfants, M. D., R. D. et M.-C. D.. Aux termes d’un protocole transactionnel des 13 et 20 octobre 2005, les héritiers ont, d’une part, réparti le solde des droits indivis des actions du défunt dans la société anonyme entre deux d’entre eux (R. D. et M. D.) et, d’autre part, attribué le fonds de commerce l’un d’eux (R. D.) en pleine propriété, à charge pour lui d’en céder ou d’en apporter la propriété soit à la SA, soit à une société qui détiendrait les actions de cette société.
Le 6 juillet 2006, les actionnaires majoritaires de la société, réunis en assemblée générale extraordinaire, en l’absence de M. D., ont approuvé l’apport du fonds de commerce et décidé de l’augmentation du capital social par la création d’actions nouvelles attribuées à l’apporteur en rémunération de l’apport. M. D. est décédée le 6 mars 2007, laissant pour lui succéder, notamment, Mme M.-C. D..
Estimant que cette opération d’apport et d’augmentation de capital, ce dernier ayant été sciemment sous-évalué, avait été réalisée dans des conditions fautives aboutissant à la dilution de ses droits d’associée, Mme M.-C. D. a assigné en responsabilité civile R. D. et ses enfants ainsi que la société.

Arrêt d'appel. L’arrêt d’appel a rejeté ces demandes. Pour ce faire, il retient que la demanderesse, associée minoritaire n’établit pas que la société ne pouvait tirer un avantage suffisant de la maîtrise du réseau de distribution par l’apport du fond de commerce, pour justifier l’avantage consenti à l’apporteur, à savoir R. D..

Décision. La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel au visa de l'article 1382 du Code civil (désormais C. civ., art. 1240 N° Lexbase : L0950KZ9) et le principe selon lequel la fraude corrompt tout.

Elle retient qu’en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à exclure l'existence d'une collusion frauduleuse des majoritaires au détriment de l’associée minoritaire, de nature à engager leur responsabilité civile, la cour d'appel, qui n'a pas recherché, comme elle y était invitée, si l’opération d’apport orchestrée par les majoritaires n’avait pas conduit, par la sous-évaluation de la société et l'octroi corrélatif d’actions nouvelles nombreuses à l’apporteur, à priver illégitimement l’associée minoritaire, d’une partie de ses droits en diluant sa participation au capital de la société, a privé sa décision de base légale.

 

newsid:474822

Successions - Libéralités

[Brèves] L’action en nullité du testament engagée par un héritier réservataire est-elle suspensive de la prescription de l'action en délivrance d’un legs ?

Réf. : Cass. civ. 1, 30 septembre 2020, n° 19-11.543, FS-P+B (N° Lexbase : A68893W3)

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N4828BYH

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 12 Octobre 2020

► L'action en nullité du testament engagée par un héritier réservataire, qui n'empêche pas le légataire universel d'exercer l'action en délivrance de son legs, n'en suspend pas la prescription.

Faits et procédure. En l’espèce, la défunte (décédée le 13 janvier 2005) avait laissé pour lui succéder sa fille, en l'état de trois testaments olographes des 15 novembre 2000, 17 novembre 2000 et 24 septembre 2003 instituant une légataire universelle. Un arrêt du 25 mars 2008, devenu irrévocable après rejet d'un pourvoi (Cass. civ. 1, 15 décembre 2010, n° 09-66.870, F-D N° Lexbase : A2532GN4), avait rejeté la demande de la fille tendant à l'annulation des testaments.

Par acte du 13 octobre 2014, la légataire avait assigné la fille en ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l'indivision existant entre elles sur l'immeuble dépendant de la succession. Elle avait sollicité la délivrance de son legs par conclusions du 29 octobre 2015.

Pour déclarer recevable et bien fondée la demande en délivrance du legs universel dont la défunte l'avait gratifiée, la cour d’appel de Nancy avait retenu que la légataire ne pouvait agir judiciairement en délivrance de son legs tant que son droit de légataire universelle n'était pas définitivement établi, ce qui n’était intervenu que lors du prononcé de l'arrêt de la Cour de cassation du 15 décembre 2010 mettant fin au litige sur ce point. Elle ajoutait que cette demande ayant été expressément formulée devant le tribunal par conclusions du 29 octobre 2015, elle n’était donc pas prescrite.

Décision Cour de cassation. A tort, selon la Cour suprême, qui censure la décision après avoir rappelé, d’abord, qu’il résulte de l’article 1004 du Code civil (N° Lexbase : L0161HPN) qu'à défaut de délivrance volontaire, le légataire universel est tenu de demander en justice la délivrance des biens compris dans le testament aux héritiers réservataires ; elle ajoute, ensuite, que l'action en nullité du testament engagée par un héritier réservataire, qui n'empêche pas le légataire universel d'exercer l'action en délivrance de son legs au sens de l’article 2234 du Code civil (N° Lexbase : L7219IAM), n'en suspend pas la prescription.

Il en résultait, en l’espèce, que le délai de l'action en délivrance du legs, qui avait commencé à courir le jour du décès, n'avait pas été suspendu par l'action en nullité des testaments engagée par la fille de la défunte.

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