Le Quotidien du 20 juillet 2020

Le Quotidien

Concurrence

[Brèves] Prescription de l’action fondée sur la rupture brutale d’une relation commerciale établie : point de départ du délai et extension de l’interruption liée à une précédente action en responsabilité contractuelle

Réf. : Cass. com., 8 juillet 2020, n° 18-24.441, FS-P+B (N° Lexbase : A10433R3)

Lecture: 5 min

N4145BY8

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par Vincent Téchené

Le 15 Juillet 2020

► La prescription de l'action en responsabilité pour rupture brutale d’une relation commerciale cout à compter de la notification de la rupture dès lors que la victime a connaissance, à cette date, de l'absence de préavis et du préjudice en découlant ;

► L'interruption de la prescription pouvant s'étendre d'une action à une autre lorsque ces deux actions,  quoiqu'ayant des causes distinctes, tendent à un seul et même but, il appartient aux juges de vérifier que les faits dénoncés relatifs à la seconde action fondée sur l’article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce (N° Lexbase : L0496LQG) étaient les mêmes que ceux invoqués dans une première action pour réclamer l'indemnisation sur le fondement contractuel (C. civ. art. 1147, anc. N° Lexbase : L1248ABT), de sorte que les actions tendaient toutes deux à la réparation du préjudice résultant de la modification unilatérale des conditions commerciales, éventuellement constitutive d'une rupture, fût-elle seulement partielle, de la relation commerciale unissant les parties.

Faits et procédure. À la suite d'un différend ayant opposé deux partenaires commerciaux, le fournisseur a mis un terme, le 2 septembre 2009, à ses relations commerciales avec le distributeur aux conditions antérieures. Dans le cadre d’une instance engagé par un client du distributeur contre ces deux sociétés, le distributeur a formé contre le fournisseur, à titre reconventionnel, une demande d'indemnisation de son préjudice commercial, sur le fondement de l'article 1147 du Code civil. Cette demande ayant été rejetée par arrêt du 18 novembre 2014, le distributeur a, le 2 avril 2015, assigné le fournisseur en paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par la rupture brutale d'une relation commerciale établie, en application de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce.

Cette demande ayant été jugée irrecevable comme prescrite (CA Paris, Pôle 5, 4ème ch., 27 juin 2018, n° 16/08334 N° Lexbase : A6240XUN), le distributeur a formé un pourvoi en cassation  

Décision. La Cour de cassation apporte deux précisions relatives à la prescription de l'action pour rupture brutale d’une relation commerciale établie.

  • Point de départ du délai de prescription

La Cour de cassation rappelle qu’il résulte de l'article 2224 du Code civil (N° Lexbase : L7184IAC) que la prescription d'une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime, si celle-ci établit qu'elle n'en avait pas eu précédemment connaissance. Ainsi, elle retient que c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que la prescription de l'action en responsabilité engagée en l’espèce avait couru à compter de la notification de la rupture dès lors que le distributeur avait eu connaissance, à cette date, de l'absence de préavis et du préjudice en découlant, sans qu'il y ait lieu de tenir compte de l'éventualité d'une faute ayant pu justifier que le fournisseur ait mis un terme à la relation sans préavis.

  • Qualification d’actions « tendant à un seul et même but » ou « aux mêmes fins »

La Cour de cassation commence par rappeler, au visa de l’article 2241 du Code civile (N° Lexbase : L7181IA9) que si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque deux actions, quoiqu'ayant des causes distinctes, tendent à un seul et même but, de telle sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première.

Elle constate, ensuite, que pour écarter le moyen tiré de l'interruption de la prescription par la demande reconventionnelle que le distributeur avait formée contre son fournisseur dans la précédente instance qui les avait opposées, et déclarer prescrite sa demande de dommages-intérêts pour rupture brutale d'une relation commerciale établie, l'arrêt relève que les griefs invoqués en première instance étaient fondés sur les dispositions de l'article 1147 ancien du Code civil. En outre, pour les juges d’appel, l’objet de la précédente action était distinct de celui dont la cour d'appel est saisie, la réparation d'un préjudice commercial causé par des manquements contractuels et des actes de dénigrement ne pouvant tendre à la même fin et au même but que la réparation de la marge perdue en raison de l'absence de préavis alloué à la suite de la rupture des relations commerciales l'empêchant ainsi de se réorganiser.

La Haute juridiction censure l’arrêt d’appel : en statuant ainsi, par des motifs inopérants, pris du fondement exclusivement contractuel de la précédente demande, sans vérifier si les faits dénoncés pour réclamer l'indemnisation de la perte de marge commerciale que le distributeur prétendait avoir subie par suite de la modification unilatérale des conditions commerciales n'étaient pas les mêmes que ceux qu'elle invoquait au soutien de sa demande fondée sur ce texte, de sorte que les actions tendaient toutes deux à la réparation du préjudice résultant de la modification unilatérale des conditions commerciales, éventuellement constitutive d'une rupture, fût-elle seulement partielle, de la relation commerciale unissant les parties, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

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Covid-19

[Brèves] Discothèques et salles de danse : le Conseil d’État valide le maintien de la fermeture

Réf. : CE référé, 13 juillet 2020, n° 441449 (N° Lexbase : A35533RZ)

Lecture: 2 min

N4166BYX

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par Vincent Téchené

Le 17 Juillet 2020

► La fermeture des discothèques et des salles de danse n’est pas une mesure disproportionnée dans le cadre de la lutte contre la pandémie ; elle se justifie par le caractère clos des établissements, la nature de l’activité physique de la danse et la difficulté de garantir le respect des gestes barrières ou du port du masque dans un contexte festif.

Faits et procédure. Le Syndicat national des discothèques et lieux de loisirs (SNDLL) et plusieurs établissements de nuit ont demandé au juge des référés du Conseil d’État de suspendre les décrets n° 2020-759 du 21 juin 2020 (N° Lexbase : L4743LXX) et n° 2020-860 du 10 juillet 2020 (N° Lexbase : Z058979X) qui maintiennent fermées les discothèques et salles de danse.

Décision. Le Conseil d’État retient donc que, eu égard au caractère clos des établissements en cause, à la nature d’activité physique de la danse ainsi qu’à la difficulté de garantir le port du masque ou le respect des règles de distanciation sociale dans un contexte festif, il n’apparaît pas, en l’état de l’instruction, que l’interdiction faite à ces établissements d’exploiter leur activité de salle de danse revêt, au regard de l’objectif de protection de la santé publique poursuivi, un caractère disproportionné. Il précise en outre que les requérants ne sauraient utilement invoquer, à cet égard, la circonstance que certains bars laisseraient leur clientèle danser en méconnaissance des conditions auxquelles est subordonnée leur ouverture. Ils ne peuvent davantage utilement invoquer la circonstance que des soirées dansantes à caractère commercial seraient organisées dans des lieux n’ayant pas cette destination, en méconnaissance de la réglementation applicable.

Enfin, sur l’illégalité soulevée de l’interdiction qui est faite à ces établissements d’exercer toute activité, y compris une activité qui serait limitée à celle que sont autorisées à exercer les restaurants et débits de boisson, le juge administratif retient que, eu égard notamment aux caractéristiques des lieux en cause, qui ne sont pas directement ouverts sur l’espace public, et à leurs horaires d’ouverture étendus, il n’apparaît pas que puisse être garantie la possibilité d’assurer, par des contrôles effectifs, le respect d’une telle limitation d’activité, qui procèderait d’un simple engagement des exploitants et non d’un changement temporaire de catégorie administrative après mise en œuvre des procédures adéquates. Ainsi, le maintien de la fermeture des établissements de type P pour l’ensemble de leurs activités n’apparaît pas davantage disproportionné au regard de l’objectif poursuivi.

Il en résulte donc que les demandes du SNDLL et de plusieurs établissements de nuit sont rejetées.

newsid:474166

Filiation

[Brèves] Refus de transcription de l’acte de naissance d’un enfant né de GPA à l’étranger : quid lorsque la mère d'intention est aussi la mère génétique ?

Réf. : CEDH, 16 juillet 2020, Req. 11288/18, D c/ France (N° Lexbase : A35543R3)

Lecture: 6 min

N4170BY4

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 28 Juillet 2020

► Le refus, par les juridictions françaises, de transcrire l’acte de naissance d’un enfant né à l’étranger d’une gestation pour autrui en tant qu’il désigne la mère d’intention comme étant sa mère, celle-ci étant sa mère génétique, et pour autant que la procédure d’adoption permet de reconnaître un lien de filiation, n’emporte ni violation de l’article 8 (N° Lexbase : L4798AQR, droit au respect de la vie familiale), ni violation de l’article 14 (N° Lexbase : L4747AQU, interdiction de la discrimination) combiné avec l’article 8.

La question de la transcription de l’acte de naissance d’un enfant né de GPA à l’étranger a fait l’objet d’un contentieux très important depuis quelques années, qui a permis progressivement à la Cour européenne des droits de l’Homme de poser des principes jurisprudentiels désormais bien définis ; c’est dans le cadre de ces principes qu’elle continue d’apporter des réponses qui s’inscrivent dans la lignée de sa jurisprudence, comme en témoigne l’arrêt rendu le 16 juillet 2020.

L’affaire. Les parents requérants s’étaient mariés en France en 2008, et l’enfant (troisième requérant) était né en Ukraine en septembre 2012, d’une gestation pour autrui. L’acte de naissance établi à Kiev indiquait que la première requérante était la mère, que le deuxième requérant était le père et ne mentionnait pas la femme qui avait accouché de l’enfant.

Face au rejet de la demande de transcription de l’acte de naissance ukrainien de l’enfant pour autant qu’il désignait la première requérante comme étant sa mère, les requérants invoquaient, devant la CEDH, l’article 8 (droit au respect de la vie familiale), pris isolément et combiné avec l’article 14 (interdiction de la discrimination), dénonçant une violation du droit au respect de la vie privée de l’enfant ainsi qu’une discrimination fondée sur « la naissance » dans sa jouissance de ce droit.

♦ Sur la violation alléguée du droit au respect de la vie privée de l’enfant (article 8)

Rappel de la jurisprudence CEDH. La Cour rappelle qu’elle s’est déjà prononcée sur la question du lien de filiation entre l’enfant et le père d’intention, père biologique, dans les arrêts « Mennesson c/ France » et « Labassee c/ France » (CEDH, 26 juin 2014, deux arrêts, Req. 65192/11, Mennesson c/ France N° Lexbase : A8551MR7, et Req. 65941/11, Labassée c/ France N° Lexbase : A8552MR8, et le comm. d’Adeline Gouttenoire, Lexbase, Droit privé, n° 577, 2014 N° Lexbase : N2924BUT). Elle précise qu’il ressort de sa jurisprudence que l’existence d’un lien génétique n’a pas pour conséquence que le droit au respect de la vie privée de l’enfant requière que la reconnaissance du lien de filiation entre l’enfant et le père d’intention puisse se faire spécifiquement par la voie de la transcription de son acte de naissance étranger. La Cour ne voit pas de raison dans les circonstances de l’espèce d’en décider autrement s’agissant de la reconnaissance du lien de filiation entre l’enfant et la mère d’intention, mère génétique.

Il ne saurait donc être retenu que le rejet de la demande de transcription de l’acte de naissance ukrainien de la troisième requérante pour autant qu’il désigne la première requérante est constitutif d’une ingérence disproportionnée dans son droit au respect de sa vie privée du seul fait que la première requérante est sa mère génétique, dès lors que le lien de filiation entre l’une et l’autre peut être effectivement établi par une autre voie.

Reconnaissance du lien de filiation par un autre moyen, tel que l’adoption. Comme le soulignait le Gouvernement, les deux premiers requérants étant mariés et l’acte de naissance ukrainien de la troisième requérante ne mentionnant pas la femme qui avait accouché, la première requérante avait la possibilité de saisir le juge d’une demande tendant à son adoption plénière au titre de l’adoption de l’enfant du conjoint.

Ainsi que l’avait relevé la Cour dans son avis consultatif rendu le 10 avril 2019, l’adoption produit des effets de même nature que la transcription de l’acte de naissance étranger s’agissant de la reconnaissance du lien de filiation entre l’enfant et la mère d’intention (CEDH, 10 avril 2019, avis n° P16-2018-001 N° Lexbase : A7859Y8L, cf. les obs. d'Adeline Gouttenoire, Le régime français de la GPA à l’étranger validée par la Cour européenne des droits de l’Homme, sous certaines réserves…, Lexbase, Droit privé, n° 784, mai 2019 N° Lexbase : N9099BXB).

La Cour observe notamment qu’il résulte des indications données par le Gouvernement que la durée moyenne d’obtention d’une décision n’est que de 4,1 mois en cas d’adoption plénière.

En refusant de procéder à la transcription de l’acte de naissance ukrainien de la troisième requérante sur les registres de l’état civil français pour autant qu’il désignait la première requérante comme étant sa mère, l’État défendeur n’a pas, dans les circonstances de la cause, excédé sa marge d’appréciation. Il n’y a donc pas eu violation de l’article 8 de la Convention.

♦ Sur la discrimination alléguée fondée sur « la naissance » dans la jouissance du droit au respect de la vie privée de l’enfant

Pour la Cour, la différence de traitement entre les enfants français nés d’une gestation pour autrui à l’étranger et les autres enfants français nés à l’étranger, ne tient pas à ce que les premiers ne pourraient - comme les seconds - obtenir la reconnaissance en droit interne d’un lien de filiation à l’égard de celle dont le nom figure sur l’acte de naissance étranger. Elle consiste en ce que, à l’époque des faits, les premiers, contrairement aux seconds, ne pouvaient obtenir la transcription intégrale de l’acte de naissance étranger et devaient passer par la voie de l’adoption pour leur filiation maternelle.

Or, comme l’a déjà souligné la Cour, l’adoption de l’enfant du conjoint constitue en l’espèce un mécanisme effectif permettant la reconnaissance du lien de filiation entre la première et la troisième requérante cette différence de traitement quant aux modalités d’établissement du lien maternel de filiation visait à s’assurer, au regard des circonstances particulières de chaque cas, qu’il était dans l’intérêt supérieur de l’enfant né d’une gestation pour autrui qu’un tel lien soit établi à l’égard de la mère d’intention.

La Cour admet donc que la différence de traitement dénoncée par les requérants quant aux modalités de la reconnaissance du lien de filiation avec leur mère génétique, reposait sur une justification objective et raisonnable. Il n’y a donc pas eu violation de l’article 14 combiné avec l’article 8.

Sur l’ensemble de la question :

V. ETUDE : La gestation ou maternité pour autrui, in La filiation, Lexbase (N° Lexbase : E4415EY8).

newsid:474170

Licenciement

[Brèves] Comportement fautif d’un stewart lors d’une escale : licenciement justifié dès lors que les faits se rattachent à la vie professionnelle

Réf. : Cass. soc., 8 juillet 2020, n° 18-18.317, FS-P+B (N° Lexbase : A11673RN)

Lecture: 2 min

N4136BYT

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par Charlotte Moronval

Le 15 Juillet 2020

► L'article 4.2 de l'annexe II du règlement intérieur de la société Air France n'impose pas que l'information écrite adressée aux délégués du personnel avant la tenue de l'entretien préalable expose les faits motivant la sanction envisagée ;

se rattachent à la vie professionnelle du salarié, les faits de vol visés dans la lettre de licenciement, dont le salarié ne contestait pas la matérialité, commis pendant le temps d'une escale dans un hôtel partenaire commercial de la société Air France, qui y avait réservé à ses frais les chambres, que c'est à la société Air France que l'hôtel avait signalé le vol et que la victime n'avait pas porté plainte en raison de l'intervention de la société.

Dans les faits. Un salarié, engagé en qualité de steward par la société Air France, a été licencié pour faute grave aux motifs d'avoir manqué à ses obligations professionnelles et porté atteinte à l'image de la compagnie en ayant soustrait le portefeuille d'un client d'un hôtel dans lequel il séjournait en tant que membre d'équipage de la société. Il saisit la juridiction prud'homale.

La position de la cour d’appel. La cour d’appel (CA Paris, Pôle 6, 5ème ch., 12 avril 2018, n° 16/11682 N° Lexbase : A8354XKM) juge le licenciement du salarié fondé sur une faute grave et le déboute de ses demandes. Celui-ci forme alors un pourvoi en cassation.

La solution. Enonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi.

→ Dans un premier temps, elle relève que la cour d’appel a constaté que la société Air France avait adressé aux délégués du personnel une note faisant mention de l'engagement d'une procédure disciplinaire du second degré à l'encontre du salarié et sollicitant des observations éventuelles de leur part, et que, dès lors, elle a exactement décidé que l'employeur avait satisfait aux obligations mises à sa charge par l'article 4.2 de l'annexe II du règlement intérieur.

→ Dans un second temps, la Chambre sociale relève que la cour d'appel, ayant correctement relevé que les faits reprochés, énoncés ci-dessus, se rattachaient à la vie professionnelle du salarié, a, sans méconnaître les termes du litige, légalement justifié sa décision.

Pour en savoir plus, v. ETUDE : La notion de faute du salarié, Le comportement fautif du salarié entraînant un trouble caractérisé au sein de l'entreprise, in Droit du travail, Lexbase (N° Lexbase : E4589EXA).

 

newsid:474136

Marchés publics

[Brèves] Résiliation unilatérale pour irrégularité du marché résultant d'une faute de l'administration : nature de l’irrégularité qui justifierait que le juge en prononce l'annulation ou la résiliation

Réf. : CE 2° et 7° ch.-r., 10 juillet 2020, n° 430864, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A17953RW)

Lecture: 3 min

N4127BYI

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par Yann Le Foll

Le 15 Juillet 2020

La résiliation unilatérale pour irrégularité du contrat résultant d'une faute de l'administration n’est possible qu’à la condition que l’irrégularité justifierait que le juge en prononce l'annulation ou la résiliation (CE 2° et 7° ch.-r., 10 juillet 2020, n° 430864, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A17953RW).

Faits. La communauté d'agglomération Reims métropole a lancé une procédure de passation sous la forme d'un appel d'offres ouvert pour l'attribution d'un marché public ayant pour objet la fourniture de points lumineux, supports et pièces détachées. Les trois lots ont été attribués à la société requérante, qui a commencé l'exécution des prestations le 1er janvier 2015. Le 5 février 2015, la communauté d'agglomération Reims métropole l'a toutefois informée de la résiliation des trois lots à compter du 1er avril 2015 en raison de l'irrégularité entachant la procédure de passation du marché. 

En cause d’appel. Par un arrêt du 19 mars 2019 (CAA Nancy, n° 17NC02326 N° Lexbase : A3763Y8U), contre lequel la société se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Nancy a essentiellement annulé le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en tant qu'il a condamné la communauté urbaine du Grand Reims à verser à la société une somme de 172 560,73 euros et rejeté le surplus des conclusions des parties. Elle a jugé, au vu notamment d'autres marchés dans lesquels les documents de la consultation comportaient la mention « ou équivalent » au titre des spécifications techniques, que l'omission de cette mention dans le marché en litige avait eu pour effet de favoriser la candidature de la société, pratique interdite par l'article R. 2111-7 du Code de la commande publique (N° Lexbase : L3872LRT).

Décision. La cour administrative d’appel a commis une erreur de droit en en déduisant que cette irrégularité justifiait la résiliation du contrat en litige par la communauté d'agglomération du Grand Reims par application  du deuxième alinéa de l'article 29 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) des marchés publics de fournitures courantes et de services (N° Lexbase : Z44825PH), applicable en vertu de l'article 5 du cahier des clauses administratives particulières du marché litigieux, selon lequel « Le pouvoir adjudicateur peut également mettre fin, à tout moment, à l'exécution des prestations pour un motif d'intérêt général », sans rechercher si cette irrégularité pouvait être invoquée par la personne publique au regard de l'exigence de loyauté des relations contractuelles et si elle était d'une gravité telle que, s'il avait été saisi, le juge du contrat aurait pu prononcer l'annulation ou la résiliation du marché en litige, et, dans l'affirmative, sans définir le montant de l'indemnité due à la société requérante (s'agissant des vices du contrat justifiant son annulation ou sa résiliation le juge, CE, Ass., 28 décembre 2009, n° 304802 N° Lexbase : A0493EQC).

Pour aller plus loin : V. N. Lafay et E. Grelczyk, La formalisation du besoin en référence à des spécifications techniques, Droit de la commande publique, Lexbase (N° Lexbase : E7106ZKE)

newsid:474127

Sécurité sociale

[Brèves] Précisions sur la notion d'employeur pour la mise en œuvre des Règlements de coordination des régimes nationaux de Sécurité sociale dans le domaine des transports internationaux

Réf. : CJUE, 16 juillet 2020, aff. C‑610/18 (N° Lexbase : A24523RA)

Lecture: 4 min

N4160BYQ

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par Charlotte Moronval

Le 22 Juillet 2020

► L’employeur de chauffeurs de poids lourds salariés dans le transport international routier est l’entreprise de transport qui exerce l’autorité effective sur ces chauffeurs, supporte leur charge salariale et dispose du pouvoir effectif de les licencier, et non l’entreprise avec laquelle ce chauffeur routier a conclu un contrat de travail et qui est formellement présentée dans ce contrat comme étant son employeur.

Les faits. Une société établie à Chypre avait embauché des chauffeurs routiers, qu’elle avait mis à la disposition d’entreprises de transports routiers internationaux établies aux Pays Bas.

La question était de savoir quelle législation en matière de Sécurité sociale s'applique à ces chauffeurs. L’organisme de protection sociale néerlandais avait décidé d’assujettir ces salariés à la législation de Sécurité sociale hollandaise. La société estime, de son côté, que les contrats de travail conclus avec les chauffeurs sont soumis à la législation sociale chypriote étant donné que, dans ces contrats, elle est expressément désignée comme l’employeur, même si ces chauffeurs sont habituellement mis à la disposition des entreprises de transport néerlandaises.

La question préjudicielle. Dans ce contexte, la juridiction de renvoi, soulignant l’importance décisive de cette question pour la détermination de la législation nationale de Sécurité sociale applicable, a demandé à la Cour d’apporter des clarifications quant au point de savoir qui, des entreprises de transport néerlandais ou de la société chypriote, doit être considéré comme étant « l’employeur » des chauffeurs concernés. En effet, en vertu des Règlements n° 1408/71 (N° Lexbase : L4570DLT) et n° 883/2004 (N° Lexbase : L7666HT4), des personnes, telles que les chauffeurs en cause, qui exercent leurs activités dans deux ou plusieurs États membres sans être occupées de manière prépondérante sur le territoire de l’État membre où elles résident, sont soumises, en matière de Sécurité sociale, à la législation de l’État membre dans lequel l’employeur a son siège social ou son siège d’exploitation.

La position de la CJUE. La Cour a tout d’abord relevé, d’une part, que la relation entre un « employeur » et son « personnel » implique l’existence d’un lien de subordination entre ceux-ci. D’autre part, elle a souligné qu’il y a lieu de tenir compte de la situation objective dans laquelle se trouve le travailleur salarié concerné et de l’ensemble des circonstances de son occupation. À cet égard, si la conclusion d’un contrat de travail peut être un indicateur de l’existence d’un lien de subordination, cette circonstance ne saurait, à elle seule, permettre de conclure de manière décisive à l’existence d’un tel lien. En effet, encore convient-il d’avoir égard non pas seulement aux informations formellement contenues dans le contrat de travail, mais également à la manière dont les obligations incombant tant au travailleur qu’à l’entreprise en question sont exécutées en pratique. Ainsi, quel que soit le libellé des documents contractuels, il y a lieu d’identifier l’entité sous l’autorité effective de laquelle est placé le travailleur, à laquelle incombe, dans les faits, la charge salariale correspondante et qui dispose du pouvoir effectif de licencier ce travailleur.

→ En l’espèce, la Cour a constaté que les chauffeurs apparaissent faire partie du personnel des entreprises de transport et avoir ces entreprises comme employeurs, si bien que la législation néerlandaise de Sécurité sociale leur semble être applicable, ce qu’il appartient néanmoins à la juridiction de renvoi de vérifier. En effet, ces chauffeurs, avant la conclusion des contrats de travail avec la société chypriote, avaient été choisis par les entreprises de transport elles-mêmes et ont exercé, après la conclusion desdits contrats, leur activité pour le compte et au risque de ces entreprises. En outre, la charge effective de leurs salaires était assumée, par le biais de la commission versée à la société chypriote, par les entreprises de transport. Enfin, les entreprises de transport semblaient disposer du pouvoir effectif de licenciement et une partie des chauffeurs étaient, antérieurement à la conclusion des contrats de travail avec la société chypriote, déjà salariés de ces entreprises.

newsid:474160

Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

[Brèves] Le Conseil d’État réitère sa jurisprudence relative à la TVA sur la marge

Réf. : CE 8° ch., 1er juillet 2020, n° 435463, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A29813QH) ; CE 8° ch., 1er juillet 2020, n° 431641, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A29763QB)

Lecture: 2 min

N4102BYL

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par Marie-Claire Sgarra

Le 15 Juillet 2020

Par deux arrêts en date du 1er juillet 2020, le Conseil d’État a renouvelé sa position concernant le régime de la TVA sur marge.

Rappel des faits : en l’espèce, une entreprise, exerçant une activité de marchand de biens, a procédé, à la cession de trois terrains à bâtir issus de la division parcellaire de deux ensembles immobiliers constitués, chacun, d'une maison à usage d'habitation et de son terrain d'assiette. À l'issue d'un contrôle sur pièces, la société s'est vue réclamer des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, procédant de la remise en cause du régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge qu'elle avait appliqué à ces opérations. Le tribunal administratif de Dijon prononce la décharge de ces impositions. La cour administrative d’appel de Lyon a confirmé le jugement du tribunal administratif (CAA Lyon, 27 août 2019, n° 19LY01266 N° Lexbase : A6568ZM9).

En appel : le bénéfice du régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge est subordonné à la seule condition que l'acquisition du bien cédé n'ait pas ouvert droit à déduction de la taxe ; est sans incidence sur sa mise en oeuvre la circonstance que les caractéristiques physiques et la qualification du bien en cause aient été modifiées entre son acquisition et sa vente. À tort selon le Conseil d’État.

Solution : il résulte des dispositions de l’article 392 de la Directive du Conseil du 28 novembre 2006 (N° Lexbase : L7664HTZ) que les règles de calcul dérogatoires de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elles prévoient s'appliquent aux opérations de cession de terrains à bâtir qui ont été acquis en vue de leur revente et ne s'appliquent donc pas à une cession de terrains à bâtir qui, lors de leur acquisition, avaient le caractère d'un terrain bâti. Le Conseil d’État confirme donc le redressement.

À noter : le Conseil d’État a rendu une décision identique et annulé le jugement de la cour administrative d’appel de Marseille (CAA Marseille, 12 avril 2019, 18MA00802 N° Lexbase : A7535Y9X).

Rappelons que le débat ne semble pas clos sur cette question de TVA sur la marge. Le Conseil d’État a en effet saisi (enfin) la CJUE sur cette question (CE 3° et 8° ch.-r., 25 juin 2020, n° 416727, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A34753PE). Affaire à suivre…

Pour aller plus loin :

À lire, D. Falco, TVA sur la marge en matière immobilière : la condition d’identité validée par le Conseil d’État, Lexbase Fiscal, mai 2020, n° 824 (N° Lexbase : N3279BY4)

M-C. Sgarra, TVA sur marge : le Conseil d’État saisit la CJUE, Lexbase Fiscal, juillet 2020, n° 830 (N° Lexbase : N3885BYK)

 

 

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Voies d'exécution

[Brèves] Saisie attribution pratiquée entre les mains du comptable public : dérogation portant sur le délai de la communication des éléments à l’huissier de justice

Réf. : Cass. civ. 2, 2 juillet 2020, n° 19-14.379, F-P+B+I (N° Lexbase : A57513Q3)

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par Alexandra Martinez-Ohayon

Le 29 Juillet 2020

► Dans le cadre d’une saisie attribution, le tiers saisi doit déclarer au créancier l’étendue de ses obligations à l’égard du débiteur ainsi que les modalités qui pourraient les affecter et, s’il y a lieu, les cessions de créances, délégations ou saisies antérieures ; il doit effectuer cette obligation sur le-champ  auprès de l’huissier de justice en charge de la saisie ;

Par dérogation, lorsque la saisie est pratiquée entre les mains du comptable public, ce dernier dispose quant à lui d’un délai de vingt-quatre heures pour fournir à l’huissier de justice ces renseignements et lui communiquer les pièces justificatives.

Faits et procédure. L’Urssaf, a fait procéder à une saisie-attribution entre les mains de l’école nationale supérieure des officiers sapeurs-pompiers (Ensosp), sur des sommes que cet établissement public aurait été tenu envers la société Aegitna au titre d’un marché public de prestations d’accueil téléphonique et de gardiennage des sites de l’école.

Par jugement d’octobre 2013, le juge de l’exécution saisi a indiqué qu’il était compétent pour statuer sur la mesure de saisie-attribution réalisée entre les mains de l’Ensosp, et que la mesure notifiée était régulière. Néanmoins, le jugement a déclaré incompétent le juge de l’exécution, pour statuer sur la validité de l’avenant au marché public attribué à la société Aegitna et portant transfert du marché à la société Amo 13, et renvoyé les parties devant la juridiction administrative. La demande d’indemnisation de l’Urssaf a été rejetée, et cette dernière a interjeté appel de cette décision.

Durant l’instance d’appel, le conseiller de la mise en état s’est déclaré incompétent au profit de la cour administrative d’appel de Marseille. Par arrêt sur déféré de l’Urssaf, la cour d’appel a infirmé l’ordonnance du conseiller de la mise en état, et a déclaré l’exception d’incompétence recevable mais mal fondée et en a débouté l’école.

La même cour d’appel a infirmé le jugement du juge de l’exécution, en ce qu’il s’est prononcé sur le respect par l’école de son obligation d’information, sur la compétence du JEX et le renvoi de l’affaire devant la juridiction administrative concernant la question de la validité de l’avenant, le rejet de la demande d’indemnisation de l’Urssaf et les dépens.

La cour d’appel a de nouveau débouté l’organisme de sa demande de condamnation, et condamné l’école à lui verser, une somme équivalente au titre de dommages-intérêts sur le fondement de l’article R. 211-5 alinéa 2 du Code des procédures civiles d’exécution (N° Lexbase : L2211IT3), et une seconde en application de l’article R. 211-9 (N° Lexbase : L2215IT9) du même code. Les demandes des parties au titre de l’article 700 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1253IZG) ont été rejetées, mais l’école a été condamnée aux dépens de première instance et d’appel avec distraction.

Un pourvoi a été introduit et la Cour suprême, par un arrêt du 7 décembre 2017 (Cass. civ. 2, 7 décembre 2017, n° 16-23.603 N° Lexbase : A1237W7X), a cassé et annulé cet arrêt, sauf en ce qu’il a infirmé le jugement du juge de l’exécution du tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence ayant déclaré le juge de l’exécution incompétent pour statuer sur la validité de l’avenant au marché public, et renvoyé les parties à saisir le tribunal administratif.

L’arrêt dont fait l’objet cette brève porte sur l’arrêt de Cour de cassation statuant sur le pourvoi formé contre l’arrêt rendu par la cour d’appel de renvoi.

Le pourvoi. L’Urssaf, demanderesse au pourvoi fait grief à l'arrêt rendu de la débouter de sa demande de condamnation de l’Ensosp en vertu de l’article R. 211-5 alinéas 1 et 2 du Code des procédures civiles d’exécution, en mettant en avant la dérogation issue de l’article 59 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 (N° Lexbase : L9125AG3), devenu l’article R. 211-4, alinéa 1er, du Code des procédures civiles d’exécution (N° Lexbase : L6670LT9), concernant le délai dont dispose le comptable public pour fournir à l’huissier les renseignements et les pièces justificatives. Les juges d’appel ayant retenu que ces éléments pouvaient être fournis directement par l’ordonnateur ou le sachant contacté par le comptable public, dès lors, l’école n’avait pas manqué à ses obligations de tiers saisi.

Solution de la Cour. Enonçant la solution précitée, les Hauts magistrat cassent et annulent l’arrêt de la cour d’appel aux visas de l’article L. 211-3 du Code des procédures civiles d’exécution, l’article 5 du décret n° 93-977 du 31 juillet 1992 , devenu l’article R. 211-4, alinéa 3, du Code des procédures civiles d’exécution, et l’article 20 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962, devenu l’article 9 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 , mais seulement en ce qu’il a débouté l’Urssaf de ses demandes de condamnation de l’Ensosp.

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