La lettre juridique n°705 du 6 juillet 2017

La lettre juridique - Édition n°705

Droit financier

[Brèves] Marchés d'instruments financiers et séparation du régime juridique des sociétés de gestion de portefeuille de celui des entreprises d'investissement

Réf. : Ordonnance n° 2017-1107 du 22 juin 2017, relative aux marchés d'instruments financiers et à la séparation du régime juridique des sociétés de gestion de portefeuille de celui des entreprises d'investissement (N° Lexbase : L0157LGW)

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N9160BW8

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par Vincent Téchené

Le 06 Juillet 2017

La Directive "MiFID II" (Directive 2014/65/UE du 15 mai 2014 N° Lexbase : L5484I3I) a été transposée pour l'essentiel par l'ordonnance n° 2016-827 du 23 juin 2016, relative aux marchés d'instruments financiers (N° Lexbase : L8996K8P ; lire N° Lexbase : N3444BWH). Une nouvelle ordonnance, publiée au Journal officiel du 27 juin 2017, parachève cette transposition (ordonnance n° 2017-1107 du 22 juin 2017, relative aux marchés d'instruments financiers et à la séparation du régime juridique des sociétés de gestion de portefeuille de celui des entreprises d'investissement N° Lexbase : L0157LGW).
Elle définit, d'une part, les dispositions relatives aux autorités compétentes, à la coopération entre celles-ci et l'Autorité européenne des marchés financiers, et à la coopération avec les autorités compétentes des pays tiers.
D'autre part, elle procède à la séparation du régime juridique des sociétés de gestion de portefeuille de celui des entreprises d'investissement. En effet, les sociétés de gestion de portefeuille sont actuellement définies en droit français comme des entreprises d'investissement. Afin, de limiter toute situation de surtransposition liée à l'application des dispositions de "MiFID II" et "MiFIR" (Règlement n° 600/2014 du 15 mai 2014 N° Lexbase : L4857I3B) à l'ensemble des sociétés de gestion de portefeuille en leur qualité d'entreprise d'investissement, sont exclues en droit national les sociétés de gestion de portefeuille exerçant une activité de gestion collective de la catégorie des entreprises d'investissement, ces dernières étant, par nature et dans leur ensemble, concernées par les futures dispositions de "MiFID II" et "MiFIR".
L'ordonnance est composée de quatre chapitres. Le premier vise les modifications apportées au Code monétaire et financier. Le deuxième vise à tirer les conséquences dans le Code de commerce, le Code général des impôts, le Code civil et le Code du travail de la sortie des sociétés de gestion de portefeuille du régime des entreprises d'investissement. Le troisième chapitre vise les dispositions relatives à l'outre-mer. Enfin, le quatrième chapitre comprend les dispositions diverses et finales.
Ces modifications se font à droit constant pour les sociétés de gestion de portefeuille exerçant une activité de gestion collective.
La date d'entrée en vigueur de l'ordonnance est fixée au 3 janvier 2018.

newsid:459160

Entreprises en difficulté

[Brèves] Assignation en redressement judiciaire par un créancier : conditions

Réf. : Cass. com., 28 juin 2017, n° 16-10.025, FS-P+B+I (N° Lexbase : A6374WKB)

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N9152BWU

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par Vincent Téchené

Le 19 Juillet 2017

Le créancier qui assigne son débiteur en redressement judiciaire n'a pas à justifier d'un titre exécutoire, pourvu que sa créance soit certaine, liquide et exigible. Tel est l'enseignement d'un arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 28 juin 2017 (Cass. com., 28 juin 2017, n° 16-10.025, FS-P+B+I N° Lexbase : A6374WKB).
En l'espèce, une société bailleresse a été condamnée à payer une indemnité d'éviction. L'arrêt confirmatif, rendu par la cour d'appel de Pau sur l'appel des preneurs, a été déclaré non avenu, faute d'avoir été signifié dans les six mois de sa date, par un arrêt de la cour d'appel d'Agen du 14 mai 2014 qui a annulé, par voie de conséquence, tous les actes d'exécution forcée qui avaient été diligentés. Les preneurs ont assigné la société bailleresse en redressement judiciaire.
La cour d'appel d'Agen (CA Agen, 2 novembre 2015, n° 15/00432 N° Lexbase : A5639NUE) ayant fait droit à cette demande, la débitrice a formé un pourvoi en cassation.
Enonçant la solution précitée, la Haute juridiction le rejette : après avoir exactement énoncé que la demande des créanciers ne tendait pas à l'exécution du jugement du 22 novembre 2007 ayant fixé l'indemnité d'éviction due par la débitrice, mais à l'ouverture d'une procédure collective, la cour d'appel a relevé, à bon droit, que par suite de l'annulation de l'arrêt confirmatif, ce jugement avait retrouvé son plein effet, ce dont il résultait que la créance sur la société débitrice était certaine, liquide et exigible, peu important que ce jugement n'ait pas été signifié, et qu'elle pouvait être prise en considération, au titre du passif exigible, pour caractériser la cessation des paiements (cf. l’Ouvrage "Entreprises en difficulté" N° Lexbase : E8608ETY).

newsid:459152

Fiscalité des entreprises

[Jurisprudence] En matière de remboursement d'une créance de CIR des sociétés du groupe, la société intégrante est seule maître à bord...

Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 10 mai 2017, n° 395447, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A1102WCS)

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N9293BW4

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par Karim Sid Ahmed, Maitre de conférences à l'Université de Cergy-Pontoise, Directeur du M2 Droit fiscal et douanier

Le 06 Juillet 2017

Dans un groupe relevant du régime de l'intégration fiscale prévu à l'article 223 A (N° Lexbase : L1889KG3) et suivants du CGI, sauf mandat confié à une filiale, seule la société mère est recevable à demander le remboursement des créances correspondant à l'excédent des crédits d'impôt résultant des dépenses de recherche effectuées par les sociétés du groupe. Par ailleurs, une régularisation ne saurait intervenir au stade de l'appel par le dépôt d'une requête intégrant au nombre de ses auteurs la société mère (CE 9° et 10° ch.-r., 10 mai 2017, n° 395447, mentionné aux tables du recueil Lebon). La société requérante qui exerce une activité de conception et de fabrication de chargeurs embarqués fait partie d'un groupe fiscalement intégré. Elle a déclaré, au titre des exercices clos en 2009 et 2010, des dépenses de recherche (respectivement 237 733 euros et 188 742 euros) donnant lieu, selon elle, au bénéfice du crédit d'impôt prévu par l'article 244 quater B du CGI (N° Lexbase : L3333LCG) (1). S'appuyant sur les dispositions de l'article 199 ter B (N° Lexbase : L3950KW9) (2), la société mère a demandé à l'administration fiscale le remboursement immédiat des créances fiscales correspondant à l'excédent de ce crédit d'impôt après imputation sur l'impôt sur les sociétés d'ensemble du groupe. Celle-ci a partiellement accepté la demande relative à l'année 2009, et rejeté la demande relative à l'année 2010.

Ainsi, la société requérante a saisi le tribunal administratif de Montpellier de demandes tendant au remboursement de ces créances. Celles-ci ont été rejetées par un jugement du 28 décembre 2012 au motif qu'elles étaient irrecevables (TA Montpellier, 28 décembre 2012, n° 1105301).

Les deux sociétés (filiale et mère) ont conjointement fait appel du jugement auprès de la de la cour administrative d'appel de Marseille. Elles estiment que la société filiale disposait de la qualité pour agir car les dispositions de l'article 223 O du CGI (N° Lexbase : L3199KWE) sont sans influence sur la détermination de cette qualité. Par ailleurs, elles ajoutent que la circonstance que la société mère est au nombre des auteurs de la requête d'appel est de nature à régulariser les demandes présentées devant les premiers juges par la filiale.

Les juges du fond, dans un arrêt en date du 20 octobre 2015, rejettent leur appel (3). Ils rappellent "que seule la société mère pouvait imputer le crédit d'impôt litigieux sur l'impôt sur les sociétés dont elle était redevable ou en demander le remboursement". Avant d'ajouter que "la société mère a accompagné les relevés de solde relatifs aux résultats d'ensemble du groupe au titre des exercices clos en 2009 et 2010 des déclarations relatives au crédit d'impôt en faveur de la recherche établies par la société filiale, et présenté elle-même, en tant que société mère, les demandes de remboursement de ces crédits".

L'argument tenant au fait que la présence de la société mère parmi les auteurs de la requête d'appel aurait permis de régulariser les demandes présentées devant les premiers juges par sa filiale n'a pas davantage convaincu les magistrats. La cour conclut que la filiale était irrecevable à demander devant le tribunal administratif le remboursement desdits crédits d'impôt.

Par la suite, les sociétés concernées ont formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt. Elles soutiennent que la cour d'appel a "commis une erreur de droit en jugeant qu'au sein d'un groupe fiscalement intégré, seule la société mère était recevable à demander le remboursement des créances correspondant à l'excédent des crédits d'impôt résultant des dépenses de recherche effectuées par les sociétés du groupe".

La Conseil d'Etat, dans un arrêt du 10 mai 2017, rejette le pourvoi au motif que la société mère était la seule recevable à demander le remboursement des créances correspondant à l'excédent des crédits d'impôt résultant des dépenses de recherche effectuées par les sociétés du groupe. Toutefois, les juges du Palais-Royal admettent qu'en vertu du principe de solidarité (CGI, art. 223 A), une réclamation (exemple : remboursement d'un crédit d'impôt) introduite par une société membre est recevable si la société mère du groupe lui a confié un mandat régulier. Or, tel n'était pas le cas dans cette affaire.

De prime abord, la question posée par cet arrêt ne semble pas d'une particulière complexité. En effet, et cela est suffisamment rare pour le mentionner, l'article 223 O du CGI est limpide et ne laisse guère la place au doute et à l'interprétation. Il est ainsi indiqué que "la société mère est substituée aux sociétés du groupe pour l'imputation sur le montant de l'impôt sur les sociétés dont elle est redevable au titre de chaque exercice [...] des crédits d'impôt pour dépenses de recherche dégagés par chaque société du groupe en application de l'article 244 quater B". Cette clarté souvent fuyante en droit fiscal n'enlève pourtant pas tout intérêt à cette décision. La raison principale est que l'on se trouve face à une des questions les plus épineuses de la fiscalité des affaires qui est celle de l'appréhension par le droit fiscal d'une réalité économique qu'est le groupe de sociétés. Celui-ci peut être défini comme un ensemble de sociétés qui, tout en conservant leur existence juridique propre, se trouve liées les unes aux autres de sorte que l'une d'elles, la société mère, qui tient les autres sous sa dépendance, en fait ou en droit, exerce un contrôle sur l'ensemble des sociétés dominées et fait prévaloir une unité de décision.

Le droit fiscal, sans aller jusqu'à reconnaitre la personnalité morale aux groupes de sociétés, a fait le choix de ne pas ignorer leurs spécificités. C'est l'article 223 A du CGI qui s'est engagé le plus loin sur cette voie en instaurant le régime de l'intégration fiscale qui permet à la société mère de "se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95 % au moins du capital". Il s'agit d'un pas important effectué par le législateur en faveur de la reconnaissance de la personnalité fiscale du groupe de sociétés. La jurisprudence, quant à elle, a eu l'occasion s'agissant du contrôle fiscal des filiales de groupes intégrés de rappeler que l'administration fiscale ne pouvait faire abstraction de l'existence de ceux-ci. L'administration est ainsi tenue d'indiquer à la société mère les conséquences de la vérification de comptabilité de la filiale sur le résultat d'ensemble du groupe (exemple : CE 9° et 10° s-s-r., 13 décembre 2013, n° 338133, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A3703KRL).

Il apparaît dès lors très nettement que le droit fiscal a entendu faire de la société mère l'organe central du régime de l'intégration fiscale. En effet, la consolidation fiscale a pour conséquence que l'impôt sur les sociétés ne sera acquitté que par la société tête de groupe. Celle-ci est ainsi seule redevable des impôts sur les résultats du groupe. Toutefois, chaque société du groupe est solidairement tenue des impôts dus par la société tête de groupe à hauteur de la fraction des impôts correspondant à ses résultats.

L'arrêt du 10 mai 2017 vient en quelque sorte raviver la question des rôles reconnus à chaque entité du groupe intégré. On sait que les sociétés membres conservent leur personnalité morale même après leur entrée dans le périmètre d'intégration. Ce qui explique qu'elles continuent de souscrire une déclaration de résultat. A ce stade, les membres du groupe se voient donc reconnaître un rôle et une place par le droit fiscal au sein du groupe intégré. Néanmoins, la phase ultérieure de détermination et d'imposition du résultat d'ensemble les écarte totalement au profit de la société mère.

En l'espèce, les dépenses de recherche avaient été déclarées conformément à cette répartition des rôles par la société filiale. Le crédit d'impôt obtenu conformément à l'article 244 quater B du CGI a ensuite fait l'objet d'une imputation sur l'imposition du résultat d'ensemble. Enfin, la société mère a demandé à l'administration fiscale le remboursement immédiat des créances fiscales correspondant à l'excédent de ce crédit d'impôt après imputation sur l'impôt sur les sociétés d'ensemble du groupe.

On remarquera, au cas présent, que la demande a été bien effectuée par la société mère et non par sa filiale. Ce qui pourrait laisser supposer qu'elle connaissait les subtilités propres à l'organisation "institutionnelle" du groupe intégré. Pourtant, ce n'est pas elle mais sa filiale qui a saisi le tribunal administratif de Marseille de demandes tendant au remboursement de ces créances. On rappellera que la filiale ne disposait d'aucun mandat pour agir au nom de la société intégrante. Cet oubli aurait pu être évité car au stade de l'instance juridictionnelle, dans le délai de recours contentieux, le défaut de qualité du signataire de la demande introductive d'instance ou de la requête peut être régularisé par la production d'un mandat (4). La jurisprudence eu l'occasion d'affirmer à plusieurs reprises qu'après notification d'une décision de rejet pour irrecevabilité, le vice de forme peut être régularisé par la demande adressée au tribunal administratif, dans le délai de recours contentieux, présentée par le contribuable lui-même (CAA Nancy, 19 juin 1990, n° 89NC00224 N° Lexbase : A9982AWM) ou par une personne ayant qualité pour agir en son nom sans mandat (CE 8° et 9° s-s-r., 1er mars 1989, n° 79218 et 79283, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A0716AQL ; CE 7° et 8° s-s-r., 3 mai 1989, n° 78223, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A1182AQT), ainsi que par une personne dûment mandatée. On soulignera que les juges administratifs se montrent plus conciliants que leurs homologues judiciaires s'agissant de la régularisation d'un vice de forme. La jurisprudence de la Cour de cassation est fluctuante sur la question, tantôt favorable (Cass. com., 16 mai 1995, n° 93-18.216), tantôt défavorable (Cass. com., 10 octobre 1989, n° 87-19.363 N° Lexbase : A0018CR4) à une telle régularisation.

La régularisation selon les requérants était intervenue au stade de l'appel car la société mère figurait parmi les auteurs de la requête d'appel. Le Conseil d'Etat, à l'instar de la cour administrative d'appel, n'a pas estimé cette "régularisation" recevable. Cette solution est conforme à la jurisprudence administrative relative à la régularisation des vices de forme. La Haute juridiction n'a donc pas souhaité faire une entorse à celle-ci s'agissant du crédit d'impôt recherche. Du point de vue des principes, cela aurait été difficilement justifiable mais le besoin actuel de soutenir les activités de recherche et développement des entreprises aurait pu conduire à une toute autre solution fondée sur le pragmatisme.

On soulignera, en dernier lieu, que cette jurisprudence fait d'une certaine manière écho à celle qui refuse de reconnaître l'intérêt de groupe comme fait justificatif en matière d'acte anormal de gestion (5). Pour échapper au couperet qu'est acte anormal de gestion, une filiale ne peut se prévaloir de son appartenance au groupe. Ainsi, dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt commenté, on aurait pu considérer que la société filiale était recevable à demander le remboursement des créances fiscales du fait de son appartenance à un groupe intégré.

Il apparaît qu'au-delà de la question de la régularisation d'un vice de forme, cet arrêt met en lumière une nouvelle fois les problèmes engendrés sur le plan fiscal par l'absence de reconnaissance de personnalité morale aux groupes de sociétés.


(1) CGI, art. 244 quater B, al. 1 : "Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies (N° Lexbase : L3941KWU), 44 sexies A (N° Lexbase : L0952I7E), 44 septies (N° Lexbase : L4650I7D), 44 octies (N° Lexbase : L1927KGH), 44 octies A (N° Lexbase : L1926KGG), 44 duodecies (N° Lexbase : L9750I3I), 44 terdecies (N° Lexbase : L3061LCD) à 44 quindecies peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année".
(2) CGI, art. 199 ter B, al. 1 : "Le crédit d'impôt pour dépenses de recherche défini à l'article 244 quater B est imputé sur l'impôt sur le revenu dû par le contribuable au titre de l'année au cours de laquelle les dépenses de recherche prises en compte pour le calcul du crédit d'impôt ont été exposées. L'excédent de crédit d'impôt constitue au profit de l'entreprise une créance sur l'Etat d'égal montant. Cette créance est utilisée pour le paiement de l'impôt sur le revenu dû au titre des trois années suivant celle au titre de laquelle elle est constatée puis, s'il y a lieu, la fraction non utilisée est remboursée à l'expiration de cette période".
(3) CAA Marseille, 20 octobre 2015, n° 13MA00854 (N° Lexbase : A3251NUX).
(4) BOI-CTX-PREA-10-50-20120912, n° 330 (N° Lexbase : X5222ALY).
(5) CE 3° et 8° s-s-r., 28 avril 2006, n° 278738, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A1995DPL).

newsid:459293

Fiscalité des entreprises

[Brèves] Sur les règles d'imputation de la retenue à la source sur les revenus mobiliers de sources française ou étrangère

Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 26 juin 2017, n° 406437, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A4502WKX) et n° 386269, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A4492WKL)

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N9159BW7

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par Jules Bellaiche

Le 06 Juillet 2017

L'imputation de l'impôt retenu à la source sur les revenus de source française et sur les revenus de source étrangère, perçus au cours d'un exercice, s'opère sur l'impôt sur les sociétés à la charge du bénéficiaire de ces revenus au titre de cet exercice, sans qu'il y ait lieu de distinguer selon que cet impôt est dû au taux normal ou au taux réduit. Telle est la solution retenue par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 26 juin 2017 (CE 9° et 10° ch.-r., 26 juin 2017, deux arrêts, n° 406437, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A4502WKX et n° 386269, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A4492WKL).
En l'espèce, la société requérante soutient que les dispositions de l'article 220 du CGI (N° Lexbase : L1389IZH) méconnaissent les principes d'égalité devant la loi et d'égalité devant les charges publiques, le droit de propriété, ainsi que la compétence du législateur, en ce qu'elles ne prévoient pas la possibilité, pour les contribuables assujettis à l'impôt sur les sociétés bénéficiaires de revenus de capitaux mobiliers qui ont supporté des retenues à la source, d'imputer ces dernières sur l'impôt dû, quel que soit le taux auquel il est calculé, ni de reporter sur les exercices suivants la fraction de ces retenues qui n'aurait pu être imputée.
Pour la Haute juridiction, eu égard à l'argumentation ainsi développée, la société doit être regardée comme contestant seulement la constitutionnalité des dispositions du a du 1 de l'article 220 du CGI. Ces dernières, qui ont valeur législative, sont applicables au litige et n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel. D'une part, comme énoncé dans le principe dégagé, l'imputation des retenues à la source que les dispositions litigieuses prévoient s'opère sur l'impôt sur les sociétés dû au titre de l'exercice de perception des revenus, quel que soit le taux auquel il est calculé.
En revanche, et d'autre part, les moyens tirés de ce qu'en ne prévoyant pas la possibilité pour les contribuables qui n'ont pu imputer en tout ou partie ces retenues à la source sur l'impôt sur les sociétés dû au titre du même exercice d'en reporter la fraction non utilisée sur les exercices suivants, ces dispositions méconnaissent les principes d'égalité devant la loi et d'égalité devant les charges publiques, ainsi que le droit de propriété, soulèvent une question qui présente un caractère sérieux. Par conséquent, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée (cf. le BoFip - Impôts annoté N° Lexbase : X5678ATH).

newsid:459159

Licenciement

[Brèves] Procédures de licenciement économique collectif successives et PSE distincts : les différences relatives aux avantages prévus dans les divers PSE peuvent être justifiées

Réf. : Cass. soc., 29 juin 2017, deux arrêts, n° 15-21. 008 (N° Lexbase : A1625WLR) et n° 16-12.007 (N° Lexbase : A1626WLS), FS-P+B+R+I

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N9162BWA

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par Blanche Chaumet

Le 06 Juillet 2017

Il n'y a pas de violation du principe d'égalité de traitement lorsque deux procédures de licenciement économique collectif ont été successivement engagées dans l'entreprise accompagnées de plans de sauvegarde de l'emploi distincts, le salarié licencié dans le cadre de la première procédure n'étant pas dans une situation identique à celle des salariés licenciés dans le cadre de la seconde procédure au cours de laquelle a été élaboré, après information et consultation des institutions représentatives du personnel, le plan prévoyant les avantages revendiqués. Telle est la solution dégagée par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans deux arrêts rendus le 29 juin 2017 (Cass. soc., 29 juin 2017, n° 15-21. 008 N° Lexbase : A1625WLR et n° 16-12.007 N° Lexbase : A1626WLS, FS-P+B+R+I).

Dans les deux cas, les salariés avaient été licenciés dans le cadre d'une procédure de licenciement économique collectif avec la mise en place d'un PSE. Les sociétés avaient, ensuite, mis en place une seconde procédure de licenciement avec un PSE distinct du premier. Les avantages figurants dans les deux PSE étant différents, les salariés licenciés au cours de la première procédure ont saisi la juridiction prud'homale sur le fondement du principe d'égalité de traitement.

Dans le premier cas, pour faire droit à la demande du salarié, la cour d'appel (CA Montpellier, 6 mai 2015, n° 12/02135 N° Lexbase : A7331NHY) retient notamment que si le montant de l'indemnité complémentaire et la durée de congé de reclassement résultent de plans distincts, ceux-ci conféraient néanmoins des avantages de même nature et que pour justifier ces différences de traitement d'un plan par rapport à l'autre, il n'est allégué aucune difficulté particulière de reclassement professionnel ni de niveau de qualification différent des salariés concernés ou d'une dégradation de la situation de l'emploi.

Dans le second cas, pour faire droit à la demande des salariés licenciés, la cour d'appel (CA Angers, deux arrêts, 17 décembre 2015, n° 13/01983 N° Lexbase : A9181NZ3 et n° 13/02031 N° Lexbase : A9163NZE) énonce, notamment, que la circonstance que le second PSE et la procédure de licenciement collectif pour motif économique qu'il accompagnait se soient inscrits dans le cadre d'une fermeture du site alors que le premier PSE et la première procédure de licenciement collectif pour motif économique s'étaient inscrits dans le cadre de la suppression d'un grand nombre d'emplois ne suffit pas en soi à caractériser une différence de situation propre à justifier le versement de l'indemnité litigieuse aux seuls salariés licenciés en 2007. A la suite de cette décision, les sociétés respectives se sont pourvues en cassation.

En énonçant la règle susvisée, la Haute juridiction casse les arrêts d'appel (voir la note explicative ; cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E9336ESL).

newsid:459162

QPC

[Brèves] Inconstitutionnalité du délai d'appel des jugements des juridictions du travail, applicable uniquement dans certains territoires ultramarins

Réf. : Cons. const., décision n° 2017-641 QPC du 30 juin 2017 (N° Lexbase : A1657WLX)

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N9169BWI

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par Blanche Chaumet

Le 06 Juillet 2017

Les mots "Dans les quinze jours du prononcé du jugement", figurant au premier alinéa de l'article 206 de la loi n° 52-1322 du 15 décembre 1952, instituant un Code du travail dans les territoires et territoires associés relevant des ministères de la France d'Outre-mer (N° Lexbase : L6236HXA), dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 82-1114 du 23 décembre 1982, relative au régime législatif du droit du travail dans le territoire de la Nouvelle-Calédonie et dépendances et prévoyant un délai d'appel des jugements des juridictions du travail, applicable uniquement dans certains territoires ultramarins, dont Mayotte, sont contraires à la Constitution. Telle est la solution dégagée par le Conseil constitutionnel dans un arrêt rendu le 30 juin 2017 (Cons. const., décision n° 2017-641 QPC du 30 juin 2017 N° Lexbase : A1657WLX).

Saisi d'une QPC par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation (Cass. QPC, 5 mai 2017, n° 17-40.029, F-D N° Lexbase : A9539WBW), le Conseil constitutionnel précise, en énonçant la règle susvisée, que l'exclusion qui résulte du délai de droit commun, fixé d'ailleurs par le pouvoir réglementaire, ne trouve sa justification ni dans une différence de situation des justiciables dans ce territoire par rapport à ceux des autres territoires, ni dans l'organisation juridictionnelle, les caractéristiques ou les contraintes particulières propres au département de Mayotte. Il en résulte que ces dispositions sont contraires à la Constitution. La déclaration d'inconstitutionnalité intervient à compter de la date de publication de cette décision et est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date.

Par suite, les Sages précisent qu'à compter de cette date, le délai applicable pour l'appel des jugements mentionnés à l'article 206 de la loi du 15 décembre 1952 est celui de droit commun.

newsid:459169

Responsabilité administrative

[Brèves] Indemnisation des victimes des essais nucléaires : conditions de renversement de la présomption de causalité

Réf. : CE 2° et 7° ch.-r., 28 juin 2017, n° 409777, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A1544WLR)

Lecture: 2 min

N9170BWK

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par Yann Le Foll

Le 06 Juillet 2017

Concernant l'indemnisation des victimes des essais nucléaires, la présomption de causalité ne peut être renversée que si l'administration établit que la pathologie de l'intéressé résulte exclusivement d'une cause étrangère à l'exposition aux rayonnements ionisants due aux essais nucléaires, en particulier parce qu'il n'a subi aucune exposition à de tels rayonnements. Telle est la solution d'un avis rendu le 28 juin 2017 (CE 2° et 7° ch.-r., 28 juin 2017, n° 409777, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A1544WLR).

A l'occasion du même avis, la Haute juridiction indique qu'il résulte du II de l'article 113 de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 (N° Lexbase : L0526LDT), d'une part, que le législateur a confié au comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN) la mission de réexaminer l'ensemble des demandes d'indemnisation ayant fait l'objet d'une décision de rejet de la part du ministre ou du comité, s'il estime que l'entrée en vigueur de cette loi est susceptible de justifier l'abrogation de la précédente décision et, d'autre part, que les victimes ou leurs ayants droit peuvent, dans les douze mois à compter de l'entrée en vigueur de cette loi, présenter au CIVEN une nouvelle demande d'indemnisation.

Compte tenu de son office, il appartient au juge du plein contentieux, saisi d'un litige relatif à une décision intervenue après réexamen d'une ancienne demande d'indemnisation ou en réponse à une demande postérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 28 février 2017, de statuer en faisant application des dispositions de la loi n° 2010-2 du 5 janvier 2010 (N° Lexbase : L2038IGL), dans leur rédaction issue de la loi du 28 février 2017 et, s'il juge illégale la décision contestée, de fixer le montant de l'indemnité due au demandeur, sous réserve que ce dernier ait présenté des conclusions indemnitaires chiffrées, le cas échéant, après que le juge l'a invité à régulariser sa demande sur ce point.

En revanche, il résulte des dispositions rappelées ci-dessus de la loi du 28 février 2017 que le législateur a entendu que, lorsque le juge statue sur une décision antérieure à leur entrée en vigueur, il se borne, s'il juge, après avoir invité les parties à débattre des conséquences de l'application de la loi précitée, qu'elle est illégale, à l'annuler et à renvoyer au CIVEN le soin de réexaminer la demande (cf. l’Ouvrage "Responsabilité administrative" N° Lexbase : E3802EUD).

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Social général

[Jurisprudence] Les éléments clés d'un accord autorisant valablement le recours au forfait en jours

Réf. : Cass. soc., 22 juin 2017, n° 16-11.762, FS-P+B (N° Lexbase : A1017WKU)

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N9227BWN

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par Sébastien Tournaux, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux

Le 06 Juillet 2017

Parmi les très nombreuses affaires portées devant la Chambre sociale de la Cour de cassation pour apprécier la validité d'un accord collectif autorisant le recours au forfait en jours, peu nombreuses sont celles ayant trouvé grâce à ses yeux. Il est donc toujours très intéressant d'analyser les arrêts, comme celui rendu le 22 juin 2017, qui jugent suffisant le contenu de tels accords (I). L'analyse de cette décision, mise en perspective avec les précédents accords validés et les dispositions légales nouvelles issues de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels (N° Lexbase : L8436K9C), dite "El Khomri", permettent d'esquisser une trame du contenu que doit revêtir l'accord collectif, sans malheureusement épuiser toute interrogation (II).
Résumé

Répond aux exigences relatives au droit à la santé et au repos, l'accord conclu le 11 juillet 2008, relatif à l'organisation du temps de travail des cadres relevant du statut d'autonomie, selon lequel ces personnels sont soumis à un forfait annuel en jours évalué à deux cent neuf jours par an, en ce qu'il prévoit, d'une part, que les cadres sont tenus de déclarer régulièrement dans le logiciel "temps" en place dans l'entreprise le nombre de jours ou de demi-journées travaillées ainsi que le nombre de jours ou de demi-journées de repos et qu'une consolidation est effectuée par la direction des ressources humaines pour contrôler leur durée de travail, d'autre part, qu'au cours de l'entretien annuel d'appréciation, le cadre examine avec son supérieur hiérarchique la situation du nombre de jours d'activité au cours de l'exercice précédent au regard du nombre théorique de jours de travail à réaliser, les modalités de l'organisation, de la charge de travail et de l'amplitude de ses journées d'activité, la fréquence des semaines dont la charge a pu apparaître comme atypique, que toutes mesures propres à corriger cette situation sont arrêtées d'un commun accord et que s'il s'avère que l'intéressé n'est pas en mesure d'exercer ses droits à repos, toute disposition pour remédier à cette situation sera prise d'un commun accord entre le cadre concerné et son manager.

I - Le maintien d'un contrôle étroit des accords collectifs autorisant le recours au forfait en jours

Surveillance étroite des accords collectifs. Depuis un fameux arrêt rendu le 29 juin 2011 (1), la Chambre sociale de la Cour de cassation contrôle étroitement le contenu des accords collectifs autorisant le recours aux conventions de forfait en jours et le respect, par l'employeur, de ses stipulations destinées à assurer "la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires" et à "garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, du travail du salarié".

De nombreux accords sont passés sous les fourches caudines de la Chambre sociale de la Cour de cassation et la majorité des accords contrôlés a été jugée insuffisante au regard des exigences constitutionnelles et européennes de protection de la santé et du repos des travailleurs (2).

L'incertitude planant sur ces accords était telle que ce lourd contentieux a, une fois n'est pas coutume, stimulé une intervention législative. La loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels (N° Lexbase : L8436K9C), dite "El Khomri", a ainsi sensiblement sécurisé les conventions de forfait en jours, d'abord, en permettant aux employeurs de pallier les insuffisances d'un accord collectif peu loquace sur les questions de durées de travail, de temps de repos et de charge de travail, ensuite, en mettant en oeuvre un dispositif de "rattrapage" des conventions de forfait conclues antérieurement à la loi (3).

La jurisprudence antérieure n'a que rarement permis d'appréhender quel contenu exact était attendu de l'accord. La loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 apporte quelques précisions et exige de l'accord qu'il envisage les "modalités selon lesquelles l'employeur assure l'évaluation et le suivi régulier de la charge de travail du salarié", les "modalités selon lesquelles l'employeur et le salarié communiquent périodiquement sur la charge de travail du salarié, sur l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle, sur sa rémunération ainsi que sur l'organisation du travail dans l'entreprise" et "les modalités selon lesquelles le salarié peut exercer son droit à la déconnexion" (4). La loi n'était, toutefois, pas applicable à l'affaire présentée.

Présentation des accords collectifs validés. La Chambre sociale, nous l'avons vu, n'a que rarement admis qu'un accord collectif autorisant le recours aux conventions de forfait en jours comporte des garanties suffisantes en matière de temps et de charge de travail raisonnables. Il n'est donc pas inutile de revenir rapidement sur le contenu d'accords validés.

En 2011, la Chambre sociale jugeait que l'accord du 28 juillet 1998, sur l'organisation du travail dans la métallurgie, comportait des garanties suffisantes (5). L'accord exigeait que soit organisé "un contrôle du nombre de jours travaillés, afin de décompter le nombre de journées ou de demi-journées travaillées, ainsi que celui des journées ou demi-journées de repos prises", imposait à l'employeur d'établir "un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées, ainsi que le positionnement et la qualification des jours de repos en repos hebdomadaires, congés payés, congés conventionnels ou jours de repos au titre de la réduction du temps de travail" et au supérieur hiérarchique du salarié au forfait d'assurer "le suivi régulier de l'organisation du travail de l'intéressé et de sa charge de travail". Enfin, l'accord prévoyait que chaque salarié au forfait devait bénéficier "chaque année, d'un entretien avec son supérieur hiérarchique au cours duquel seront évoquées l'organisation et la charge de travail de l'intéressé et l'amplitude de ses journées d'activité", amplitude et charge de travail qui devaient rester "raisonnables et assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail de l'intéressé".

En 2014 (6), c'est l'accord d'aménagement et de réduction du temps de travail dans le secteur des banques du 29 mai 2001, qui fut validé par la Chambre sociale. Cet accord prévoit, en effet, qu'un "décompte des journées et demi-journées travaillées se fait sur la base d'un système auto-déclaratif", que "l'organisation du travail de ces salariés devra faire l'objet d'un suivi régulier par la hiérarchie qui veillera notamment aux éventuelles surcharges de travail", que "dans ce cas, il y aura lieu de procéder à une analyse de la situation, de prendre le cas échéant toutes dispositions adaptées pour respecter, en particulier, la durée minimale du repos quotidien prévue par l'article L. 220-1 du Code du travail (N° Lexbase : L4622DZ9) et de ne pas dépasser le nombre de jours travaillés, et ce dans les limites prévues au dernier alinéa de l'article L. 212-15-3, III, dudit code ([LXB=L7755HB])" et que "la charge du travail confiée et l'amplitude de la journée d'activité en résultant doivent permettre à chaque salarié de prendre obligatoirement le repos quotidien visé ci-dessus".

Enfin, en 2016 (7), la Chambre sociale jugeait suffisant le contenu d'un accord collectif sur la réduction du temps de travail qui stipulait que "les conditions de contrôle et de suivi de l'organisation du travail, de l'amplitude des journées d'activité et de charge de travail des cadres au forfait jours sont décrites dans l'annexe jointe, laquelle recense un ensemble de thèmes, parmi lesquels les principes du droit aux repos hebdomadaire et journalier minimum, les moyens de contrôle et leur fréquence, hebdomadaire ou mensuelle, ainsi que 'le suivi et le contrôle de la charge de travail' dont il est précisé qu'ils sont destinés à permettre à chaque cadre d'alerter sa hiérarchie en cas de difficulté' au moyen d'une zone de commentaire spécifique sur le relevé déclaratif' avec possibilité de demande d'entretien auprès de la hiérarchie' et selon une périodicité mensuelle'".

Analyse des accords validés. Chacune de ces affaires permettait de mettre en lumière les grands marqueurs que la Chambre sociale entend voir apparaître dans un accord autorisant le recours au forfait en jours et que l'on peut compléter par l'analyse de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016.

Doit, d'abord, être prévu qu'un système de contrôle des durées de travail et des temps de repos soit mis en oeuvre. Si le salarié peut être associé au contrôle, l'employeur doit toujours, in fine, contrôler et valider ses déclarations.

Ensuite, il doit être organisé un suivi régulier de la charge de travail qui passe, dans chacun de ces accords, par l'organisation d'entretiens réguliers (annuels) au cours desquels des thématiques précises doivent être abordées : charge et amplitude de travail au cours du cycle précédent, respect des durées maximales de travail et des temps minima de repos, identification d'une surcharge de travail, etc. La loi ajoute des items de discussion comme la rémunération du salarié, l'organisation du travail dans l'entreprise ou la conciliation vie personnelle/vie professionnelle.

Enfin, des moyens doivent être mis en place afin de permettre au salarié et/ou à sa hiérarchie de faire face à un dérapage. L'accord peut organiser un dispositif d'alerte de sa hiérarchie par le salarié en cas de surcharge de travail ou de dépassement des durées. L'accord peut, encore, autoriser l'employeur à prendre les mesures pour que cessent les dépassements de durées maximales raisonnables de travail ou de durées minimales de repos, etc.

Ce sont ces grands traits que l'on retrouve dans l'accord collectif analysé par la Chambre sociale dans l'arrêt sous examen.

L'affaire. Une salariée "bénéficiait" d'un forfait-jours de deux cent neuf jours par an en application d'un accord du 11 juillet 2008, relatif à l'organisation du temps de travail des cadres. Elle saisit le juge prud'homal et demanda le paiement de rappel de salaires au titre d'heures supplémentaires et de diverses indemnités en invoquant, à titre principal, la nullité de la convention de forfait en jours en raison des insuffisances de l'accord collectif qui ne serait pas de nature à assurer la protection de sa sécurité et de sa santé et, à titre subsidiaire, le comportement de l'employeur qui n'aurait pas mis en oeuvre les mesures prévues par l'accord.

La cour d'appel de Lyon la débouta de ses demandes et elle forma pourvoi en cassation en reprenant les mêmes arguments. Par un arrêt rendu le 22 juin 2017, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette son pourvoi.

Par un long attendu, elle juge, d'abord, que "répond aux exigences relatives au droit à la santé et au repos, l'accord conclu le 11 juillet 2008 [...] en ce qu'il prévoit, d'une part que les cadres sont tenus de déclarer régulièrement dans le logiciel temps' en place dans l'entreprise le nombre de jours ou de demi-journées travaillées ainsi que le nombre de jours ou de demi-journées de repos et qu'une consolidation est effectuée par la direction des ressources humaines pour contrôler leur durée de travail, d'autre part qu'au cours de l'entretien annuel d'appréciation, le cadre examine avec son supérieur hiérarchique la situation du nombre de jours d'activité au cours de l'exercice précédent au regard du nombre théorique de jours de travail à réaliser, les modalités de l'organisation, de la charge de travail et de l'amplitude de ses journées d'activité, la fréquence des semaines dont la charge a pu apparaître comme atypique, que toutes mesures propres à corriger cette situation sont arrêtées d'un commun accord et que s'il s'avère que l'intéressé n'est pas en mesure d'exercer ses droits à repos, toute disposition pour remédier à cette situation sera prise d'un commun accord entre le cadre concerné et son manager".

Elle considère, ensuite, s'agissant de la mise en oeuvre de l'accord, que "la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve, a relevé que la mise en oeuvre du forfait-jours avait fait l'objet d'un suivi régulier par l'employeur, et fait ressortir que celui-ci avait veillé à ce que la charge de travail de la salariée ne soit pas excessive".

II - L'émergence progressive d'indices de la validité de l'accord autorisant le recours à l'accord collectif

Accord d'entreprise. La convention de forfait avait été conclue en application d'un accord collectif d'entreprise. Si cette possibilité est expressément envisagée par le Code du travail qui lui donne priorité depuis la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, il n'en allait pas aussi clairement sous l'empire de la législation antérieure (8).

Ce n'est, toutefois, pas la première fois que la Chambre sociale accepte qu'un accord collectif d'entreprise complète un accord de branche, voire qu'il prévoit seul la possibilité de recourir aux conventions de forfait en jours (9), si bien qu'il n'y a là, que la confirmation d'une règle relative à une situation qui a vocation à devenir de plus en plus fréquente.

Contenu d'un accord valable. La Chambre sociale nous fournit surtout une nouvelle illustration du contenu que l'on doit trouver dans un accord collectif de branche ou d'entreprise, pour que soient garantis les durées maximales raisonnables de travail, les temps de repos minima et une charge de travail raisonnable.

Comme dans les affaires précédemment étudiées, l'accord prévoyait un contrôle des journées de travail et de repos par un système hybride de déclaration par le salarié et de validation par l'employeur. L'intervention du salarié dans le contrôle est admise depuis plusieurs années, à condition qu'il ne soit pas seul à en supporter la charge et les conséquences (10). Pour autant, les textes issus de la loi "El Khomri" ne semblent pas être aussi permissifs. En effet, l'article L. 3121-63 du Code du travail (N° Lexbase : L6652K9A), qui détermine le contenu de l'accord collectif, dispose que l'accord doit établir "les modalités selon lesquelles l'employeur assure l'évaluation et le suivi régulier de la charge de travail du salarié" (11). Il faut s'intéresser aux dispositions supplétives, applicables en cas d'insuffisance de l'accord, pour trouver une éventuelle intervention conjointe du salarié et de l'employeur dans ce contrôle, l'article L. 3121-65 du Code du travail (N° Lexbase : L6659K9I) prévoyant qu'en cas d'insuffisance de l'accord, "l'employeur établit un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées. Sous la responsabilité de l'employeur, ce document peut être renseigné par le salarié". Il n'est donc pas certain, qu'à l'avenir, un accord collectif soit jugé suffisant par le juge lorsque l'accord sollicitera le salarié pour déclarer ses heures de travail. Les conséquences d'une telle solution seraient, toutefois, insignifiantes : si l'accord est jugé insuffisant, l'employeur pourra y pallier en établissant un document de contrôle éventuellement renseigné par le salarié.

De la même manière, la Chambre sociale prête attention à l'organisation d'un suivi régulier par le biais d'entretiens annuels au cours desquels des thématiques précises doivent être abordées : nombre de jours d'activité au regard du nombre théorique de jours de travail à réaliser ; modalités de l'organisation, de la charge de travail et de l'amplitude des journées d'activité ; fréquence des semaines dont la charge a pu apparaître comme atypique. De tous les accords déjà validés par la Chambre sociale, l'accord examiné est sans doute celui qui détaille le plus le contenu de l'entretien. Il reste, toutefois, en deçà, là encore, des exigences de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, puisqu'il n'est pas imposé que soient discutées les questions de rémunération, d'organisation du travail ou de conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle. Il est vrai que la loi nouvelle n'impose pas à l'accord de prévoir des entretiens mais seulement d'organiser des modalités de "communication" entre l'employeur et le salarié sur ces sujets. Quoiqu'il en soit, on perçoit, à nouveau, sur cette question, que les dispositions supplétives du Code du travail pourraient souvent trouver à s'appliquer lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, ces questions ne font pas l'objet d'une évaluation sous la contrainte de l'accord collectif.

L'accord examiné s'intéresse, enfin, aux conséquences d'un désordre (dépassement des durées maximales ou minimales, charge de travail excessive, etc.) en prévoyant que toutes les mesures propres à remédier à ces difficultés peuvent être prises d'un commun accord, en particulier si le salarié n'est pas en mesure de bénéficier de ses droits à repos. Sur ce point, l'accord comme la Chambre sociale de la Cour de cassation vont plus loin que la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, qui ne s'intéresse qu'assez peu aux conséquences d'un suivi qui démontrerait une surcharge de travail ou le non-respect des durées raisonnables de travail ou minimales de repos. Or, il s'agit d'une question essentielle tant il semble, en grande partie, inutile d'avoir les moyens d'identifier un dysfonctionnement sans envisager de mesure pour y remédier. Sans doute les partenaires sociaux pourront-ils faire preuve d'imagination dans ce domaine. On peut aussi imaginer que de telles mesures prévues en nombre et en qualité par l'accord pourraient compenser des insuffisances relatives aux thématiques abordées lors d'un entretien, par exemple.

Appréciation du respect de l'accord collectif. On relèvera, enfin, brièvement, que c'est la première fois, à notre connaissance, que la Chambre sociale de la Cour de cassation affirme aussi clairement que l'appréciation de la bonne mise en oeuvre de l'accord par l'employeur relève du pouvoir souverain des juges du fond.

Cela n'étonne guère. D'abord, parce que les termes employés par la Chambre sociale dans de précédentes affaires laissaient penser qu'un simple contrôle léger était réservé à cette question (12). Ensuite, parce que, sur des questions connexes d'appréciation de la réalisation d'heures supplémentaires (13) ou de nombre de jours travaillés dans le cadre d'un forfait en jours (14), la Chambre sociale abandonne déjà son contrôle au pouvoir souverain des juges du fond.

L'étape suivante pourrait consister, à moyen terme, à abandonner au pouvoir souverain des juges du fond le contrôle du contenu de l'accord et, le cas échéant, des mesures prises unilatéralement par l'employeur pour pallier ses insuffisances. La question est plus délicate toutefois, car le caractère réglementaire de l'accord collectif pousse le plus souvent la Chambre sociale à conserver un contrôle étroit sur l'appréciation de son contenu (15). Il n'est pas certain, d'ailleurs, qu'un tel allègement du contrôle soit opportun si l'on part de l'idée que les accords d'entreprise, qui seront sans doute négociés en nombre dans les années à venir, sont souvent de moins bonne qualité rédactionnelle que les accords de branche.


(1) Cass. soc., 29 juin 2011, n° 09-71.107, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A5499HU9) et nos obs., Lexbase, éd. soc., 2011, n° 447 (N° Lexbase : N6810BSZ) ; D., 2012, p. 901, obs. P. Lokiec et J. Porta ; RDT, 2011, p. 474, note B. Van Craeynest et P. Masson ; ibid., p. 481, étude M.-F. Mazars, S. Laulom et Ch. Dejours ; JSL, n° 304, 29 juillet 2011, obs. M. Hautefort ; JCP éd. S., 2011, 1332, entretien J.-F. Akandji-Kombé ; ibid., 1333, note M. Morand ; RJS, 2011, p. 587, chron. F. Favennec-Héry ; Dr. ouvr., 2012, p. 171, obs. A. Lyon-Caen.
(2) Commentés dans les colonnes de Lexbase, v. Cass. soc., 29 juin 2011, n° 09-71.107, préc. ; Cass. soc., 31 janvier 2012, n° 10-19.807, FS-P+B+R (N° Lexbase : A8942IBS) et nos obs., Lexbase, éd. soc., n° 473, 2012 (N° Lexbase : N0230BTP) ; Cass. soc. 12 mars 2014, n° 12-29.141, FS-P+B (N° Lexbase : A9489MGK) et les obs. d'A. Fabre, Lexbase, éd. soc., n° 566, 2014 (N° Lexbase : N1702BUL) ; Cass. soc., 14 mai 2014, n° 12-35.033, FS-P+B (N° Lexbase : A5582MLC) ; Cass. soc., 11 juin 2014, n° 11-20.985, F-P+B (N° Lexbase : A2160MRG) et les obs. de G. Auzero, Lexbase, éd. soc., n° 576, 2014 (N° Lexbase : N2841BUR) ; Cass. soc., 13 novembre 2014, n° 13-14.206, FS-P+B (N° Lexbase : A2988M33) et nos obs., Lexbase, éd. soc., n° 592, 2014 (N° Lexbase : N4799BUB) ; Cass. soc., 17 décembre 2014, deux arrêts, n° 13-23.230, FS-P+B (N° Lexbase : A2936M8A) et n° 13-22.890, FS-P+B (N° Lexbase : A2959M84) et nos obs., Lexbase, éd. soc., n° 597, 2015 (N° Lexbase : N5446BUA) ; Cass. soc., 4 février 2015, n° 13-20.891, FS-P+B (N° Lexbase : A2465NBW) et nos obs., Lexbase, éd. soc., n° 602, 2015 (N° Lexbase : N6073BUH).
(3) Sur les apports de la loi du 8 août 2016 en la matière, v. notre étude, Lexbase, éd. soc., n° 666, 2016 (N° Lexbase : N4067BWK). V. également M. Morand, Clarification et sécurisation des conventions de forfait, JCP S., 2016, 1295.
(4) C. trav., art. L. 3121-64 (N° Lexbase : L6653K9B).
(5) Cass. soc., 29 juin 2011, n° 09-71.107, préc..
(6) Cass. soc., 17 décembre 2014, n° 13-22.890, préc..
(7) Cass. soc., 8 septembre 2016, n° 14-26.256, FS-P+B (N° Lexbase : A5176RZQ) et nos obs., Lexbase, éd. soc., n° 669, 2016 (N° Lexbase : N4352BW4).
(8) C. trav., art. L. 3121-63 (N° Lexbase : L6652K9A).
(9) V. déjà Cass. soc., 11 juin 2014, n° 11-20.985, préc. ; Cass. soc., 17 décembre 2014, n° 13-23.230, préc..
(10) Ph. Flores, Le forfait en jours et l'effectivité des garanties offertes, SSL, 2014, n° 1635.
(11) Nous soulignons.
(12) La cour d'appel "a exactement retenu" (Cass. soc., 2 juillet 2014, n° 13-11.940, N° Lexbase : A2581MTR), "a exactement décidé" (Cass. soc., 12 mars 2014, n° 12-29.141, préc.), "a exactement déduit" (Cass. soc., 19 février 2014, n° 12-22.174, N° Lexbase : A7675MEY).
(13) Cass. soc., 4 décembre 2013, n° 12-22.344, FP-P+B+R (N° Lexbase : A8269KQC).
(14) Cass. soc., 23 septembre 2009, n° 08-41.377, FS-P+B+R (N° Lexbase : A3528ELA).
(15) J.-Y. Frouin, L'interprétation des conventions collectives, RJS, 1996, p. 137 ; B. Teyssié, Droit du travail - Relations collectives, LexisNexis, 10ème éd., 2016, p. 954.


Décision

Cass. soc., 22 juin 2017, n° 16-11.762, FS-P+B (N° Lexbase : A1017WKU)

Rejet (CA Lyon, 4 décembre 2015, n° 14/07930 N° Lexbase : A5188NYS)

Textes visés : néant.

Mots-clés : conventions de forfait en jours ; accord collectif d'entreprise.

Lien base : (N° Lexbase : E0430GA8).

newsid:459227

QPC

[Brèves] Inconstitutionnalité du délai d'appel des jugements des juridictions du travail, applicable uniquement dans certains territoires ultramarins

Réf. : Cons. const., décision n° 2017-641 QPC du 30 juin 2017 (N° Lexbase : A1657WLX)

Lecture: 1 min

N9169BWI

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par Blanche Chaumet

Le 06 Juillet 2017

Les mots "Dans les quinze jours du prononcé du jugement", figurant au premier alinéa de l'article 206 de la loi n° 52-1322 du 15 décembre 1952, instituant un Code du travail dans les territoires et territoires associés relevant des ministères de la France d'Outre-mer (N° Lexbase : L6236HXA), dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 82-1114 du 23 décembre 1982, relative au régime législatif du droit du travail dans le territoire de la Nouvelle-Calédonie et dépendances et prévoyant un délai d'appel des jugements des juridictions du travail, applicable uniquement dans certains territoires ultramarins, dont Mayotte, sont contraires à la Constitution. Telle est la solution dégagée par le Conseil constitutionnel dans un arrêt rendu le 30 juin 2017 (Cons. const., décision n° 2017-641 QPC du 30 juin 2017 N° Lexbase : A1657WLX).

Saisi d'une QPC par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation (Cass. QPC, 5 mai 2017, n° 17-40.029, F-D N° Lexbase : A9539WBW), le Conseil constitutionnel précise, en énonçant la règle susvisée, que l'exclusion qui résulte du délai de droit commun, fixé d'ailleurs par le pouvoir réglementaire, ne trouve sa justification ni dans une différence de situation des justiciables dans ce territoire par rapport à ceux des autres territoires, ni dans l'organisation juridictionnelle, les caractéristiques ou les contraintes particulières propres au département de Mayotte. Il en résulte que ces dispositions sont contraires à la Constitution. La déclaration d'inconstitutionnalité intervient à compter de la date de publication de cette décision et est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date.

Par suite, les Sages précisent qu'à compter de cette date, le délai applicable pour l'appel des jugements mentionnés à l'article 206 de la loi du 15 décembre 1952 est celui de droit commun.

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Sociétés

[Jurisprudence] La rémunération du gérant de la SARL est due tant qu'aucune décision la révoquant n'est intervenue

Réf. : Cass. com., 21 juin 2017, n° 15-19.593 F-P+B+I (N° Lexbase : A4283WIH)

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N9192BWD

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par Bernard Saintourens, Professeur à la Faculté de droit de Bordeaux, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition affaires

Le 06 Juillet 2017

La rémunération des dirigeants de sociétés suscite l'attention du législateur et, au-delà, des médias et du public lorsqu'il s'agit de grandes sociétés de capitaux. Les sommes en jeu peuvent, en effet, atteindre parfois des altitudes vertigineuses dont on peine à asseoir la légitimité. Plus rarement, les interrogations portent sur la rémunération de la multitude des dirigeants d'entreprises sociétaires qui sont en charge la gestion des PME. Le contentieux suscité à propos de la rémunération des gérants de SARL est relativement rare et l'on retiendra d'autant plus volontiers l'arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation, en date du 21 juin 2017, fortement encouragé en cela par la large diffusion voulue par la Haute juridiction elle-même (P+B+I). En l'espèce, le co-gérant d'une SARL bénéficiait d'une rémunération mensuelle de 6 000 euros, qui avait été fixée par une décision prise par l'assemblée générale ordinaire de cette société. Ayant dû s'absenter de la société pour cause de maladie, le versement de sa rémunération, pour la période de temps concernée, était refusé, à la suite bien sûr d'un changement du contrôle de la société. La cour d'appel de Rennes, par son arrêt en date du 7 avril 2015 (1), pour rejeter la demande en paiement de la fraction de rémunération en cause sollicitée par le gérant, avait retenu que l'indemnité due au gérant devait correspondre à un travail réalisé pour la société, travail qu'il ne pouvait accomplir étant absent pour cause de maladie et faute pour lui d'apporter la preuve qu'il était demeuré à même d'exercer sa fonction de gérant.

La Chambre commerciale prononce la cassation de l'arrêt en affirmant, dans un attendu qui apparaît bien comme étant de principe, que la rémunération est due au gérant tant qu'aucune décision la révoquant n'est intervenue. La position est d'importance et ses incidences méritent d'être bien mesurées, tant en ce qu'il en résulte que la rémunération du gérant est pérenne par principe (I) que parce que sa suppression ne peut intervenir que de manière exceptionnelle (II).

I - Une rémunération pérenne par principe

Une première observation doit être faite, à la lecture de l'arrêt sous examen. La Chambre commerciale, pour prononcer la cassation de l'arrêt de la cour d'appel pour violation de la loi, se place sous le visa de l'article L. 223-18 du Code de commerce (N° Lexbase : L2030KGB). On peut tout de suite éviter au lecteur de s'y précipiter pour tenter d'y trouver une quelconque règle légale qui viendrait encadrer l'octroi et la suppression de la rémunération du gérant. Pour dire les choses clairement, ce texte est rigoureusement muet sur ce point. Il est certes relatif à ce que l'on dénomme, par commodité, le statut du gérant et envisage sa nomination, la durée de ses fonctions et ses pouvoirs mais ne dit mot de son éventuelle rémunération. Parce qu'il était difficile d'envisager qu'une question aussi potentiellement sensible demeure dans une sorte de non-droit, la doctrine (2) et la jurisprudence ont pris le parti de rattacher ce point à l'article L. 223-18 du Code de commerce, faute de mieux. On retrouve d'ailleurs cette référence de texte tant dans d'anciennes décisions (3) que dans de plus récentes (4) et traitant du contentieux de la rémunération des gérants de SARL.

Sans doute est-ce dans l'arrêt précité du 25 septembre 2012, (5) que l'on retrouve l'expression la plus emblématique de la position de la Cour de cassation. En affirmant que "la rémunération du gérant de la SARL est déterminée soit par les statuts, soit par une décision de la collectivité des associés", la Haute juridiction vient donner, par principe, un caractère pérenne à la rémunération octroyée au gérant. L'arrêt commenté se situe donc pleinement dans ce courant jurisprudentiel, en tirant une conséquence logique et protectrice des intérêts du gérant. Sa rémunération, telle qu'accordée par la stipulation statutaire ou, plus fréquemment, par une décision collective des associés, lui est acquise tant qu'elle n'est pas révoquée dans une autre décision de même nature. Même des circonstances qui empêcheraient l'exercice effectif des fonctions de gérant ne constituent pas, en elles-mêmes, des causes validant l'interruption du versement de la rémunération initialement octroyée.

Dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt commenté, la maladie du gérant était invoquée comme devant provoquer le non-paiement de la rémunération. Antérieurement, il avait été jugé que la rémunération demeurait due alors même qu'un administrateur provisoire avait été nommé en justice et qu'en conséquence le gérant se trouvait, pour la durée du mandat de l'administrateur, déchargé de toutes ses tâches (6).

L'arrêt en date du 21 juin 2017 sonne donc comme un rappel à l'ordre : les évènements, en eux-mêmes, sont impropres à entraîner la suppression de la rémunération du gérant. La rémunération est conservée tant que la décision qui l'avait octroyée n'est pas révoquée par une autre décision émanant de la collectivité des associés.

II - Une rémunération supprimée par exception

Si l'on suit la position de la présente décision et que l'on se situe dans la perspective des précédents jurisprudentiels en la matière, on ne peut que constater que la suppression de la rémunération qui aurait été octroyée à un gérant de SARL ne peut être qu'exceptionnelle et suppose un traitement juridique approprié.

En premier lieu, pour s'en tenir à l'indication fournie dans l'arrêt, une décision de la collectivité des associés pourrait interrompre le versement de la rémunération. Libres d'octroyer, ou non, une rémunération au gérant, les associés sont en droit de revenir sur une décision précédente et de mettre un terme à la rétribution initialement accordée. Ainsi, prenant acte de la cessation effective des fonctions, liée, par exemple, à la maladie du gérant, les associés sont en droit de supprimer la rémunération pour le temps correspondant à l'impossibilité pour l'intéressé d'accomplir normalement les fonctions pour lesquelles il était rémunéré.

En second lieu, au-delà de ce qu'envisage l'arrêt commenté, il nous semble admissible que, dès la décision d'octroi de la rémunération, il puisse être prévu des hypothèses entraînant la cessation temporaire ou définitive de la rémunération accordée. Diverses causes d'interruption de la rémunération pourraient être envisagées, tenant à la situation personnelle du gérant (maladie, évènement familial grave...) mais aussi aux résultats de la société. Dans ce dernier cas de figure, il pourrait être prévu, dès l'octroi initial de la rémunération, qu'elle serait réduite, voire supprimée, en considération des comptes sociaux, par paliers ou par l'effet d'un seuil unique. Dans tous les cas, la stipulation devrait être précise si l'on entend lui donner un caractère automatique et éviter le contentieux de sa mise en oeuvre. En observation ultime, on relèvera que si le gérant est associé, il prendra part à la décision collective statuant sur la suppression de sa rémunération (7).


(1) CA Rennes, 7 avril 2015, n° 14/02090 (N° Lexbase : A1337NGM).
(2) V. not. P. Le Cannu et B. Dondéro, Droit des sociétés, Lextenso éd., n° 1364.
(3) V. not. Cass. com., 18 novembre 1997, n° 95-19.085 (N° Lexbase : A2284AZM), RJDA, 3/98, n° 293.
(4) V. not. Cass. com., 25 septembre 2012, n° 11-22.754, F-P+B (N° Lexbase : A5922ITI), D., 2012, p. 2301, obs. A. Lienhard ; JCP éd. E, 2012, 35, note D. Gallois-Cochet ; Bull Joly Sociétés, 2013, p. 22, note B. Dondéro ; Ch. Lebel, Lexbase, éd. aff., 2012, n° 312 (N° Lexbase : N3936BTX) . V., également, Cass. com., 25 septembre 2012, n° 11-22.337, F-P+B (N° Lexbase : A6036ITQ), Rev. Sociétés, 2013, p. 104, note A. Couret ; Bull Joly Sociétés, 2013, p. 26, note B. Dondéro.
(5) Cass. com., 25 septembre 2012, n° 11-22.754, F-P+B, préc..
(6) V. Cass. com., 21 avril 1992, n° 90-19.860, publié (N° Lexbase : A4315ABG), Bull Joly Sociétés, 1992, p. 661, note P. Le Cannu.
(7) V. Cass. com. 4 octobre 2011, n° 10-23.398, F-P+B (N° Lexbase : A5962HYH), RJDA 12/11, n° 1036.

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Urbanisme

[Brèves] Préemption : pas de condamnation à des dommages-intérêts de la partie se désistant tant que la décision de première instance n'est pas définitive

Réf. : Cass. civ. 3, 29 juin 2017, n° 16-14.622, FS-P+B+I (N° Lexbase : A1627WLT)

Lecture: 1 min

N9161BW9

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par Yann Le Foll

Le 06 Juillet 2017

La partie se désistant d'une procédure de préemption ne peut être condamnée au versement de dommages-intérêts tant que la décision de première instance fixant le prix d'acquisition n'est pas devenue définitive. Telle est la solution d'un arrêt rendu par la Cour de cassation le 29 juin 2017 (Cass. civ. 3, 29 juin 2017, n° 16-14.622, FS-P+B+I N° Lexbase : A1627WLT).

Une communauté d'agglomération aux droits de laquelle se trouve un établissement public territorial a préempté un appartement appartenant aux consorts Y. Le juge de l'expropriation, saisi par la communauté d'agglomération en l'absence d'accord des parties sur le prix d'acquisition, a fixé celui-ci par jugement du 17 juin 2014. La communauté d'agglomération, qui a relevé appel de cette décision, a renoncé à exercer son droit de préemption le 7 avril 2015 et s'est désistée de son action le 14 avril 2015. Pour condamner la communauté d'agglomération à payer des dommages-intérêts aux consorts Y., l'arrêt attaqué (CA Paris, Pôle 4, 7ème ch., 28 janvier 2016, n° 14/19637 N° Lexbase : A8992N4S) retient que, celle-ci s'étant désistée de son action et par conséquent de sa procédure d'appel, la date de la fixation judiciaire du prix est celle de la décision du premier juge et qu'en conséquence la renonciation, qui est intervenue plus de deux mois après, est tardive.

En statuant ainsi, alors qu'à la date à laquelle la communauté d'agglomération a renoncé à la préemption, l'instance d'appel était toujours en cours de sorte que le jugement n'était pas devenu définitif, la cour d'appel a violé l'article L. 213-7 du Code de l'urbanisme (N° Lexbase : L7389ACN ; cf. l’Ouvrage "Droit de l'urbanisme" N° Lexbase : E4517E7G).

newsid:459161

Vente d'immeubles

[Brèves] Appréciation restrictive de la présomption de connaissance du vice caché par le vendeur

Réf. : Cass. civ. 3, 29 juin 2017, n° 16-18.087, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A7179WLH)

Lecture: 2 min

N9256BWQ

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par June Perot

Le 07 Juillet 2017

La clause de non-garantie des vices cachés ne peut être invoquée par le vendeur qui, en sa qualité de dernier exploitant du garage précédemment exploité par son père ne pouvait ignorer les vices affectant les locaux d'un garage automobile et dans la mesure où l'existence des cuves enterrées qui se sont avérées fuyardes n'avait été révélée à l'acquéreur que postérieurement à la vente. Telle est la solution énoncée par la troisième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 29 juin 2017 (Cass. civ. 3, 29 juin 2017, n° 16-18.087, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A7179WLH).

Dans cette affaire, selon acte notarié, les consorts X ont vendu à une SCI, avec l'entremise d'un agent immobilier, la société A., le rez-de-chaussée d'un immeuble où avait été exploité un garage automobile, l'acquéreur ayant exprimé dans l'acte l'intention d'affecter ce bien à l'habitation. Après une expertise attestant la présence dans le sous-sol d'hydrocarbures et de métaux lourds provenant de cuves enterrées et rendant la dépollution nécessaire, la SCI acquéreuse a assigné les vendeurs, les notaires instrumentaires, ainsi que l'agent immobilier en garantie des vices-cachés et indemnisation de son préjudice. En cause d'appel, pour juger la clause de non garantie des vices cachés stipulée dans le contrat de vente inopérante, l'arrêt a retenu que le vendeur, en tant qu'il avait été le dernier exploitant des lieux du garage précédemment exploité par son père, ne pouvait avoir ignoré les vices affectant les locaux (CA Toulouse, 25 janvier 2016, n° 14/06209 N° Lexbase : A5959N4H). Les vendeurs ont formé un pourvoi. Selon un premier moyen, s'articulant en cinq branches, les vendeurs soutenaient que l'activité de garagiste impliquait la connaissance de l'existence des cuves mais nullement l'existence d'une pollution des sols. Ils soutenaient également qu'il n'existait aucun lien causal entre l'éventuel manquement du vendeur quant à l'information relative au risque de pollution et l'étude qui a dû être réalisée et qui a constaté la pollution des sols. Approuvant les juges d'appel et énonçant la solution susvisée, la Cour régulatrice rejette le pourvoi (cf. l’Ouvrage "Contrats spéciaux" N° Lexbase : E2322EYN).

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