Le Quotidien du 12 avril 2024

Le Quotidien

Conventions et accords collectifs

[Brèves] Un accord collectif peut-il déterminer des niveaux spécifiques de négociations annuelles obligatoires ?

Réf. : Cass. soc., 3 avril 2024, n° 22-15.784, FS-B N° Lexbase : A34942ZG

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N9022BZ8

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par Lisa Poinsot

Le 11 Avril 2024

Un accord collectif négocié et signé aux conditions de droit commun peut définir, dans les entreprises comportant des établissements distincts, les niveaux auxquels la négociation annuelle obligatoire est conduite.

Faits et procédure. Un accord collectif de méthode sur la négociation des statuts collectifs au sein de la société est signé par deux des trois organisations syndicales représentatives dans l’entreprise.

Aux termes de cet accord, il est identifié trois périmètres de négociations portant sur les statuts collectifs, correspondant à l’organisation opérationnelle de la société, applicables aux salariés des établissements relevant des divisions industrie, tertiaire et centre de services partagés.

Alors que les négociations annuelles obligatoires au niveau des divisions tertiaires et industrie sont engagées par la société, un syndicat s’oppose à leur déroulement à un niveau inférieur à celui de l’entreprise. Les négociations sont néanmoins maintenues au niveau de chaque division, sans la participation du syndicat.

Ce dernier saisit le tribunal judiciaire aux fins :

  • d’ordonner à la société, sous astreinte, de convoquer les organisations syndicales représentatives à la négociation annuelle obligatoire au niveau de l’entreprise ;
  • d’obtenir la condamnation de la société à lui verser une provision au titre des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de non-respect de l’obligation de négociation annuelle au niveau de l’entreprise.

Pour débouter le syndicat de ses demandes, la cour d’appel (CA Lyon, 24 février 2022, n° 21/08422 N° Lexbase : A88657NN) analyse le contenu de l’accord, signé par des organisations représentatives dans l’entreprise, qui prévoit :

  • en son article 1er, les niveaux et les périmètres des négociations ;
  • aux articles 2 et 7, les modalités de désignation des délégués syndicaux habilités à représenter leurs organisations au niveau de chaque périmètre et les conditions de validité de l’accord conclu ;
  • à l’article 5, les sujets de négociation.

Un pourvoi en cassation est alors formé par le syndicat, arguant que la négociation annuelle obligatoire devant s'ouvrir au niveau de l'entreprise, elle ne peut être engagée par l'employeur au niveau d'un établissement si l'une des organisations syndicales représentatives à ce niveau s'y oppose.

Solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi en application de l’article L. 2242-1 du Code du travail N° Lexbase : L4403L79, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2021-1018, du 2 août 2021 N° Lexbase : L4000L7B et l’article L. 2242-10 du même code N° Lexbase : L7811LGE.

La Haute juridiction confirme qu’en application de l’accord litigieux, les négociations annuelles obligatoires doivent être conduites au niveau de chacune des divisions.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La négociation obligatoire dans l’entreprise, La négociation obligatoire dans l’entreprise à l’initiative de l’employeur, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E2420ETS.

 

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Données personnelles

[Brèves] Prospection commerciale et utilisation de données fournies par des courtiers en données : la CNIL sanctionne une société

Réf. : CNIL, délibération n° SAN 2024-004, 4 avril 2024 N° Lexbase : X2402CRE

Lecture: 4 min

N9051BZA

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par Vincent Téchené

Le 24 Avril 2024

► Le 4 avril 2024, la CNIL a sanctionné une société d’une amende de 525 000 euros notamment pour avoir utilisé à des fins de prospection commerciale des données fournies par des courtiers en données, sans s’assurer que les personnes concernées avaient valablement consenti à être démarchées.

HUBSIDE.STORE procède à des campagnes de démarchage par téléphone et par SMS pour promouvoir les produits vendus dans ses boutiques (téléphones portables, ordinateurs, etc.). Les données des prospects démarchés sont achetées auprès de courtiers en données, éditeurs de sites de jeux-concours et de tests de produits.

  • Un manquement à l’obligation de recueillir le consentement des personnes à recevoir de la prospection commerciale par voie électronique (CPCE, art. L. 34-5 N° Lexbase : L7352LXL)

Pour réaliser ses campagnes de démarchage par SMS, la société HUBSIDE.STORE achète des données de prospects auprès de plusieurs courtiers en données. La collecte de ces données est effectuée par les courtiers via des formulaires de participation à des jeux-concours ou à des tests de produits en ligne sur différents sites web.

La formation restreinte a considéré que l’apparence trompeuse de ces formulaires ne permet pas de recueillir un consentement libre et univoque, conforme aux exigences du RGPD (Règlement n° 2016/679, du 27 avril 2016 N° Lexbase : L0189K8I), qui permettrait de fonder les opérations de prospection par SMS de la société.

En effet, la mise en valeur des boutons entraînant la transmission de ses données à des fins de prospection commerciale (par leur taille, leur couleur, leur intitulé et leur emplacement), comparée aux liens hypertextes permettant de participer au jeu sans accepter cette transmission (d’une taille nettement inférieure et se confondant avec le corps du texte), pousse fortement les utilisateurs à accepter.

Il appartient à la société, en tant qu’utilisatrice des données recueillies, de s’assurer que les personnes concernées ont exprimé un consentement valide. À cet égard, la formation restreinte a relevé que, même si la société a imposé certaines exigences contractuelles à ses fournisseurs de données en amont, aucun contrôle effectif de ces exigences n’était opéré en aval. La CNIL a ainsi constaté une proportion importante de fichiers de prospects non conformes.

  • Un manquement à l’obligation de disposer d’une base légale pour les traitements mis en œuvre (RGPD, art. 6)

S’agissant de la prospection commerciale par appels téléphoniques, la formation restreinte a rappelé que, si celle-ci peut être fondée sur l’intérêt légitime de la société, c’est à la condition que les personnes concernées, au moment de la collecte de leurs données, soient informées qu’elles pourront recevoir des offres de prospection commerciale de la part de cette société.

Or, la CNIL a constaté que les formulaires de jeux-concours à partir desquels les données des prospects étaient collectées, ne mentionnaient pas systématiquement la société HUBSIDE.STORE dans la liste des partenaires susceptibles de démarcher les personnes concernées.

  • Un manquement à l’obligation d’information (RGPD, art. 14)

Les contrôles réalisés ont mis en évidence que les personnes démarchées par téléphone ne disposaient pas de toutes les informations nécessaires sur la collecte et l’utilisation de leurs données personnelles.

La formation restreinte a rappelé que cette information était indispensable afin de permettre aux personnes concernées de pouvoir exercer leurs droits, par exemple celui d’accéder à leurs données, de les rectifier ou de s’opposer à des sollicitations ultérieures de manière simple et gratuite.

  • Sanction

La CNIL a donc prononcé une amende de 525 000 euros rendue publique. Cette amende a été prise en coopération avec les autorités de contrôle européennes concernées (Belgique, Italie, Espagne, Portugal) dans le cadre du guichet unique.

Le montant de cette amende, qui représente environ 2 % du chiffre d’affaires de la société, a notamment été décidé au regard de la gravité des manquements retenus et de la responsabilité endossée par l’organisme utilisant les données collectées. La formation restreinte a également tenu compte du fait que la société HUBSIDE.STORE avait massivement recours à la prospection commerciale.

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Marchés publics

[Brèves] Contrat de bail ou d'achat d'un bien immobilier devant faire l'objet de travaux à la charge du cocontractant : requalification en marché de travaux

Réf. : CE, 2e-7e ch. réunies, 3 avril 2024, n° 472476, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A64072ZC

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N9011BZR

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par Yann Le Foll

Le 11 Avril 2024

► Le contrat par lequel un pouvoir adjudicateur prend à bail ou acquiert des biens immobiliers qui doivent faire l'objet de travaux à la charge de son cocontractant constitue un marché de travaux lorsqu'il résulte des stipulations du contrat qu'il exerce une influence déterminante sur la conception des ouvrages.

Faits. Le centre hospitalier Alpes-Isère a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler le contrat de bail en l'état futur d'achèvement qu'il a conclu avec une société civile immobilière. Le tribunal a rejeté cette demande et son jugement a été annulé en appel (CAA Marseille, 6e ch., 27 février 2023, n° 21MA04312 N° Lexbase : A28909G7).

Principe. Le contrat par lequel un pouvoir adjudicateur prend à bail ou acquiert des biens immobiliers qui doivent faire l'objet de travaux à la charge de son cocontractant, constitue un marché de travaux au sens des articles 4 et 5 de l'ordonnance n° 2015-899, du 23 juillet 2015, relative aux marchés publics N° Lexbase : L9077KBS, repris respectivement aux articles L. 1111-1 N° Lexbase : L4504LRA et L. 1111-2 N° Lexbase : L3878LR3 du Code de la commande publique, lorsqu'il résulte des stipulations du contrat qu'il exerce une influence déterminante sur la conception des ouvrages.

Tel est le cas lorsqu'il est établi que cette influence est exercée sur la structure architecturale de ce bâtiment, telle que sa dimension, ses murs extérieurs et ses murs porteurs. Les demandes de l'acheteur concernant les aménagements intérieurs ne peuvent être considérées comme démontrant une influence déterminante que si elles se distinguent du fait de leur spécificité ou de leur ampleur (sur les indices pouvant avoir eu une influence décisive du pouvoir adjudicateur sur la réalisation du bâtiment, v. CJUE, 22 avril 2021, aff. C-537/19, Commission européenne c/ République d'Autriche N° Lexbase : A32394QZ).

Décision CE. Ayant appliqué ce principe pour estimer que ce contrat, dénommé par les parties « bail en l'état futur d'achèvement », constituait bien un marché public de travaux dès lors que l'ouvrage répondait aux besoins exprimés par le centre hospitalier (correspondant ainsi à la définition du marché prévue à l'article L. 1111-1 du Code de la commande publique), estimant nécessairement qu'il avait exercé une influence déterminante sur la conception de cet ouvrage, la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas commis d'erreur de droit.

Décision CE (suite). En vertu du contrat en litige, les travaux d'aménagement du bâtiment A et de construction du bâtiment C étaient rémunérés par le centre hospitalier, non par le versement immédiat d'un prix, mais par le versement de loyers ainsi que de « surloyers ». C’est à bon droit que la cour a considéré qu'une telle clause prévoyant ces versements, qui constituaient des paiements différés, était prohibée dans les marchés publics passés par les établissements publics de santé, en application des dispositions de l'article 60 de l'ordonnance du 23 juillet 2015.

Elle a donc pu en déduire que cette clause de paiement différé était indivisible du reste du contrat, et qu'eu égard à la nature de cette clause, le contenu du contrat présentait un caractère illicite (en effet, un contrat administratif est illicite en raison de ce que son objet même est contraire à la loi, CE, 9 novembre 2018, n° 420654 et n° 420663, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A6422YK3) et qu'un tel vice était de nature à justifier son annulation (recours « Béziers 1 », CE ass., 28 décembre 2009, n° 304802 N° Lexbase : A0493EQC).

À ce sujet. Lire A. M. Smolinska, Systématisation des pouvoirs de l’administration face à une clause contractuelle illicite, Lexbase Public, avril 2023, n° 704 N° Lexbase : N5109BZA.

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