Conseil d'Etat
Statuant au contentieux
N° 184713
2 SS
BENDJAMA
M Ribadeau Dumas, Rapporteur
M Honorat, Commissaire du gouvernement
Lecture du 9 Juin 1999
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête enregistrée le 6 janvier 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M Feraht BENDJAMA, demeurant Tour Tourmalet, Parc Henri Wallon, à Saint-Etienne du Rouvray (76800) ; M BENDJAMA demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 23 août 1995 lui refusant l'acquisition de la nationalité française ;
2°) d'ordonner la production des pièces sur lesquelles s'est fondé le ministre ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil, et notamment ses articles 21-2 et 21-4 ;
Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M Ribadeau Dumas, Auditeur,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M BENDJAMA,
- les conclusions de M Honorat, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 21-4 du code civil : "le gouvernement peut s'opposer, par décret en Conseil d'Etat, pour indignité ou défaut d'assimilation, à l'acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger dans le délai d'un an à compter de la date du récépissé prévu au deuxième alinéa de l'article 26" ; qu'aux termes de l'article 32 du décret du 30 décembre 1993 : "lorsque le gouvernement veut s'opposer par décret en Conseil d'Etat, pour indignité ou défaut d'assimilation, à l'acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger d'un conjoint de nationalité française, le ministre chargé des naturalisations notifie les motifs de fait et de droit qui justifient l'intention de faire opposition à l'intéressé, qui dispose d'un délai qui ne peut être inférieur à 15 jours pour produire un mémoire en défense" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par lettre du 28 juin 1995, notifiée le 5 juillet 1995, M BENDJAMA a été informé des motifs précis de fait et de droit justifiant l'intention du ministre de s'opposer à sa naturalisation ; qu'il a été mis à même de produire ses observations en défense et a d'ailleurs produit un mémoire ; qu'ainsi, il n'est pas fondé à soutenir que le décret attaqué aurait été pris au terme d'une procédure irrégulière ;
Considérant que le décret attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que le moyen tiré de son insuffisance de motivation doit, par suite, être écarté ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M BENDJAMA a manifesté, en 1992, dans le cadre de son activité militante dans la région de Rouen-Elbeuf pour l'intégrisme islamique, un comportement révélant un rejet des valeurs essentielles de la société française ; qu'ainsi, le gouvernement a pu légalement estimer que M BENDJAMA ne pouvait être regardé, à la date du décret attaqué, comme assimilé à la communauté française ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner la mesure d'instruction sollicitée, que M BENDJAMA n'est pas fondé à demander l'annulation du décret du 23 août 1995 lui refusant l'acquisition de la nationalité française pour défaut d'assimilation ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M BENDJAMA est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M Feraht BENDJAMA et au ministre de l'emploi et de la solidarité.