La lettre juridique n°515 du 7 février 2013 : Avocats/Institutions représentatives

[Focus] Gouvernance de la profession : le barreau de Paris pour un Ordre national

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par Anne-Laure Blouet Patin, Directrice de la Rédaction

le 07 Février 2013

Véritable "serpent de mer" pour la profession, la Gouvernance n'en finit pas de susciter débats, polémiques et passes d'armes entre les institutions représentatives. Et le sujet, lancé depuis quelques années déjà, revient régulièrement sur le devant de la scène, aucun consensus n'arrivant à être trouvé entre les "trois grands" : le Conseil national des barreaux, la Conférence des Bâtonniers et le barreau de Paris... Dernier acte en date, l'adoption, le 15 janvier 2013, d'une motion par le conseil de l'Ordre parisien demandant la création d'une mission consultative. L'objet de cette commission : retranscrire le projet de réforme de la gouvernance de la profession issu du barreau parisien... En 2011, sous le bâtonnat de Jean Castelain, les avocats parisiens avaient été sollicités sur le thème de la gouvernance. A un premier sondage, quelque 3 047 avocats, sur les 22 555 inscrits à Paris, soit 13,51 % du barreau parisien, s'étaient exprimés à 90 % en faveur d'un pouvoir normatif et d'un pouvoir de représentation de la profession au niveau national, avec un "bâtonnier national" élu au suffrage universel direct, pour 75 %. Au référendum du 7 décembre 2011, 6 871 avocats parisiens votants s'étaient alors prononcés à 74 % pour un Ordre national à la place du CNB, à 78 % pour un président élu au suffrage universel direct, à 57 % pour un regroupement des ordres au niveau régional et à 66 % pour un rattachement des organismes techniques à l'Ordre national. Et le couperet tombait quelques jours après avec la publication des résultats d'une enquête TNS-Sofres, commandée par le CNB, qui concluait à un Conseil national des barreaux "inefficace" et au désir, par les avocats interrogés, d'avoir une seule et unique organisation pour les représenter au niveau national... De son côté le "Parlement de la profession" a tenté d'avancer. Lors de son assemblée générale des 16 et 17 novembre 2012, le bureau du CNB a présenté sous forme d'un rapport d'étape, qui constitue un simple document de travail, l'état de ses réflexions sur l'organisation de la profession d'avocat. Les réflexions du bureau portent essentiellement sur une évolution du CNB de nature à favoriser celle de la profession, aux fins de l'efficacité de son organisation et de sa représentation institutionnelle. Dans ce cadre, les axes de réforme soumis au débat de l'assemblée générale ont trait :

- au système électoral ;

- à la durée du mandat des membres du CNB et aux modalités de désignation de son président ;

- aux vice-présidents élus et de droit du CNB ;

- aux missions de l'institution nationale et à sa dénomination ;

- aux aspects financiers de la réforme ;

- à la coordination entre le CNB et les organismes techniques de la profession ;

- à la création d'une chambre disciplinaire d'appel.

Une synthèse de l'ensemble des contributions sur ce sujet sera présentée à l'assemblée générale du mois de février 2013, puis soumise au vote de l'assemblée de mars prochain.

Ainsi, fort logiquement, c'est devant son conseil de l'Ordre que l'ancien Bâtonnier Jean Castelain a présenté son rapport visant à la naissance d'un Ordre national, apportant ainsi sa contribution au sujet !

Le rapport prévoit la création d'un Ordre national qui se substituerait progressivement, de plein droit, à chacun des 161 Ordres existants. Il ne s'agirait ni d'un organe parlementaire, ni d'un organe exécutif, mais d'un Ordre, organisme dans lequel les avocats se reconnaissent naturellement, et auquel l'affiliation des avocats serait obligatoire.

La mission principale de cet Ordre national serait de traiter de "toutes questions intéressant l'exercice de la profession", pouvoir actuellement reconnu à chaque Ordre sur le territoire de la République. Et seul cet Ordre national pourrait décider, pour l'ensemble de la profession, au niveau national, des questions de déontologie, de formation, d'accès. Plus généralement, il serait seul à fixer la politique de l'ensemble du barreau français (par exemple, de décider de l'exercice ou non de la profession d'avocat en entreprise).

La question se pose alors de la discipline. L'Ordre national serait-il une "super instance" disciplinaire ? Non. Pour le barreau parisien, l'Ordre national s'appuierait sur des formations disciplinaires régionales, par cour d'appel, auxquelles serait laissé l'actuel pouvoir disciplinaire, sauf à permettre au président de l'Ordre national de saisir une juridiction disciplinaire régionale si les Bâtonniers du ressort de la cour dans laquelle des manquements auraient été commis n'exerçaient pas leur pouvoir de poursuites.

Quid des barreaux ? Quid de l'organisation décentralisée de cet Ordre national ? Elémentaire, pour Paris : les barreaux de cours. La profession serait organisée de façon régionale par ressort de cour d'appel, le Bâtonnier de cour étant -sauf accord entre barreaux- le Bâtonnier du barreau le plus important en nombre du ressort de la cour d'appel. Mais, ces barreaux de cour ne seraient pas dotés de la personnalité morale...

Un président élu au suffrage universel. Le président de l'Ordre national des avocats serait élu par l'ensemble des avocats de France. Il tirerait de cette élection une légitimité incontestable et le pouvoir d'être la voix de l'ensemble de la profession. Son mandat serait de deux années, renouvelables une fois, pour permettre d'inscrire l'action dans la continuité, en gardant le rythme habituel des élections ordinales. L'usage d'une alternance Paris/Province dans le choix du président ne serait pas maintenu, compte tenu notamment du vote au suffrage universel.

Un financement assuré par les avocats. L'action de l'Ordre national serait financée par une cotisation forfaitaire par avocat. Elle serait recouvrée directement par l'Ordre national. Les comptes de l'Ordre national seraient certifiés par un commissaire aux comptes et soumis au contrôle de la Cour des comptes.

A l'issue de cette séance, que l'on peut supposer avoir été intense -le président du CNB, Christian Charrière-Bournazel en étant membre-, le conseil, afin que ces réflexions et propositions, et celles des autres composantes de la profession, interrogées parallèlement par le CNB, puissent être débattues avec recul et sérénité tout en intégrant d'autres réflexions inspirées d'autres professions et organisations, a adopté une motion visant à la création d'une commission ad hoc :

"le conseil de l'Ordre des avocats de Paris, réuni en sa séance du 15 janvier 2013, connaissance prise du questionnaire préparé par le Bureau du Conseil national des barreaux et du rapport de la commission Gouvernance du barreau de Paris, est d'avis de proposer la création d'une commission consultative (la Commission), composée de 11 membres, 2 désignés par le Président du CNB, 2 désignés par le Président de la Conférence des bâtonniers, 2 désignés par le bâtonnier de Paris -étant précisé que ces 6 membres désigneront le Président de la Commission- et 4 désignés parmi les membres de la société civile par le Président de la Commission pour présenter à la profession, après une large concertation avec ses représentants, le texte d'une proposition de loi créant un Ordre national des avocats".

Incontestablement, la position parisienne pourrait être vécue par certains comme une tentative de passage en force. Notamment pour la Conférence des Bâtonniers, dont le président, Jean-Luc Forget, rappelle qu'elle est l'expression du maillage du territoire... Et encore le 25 janvier dernier, lors de l'Assemblée générale statutaire de la Conférence : "Les Ordres ne doivent pas, ne peuvent pas se substituer à l'institution nationale. Celle-ci ne doit pas, ne peut pas, se substituer aux Ordres".

Affaire à suivre... encore...

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