La lettre juridique n°301 du 17 avril 2008 : Baux commerciaux

[Textes] La déclaration de cession d'un fonds de commerce, fonds artisanal ou bail commercial soumise au droit de préemption

Réf. : Arrêté du 29 février 2008, relatif à la déclaration préalable à la cession de fonds artisanaux, de fonds de commerce ou de baux commerciaux et modifiant le Code de l'urbanisme (N° Lexbase : L8563H3K) et formulaire cerfa n° 13644*01

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par Julien Prigent, Avocat à la cour d'appel de Paris

le 07 Octobre 2010

En vue de permettre aux commerces de première nécessité et de proximité de se maintenir en milieu rural et dans certains quartiers des grandes villes, le législateur a reconnu aux communes un droit de préemption, en cas de cession de fonds de commerce ou artisanal ou de bail commercial (loi n° 2005-882 du 2 août 2005, en faveur des petites et moyennes entreprises, art. 58 N° Lexbase : L7582HEK). Ces nouvelles dispositions n'étaient, toutefois, pas applicables, tant qu'un décret, pris en Conseil d'Etat, n'en avait pas précisé les conditions d'application (C. urb., art. L. 214-3 N° Lexbase : L5589HBM). Le décret d'application a été publié le 28 décembre 2007 (décret n° 2007-1827 du 26 décembre 2007, relatif au droit de préemption des communes sur les fonds de commerce, les fonds artisanaux et les baux commerciaux, NOR : DEVU0768059D N° Lexbase : L6840H3Q et lire nos obs. Publication du décret relatif au droit de préemption des communes sur les fonds de commerce, les fonds artisanaux et les baux commerciaux (première partie), Lexbase Hebdo n° 290 du 31 janvier 2008 - édition privée générale N° Lexbase : N8659BD3 et Publication du décret relatif au droit de préemption des communes sur les fonds de commerce, les fonds artisanaux et les baux commerciaux (seconde partie), Lexbase Hebdo n° 291 du 7 février 2008 - édition privée générale N° Lexbase : N0345BEI), soit plus de deux ans après la création de ce droit. L'entrée en vigueur du nouveau droit de préemption ne semblait, toutefois, toujours pas effective, l'article R. 214-4 du Code de l'urbanisme prévoyant que la déclaration préalable à la cession, prévue à l'article L. 214-1 du même code (N° Lexbase : L5587HBK), devait être effectuée dans les formes prévue par arrêté interministériel. C'est l'objet de l'arrêté du 29 février 2008 relatif à la déclaration préalable à la cession de fonds artisanaux, de fonds de commerce ou de baux commerciaux et modifiant le Code de l'urbanisme par la création d'un nouvel article A. 214-1.

Ce texte dispose que "la déclaration préalable prévue par les articles L. 214-1 et R. 214-4 doit être établie conformément au formulaire enregistré par la direction générale de la modernisation de l'Etat, sous le numéro Cerfa 13644*01 et disponible sur le site internet du ministère de l'Ecologie, du Développement et de l'Aménagement durables : http://www.developpement-durable.gouv.fr". Ce formulaire, objet de la présente analyse, a récemment été mis en ligne.

Il doit être rappelé, au préalable, que si l'arrêté du 29 février 2008 parachève le nouveau dispositif, il n'en reste pas moins que l'existence d'un droit de préemption est toujours subordonnée à la création par la commune d'un périmètre de sauvegarde du commerce et de l'artisanat de proximité (C. urb., art. L. 214-1 N° Lexbase : L5587HBK). Il ne s'agit que d'une faculté et, à défaut de délibération en ce sens, la commune ne bénéficie d'aucun droit de préemption.

I - Objet de la cession envisagée

Le cédant doit, tout d'abord, préciser l'objet de la cession : fonds de commerce, fonds artisanal ou bail commercial, étant précisé que cette dernière rubrique aurait dû être qualifiée de cession du droit au bail "seul", la cession du fonds de commerce emportant, le plus souvent, celle du bail commercial portant sur les locaux dans lequel il est exploité (Cass. com., 26 octobre 1993, n° 91-15.877, Epoux Blondeau c/ Etablissements J. Eon combustibles et autres N° Lexbase : A5754ABQ).

II - Identité des parties à l'acte de cession

Le propriétaire du fonds ou du bail commercial doit, ensuite, préciser son identité et son adresse, ainsi que celles du bailleur.

III - Description du bien

Sous la rubrique "description du bien", plusieurs informations sont requises :

  • l'adresse "du bien", à savoir du local où est exploité le fonds ou sur lequel porte le bail commercial ;
  • l'activité exercée ;
  • le caractère purement commercial ou artisanal ou la présence d'un local accessoire à usage d'habitation, ainsi que l'existence éventuelle de locaux annexes (entrepôts, ateliers, etc.).

En outre, le chiffre d'affaires réalisé au cours des trois dernières années peut, également, être précisé, cette mention n'étant, toutefois, que facultative. En l'absence de cette dernière information, il sera difficile pour la commune d'apprécier la juste valeur du prix auquel la cession est envisagée, étant rappelé (C. urb., art. R. 214-5) que la commune est tenue, si elle décide d'exercer son droit de préemption, soit d'acquérir au prix et conditions indiqués dans la déclaration préalable, soit d'acquérir aux prix et conditions fixés par l'autorité judiciaire saisie dans les conditions prévues à l'article R. 214-6 du Code de l'urbanisme.

Cette carence dans l'exigence des informations à porter à la connaissance de la commune, qui lui permettraient de mieux apprécier le prix de cession, se retrouve, également, en matière de cession du droit au bail seul, puisque pour ce dernier, mais il s'agit ici d'une obligation, seuls la date et le montant du loyer doivent être portés sur le formulaire de déclaration préalable. Or, la valeur du droit au bail repose sur de nombreux autres critères contractuels (répartition des charges entre bailleur et preneur, durée du bail, destination contractuelle, etc.).

IV - Modalité de la cession

1. Le droit de préemption de la commune porte sur les "cessions" (C. urb., art. L. 214-1) ou sur les "aliénations à titre onéreux" (C. urb., art. L. 214-3) de fonds artisanaux, de fonds de commerce ou de baux commerciaux, ce qui recouvre, a priori, tant les cessions amiables que forcées.

L'article R. 214-7 du Code de l'urbanisme régit de manière spécifique le droit de préemption en cas de cessions par voie d'adjudication. Dans cette hypothèse, la déclaration préalable doit être effectuée, selon la situation, par le commissaire-priseur, le greffier de la juridiction ou par le notaire, au moins trente jours avant la date fixée pour la vente. Surtout, la commune ne dispose, dans ce cas, que d'un délai de trente jours, et non de deux mois, pour notifier sa décision de se substituer à l'adjudicataire (C. urb., art. L. 214-1, al. 3, et art. R. 214-5).

Compte tenu de ces spécificités, notamment de ce délai plus court, la commune doit être informée de la nature de la cession, amiable ou par voie d'adjudication. Le formulaire de déclaration préalable impose, en conséquence, de préciser si la cession a lieu sous l'une ou l'autre de ces formes, ainsi que la date et les modalités de la vente.

2. Le "prix de vente" ou son "évaluation" doit, également, être porté sur le formulaire. Cette information est primordiale car, comme cela a déjà été indiqué, il liera a priori la commune qui, si elle est en désaccord avec ce montant, pourra, néanmoins, faire fixer judiciairement le prix (C. urb., art. R. 214-5).

3. La déclaration préalable doit, également, mentionner les modalités de paiement : "comptant à la signature de l'acte authentique" ou "à terme", qu'il sera nécessaire, dans ce dernier cas, de préciser.

Il est curieux de n'avoir envisagé la signature du contrat définitif que sous la forme d'un acte authentique.

Un paiement en nature est, également, envisagé, qui devrait s'analyser juridiquement en une dation en paiement. Dans ce cas, il faut préciser la contrepartie de l'aliénation et son évaluation.

L'hypothèse d'un "échange", "apport en société" (analysé par la jurisprudence comme une cession : Cass. civ. 3, 8 juillet 1992, n° 90-16.758, SARL Suffren Fleurs c/ SCI 4, rue Desaix à Paris 15e N° Lexbase : A8883AHH, à propos de l'apport d'un droit au bail) ou toute autre modalité de cession autre qu'une vente est, également, envisagée.

V - Création d'un droit de délaissement ?

Le déclarant doit, également, choisir entre l'une des deux options suivantes :

  • demander au titulaire du droit de préemption d'acquérir le fonds ou le bail ;
  • ou porter seulement à la connaissance de la commune le fait qu'il a "recherché et trouvé" un acquéreur disposé à acheter ce fonds ou bail.

Comme l'a relevé un commentateur de l'arrêté rapporté (D. Dutrieux, Droit de préemption communal sur les fonds de commerce, fonds artisanaux et baux commerciaux, publication du formulaire de déclaration préalable, JCP éd. N, 1er février 2008, actu. n° 370, p. 18-19), cet arrêté reconnaît, implicitement, au cédant potentiel un droit de délaissement qui peut être défini comme "la possibilité donnée au propriétaire d'un bien exposé à un droit de préemption [...] de mettre l'administration en demeure de l'acquérir" (Droit de l'urbanisme et de la construction, J.-B. Auby, H. Périnet-Marquet, 7ème éd., n° 655).

Or, ni la loi instituant le droit de préemption des communes sur les cessions de fonds ou de bail, ni son décret d'application ne semblent reconnaître une telle faculté au cédant.

VI - Mention du mandataire

La déclaration préalable peut être effectuée par un mandataire, qui devra mentionner son identité et ses coordonnées.

Il peut, également, être prévu que la notification par l'administration de son droit de préemption s'effectuera soit à l'adresse du propriétaire du fonds ou du titulaire du bail, soit à l'adresse de son mandataire signataire de la déclaration.

Il est, en outre, indiqué dans le formulaire que "toutes les décisions relatives à l'exercice du droit de préemption seront notifiées au bailleur en cas de déclaration de cession d'un bail commercial", cette obligation découlant de l'article R. 214-5 du Code de l'urbanisme. Le bailleur devra, ultérieurement et avant toute rétrocession, donner son accord (C. urb., art. L. 214-2 N° Lexbase : L5588HBL).

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