La lettre juridique n°299 du 3 avril 2008 : Droit des étrangers

[Jurisprudence] Quand le Conseil d'Etat se mêle de politique étrangère

Réf. : CE 2° et 7° s-s-r., 13 février 2008, n° 295443, Association Forum des réfugiés (N° Lexbase : A9140D4B)

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par Frédéric Dieu, commissaire du Gouvernement près le Tribunal administratif de Nice

le 07 Octobre 2010

Par une décision en date du 13 février 2008, le Conseil d'Etat a jugé que l'Albanie et le Niger n'étaient pas des "pays d'origine sûrs" au sens du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), en raison de l'instabilité de leur contexte politique et social. Dans cette affaire, l'association "Forum des réfugiés" demandait au Conseil d'Etat d'annuler une décision du conseil d'administration de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), considérant comme "pays sûrs" plusieurs Etats. La Haute juridiction a fait partiellement droit à la requête, en relevant que si le conseil d'administration de l'OFPRA n'avait pas "inexactement apprécié la situation de l'ancienne République yougoslave de Macédoine, de la République de Madagascar et de la République unie de Tanzanie au regard des critères posés par le 2° de l'article L. 741-4 [du CESEDA]", il avait cependant entaché sa décision d'illégalité en estimant que l'Albanie et le Niger satisfaisaient à ces critères. Le Conseil d'Etat a ainsi pris une position différente de celle qu'il avait adoptée le 7 août 2007 en tant que juge du référé-suspension (CE 6° s-s., 7 août 2007, n° 301540, Ministre de l'Intérieur et de l'Aménagement du territoire c/ M. Peqini N° Lexbase : A8998DXK), puisqu'il avait alors considéré que le moyen tiré de ce que l'Albanie n'était pas un pays sûr au sens de l'article L. 741-4 du CESEDA (N° Lexbase : L5929G4D) n'était pas propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée. La décision du 13 février 2008 marque ainsi la première intervention "positive" du Conseil d'Etat sur le terrain de l'appréciation de la situation des pays étrangers, au regard des droits de l'Homme et des libertés fondamentales. En faisant pour la première fois application du contrôle normal qu'il exerce sur les décisions de l'OFPRA, en la matière, pour invalider partiellement la position retenue par cet établissement, le Conseil d'Etat fait irruption dans un domaine éminemment politique et même régalien, puisqu'il touche à la politique étrangère de la France.

I - Si la notion et la première liste des pays d'origine sûrs ont été validées par le Conseil constitutionnel et le Conseil d'Etat...

A. Origine et objet de la notion de "pays d'origine sûrs"

1) Une notion issue du droit communautaire mais dont la mise en oeuvre a été anticipée par le droit interne

Lors du Conseil européen de Tampere des 15 et 16 octobre 1999, un accord a été trouvé sur la nécessité de mettre en place un régime d'asile européen commun. Selon les conclusions de la présidence, ce régime devait être fondé sur l'application intégrale et globale de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés, et maintenir le principe de non refoulement ; il devait déboucher sur une procédure d'asile commune et sur un statut uniforme, valable dans toute l'Union pour les personnes qui se voient accorder l'asile.

Dès l'année 2000, la Commission a présenté une proposition de Directive relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les Etats membres, mais il n'a pas été possible de trouver un accord sur ce texte qui a été suivi de plusieurs autres, toujours en négociation. La notion de "pays d'origine sûr" avait déjà été consacrée par le protocole annexé au Traité d'Amsterdam du 2 octobre 1997, selon lequel les Etats membres de l'Union constituent les uns vis-à-vis des autres des "pays d'origine sûrs", avec cette conséquence qu'une demande d'asile présentée par un ressortissant d'un Etat membre ne peut jamais être prise en considération.

Alors que l'élaboration de la norme européenne connaissait des difficultés, le législateur français a introduit dans notre droit la notion de "pays d'origine sûr". La loi n° 2003-1176 du 10 décembre 2003 (N° Lexbase : L9630DLA), modifiant la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952, relative au droit d'asile (N° Lexbase : L0885BD7), a institué en droit français la notion de "pays d'origine sûr". Cette loi a, par son article 2, désormais codifié à l'article L. 722-1 du CESEDA (N° Lexbase : L1328HPU), confié au conseil d'administration de l'OFPRA le soin de fixer une liste des pays d'origine sûrs, dans l'attente de l'élaboration d'une liste européenne, et par son article 5, désormais codifié aux articles L. 723-1 (N° Lexbase : L5965G4P) et L. 741-4 précité du même code, elle a prévu que les ressortissants d'un "pays d'origine sûr" pourraient se voir refuser l'admission sur le territoire, que l'Office statuerait par priorité sur leur demande, et qu'ils bénéficieraient du droit de se maintenir en France jusqu'à la décision de l'OFPRA.

La loi a donné une définition du "pays d'origine sûr", en précisant à l'article L. 741-4-2° qu'un pays ne pouvait être considéré comme sûr que "s'il veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'Etat de droit, ainsi que des droits de l'Homme et des libertés fondamentales". Enfin, et ce point est essentiel, elle a explicitement prévu que "la prise en compte du caractère sûr du pays d'origine ne peut faire obstacle à l'examen individuel de chaque demande". Toutefois, aux termes de la rédaction actuelle de l'article L. 722-1, le conseil d'administration de l'OFPRA n'a reçu compétence pour fixer la liste des pays d'origine sûrs que "pour la période comprise entre la date d'entrée en vigueur de la loi n° 2003-1176 du 10 décembre 2003 et l'adoption de dispositions communautaires en cette matière".

Or, depuis, la Directive 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005, relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les Etats membres (N° Lexbase : L9965HDG), a été adoptée par les Etats membres. Cette Directive, postérieure à l'adoption de la loi du 10 décembre 2003, autorise cependant les Etats membres à "maintenir les dispositions législatives qui sont en vigueur le 1er décembre 2005, qui leur permettent de désigner comme pays d'origine sûrs, au niveau national, des pays tiers autres que ceux qui figurent sur la liste commune minimale à des fins d'examen de demandes d'asile, lorsqu'ils se sont assurés que les personnes dans les pays tiers concernés ne sont généralement pas soumises : a) à des persécutions au sens de l'article 9 de la Directive 2004/83/CE (N° Lexbase : L7972GTG), ni b) à la torture ou à des traitements ou des peines inhumains ou dégradants".

Les dispositions communautaires ayant été aujourd'hui définitivement adoptées, et étant par ailleurs entrées en vigueur, l'article L. 722-1 du CESEDA a pérennisé la compétence du conseil d'administration de l'OFPRA. Ce dernier est, désormais, sans aucune restriction temporelle, compétent "dans les conditions prévues par les dispositions communautaires en cette matière". Le 3 mai 2006, le conseil d'administration de l'OFPRA a, d'ailleurs, complété la liste des "pays d'origine sûrs" par l'adjonction de cinq nouveaux Etats : l'Albanie, la Macédoine, Madagascar, le Niger et la Tanzanie.

La liste des "pays d'origine sûrs" prise en application de l'article L. 722-1 coexistera donc avec celle qui devrait être fixée par les institutions communautaires, et qui s'appliquera à l'ensemble des Etats membres de l'Union européenne, en vertu de l'article 29 de la Directive précitée du 1er décembre 2005. Soulignons, cependant, que la liste "communautaire" n'a toujours pas été adoptée à ce jour. Les dispositions de droit interne continueront donc à s'imposer en la matière.

2) Une procédure d'examen dérogatoire à la procédure habituelle dont la mise en oeuvre a fait chuter le nombre de demandes présentées par les ressortissants des "pays d'origine sûrs"

Une demande d'asile présentée par un ressortissant d'un "pays d'origine sûr" est soumise à un régime dérogatoire. D'une part, à l'instar des nationaux des pays relevant de la clause de l'article 1er C 5 de la Convention de Genève, les demandeurs d'asile ressortissants de ces pays ne bénéficient pas de l'admission sur le territoire, et le recours qu'ils peuvent former en cas de rejet de leur demande n'est pas suspensif : le préfet n'est donc pas tenu d'attendre que la commission de recours des réfugiés (CRR) se prononce pour prendre une mesure d'éloignement à destination d'un "pays d'origine sûr" (CAA Bordeaux, 12 octobre 2006, n° 06BX01287, M. Jasmin Dedic N° Lexbase : A9918DS7). D'autre part, les demandes d'asile émanant des ressortissants de ces pays sont traitées selon une procédure prioritaire. L'OFPRA est alors tenu d'examiner ces demandes dans un délai de 15 jours, lorsque le demandeur est laissé en liberté, et de 96 heures, lorsqu'il est placé en rétention administrative. En tout état de cause, cet examen prioritaire impose un examen individuel de chaque demande par les services de l'OFPRA.

En application du deuxième alinéa de l'article L. 722-1 du CESEDA, la compétence pour définir la liste des pays d'origine considérés comme sûrs est confiée au conseil d'administration de l'OFPRA. Celui-ci a adopté, le 30 juin 2005, une liste de 12 "pays d'origine sûrs" comprenant : le Bénin, la Bosnie-Herzégovine, le Cap-Vert, la Croatie, la Géorgie, le Ghana, l'Inde, le Mali, Maurice, la Mongolie, le Sénégal et l'Ukraine.

Dans le cadre du dispositif créé par la loi du 10 décembre 2003, il faut souligner que le fonctionnaire de police ou des douanes va préjuger du caractère "manifestement infondé" de la demande d'asile de l'étranger, sous réserve de la décision de l'OFPRA. Dans ce cas, la France nie l'existence de persécutions prétendues et refuse sa protection à l'étranger. Un recours est ouvert aux "déboutés" devant la CRR. La conséquence est la fin de l'autorisation de séjour de l'étranger sur le territoire français, malgré la possibilité d'un recours devant le Conseil d'Etat. Ce refus fait peser une lourde responsabilité sur ceux qui en décident, sous le contrôle de la juridiction administrative. Pratiquement, les autorités administratives elles-mêmes estiment que les mesures d'éloignement des déboutés sont très peu mises en oeuvre, notamment pour des raisons financières, mais aussi d'organisation. Cette situation fait que les clandestins sont d'autant plus incités à entrer sur le territoire français, quel que soit le moyen employé, qu'il y a peu de risque d'être éloigné. Entrer en France assure pratiquement de pouvoir s'y maintenir.

En revanche, si la demande paraît fondée, le demandeur d'asile pourra pénétrer sur le territoire et bénéficier d'une autorisation de séjour temporaire, puis d'un récépissé de trois mois renouvelable jusqu'à la décision finale. En revanche, il ne bénéficiera plus du droit au travail comme auparavant, ce qui le placera dans une situation de précarité certaine. Convoqué dans une préfecture, il pourra tenter de faire reconnaître sa qualité de réfugié politique. En cas de réponse positive, le réfugié se verra délivrer par l'OFPRA une carte de réfugié et une carte de séjour de dix ans par la préfecture.

Selon les données recueillies par la commission d'enquête du Sénat sur l'immigration clandestine, la publication de la liste des pays d'origine sûrs a fait chuter de plus de 66 %, entre le 1er juillet et le 31 décembre 2005, le nombre des premières demandes d'asile émanant de leurs ressortissants. Du même coup, la demande d'asile originaire de ces pays, qui représentait 11,4 % de la demande d'asile totale au 30 juin 2005, n'en représentait plus que 3,9 % au 31 décembre 2005. Ces seules statistiques font apparaître la "réussite" de cette mesure, dont l'objet est de dissuader la présentation de demandes d'asile "opportunistes" qui n'émaneraient, en réalité, que de candidats à l'immigration pour des motifs ne rentrant pas dans le champ de la protection organisée par la Convention de Genève, ou par la protection subsidiaire visée par le chapitre II du titre premier du livre VII du CESEDA.

B. La notion de "pays d'origine sûrs" a été validée par le Conseil constitutionnel, tandis que la première liste des pays d'origine sûrs retenue par l'OFPRA a été validée par le Conseil d'Etat

1) Le Conseil constitutionnel a validé la notion de "pays d'origine sûrs"

Par sa décision du 4 décembre 2003 (Cons. const., décision n° 2003-485 DC, du 4 décembre 2003, Loi modifiant la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952, relative au droit d'asile N° Lexbase : A0372DIM, au Recueil p. 455, Petites Affiches du 20 janvier 2004, note Schoettl), le Conseil constitutionnel a admis la conformité des dispositions de la loi du 10 décembre 2003 à la Constitution, relevant, en particulier, l'existence d'une obligation d'examen individuel des demandes, et considérant qu'elles ne méconnaissaient pas le principe d'égalité.

A l'argument selon lequel en confiant l'établissement de la liste des pays sûrs à l'OFPRA, le législateur n'aurait pas respecté l'article 21 de la Constitution (N° Lexbase : L1280A9B), qui confère au Premier ministre l'exercice du pouvoir réglementaire, le juge constitutionnel a répondu que ces dispositions ne font "pas obstacle à ce que le législateur confie à une autorité de l'Etat autre que le Premier ministre, le soin de fixer des normes permettant de mettre en oeuvre une loi". Il a, cependant, assorti cette réponse d'une condition : il faut que cette habilitation ne concerne que des mesures de portée limitée, tant par leur champ d'application, que par leur contenu (mais tel était le cas, selon lui, en l'espèce).

Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a relevé que la fixation de la liste des pays d'origine sûrs pouvait faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, ne liant donc pas l'appréciation de la situation de chaque demandeur d'asile par la CRR (devenue Cour nationale du droit d'asile), et que la loi du 10 décembre 2003 ne portait pas atteinte à l'indépendance de cette Commission vis-à-vis de l'OFPRA, et était donc sans incidence sur son impartialité.

2) Le Conseil d'Etat a validé la liste des "pays d'origines sûrs" fixée par l'OFPRA le 30 juin 2005

Nous l'avons vu, par une délibération en date du 30 juin 2005, le conseil d'administration de l'OFPRA a adopté une liste de 12 pays d'origine sûrs comprenant : le Bénin, la Bosnie-Herzégovine, le Cap-Vert, la Croatie, la Géorgie, le Ghana, l'Inde, le Mali, l'île Maurice, la Mongolie, le Sénégal et l'Ukraine. Le Conseil d'Etat, saisi d'un recours en annulation contre la décision de l'Office, a validé cette liste au regard des stipulations de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et de protection des libertés fondamentales (CESDH) (CE 2° et 7° s-s-r., 5 avril 2006, n° 284706, Gisti et autres N° Lexbase : A9551DN3, au Recueil p. 186).

Après avoir rappelé que les stipulations du cinquième alinéa du préambule de la Convention de Genève sont dépourvues d'effet direct, le Conseil d'Etat a indiqué que l'établissement d'une liste de "pays d'origine sûrs" avait pour effet de permettre l'application d'une procédure prioritaire pour l'examen par l'OFPRA des demandes d'asile émanant des ressortissants desdits pays, et que cette disposition ne pouvait exempter l'administration de procéder à l'examen individuel de chaque dossier. Selon le Conseil, en outre, la circonstance que les règles de procédure applicables sont différentes selon que le demandeur est originaire ou non d'un pays "considéré comme sûr", n'est pas contraire aux stipulations de l'article 3 de la Convention de Genève, dès lors que l'examen individuel effectué par l'OFPRA et, le cas échéant, par la CRR, assure le respect des garanties qui s'attachent à la mise en oeuvre du droit d'asile.

Le Conseil d'Etat s'est également prononcé sur la conformité de la décision de l'OFPRA aux articles 3 (N° Lexbase : L4764AQI) et 14 (N° Lexbase : L4747AQU) de la CESDH. Il a considéré, sur ce point, que ces articles n'avaient pas été méconnus, dès lors que les demandeurs d'asile provenant de "pays réputés sûrs" bénéficiaient dans tous les cas du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'OFPRA, et ne pouvaient faire l'objet d'aucune mesure d'éloignement avant l'intervention de cette décision, la décision fixant le pays de destination accompagnant, le cas échéant, la mesure d'éloignement prise à leur encontre ultérieurement devant être conforme aux stipulations de l'article 3 de la Convention.

Enfin, et au fond, le Conseil d'Etat a considéré que le conseil d'administration de l'OFPRA avait pu retenir sur la liste des pays d'origine "considérés comme sûrs" des Etats autres que ceux de l'OCDE, et qu'il avait exactement apprécié la situation des pays retenus au regard de ces critères, cette liste ayant été élaborée en tenant compte de l'ensemble des informations dont il avait disposé, en particulier des rapports établis sur ces pays par le Haut commissariat des Nations-Unies pour les réfugiés.

II - ... ce dernier n'en exerce pas moins un strict contrôle sur les compétences qu'exerce l'OFPRA en la matière, en se prononçant en particulier sur la situation des pays en cause au regard des droits de l'Homme et des libertés fondamentales

A. Le Conseil d'Etat s'est d'abord prononcé sur les principes présidant à la fixation de la liste des "pays d'origine sûrs", et à la procédure applicable aux ressortissants de ces pays

1) Les principes présidant à la fixation de la liste des "pays d'origine sûrs"

Dans la décision du 13 février 2008, le Conseil d'Etat s'est d'abord prononcé sur les modalités de fixation par l'OFPRA de la liste des "pays d'origine sûrs". L'association requérante soutenait, en effet, que la décision en cause avait été adoptée selon une procédure irrégulière, dans la mesure où le conseil d'administration de l'Office avait procédé à un vote global en ce qui concernait les pays nouvellement admis (Albanie, Macédoine, Madagascar, Niger et Tanzanie), et non à un vote séparé, pays par pays.

A cet égard, le Conseil d'Etat a noté que le conseil d'administration de l'OFPRA avait procédé, avant d'adopter par un vote global l'extension de la liste des "pays d'origine sûrs", à un examen détaillé de la situation particulière de chaque pays, au regard des critères posés par l'article L. 741-4 du CESEDA. Par ailleurs, le Conseil a relevé que ni les dispositions de la Directive 2005/85/CE du Conseil précitée, ni les dispositions du décret n° 2004-814 du 14 août 2004, relatif à l'OFPRA et à la CRR (N° Lexbase : L0842GTD), n'imposaient qu'un vote séparé eût lieu pour chacun des pays, vote séparé que la teneur des débats auxquels avait donné lieu l'examen pays par pays ne rendait pas nécessaire en l'espèce. La décision a donc été adoptée selon une procédure régulière.

Il n'en demeure pas moins que le vote séparé pour chacun des pays n'était pas nécessaire, ce qui signifie que le principe du vote global n'a pas été validé en tant que tel par le Conseil d'Etat. Dans ses conclusions sous la décision du 13 février 2008, Emmanuelle Prada-Bordenave relève, d'ailleurs, que si aucun texte n'impose un vote pays par pays, "il ne ressort d'aucune des mentions du procès-verbal que le vote qui a eu lieu aurait eu la nature d'un vote bloqué" et "qu'il eût été concevable de disjoindre au moment du vote le cas d'un pays". Cette analyse confirme donc le refus d'accorder au vote global une valeur de principe, et cela vaut tant au stade de la décision de l'OFPRA (qui peut décider au moment du vote de ne pas inclure un pays dont la situation a pourtant et préalablement fait l'objet de discussions), qu'au stade de la décision du Conseil d'Etat (qui peut décider, comme il l'a fait dans la décision en cause, d'exclure un ou plusieurs pays de liste des "pays d'origine sûrs", sans remettre en cause la légalité de l'inscription des autres pays).

Il nous semble, donc, que la nécessité ou non d'un vote séparé dépendra des discussions et débats qui auront précédé ce vote, et en particulier de l'existence ou non d'une discussion argumentée sur chacun des pays en cause. Il faut, en effet, que la situation de chaque pays au regard des critères fixés à l'article L. 741-4-2° précité soit examinée, si ce n'est au moment du vote, du moins au moment des débats qui le précèdent, afin que les membres du conseil d'administration puissent se prononcer en connaissance de cause sur le caractère sûr des pays. Donc, si un pays a été reconnu par l'OFPRA comme un "pays d'origine sûr", sans qu'aucun débat ni discussion n'aient eu lieu préalablement au vote global sur la situation de ce pays, il est vraisemblable que le Conseil estimera que la décision a été adoptée selon une procédure irrégulière, et qu'il sera donc contraint de l'annuler, du moins partiellement, c'est-à-dire en tant qu'elle a retenu ce pays sur la liste des "pays d'origine sûrs".

2) Une procédure dont la constitutionnalité et la légalité sont subordonnées à la mise en oeuvre d'un examen individuel de chaque demande, mais qui porte cependant atteinte aux droits des ressortissants des pays d'origine sûrs

Le Conseil constitutionnel l'avait déjà souligné dans la décision du 4 décembre 2003 précitée : le fait d'avoir la nationalité d'un pays sûr a pour seul effet de mettre en oeuvre une procédure prioritaire, comme c'était déjà le cas pour certains demandeurs d'asile. Or, a souligné le Conseil, la prise en compte du caractère sûr du pays d'origine ne peut faire obstacle à l'examen individuel de chaque demande. En outre, l'intéressé dispose du droit de rester en France pendant cet examen et l'Office n'est pas dispensé de l'obligation de procéder à l'audition de l'intéressé. Dans la décision du 13 février 2008, le Conseil d'Etat, dans le cadre de son contrôle de conventionalité, a également considéré que la mise en oeuvre d'une procédure spécifique pour les ressortissants des "pays d'origine sûrs" ne pouvait être contraire aux stipulations de l'article 3 de la Convention de Genève, qui prévoient que "les Etats contractants appliqueront les dispositions de cette Convention aux réfugiés, sans discrimination quant à la race, la religion ou le pays d'origine", en adoptant le même raisonnement que le Conseil constitutionnel.

En effet, au moyen tiré de la rupture de l'égalité, le Conseil constitutionnel avait opposé l'absence d'égalité entre les demandeurs d'asile selon qu'ils proviennent ou non d'un pays sûr, ce qui justifiait que des règles de procédure différentes puissent leur être appliquées sans que fût méconnu le principe d'égalité. Le Conseil d'Etat, dans la décision du 13 février 2008, indique, également, que les demandeurs d'asile provenant de pays "considérés comme sûrs" se trouvent placés "dans une situation différente de celle des demandeurs d'asile venant d'autres pays". Or, le principe d'égalité ne peut trouver à s'appliquer que lorsque les demandeurs sont placés dans une situation identique (CE 1° et 6° s-s-r., 21 mars 2007, n° 284951, 285025 et 285033, Association française des médecins esthéticiens - Syndicat national des médecins esthétiques et M. Bzowski et autres N° Lexbase : A7309DUA, Mentionné aux Tables). Dès lors que des personnes sont placées dans une situation de droit différente, le principe d'égalité ne peut être utilement invoqué (CE 9° et 10° s-s-r., 30 mars 2007, n° 280156 et 280498, Syndicat des enseignants CGT à Mayotte et Syndicat des instituteurs de Mayotte Force ouvrière N° Lexbase : A8129DUM).

La position du Conseil d'Etat, comme celle du Conseil constitutionnel, est cependant contestable. En effet, la différence de situation relevée par le Conseil nous paraît pour le moins artificielle, puisque résultant d'une appréciation subjective portée par l'OFPRA et le juge lui-même : la différence de situation n'est donc pas objective, mais construite par l'administration. Bien plus, alors même que le recours dont il est saisi l'oblige à examiner le caractère sûr ou non des pays en cause au regard des critères de l'article L. 741-4-2°, le Conseil d'Etat fait comme si cette qualification n'était pas contestée au moment où il examine le moyen tiré de la rupture du principe d'égalité. Ce qui est une question devient alors une réponse et un fait acquis : les pays en cause sont des "pays d'origine sûrs", et c'est pourquoi leurs ressortissants se trouvent dans une situation différente des ressortissants des autres pays. Toutefois, comment peut-on ainsi accréditer une appréciation de l'administration qui est elle-même en litige ? Surtout, comment peut-on, pour qualifier une différence de situation, se borner à tenir pour acquises les allégations de l'administration sur lesquelles il s'agit précisément de se prononcer ? Il nous semble donc que l'on ne peut en aucun cas considérer que les demandeurs d'asile provenant de pays "considérés comme sûrs" se trouvent placés "dans une situation différente de celle des demandeurs d'asile venant d'autres pays" : dire cela revient à considérer comme résolue une question qui n'a même pas été examinée, et à faire de la différence de situation une interprétation purement subjective. Sont alors différentes des situations que l'administration estime être différentes.

Peut-être conscient du caractère aporétique et quelque peu circulaire de ce raisonnement (puisque pour ne pas répondre à la question posée, l'on considère qu'elle est une réponse et non une question), le Conseil d'Etat a relevé que la différence de traitement des demandeurs d'asile, selon qu'ils sont ou non originaires d'un "pays d'origine sûr", était purement procédurale et aucunement fondamentale, puisque c'est seulement la procédure d'examen des demandes qui différait.

Ainsi, comme le Conseil constitutionnel, le Conseil d'Etat a souligné que la conventionalité du dispositif, au regard des stipulations de l'article 3 de la Convention de Genève, était garantie par l'existence d'un examen individuel effectué par l'OFPRA, cet examen individuel permettant seul d'assurer le "respect des garanties qui s'attachent à la mise en oeuvre du droit d'asile". Ce faisant, le Conseil d'Etat a rappelé la position de principe qu'il avait adoptée lors de l'examen de la légalité de la délibération du conseil d'administration de l'OFPRA en date du 30 juin 2005, qui avait fixé une première liste de "pays d'origine sûrs" : dans la décision du 5 avril 2006, "Gisti", le Conseil avait en effet affirmé que "l'établissement d'une liste de pays d'origine sûrs [...] ne saurait exempter l'administration de procéder à l'examen individuel de chaque dossier, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 741-4 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile".

Là encore, la position du Conseil d'Etat (comme celle du Conseil constitutionnel) est contestable. L'on ne saurait affirmer que la différence de traitement des demandeurs d'asile, selon qu'ils sont ou non originaires d'un "pays d'origine sûr", est purement procédurale : en effet, de toute évidence, les demandeurs originaires d'un "pays d'origine sûr" ne bénéficient pas des mêmes droits que les demandeurs originaires des autres pays. Ainsi, et en premier lieu, ils ne bénéficient pas d'une autorisation provisoire de séjour, contrairement aux autres demandeurs d'asile qui bénéficient de ce droit jusqu'à la décision de l'OFPRA et, éventuellement, de la Cour nationale du droit d'asile (1). Ni droit au séjour ni recours suspensif devant la Cour nationale du droit d'asile, voilà déjà ce qui distingue les demandeurs originaires d'un pays d'origine sûr des demandeurs originaires des autres pays. Soulignons, en outre, que les premiers, à la différence des seconds, ne bénéficient ni de l'allocation temporaire d'attente prévue à l'article L. 351-9 du Code du travail (N° Lexbase : L1881HPD) (CE, 7 août 2007, Ministre de l'Intérieur c/ M. Peqini, précité), ni de la couverture maladie universelle.

L'on voit donc que la différence de traitement entre demandeurs d'asile originaires d'un "pays d'origine sûr", et demandeurs d'asile originaires des autres pays, touche aux droits respectifs dont ceux-ci disposent, et pas seulement à la procédure d'examen de leurs demandes respectives. La position du Conseil d'Etat et du Conseil constitutionnel est donc sur ce point, et pour le moins, constructive et contestable, d'autant que la différence de situation alléguée entre ces deux catégories de demandeurs résulte d'une appréciation subjective de l'OFPRA.

B. Le Conseil d'Etat a ensuite confirmé l'étendue de son contrôle sur l'OFPRA avant d'en faire une application particulièrement audacieuse

1) La fixation de la liste des pays d'origine sûrs par l'OFPRA donne lieu à un contrôle normal de la part du Conseil d'Etat

Dans ses conclusions sous la décision du 5 avril 2006 précitée, le commissaire du Gouvernement E. Prada-Bordenave estimait que le contrôle de la fixation par l'OFPRA de la liste des "pays d'origine sûrs" devait être limité à l'erreur manifeste d'appréciation "compte tenu du caractère particulièrement délicat de l'appréciation en cause". Le Conseil d'Etat ne l'a cependant pas suivi, et il a considéré que la compétence exercée par l'OFPRA en la matière devait être soumise à un contrôle normal. C'est ainsi que le Conseil a examiné la légalité de la décision de l'OFPRA au regard des critères fixés par l'article L. 741-4 du CESEDA (respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'Etat de droit, ainsi que des droits de l'Homme et des libertés fondamentales) en "tenant compte de l'ensemble des informations dont disposait l'Office à la date à laquelle il s'est prononcé, en particulier des rapports établis sur ces pays par le Haut commissariat des Nations-Unies pour les réfugiés".

Le choix du contrôle normal de préférence à un contrôle de l'erreur manifeste d'appréciation se justifie, selon nous, par le caractère essentiellement législatif (et non réglementaire) de la compétence relative à la fixation des "pays d'origine sûrs". On sait, en effet, que selon l'article 34 de la Constitution (N° Lexbase : L1294A9S), "La loi fixe les règles concernant [...] les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques". Certes, la mise en oeuvre des garanties déterminées par le législateur relève du pouvoir exécutif. Toutefois, en subordonnant l'intégration d'un pays sur la liste des "pays d'origine sûrs" au respect par ce pays des principes de la liberté, de la démocratie et de l'Etat de droit, ainsi que des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, le législateur a clairement encadré la compétence du pouvoir réglementaire, et il ne pouvait être question pour le Conseil d'Etat de méconnaître ce strict encadrement en laissant au pouvoir réglementaire, et donc au conseil d'administration de l'OFPRA, une trop grande marge de manoeuvre.

Dans la décision du 13 février 2008, le Conseil a confirmé cette solution en exerçant à nouveau un contrôle normal sur la nouvelle liste des pays d'origine sûrs fixée par l'OFPRA, en définissant à nouveau ce contrôle normal comme l'appréciation de la situation des pays figurant sur cette liste au regard du respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'Etat de droit, ainsi que des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

2) L'immixtion du Conseil d'Etat dans la politique étrangère de la France

La décision du 13 février 2008, si elle confirme essentiellement l'approche et la solution retenues par le Conseil d'Etat dans la précédente décision du 5 avril 2006, est cependant remarquable en ce que, pour la première fois, et contrairement aux conclusions de son commissaire du Gouvernement qui proposait de valider l'ensemble de la liste, le Conseil d'Etat a partiellement annulé la liste fixée par l'OFPRA, et s'est ainsi prononcé défavorablement sur la situation de deux pays au regard des droits de l'Homme et des libertés fondamentales. Ce faisant, le Conseil a, en effet, porté un jugement nécessairement politique sur les pays en cause, l'Albanie et le Niger, et s'est donc, implicitement mais tout aussi nécessairement, immiscé dans un domaine (le jugement porté sur la situation d'un pays étranger au regard des droits de l'Homme) relevant normalement de la politique étrangère.

Or, il faut souligner que, contrairement à la décision du 5 avril 2006, la décision du 13 février 2008 n'a nullement précisé les sources sur lesquelles s'était fondé le Conseil d'Etat pour considérer que les deux pays en cause "en dépit des progrès accomplis [...] ne présentaient pas, à la date de la décision attaquée, eu égard notamment à l'instabilité du contexte politique et social propre à chacun de ces pays, les caractéristiques justifiant leur inscription sur la liste des pays d'origine sûrs au sens du 2° de l'article L. 741-4 de ce code". En effet, si la décision du 5 avril 2006 avait noté que l'OFPRA s'était prononcé au vu des rapports établis sur ces pays par le Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, et avait donc semblé retenir la pertinence de ces rapports, la décision du 13 février 2008 n'a donné aucune précision sur les sources qui ont permis au Conseil d'Etat d'affirmer que l'Albanie et le Niger souffraient d'un contexte politique et social instable. Par-delà le caractère très général et, il faut bien le dire, assez vague de cette expression, il est remarquable de constater que, non seulement le Conseil d'Etat se mêle ici de politique étrangère en se prononçant sur la situation des droits de l'Homme et des libertés fondamentales dans deux pays étrangers, mais, qu'en outre, il le fait sans aucunement justifier sa position.

Or, si la situation du Niger présente effectivement une instabilité politique et sociale du fait de l'existence d'un mouvement de rébellion armé de la part de la minorité touareg et de la brutalité des forces de sécurité gouvernementales (2), il n'en est pas de même pour la situation de l'Albanie qui est "seulement" affectée par la persistance de "crimes d'honneur" dans certaines zones, par la corruption et l'abus de la force par les services de sécurité et encore par les discriminations envers les femmes et les minorités (3).

Plus généralement, le même rapport note que les élections locales ont eu lieu en février 2007 sous la surveillance d'observateurs internationaux, et n'accrédite guère le constat d'instabilité politique et sociale fait par le Conseil d'Etat. Soulignons d'ailleurs que l'Albanie a été inscrite par la Grande Bretagne sur la liste des "pays d'origine sûrs". L'on doit donc s'interroger sur la pertinence du contrôle opéré par le Conseil en la matière, et l'on ne peut, à cet égard, que regretter que celui-ci n'ait pas davantage précisé les motifs et les sources sur lesquelles il s'est fondé pour dénier à l'Albanie la qualité de "pays d'origine sûr".


(1) CE Assemblée, 13 décembre 1991, n° 120560, Préfet de l'Hérault c/ Dakoury et Nkodia (N° Lexbase : A0112ARL), RUDH, 30 avril 1992, vol. 4, p. 117 conclusions Abraham, AJDA, 1992, p. 114, chronique Maugüe et Schwartz ; Cons. const., décision n° 93-325 DC du 13 août 1993 (N° Lexbase : A8285ACT) : "le respect du droit d'asile, principe de valeur constitutionnelle, implique d'une manière générale que l'étranger qui se réclame de ce droit soit autorisé à demeurer provisoirement sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande ; sous réserve de la conciliation de cette exigence avec la sauvegarde de l'ordre public, l'admission au séjour qui lui est ainsi nécessairement consentie doit lui permettre d'exercer effectivement les droits de la défense qui constituent pour toutes les personnes, qu'elles soient de nationalité française, de nationalité étrangère ou apatrides, un droit fondamental à caractère constitutionnel".
(2) Cf. à ce sujet le rapport du Département d'Etat américain sur la situation au Niger disponible sur le site du Haut commissariat des Nations-Unies pour les réfugiés : United States Department of State, 2007 Country Reports on Human Rights Practices - Niger, 11 March 2008
(3) Cf. à ce sujet le rapport du Département d'Etat américain sur la situation en Albanie disponible sur le site du Haut commissariat des Nations-Unies pour les réfugiés : United States Department of State, 2007 Country Reports on Human Rights Practices - Albania, 11 March 2008.

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