Le Quotidien du 22 septembre 2023

Le Quotidien

Actualité judiciaire

[A la une] Le cimentier Lafarge se défend d’avoir frayé avec les terroristes dont ceux de l’État islamique

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N6824BZR

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par Vincent Vantighem

Le 20 Septembre 2023

Officiellement, le « califat » de Daesh en Syrie n’existe plus depuis le 23 mars 2019 et la prise de Baghouz. Mais évidemment, on n’a pas fini d’en entendre parler. Le sujet s’est même invité devant la Cour de cassation mardi 19 septembre. Pas question ici d’établir la responsabilité des dirigeants du groupe terroriste qui a secoué l’ordre mondial. Mais bien, l’une des plus grosses entreprises françaises. Le cimentier Lafarge, en l’occurrence.

Poursuivi depuis des années, le géant du ciment a, en effet, saisi la plus haute juridiction française dans le but de contester et de faire annuler ses mises en examen pour « mise en danger de ses salariés » syriens d’une part, et « complicité de crime contre l’humanité » d’autre part. Dans les faits, le groupe est accusé d’avoir mis en danger la vie de ses employés sur le sol syrien en maintenant en activité son usine de Jalabiya de 2012 à 2014 alors que la guerre faisait rage.

Un risque d’enlèvement et d’extorsion pour les salariés syriens

L’histoire fait froid dans le dos et aurait pu aisément nourrir l’imaginaire des scénaristes du Bureau des légendes, cette série sur les agents secrets français. Désormais filiale d’Holcim, le groupe Lafarge est soupçonné, en réalité, d’avoir versé en 2013 et 2014, via l’une de ses filiales, plusieurs millions d’euros à des groupes djihadistes, parmi lesquels l’organisation État islamique. Le but était aussi simple que clair : maintenir l’activité de son usine de Jalabiya alors que le pays sombrait peu à peu dans le chaos. En versant des pots-de-vin, les dirigeants de Lafarge s’assuraient que les terroristes ne s’en prendraient pas à leurs salariés ou à leurs installations. Et peu importe que l’argent serve, au final, à tenter de renverser un État ou à fomenter des projets d’attentats.

Dans ce contexte, Lafarge était donc parvenu à maintenir l’activité de ses salariés syriens sur le site jusqu’en septembre 2014 alors que ses employés de nationalité étrangère avaient, eux, été évacués en 2012. « Les salariés syriens ont été exposés au risque d’extorsion et d’enlèvement » a précisé le rapporteur lors de l’audience devant la Cour de cassation.

La filiale syrienne était une « coquille vide » pour l’avocat général 

Car le sujet ici est bien de savoir si le droit français s’appliquait sur le sol syrien dans la mesure où les salariés étaient employés par une filiale de droit syrien mais détenue à 98 % par la maison-mère française. Pour Patrice Spinosi, la réponse est clairement « non ». Avocat du cimentier, il a plaidé que le droit français n’avait pas de valeur en la matière en s’appuyant notamment sur un avis de la Chambre sociale de la Cour de cassation du 4 juillet. Autrement dit, pour lui, Lafarge n’avait même pas à former ses salariés syriens à la sécurité comme le prévoient les lois de police française.

En totale opposition évidemment, Catherine Bauer-Violas, avocate du Centre européen pour les droits constitutionnels et humains (ECCHR) et de deux salariés, a plaidé l’inverse. En expliquant que le contrat de travail de ses clients présentait « plus de liens avec la France qu’avec la Syrie ». Insistant devant la Cour de cassation, elle a précisé que Lafarge exerçait « un réel pouvoir de direction sur les salariés syriens concernés » et « encadrait les règles de sécurité à la filiale ».

Un sentiment auquel s’est rangé l’avocat général qui a préconisé le rejet de l’ensemble du pourvoi porté par le cimentier. D’une façon lapidaire : « Les décisions que Lafarge a prises en France à son siège social ont démontré que sa filiale syrienne n’était finalement qu’une coquille vide... »

La décision sera rendue le 7 novembre prochain. Au-delà du symbole d’une mise en examen pour avoir frayé avec des groupes terroristes, c’est désormais le risque d’un procès qui pointe à l’horizon pour Lafarge.

newsid:486824

Droit des personnes

[Brèves] PMA post-mortem : la CEDH valide l’interdiction française d’exporter des gamètes ou des embryons

Réf. : CEDH, 14 septembre 2023, req. n° 22296/20 et n° 37138/20, Baret et Caballero c. France N° Lexbase : A27911HT

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N6822BZP

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par Laïla Bedja

Le 21 Septembre 2023

► L’interdiction d’exporter des gamètes ou des embryons dans un pays qui autorise l’insémination post-mortem ne méconnaît pas le droit au respect de la vie privée protégé par l’article 8 de la CESDH.

Les faits et procédure. Les deux affaires dont la CEDH était saisie, concernent l’interdiction d’exportation des gamètes du mari de la première requérante (req. n° 22296/20) et des embryons du couple que formaient la seconde requérante et son mari décédé vers l’Espagne, pays qui autorise la procréation post-mortem (req. n° 37138/20). Invoquant l’article 8 de la Convention N° Lexbase : L4798AQR, les requérantes se plaignent que les refus litigieux (CE réf., 24 janvier 2020, n° 437328 N° Lexbase : A83163CY et CE référé, 28 février 2020, n° 438852 N° Lexbase : A14463HZ) qui se fondent sur l’interdiction de la procréation posthume posée par l’article L. 2141-2 du Code de la santé publique N° Lexbase : L4562L74 et l’interdiction d’exporter des gamètes ou des embryons à des fins prohibées par la loi française prévues par l’article L. 2141-11-1 du Code de la santé publique N° Lexbase : L4571L7G emportent violation de leurs droits.

La décision. La CEDH rejette les requêtes et valide l’interdiction faite par la législation française d’avoir recours à la procréation médicalement assistée posthume en constatant l’absence de violation de l’article 8 de la Convention sur le droit à la vie privée et familiale.

Si la Cour constate que l’interdiction constitue une ingérence dans la vie privée des requérantes, dès lors que la possibilité pour une personne d’exercer un choix quant au sort réserver à ses embryons ou gamètes relève de son droit à l’autodétermination, elle tempère en énonçant que « l’interdiction absolue de l’insémination posthume en France relève d’un choix politique et que, s’agissant d’une question de société portant sur des enjeux d’ordre moral ou éthique, il y a lieu d’accorder une importance particulière au rôle du décideur national ».

Elle relève par ailleurs que l’interdiction d’exportation des gamètes ou embryons, qui revient à exporter l’interdiction de la procréation post-mortem sur le territoire national, vise à faire obstacle au risque de contournement des dispositions du code de la santé publique posant cette interdiction. Elle note également que, jusqu’à l’intervention de la loi du 2 août 2021 relative à la bioéthique, le législateur s’est efforcé de concilier la volonté d’élargir l’accès à l’AMP et le respect des préoccupations de la société quant aux questionnements éthiques délicats soulevés par la perspective de la conception posthume.

Elle estime que les autorités internes ont ménagé un « juste équilibre » entre les intérêts concurrents en jeu, que l’État défendeur n’a pas outrepassé la marge d’appréciation dont il disposait et, partant, qu’il n’y a pas eu violation de l’article 8 de la CESDH.

La Cour reconnaît néanmoins que l’ouverture, depuis 2021, par le législateur de l’AMP aux couples de femmes et aux femmes seules pose de manière renouvelée la pertinence de la justification du maintien de l’interdiction dénoncée par les requérantes.

Rappelons que l’interdiction de la procréation post-mortem remonte aux origines de la législation bioéthique, en 1994, et a été réitérée à l’occasion des révisions intervenues en 2004 et en 2011.

Dans le cadre de la révision de la loi relative à la bioéthique, le Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE), dans son avis n° 113 intitulé « La demande d’assistance médicale à la procréation après le décès de l’homme faisant partie du couple » (10 février 2011), réitéré dans son avis n° 129 adopté le 18 septembre 2018, s’est prononcé en faveur du maintien de l’interdiction de l’AMP réalisée avec les gamètes d’une personne décédée en raison notamment du « caractère plus difficilement vérifiable du consentement du père au moment même de la procréation et [de] la non-présence d’un embryon qui procéderait des deux membres du couple et concrétiserait ainsi le projet parental ». En revanche, il a préconisé l’autorisation du transfert d’embryon post-mortem. Aussi, le Conseil d’État s’était prononcé en faveur de la levée de l’interdiction de l’AMP post-mortem (Conseil d’État, avis sur un projet de loi relatif à la bioéthique, 18 juillet 2019).

S’appuyant sur ces différents travaux, le gouvernement a, le 24 juillet 2019, déposé un projet de loi prévoyant de supprimer l’exigence d’une infertilité pathologique à laquelle était subordonnée la possibilité de recourir à l’AMP et d’élargir cette dernière aux couples de femmes et aux femmes non mariées. Ce projet ne prévoyait pas de revenir sur l’interdiction absolue de l’AMP post-mortem en raison des enjeux éthiques spécifiques en cause et des difficultés juridiques que sa levée serait susceptible d’entraîner. À ce titre sont notamment évoqués par le Gouvernement le risque de pressions familiales ou sociales sur les veuves, la possibilité d’un récit identitaire de l’enfant marqué par le contexte de deuil ou, sur un autre plan, le risque de susciter des débats sur le statut de l’embryon.

La loi a été définitivement adoptée, en troisième lecture, par l’Assemblée nationale le 29 juin 2021, à la suite de deux lectures dans les deux chambres du Parlement et d’une commission mixte paritaire qui, du fait d’importants désaccords de fond entre les deux chambres, n’était pas parvenue à élaborer un texte commun. Le texte adopté par l’Assemblée nationale a ouvert l’AMP aux couples de femmes et aux femmes seules, et a maintenu l’interdiction de la conception posthume.

Au cours des débats, une cinquantaine d’amendements en faveur de l’AMP post-mortem avaient été déposés devant l’Assemblée nationale et le Sénat. Ces amendements ont tous été rejetés. Promulguée le 2 août 2021, la loi n° 2021-1017, relative à la bioéthique N° Lexbase : L4001L7C est entrée en vigueur le 4 août 2021.

Pour aller plus loin : lire l’article de C. Siffrein-Blanc, L’accès à la parenté pour tous, consacré par la loi bioéthique du 2 août 2021, in le Dossier spécial « Loi bioéthique 2021 : les apports en droit des personnes et de la famille », Lexbase Droit privé, septembre 2021, n° 878 N° Lexbase : N8818BYA

newsid:486822

Droit pénal fiscal

[Brèves] Fraude fiscale : l’absence d’annexion de l’AMR à la dénonciation des faits n’entraine pas la nullité de la procédure

Réf. : Cass. crim., 13 septembre 2023, n° 22-82.288, FS-B N° Lexbase : A47881GG

Lecture: 3 min

N6829BZX

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par Marie-Claire Sgarra

Le 18 Octobre 2023

L'absence d'annexion de l'avis de mise en recouvrement (AMR) à la dénonciation de faits de fraude fiscale au procureur de la République par l'administration fiscale ne constitue pas une cause de nullité de la procédure.

Les faits. À la suite d'une dénonciation de l'administration fiscale au procureur de la République, le gérant d’une société a comparu devant le tribunal correctionnel pour s'être frauduleusement soustrait à l'établissement ou au paiement de l'impôt sur les sociétés et de la TVA en omettant volontairement de faire ses déclarations dans les délais prescrits et pour avoir sciemment omis de passer des écritures au livre journal ou au livre d'inventaire.

Procédure. Le tribunal correctionnel a fait droit à l'exception de nullité soulevée par le prévenu, a annulé les actes d'enquête et a dit n'y avoir lieu à statuer sur la constitution de partie civile de l'administration fiscale. Le procureur de la République et l'administration fiscale ont interjeté appel de cette décision.

En cause d’appel. Pour annuler les actes de la procédure, après avoir constaté l'irrégularité de la dénonciation de l'administration fiscale au procureur de la République, l'arrêt énonce qu'il résulte de l'application combinée des articles L. 228 du Livre des procédures fiscales N° Lexbase : L6506LUI et 111-5 du Code pénal N° Lexbase : L2064AME que l'AMR, qui impose à l'administration fiscale de dénoncer au ministère public les faits les plus graves de fraude fiscale, doit expressément mentionner les droits et majorations retenus, à défaut de quoi la dénonciation au ministère public est irrégulière et les poursuites pénales initiées par lui entachées de nullité.

Par suite, la dénonciation de l'administration fiscale est irrégulière, le procureur de la République ne pouvant valablement engager des poursuites pénales.

Solution de la Chambre criminelle.

Il résulte de l’article L. 228 du LPF que les poursuites du chef de fraude fiscale ne peuvent être régulièrement engagées par le ministère public à la suite d'une dénonciation obligatoire de l'administration fiscale que :

  • d'une part, si le montant des droits éludés est supérieur à 100 000 euros ;
  • d'autre part, si les majorations appliquées, appréciées au stade de la mise en recouvrement, sont celles de 100 %, 80 % ou 40 % prévues par les différents textes auxquels il renvoie.

Le texte ne prévoit pas que la dénonciation obligatoire doive être accompagnée de l'avis de mise en recouvrement des droits, pénalités et intérêts de retard.

Lorsque la juridiction est saisie d'une demande d'annulation des poursuites tirée du non-respect des critères légaux pour procéder à la dénonciation obligatoire, la nullité n'est pas encourue dès lors que les juges sont en mesure, à partir des pièces de la procédure et de celles qui leur sont soumises par les parties, de s'assurer que les conditions tenant au montant des droits éludés et aux majorations appliquées telles qu'appréciées au stade de la mise en recouvrement sont réunies.

La Chambre criminelle casse et annule l’arrêt de la cour d’appel de Versailles.

 

newsid:486829

Élections professionnelles

[Brèves] Pas d’annulation des élections du CSE en cas de transmission de la liste d’émargement après la clôture du scrutin

Réf. : Cass. soc., 13 septembre 2023, n° 22-11.338, F-B N° Lexbase : A47961GQ

Lecture: 2 min

N6833BZ4

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par Charlotte Moronval

Le 27 Septembre 2023

► En matière d’élections professionnelles, l'irrégularité résultant de la transmission directe par l'employeur, après la clôture du scrutin, de la liste d'émargement à la demande d'une partie intéressée, n'est pas susceptible d'entraîner en elle-même l'annulation des élections.

Faits et procédure. Des élections des membres du CSE se sont déroulées dans une entreprise, par voie électronique.

La déléguée syndicale et le syndicat ont saisi le tribunal judiciaire d'une demande d'annulation des élections, invoquant une atteinte à la confidentialité résultant de la transmission, par l'employeur et à leur demande, de la liste d'émargement.

Rappel. La liste d'émargement n'est accessible qu'aux membres du bureau de vote et à des fins de contrôle de déroulement du scrutin (C. trav., art. R. 2314-16 N° Lexbase : L0620LIS).

L'employeur, ou le prestataire qu'il a retenu, conserve sous scellés, jusqu'à l'expiration du délai de recours et, lorsqu'une action contentieuse a été engagée, jusqu'à la décision juridictionnelle devenue définitive, les fichiers supports comprenant la copie des programmes sources et des programmes exécutables, les matériels de vote, les fichiers d'émargement, de résultats et de sauvegarde, après la clôture du scrutin, et qu'il appartient aux parties intéressées de demander au juge, en cas de contestation des élections, que les listes d'émargement soient tenues à sa disposition (C. trav., art. R. 2314-17 N° Lexbase : L0619LIR).

Le tribunal judiciaire déboute les requérants de leur demande. Selon lui, la demande de transmission de la liste par la déléguée syndicale constituait un stratagème, la déléguée ayant placé l’employeur en situation de commettre une faute.

Ils forment un pourvoi en cassation.

La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi.

La Haute juridiction en a déduit que dès lors que l’employeur avait transmis directement la liste d’émargement à la déléguée syndicale à la demande de celle-ci, postérieurement à la clôture du scrutin, le tribunal a débouté à bon droit l’intéressée et le syndicat de leur demande d’annulation des élections.

Pour aller plus loin :

  • lire J. Damiano, Le vote électronique aux élections professionnelles au CSE, Lexbase Social, juillet 2022, n° 915 N° Lexbase : N2256BZL
  • lire également J. Cadot et M. Nabier, L’organisation des élections du CSE : les points de vigilance, Lexbase Social, février 2023, n° 936 N° Lexbase : N4444BZM
  • v. notamment ÉTUDE : Le déroulement des élections des membres de la délégation du personnel, Le recours au vote électronique, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E2092GAQ.

 

newsid:486833

Licenciement

[Brèves] Entretien préalable : les frais de déplacement pour assister un salarié sont-ils remboursés ?

Réf. : Cass. soc., 6 septembre 2023, n° 22-14.184, F-D N° Lexbase : A14481GQ

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N6782BZ9

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par Lisa Poinsot

Le 20 Septembre 2023

Le salarié, assistant un autre salarié lors de l’entretien préalable au licenciement ou à une sanction disciplinaire, ne doit, du fait de l’assistance qu’il prête, subir aucune perte de rémunération.

Faits et procédure.  Ayant assisté plusieurs de ses collègues lors d’entretiens préalables à sanction, un salarié réclame le paiement de ses frais de déplacement afférents. Il saisit pour ce faire la juridiction prud’homale.

Pour allouer au salarié l’indemnisation du kilomètre basée sur la puissance fiscale du véhicule utilisé prévue par le barème fiscal pour l’année 2019, les juges du fond relèvent que les frais qu’aurait exposés le salarié ne peuvent être indemnisés que sur la base d’un barème kilométrique.

Ainsi, ils condamnent l’employeur au remboursement de ces frais de déplacement.

Ce dernier forme un pourvoi en cassation en contestant, notamment, l’appréciation faite par les juges du fond des justificatifs de frais produits par le salarié.

Rappel. Pendant la durée de la mission d’assistance, l’employeur doit assurer un maintien de rémunération du représentant du personnel sans pouvoir déduire de cette durée indemnisée du crédit d’heures de délégation dont il dispose. Également, si le représentant du personnel engage des frais exceptionnels pour se rendre au lieu de l’entretien préalable, l’employeur doit également lui rembourser l’intégralité de ces frais.

La solution. Énonçant la solution susvisée, la Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi sur le fondement des articles L. 1232-4 N° Lexbase : L1079H9T et L. 1332-2 N° Lexbase : L5820ISD du Code du travail.

L’employeur doit donc donner suite à une demande de remboursement de frais de déplacement engagés par un salarié, non-représentant du personnel, pour assister des collègues lors d’entretiens préalables.

Pour aller plus loin : 

  • v. fiches pratiques, FP208, Rédiger une convocation à un entretien préalable à un licenciement pour motif disciplinaire, Rupture du contrat de travail N° Lexbase : X2804CQW ; Comment rédige-t-on une convocation à un entretien préalable (pour motif disciplinaire - hors licenciement) ?, Droit du travail N° Lexbase : N7504BX9 ;
  • v. formulaires, MDS0085, Lettre de convocation à un entretien préalable en vue d'une sanction disciplinaire (sauf licenciement) N° Lexbase : X5821APBMDS0086, Lettre de convocation à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement N° Lexbase : X5822APC ; MDS0087, Lettre de convocation à un entretien préalable dans le cadre d'un licenciement pour faute grave avec mise à pied conservatoire N° Lexbase : X5823APD, Droit du travail ;
  • v. ÉTUDE : La procédure applicable au licenciement pour motif personnel, L'obligation de mentionner la possibilité pour le salarié de se faire assister, in Droit du travail N° Lexbase : E9071ESR ;
  • v. aussi ÉTUDE : La procédure disciplinaire, L'assistance des parties, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E043703L.

 

newsid:486782

Procédure civile

[Brèves] Contradiction entre la DA visant l’ensemble des chefs de dispositif du jugement et le sens des conclusions

Réf. : Cass. civ. 2, 14 septembre 2023, n° 20-18.169, F-B N° Lexbase : A57261G8

Lecture: 4 min

N6785BZC

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par Alexandra Martinez-Ohayon

Le 27 Septembre 2023

Lorsque la déclaration d'appel vise l'ensemble des chefs de dispositif du jugement, l'appelant a la faculté de solliciter dans ses conclusions, soit la réformation, soit l'annulation de cette décision ; dès lors, la cour d’appel saisie par voie de conclusions d'une demande d'annulation de l'ordonnance d'un juge-commissaire, alors que la déclaration d'appel visait l'ensemble des chefs de dispositif de l'ordonnance critiquée, n’excède pas ses pouvoirs en statuant sur la demande d'annulation de l'ordonnance figurant dans les conclusions de l'appelant.

Faits et procédure. Dans cette affaire, la société Hoche a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 7 juin et 21 décembre 2017, et une société a été nommée en qualité de mandataire, puis de liquidateur judiciaire.

Par lettres des 7 juillet et 22 août 2017, une banque a déclaré des créances au titre d'un solde débiteur de compte courant et d'un prêt. La société Hoche a contesté cette déclaration.

Par ordonnance du 5 décembre 2018, un juge-commissaire a admis la créance de prêt pour un certain montant à titre privilégié. Par une autre ordonnance du même jour, il a admis la créance de solde débiteur du compte courant et de frais accessoires, à un certain montant, à titre chirographaire.

La société Hoche a interjeté appel de la première ordonnance par déclaration du 18 décembre 2018 tendant à sa réformation et visant l'unique chef de dispositif critiqué.

Le pourvoi. La banque fait grief à l'arrêt (CA Paris, 5, 8, 10 mars 2020, n° 18/28341 N° Lexbase : A49673IS) d’avoir annulé l’ordonnance déférée, et d’avoir statué sur le fond par l’effet dévolutif de l’appel, de n’admettre sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société au titre du prêt, qu’à titre chirographaire et de la débouter de sa demande d'admission des intérêts à échoir et de l'indemnité d'exigibilité anticipée. En l’espèce, la cour d’appel a relevé qu'elle était saisie par voie de conclusions d'une demande d'annulation de l'ordonnance d'un juge-commissaire et que la déclaration d'appel visait l'ensemble des chefs de dispositif de l'ordonnance critiquée.

Solution. La deuxième chambre civile de la Cour de cassation valide le raisonnement de la cour d’appel et rejette le pourvoi. Elle estime que la cour d'appel n'a pas excédé ses pouvoirs en statuant sur la demande d'annulation de l'ordonnance figurant dans les conclusions de l'appelant.

La Haute juridiction :

- en premier lieu, rappelle que la déclaration d'appel défère à la cour d'appel la connaissance des chefs de jugement critiqués expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s'opérant pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible, conformément des articles 562 N° Lexbase : L7233LEM et 901, 4° N° Lexbase : L5914MBN du Code de procédure civile ;

- en second lieu, relève que l'appelant doit, dans le dispositif de ses conclusions, mentionner qu'il demande l'infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l'anéantissement ou l'annulation, en vertu des articles 542 N° Lexbase : L7230LEI et 954 N° Lexbase : L7253LED du Code de procédure civile.

Dès lors, la Cour conclut que la déclaration d'appel qui mentionne les chefs de dispositif du jugement critiqués délimite l'étendue de l'effet dévolutif de l'appel quand les conclusions, par l'énoncé dans leur dispositif, de la demande d'infirmation ou d'annulation du jugement déterminent, quant à elles, la finalité de l'appel, qui tend à l'annulation ou à la réformation du jugement, dans les limites de la dévolution opérée par la déclaration d'appel.

Enfin, il en découle que lorsque la déclaration d'appel vise l'ensemble des chefs de dispositif du jugement, l'appelant a la faculté de solliciter dans ses conclusions, soit la réformation, soit l'annulation de cette décision.

Elle déclare non fondé le moyen soulevé par la banque.

newsid:486785

Urbanisme

[Brèves] Sanction de la méconnaissance de l’obligation d’enregistrement des transactions mettant fin à une instance relative à une autorisation d’urbanisme

Réf. : Cons. const., décision n° 2023-1060 QPC du 14 septembre 2023 N° Lexbase : A64871GD

Lecture: 2 min

N6804BZZ

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par Yann Le Foll

Le 20 Septembre 2023

► La sanction de la méconnaissance de l’obligation d’enregistrement des transactions mettant fin à une instance relative à une autorisation d’urbanisme n’est pas contraire au principe d’égalité devant la loi.

Disposition contestée. Le deuxième alinéa de l’article L. 600-8 du Code de l’urbanisme N° Lexbase : L0031LNH, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2013-638 du 18 juillet 2013, relative au contentieux de l’urbanisme N° Lexbase : L4499IXW, prévoit : « La contrepartie prévue par une transaction non enregistrée est réputée sans cause et les sommes versées ou celles qui correspondent au coût des avantages consentis sont sujettes à répétition. L’action en répétition se prescrit par cinq ans à compter du dernier versement ou de l’obtention de l’avantage en nature ».

Position CConst. En application de l’article L. 600-8 du Code de l’urbanisme, la transaction par laquelle une personne s’engage à se désister de son recours en annulation contre une autorisation d’urbanisme, en contrepartie d’une somme d’argent ou d’un avantage en nature, doit être enregistrée auprès de l’administration fiscale dans un délai d’un mois.

Il résulte des dispositions contestées que, en cas de méconnaissance de cette formalité, la contrepartie qui a été consentie au requérant est réputée sans cause et sujette à une action en répétition, alors que le titulaire de l’autorisation d’urbanisme qui faisait l’objet du recours conserve le bénéfice du désistement. Ce faisant, ces dispositions établissent une différence de traitement entre les parties à la transaction.

En sanctionnant le défaut d’enregistrement destiné à assurer la publicité des transactions, le législateur a souhaité dissuader la conclusion de celles mettant fin à des instances introduites dans le seul but d’obtenir indûment un gain financier. Il a ainsi entendu limiter les risques particuliers d’incertitude juridique qui pèsent sur les décisions d’urbanisme et lutter contre les recours abusifs.

Au regard de cet objet, l’auteur du recours dirigé contre l’autorisation d’urbanisme est dans une situation différente de celle du bénéficiaire de cette autorisation.

Dès lors, la différence de traitement résultant des dispositions contestées, qui repose sur une différence de situation, est en rapport direct avec l’objet de la loi. Le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant la loi doit donc être écarté.

Décision. Le deuxième alinéa de l’article L. 600-8 du Code de l’urbanisme, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2013-638 du 18 juillet 2013 relative au contentieux de l’urbanisme, est conforme à la Constitution.

Pour aller plus loin. V. ÉTUDE, La notification des recours en matière d'urbanisme : le contrôle des transactions, in Droit de l’urbanisme (dir. A. Le Gall), Lexbase N° Lexbase : E4912E73.

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Vente d'immeubles

[Brèves] Résolution d’un contrat de vente en viager : cf. les stipulations de la clause résolutoire !

Réf. : Cass. civ. 3, 14 septembre 2023, n° 22-13.209, FS-B N° Lexbase : A57321GE

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N6816BZH

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 20 Septembre 2023

► Dans le cadre de la résolution d’un contrat de vente en viager, dont la clause résolutoire prévoit qu'en cas de résolution du contrat, seuls les arrérages versés et les embellissements et améliorations apportés au bien demeuraient acquis au vendeur, le débirentier :
- a droit à la restitution du « bouquet » correspondant à la part du prix payée comptant lors de la signature du contrat ;
- ne peut être condamné au paiement des arrérages échus et impayés au jour de la résolution, seuls les arrérages versés demeurant acquis au vendeur.

Faits et procédure. En l’espèce, par acte authentique du 6 janvier 1992, une maison d’habitation a été vendue moyennant le prix d'un million de francs payé comptant à hauteur de 440 000 francs, le solde ayant été converti en rente viagère d'un montant mensuel de 4 300 francs.

La rente n'ayant plus été payée régulièrement, par convention en date du 25 janvier 2012, les parties ont convenu que les vendeurs s'engageaient à renoncer au paiement de la rente contre paiement de la somme de 50 000 euros si le bien immobilier, mis en vente par l’acquéreur, faisait l'objet d'un acte définitif de vente avant un délai de six mois à compter du jour de la signature (cette somme étant revue à la baisse, si la vente intervenait plus tardivement).

Le bien n'a pas été vendu.

Le service de la rente ayant cessé à compter du mois d'août 2015, les vendeurs ont assigné le débirentier en résolution de la vente, paiement des arrérages impayés et expulsion.

Décision CA. La cour d’appel de Pau (CA Pau, 23-11-2021, n° 18/03414 N° Lexbase : A69617CS) a liquidé la créance des vendeurs à la somme de 28 495 euros, après avoir retenu que la rente ayant continué à courir jusqu'à l'acquisition de la clause résolutoire, l’acquéreur devait être condamné à payer aux vendeurs la somme de 830 euros par mois depuis le mois d'août 2015 jusqu'à la prise d'effet du commandement visant la clause résolutoire, somme à laquelle il fallait ajouter les indemnités d'occupation dues jusqu'à la libération des lieux et retrancher les arrérages versés de janvier 2012 à août 2015.

L’acquéreur a formé un pourvoi reprochant à la cour :

  • de ne pas avoir ordonné la restitution du « bouquet » initialement payé au vendeur ;
  • de l’avoir condamné à payer les arrérages ayant « continué à courir jusqu'à l'acquisition de la clause résolutoire », au titre des « arrérages échus et impayés », cependant que la clause résolutoire dont elle avait fait application prévoyait exclusivement que demeuraient à la charge de l'acquéreur les arrérages versés, en l'occurrence jusqu'en août 2015.

Cassation. Les arguments trouvent écho auprès de la Haute juridiction, qui censure la décision au visa des articles 1134 N° Lexbase : L1234ABC et 1183 N° Lexbase : L1285AB9 du Code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

Pour rappel, le premier prévoit que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Il résulte du second que la condition résolutoire entraîne l'anéantissement rétroactif du contrat ainsi que des restitutions réciproques qui en constituent des conséquences légales.

On relèvera qu’il est fréquent que la clause résolutoire prévoit que le vendeur n’aura pas à rembourser à l’acquéreur les sommes versées au titre de la rente viagère antérieurement à l’annulation de la vente, ni le montant du bouquet.

Mais tel n’était pas le cas en l’espèce, et c’est bien pour cela que la Haute juridiction renvoie à l’article 1134 relatif à la force obligatoire du contrat.

La Haute juridiction reproche en effet à la cour d’avoir statué ainsi, sans ordonner la restitution du « bouquet » correspondant à la part du prix payée comptant lors de la signature du contrat et en incluant dans son calcul le paiement des arrérages échus et impayés au jour de la résolution, après avoir constaté, par motifs adoptés, que la clause résolutoire prévoyait qu'en cas de résolution du contrat, seuls les arrérages versés et les embellissements et améliorations apportés au bien demeuraient acquis au vendeur.

Pour en aller ainsi, encore fallait-il que la cour retienne que le « bouquet » et les arrérages échus et impayés étaient laissés au vendeur à titre de dommages-intérêts, ce qu’elle n’avait pas fait.

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