Le Quotidien du 2 décembre 2021

Le Quotidien

Éditorial

[A la une] À l’appel des 3 000, prendre soin de la Justice

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N9573BY9

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par Dorothée Fayein-Bourgois, Avocate à Amiens et ancien Bâtonnier

Le 01 Décembre 2021

Ils sont désormais plus de 5 000 à avoir signé « l’appel des 3 000 » paru dans Le Monde le 23 novembre 2021 sous le titre « Nous ne voulons plus d’une Justice qui n’écoute pas et qui chronomètre tout ».

Les jours s’égrènent, les noms aussi, au bas de cette tribune.

Si nombreux, qu’on a renoncé à les compter, à parcourir la liste de ces magistrats et de ces greffiers, dont le mouvement dépasse celui du cœur, pour Charlotte, une jeune juge placée, dont le suicide, le 23 août 2021, provoque l’amorce de cette expression publique.

C’est un mouvement du corps (des corps) qui crie son amour pour la Justice en même temps que sa souffrance.

Chacun des commentateurs en a souligné le caractère singulier, inédit, traversant la diversité des sensibilités et des appartenances, venu de professionnels peu enclins à rendre publiques les difficultés qui sont les leurs - dans les détails de ces vies, des sacrifices consentis -, l’autorité s’accommodant mal d’explications et de complaintes.

Les mots sont forts : « violence du fonctionnement de notre institution », « face visible d’une Justice qui maltraite les justiciables », « souffrance éthique », « sentiment de perte de sens ».

Ce mouvement n’est pas une crise de foi ou des repères, mais exprime une profonde désespérance face à la crainte d’avoir à lâcher un jour, d’avoir à renoncer au serment prêté devant une cour d’appel.

Et cette souffrance infligée aux magistrats et aux greffiers doit être regardée avec courage, comme l’ont fait les auteurs de l’appel, car elle est, comme toute souffrance, génératrice d’autres souffrances infligées à d’autres acteurs, jusqu’aux justiciables.

En dépit de tout, de la réalité du quotidien décrit tour à tour par les juges aux affaires familiales, les juges civils de proximité, les juges des enfants, les juges correctionnels, les substituts du procureur, il est encore bien là, cet amour de la Justice. Elle est encore bien là cette conscience de la faim et de la soif de Justice des hommes, des femmes, des enfants, des entreprises de notre temps, de la nécessité d’offrir à la Justice un visage humain, de la qualité, de l’écoute et du temps qu’implique une décision attendue.

Quelle chance de constater que l’institution, les injonctions contradictoires, les temps courts, les innombrables réformes n’ont pas - encore - eu raison de cela ! Et de cela, nous avons l’obligation collective de prendre soin. De cette déclaration d’amour, de cette flamme, même un peu essoufflée, parce que malmenée par des brises glaciales, des vents violents ou les simples courants d’air qui s’engouffrent dans les bureaux des palais de Justice.

Car, non. La Justice n’est pas une machine qui se serait cassée et qu’on aurait réparée. Elle prend corps et visage dans ces hommes et ces femmes qui y engagent leur vie et leur temps, leur serment et leurs rêves, leur compétence et leur savoir-faire et -être, leur énergie et leur espérance, dans des contextes parfois éminemment difficiles et périlleux.

Comment ne pas songer, à cet égard, à celui provoqué par la pandémie de la covid-19, dès le début de l’année 2020 ?

Cette crise qui a interrogé et interroge encore les fondements de nos vies, la devise de notre République et la Justice, dans son fonctionnement et sa continuité.

Cette crise qui a évidemment mis en exergue l’indiscutable utilité que constituent les outils informatiques innovants, comme la procédure pénale numérique et la communication électronique pénale, mais qui a, plus encore, démontré avec éclat comme la mesure de la Justice est le sur-mesure.

Le sur-mesure n’est pas un luxe inatteignable dont la Justice n’aurait pas les moyens : il est une attention portée à chacun de ses acteurs, au plus près de leurs compétences, de leurs aspirations, de leurs contraintes, de leurs besoins. Il est un prendre soin ensemble de ce bien commun qu’est la Justice, et se satisfait mal des statistiques, des grandes messes, des états généraux, précurseurs et légitimateurs annoncés de énièmes réformes.

À cet égard, les courriers adressés au garde des Sceaux les 25 novembre et 26 novembre 2021, par les conférences nationales des premiers présidents et procureurs généraux d’une part, et les conférences nationales des présidents des tribunaux judiciaires et des procureurs de la République d’autre part, constituent un signe éminemment heureux de l’engagement et de la disponibilité des chefs de cour et de juridiction pour contribuer à répondre efficacement à cet appel des magistrats et greffiers, pour autant qu’on leur en donne les moyens, et la confiance ; ils constituent - avec les directeurs des services de greffe judiciaires - le bon échelon.

La confiance dans l’institution judiciaire ne se décrète ni ne se satisfait d’injonctions : elle se mérite.

La Justice n’est pas réparée, elle est encore souffrante (d’aucuns diront, à raison, #justicemalade), et a besoin qu’on prenne soin d’elle, au plus près, qu’on prenne soin de ses acteurs - tous -, des juridictions, qu’on se fie aux chefs de cour et de juridiction qui savent les ressources, les besoins, les contraintes dans chacun des territoires.

Et que la Nation lui accorde, au plus large, une protection, des moyens et toute sa reconnaissance.

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Droit pénal spécial

[Brèves] Violences intrafamiliales : l’effectivité des droits des victimes renforcée

Réf. : Décret n° 2021-1516, du 23 novembre 2021, tendant à renforcer l’effectivité des droits des personnes victimes d’infractions commises au sein du couple ou de la famille (N° Lexbase : L3341L9M)

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N9631BYD

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par Adélaïde Léon

Le 21 Décembre 2021

Publié au Journal officiel du 25 novembre 2021, le décret n° 2021-1516 est venu renforcer l’effectivité des droits des victimes de violences intrafamiliales et notamment la protection des mineurs. Il entrera en vigueur le 1er février 2022.

Justice restaurative. Les mesures de justice restaurative permettent à la victime et l’auteur d’une infraction de « participer activement à la résolution des difficultés résultant de l’infraction » (C. pén., art. 10-1 N° Lexbase : L9868I3U). Elles peuvent être proposées à l’occasion de toute procédure pénale et à tous les stades de la procédure, y compris lors de l’exécution de la peine, dès lors que l’auteur de l’infraction a reconnu les faits. Le présent décret vient ajouter deux alinéas à l’article D. 1-1-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2303LZC) aux termes desquels il est précisé que :

  • les mesures de justice restaurative pourront être mises en œuvre y compris si la prescription de l’action publique est acquise ;
  • le procureur de la République vérifiera si une mesure de justice restaurative est possible lorsqu’un classement sans suite, un non-lieu, une relaxe ou un acquittement auront été prononcés en raison de la prescription de l’action publique dans des procédures concernant des infractions sexuelles commises par des majeurs sur des mineurs dont la commission aura été reconnue.

Violences conjugales en présence d’un mineur. Le décret n° 2021-1516 prévoit par ailleurs la création d’un nouvel article D. 1-11-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L4130L9T) selon lequel, en cas de violences conjugales, il appartient aux autorités judiciaires de vérifier si ces violences ont été commises en présence d’un mineur. Cette précision doit permettre au mineur d’être également considéré comme victime et non comme témoin des faits et de se constituer partie civile, le cas échéant, en étant représenté par un administrateur ad hoc.

Il appartient dans ces circonstances au procureur de la République de veiller à ce que figurent au dossier de la procédure dont est saisie la juridiction de jugement tous les éléments permettant d’apprécier l’importance du préjudice subi par le mineur, de se prononcer sur l’autorité parentale, les droits de visites et d’hébergement, « le cas échéant en versant au dossier des pièces émanant de procédures suivies devant le tribunal judiciaire, le juge aux affaires familiales ou le juge des enfants, ou en requérant un examen ou une expertise psychologique du mineur ».

Copie du certificat d’examen médical. L’article D. 1-12 du Code de procédure pénal (N° Lexbase : L9255L38) fixe les modalités selon lesquelles les victimes de violences ont le droit de se voir remettre une copie du certificat d’examen médical lorsque celui-ci a été requis par un officier ou agent de police judiciaire, un magistrat ou une juridiction.

Le présent décret ajoute un alinéa VII précisant que lorsque l’examen concerne une victime mineure, le médecin n’a pas l’obligation de remettre une copie du certificat aux représentants légaux de la victime qui en font la demande s’il estime que cette communication pourrait être contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant, « notamment en cas de suspicion de violences intrafamiliales, ou si le mineur disposant d’un degré de maturité suffisant le refuse ».

Agrément des associations d’aides aux victimes. Le décret n° 2021-1516 prévoit la possibilité, pour les associations d’aide aux victimes spécialisées dans la prise en charge et l’accompagnement des victimes de violences conjugales et les violences sexuelles et sexistes d’obtenir un agrément pour assister les victimes de ces infractions.

Délit de non-représentation d’enfant. Un nouvel article D. 47-11-3 est inséré dans le Code de procédure pénal (N° Lexbase : L4127L9Q). Il prévoit que lorsqu’une personne mise en cause pour non-représentation d’enfant soutient que les faits qui lui sont reprochés ont été justifiés par des violences ou toutes autres infractions relevant de l’article 706-47 du Code de procédure pénale (infractions de nature sexuelle et certains crimes commis à l’encontre de mineurs) (N° Lexbase : L2564L4Q) commises par la personne qui a le droit de le réclamer, le procureur de la République veillera à ce que ces allégations soient vérifiées avant de décider de mettre ou non en mouvement l’action publique.

Dans l’hypothèse d’une citation directe, il appartiendra au procureur de s’assurer que le tribunal correctionnel dispose des éléments lui permettant d’apprécier la réalité de ces violences et l’application éventuelle des dispositions relatives à l’état de nécessité.

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Avocats

[Brèves] Révocation de l’avocat : quand l’abus de droit n’est pas caractérisé…

Réf. : Cass. civ. 2, 10 novembre 2021, n° 20-15.361, F-B (N° Lexbase : A45067BI)

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par Marie Le Guerroué

Le 01 Décembre 2021

► L’abus de droit de la part d’un mandant qui met fin à ses relations contractuelles avec un avocat n’est pas caractérisé en l’absence d’état de dépendance de l’avocat, de caractère brutal de la rupture, de preuve d’une réduction de capital du cabinet, d'obligation de se séparer de deux collaboratrices, de désorganisation du cabinet et de perte significative du chiffre d'affaires consécutive à la révocation.

Faits et procédure. Une banque, aux droits de laquelle est venue une société, avait mandaté, en 2009, un avocat avec pour mission de représenter ses intérêts dans les actions en responsabilité et en paiement relatives aux affaires dites « Apollonia ». Arguant de la réorganisation interne du groupe de sociétés auquel elle appartient, la société avait mis fin, le 2 octobre 2015, au mandat conféré à l'avocat, s'agissant de la gestion des dossiers relatifs à ce contentieux, avant de le décharger, le 6 janvier 2016, des autres dossiers qu’il gérait dans son intérêt. S'estimant victime d'une révocation abusive de son mandat, l’avocat avait assigné la société devant un tribunal de grande instance aux fins d’indemnisation. Devant la Cour de cassation, l’avocat fait grief à l'arrêt d’appel de le débouter de l'ensemble de ses demandes tendant à « dire et juger » que la société avait rompu brutalement leur relation, de le débouter de ses demandes tendant à réparer ses préjudices financier et moral et de le condamner à verser à la société la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L1253IZG).

Réponse de la Cour. Pour rejeter la demande d'indemnisation formée par l’avocat, l’arrêt d’appel relève que si, en 2010 et 2011, le chiffre d'affaires de l’avocat, lié aux dossiers Apollonia, a atteint 43 % du contentieux du cabinet, il avait diminué à 26 % en 2013 et 2014 et 28 % sur 9 mois en 2015, ce qui ne peut caractériser un état de dépendance. La décision précise que ce contentieux sériel résultant d’un sinistre, important en nombre de dossiers à son apparition, n’était pas destiné à perdurer dans le temps ce que ne pouvait ignorer l'avocat, de sorte que la rupture, qui est intervenue en 2015, ne peut être qualifiée de brutale. L'arrêt retient également que l'avocat ne démontre pas, contrairement à ce qu'il prétend, qu'il a dû procéder à une réduction de capital, en lien avec la présente affaire, qu'il ne justifie pas davantage avoir été dans l'obligation de se séparer de deux collaboratrices chargées de ce contentieux, que la rupture aurait entraîné une désorganisation du cabinet et qu’enfin, la perte du chiffre d'affaires prétendument consécutive à la révocation n'était pas significative. De ces constatations et énonciations, la cour d'appel, qui ne s’est pas bornée à relever l’absence d’une situation de dépendance économique et qui n’était pas tenue d’entrer dans le détail de l’argumentation des parties, a, aux termes d’une motivation détaillée, pu en déduire que l’avocat ne pouvait prétendre à une indemnité, en l'absence d'abus de droit de la part du mandant.

Rejet. Pour la Cour de cassation, le moyen n’est pas fondé. Le pourvoi est rejeté.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La représentation en justice et défense, La révocation de l'avocat, in La profession d’avocat, (dir. H. Bornstein), Lexbase (N° Lexbase : E36483RK).

 

newsid:479396

Bancaire

[Brèves] Fraude au virement : l’encadrement de la possibilité de contre-passation du banquier du bénéficiaire

Réf. : Cass. com., 24 novembre 2021, n° 20-10.044, F-D (N° Lexbase : A78277CU)

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N9603BYC

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par Jérôme Lasserre Capdeville

Le 01 Décembre 2021

► Sauf stipulations contractuelles contraires, lorsque le montant d’un virement a été remboursé au payeur par son prestataire de services de paiement en application de l'article L. 133-18 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L5119LGP), serait-ce en raison de l’existence d'une fraude, le prestataire de services de paiement du bénéficiaire, s’il a déjà inscrit le montant de ce virement au crédit du compte de son client, ne peut contre-passer l’opération sur le compte de celui-ci sans son autorisation, quand bien même il aurait lui-même restitué le montant du virement au prestataire de services de paiement du payeur.

Il résulte de l’article L. 133-18 du Code monétaire et financier, qu’en présence d’une opération de paiement non autorisée signalée par l'utilisateur, le prestataire de services de paiement du payeur doit rembourser ce même payeur. En effet, aux termes de cet article : « En cas d'opération de paiement non autorisée signalée par l'utilisateur dans les conditions prévues à l'article L. 133-24, le prestataire de services de paiement du payeur rembourse au payeur le montant de l'opération non autorisée immédiatement après avoir pris connaissance de l'opération ou après en avoir été informé, et en tout état de cause au plus tard à la fin du premier jour ouvrable suivant, sauf s'il a de bonnes raisons de soupçonner une fraude de l'utilisateur du service de paiement et s'il communique ces raisons par écrit à la Banque de France. Le cas échéant, le prestataire de services de paiement du payeur rétablit le compte débité dans l'état où il se serait trouvé si l'opération de paiement non autorisée n'avait pas eu lieu ».

Mais qu’advient-il pour le prestataire de services de paiement du bénéficiaire ? Ce dernier peut-il procéder à une contre-passation sur le compte du bénéficiaire ? Une décision de la Chambre commerciale de la Cour de cassation vient nous éclairer sur ce point.

Faits et procédure. En l’espèce, la société F., qui offre un service de cartes de paiement prépayées, était titulaire d’un compte dans les livres de la Société générale. Le 19 décembre 2012, ce compte avait été crédité de la somme de 6 300 euros en exécution d'un virement émis depuis un compte ouvert dans les livres de la société HSBC au nom de M. K. La société F. avait alors porté ce même montant, sous déduction d’une commission, au crédit de la carte prépayée d'un de ses clients.

Or, M. K. ayant contesté avoir autorisé le virement, s’estimant victime d'une fraude, et obtenu le remboursement de son montant par la société HSBC, celle-ci avait demandé le retour des fonds à la Société générale, qui en avait informé la société F. le 9 janvier 2013. Ayant restitué les fonds à HSBC, la Société générale avait procédé, le 22 avril 2013, en dépit de l’opposition de sa cliente, à la contre-passation de l’opération sur le compte de cette dernière.

La société F. avait alors assigné la Société générale en restitution de la somme ainsi débitée de son compte. La cour d’appel de Grenoble avait cependant, le 7 novembre 2019, rejeté la demande de restitution de la société F.. Celle-ci avait alors formé un pourvoi en cassation.

Moyens. Elle commençait par y rappeler qu’une banque qui, sans autorisation, débite le compte de son client qui aurait reçu un paiement indu réalise une opération de paiement non autorisée, l’obligeant à restitution. Elle considérait dès lors qu’en se bornant à retenir, pour écarter sa demande tendant à la restitution de la somme de 6 300 euros contre-passée par la Société générale, que l’ordre de virement dont avait bénéficié cette société était faux, et que le paiement reçu était par conséquent indu, tout en constatant que la société F. s’était opposée à la répétition, la cour d’appel aurait violé, ensemble, les articles 1937 (N° Lexbase : L2161ABN) du Code civil, L. 133-7 (N° Lexbase : L5648AIZ) et L. 133-18 du Code monétaire et financier.

Décision. Ce pourvoi se révèle utile, puisque la Haute juridiction casse la décision des juges grenoblois.

Elle débute sa décision en posant le principe suivant : « Sauf stipulations contractuelles contraires, lorsque le montant d'un virement a été remboursé au payeur par son prestataire de services de paiement en application de l'article L. 133-18 du Code monétaire et financier, serait-ce en raison de l'existence d'une fraude, le prestataire de services de paiement du bénéficiaire, s'il a déjà inscrit le montant de ce virement au crédit du compte de son client, ne peut contre-passer l'opération sur le compte de celui-ci sans son autorisation, quand bien même il aurait lui-même restitué le montant du virement au prestataire de services de paiement du payeur ».

Elle note ensuite que pour rejeter la demande de la société F. tendant à la condamnation de la Société générale à lui restituer le montant du virement contre-passé sur son compte, la cour d’appel avait d’abord retenu que la Société générale justifiait du caractère frauduleux de l'ordre de virement qui, à défaut d’émaner du titulaire du compte émetteur, n’avait pu donner un caractère irrévocable au droit de la société F. sur le montant des fonds encaissés et inscrits au crédit de son compte et, ensuite, que la société F. ne démontrant l'existence d'aucun lien d'obligation entre elle et M. K., le virement était dépourvu de fondement, ce qui autorisait la Société générale à contre-passer l’opération sur le compte de sa cliente, malgré l’opposition de celle-ci, au titre de la répétition de l'indu.

La Cour de cassation en conclut alors qu’en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles 1937 du Code civil et L. 133-18 du Code monétaire et financier.

Observations. Cette solution est heureuse. Par son intermédiaire, la Chambre commerciale de la Cour de cassation vient clarifier une situation non expressément régie par les dispositions du Code monétaire et financier.

Par cette jurisprudence, on notera que la Haute juridiction rejoint la pratique appliquée, en matière d’opérations passées à distance à l’aide d’une carte bancaire, antérieurement à l’ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009 relative aux conditions régissant la fourniture de services de paiement (N° Lexbase : L4658IEA). En effet, il était admis que les banques puissent stipuler des clauses mettant à la charge des commerçants le remboursement des opérations ainsi contestées par leurs clients. Les banques se retournaient donc vers les e-commerçants afin de récupérer les sommes qu'elles avaient restituées, dans un premier temps, au titulaire de la carte, du moment que cette situation était envisagée dans la convention les unissant à ceux-ci. De telles clauses n’avaient d’ailleurs été jugées ni potestatives, ni abusives (CA Pau, 8 janvier 2007, n° 04/02285 N° Lexbase : A86143WX ; CCE, 2007, comm. 58, obs. A. Debet ; RD banc. fin., 2007, comm. 124, obs. E. Caprioli).

Il en va logiquement de même aujourd’hui, si une telle possibilité de contre-passation a été envisagée par le contrat unissant le prestataire de service de paiement du bénéficiaire de l’opération de paiement et ce même bénéficiaire. À défaut, en revanche, la contre-passation ne pourra logiquement pas être opérée.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Le droit des opérations de paiement (cartes, virements, prélèvements), La contestation de l’opération non autorisée, in Droit bancaire, (dir. J. Lasserre Capdeville), Lexbase (N° Lexbase : E86503E4).

 

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Copropriété

[Brèves] Point de départ de l’action en cessation d’une infraction résultant de l’exploitation saisonnière d’un lot de copropriété, qui se répète d'année en année ?

Réf. : Cass. civ. 3, 24 novembre 2021, n° 20-17.684, FS-D (N° Lexbase : A52007DX)

Lecture: 3 min

N9621BYY

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 01 Décembre 2021

Lorsque l'infraction alléguée au règlement de copropriété résulte d’une exploitation saisonnière d’un lot de copropriété qui se répète d'année en année, le délai de prescription de l’action en cessation de l’infraction ne recommence pas à courir chaque année avec la reprise de cette exploitation ; le point de départ du délai de prescription est donc le jour où a été commise, pour la première fois, l'infraction au règlement de copropriété.

Faits et procédure. L’affaire concernait une résidence soumise au statut de la copropriété, comprenant : deux lots loués et exploités à usage de restaurant ; un lot loué et exploité à usage de boutique de prêt-à-porter et, épisodiquement, de bar ; ainsi qu’un lot loué et exploité à usage d'école de surf et de location de planches de surf.

Devant leur devanture et avant le trottoir public, se trouvait une zone de circulation en pavés autobloquants dont le syndicat des copropriétaires soutenait qu'elle constituait une partie commune, occupée irrégulièrement par ces commerces.

Les 1er et 4 décembre 2014, le syndicat a assigné les copropriétaires-bailleurs de ces lots et leurs locataires en cessation de tout encombrement des parties communes et en indemnisation de son préjudice.

Décision CA Pau. La cour d’appel de Pau avait déclaré recevable l’action du syndicat, estimant que lorsque l'occupation des parties alléguées communes est temporaire du fait d'une exploitation saisonnière qui se répète d'année en année, les lieux étant rendus en fin de saison à leur aspect et destination initiaux, chaque nouvelle occupation est le point de départ d'une nouvelle prescription décennale ; elle avait alors constaté que les terrasses installées devant les lots des copropriétaires-bailleurs étaient, pendant leur période d'ouverture, occupées, chaque année, par les éléments mobiliers nécessaires à l’exploitation des commerces (CA Pau, 20 mai 2020, n° 18/01948 N° Lexbase : A91043LR).

Cassation. La décision est censurée, au visa de l’article 42 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 (N° Lexbase : Z07629MW), par la Haute juridiction qui, accueillant l’argument avancé par les demandeurs au pourvoi, relève qu’il résultait de ses constatations que c'était la même infraction au règlement de la copropriété qui s'était répétée, sans interruption, à chaque saison, de sorte que chaque nouvelle occupation n’était pas le point de départ d'une nouvelle prescription décennale.

Modification du délai de prescription par la loi « ELAN ». On rappellera que, depuis la loi « ELAN » du 23 novembre 2018, la prescription n’est plus décennale mais quinquennale, puisque la loi a modifié l’article 42, alinéa 1er, de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L4849AH3), qui dispose désormais que « Les dispositions de l'article 2224 du Code civil relatives au délai de prescription et à son point de départ sont applicables aux actions personnelles relatives à la copropriété entre copropriétaires ou entre un copropriétaire et le syndicat ».

La solution de l’arrêt quant au point de départ de l’action demeure applicable dans le cadre de ces nouvelles dispositions.

Pour aller plus loin : cf. ÉTUDE : Le contentieux de la copropriété : aspects procéduraux, Point de départ du délai de prescription quinquennale, in Droit de la copropriété, (dir. P.-E. Lagraulet), Lexbase ({"IOhtml_internalLink": {"_href": {"nodeid": 5639338, "corpus": "encyclopedia"}, "_target": "_blank", "_class": "color-encyclopedia", "_title": "Point de d\u00e9part du d\u00e9lai de prescription quinquennale", "_name": null, "_innerText": "N\u00b0\u00a0Lexbase\u00a0: E7168ETN"}}).

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Cotisations sociales

[Brèves] Attributions d’actions gratuites et assiette des cotisations : la Cour de cassation rappelle les règles aux juges du fond

Réf. : Cass. civ. 2, 25 novembre 2021, n° 20-16.997, F-B (N° Lexbase : A96607CR)

Lecture: 2 min

N9612BYN

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par Laïla Bedja

Le 01 Décembre 2021

► Au regard de l’article L. 242-1, alinéa 2, du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L4986LR4), sont exclus de l'assiette des cotisations mentionnées au premier alinéa les avantages mentionnés au I des articles 80 bis (N° Lexbase : L9932IWR) et 80 quaterdecies (N° Lexbase : L2205LYC) du Code général des impôts (attributions d’actions gratuites), si l'employeur notifie à son organisme de recouvrement l'identité de ses salariés ou mandataires sociaux auxquels des actions ont été attribuées au cours de l'année civile précédente, ainsi que le nombre et la valeur des actions attribuées à chacun d'eux ; à défaut, l'employeur est tenu au paiement de la totalité des cotisations sociales, y compris pour leur part salariale.

Les faits et procédure. À la suite d’un contrôle sur les années 2012 à 2014, l’URSSAF a adressé une société une lettre d’observations. Les chefs de redressement portent notamment sur le forfait social sur les jetons de présence et sur la contribution patronale sur les attributions d'actions gratuites.

La société a saisi d’un recours la juridiction de Sécurité sociale.

La cour d’appel. Concernant le chef de redressement portant sur la contribution patronale sur les attributions d’actions gratuites, la cour d’appel, pour confirmer le redressement, relève que le conseil d’administration a exploité délibérément une faille de la réglementation et que la décision d'attribuer les actions gratuites en cause n‘a pas été prise par l'assemblée générale extraordinaire. Elle retient que, pour pouvoir bénéficier de l'exonération de la contribution prévue par l'article L. 137-13 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L7372LZ3), il faut au moins, dans l'hypothèse où les dispositions des articles L. 225-197-1 (N° Lexbase : L2188LYP) et L. 225-197-6 (N° Lexbase : L5943LQ8) du Code de commerce ne sont pas réunies, que la notification, prévue par l'article L. 242-1, alinéa 2, du Code de la Sécurité sociale, à l'organisme de recouvrement, de l'identité des mandataires sociaux bénéficiaires, ait eu lieu et que la société n'apportait pas la preuve qu'elle ait, en temps et en heure, notifié à l'URSSAF l'identité du mandataire social concerné.

Cassation. La cour d’appel ayant statué en violation de l’article L. 137-13 précité, par refus d’application et de l’article L. 242-1, alinéa 2, par fausse application, la Haute juridiction casse et annule l’arrêt.

Pour en savoir plus : v. ÉTUDE : La rémunération et les autres avantages financiers, Les attributions gratuites d'actions, in Droit de la protection sociale, Lexbase (N° Lexbase : E9410CDU).

newsid:479612

Données personnelles

[Brèves] Publication du quatrième avis de la CNIL adressé au Parlement sur les conditions de mise en œuvre des dispositifs accompagnant la lutte contre la Covid-19

Réf. : CNIL, 21 octobre 2021, délibération n° 2021-139 (N° Lexbase : X0162CNC)

Lecture: 10 min

N9632BYE

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par Marie-Lou Hardouin-Ayrinhac

Le 01 Décembre 2021

► À la suite de ses précédents avis et de ses 42 contrôles, la CNIL fait un nouveau bilan de ses actions concernant les systèmes et dispositifs mis en place par le Gouvernement depuis 18 mois pour lutter contre l’épidémie de Covid-19.

Contexte. En raison de la crise sanitaire qui perdure depuis mars 2020, la CNIL a été amenée à se prononcer à plusieurs reprises et en urgence, sur la mise en œuvre et l’évolution des traitements de données personnelles créés pour lutter contre l’épidémie.

Elle a joué un rôle essentiel dans l’encadrement normatif de ces dispositifs :

  • en amont, en se prononçant, à l’occasion de demandes d’avis, sur l’évolution des systèmes ;
  • en aval , en effectuant de nombreuses opérations de contrôle.

Par son action, la CNIL a également activement participé à éclairer les débats parlementaires autour des enjeux fondamentaux liés au respect de la vie privée et des données personnelles.

Concernant le fichier « SI-DEP ». Pour rappel, le fichier « SI-DEP » (système d’information de dépistage) est un système d’information national mis en œuvre par le ministère des Solidarités et de la Santé qui permet la centralisation des résultats des tests de dépistage de la Covid-19 réalisés par des laboratoires publics ou privés et certains professionnels de santé habilités, comme les pharmaciens.

La CNIL relève que ce fichier n’a pas connu d’évolution depuis la dernière campagne de contrôle. Elle n’a ainsi pas effectué de nouvelles vérifications, mais reste en contact régulier avec les équipes en charge de sa mise en œuvre.

Elle relève par ailleurs que les observations formulées dans son dernier avis sur le décret encadrant le fichier ont été suivies. Les évolutions mises en place concernant l’alimentation de la base pseudonymisée « SI-DEP » (constituée par la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) pour la gestion de l’urgence sanitaire et de l’amélioration des connaissances sur le virus) ont permis, notamment, d’améliorer la sécurité du dispositif.

Enfin, la CNIL a effectué des vérifications concernant une violation de données subie par l’AP-HP en août 2021 et portant sur des données issues de « SI-DEP ». L’analyse des éléments recueillis est en cours.

Concernant le fichier « Contact Covid » et le suivi des cas contacts. Pour mémoire, le fichier « Contact Covid », mis en œuvre par la CNAM, recueille des informations sur les cas contacts et les chaînes de contamination. Il vise à détecter les cas contacts à trois niveaux différents :

  • les médecins de ville/établissements de santé/centres de santé ;
  • le personnel habilité de l’assurance maladie ;
  • les agences régionales de santé (ARS).

Depuis la publication de son troisième avis, la CNIL a réalisé plusieurs contrôles sur des dispositifs de suivi. Elle a ainsi constaté diverses mauvaises pratiques :

  • une conservation trop longue des données de santé des personnes dans le dispositif « Covidom Covisan » (dispositif permettant un suivi médical à domicile ou un accompagnement à l’isolement) ;
  • une information incomplète des patients ;
  • l’absence de réalisation d’une analyse d’impact relative à la protection des données de la part de l’ARS pour le dispositif « Contact Covid ».

En conséquence, la présidente de la CNIL a adressé des observations aux responsables de traitement concernés afin qu’ils prennent les mesures nécessaires. Parallèlement, elle a, de nouveau, alerté le ministère des Solidarités et de la Santé sur les mauvaises pratiques relevées.

Concernant l’application « TousAntiCovid ». Pour rappel, l'application « TousAntiCovid » (anciennement dénommée « StopCovid ») est une application mobile de suivi de contacts, basée sur le volontariat des personnes et utilisant la technologie Bluetooth. Mise à disposition par le Gouvernement, elle permet d’alerter les utilisateurs d’un risque de contamination lorsqu’ils ont été à proximité d’un autre utilisateur ayant été diagnostiqué ou dépisté positif à la Covid-19. L’application a progressivement été enrichie et elle fournit désormais également des informations factuelles et sanitaires sur l’épidémie.

Plusieurs contrôles de l’application « TousAntiCovid » et des organismes impliqués dans sa mise en œuvre ont été réalisés en juillet et en septembre 2021. Les contrôles ont révélé l’existence de transferts hors Union européenne lors de la conversion d’un certificat au format européen. Une fois alerté par la CNIL sur cette situation, le ministère des Solidarités et de la Santé a toutefois immédiatement procédé aux aménagements nécessaires pour mettre fin à cette transmission.

Sur la seconde fonctionnalité « TousAntiCovid-Signal », la CNIL a mis en évidence plusieurs insuffisances en matière de protection des données, telles que l’absence d’anonymisation des données d’utilisations. La CNIL note néanmoins que le ministère des Solidarités et de la Santé a mis en place de nouvelles modalités permettant de réduire le risque d’exploitation malveillante des données collectées.

Concernant le fichier « Vaccin Covid ». Pour mémoire, le fichier « Vaccin Covid », géré conjointement par la Direction générale de la Santé et de la CNAM a pour objectif la mise en œuvre, le suivi et le pilotage des campagnes vaccinales contre la Covid-19. Il comprend des informations sur les personnes invitées à être vaccinées ou déjà vaccinées afin notamment d’organiser la campagne de vaccination, le suivi et l’approvisionnement en vaccins et consommables (seringues, etc.), et la réalisation de recherches et du suivi de pharmacovigilance. Ce fichier n’a pas vocation à s’étendre à d’autres vaccinations que celle contre la Covid-19.

La CNIL s’est prononcée à plusieurs reprises sur les modifications apportées au système d’information « Vaccin Covid », telles que l’accès à la liste des professionnels de santé non vaccinés soumis à l’obligation vaccinale par les ARS. Elle a rappelé à cette occasion que seules les ARS pourraient être destinataires des données relatives au statut vaccinal de ces professionnels, compte tenu du caractère particulièrement sensible de ces informations. La CNIL a également insisté sur la nécessité d’informer les professionnels de l’utilisation du Fichier national des professionnels de santé afin de contrôler leur statut vaccinal.

De plus, la CNIL s’est prononcée sur la création, à destination des médecins traitants et de certains personnels de la CNAM, de listes de patients non vaccinés. La CNIL a rappelé qu’elle n’est en principe pas favorable à la diffusion de ces listes, même si elle estime que ce dispositif ne porte pas atteinte au principe du secret médical : ces informations ne seraient communiquées, s’agissant des médecins traitants, qu’à leur demande.

Des contrôles ont été effectués, notamment dans des centres de vaccination en Île-de-France ainsi qu’à la direction du numérique du ministère des Solidarités et de la Santé. À la suite de plusieurs signalements qui ont révélé un défaut d’information des personnes candidates à la vaccination dans certains centres de vaccination, la CNIL a formulé des observations auprès du ministère des Solidarités et de la Santé ainsi que la CNAM, leur demandant de s’assurer que les personnes souhaitant se faire vacciner reçoivent une information claire et précise. 

Concernant le passe sanitaire « activités ». Pour rappel, le passe sanitaire « activités » est un dispositif au format papier ou numérique permettant d’accéder, en France, à certains lieux recevant du public. Pour être valide, le passe doit comporter une « preuve » sanitaire :

  • soit une attestation de vaccination (schéma vaccinal complet) ;
  • soit une preuve d’un test PCR, antigénique ou autotest négatif ;
  • soit un test montrant le rétablissement de la Covid-19.

Le passe sanitaire « voyages », au format européen, permet quant à lui le contrôle sanitaire aux frontières.

La CNIL s’est prononcée à plusieurs reprises sur les modalités de mise en œuvre du passe sanitaire, dont le champ d’application a été considérablement élargi afin d’inclure les activités du quotidien. Ainsi, elle a recommandé :

  • que les justificatifs puissent être présentés au format papier, afin de conserver le caractère volontaire de l’utilisation de l’application numérique « TousAntiCovid » ;
  • que les personnes autorisées à procéder aux vérifications ne devraient avoir accès qu’aux données d’identification et au résultat de validité du passe, et non à la nature du document ou aux autres données qu’il peut contenir.

Enfin, saisie dans le cadre d’une modification du décret encadrant les conditions de mise en œuvre du passe sanitaire, notamment dans l’objectif de lutter contre la fraude, la CNIL a invité le ministère à limiter expressément les finalités du dispositif envisagé et à prévoir une bonne information des personnes concernées, notamment sur les modalités de génération d’un nouveau passe.

Concernant l’application « TousAntiCovid Vérif ». Pour mémoire, l’application « TousAntiCovid Vérif » a été mise en place afin de vérifier la validité des passes sanitaires par des agents habilités.

Lorsqu’un passe sanitaire est scanné par l’application, seuls apparaissent le nom, prénom, la date de naissance ainsi que la validité (ou non) du passe.

La CNIL a effectué plusieurs contrôles de l’application et a constaté que les données des passes sanitaires vérifiés n’étaient pas conservées. Toutefois, la CNIL a relevé plusieurs dysfonctionnements (par exemple l’absence d’information des personnes sur le traitement des données dans certains lieux). La présidente de la CNIL a adressé un courrier aux organismes concernés les invitant à prendre les mesures nécessaires.

Une procédure de contrôle continue. La CNIL poursuivra ses contrôles tout au long de l’utilisation de ces fichiers, et ce jusqu’à la suppression des données qu’ils contiennent. Ces fichiers sont uniquement utilisés pour lutter contre l’épidémie de Covid-19 : en ce sens, elle effectuera une nouvelle campagne de contrôles auprès des organismes concernés portant sur la durée de conservation, la suppression et/ou l’anonymisation des données.

Enfin, la CNIL insiste sur la nécessité que les éléments qui permettent d’apprécier l’efficacité des traitements susmentionnés lui soient rapidement transmis, afin de continuer l’exercice de sa mission. En effet, malgré plusieurs demandes, une telle évaluation n’a, à ce jour, pas été transmise à la CNIL. À cet égard, elle tient à souligner que l’utilisation des dispositifs précités reste conditionnée à des garanties relatives à leur efficacité.

Les précédents avis trimestriels de la CNIL adressés au Parlement concernant les conditions de mise en œuvre des dispositifs accompagnant la lutte contre la Covid-19 :

  • CNIL, 10 septembre 2020, délibération n° 2020-087 (N° Lexbase : X1192CKD) ; 
  • CNIL, 14 janvier 2021, délibération n° 2021-004 (N° Lexbase : X4762CMC) ; lire M.-L. Hardouin-Ayrinhac, Publication du deuxième avis de la CNIL adressé au Parlement sur les conditions de mise en œuvre de « SI-DEP », « Contact Covid », « Vaccin Covid » et « TousAntiCovid », Lexbase Affaires, janvier 2021, n° 663 (N° Lexbase : N6196BY7). 
  • CNIL, 27 mai 2021, délibération n° 2021-062 (N° Lexbase : X9093CMQ) ; lire M.-L. Hardouin-Ayrinhac, Publication du troisième avis de la CNIL adressé au Parlement sur les conditions de mise en œuvre des dispositifs accompagnant la lutte contre la Covid-19, Lexbase Droit privé, juin 2021, n° 868 (N° Lexbase : N7813BYZ).

newsid:479632

Fiscalité locale

[Brèves] Exonération de TFPB : quid des outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels ?

Réf. : CE 3° ch., 22 novembre 2021, n° 436304, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A61887C8)

Lecture: 2 min

N9567BYY

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par Marie-Claire Sgarra

Le 01 Décembre 2021

Pour apprécier la consistance des propriétés qui entrent dans le champ de la taxe foncière sur les propriétés bâties, il est tenu compte, non seulement de tous les éléments d'assiette mais également des biens faisant corps avec eux ;

► Sont toutefois exonérés de cette taxe ceux de ces biens qui font partie des outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation d'un établissement industriel, c'est-à-dire ceux de ces biens qui relèvent d'un établissement qualifié d'industriel et qui sont spécifiquement adaptés aux activités susceptibles d'être exercées dans un tel établissement.

Les faits :

  • une SA exploite sur le territoire de la commune d'Arnage un établissement dont elle est propriétaire, où sont fabriquées des pièces destinées au secteur de l'industrie automobile ;
  • elle a demandé au TA de Nantes de prononcer la réduction des cotisations de TFPB, de CFE et de taxe additionnelle à la CFE pour frais de chambres de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014, toutes assises sur la valeur locative de l'établissement, évaluée selon la méthode comptable.

🔎 Principes :

  • sont soumis à la TFPB les installations destinées à abriter des personnes ou des biens ou à stocker des produits ainsi que les ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions tels que, notamment, les cheminées d'usine, les réfrigérants atmosphériques, les formes de radoub, les ouvrages servant de support aux moyens matériels d'exploitation et les ouvrages d'art et les voies de communication (CGI, art. 1381 N° Lexbase : L1070IZN) ;
  • sont exonérés de la TFPB les outillages et autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels (CGI, art. 1382 N° Lexbase : L5623L4Z) ;
  • chaque propriété ou fraction de propriété est appréciée d'après sa consistance, son affectation, sa situation et son état, à la date de l'évaluation (CGI, art. 1495 N° Lexbase : L8465LHY) ;
  • pour l'appréciation de la consistance il est tenu compte de tous les travaux, équipements ou éléments d'équipement existant au jour de l'évaluation (CGI, art. 324 B, annexe III N° Lexbase : L9425LKB).

⚖️ Solution du CE. En jugeant que les outillages, autres installations et moyens matériels d'exploitation des établissements industriels mentionnés à l’article 1382 du CGI s'entendent de ceux qui participent directement à l'activité industrielle de l'établissement et sont dissociables des immeubles, le tribunal administratif a commis une erreur de droit.

 

newsid:479567

Procédure administrative

[Brèves] Demande tendant à l'exécution d'une décision de justice : office du juge en cas de renonciation du demandeur au bénéfice d'une partie de ces mesures

Réf. : CE 2° et 7° ch.-r., 25 novembre 2021, n° 447105, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A13107DU)

Lecture: 2 min

N9599BY8

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par Yann Le Foll

Le 01 Décembre 2021

► Le juge de l'exécution n’a pas à prescrire les mesures qu'implique nécessairement la décision dont l'exécution lui est demandée lorsque la partie qui a saisi la juridiction d'une demande d'exécution y a expressément renoncé (confirmant CAA Lyon, 17 novembre 2020, n° 18LY03358 N° Lexbase : A841737U).

Principe. Il résulte des articles L. 911-4 (N° Lexbase : L7381LP3), R. 921-5 (N° Lexbase : L3344ALG) et R. 921-6 (N° Lexbase : L7273KHT) du Code de justice administrative qu'il appartient au juge de l'exécution de prescrire les mesures qu'implique nécessairement la décision dont l'exécution lui est demandée par la partie intéressée, alors même que ces mesures ne figuraient pas expressément dans la demande présentée au président de la juridiction ou dans les mémoires produits après l'ouverture de la procédure juridictionnelle.

Il n'en va autrement que lorsque la partie qui a saisi la juridiction d'une demande d'exécution a indiqué, sans équivoque, qu'elle renonçait au bénéfice d'une partie de ces mesures.

Faits. Par un courrier du 24 avril 2018, un technicien territorial a saisi le président de la cour administrative d'appel de Lyon, sur le fondement des dispositions de l'article R. 921-5 du Code de justice administrative, d'une demande d'exécution du jugement du 12 novembre 2014 du tribunal administratif de Lyon faisant injonction au syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) de l'Est Gessien de procéder à la régularisation de ses droits à rémunération.

Par une ordonnance du 12 novembre 2018, le président de la cour a ouvert la procédure juridictionnelle. Si le SIVOM de l'Est Gessien fait valoir que dans ses mémoires produits après l'ouverture de la procédure juridictionnelle d'exécution, l’intéressé avait demandé le versement d'une somme inférieure au montant de 47 787,63 euros que la cour a enjoint de verser, il n'est pas allégué que l'intéressé aurait indiqué, sans équivoque, qu'il renonçait à une partie des sommes dues en exécution de ce jugement, alors d'ailleurs qu'il demandait le versement de ce même montant dans son courrier adressé au président de la cour.

Solution. Dès lors, le SIVOM de l'Est Gessien n'est pas fondé à soutenir que la cour aurait commis une erreur de droit en lui enjoignant de verser à l’intéressé qui n'était d'ailleurs pas tenu de préciser les montants dus en exécution du jugement, une somme qui ne figurait pas dans sa demande.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les dispositions relatives à l'exécution des décisions applicables devant toutes les juridictions, Les droits du justiciable en cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, in Procédure administrative, (dir. C. De Bernardinis), Lexbase (N° Lexbase : E4791EXQ).

newsid:479599

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