Le Quotidien du 6 août 2021

Le Quotidien

Avocats/Institutions représentatives

[Brèves] Bâtonnat Nice 2019 : la Cour de cassation confirme que la sincérité du scrutin et le résultat du vote n’ont pas été affectés par le tract anonyme

Réf. : Cass. civ. 1, 30 juin 2021, n° 20-13.289, F-D (N° Lexbase : A21084YQ)

Lecture: 4 min

N8258BYI

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par Marie Le Guerroué

Le 05 Août 2021

► La sincérité du scrutin et le résultat du vote des élections du Bâtonnier et vice-Bâtonnier de l’Ordre des avocats au barreau de Nice n’ont pas été affectés par le tract anonyme ni par le message critique diffusé par un avocat sur son compte « Facebook » ; la Cour de cassation confirme ainsi la décision précédemment rendue par la cour d’appel de Nice dans cette affaire (CA Aix-en-Provence, 12 décembre 2019, n° 19/08955 N° Lexbase : A2589Z8E).

Faits et procédure. Un arrêt du 11 avril 2019 rendu sur renvoi après cassation avait annulé les élections du Bâtonnier et vice-bâtonnier de l’Ordre des avocats au barreau de Nice. Le juge des référés du tribunal de grande instance de Nice avait désigné un avocat à ce barreau pour assurer la suppléance du Bâtonnier de l’Ordre jusqu’à la tenue de nouvelles élections. Les opérations électorales avaient eu lieu les 21 et 28 mai suivants et sur les mille deux cent soixante-sept électeurs inscrits, neuf cent soixante-treize ont voté. À l’issue du second tour de scrutin, deux avocats avaient été respectivement élus Bâtonnier et vice-Bâtonnier par cinq cent quarante-huit voix contre trois cent quatre-vingt-dix-huit au profit de deux autres candidats. Le 4 juin 2019, ces derniers avaient formé un recours en annulation des opérations électorales sur le fondement de l’article 12 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat (N° Lexbase : L8168AID) en invoquant une irrégularité et l’existence d’un dénigrement opéré à leur égard. Ils avancent notamment qu’un acte de dénigrement dirigé contre l’un des candidats justifie l'annulation de l’élection lorsque les manœuvres ont eu pour effet de fausser les résultats de la consultation et porter ainsi atteinte à la sincérité du scrutin.

CA Aix-en-Provence. L’arrêt d’appel relève :

  • que l'élection a été acquise par un écart très substantiel de cent cinquante voix par rapport aux requérants ;
  • qu'après avoir constaté qu’un tract anonyme, diffusé quelques jours avant le premier tour des élections, dans les boîtes aux lettres de l'ensemble des avocats contenait des allusions et accusations, qui constituaient des attaques graves dépassant les propos normaux admissibles lors d’une campagne électorale, la cour retient qu’il a donné lieu dès le lendemain, à un rappel solennel par le Bâtonnier suppléant des principes et valeurs de la profession et à une condamnation cinglante au regard de la dignité, de l'indépendance et de la modération dont tout avocat est porteur, et que ce tract n’a pu avoir une influence sur le choix effectué par les avocats du barreau ;
  • que, si un message critique a été diffusé par un avocat sur son compte « Facebook », il ne constitue pas un élément susceptible d’avoir influencé la campagne électorale, dès lors qu’il a été adressé à un public restreint et que sa lecture supposait une démarche volontaire de ceux qui constituaient le cercle des amis du diffuseur ;
  • que sur les deux cent trente et un votes effectués par procuration, seules dix-huit procurations sont contestées pour avoir été admises ou refusées de manière irrégulière, ce qui n’a pu avoir d'incidence sur le résultat du vote en raison de l’écart de voix obtenu par les avocats élus.

Réponse de la Cour. Dès lors, pour la Cour de cassation en ayant ainsi procédé à une analyse in concreto de chacun des motifs d'annulation invoqués par les requérants et apprécié souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, n’a pu qu’en déduire que la sincérité du scrutin et le résultat du vote n'avaient pas été affectés.
 

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Les instances de la profession, La contestation de l'élection du Bâtonnier et du vice-Bâtonnier, in La profession d'avocat, (dir. H. Bornstein), Lexbase (N° Lexbase : E34093RP).


 

newsid:478258

Copropriété

[Brèves] Réglementation des copropriétés : précisions diverses

Réf. : QE n° 18599 de M. Yves Détraigne, JO Sénat, 5 novembre 2020, réponse publ. 22 juillet 2021 p. 4620, 15ème législature (N° Lexbase : L3800L7U)

Lecture: 11 min

N8505BYN

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 05 Août 2021

► Dans une réponse publiée au JO Sénat le 22 juillet 2021, le ministre de la Justice était appelé à apporter des éclaircissements concernant de précédentes réponses qu’il avait apportées, concernant :
1° l'installation d'un équipement de vidéosurveillance en partie commune à jouissance privative ;
2° l'engagement de la responsabilité de l'auteur d'un projet de résolution constitutif d'une diffamation au sens de la loi du 29 juillet 1881 ;
3° la notification de travaux par le syndicat des copropriétaires au copropriétaire titulaire d'un droit de jouissance privative sur des parties communes ;
4° la possibilité de clore une partie commune à jouissance privative, de l'obligation éventuelle d'en fournir la clé d'accès au syndic et de la procédure d'information que ce dernier doit respecter s'il souhaite accéder aux lieux.

1° Concernant l'installation d'un équipement de vidéosurveillance en partie commune à jouissance privative qui n'impliquerait que de menus travaux ne modifiant pas la substance et la destination de la partie commune à jouissance privative concernée, qui n'affecterait que des éléments mineurs de celle-ci ou serait d'un aspect discret par ses formes et dimensions et fixé par un ancrage léger et superficiel, une dispense d'autorisation préalable de l'assemblée générale des copropriétaires parait envisageable, sous réserve de l'appréciation souveraine des juges du fond saisis d'un tel litige.

Il conviendrait, par ailleurs, d'assurer que les zones filmées se trouvent exclusivement à l'intérieur de la partie commune à jouissance privative où l'équipement est installé, voire à l'intérieur de la partie privative du copropriétaire à l'origine de l'installation.

Il conviendrait enfin de s'assurer que l'installation de l'équipement de vidéosurveillance en partie commune à jouissance privative n'est pas non plus de nature à affecter l'aspect extérieur de l'immeuble au sens du b) de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L4825AH8), ce qui serait de nature à rétablir la nécessité d'une autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires.

Dans ces conditions, l'équipement léger et sans impact sur l'harmonie de l'immeuble, n'ayant vocation à filmer aucun copropriétaire ni aucune partie commune générale ou partie privative autre que celle du propriétaire de l'installation, semble être un usage ne portant « atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l'immeuble », conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article 9 de la loi du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L4861AHI).

Dès lors, et sous réserve de l'appréciation des juridictions saisies, aucune information spécifique ne paraitrait due au syndicat des copropriétaires.

Il y a toutefois lieu de signaler qu'il appartient au syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic, de vérifier le correct entretien des parties communes, y compris celles qui sont à jouissance privative. Pour s'assurer de leur bon entretien, le syndic peut exercer un « droit de regard » impliquant une visite des lieux. Ce droit de visite est opposable au copropriétaire concerné : le syndic peut ainsi être autorisé par le juge à pénétrer dans une partie commune à jouissance privative à cet effet (Cons. const., 18 janvier 1995, n° 94-352 DC, cons. 3 N° Lexbase : A8320AC7). Dans une telle hypothèse, il conviendra que le copropriétaire à l'origine de l'installation d'un tel équipement de vidéosurveillance dans une partie commune à jouissance privative alerte le syndic, en amont de sa visite, de la présence de l'équipement, de la finalité poursuivie par le dispositif de vidéosurveillance (ex : sécurisation du domicile notamment pour lutter contre les cambriolages) et de la possibilité que son image soit captée, conformément à la législation en vigueur (C. pén., art. 226-1 N° Lexbase : L8546LXS ; C. civ., art. 9 N° Lexbase : L3304ABY) et par respect de la vie privée des personnes filmées et de leur droit à l'image (ex : voisins, visiteurs). Par ailleurs, il conviendra également de s'assurer que le dispositif de vidéosurveillance mis en place par le copropriétaire se limite à une partie commune à jouissance privative. Le dispositif ne doit en effet pas servir à « surveiller » en temps réel les allées et venues des résidents ou des visiteurs. Enfin, si le dispositif filme des espaces communs publics (ex : parking, local vélos ou poussettes, hall d'entrée, portes d'ascenseur, cour), l'information des personnes devra se faire conformément aux articles 13 du « RGPD » (Règlement n° 2016/679 du 27 avril 2016 N° Lexbase : L0189K8I) et 104 de la loi « Informatique et Libertés » (N° Lexbase : L8794AGS). Ainsi, les personnes filmées devront être informées de l'existence du dispositif au moyen de panneaux affichés en permanence, de façon visible dans les lieux concernés. Ces panneaux devront a minima indiquer : les finalités du traitement installé, la durée de conservation des images, le nom ou la qualité et le numéro de téléphone du responsable/du délégué à la protection des données (DPO), l'existence des droits « Informatique et libertés » et le droit d'introduire une réclamation auprès de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), en précisant ses coordonnées.

2° Concernant l'engagement de la responsabilité de l'auteur d'un projet de résolution constitutif d'une diffamation au sens de la loi du 29 juillet 1881 (N° Lexbase : L7589AIW), il y a lieu de rappeler que les faits de diffamation sont prévus et réprimés par les articles 29 et suivants de la loi du 29 juillet 1881 et les articles R. 625-7 (N° Lexbase : L4087LGH) et suivants du Code pénal. Ils peuvent être constitués par voie de documents privés (voir, pour des documents adressés aux copropriétaires de plusieurs résidences gérées par un même syndic : Cass. civ. 2, 12 décembre 2002, n° 00-10.150, publié au bulletin N° Lexbase : A4483A4S) ou par la lecture d'un texte diffamant, l'infraction étant constituée à l'égard de celui qui lit le texte quand bien même il aurait été préparé par un tiers (Paris, 13 mars 1998 : Gaz. Pal. 1998. 2. Somm. 554). Néanmoins, lorsque la diffusion s'est limitée à une assemblée des copropriétaires, « assemblée privée réunie dans un intérêt commun », le caractère public de la diffamation ou de l'injure est écarté et seule une contravention de diffamation ou d'injure non publique peut être éventuellement retenue (Cass. crim., 2 juillet 1975, n° 74-91.708, publié au bulletin N° Lexbase : A7688CEH). La responsabilité de l'auteur de la résolution diffamante pourrait donc être recherchée sur ce fondement. Une plainte peut être déposée quand bien même l'auteur des propos ne serait pas connu.

3° Concernant la notification de travaux par le syndicat des copropriétaires au copropriétaire titulaire d'un droit de jouissance privative sur des parties communes, il apparaît que le statut de la copropriété ne prévoit aucun délai de prévenance particulier. Certains règlements de copropriété traitent expressément l'hypothèse de travaux d'entretien et de conservation des parties communes à jouissance privative, et prévoient le principe d'un libre accès de ces espaces à toute personne chargée par le syndicat des copropriétaires d'y procéder (Cass. civ. 3, 5 janvier 1994, n° 92-10.140 N° Lexbase : A7664CMS).

À défaut de mention spécifique relative à un délai de prévenance, il appartiendra au syndic, pour son compte et celui de ses préposés et commanditaires (notamment les artisans chargés des travaux en question), d'avertir le copropriétaire concerné dans un délai raisonnable. Afin de quantifier ce délai, certaines juridictions paraissent s'être référées au délai de prévenance de huit jours applicable en matière de travaux supposant un accès aux parties privatives (CA Aix-en-Provence, 18 décembre 2014, n° 14/00351 N° Lexbase : A1806M8E).

L'appréciation du caractère raisonnable du délai de prévenance laissé au copropriétaire relève de l'appréciation souveraine des juges saisis de la question. Par ailleurs, il doit être souligné que l'existence d'un motif « impératif de sécurité ou de conservation des biens » permet d'écarter le délai de prévenance prévu à l'article 9 de la loi du 10 juillet 1965 (N° Lexbase : L4861AHI), en raison de l'urgence, mais non de surmonter le refus du copropriétaire concerné de donner accès aux lieux. Pour obtenir cet accès, une autorisation préalable du juge reste nécessaire et peut être obtenue par la voie du référé (Paris, 8 déc. 1986 : RDI 1987. 373), sans préjudice de la possibilité pour le syndicat des copropriétaires d'engager la responsabilité du copropriétaire qui se serait indûment opposé à cet accès et aurait rendu la saisine du juge indispensable. De la même façon, et sous réserve de l'appréciation souveraine des juridictions compétentes, l'urgence ne semble pas de nature à permettre de surmonter le refus d'accès aux parties communes à jouissance privative opposé par le copropriétaire titulaire de ce droit.

4° S'agissant, en dernier lieu, de la possibilité de clore une partie commune à jouissance privative, de l'obligation éventuelle d'en fournir la clé d'accès au syndic et de la procédure d'information que ce dernier doit respecter s'il souhaite accéder aux lieux, il est constant que le statut de la copropriété ne fournit pas un tel degré de précisions et qu'il incombe en première intention au règlement de la copropriété concernée et à l'assemblée générale des copropriétaires elle-même de déterminer les règles de vie commune et de fonctionnement de l'immeuble, et particulièrement l'étendue du droit de jouissance exclusive qu'elle confère à l'un d'eux.

L'octroi d'un droit de jouissance privative sur des parties communes est ainsi fréquemment assorti de conditions d'usage tenant aux facultés d'édifier ou de clore les lieux (ex : TJ Marseille, 3e chambre civile, 3 mai 2010, n° 07/08810). En toute hypothèse, la jouissance exclusive d'une partie commune différant de la propriété exclusive (Cass. civ. 3, 27 mars 2008, n° 07-11.801, FS-P+B N° Lexbase : A6103D78), le bénéficiaire d'un tel droit ne peut en disposer librement comme s'il s'agissait d'une partie privative. Ce droit d'usage réservé à un copropriétaire sur une partie des terrains ou du gros-œuvre trouve ses limites dans la nécessité pour son titulaire de « ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l'immeuble », conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article 9 de la loi du 10 juillet 1965. Dans ces conditions, et sauf stipulation contraire du règlement de copropriété ou d'une décision de l'assemblée générale des copropriétaires, rien n'indique que le copropriétaire qui aurait régulièrement clos une partie commune à jouissance privative par une porte à clef soit tenu de remettre un double de cette clef au syndic, à charge néanmoins pour ledit copropriétaire de permettre à ce dernier d'exercer ses missions et particulièrement celle de s'assurer du bon entretien de cet espace.

À défaut de toute procédure choisie par la copropriété pour ce faire, et en cas de refus du copropriétaire concerné de donner accès aux lieux, le syndic peut être autorisé par le juge à pénétrer dans une partie commune à jouissance privative, dans le respect du droit au respect de la vie privée du copropriétaire concerné, garanti notamment par l'article 9 du Code civil (N° Lexbase : L3304ABY), et du principe à valeur constitutionnelle d'inviolabilité du domicile (Cons. const., 18 janvier 1995, n° 94-352 DC, cons. 3 N° Lexbase : A8320AC7).

newsid:478505

Covid-19

[Brèves] Loi relative à la gestion de la crise sanitaire : les Sages valident le « passe sanitaire » et censurent la rupture des CDD et contrat de mission ainsi que le placement à l’isolement

Réf. : Cons. const., décision n° 2021-824 DC, du 5 août 2021, Loi relative à la gestion de la crise sanitaire (N° Lexbase : A62354ZX)

Lecture: 7 min

N8528BYI

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par Laïla Bedja et Charlotte Moronval

Le 06 Août 2021

► Faisant l’objet de quatre saisines différentes des parlementaires et du Premier ministre, le projet de loi relative à la gestion de la crise sanitaire a fait l’objet d’une censure partielle ; les Sages valident les dispositions concernant le « passe sanitaire » et censurent celles organisant la rupture anticipée de certains contrats de travail et le placement « automatique » à l’isolement, jugeant ces dispositions contraires à la Constitution.

Conformité des dispositions relatives au « passe sanitaire »

Au regard du A du paragraphe II de l'article 1er de la loi du 31 mai 2021, le Premier ministre peut subordonner l'accès à certains lieux, établissements, services ou événements à la présentation d'un « passe sanitaire » qui peut revêtir la forme soit d'un résultat d'examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par la covid-19, soit d'un justificatif de statut vaccinal, soit d'un certificat de rétablissement à la suite d'une contamination. L’article 1er de la loi déférée étend les pouvoirs du Premier ministre. Il est notamment reproché à ces dispositions de subordonner l'accès aux grands magasins et centres commerciaux et aux transports publics à la présentation d'un « passe sanitaire », ce qui n'aurait pas d'intérêt dans la lutte contre l'épidémie. Il était soutenu qu'en outre, ces dispositions emporteraient des effets disproportionnés au regard de l'objectif poursuivi, ce dont il résulterait une méconnaissance de la liberté d'aller et de venir, du droit au respect de la vie privée et du droit d'expression collective des idées et des opinions.

Si le Conseil constitutionnel reconnaît l’atteinte à ces libertés, il valide les dispositions contestées au regard de l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé poursuivi par le législateur, ce dernier estimant que, en l'état des connaissances scientifiques dont il disposait, les risques de circulation du virus de la covid-19 sont fortement réduits entre des personnes vaccinées, rétablies ou venant de réaliser un test de dépistage dont le résultat est négatif.

S’agissant de l’application du « passe sanitaire » aux services et établissements de santé, sociaux et médico-sociaux, le législateur a réservé l'exigence de présentation d'un « passe sanitaire » aux seules personnes accompagnant ou rendant visite aux personnes accueillies dans ces services et établissements, ainsi qu'à celles qui y sont accueillies pour des soins programmés. Ainsi, cette mesure, qui s'applique sous réserve des cas d'urgence, n'a pas pour effet de limiter l'accès aux soins.

Par ailleurs, les Sages écartent le grief relatif à l’obligation de soins ou l’obligation de vaccination, les obligations imposées au public pouvant être satisfaites par la présentation aussi bien d'un justificatif de statut vaccinal, du résultat d'un examen de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination ou d'un certificat de rétablissement à la suite d'une contamination.

Obligations de contrôle imposées aux exploitants et aux professionnels et sanction. Toujours concernant le « passe sanitaire », il était reproché aux dispositions, d’une part, une méconnaissance de la liberté d'entreprendre en faisant peser sur les acteurs économiques l'obligation de contrôler l'accès aux lieux qu'ils exploitent, ce qui serait de nature à nécessiter la mobilisation de moyens humains et matériels importants et, d'autre part, de prévoir des peines disproportionnées au regard des manquements susceptibles d'être reprochés à ces professionnels. Pour les Sages, s'il peut en résulter une charge supplémentaire pour les exploitants, la vérification de la situation de chaque client peut être mise en œuvre en un temps bref.

Sur la sanction en cas de non-respect de cette obligation, le Conseil constitutionnel relève que, lorsqu'un manquement, ayant fait l'objet d'une mise en demeure, est constaté à plus de trois reprises au cours d'une période de quarante-cinq jours, l'exploitant ou le professionnel peut être condamné à un an d'emprisonnement et à 9 000 euros d'amende. Il juge que, au regard de la nature du comportement réprimé, les peines instituées ne sont pas manifestement disproportionnées.

Non-conformité de la mesure de placement en isolement applicable de plein droit aux personnes faisant l'objet d'un test de dépistage positif à la covid-19

Le Conseil constitutionnel rappelle que, aux termes de l'article 66 de la Constitution : « Nul ne peut être arbitrairement détenu. L'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi ». La liberté individuelle, dont la protection est confiée à l'autorité judiciaire, ne saurait être entravée par une rigueur non nécessaire. Les atteintes portées à l'exercice de cette liberté doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées aux objectifs poursuivis. Ainsi, le placement en isolement s'appliquant sauf entre 10 heures et 12 heures, en cas d'urgence ou pour des déplacements strictement indispensables, constitue une privation de liberté. Les dispositions contestées prévoient que, sous peine de sanction pénale (amende de 750 euros), toute personne qui se voit communiquer le résultat positif d'un test de dépistage à la covid-19 a l'obligation de se placer à l'isolement pour une durée de dix jours, sans qu'aucune appréciation ne soit portée sur sa situation personnelle.

Or, d'une part, cette obligation n'est portée à sa connaissance qu'au seul moyen des informations qui lui sont communiquées au moment de la réalisation du test. D'autre part, l'objectif poursuivi par les dispositions contestées n'est pas de nature à justifier qu'une telle mesure privative de liberté s'applique sans décision individuelle fondée sur une appréciation de l'autorité administrative ou judiciaire.

Sur les dispositions relatives aux contrats de travail

Censure des dispositions relatives à la rupture anticipée du CDD ou du contrat de mission. Le Conseil constitutionnel a censuré les dispositions de l'article 1er de la loi prévoyant qu'un contrat à durée déterminée ou de mission puisse être rompu avant son terme par l'employeur faute de « passe sanitaire ».

En prévoyant que le défaut de présentation d'un « passe sanitaire » constitue une cause de rupture anticipée des seuls contrats à durée déterminée ou de mission, le législateur a institué une différence de traitement entre les salariés selon la nature de leurs contrats de travail qui est sans lien avec l'objectif poursuivi, explique le Conseil constitutionnel.

Validation de la procédure de suspension du contrat de travail sans rémunération. Le Conseil constitutionnel estime en revanche que la procédure de suspension du contrat de travail sans rémunération pour les salariés concernés par l'obligation du « passe sanitaire » n'est pas contraire à la Constitution.

Il relève notamment que la mesure est temporaire, l’obligation de présenter un « passe sanitaire » n’étant imposée que pour la période comprise entre le 30 août et le 15 novembre 2021. Par ailleurs, si cette suspension s'accompagne de l'interruption du versement de la rémunération, elle prend fin dès que le salarié produit les justificatifs requis.

Sur l’obligation pour les étrangers de se soumettre aux obligations sanitaires nécessaires à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement

Les dispositions contestées (art. 2 de la loi) punissent de trois ans d'emprisonnement le refus par un étranger de se soumettre aux obligations sanitaires nécessaires à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement dont il fait l'objet. L'expression « obligations sanitaires », éclairée par les travaux parlementaires, doit s'entendre des tests de dépistage de la covid-19. Il appartient par ailleurs au juge pénal, saisi de poursuites ordonnées sur le fondement de ces dispositions, de vérifier la réalité du refus opposé par l'étranger poursuivi et l'intention de l'intéressé de se soustraire à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement. Sous cette réserve, ces dispositions ne méconnaissent pas le principe de proportionnalité des peines.

L'obligation de se soumettre à un test de dépistage de la covid-19 en application des dispositions contestées ne comporte aucun procédé attentatoire à l'intégrité physique et à la dignité des personnes. En conséquence, manquent en fait les griefs tirés de l'atteinte au principe du respect de la dignité de la personne humaine et à l'inviolabilité du corps humain. L’article ne méconnait donc aucune exigence constitutionnelle.

newsid:478528

Filiation

[Brèves] Adoption, par le conjoint du père, de l’enfant né par GPA à l’étranger : la première chambre civile confirme sa jurisprudence

Réf. : Cass. civ. 1, 7 juillet 2021, deux arrêts, n° 20-10.721 (N° Lexbase : A62604YI), et n° 20-10.722 (N° Lexbase : A63104YD), F-D

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N8374BYS

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par Marie-Lou Hardouin-Ayrinhac

Le 05 Août 2021

► Dans le cadre d'une demande d'adoption de l'enfant né par GPA à l'étranger par le conjoint du père, en l'absence de lien de filiation établi avec la femme ayant donné naissance à l'enfant, le droit français n'interdit pas le prononcé de l'adoption : 1° lorsque le droit étranger autorise la convention de gestation pour autrui ; 2° et que l'acte de naissance de l'enfant, qui ne fait mention que d'un parent, a été dressé conformément à la législation étrangère, en l'absence de tout élément de fraude.

La solution avait déjà été posée dans deux arrêts rendus le 4 novembre 2020 (Cass. civ. 1, 4 novembre 2020, deux arrêts, n° 19-50.042  N° Lexbase : A418333C et n° 19-15.739 N° Lexbase : A418433D, FS-P+B+I ; cf. Adeline Gouttenoire, Établissement et reconnaissance de la filiation : retour sur une année riche en jurisprudence (année 2020), Lexbase Droit privé, janvier 2021, n° 851 N° Lexbase : N6161BYT). 

Faits et procédure. Un père reconnaît son enfant, le 10 septembre 2012, à l'ambassade de France à New Delhi. Il a eu recours à une convention de gestation pour autrui en Inde. La transcription de l'acte de naissance établi à l'étranger ne mentionne que le nom du père.

Par requête du 29 août 2017, l'époux du père forme une demande d'adoption plénière de l'enfant de son conjoint. Le père consent à cette adoption le 4 juillet 2017.

La cour d'appel de Douai rejette la demande d'adoption plénière de l'enfant par l'époux du père (CA Douai, 14 novembre 2019, n° 19/02078 N° Lexbase : A3467ZY3). Les époux se pourvoient en cassation.

Décision. La première chambre civile de la Cour de cassation considère qu'il résulte des articles 16-7 (N° Lexbase : L1695ABE), 353, alinéa 1 (N° Lexbase : L5349LTB), 345-1, 1° (N° Lexbase : L8008IWI), et 47 (N° Lexbase : L1215HWW) du Code civil que le droit français n'interdit pas le prononcé de l'adoption, par l'époux du père, de l'enfant né à l'étranger de cette procréation lorsque le droit étranger autorise la convention de gestation pour autrui et que l'acte de naissance de l'enfant, qui ne fait mention que d'un parent, a été dressé conformément à la législation étrangère, en l'absence de tout élément de fraude.

Pour rejeter la demande d'adoption plénière, la cour d'appel avait retenu que l’absence de production de la convention de gestation pour autrui ne permettait pas d'appréhender les modalités selon lesquelles la femme ayant accouché de l'enfant aurait renoncé de manière définitive à l'établissement de la filiation maternelle et qu'il en était de même du consentement de cette femme à l'adoption de l'enfant, par le mari du père. Elle ajoutait que, dans ces conditions, il ne pouvait être conclu que l'adoption sollicitée, exclusivement en la forme plénière et avec les effets définitifs qui s'attachent à cette dernière, soit conforme à l'intérêt de l'enfant, qui ne peut s'apprécier qu'au vu d'éléments biographiques suffisants.

La première chambre civile de la Cour de cassation considère, qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à justifier, en l'absence de lien de filiation établi avec la femme ayant donné naissance à l'enfant et de tout élément de fraude quant aux droits de celle-ci, un refus de l'adoption plénière fondé sur l'intérêt de l’enfant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés.

 Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La gestation ou maternité pour autrui, in La filiation, (dir. A. Gouttenoire), Lexbase (N° Lexbase : E4415EY8).

 

newsid:478374

Habitat-Logement

[Brèves] Évaluation du coût de la reconstruction d’un immeuble frappé d’une situation d'insalubrité irrémédiable

Réf. : CE 5° et 6° ch.-r., 16 juillet 2021, n° 450188, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A11544ZR)

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par Yann Le Foll

Le 20 Juillet 2021

► Le coût de la reconstruction d’un immeuble frappé d’une situation d'insalubrité irrémédiable doit être apprécié en y incorporant le coût de démolition de l'immeuble concerné.

Principe. Le quatrième alinéa de l'article L. 1331-26 du Code de la santé publique (N° Lexbase : L5356IMC), dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2005-1566 du 15 décembre 2005 (N° Lexbase : L5276HDR), permet à l'autorité compétente de caractériser d'irrémédiable l'insalubrité d'un immeuble et de prononcer, par suite, l'interdiction définitive de l'habiter ainsi que, le cas échéant, de l'utiliser et l'obligation de le détruire.

Il prévoit, comme l'une des deux conditions alternatives du caractère irrémédiable de l'insalubrité, la circonstance que les travaux nécessaires à la résorption de l'insalubrité de l'immeuble présentent un coût plus élevé que celui de la reconstruction du même immeuble (CE 4° et 5° s-s-r., 20 mars 2015, n° 371895, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A1296NEQ). Pour son application, le coût de reconstruction de l'immeuble doit être apprécié en y incorporant le coût de démolition de l'immeuble concerné.

Application/solution. La requérante n'est donc pas fondée à soutenir qu'en raison de ce qu'elles n'incluent pas le coût de la démolition de l'immeuble dans le coût de reconstruction dont la comparaison avec le coût de résorption de l'insalubrité permet de caractériser une situation d'insalubrité irrémédiable, les dispositions contestées du quatrième alinéa de l'article L. 1331-26 du Code de la santé publique portent une atteinte injustifiée et disproportionnée au droit de propriété garanti par les articles 2 (N° Lexbase : L1366A9H), 4 (N° Lexbase : L1368A9K) et 17 (N° Lexbase : L1364A9E) de la DDHC du 26 août 1789.

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Procédure pénale/Détention provisoire

[Brèves] Information du mis en examen devant le JLD : incidence du défaut de notification du droit à bénéficier d’un délai pour préparer sa défense

Réf. : Cass. crim., 28 juillet 2021, n° 21-83.005, F-B (N° Lexbase : A62364ZY)

Lecture: 3 min

N8527BYH

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Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/70461323-edition-du-06082021#article-478527
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par Adélaïde Léon

Le 21 Septembre 2021

► L’absence de notification au mis en examen de son droit à bénéficier d’un délai pour préparer sa défense ne doit pas obligatoirement figurer dans le procès-verbal du débat contradictoire devant le JLD ; l’absence d’une telle mention doit certes conduire à considérer que l’information n’a pas été délivrée ; toutefois, il ne résulte de nullité du défaut de mention qu’en cas de démonstration d’un grief.

Rappel des faits. Une information a été ouverte et un individu a été mis en examen des chefs de viols et agressions sexuelles. Présenté au juge des libertés et de la détention (JLD), il a été placé en détention provisoire puis a interjeté appel de cette décision estimant que le défaut de notification de son droit à bénéficier d’un délai pour préparer sa défense avait porté atteinte à ses intérêts et justifiait l’annulation du débat contradictoire et de l’ordonnance de placement en détention.

En cause d’appel. La chambre de l’instruction a confirmé l’ordonnance de placement en détention provisoire du JLD. La juridiction d’appel rejette le moyen de nullité soulevé par l’intéressé au motif qu’il était assisté d’un avocat qui avait eu le temps de s’entretenir avec son client avant le débat contradictoire, qui a pu présenter ses arguments au cours de ce débat et qui n’a pas sollicité de délai pour préparer la défense de son client.

Le mis en examen a formé un pourvoi.

Décision. La Cour de cassation rejette le pourvoi au visa de l’article 145, alinéa 4, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L2791KGH), lequel prévoit la formalité substantielle de l’information du mis en examen de son droit à solliciter un délai pour préparer sa défense.

La Chambre criminelle précise tout d’abord que ces dispositions n’imposent pas que la mention de cette formalité soit portée au procès-verbal de débat contradictoire. Toutefois, la Cour précise que l’absence d’une telle mention doit conduire à considérer que l’information n’a pas été délivrée.

Enfin, la Chambre criminelle conclut en précisant qu’il ne résulte de nullité du défaut de mention qu’en cas de démonstration d’un grief.

En l’espèce, le demandeur a été assisté par un avocat choisi devant le JLD, lequel a pu s’entretenir avec son client, prendre connaissance du dossier et a été mis en mesure d’apprécier l’opportunité de solliciter un délai pour préparer la défense de son client. Selon la Cour, l’existence d’un grief n’est donc pas démontrée.

Pour aller plus loin : v. N. Catelan, ÉTUDE : Les mesures de contrainte au cours de l’instruction, Les étapes du placement en détention provisoire, in Procédure pénale, (dir. J.-B. Perrier), Lexbase (N° Lexbase : E4181Z9Q).

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