Le Quotidien du 19 août 2021

Le Quotidien

Collectivités territoriales

[Focus] Les modalités de contestation d’un arrêté municipal

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par Max Boiron Bertrand, Avocat au barreau de Lyon

Le 19 Juillet 2021

 


Mots clés : pouvoirs de police • contestation • arrêtés municipaux

Les maires des communes littorales sont amenés, surtout pendant la période estivale qui entraîne un afflux de touristes, à réglementer les activités des entreprises de loisirs profitant de cette manne tout en participant à l'animation des centres-villes et des bords de plages. Cet encadrement implique nécessairement une restriction du champ d'action de ces entreprises, lesquelles peuvent être amenées à contester les décisions de l'édile qu'elles trouveraient injustifiées.


 

Durant la période estivale, on peut assister à une singulière migration depuis près d’un siècle. Les villes des côtes françaises se remplissent de ces vacanciers qui viennent s’y délasser. L’espace de quelques semaines où « le temps dure longtemps », la vie locale change.

Dans ce contexte particulier, les maires des communes touristiques sont en première ligne pour canaliser l’afflux massif d’une population pérégrine. Ils sont alors souvent amenés à encadrer un peu plus strictement le quotidien en prévoyant des règles spécifiques concernant le bruit, les tenues vestimentaires, la pratique de certains loisirs, etc. Ils disposent à cette fin d’un pouvoir de police administrative qui leur permet de prendre de nombreuses mesures destinées à prévenir toute atteinte (à l’ordre public, à la sécurité, à la salubrité). L’édiction de ces mesures crée régulièrement des polémiques saisonnières : on se souvient notamment des arrêtés « anti-burkinis » [1] ou encore des récurrents arrêtés « anti-mendicité » [2]. Plus localement, certaines décisions encadrant la pratique de loisirs, en particulier sur les plages, peuvent également générer certains remous.

On peut ainsi relever une récente décision prise par le maire de la commune de La Tremblade (Charente-Maritime) pour interdire la pratique des « activités cyclables » (sic) sur les plages de la commune. Cet arrêté du 14 juin 2021 est notamment justifié, selon l’édile, par la dangerosité que représente la circulation des vélos sur les plages, et plus particulièrement les « fatbike » (vélos aux pneus plus épais permettant de rouler sur le sable et pouvant être équipés d’une assistance électrique).

Une entreprise locale de location de vélos s’estime particulièrement touchée par cette décision, dans la mesure où les vélos qu’elle loue sont essentiellement destinés à rouler sur le sable. Comme beaucoup d’entreprises mises en difficulté par des restrictions estivales, elle pourrait s’interroger sur la légalité de l’arrêté litigieux (I), et même envisager une ou plusieurs actions contentieuses (II).

I. La légalité des mesures de police

Il convient tout d’abord d’identifier clairement la nature de l’acte en cause, afin de pouvoir lui faire correspondre un régime juridique. Ensuite, il s’agira d’analyser les conditions de légalité d’un tel acte, qui se décomposent classiquement en deux volets : sa légalité externe et sa légalité interne.

A. L'identification préliminaire de la nature de l’acte en cause

Avant d’entrer dans l’analyse à proprement parler de l’arrêté en question, il convient de le qualifier avec justesse. En effet, les actes de police administrative obéissent à un régime particulier. L’arrêté en cause semble pouvoir concilier deux objectifs : d’une part, la préservation des dunes, de la faune et de la flore du milieu dunaire, et d’autre part, la prévention de toute atteinte à la sécurité et la tranquillité publique. On pourrait alors se demander si cette décision constitue un simple acte de préservation d’un bien du domaine communal (les dunes), ou bien un acte de police. Dans le cas d’espèce, bien que le maire invoque la « nécessité de protéger le littoral » et la faune et la flore dunaire, il souligne que cet arrêté a été pris dans le but « d’assurer la sécurité des différents usagers de la mer et des lieux de baignade ». La préservation du milieu dunaire et de son biotope apparaît donc secondaire : le principal objet de cette décision est d’encadrer la pratique d’activités cyclables dans certains secteurs, notamment en période d’affluence. La décision litigieuse semble donc constituer, non pas un simple acte de gestion du domaine communal, mais bien une mesure de police [3]. À ce titre, elle est soumise à certaines conditions de légalité.

B. La légalité externe de la mesure de police : la compétence de son auteur, sa forme et la procédure préalable

Les mesures de police sont des actes administratifs qui doivent respecter certaines conditions de légalité qui tiennent non pas au contenu de l’acte, mais aux conditions de sa formation, à savoir la compétence de son auteur, sa forme et la procédure qui doit être suivie préalablement à leur édiction. En général, les questions de la compétence de l’auteur de la mesure et de la procédure qui a mené à sa formation posent peu de problèmes. La forme de l’acte peut en revanche être plus facilement critiquée.

1) Sur les questions de la compétence de l’auteur de l’acte et de la procédure menant à sa formation

En premier lieu, maire détient de nombreuses compétences en tant qu’autorité de police administrative. Il tire l’essentiel de ses pouvoirs du Code général des collectivités territoriales, et notamment de ses articles L. 2212-2 (N° Lexbase : L0892I78) et suivants. Sa compétence est limitée par celle des autres autorités de police : un certain domaine peut lui échapper car il est matériellement attribué à une autre autorité (par exemple, les conditions d’utilisation du glyphosate [4]), ou parce que sa compétence rencontre ses limites géographiques (un maire n’est en principe pas compétent sur le territoire d’une autre commune). Plusieurs édiles de communes limitrophes peuvent tout à fait harmoniser les mesures qu’ils prennent, notamment pour la règlementation de la circulation [5]. Ce point pose en général peu de difficultés.

En second lieu, il arrive qu’avant de prendre certains actes de police, l’autorité compétente doive suivre une certaine procédure prévue par les textes. Par exemple, la dissolution d’une association de supporters nécessite la saisine d’une commission spécifique pour avis [6]. Ce cas de figure est assez rare et bien souvent, le maire n’a pas à suivre de procédure particulière préalablement à l’édiction d’un arrêté. Dans l’hypothèse où la décision qu’il prend n’est pas une décision individuelle (qui concerne une personne en particulier) mais qu’elle est une décision règlementaire (comme c’est le cas en l’espèce), le maire n’est notamment pas soumis au respect du contradictoire [7].

En ce qui concerne l’arrêté étudié qui règlemente l’usage des vélos sur le territoire de la commune de La Tremblade, la compétence de l’auteur ne semble poser aucun problème. Cet arrêté est en effet signé du maire qui, a priori, dispose bien de la compétence nécessaire à la prise d’une telle décision. Il ne semble pas qu’une procédure particulière aurait dû être suivie préalablement à la décision du maire de la commune.

2) Sur la motivation de l’arrêté

Le Code des relations entre le public et l’administration pose une obligation de motivation des décisions individuelles défavorables dont font partie les mesures de police[8]. À ce titre, l’administration doit mettre l’intéressé à même de comprendre les raisons de fait et de droit qui fondent sa décision. En revanche, sans texte spécifique l’imposant, les décisions règlementaires ne sont en principe pas concernées par l’obligation de motivation. Seules quelques exceptions sont concernées, telles que les mesures de police de la circulation et du stationnement.

L’article L. 2213-4 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L3143LUX) prévoit notamment que « le maire peut, par arrêté motivé, interdire l'accès […] de certains secteurs de la commune aux véhicules dont la circulation […] dans ces secteurs est de nature à compromettre soit la tranquillité publique, […] soit la protection des espèces animales ou végétales, soit la protection des espaces naturels ». Il impose donc une obligation de motivation au maire qui réglemente l’accès de certains secteurs aux véhicules. La cour administrative d’appel de Versailles a rendu un arrêt intéressant à ce sujet, dans lequel elle a jugé qu’un arrêté municipal était insuffisamment motivé car ses dispositions « visent le Code général de collectivités territoriales [a priori sans viser spécifiquement les articles concernés] et si le maire a mentionné qu'il y avait lieu de modifier la réglementation de la circulation automobile » [9].

En l’espèce, l’arrêté du maire de La Tremblade semble au moins pour partie soumis à une obligation de motivation, en ce qu’il prohibe l’accès de certains secteurs aux véhicules [10]. La décision litigieuse fait référence assurément aux considérations de fait qui ont motivé cette décision. Elle pourrait donc sembler motivée en fait, bien qu’il ne soit pas clairement expliqué dans quelle mesure les activités interdites portent atteinte à la sécurité des usagers. En revanche, l’arrêté en question ne fait pas référence au Code pénal et au Code général des collectivités territoriales dans ses visas. On peut donc s’interroger sérieusement sur le caractère suffisant de la motivation de cette décision. Si la jurisprudence n’est pas absolument tranchée sur ce point, on retrouve toutefois des arrêts qui ont censuré des décisions administratives qui ne faisaient référence qu’à une législation en général, sans indiquer les dispositions qui étaient appliquées [11]. La motivation de l’arrêté litigieux semble donc critiquable sur ce point.

C. La légalité interne de la mesure de police : son contenu

Il convient d’envisager les principales critiques qui peuvent être formulées contre des décisions de police administrative qui ont pour objet l’encadrement de la pratique d’une activité sur le territoire d’une commune. Il s’agira notamment du détournement de pouvoir, de l’erreur dans la qualification matérielle des faits et de la disproportion de la mesure.

Tout d’abord, le maire ne peut faire usage de ses pouvoirs de police dans un but autre que celui dans lequel ils lui ont été conférés : le cas échéant, son acte serait entaché d’un détournement de pouvoir. À titre d’exemple, le juge a déjà sanctionné un arrêté restreignant le commerce ambulant qui était en fait motivé par la volonté de protéger les commerçants de la localité [12]. Un tel vice est en général difficile à prouver (a fortiori quand on entend soutenir que l’administration a « déguisé » sa décision pour lui donner une apparence de légalité, en cachant sa volonté réelle qui serait moins avouable).

Ensuite, l’administration ne doit naturellement pas avoir commis d’erreur dans la qualification matérielle des faits. Ainsi, est illégal l’arrêté d’un maire qui interdit le stationnement dans une partie de la chaussée sur sa commune en se fondant sur la nécessité, d'une part, d'assurer le bon ordre et de prévenir tout accident et, d'autre part, de préserver le caractère environnemental du site, alors que le stationnement de véhicules ne présente aucune gêne, aucun danger, ou aucune menace pour l’environnement [13].

Enfin, une mesure de police restreint la liberté. Partant, elle doit être « adaptée, nécessaire et proportionnée » [14] pour assurer l’objectif de maintien de l’ordre public. Au titre de la proportionnalité, la mesure de police ne doit pas créer d’interdiction générale et absolue et être adaptée au but poursuivi. Une mesure disproportionnée par rapport à l’objectif poursuivi pourra être annulée. À titre d’exemple, le juge administratif a annulé une décision de maintien de barrières métalliques au milieu d’une rue, dont la manipulation est difficile pour laisser les riverains accéder à leur propriété, en jugeant que cette mesure est disproportionnée par rapport à l’objectif poursuivi [15]. Au contraire, il a estimé qu’un arrêté par lequel le maire d’une commune a interdit la pratique de randonnées équestres sur une partie des plages de sa commune n’était pas disproportionné au regard de l’objectif de sécurité et de tranquillité poursuivi. Il a estimé que cette décision ne portait pas une atteinte excessive au principe de liberté de commerce et d’industrie [16].

En l’espèce, la légalité interne de l’arrêté municipal en question pourrait être discutée.

1. Il n’apparaît pas pertinent de se prononcer sur un éventuel détournement dont serait entachée une décision administrative en la commentant ex nihilo ;

2. Au titre de l’erreur dans la qualification matérielle des faits, on pourrait certainement discuter la réalité de l’existence de risques pour la faune et la flore du milieu dunaire induits par la pratique du vélo ou de la trottinette. De prime abord, ces activités n’apparaissent en effet pas en elles-mêmes représenter un danger. Au demeurant, l’arrêté litigieux indique que « le piétinement déstabilise le sable et détruit la végétation », ce qui semble dénué de lien avec les « activités cyclables » (sauf à considérer que les cyclistes descendent les dunes en vélo, et les remontent en piétinant le sable).

3. Le point central de la discussion de la légalité de cet arrêté serait probablement la proportionnalité des mesures qu’il contient. En effet, on pourrait relever pêle-mêle que :

- cet arrêté prévoit une interdiction générale d’accès et de circulation sur les dunes et ses abords (qui ne sont, au demeurant, imprécisément définis [17]) ;

- que les secteurs dont l’accès est restreint sont également imprécisément définis [18] ;

- que les mesures prises sont disproportionnées, en ce qu’elles concernent de nombreux moyens de déplacement (pas uniquement ceux qui permettent de se déplacer sur l’estran), et que d’autres mesures moins restrictives étaient peut-être à envisager.

Ces arguments pourraient servir de base à une ou plusieurs actions contentieuses.

II. Les actions contentieuses envisageables

Une personne qui est affectée par une mesure de police peut envisager de la contester pour obtenir sa disparition.

Tout d’abord, elle peut demander à l’administration de retirer ou d’abroger son acte. Si le maire retire ou abroge un acte règlementaire illégal, rien ne l’empêche en principe de prendre un nouvel acte purgé de toute illégalité. Ce type de démarche peut permettre d’obtenir des résultats rapides et très satisfaisants s’il existe un excellent contact entre les élus et les demandeurs. En revanche, son issue est incertaine et il apparaît souvent préférable de privilégier la voie contentieuse, qui peut être plus rapide et qui est mieux cadrée.

Ainsi, il convient envisager l’introduction d’un ou plusieurs recours contentieux contre cette décision.

En premier lieu, la procédure contentieuse « normale » est le recours en annulation qui permet d’obtenir la disparition rétroactive de la décision visée (son annulation juridictionnelle). Un recours doit être introduit dans un délai de deux mois suivant la publication de l’arrêté en cause. Cette procédure appelée procédure « au fond » est assez longue : l’audience n’intervient en général pas avant au moins un an, et durant ce délai, la décision litigieuse continue à produire ses effets.

En deuxième lieu, il apparaît souvent nécessaire d’introduire un recours d’urgence en parallèle : il s’agit des référés. Deux procédures sont à envisager (de façon alternative ou conjointe) : le « référé-suspension » et le « référé-liberté ». Ces deux recours peuvent permettre d’obtenir la suspension de la décision litigieuse (elle ne produit plus d’effets jusqu’à l’intervention du jugement du recours en annulation). Il faut pouvoir démontrer l’existence d’une urgence pour que le juge ordonne la suspension de la décision (ou toute autre mesure, pour le « référé-liberté »). En référé-suspension, le juge suspendra la mesure contestée s’il existe un « doute sérieux » quant à la légalité de la décision contestée. En référé-liberté, il pourra ordonner sa suspension si elle porte une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, comme la liberté du commerce et de l’industrie [19]. Le référé-suspension est en général audiencé sous deux ou trois semaines quand, en référé-liberté, le juge se prononce sous 48 heures.

En troisième lieu, l’édiction d’une mesure de police peut engager la responsabilité de l’administration. Tout d’abord, si sa décision est illégale, il pourra être retenu qu’elle a commis une faute. Une personne qui a subi un préjudice du fait de l’illégalité fautive d’une mesure de police administrative pourra alors demander l’indemnisation de son préjudice. Une personne qui a subi un préjudice anormal et spécial du fait d’une mesure de police légale pourra également chercher à obtenir l’indemnisation de ses préjudices sur le fondement de la responsabilité sans faute. Par exemple, l’interdiction de circulation de certains véhicules ayant entrainé le tarissement de la clientèle d’un relais routier a justifié l’indemnisation de son exploitant [20].

En l’espèce, le maire de la commune de La Tremblade a pris un arrêté qui règlemente la pratique des « activités cyclables » sur les plages de la commune (et interdit l’accès et la circulation sur les dunes et leurs abords). Cet arrêté semble porter préjudice à un loueur de vélo installé sur le territoire de la commune.

Ce dernier, s’il estime que la mesure de police litigieuse est illégale, peut en demander l’abrogation ou le retrait au maire. Cette démarche présentant certaines limites (et le maire ne semblant pas disposé à faire droit à sa demande), il semble préférable pour lui d’attaquer directement cet arrêté devant le tribunal administratif de Poitiers. Le délai de recours contentieux est de deux mois à compter de la publication de la décision litigieuse. L’arrêté en question ayant été affiché le 16 juin 2021, le loueur pourrait donc introduire un recours en annulation jusqu’au 17 août 2021. Il ne lui est toutefois pas conseillé d’attendre l’échéance de la fin du délai de recours contentieux s’il souhaite obtenir la censure de cette décision au plus vite. S’il souhaite sauver une partie du chiffre d’affaires de sa saison estivale, il devra a priori doubler son recours en annulation d’un référé. Suivant l’urgence de sa situation et l’issue d’une première analyse de la légalité de la décision, il lui sera conseillé d’introduire un référé-suspension ou un référé-liberté. Il faudra, dans ce cadre, qu’il démontre au moins l’existence d’un doute sérieux quant à la légalité de la décision litigieuse (en référé liberté). Son argumentation devra être particulièrement poussée sur la légalité interne de la décision (proportionnalité et exactitude matérielle des faits). En effet, si la décision est suspendue pour une question de légalité externe – par exemple, ici, la motivation de l’arrêté litigieux semble discutable – l’administration pourra toujours retirer sa décision et en prendre une nouvelle.

Illustration de la procédure contentieuse

 

[1] CE, référé, 26 août 2016, n° 402742, 402777 (N° Lexbase : A6904RYD).

[2] Voir notamment CE, 9 juillet 2003, n° 229618, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A1932C9G).

[3] Voir en ce sens, CE, 11 décembre 2008, n° 307084 (N° Lexbase : A7041EBE), sur l’interdiction de la pratique de sports en eaux vives sur certaines parcelles du domaines communal, prise pour le maintien de la tranquillité publique

[4] CE, 31 décembre 2020, n° 439253, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A35294BC).

[5] Voir par exemple CAA Nantes, 8 décembre 2017, n° 16NT00395 (N° Lexbase : A1853W7R), concernant des arrêtés du maire du Mont-Saint-Michel réglementant la circulation et le stationnement dans l'agglomération, sur la digue-route, le pont-passerelle et l'esplanade.

[6] C. sport, art. L. 332-18 (N° Lexbase : L7805LPR) et R. 332-10 (N° Lexbase : L8544HZH).

[7] Voir CAA Lyon, 27 mai 2021, n° 19LY01149 (N° Lexbase : A87134WM), concernant un arrêté interdisant le stationnement de véhicules sur certaines parcelles.

[8] CRPA, art. L. 211-2 (N° Lexbase : L1815KNK).

[9] CAA Versailles, 25 novembre 2004, n° 02VE00419 (N° Lexbase : A7991D9T).

[10] Il pourra exister une réelle interrogation sur la notion de véhicule, et de l’application de la notion de piéton entendue selon les dispositions du II de l’article R. 412-34 du Code de la route (N° Lexbase : L0795LTM).

[11] En creux, l’arrêt de la CAA de Versailles précité semble aller dans ce sens. Voir aussi CAA Lyon, 1er mars 1994, n° 93LY01724 (N° Lexbase : A8448BEM) ; CAA Nancy, 26 juin 2008, n° 07NC01185 (N° Lexbase : A7991D9T) ; CAA Paris, 12 mars 2008, n° 07PA02091 (N° Lexbase : A4781D8L).

[12] CE, 25 janvier 1991, n° 80969, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A0953AI7).

[13] CAA Douai, 6 mai 2014, n° 13DA00855 (N° Lexbase : A1584MPD).

[14] CE Ass., 26 octobre 2011, n° 317827, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A0171HZD).

[15] CAA Nantes, 19 octobre 2018, n° 17NT02592 (N° Lexbase : A5946YHP).

[16] CE, 31 mars 1999, n° 160880 (N° Lexbase : A4487AXH).

[17] Voir, sur l’imprécision de définition temporelle d’une mesure, CAA Marseille, 21 février 2005, n° 02MA00879 (N° Lexbase : A2324DHK), et sur l’imprécision géographique CAA Nantes, 8 février 2017, n° 15NT01606 (N° Lexbase : A2611TCP).

[18] Voir CAA Nancy, 25 avril 2002, n° 98NC02344 (N° Lexbase : A5375BMZ).

[19] Voir CE, 16 février 2021, n° 449605 (N° Lexbase : A18374HI).

[20] CE, 13 mai 1987, n° 50876, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A3731APU).

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Environnement

[Brèves] JO 2024 : la construction du village des médias finalement validée

Réf. : CAA Paris, 1ère ch., 8 juillet 2021, n° 21PA00909 (N° Lexbase : A05044ZP) et n° 20PA04255 (N° Lexbase : A04974ZG)

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par Yann Le Foll

Le 20 Juillet 2021

► L’arrêté préfectoral autorisant l’aménagement de la zone d’aménagement concerté du « cluster des médias » dans le cadre des Jeux Olympiques de Paris 2024 valant dérogation à l’interdiction de porter atteinte à des espèces protégées est légal, car la preuve de l’absence d’alternative satisfaisante au projet autorisé est suffisamment apportée.

Faits. À la suite de la requête déposée par plusieurs associations et par des riverains, le juge des référés de la cour administrative d’appel de Paris avait, par une ordonnance rendue le 6 avril 2021, suspendu l’exécution de l’arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 12 novembre 2020 autorisant l’aménagement de la zone d’aménagement concerté du « cluster des médias » par l’établissement public Société de livraison des ouvrages olympiques (SOLIDEO) sur les communes du Bourget, de Dugny et de La Courneuve, en tant que l’autorisation accordée valait dérogation à l’interdiction de porter atteinte à des espèces protégées prévue au 4° de l’article L. 411-2 du Code de l’environnement (N° Lexbase : L7818K9G).

Rappel. L’article L. 411-1 du Code de l’environnement (N° Lexbase : L7924K9D) prévoit, en effet, que, lorsque la préservation du patrimoine naturel justifie la conservation d’espèces animales ou végétales et de leurs habitats, sont, entre autres, interdites la destruction ou la perturbation d’animaux de ces espèces. Toutefois, dans une telle hypothèse, l’article L. 411-2 prévoit la possibilité de dérogation à ces interdictions, à condition, notamment, qu’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante et que ces dérogations ne nuisent pas au maintien dans un état de conservation favorable des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle (pour la construction d’un parc éolien au sein de la forêt de Lanouée dans le Morbihan, CE 5° et 6° ch.-r., 15 avril 2021, n° 430500, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A55274PE ; voir pour une décision inverse concernant le CDG Express, TA Montreuil, 9 novembre 2020, n° 1906180 N° Lexbase : A068134Y). 

Au cas présent, la dérogation en cause portait sur la destruction d’individus de 4 espèces animales protégées, de sites de reproduction ou d’aires de repos de 23 espèces et la perturbation de spécimens de 35 espèces. Le juge des référés, après avoir considéré que l’urgence à suspendre l’autorisation de dérogation était établie, avait jugé qu’en l’état du dossier qui lui était soumis, il existait un doute sérieux sur la légalité de la dérogation accordée en raison, sur la forme, d’une insuffisance de motivation quant à la justification de l’absence d’alternative satisfaisante au choix du lieu d’implantation du projet et également, au fond, du fait que l’absence d’une telle solution alternative n’était pas établie. Le juge des référés avait, en conséquence, prononcé, à titre provisoire, la suspension de l’exécution de l’arrêté attaqué.

Décision CAA. La cour administrative d’appel a notamment jugé, s’agissant de la dérogation accordée par le préfet au titre des dispositions de l’article L. 411-2 du Code de l’environnement, que, compte tenu des éléments portés à sa connaissance dans le cadre de l’instruction de la demande au fond, la preuve de l’absence d’alternative satisfaisante au projet autorisé était suffisamment apportée.

Elle a considéré que le choix d’implantation de la zone d’aménagement concerté du village des médias avait été fait pour répondre à une double temporalité, l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de 2024 et l’héritage de ces jeux, dont les équipements doivent s’inscrire dans un projet de territoire. Plusieurs sites avaient, à cette fin, été étudiés et celui de Dugny/Le Bourget a été retenu en raison de l’existence d’un projet de création d’un nouveau quartier pouvant être utilisé temporairement comme lieu d’hébergement dans le cadre du village des médias et de surfaces disponibles pour l’implantation de sites pour les épreuves sportives.

Ce choix a été guidé par les impératifs de proximité et de compacité entre les différents sites olympiques. En effet, le village des médias a été implanté à proximité des différents sites de compétition et du village des athlètes situé à Saint-Denis/Saint-Ouen et, surtout, à moins d’un kilomètre à pied du Parc des expositions de Paris-Le Bourget, qui doit, conformément à une décision prise dans le cadre de la candidature de la ville de Paris, accueillir le centre principal des médias durant les compétitions, alors que les capacités hôtelières à proximité de ce site sont insuffisantes (lire A. de Prémorel, Une pierre de plus à la construction de la jurisprudence du Conseil d’État sur les dérogations espèces protégées, Lexbase Public n° 626, 2011 N° Lexbase : N7515BYY).

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Fiscalité internationale

[Focus] Article 57 du CGI – Prix de transfert : attention au fichier local !

Lecture: 16 min

N6712BYA

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par Clément Thomas, Doctorant en fiscalité internationale et européenne a l’université Aix - Marseille et Consultant en fiscalité

Le 20 Juillet 2021


Mots-clés : prix de transfert • entreprises • bénéfices • fichier local 

Selon la définition de l'Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE), les prix de transfert sont les « prix auxquels une entreprise transfère des biens corporels, des actifs incorporels, ou rend des services à des entreprises associées ». Les prix de transfert figurent au premier plan des sujets de fiscalité internationale. 

L'étude ci-dessous portera sur méthodologie applicable à ce dispositif. 


 

Il est nécessaire de partir du constat que chaque juridiction a une fiscalité différente. Ainsi, un groupe de sociétés peut avoir intérêt à diminuer son bénéfice dans les pays à fiscalité élevée dans lesquels il est présent, pour l’augmenter mécaniquement dans d’autres États où la pression fiscale est moins forte. Le résultat net du groupe après impôt est ainsi augmenté et le groupe dispose donc de davantage de ressources financières pour de nouveaux investissements ou pour servir un dividende plus élevé à ses actionnaires.

La difficulté étant qu’entre entreprises associées, la pression du marché n’existe a priori pas. Tout du moins, bon nombre de groupes d’entreprises tentent de neutraliser les effets néfastes de celui-ci par l’intermédiaire de prix de transfert. Ces derniers qui ont tendance à s’éloigner très largement de ceux pratiqués entre sociétés dites « indépendantes ». S’ils peuvent dans certains cas être utilisés pour soutenir une société du groupe en difficulté, dans de très nombreux cas ces prix sont un moyen de réduire à peau de chagrin l’impôt initialement dû par le groupe. Ce qui n’est pas sans impact budgétaire pour les juridictions dites « victimes ».

Cette problématique des prix de transfert est l’un des sujets d’actualité les plus évoqués en matière de fiscalité internationale. Néanmoins, il demeure l’un des plus opaques en raison de sa complexité technique. En effet, bien que rattaché au droit fiscal, cette pratique relève tantôt du droit tantôt de l’économie. De ce fait, aborder ce contentieux suppose au fiscaliste de faire preuve d’une certaine ouverture d’esprit pour aborder la question de son contentieux. Nombreux sont les articles qui citent les diverses pratiques en cause, les méthodes de détermination des prix de transfert, etc.
Toutefois, peu d’articles abordent cette thématique sous l’angle « méthodologique ». Or, si le fond est d’une importance capitale, la forme, demeure la pierre angulaire de ce contentieux. Ainsi, se pose les questions suivantes : Comment s’y prendre, par où commencer et surtout quel est le document sur lequel porte l’essentiel du contentieux ? Cette étude tentera de répondre de la meilleure des manières à l’étude pratique des prix de transfert.

Tout d’abord, il est nécessaire de rappeler que dans le cas français, les moyens de contrôle fiscal ont pour base l’article 57 du Code général des impôts (ci-après CGI) (N° Lexbase : L9738I33), article qui vise principalement à protéger la juridiction française contre les pertes de recettes pouvant résulter de la mise en œuvre de stratégies de localisation des bénéfices.

Ce n’est qu’après la vérification des conditions de fond que le législateur a doté, à travers l’article L. 13 B du Livre des procédures fiscales (ci-après LPF) (N° Lexbase : L3165LC9) l’administration fiscale du pouvoir d’exiger des entreprises, dans le cadre d’une vérification de comptabilité et suivant une procédure spécifique, des éléments d’information sur les conditions de détermination des prix de transfert pratiqués.

Alors qu’elle n’est qu’une suggestion audit article, la constitution, par les sociétés françaises, d’une documentation générale couvrant les transactions réalisées avec des entreprises étrangères a été érigée en obligation à l’article L. 13 AA du LPF (N° Lexbase : L9494LH4) pour les plus grandes entreprises par la loi de rectificative pour 2010 [1]. Documentation obligatoire refondue dans le cadre de la loi de finances pour 2018 [2] afin de la mettre en conformité avec le standard international prévu par l’action 13 des travaux BEPS figurant en Annexe II au chapitre V des Principes de l’OCDE. La documentation doit être constituée de deux fichiers (LPF, art. R. 13 AA-1 N° Lexbase : L9529LK7) :

  • un fichier principal,
  • un fichier local

I - Le fichier principal ou « Master file »

Le fichier principal est un document permettant une vision d’ensemble du groupe, de ses activités, de sa politique globale en matière de prix de transfert et de répartition des bénéfices au niveau mondial. Ce document bien que nécessaire n’est que rarement sujet à contentieux. La raison étant qu’ici les informations évoquées ne sont que « descriptives » et ne concernent en rien les flux économiques effectués entre les diverses entités. Bien que générales, ces informations doivent néanmoins être évoquées et commentées par nos soins.

Au sein du fichier principal, doivent être mentionnées les 5 rubriques suivantes :

A - Structure organisationnelle : La description de la structure organisationnelle du groupe multinational comprend un schéma illustrant la structure juridique et capitalistique du groupe, ainsi que la situation géographique des entités opérationnelles de ce groupe. Bien que recommandée par nos soins, il n’est pas exigé de faire une étude approfondie. Pour ce faire, la mise en place de schémas est fortement appréciée.

B - Domaines d’activité du groupe : Cette rubrique se divise en plusieurs sous-rubriques.

Description des sources importantes de bénéfices du groupe (a) : il s’agit ici des activités réalisées par des entités du groupe et qui exercent une influence déterminante dans la réalisation des bénéfices. Il serait intéressant ici pour les conseils de faire une répartition précise du chiffre d’affaires de chacune des entités du groupe ainsi que des différents pôles concernés.

Description de la chaîne d’approvisionnement (b) : cela consiste à décrire les principales étapes qui conduisent à la commercialisation des biens et/ou services. Cela peut se matérialiser par l’intermédiaire de schémas voire de frise.

Mention des accords importants de prestations de services entre entreprises associées (c) : à ce titre doit être mentionnée la description des accords importants de prestations de services entre les entreprises associées du groupe [3], à l’exception des accords de recherche et développement. Cela peut se matérialiser librement. À titre d’exemple, voici le tableau que propose l’administration fiscale [4].

Objet de l'accord

Identité du prestataire (dénomination, État d'implantation)

Identité du/ des preneurs (dénomination et juridiction d'implantation)

Description générale de l'accord

Méthode de rémunération retenue (OCDE ou autres )

Description des principaux marchés géographiques sur lesquels les biens et services du groupe sont vendus (d) : il s’agit ici de décrire la répartition géographique des entités et de déterminer les revenus générés par chacune des filiales en cause.

Analyse fonctionnelle des principales entités du groupe (e) : cette analyse décrit les principales contributions des différentes entités du groupe à la création de valeur, c’est-à-dire les fonctions-clés exercées par les différents acteurs dans le processus de prix de transfert, les risques importants assumés par chacun des acteurs et les actifs importants utilisés [5]. Il sera nécessaire de déterminer précisément le rôle de chacun des acteurs. À savoir, qui endosse les risques, qui est le bénéficiaire. Cette analyse permet ainsi d’effectuer les ajustements nécessaires à la mise en œuvre des méthodes de comparaison avec le comportement de tiers sur le marché libre. Ainsi, une entité qui supporte des risques doit être davantage rémunérée que si elle n’en supporte pas. De nouveaux développements sur ces analyses ont été effectués par l’OCDE [6].

Description des opérations importantes de réorganisations d’entreprises (f) : il s’agit de la description des opérations importantes de réorganisations d’entreprises, ainsi que d’acquisitions et de cessions d’éléments d’actifs intervenues au cours de l’exercice. Les opérations devant être décrites sont celles qui correspondent aux opérations réalisées par des entreprises du groupe, indépendamment du fait qu’elles soient ou non en lien avec l’entreprise, et qui se sont traduites par des disparitions, des transferts ou des créations d’activité, ainsi que par des changements de statut juridique ou de fonction.

C - Actifs incorporels du groupe : cette catégorie comprend en elle-même 4 catégories :

Description générale de la stratégie du groupe en matière de mise au point, de propriété et d’exploitation des actifs incorporels (a) : cette description comporte notamment la localisation des principales installations de recherche et développement et de la direction effective de ces activités. En ce qui concerne la description de la stratégie du groupe, celle-ci doit notamment comprendre des renseignements sur :

les entités qui sont propriétaires des actifs incorporels et celles qui réalisent les travaux de développement; les entités qui exploitent les actifs incorporels dans le cadre de leur activité, en distinguant les entités qui perçoivent des revenus passifs afférents à ces actifs (redevances), de celles qui utilisent les incorporels pour la production d’un bien ou d’un service ; les activités qui sont réalisées au sein du groupe et celles qui sont sous-traitées auprès d’entreprises tierces ; les modes d’exploitation des actifs incorporels (exploitation en pleine propriété, concession de droits d’usage, etc.).

En ce qui concerne les installations de recherche, celles-ci correspondent aux unités opérationnelles de recherche et développement telles que les centres, laboratoires ou ateliers de recherche.

Liste des actifs incorporels ou des catégories d’actifs incorporels (b) : cette liste comprend les actifs incorporels ou les catégories d’actifs incorporels qui sont importants pour l’établissement des prix de transfert, ainsi que les entités qui en sont légalement propriétaires.

Liste des accords importants entre entreprises associées relatifs aux actifs incorporels (c) : cette liste mentionne les accords importants entre entreprises associées relatives aux actifs incorporels, y compris les accords de répartition de coûts, les principaux accords de services de recherche et les accords de licence.

Description des éventuels transferts importants d’actifs incorporels (d) : l’entreprise présente une description générale des éventuels transferts importants d’actifs incorporels entre entreprises associées en mentionnant les pays et les rémunérations correspondantes.

D - Activités financières interentreprises du groupe : il s’agit de la description générale de la façon dont le groupe est financé, y compris une description des accords de financement importants conclus avec des prêteurs indépendants du groupe (date, durée, conditions financières, etc.). En outre, doit être évoquée la politique du groupe en matière de prix de transfert.

E - Situation financière et fiscale du groupe : Il s’agit ici d’évoquer les états financiers consolidés annuels du groupe pour l’exercice fiscal considéré, lorsqu’ils sont préparés par ailleurs à des fins d’information financière, réglementaires, de gestion interne, fiscale ou autre ainsi que les décisions des autorités fiscales, c’est-à-dire les rulings et accords préalables en matière de prix de transfert unilatéraux conclus par le groupe.

Il est donc aisé de respecter cette obligation documentaire. À ce titre, il est important de mettre en lumière que l’essentiel du contentieux « prix de transfert » ne porte pas sur le fichier principal. La raison étant que les informations évoquées sont très générales et ne portent pas à proprement parler sur les flux « prix de transfert » effectués entre les diverses entités du groupe.

           

II - Le fichier local ou « Local file »          

L’administration fiscale si elle ne s’attarde que peu sur le fichier principal, elle demeure néanmoins très attentive au fichier local. Ce document demeure la pierre angulaire du contentieux prix de transfert. Il doit contenir des informations spécifiques, précises concernant les transactions contrôlées et les informations financières de l’entreprise en cause.

Le contenu du fichier local est prévu à articles L. 13 AA du LPF et  R. 13 AA-1 du LPF. Les informations peuvent être réparties en trois catégories :

A - Entité en France :

La rubrique « entité en France » comporte la description de la structure de gestion de l’entité locale, des activités exercées et de l’environnement concurrentiel. Cela suppose de dresser un organigramme précis de l’entité ainsi que des activités exercées au sein de celle-ci.

En outre, une description des activités effectuées et de la stratégie d’entreprise mise en œuvre est nécessaire. À ce titre, il peut être intéressant de fournir en annexe, les statuts de l’entreprise locale en cause.

Enfin, il sera apprécié de l’administration fiscale un développement sur la « concurrence » entre l’entité en cause et les autres acteurs du marché.

B - Transactions contrôlées :

C’est certainement le point le plus important et délicat de la documentation prix de transfert. C’est donc sur celui-ci que porte l’essentiel du contentieux « prix de transfert ». Très généralement, cette sous-rubrique comprend une description des transactions importantes avec des entreprises associées, les montants des paiements et des recettes intragroupes, l’identification des entreprises associées impliquées dans les transactions contrôlées, les accords interentreprises importants, une analyse de comparabilité et une analyse fonctionnelle, une indication de la méthode de détermination des prix de transfert utilisé. Les transactions concernées sont celles entre l’entreprise qui établit la documentation et une ou plusieurs entreprises associées et dont le montant, agrégé par catégorie, excède 100 000 euros au titre de l’exercice.

Afin de répondre aux attentes de l’administration fiscale, il convient d’évoquer avec précision les différents points suivants :

Description des transactions importantes avec des entreprises associées et des conditions dans lesquelles elles sont réalisées. La description des transactions comporte toutes les informations relatives aux types de biens ou de produits concernés, à leur montant, aux conditions de paiement, aux garanties, ainsi qu’à la rémunération d’intermédiaires éventuels.

Il est nécessaire de ventiler par nature (ventes, prestations de services, etc.) toutes les opérations concernées. Toutefois, cette description peut être réalisée par catégorie de transactions dès lors que les transactions au sein d’une catégorie portent sur les mêmes biens et services et sont effectuées dans les mêmes conditions.

Vous trouverez ci-joint l’exemple de tableau récapitulatif des opérations en cause [7].

Nature des transactions avec des entreprises associées

Biens ou services concernés par la transaction

Montant agrégé supérieur à
100 000 euros des transactions par nature

Juridiction concernée par le flux (selon norme ISO)

Conditions de réalisation des transactions

 

Les montants des paiements et recettes intragroupes. Il convient de mentionner les paiements réalisés pour chaque catégorie de transactions impliquant l’entreprise. Il est nécessaire de les ventiler en fonction de la juridiction fiscale du payeur ou du bénéficiaire étranger. Fiscalement, il est important que ces montants se traduisent par des produits, des charges, des augmentations ou des diminutions d’actifs.

Identification des entreprises associées. Il s’agit d’identifier les entreprises associées impliquées dans chaque catégorie de transactions contrôlées et de décrire les relations qu’elles entretiennent avec l’entreprise.

Mention des accords interentreprises. Il s’agit des accords dont l’exécution se traduit par des transactions entre entreprises associées et dont le montant agrégé par catégorie excède 100 000 euros au titre de l’exercice. Il est nécessaire que les conseils remettent en sus une copie de chacun des accords en cause.

Analyse de comparabilité et analyse fonctionnelle. Ces points sont capitaux dans l’édition de la documentation prix de transfert puisqu’il s’agit de la matérialisation et la justification des flux effectués entre les entités du groupe.

Ces analyses sont accompagnées d’autres informations tout aussi importantes lors de la remise de la documentation prix de transfert, à savoir :   

  • la méthode de détermination des prix de transfert la plus adaptée et les raisons pour lesquelles cette méthode a été retenue;
  • les hypothèses importantes retenues pour justifier les transactions en cause ;
  • l’analyse pluriannuelle où l’entreprise doit obligatoirement expliquer la façon dont les analyses ont été réalisées sur une période pluriannuelle afin de déterminer le prix des transactions contrôlées;
  • les comparables utilisés. Pour ce faire, il peut est judicieux d’utiliser un logiciel spécifique (lien) ou de faire appel à un spécialiste afin d’établir un document pertinent aux yeux de l’administration fiscale. Document que l’on appelle « Benchmark ».
  • le principe de pleine concurrence qui fait état d’une description par l’entreprise des raisons pour lesquelles il a été conclu que les prix des transactions avaient été établis conformément au principe de pleine concurrence en application de la méthode de prix de transfert retenue.
  • les informations financières qui une synthèse des informations financières utilisées pour appliquer la méthode de détermination des prix de transfert est effectuée par l’entreprise.

 

C - Les informations financières de l'entité en cause

Cette rubrique comprend les comptes financiers annuels de l’entreprise, ainsi que des informations et des tableaux de répartition indiquant comment les données financières utilisées pour appliquer la méthode des prix de transfert peuvent être reliées aux états financiers annuels.

Enfin l’entreprise doit tenir à la disposition de l’administration fiscale les décisions prises par les administrations étrangères de même nature que les interprétations, instructions et circulaire fournies par l’administration fiscale française. (LPF, art. L80. A N° Lexbase : L6958LLB), et fournir une copie des accords de fixation des prix de transfert unilatéraux, bilatéraux ou multilatéraux, ou autres décisions fiscales (rulings) liées à des transactions contrôlées avec l’entreprise.

Quels sont les risques en cas de non-respect de l’obligation documentaire?

Lorsque la documentation requise n’est pas mise à la disposition de l’administration fiscale l’engagement de la vérification de comptabilité, l’administration adresse à la personne morale concernée une mise en demeure de la produire ou de la compléter dans un délai de trente jours, ne précisant la nature des documents ou compléments attendus. L’entreprise peut solliciter une prorogation du délai de réponse qui dans tous les cas ne pourra excéder 2 mois.

Le défaut de réponse ou la réponse partielle à la mise en demeure entraine l’application de l’amende prévue à l’article 1735 ter du CGI (N° Lexbase : L3123I7S). Celle-ci peut atteindre, compte tenu de la gravité des manquements, le plus élevé des deux montants suivants :

  • 0,5 % du montant des transactions concernées par les documents ou compléments qui n’ont pas été mis à la disposition de l’Administration après mise en demeure ;
  • 5 % des rectifications du résultat fondées sur l’article 57 du CGI et afférentes aux transactions ci-dessus visées.

Le montant de l’amende ne peut être inférieur à 10 000 euros. Amende qui peut s’appliquer même si aucune rectification n’a été effectuée par le service.

 

[1] Loi n° 2009-1674, du 30 décembre 2009, de finances rectificative pour 2010 (N° Lexbase : L1817IGE).

[2] Loi n° 2017-1837, du 30 décembre 2017, de finances pour 2018, art. 107 (N° Lexbase : L7952LHY).

[3] Deux entreprises sont considérées comme associées lorsque :

  • l’une participe directement ou indirectement à la direction, au contrôle ou au capital de l’autre,
  • Ou que les mêmes personnes participent directement ou indirectement à la direction, au contrôle ou au capital d’une entreprise d’un État et d’une entreprise de l’autre État.

[4] BOI-BIC-BASE-80-10-40 (N° Lexbase : X3777BN9).

[5] Principes directeurs, n° 1.51.

[6] Principes directeurs, n° 1.56 à 1.106.

[7] BOI-BIC-BASE-80-10-40.

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