Le Quotidien du 19 février 2020

Le Quotidien

Avocats/Déontologie

[Brèves] Violation par le salarié d’un cabinet d’avocat du secret professionnel...

Réf. : CA Douai, 25 octobre 2019, n° 17/01455 (N° Lexbase : A40053AL).

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N2088BYY

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par Marie Le Guerroué

Le 13 Février 2020

► Seules sont couvertes par le secret professionnel des avocats les correspondances échangées entre le client et son avocat ou entre l'avocat et ses confrères ; dès lors, le secret professionnel des avocats ne fait pas obstacle à ce qu’une SCP d’avocat consulte et fasse constater par huissier de justice les courriels échangés par son salarié, qui n'était pas avocat, depuis son adresse de messagerie professionnelle avec sa fille, fut-elle pour sa part avocate.

Telle est une des précisions apportées par la cour d’appel de Douai du 25 octobre 2019 (CA Douai, 25 octobre 2019, n° 17/01455 N° Lexbase : A40053AL).

Procédure. L’appelant, fiscaliste d’une SCP d’avocats, avait été licencié pour motif économique. Il avait saisi le conseil de prud'hommes afin de faire constater l'illégitimité de son licenciement et le caractère vexatoire de la rupture.

  • Sur le secret professionnel des avocats

Texte. La cour énonce qu’en application de l'article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 (N° Lexbase : L6343AGZ) que seules sont couvertes par le secret professionnel des avocats les correspondances échangées entre le client et son avocat ou entre l'avocat et ses confrères.

Recevabilité du PV. En conséquence, en l‘espèce, le secret professionnel des avocats ne faisait pas obstacle à ce que la SCP d’avocat consulte et fasse constater par huissier de justice les courriels échangés par son salarié, qui n'était pas avocat, depuis son adresse de messagerie professionnelle avec sa fille, fut-elle pour sa part avocate. Le procès-verbal de constatations de l’huissier de justice est donc recevable.

  • Sur la violation par le personnel du secret professionnel

Convention. La cour d’appel énonce, également, qu’en application de l'article 11 de la convention collective des avocats et de leur personnel que le salarié était tenu d'observer la discrétion la plus absolue quant aux affaires et aux frais dont il avait pu avoir connaissance en raison de ses fonctions ou de sa présence au sein du cabinet. La convention collective prévoit que la violation par le personnel du secret professionnel constitue une faute grave.
Violation caractérisée. Elle relève qu’il résulte du procès-verbal d'huissier que le salarié a transmis à sa fille divers modèles de courriers, de conventions, une note envoyée à des experts-comptables, des procès-verbaux d'assemblée générale extraordinaire, une note de synthèse sur une fusion. Si les pièces objets des envois de mails ne sont pas jointes au procès-verbal d'huissier ni versées aux débats, le salarié ne soutient pas qu'il les avait anonymisées avant de les envoyer à sa fille. Les noms des clients concernés sont à tout le moins cités dans plusieurs courriels ou dans l'intitulé des pièces envoyées. Ces envois constituent en conséquence pour la cour de la part du salarié une violation caractérisée du secret professionnel auquel il était astreint.
Intention de nuire (non). Toutefois, la teneur des messages échangés révèle qu'il s'agissait pour le salarié et sa fille de s'aider mutuellement dans le cadre de leur activité professionnelle, les messages ne traduisent aucune intention du salarié de porter préjudice à son employeur et de permettre à sa fille de capter la clientèle de la SCP au profit du cabinet qui l'employait. En l'absence de caractérisation de l'intention de nuire à son employeur, il convient pour la cour de débouter la SCP d’avocats de sa demande de dommages et intérêts (cf. l’Ouvrage « La profession d’avocat » N° Lexbase : E6383ETL).

 

newsid:472088

Avocats/Périmètre du droit

[Brèves] Condamnation de la société « Demander Justice » à payer 500 000 euros d'astreinte

Réf. : TGI Paris, 29 janvier 2020, n° 19/82171 (N° Lexbase : A75333EQ)

Lecture: 4 min

N2242BYP

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par Marie Le Guerroué

Le 12 Mars 2020

► La société « Demander justice », bien qu’ayant entrepris diverses modifications de son site, ne s’est nullement conformée aux obligations de l’arrêt qui visait à supprimer la confusion avec un site officiel et à informer l’utilisateur sur le taux de réussite, puisque la modification des couleurs n’est pas visible à l’œil nu et que la fiche d’information n’est que très difficilement consultable.

C’est en ces termes, dans un jugement du 29 janvier 2020, que le juge de l’exécution condamne la société « Demander justice » à payer au CNB la somme de 500 000 euros représentant la liquidation de l’astreinte précédemment fixée par la cour d’appel de Paris (TGI Paris, 29 janvier 2020, n° 19/82171 N° Lexbase : A75333EQ).

Procédure. Selon un arrêt du 6 novembre 2018 (CA Paris, 6 novembre 2018, n° 17/04957 N° Lexbase : A7021YKA), la cour d’appel de Paris, saisie par le Conseil national des Barreaux de diverses demandes, dont une demande de fermeture des sites exploités par la société « Demander justice », fondée notamment sur le fait que celle-ci affichait un taux de succès fallacieux et utilisait un logo aux couleurs bleue, blanche et rouge entretenant une confusion avec les services publics, avait enjoint à cette dernière sous astreinte de faire disparaître de son site les mentions de relatives au taux de réussite sauf à en mentionner précisément les modalités de calcul, et lui a fait interdiction d’utiliser ensemble les trois couleurs du drapeau français. Le Conseil national des Barreaux avait fait assigner la société devant le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Paris afin de voir liquider l'astreinte.

  • Sur l’utilisation des trois couleurs du drapeau français : le risque de confusion persiste

Le Conseil national des Barreaux faisait valoir au soutien de ses demandes que concernant l’utilisation d’un logo comportant un bandeau tricolore, la société « Demander justice » s’était contentée de remplacer la couleur blanche par une teinte d’un gris si pâle que sa distinction avec le blanc est malaisée. Le juge de l’exécution estime que force est de constater à l’examen des différentes photographies communiquées qu’il est impossible sur un écran de consultation de différencier le gris pâle utilisé de la couleur blanche, d’autant plus que la bande grise apposée entre les couleurs rouge et bleue est plus pâle que le gris utilisé pour la tête de la figurine et sa base, lui conférant ainsi par contraste une clarté plus importante, de sorte que le risque de confusion relevé par la cour et lié à l’utilisation des couleurs du drapeau français persiste.

  • Sur le taux de réussite : une difficulté d'accessibilité 

Concernant le taux de succès annoncé, le CNB indique que si la société a inséré sur le site une notice explicative, celle-ci est difficilement accessible. Le juge relève qu’il ressort des constats établis par le CNB que cette fiche n’est pas accessible par les divers liens hypertextes, mais seulement en positionnant le curseur de la souris sur la mention “82% des plaignants ont obtenu gain de cause depuis 2012", l’accès à cette information étant rendu particulièrement aléatoire puisque le curseur, généralement constitué d’une flèche ou d’une main donnant accès à un lien hypertexte, se transforme en l’espèce, lorsqu’il est positionné sur la phrase en question en une simple barre verticale assortie de deux petits traits horizontaux (I-Beam constituant la plupart du temps un outil de sélection ou d’édition), ce qui donne à penser à l’internaute qu’aucune information n’est accessible par ce biais.

Liquidation de l’astreinte. Il apparaît par conséquent que la société « Demander justice », bien qu’ayant entrepris diverses modifications de son site, ne s’est nullement conformée aux obligations de l’arrêt qui visait à supprimer la confusion avec un site officiel et à informer l’utilisateur sur le taux de réussite, puisque la modification des couleurs n’est pas visible à l’œil nu et que la fiche d’information n’est que très difficilement consultable. Au vu de l'ensemble de ces éléments et des modifications entreprises l'astreinte doit être liquidée à un montant de 500 000 euros (cf. l’Ouvrage « la Profession d'avocat" N° Lexbase : E0989E9I).

 

newsid:472242

Contrats et obligations

[Brèves] Manquement du vendeur professionnel à ses obligations d’information et de conseil pouvant emporter la résolution de la vente

Réf. : Cass. com., 22 janvier 2020, n° 18-19.377, F-D (N° Lexbase : A59433C4)

Lecture: 3 min

N2130BYK

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par Manon Rouanne

Le 18 Février 2020

► Outre la sanction de principe qui est l’engagement de la responsabilité du vendeur, le manquement de celui-ci à ses obligations d’information et de conseil peut, dès lors qu’il est d’une gravité suffisante, entraîner éventuellement la résolution de la vente.

Telle est la sanction éventuelle de la violation, par le vendeur, de ses obligations d’information et de conseil rappelée par la Chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt en date du 22 janvier 2020 (Cass. com., 22 janvier 2020, n° 18-19.377, F-D N° Lexbase : A59433C4 ; sur la caractérisation du manquement du vendeur professionnel à ses obligations d’information et de conseil de nature en entraîner la résolution de la vente, notamment, Cass. com., 27 novembre 2019, n° 18-16.821, F-D N° Lexbase : A3640Z4L ; Cass. com., 27 novembre 2019, n° 18-15.104, F-D N° Lexbase : A3525Z4C ; Cass. civ. 3, 17 octobre 2019, n° 18-21.282, F-D N° Lexbase : A9381ZRU ; Cass. civ. 1, 12 septembre 2019, n° 18-16.504, F-D N° Lexbase : A4770ZNY).

En l’espèce, par la conclusion d’un contrat de vente, un producteur a acheté à une société deux robots de traite fabriqués par une société tierce. Se plaignant de nombreux dysfonctionnements portant sur les deux machines ayant pour conséquences le déclenchement intempestif d’alarmes et une dégradation de l’état sanitaire du bétail, lequel a engendré des coûts et une baisse de la production, l’acheteur a, alors, engagé, à l’encontre du vendeur, du fabricant et du distributeur, une action en responsabilité et une action en résolution de la vente et restitution du prix.

La cour d’appel, tout en caractérisant le manquement du vendeur à son obligation d’information et de conseil de nature à engager la responsabilité de celui-ci, a, cependant, refusé de prononcer la résolution du contrat de vente au motif que cette inexécution, comme toute mauvaise exécution d’un contrat, se sanctionne par l’octroi de dommages et intérêts et non par la résolution ou l’annulation de la vente.

S’opposant à la position des juges du fond, le vendeur a, dès lors, formé un pourvoi en cassation alléguant, après avoir rappelé que le vendeur professionnel est tenu d’une obligation de conseil lui imposant de se renseigner sur les besoins de l’acheteur afin d’être en mesure de l’informer quant à l’adéquation de la chose proposée à l’utilisation qui en est prévue, que, sur le fondement de l’article 1184 ancien du Code civil (N° Lexbase : L1286ABA), le manquement du vendeur à ses obligations d’information et de conseil peut justifier la résolution judiciaire du contrat outre l’allocation de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la violation, par le vendeur, de ses obligations.

A l’instar du demandeur au pourvoi, la Cour de cassation ne rejoint pas la décision de la cour d’appel et casse l’arrêt rendu par cette dernière en affirmant, au visa de l’article 1184 ancien du Code civil, que le manquement du vendeur à ses obligations d’information et de conseil peut, à condition qu’il soit d’une gravité suffisante, justifier la résolution de la vente.

newsid:472130

Droit social européen

[Brèves] Entrave à la libre circulation des travailleurs en cas de bénéfice d’une allocation en faveur des sportifs de haut niveau aux seuls citoyens de l’Etat membre concerné

Réf. : CJUE, 18 décembre 2019, aff. C-447/18 (N° Lexbase : A4335Z83)

Lecture: 3 min

N2133BYN

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par Charlotte Moronval

Le 05 Février 2020

► Une réglementation nationale limitant le bénéfice d’une allocation instituée en faveur de certains sportifs de haut niveau aux seuls citoyens de l’Etat membre concerné constitue une entrave à la libre circulation des travailleurs.

Telle est la solution apportée par la CJUE dans une décision du 18 décembre 2019 (CJUE, 18 décembre 2019, aff. C-447/18 N° Lexbase : A4335Z83).

Les faits. Un ressortissant tchèque, ayant sa résidence en Slovaquie, remporte des médailles d’or et d’argent à des championnats d’Europe et du monde de hockey sur glace, en tant que membre de l’équipe nationale de la République socialiste tchécoslovaque. Il se voit refuser le bénéfice d’une allocation instituée en faveur de certains sportifs de haut niveau ayant représenté la Slovaquie, en raison du fait qu’il ne dispose pas de la nationalité slovaque. A noter que lors de l’adhésion de la Slovaquie et de la République tchèque à l’Union européenne, l’intéressé était en outre employé dans une école primaire et avait continué à exercer cet emploi après l’adhésion.

La motivation de la CJUE. Tout d’abord, la Cour constate que l’allocation en cause est exclue du champ d’application du Règlement 883/2004, portant sur la coordination des systèmes de Sécurité sociale (N° Lexbase : L7666HT4). En effet, selon la Cour, l’allocation ne relève pas de la notion de « prestation de vieillesse », au sens du Règlement. La Cour a relevé, à cet égard, que la finalité essentielle de l’allocation est de récompenser ses bénéficiaires pour les exploits qu’ils ont réalisés dans le domaine sportif en représentation de leur pays, ce qui explique, d’une part, le financement direct par l’État, en dehors des sources de financement du système de sécurité nationale et indépendamment des contributions versées par ses bénéficiaires, et, d’autre part, le fait qu’elle soit versée seulement à un nombre très restreint d’athlètes. Par ailleurs, elle ajoute que le versement de l’allocation est subordonné non au droit du bénéficiaire à percevoir une pension de retraite, mais uniquement à une demande en ce sens introduite par celui-ci.

Ensuite, après avoir précisé que le travailleur concerné, tout en n’ayant pas déplacé son lieu de résidence, s’est trouvé, en raison de l’adhésion à l’Union de l’Etat dont il est le ressortissant et de l’Etat sur le territoire duquel il a fixé sa résidence, dans la situation d’un travailleur migrant, la Cour juge que l’allocation concernée relève de la notion d’« avantage social », au sens du Règlement 492/2011 (N° Lexbase : L3701IQ7). Dans ce cadre, elle constate que la possibilité pour un travailleur migrant de se voir récompensé, au même titre que les travailleurs ressortissants de l’Etat membre d’accueil, pour les résultats sportifs exceptionnels qu’il a obtenus en représentation de cet Etat membre, ou des prédécesseurs en droit de celui-ci, peut contribuer à l’intégration de ce travailleur dans le milieu dudit Etat membre et donc à la réalisation de l’objectif de la libre circulation des travailleurs. La Cour souligne que l’allocation en cause au principal a pour effet non seulement d’apporter à ses bénéficiaires une sécurité financière visant, notamment, à compenser l’absence d’insertion pleine dans le marché du travail pendant les années consacrées à la pratique d’un sport à haut niveau, mais également et principalement de leur conférer un prestige social particulier en raison des résultats sportifs qu’ils ont remportés dans le contexte d’une telle représentation.

La solution. Enonçant la solution précitée, la Cour a en conséquence constaté qu’un Etat membre qui accorde une telle allocation à ses travailleurs nationaux ne saurait la refuser aux travailleurs ressortissants des autres Etats membres sans commettre une discrimination fondée sur la nationalité.

newsid:472133

Fiscalité des entreprises

[Brèves] Le Conseil d’Etat se prononce de nouveau sur la notion d’« abus de droit »

Réf. : CE 10° et 9° ch.-r., 12 février 2020, n° 421444, publié au recueil Lebon (N° Lexbase : A34993EC)

Lecture: 7 min

N2244BYR

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par Marie-Claire Sgarra

Le 19 Février 2020

Lorsque l'administration entend remettre en cause les conséquences fiscales d'une opération qui s'est traduite par un sursis d'imposition au motif que les actes passés par le contribuable ne lui sont pas opposables, elle est fondée à se prévaloir des dispositions de l'article L. 64 du Livre des procédures fiscales. En effet, une telle opération, dont l'intérêt fiscal est de différer l'imposition, entre dans le champ d'application de cet article dès lors qu'elle a nécessairement pour effet de minorer l'assiette de l'année au titre de laquelle l'impôt est normalement dû à raison de la situation et des activités réelles du contribuable.

Telle est la solution retenue par le Conseil d’Etat dans un arrêt du 12 février 2020 (CE 10° et 9° ch.-r., 12 février 2020, n° 421444, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A34993EC).

En l’espèce, les requérants ont créé une société civile qui a pour objet la constitution et la gestion d’un portefeuille de valeurs mobilières et qui a opté pour son assujettissement à l’impôt sur les sociétés. En 2007, l’époux a fait apport de titres d’une société A. à la société civile. La plus-value réalisée a été placée automatiquement sous le régime de sursis d’imposition. Par suite, la société A. a procédé au rachat de ses propres titres pour un prix identique à leur valeur d’apport.

A l’issue d’un contrôle, l’administration fiscale a considéré que l’apport des titres de la société A. à la société civile, préalablement au rachat de ses propres titres par la société, avait eu pour seul objet d’éviter l’imposition immédiate que l’époux aurait du supporter si, à défaut d’interposition de la société civile, la société A. lui avait directement racheté ses titres. L’administration fiscale a pour ce motif remis en cause le bénéfice du sursis d’imposition en mettant en œuvre la procédure de répression des abus de droit prévue à l’article L. 64 du Livre des procédures fiscales (N° Lexbase : L9266LNI) et a par ailleurs estimé que le gain correspondant au montant de la plus-value d’apport devait être taxé à concurrence de 65 % de son montant total dans la catégorie des traitements et salaires.

Le tribunal de Paris, après avoir estimé que la fraction de la plus-value imposée dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers devait être taxée selon le régime des plus-values de cession de valeurs mobilières a prononcé la décharge partielle des impositions mises à la charge des requérants (TA de Paris, 4 février 2016, n° 1400260 N° Lexbase : A0036R8T). La cour administrative d’appel de Paris a rejeté la demande de décharge complémentaire de la cotisation supplémentaire d’impôt sur le revenu (CAA de Paris, 12 avril 2018, n° 16PA01157 N° Lexbase : A6600XLZ).

Dans cette affaire le Comité de l’abus de droit fiscal avait considéré que le montage en cause devait s’analyser en un abus de droit.

Pour rappel, il résulte des dispositions de l'article L. 64 du Livre des procédures fiscales, citées au point 2 ci-dessus, que l'administration est fondée à écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors que ces actes ont un caractère fictif, ou, que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles.

La cour administrative d’appel, en retenant qu’un contribuable, en organisant un montage lui ayant permis d'entrer artificiellement dans les prévisions de la loi fiscale pour éviter l'imposition à laquelle il aurait été soumis à défaut, doit être regardé comme ayant poursuivi un but exclusivement fiscal nécessairement contraire à l'objectif poursuivi par le législateur, ne qualifie pas inexactement les faits qui lui étaient soumis et qui lui ont permis de conclure à l'existence d'un abus de droit.

= = > Les opérations présentant un caractère artificiel constituent un contentieux important. Pour exemple, le Conseil d'Etat confirme que le fait pour une société française de détenir une participation dans une holding de droit luxembourgeois lui permettant d'échapper à l'imposition prévue à l'article 209 B du Code général des impôts (N° Lexbase : L9776I3H) tout en se prévalant du régime des sociétés mères constitue un abus de droit lorsque l'acquisition de cette participation ne présente aucun intérêt autre que l'avantage fiscal retiré (CE 8° et 3° ssr., 18 mai 2005, n° 267087, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A3517DI4).

= = > De même, il résulte des stipulations de la convention fiscale franco-britannique du 22 mai 1968 qu'un résident du Royaume-Uni auquel une société française a distribué des dividendes ne peut se prévaloir des avantages prévus que s'il est le bénéficiaire effectif de ces dividendes au sens du paragraphe 9 du même article. Ne peut être regardée comme le bénéficiaire effectif des dividendes une banque britannique cessionnaire temporaire de l'usufruit d'actions à dividende prioritaire sans droit de vote spécialement émises par une société française au profit de sa société-mère américaine dans le cadre d'un montage, qui s'analyse en réalité comme un emprunt contracté par la société américaine auprès de la banque britannique, dont l'unique but est d'obtenir le remboursement, de l'avoir fiscal attaché aux distributions de la société française (CE 3° et 8° ssr., 29 décembre 2006, n° 283314, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A3666DTX).

= = > Dans une autre affaire, le Conseil d’Etat a confirmé que l’interposition d’une société étrangère luxembourgeoise dans le cadre d’un montage immobilier était artificiel dans la mesure où elle n’avait d’autre but que de faire bénéficier les contribuables des avantages d’une convention fiscale (CE Plénière, 25 octobre 2017, n° 396954, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A4471WXU).

= = > En ce qui concerne les management package, le Conseil d’Etat a requalifié en salaires les gains issus de l’exercice d’options d’achat d’action à un prix déterminé (CE 3° et 8° ssr., 26 septembre 2014, n° 365573, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A2956MXR).

= = > Le Conseil d’Etat a complété cette jurisprudence en matière de management package en jugeant que lorsque les sommes en cause trouvent essentiellement leur source dans l’exercice par l’intéressé de fonctions de dirigeant ou de salarié, elles constituent un avantage en argent imposable dans la catégorie des traitements et salaires. Les juges relèvent en outre que la circonstance que le dirigeant ait par ailleurs supporté un risque significatif en sa qualité d’actionnaire n’est pas de nature à remettre en cause cette requalification (CE 3° et 8° ch.-r., 15 février 2019, n° 408867, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A3479YX7).

 

 

Pour aller plus loin :

 

Michel Turon, L’abus de mesures « anti-abus » des conventions fiscales, Lexbase Fiscal, n° 685 (N° Lexbase : N6394BWQ)

Franck Laffaille, De l'interposition artificielle, de l'abus de convention fiscale internationale, de l'abus de droit, Lexbase Fiscal, n° 722 (N° Lexbase : N1608BXT)

Marie-Gabrielle Merloz, Nouvelle confirmation du Conseil d’Etat de l’articulation entre abus de droit et montage artificiel, Lexbase Fiscal, n° 773 (N° Lexbase : N7715BXZ)

Anne Iljic, Clarification du régime de gains issus de management packages, Lexbase Fiscal, n° 791 (N° Lexbase : N9915BXI).

 

 

 

 

newsid:472244

Procédure civile

[Brèves] La suspension du délai de péremption de l’instance, en cas d'impossibilité pour les parties d’accomplir des diligences de nature à accélérer le déroulement de l’instance

Réf. : Cass. civ. 2, 30 janvier 2020, n° 18-25.012, F-P+B+I (N° Lexbase : A90303CG)

Lecture: 3 min

N2132BYM

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par Alexandra Martinez-Ohayon

Le 09 Mars 2020

L’impossibilité pour les parties d’accomplir des diligences de nature à accélérer le déroulement de l’instance à compter de la fixation des plaidoiries, ne peut aboutir à une décision constatant la péremption de l’instance ;

lorsque l’affaire fait l’objet d’une radiation, cet événement fait courir un nouveau délai de deux ans pour la péremption.

Telle est la précision apportée par un arrêt de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation rendu le 30 janvier 2020 (Cass. civ. 2, 30 janvier 2020, n° 18-25.012, F-P+B+I N° Lexbase : A90303CG)

Faits et procédure. A la suite d’une décision de justice condamnant un bailleur à réaliser divers travaux dans le logement de son locataire, ce dernier a saisi le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de diverses demandes et contestations relatives à ces travaux. Un jugement le déboutant de l’ensemble de ses demandes a été rendu, lui ordonnant de laisser l’accès de son logement, à son bailleur, pour effectuer les travaux. Le locataire a interjeté appel devant la cour d’appel de Versailles, et l’affaire a été renvoyée devant la cour d’appel de Paris, en application de l’article 47 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L7226LED). Le 4 décembre 2013, la radiation de l’affaire a été prononcée, les parties n’ayant pas constitué avocat dans le délai d’un mois à compter de l’avis adressé par le greffe. A la suite du dépôt de la constitution de l’avocat de la partie intimée, le 11 décembre 2013, l’affaire a été réinscrite au rôle et un avis de fixation du 23 décembre 2013 a fixé l’audience des plaidoiries au 6 novembre 2014. L’affaire a de nouveau été radiée le 23 octobre 2014. L’appelant a constitué avocat le 13 octobre 2016, et sollicité le rétablissement de l’affaire.

Le pourvoi. Le demandeur au pourvoi fait grief à l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris le 1er mars 2018 de constater l’extinction de l’instance d’appel par l’effet de la péremption, au motif, qu’entre le 11 décembre 2013 et le 13 décembre 2016, plus de deux années se sont écoulées, sans l’intervention d’aucune diligence de parties.  Il invoque que l’avis de fixation du 23 décembre 2013 pour l’audience fixée au 6 novembre 2014, avait suspendu le délai de péremption.

L’argumentation du moyen est accueillie favorablement par la Cour suprême, la cour d’appel ayant retenu qu’aucune diligence de parties n’était intervenue entre l’avis de fixation et la demande de rétablissement de l’affaire par l’appelant, ne prenant pas en compte l’avis de fixation des plaidoiries, prévoyait également la date de la clôture à laquelle l’affaire avait de nouveau été radiée, les parties n’étaient pas dispensées d’accomplir des diligences pour interrompre la péremption.

A tort, selon la Cour suprême qui énonce la solution précitée au visa des articles 2 (N° Lexbase : L1108H4S) et 386 (N° Lexbase : L2277H44) du Code de procédure civile (cf. l’Ouvrage « Procédure civile » La péremption d'instance N° Lexbase : E1365EU4).

newsid:472132

Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

[Brèves] Rescrit : régime de TVA applicable aux rétrocessions d'honoraires effectuées entre deux professionnels de santé dans le cadre d'un contrat de remplacement

Réf. : Actualité BOFIP du 15 janvier 2020, BOI-RES-000056

Lecture: 2 min

N2136BYR

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par Marie-Claire Sgarra

Le 05 Février 2020

Des précisions de l’administration fiscale ont été apportées concernant le régime de TVA applicable aux honoraires rétrocédés par les médecins dans le cadre d'un contrat de remplacement.

La question est la suivante :

Un médecin indépendant titulaire fait appel à un médecin remplaçant. Dans le cadre du contrat de remplacement, les honoraires versés par les patients sont encaissés directement par le médecin remplacé, lequel en reverse ensuite un pourcentage au médecin remplaçant. La part d'honoraires conservée par le médecin remplacé correspond à une redevance couvrant les frais de fonctionnement (locaux, installations professionnelles). Quel est le régime de TVA applicable aux rétrocessions d'honoraires effectuées par des médecins professionnels dans le cadre de contrats de remplacement ?

Réponse de l’administration :

Le 1° du 4 de l'article 261 du Code général des impôts (N° Lexbase : L7825HWQ) qui transpose l'article 132, paragraphe 1 sous c) de la Directive 2006/112/CE, relative au système commun de la valeur ajoutée (N° Lexbase : L8139H3T) exonère de TVA sans possibilité d'option, les prestations de soins dispensées aux personnes par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées.

La Cour de justice de l'Union européenne considère que cette exonération est applicable lorsque deux conditions sont satisfaites, à savoir qu'il s'agisse de prestations de soins à la personne et que celles-ci soient fournies par des personnes possédant les qualifications professionnelles requises (CJUE, 10 septembre 2002, aff. C-141/00 N° Lexbase : A3667AZT ; CJUE, 27 avril 2006, aff. C-443/04 et C-444/04 N° Lexbase : A1717DPB).

Il en résulte que les sommes reversées par le médecin remplacé au médecin remplaçant à l'issue du contrat de remplacement sont exonérées de TVA dès lors qu'elles rémunèrent une prestation de soins effectuée par un praticien auprès d'un patient au sens des dispositions du 1° du 4 de l'article 261 du CGI, telles qu'interprétées par la jurisprudence européenne. Les modalités de versement de ces sommes (non pas par le patient lui-même mais par le remplacé au remplaçant ne modifient pas, au regard de la TVA, la nature de la prestation réalisée en contrepartie.

En revanche, la redevance perçue par le médecin remplacé en contrepartie de la mise à disposition de ses installations techniques et locaux au médecin remplaçant, qui ne rémunère pas une prestation de soins à la personne, est soumise à la TVA, sauf si le remplacement revêt un caractère occasionnel.

 

 

 

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Urbanisme

[Brèves] Application du principe du silence valant décision implicite de rejet à un projet portant sur une démolition soumise à permis en site inscrit

Réf. : CE 5° et 6° ch.-r., 12 février 2020, n° 421949, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A35013EE)

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par Yann Le Foll

Le 18 Février 2020

Le défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction vaut décision implicite de rejet lorsque la demande de permis de construire porte sur une démolition soumise à permis en site inscrit, y compris lorsque cette demande porte également sur une construction.

Ainsi statue le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 12 février 2020 (CE 5° et 6° ch.-r., 12 février 2020, n° 421949, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A35013EE).

Faits. Le 4 novembre 2014, la société X a déposé une demande de permis de construire portant sur la démolition de deux bâtiments, la surélévation d'un bâtiment existant et la construction d'un nouveau bâtiment sur une parcelle située dans le 11ème arrondissement de Paris. La Ville de Paris a demandé au pétitionnaire de produire des pièces supplémentaires par deux courriers à la suite desquels de nouvelles pièces ont été déposées. La société a alors demandé à la Ville de Paris de lui délivrer une attestation de permis tacite. Par lettre du 16 mars 2016, la Ville de Paris a rejeté cette demande en l'informant que sa demande de permis de construire avait fait l'objet d'une décision implicite de rejet.

Contentieux. Par jugement du 9 mars 2017 (TA Paris, 9 mars 2017, n° 1607464 N° Lexbase : A8203XMR), le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la société tendant à l'annulation du refus de lui délivrer une attestation de permis tacite.  La Ville de Paris se pourvoit contre l'arrêt du 4 mai 2018 par lequel la cour administrative d'appel de Paris (CAA Paris, 4 mai 2018, n° 17PA01548 N° Lexbase : A6796XMN), saisie par la société X, a annulé ce jugement et la décision du 16 mars 2016 refusant de lui délivrer un permis de construire tacite.

Solution. En jugeant que les dispositions de l'article R. 424-2 du Code de l'urbanisme (N° Lexbase : L2666KQS), selon lesquelles "Par exception au b de l'article R. 424-1, le défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction vaut décision implicite de rejet dans les cas suivants : (...) / i) Lorsque le projet porte sur une démolition soumise à permis en site inscrit", ne visent que les demandes de permis ou les déclarations préalables portant uniquement sur des travaux de démolition et en en déduisant que le projet de permis de construire litigieux, s'il comportait des démolitions en site inscrit nécessitant l'accord de l'architecte des bâtiments de France, n'était pas un projet "portant sur une démolition" au sens du i) de l'article R. 424-2 du Code de l'urbanisme, la cour a commis une erreur de droit (cf. l'Ouvrage "Droit de l'urbanisme" N° Lexbase : E4683E7L).

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