Le Quotidien du 23 janvier 2020

Le Quotidien

Droit pénal général

[Brèves] Récidive spéciale : assimilation des délits de recel de vol et blanchiment

Réf. : Cass. crim., 21 janvier 2020, n° 18-84.899, FS-P+B+I (N° Lexbase : A99543BB)

Lecture: 6 min

N1955BY3

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/56137376-edition-du-23012020#article-471955
Copier

par June Perot

Le 26 Février 2020

► La récidive prévue à l’article 132-10 du Code pénal (N° Lexbase : L2276AMA) est établie dès lors que, d’une part, le délit de blanchiment a été commis à l’occasion de faits de recel de vol, infraction à laquelle il devait être assimilé, au regard de la récidive, en application de l’article 324-5 du Code pénal (N° Lexbase : L1832AMS), d’autre part, compte tenu d’une précédente condamnation pour recel de vol.

C’est la précision apportée par la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt du 21 janvier 2020 (Cass. crim., 21 janvier 2020, n° 18-84.899, FS-P+B+I N° Lexbase : A99543BB).

Résumé des faits. A la suite d’une vaste enquête ayant porté sur le vol, le recel, la dissimulation de l’origine de dizaines de véhicules, une enquête préliminaire a révélé qu’un faussaire, garagiste de son état, aurait concouru à la dissimulation de l’origine de certains des véhicules volés en établissant et fournissant de faux certificats de carrossage à l’aide de tampons supportant des identités d’emprunt. Le garagiste a été cité devant le tribunal correctionnel des chefs de faux, blanchiment et blanchiment en récidive. Les premiers juges ont déclaré les faits établis, après avoir écarté la circonstance de récidive, et ont prononcé des peines. Le prévenu et le ministère public ont interjeté appel de cette décision.

En cause d’appel. Le prévenu avait formé une exception de nullité des perquisitions au motif que le JLD s’était borné à reproduire in extenso la requête du procureur de la République, n’avait pas motivé sa décision comme l’article 76, alinéa 4, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7440LPA) le commande. Pour écarter cette exception, l’arrêt retient que le grief n’est pas établi à partir du moment où le juge a visé l’article 76 précité ainsi que les diverses infractions suspectées en précisant qu’elles étaient punies d’une peine égale ou supérieure à 5 ans, et où il a pris factuellement en considération le risque de dépérissement des preuves au regard de la gravité et du nombre d’infractions, la personnalité des suspects, ainsi que le caractère simultané de plusieurs perquisitions à intervenir, rendant impossible la présence de l’intéressé sur l’ensemble des lieux concernés.

La cour d’appel a par ailleurs infirmé le jugement de première instance et retenu la circonstance de récidive légale. Pour ce faire, l’arrêt retient que, d’une part, le blanchiment en question a consisté pour le prévenu à apporter son concours à une opération de conversion du produit direct ou indirect d’un crime ou d’un délit, à savoir la transformation de fourgons volés en camping-cars, en se servant, ce qui constitue la circonstance aggravante, des facilités procurées par son activité de garagiste, d’autre part, l’état de récidive légale résulte de ce que le prévenu a été condamné antérieurement pour des faits de recel de vol.

Le prévenu a formé un pourvoi.

Régularité des opérations de perquisitions. Sur ce point, la Haute juridiction considère que la motivation de l’ordonnance du JLD répondait aux prescriptions de l’article 76, alinéa 4, du Code de procédure pénale, peu important que les motifs de ladite décision, analysant les éléments de fait et de droit rendant nécessaire la mesure, soient exactement repris des termes de la requête du procureur de la République.

Assimilation recel de vol/blanchiment. Du point de vue de la récidive, et c’est là que l’arrêt nous semble important, la Chambre criminelle valide le raisonnement des juges d’appel qui ont retenu l’état de récidive. Elle considère en effet, d’une part, que le blanchiment a été commis à l’occasion de faits de recel de vol, infraction à laquelle il devait être assimilé, et que d’autre part, compte tenu d’une précédente condamnation pour recel de vol, la récidive était établie par application de l’article 132-10 du Code pénal.

Récidive générale/récidive spéciale. Rappelons ici que si les conditions des termes de la récidive sont réunies, l'état de récidive ne pourra être relevé, y compris d'office, que si l'on se trouve dans l'un des cas de récidive prévu par la loi. La récidive sera dite générale lorsque l'infraction constitutive du second terme n'a pas à être identique à la première. Elle sera dite spéciale lorsque la récidive n'est constituée que si l'infraction constitutive du second terme est identique ou assimilée à la première (cf. l’Ouvrage « Droit pénal général » (dir. J.-B. Perrier), ETUDE : L'aggravation de la peine, J.-B. Thierry N° Lexbase : E1625GAG).

L'article 132-10 du Code pénal dispose : « lorsqu'une personne physique, déjà condamnée définitivement pour un délit, commet, dans le délai de cinq ans à compter de l'expiration ou de la prescription de la précédente peine, soit le même délit, soit un délit qui lui est assimilé au regard des règles de la récidive, le maximum des peines d'emprisonnement et d'amende encourues est doublé ». Ainsi par exemple, aux termes de l'article 321-5 du Code pénal, le recel a été assimilé au délit qui a procuré les choses recelées. En conséquence, lorsque le recel constitue un terme de la récidive, le juge doit préciser la nature de l'infraction à l'aide de laquelle les choses recelées ont été obtenues (Cass. crim., 19 novembre 1932, Bull. crim. 1932, n° 240 ; Cass. crim., 29 mai 1933, Bull. crim. 1933, n° 122). Une assimilation identique a été prévue par l'article 324-5 du Code pénal (loi n° 96-392 du 13 mai 1996 N° Lexbase : L2214ASS) entre le blanchiment et l'infraction à l'occasion de laquelle ont été commises les opérations de blanchiment. La Cour de cassation exerçant un contrôle à cet égard, exige de juges du fonds qu’ils qualifient précisément l’infraction qui constitue le premier terme de la récidive, ce qui était le cas en l’espèce (Cass. crim., 19 novembre 1932, Bull. crim. n° 240 ; Cass. crim., 30 mars 1939, ibid., n° 75 ; Cass. crim., 1er février 1940, Gaz. Pal., 1940. 1. 276).

Lire, E. Letouzey, Le recel et le blanchiment au sein de la récidive légale : du pareil au même, Lexbase Pénal, février 2020 (N° Lexbase : N2243BYQ)

newsid:471955

Concurrence

[Brèves] Déséquilibre significatif : exclusion des établissements de crédit et des sociétés de financement pour leurs opérations de banque et leurs opérations connexes et notion de «partenaire commercial»

Réf. : Cass. com., 15 janvier 2020, n° 18-10.512, FS-P+B (N° Lexbase : A91723BC)

Lecture: 6 min

N1940BYI

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/56137376-edition-du-23012020#article-471940
Copier

par Vincent Téchené

Le 22 Janvier 2020

► D’une part, les textes relatifs aux pratiques restrictives de concurrence ne s'appliquent pas aux établissements de crédit et aux sociétés de financement pour leurs opérations de banque et leurs opérations connexes définies à l'article L. 311-2 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L2511IXB) ;

► D’autre, part, la notion de «partenaire commercial» n’exclut pas, par elle-même, les clients d’un prestataire de services liés par des contrats de mise à disposition de site internet, au motif qu’il s’agit de contrats de location ayant pour objet des opérations ponctuelles à objet et durée limités ne générant aucun courant d’affaires stable et continu et n’impliquant aucune volonté commune et réciproque d’effectuer, de concert, des actes ensemble dans des activités de production, de distribution ou de services.

Tels sont les enseignements d’un arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 15 janvier 2020 (Cass. com., 15 janvier 2020, n° 18-10.512, FS-P+B N° Lexbase : A91723BC)

L’affaire. Une société (le prestataire) proposait à des clients professionnels de créer, pour leur entreprise, un site internet et de le mettre à leur disposition pour une durée de 48 mois, tacitement renouvelable pour un an, en leur faisant signer un contrat dit d’abonnement de sites internet et un contrat de licence d’exploitation, lequel était ensuite cédé à un loueur financier qui devenait alors créancier des sommes dues périodiquement par le client. Plusieurs clients ayant dénoncé les pratiques commerciales de ce prestataire, le ministre de l’Economie l’a assigné pour violation de l’article L. 442-6, I, 2°, du Code de commerce (N° Lexbase : L7575LB8), dans sa rédaction antérieure à  l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 (N° Lexbase : L0386LQD) l’effet d’obtenir la cessation des pratiques incriminées, l’annulation des clauses contractuelles qui, par leur articulation, étaient de nature à créer un déséquilibre significatif u détriment des clients et le paiement d’une amende civile. A la suite d’investigations complémentaires, le ministre de l’Economie a appelé en intervention les deux loueurs financiers. Débouté de ses demandes (CA Paris, Pôle 5, 4ème ch., 27 septembre 2017 n° 16/00671 N° Lexbase : A0777WTX), le ministre a formé un pourvoi en cassation.  

La décision.

Sur l’application des textes relatifs aux pratiques restrictives de concurrence aux établissements de crédit et aux sociétés de financement pour leurs opérations de banque et leurs opérations connexes

Le ministre de l'Economie reprochait, en premier lieu, à l’arrêt d’appel d’avoir retenu que les relations entre l’un des loueurs financiers et ses clients n'étaient pas des relations de partenariat et, en conséquence, que sa demande fondée sur l'article L. 442-6, I, 2°, du Code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019, n'est pas fondée. La Cour de cassation approuve sur ce point l’arrêt d’appel : l'article L. 511-4 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L9648LQE) prévoit seulement que les articles L. 420-1 (N° Lexbase : L6583AIN) à L. 420-4 du Code de commerce sur les pratiques anticoncurrentielles s'appliquent aux établissements de crédit et aux sociétés de financement pour leurs opérations de banque et leurs opérations connexes définies à l'article L. 311-2 du même code, de sorte que, pour ces opérations, le législateur n'a pas étendu aux établissements de crédit et sociétés de financement l'application des textes relatifs aux pratiques restrictives de concurrence. Ainsi les activités exercées par le loueur financier dans le cadre des opérations litigieuses ne relèvent pas du Code de commerce mais des dispositions spécifiques du Code monétaire et financier.

Sur la notion de «partenaire commercial»

En second lieu, le ministre de l'Economie reprochait à l'arrêt d’appel de dire que les relations entre le prestataire de services, les loueurs financiers et leurs clients n'étaient pas des relations de partenariat et que dès lors sa demande fondée sur l'article L. 442-6, I, 2°, du Code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n 2019-359 du 24 avril 2019, n'était pas fondée.

Selon ce texte, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé, le fait pour tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers de soumettre ou tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

La Cour de cassation énonce qu’au sens de ce texte, le partenaire commercial est la partie avec laquelle l'autre partie s'engage, ou s'apprête à s'engager, dans une relation commerciale. Or, elle relève que, pour rejeter la demande du ministre de l'Economie dirigée contre le prestataire de services, la cour d’appel énonce qu'un partenaire se définit comme le professionnel avec lequel une entreprise commerciale entretient des relations commerciales pour conduire une activité quelconque, ce qui suppose une volonté commune et réciproque d'effectuer de concert des actes ensemble dans des activités de production, de distribution ou de services, par opposition à la notion plus large d'agent économique ou plus étroite de cocontractant. Or, elle retient que les contrats de mise à disposition de site internet conclus entre le prestataire de services et ses clients sont des contrats de location ayant pour objet des opérations ponctuelles à objet et durée limités, de cinq ans, ne générant aucun courant d'affaires stable et continu et n'impliquant aucune volonté commune et réciproque d'effectuer, de concert, des actes ensemble dans des activités de production, de distribution ou de services. Or, pour la Cour de cassation, en statuant ainsi, en ajoutant à la loi des conditions qu'elle ne comporte pas, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Elle casse donc, sur ce point, l’arrêt d’appel.

Précisions. L’ordonnance du 24 avril 2019 a déplacé les pratiques anticoncurrentielles dans le nouvel article L. 442-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L0501LQM) qui redéfinit les trois notions concentrant l’essentiel du contentieux en la matière : l’avantage sans contrepartie ou manifestement disproportionné, le déséquilibre significatif, et la rupture brutale des relations commerciales établies. Désormais le I, 1° relatif au déséquilibre significatif, est réécrit et prohibe le fait d'obtenir ou de tenter d'obtenir de l'autre partie un avantage quelconque ne correspondant à aucune contrepartie ou manifestement disproportionné au regard de la valeur de la contrepartie consentie. La nouvelle rédaction a donc fait disparaître la notion de partenaire commercial au profit de celle d'"autre partie". Comme un auteur a pu le relever, la nouvelle définition, plus large, permet notamment d’échapper à l’interprétation restrictive donnée par la cour d’appel de Paris à la notion de partenaire commercial permettant à certaines pratiques de ne pas entrer dans le giron de l’interdiction prévue par le texte (v. G. Guizard, Lexbase, éd. Affaires, 2019, n° 599 N° Lexbase : N9603BXX). La Cour de cassation en censurant, ici, cet arrêt «adapte», en quelque sorte, le champ d’application du déséquilibre significatif à celui issu du nouvel article L. 442-1.

newsid:471940

Contrat de travail

[Brèves] Possibilité pour un salarié de droit privé engagé par le biais de CDD illicites de demander leur requalification même en cas d’existence d’un statut de droit public

Réf. : Cass. soc., 15 janvier 2020, n° 18-16.399, F-P+B (N° Lexbase : A91973BA)

Lecture: 3 min

N1959BY9

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/56137376-edition-du-23012020#article-471959
Copier

par Charlotte Moronval

Le 22 Janvier 2020

► Si le salarié ne peut prétendre à la qualité de musicien permanent et donc obtenir sa réintégration et la poursuite du contrat de travail, faute d'avoir été recruté conformément aux exigences du statut du personnel artistique de l'orchestre, il peut se prévaloir de l'irrégularité au regard des dispositions impératives du Code du travail des contrats à durée déterminée qu'il a conclus avec la commune.

Telle est la solution dégagée par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 15 janvier 2020 (Cass. soc., 15 janvier 2020, n° 18-16.399, F-P+B N° Lexbase : A91973BA).

Dans les faits. Un homme est engagé par la commune de Mulhouse en qualité de musicien altiste à l'effet de participer aux représentations données par son orchestre symphonique, suivant 191 contrats à durée déterminée de février 2003 au 6 mai 2011. Le 13 juillet 2011, il saisit la juridiction prud'homale afin d'obtenir la requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée et le paiement de rappels de salaire, d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts.

La position de la cour d’appel. Pour débouter le salarié de l'ensemble de ses demandes, la cour d’appel retient que pour conclure avec un musicien un contrat à durée indéterminée lui conférant le statut de permanent ou titulaire, la commune, en vertu du statut du personnel artistique de l'orchestre régional de Mulhouse, doit obligatoirement organiser un concours pour désigner le musicien qui sera embauché, que cette condition administrative exclut qu'elle puisse s'y soustraire en concluant sans concours un contrat à durée indéterminée avec un musicien aux fins de l'employer en qualité de titulaire, que c'est pourtant ce dont tend à bénéficier le salarié par le truchement de sa demande de requalification des contrats à durée déterminée en contrats à durée indéterminée, que c'est exactement que la commune conclut au débouté de toutes les demandes du salarié procédant de la reconnaissance à son profit d'un contrat à durée indéterminée qui ferait de lui un titulaire de l'orchestre avec tous les effets qui y sont attachés au titre de l'exécution comme de la rupture, celles-ci étant privées de fondement faute par le salarié de remplir la condition administrative de succès au concours, que c'est bien à une impossibilité juridique que se heurtent les prétentions. Le salarié décide de former un pourvoi en cassation.

La solution. Enonçant la solution susvisée, la Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la cour d’appel qui, en statuant comme elle l'a fait, a violé l’article L. 1245-1 du Code du travail (N° Lexbase : L5747IA4), ensemble l'article L. 1242-2 (N° Lexbase : L3209IMS) du même code, dans leur rédaction applicable en la cause (sur La requalification sanction du CDD en CDI, cf. l’Ouvrage «Droit du travail» N° Lexbase : E7876ESI).

newsid:471959

Fiscalité des entreprises

[Brèves] Erreur comptable délibérée : absence d’obligation pour le juge de rechercher le motif pour lequel le contribuable a passé les écritures erronées

Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 19 décembre 2019, n° 419968, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6372Z8I)

Lecture: 3 min

N1930BY7

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/56137376-edition-du-23012020#article-471930
Copier

par Marie-Claire Sgarra

Le 22 Janvier 2020

Pour établir l’existence d’une erreur comptable délibérée, le juge n’a pas à rechercher le motif pour lequel le contribuable a passé ces écritures erronées.

Telle est la solution retenue par le Conseil d’Etat dans un arrêt du 19 décembre 2019 (CE 9° et 10° ch.-r., 19 décembre 2019, n° 419968, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6372Z8I).

En l’espèce, à l’issue d’une vérification de la comptabilité de la société Veolia Environnement, société mère d’un groupe fiscalement intégré, l’administration fiscale a constaté que celle-ci avait effectué des prestations de services au profit des sociétés Veolia Eau - Compagnie Générale des Eaux et Veolia Propreté sans facturer l’intégralité de la rémunération prévue par les contrats d’assistance conclus avec ces filiales et a réintégré le montant non facturé de ces prestations dans la valeur ajoutée servant de base à la cotisation minimale de taxe professionnelle à laquelle la société Veolia Environnement a été assujettie au titre de l’exercice clos en 2009 et à la CVAE à laquelle elle a été assujettie au titre de l’exercice clos en 2010. Le tribunal administratif de Montreuil rejette leurs demandes de restitution de ces impositions. La cour administrative d’appel de Versailles confirme le jugement (CAA de Versailles, 20 février 2018, n° 16VE03879 N° Lexbase : A4680XE3).

Les charges nées au cours d’un exercice doivent entrer en compte pour la détermination de la valeur ajoutée servant de base à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises due au titre de cet exercice, alors même qu’elles n’auraient pas encore été payées au moment de la clôture de cet exercice, sauf à démontrer qu’à cette date, ces charges demeuraient incertaines dans leur principe ou dans leur montant. Par suite, en déduisant que les charges correspondant aux prestations au litige étaient certaines dans leur montant à la clôture des exercices en cause, alors même que la société Veolia Environnement avait, en méconnaissance des stipulations de la convention d’assistance, omis de facturer une partie de ces prestations à ses filiales, la cour n’a pas commis d’erreur de droit.

Par ailleurs, la cour a relevé à raison que les sociétés Veolia Eau - Compagnie Générale des Eaux et Veolia Propreté ne pouvaient ignorer avoir été bénéficiaires des prestations réalisées par la société Veolia Environnement mais non facturées par celle-ci et que l’omission de comptabiliser ces dépenses en charges résultait d’une pratique concertée avec leur société mère, qui n’avait elle-même pas comptabilisé les recettes correspondantes. En déduisant de ces éléments qu’une telle omission constituait une erreur comptable délibérée commise par les sociétés dont elles ne pouvaient demander la rectification la cour n’a pas commis non plus d’erreur de droit.

Rappelons que le Conseil d’Etat a eu l’occasion de se prononcer sur l’opposabilité au contribuable d’une telle erreur volontaire (CE Contentieux, 12 mai 1997, n° 160777, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A9837ADP). L’affaire concernait l’omission d’une dépense en comptabilité afin de présenter à un organisme bancaire un résultat bénéficiaire. L'omission, par une société, de comptabiliser des frais de déplacement exposés au cours d'un exercice, destinée à lui permettre de présenter à un organisme bancaire un résultat bénéficiaire, revêt un caractère délibérément irrégulier. La société n'était, dès lors, pas fondée à demander la rectification de cette omission pour la détermination des bases de l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'exercice en cause.

 

 

 

newsid:471930

Majeurs protégés

[Brèves] Allocation d’une indemnité exceptionnelle au MJPM : compétence exclusive du juge des tutelles, même après le décès du majeur protégé

Réf. : Cass. civ. 1, 15 janvier 2020, n° 18-22.503, FS-P+B+I (N° Lexbase : A17353BU)

Lecture: 2 min

N1945BYP

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/56137376-edition-du-23012020#article-471945
Copier

par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 21 Janvier 2020

Il résulte de la combinaison de articles 419 (N° Lexbase : L8401HW3) et 443 (N° Lexbase : L8426HWY) du Code civil, ensemble l’article L. 221-9 du Code de l’organisation judiciaire (N° Lexbase : L1725KMT) que le juge des tutelles est seul compétent pour allouer au mandataire judiciaire à la protection des majeurs une indemnité exceptionnelle au titre des actes requis par la mesure de protection et impliquant des diligences particulièrement longues ou complexes ; cette compétence ne s’éteint pas au décès de la personne protégée.

Telle est la précision apportée par la première chambre civile de la Cour de cassation, aux termes d’un arrêt rendu le 15 janvier 2010 (Cass. civ. 1, 15 janvier 2020, n° 18-22.503, FS-P+B+I N° Lexbase : A17353BU).

En l’espèce, un jugement du 28 mai 2015 avait placé une personne sous curatelle renforcée pour une durée de soixante mois, sa fille, étant désignée en qualité de curatrice et une mandataire judiciaire à la protection des majeurs (MJPM), en qualité de curatrice adjointe ; un jugement du 24 juin 2016 avait transformé la mesure en tutelle, sa fille étant désignée en qualité de tutrice et la même MJPM en qualité de tutrice adjointe ; par requête du 22 juin 2017, celle-ci avait demandé une indemnité exceptionnelle au titre des diligences accomplies depuis le 28 mai 2015 ; la personne sous tutelle était décédée par la suite.

Pour rejeter la demande présentée par la mandataire judiciaire à la protection des majeurs, la cour d’appel de Paris avait retenu que le juge des tutelles n’était plus compétent en raison du décès du majeur protégé, de sorte qu’il appartenait au MJPM de faire valoir sa créance auprès de la succession et, en cas de litige, auprès de la juridiction de droit commun (CA Paris, Pôle 5, 8ème ch., 3 juillet 2018, n° 18/03047 N° Lexbase : A6899XU3).

A tort. L’arrêt est censuré par la Haute juridiction qui énonce la solution précitée.

newsid:471945

Procédure pénale

[Brèves] Réquisitions à personnes qualifiées en enquête préliminaire : l’autorisation du procureur de la République doit concerner l’enquête en cours

Réf. : Cass. crim., 17 décembre 2019, n° 19-83.574, FS-P+B+I (N° Lexbase : A1350Z9U)

Lecture: 4 min

N1974BYR

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/56137376-edition-du-23012020#article-471974
Copier

par June Perot

Le 24 Janvier 2020

► Il résulte de l’article 77-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7427LPR) que l’autorisation donnée par le procureur de la République aux officiers de police judiciaire de faire procéder à des examens techniques ou scientifiques doit être donnée dans le cadre de la procédure d’enquête préliminaire en cours et non par voie d’autorisation générale et permanente préalable ; cette interprétation est commandée par la nécessité de garantir la direction effective des enquêtes préliminaires par le procureur de la République.

C’est ainsi que se prononce la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt du 17 décembre 2019 (Cass. crim., 17 décembre 2019, n° 19-83.574, FS-P+B+I N° Lexbase : A1350Z9U).

Résumé des faits. Dans le cadre d’une enquête de flagrance ouverte à la suite d’un vol à main armée dans une bijouterie, des mesures de police technique et scientifique ont été effectuées (prélèvement et écouvillonnage de traces de sang découvertes sur les lieux). Au visa de l’article 60-1 du Code de procédure pénale, l’Institut national de la police scientifique (INPS) a été saisi par un officier de police judiciaire de l’analyse de ces prélèvements. Dans le cadre de l’enquête poursuivie dans la forme préliminaire, ce même institut a été saisi, sur le fondement de l’article 77-1 du Code de procédure pénale par un officier de police judiciaire, conformément à des instructions permanentes du procureur de la République, afin de rapprochement entre les prélèvements biologiques et le profil génétique d’un individu. Dans le cadre de l’information ouverte sur ces faits, ce dernier a été interpellé puis mis en examen pour vol à main armée et placé en détention provisoire. Le prévenu présenté une requête aux fins d’annulation de pièces de la procédure.

En cause d’appel. Pour écarter le moyen de nullité de l’examen technique et scientifique réalisé par l’INPS et des actes subséquents, l’arrêt relève que le procureur de la République a, par instruction permanente, expressément autorisé les enquêteurs « à requérir l’INPS ou l’IRCGN aux fins d’analyse des prélèvements effectués sur une scène d’infraction, un objet ou une victime, et de comparaison avec les données du FNAEG aux fins de confirmation des rapprochements réalisés par le FNAEG » et qu’il n’est ainsi donné aucune marge d’appréciation aux enquêteurs dans une telle situation. Les juges en déduisent que le parquet a ainsi exercé son pouvoir de direction des enquêtes préliminaires diligentées par les officiers de police judiciaire.

Cassation. La Haute juridiction considère qu’en se prononçant ainsi la chambre de l’instruction a méconnu le sens et la portée de l’article 77-1 du Code de procédure pénale et du principe ci-dessus rappelé. C’est à notre connaissance la première fois que la Cour de cassation tire cette solution de l’article 77-1 (sur les réquisitions, v. dans l’Ouvrage « La procédure pénale » [dir. J.-B. Perrier], l’étude de J.-Y. Maréchal, Les actes d’investigations, Les réquisitions N° Lexbase : E7358ZKQ).

Selon la Chambre criminelle, cette interprétation est commandée par la nécessité de garantir la direction effective des enquêtes préliminaires par le procureur de la République. La Chambre criminelle a auparavant énoncé que les dispositions de l’article 77-1 sont édictées dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice (Cass. crim., 14 octobre 2003, n° 03-84.539, F-P+F+I N° Lexbase : A0864DAA). Plus récemment, elle a précisé que les dispositions de l’article 77-1 sont édictées « en vue de garantir la fiabilité de la recherche et de l’administration de la preuve » (à ce sujet, lire B. Auroy, Nullités procédurales et casuistique jurisprudentielle : la sanction du défaut d’autorisation de réquisitions à fins d’examen technique ou scientifique, Lexbase Pénal, juillet 2019 N° Lexbase : N9787BXR).

newsid:471974

Santé

[Brèves] Possible accès aux documents contenus dans le dossier d’une demande d’autorisation de mise sur le marché en l’absence de preuve relative à un risque d’atteinte aux intérêts commerciaux

Réf. : CJUE, 22 janvier 2020, aff. C-175/18 P, PTC Therapeutics International Ltd c/ Agence européenne des médicaments (EMA) (N° Lexbase : A14673CC) et aff. C-178/18 P, MSD Animal Health Innovation GmbH c/ Agence européenne des médicaments (EMA) (N° Lexbase : A14693CE)

Lecture: 3 min

N1987BYA

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/56137376-edition-du-23012020#article-471987
Copier

par Laïla Bedja

Le 29 Janvier 2020

► L’accès aux documents contenus dans le dossier d’une demande d’autorisation de mise sur le marché des médicaments doit être autorisé ; une opposition à un tel accès doit fournir des explications sur la nature, l’objet et la portée des données dont la divulgation porterait atteinte aux intérêts commerciaux.

Telle est la solution retenue, pour la première fois, par la Cour de justice de l’Union européenne dans deux arrêts rendus le 22 janvier 2020 (CJUE, 22 janvier 2020, aff. C-175/18 P, PTC Therapeutics International Ltd c/ Agence européenne des médicaments (EMA) N° Lexbase : A14673CC et aff. C-178/18 P, MSD Animal Health Innovation GmbH c/ Agence européenne des médicaments (EMA) N° Lexbase : A14693CE).

Les faits. L’Agence européenne des médicaments (EMA) avait accordé l’accès à des documents contenant des informations soumises dans le cadre de la procédure relative à des demandes d’autorisation de mise sur le marché de médicaments (AMM). Deux sociétés, qui commercialisent des spécialités pharmaceutiques ont demandé l’annulation des décisions accordant l’accès aux documents, à savoir des rapports d’essais toxicologiques et un rapport d’essai clinique, concernant deux médicaments, l’un à usage humain, l’autre à usage vétérinaire.

Après avoir délivré les AMM de ces médicaments, l’EMA a décidé de divulguer à des tiers le contenu de ces rapports, avec quelques occultations. Contrairement aux requérantes aux pourvois, qui arguaient que ces rapports devaient bénéficier d’une présomption de confidentialité dans leur intégralité, l’EMA estimait que, à l’exclusion des informations déjà occultées, lesdits rapports ne présentaient pas un caractère confidentiel.

Saisie, la Cour de l’Union s’est prononcée sur la légalité des décisions de l’EMA d’accorder, en vertu du Règlement n° 1049/2001 (N° Lexbase : L5285DLC), l’accès à ces documents.

≈ Sur l’application d’une présomption générale de confidentialité par une institution, un organe ou un organisme de l’Union, saisi d’une demande d’accès aux documents. Cette présomption générale n’est qu’une simple faculté pour l’institution, l’organe ou l’organisme, qui conserve toujours la possibilité de procéder à un examen concret et individuel des documents en cause. Ainsi, l’EMA n’était pas obligée d’appliquer une telle présomption auxdits rapports et celle-ci avait effectué un examen concret et individuel de ces rapports, qui l’avait d’ailleurs conduite à occulter certains passages de ceux-ci.

≈ Sur la question de l’atteinte aux intérêts commerciaux des sociétés requérantes. L’article 4, paragraphe 2, premier tiret du Règlement n° 1049/2001 prévoit le refus « d’accès à un document dans le cas où sa divulgation porterait atteinte à la protection des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée, y compris en ce qui concerne la propriété intellectuelle ». La Cour dit qu’il appartient aux requérantes de fournir la preuve de l’atteinte, d’un risque, ce qui fait défaut dans ces affaires. Aussi, les sociétés n’ont pas identifié concrètement et précisément les passages des rapports litigieux pouvant porter atteinte à leurs intérêts commerciaux en cas de divulgation.

newsid:471987

Urbanisme

[Brèves] Reconstruction d'une maison : prédominance de la sécurité des personnes sur le droit au respect de la vie privée et familiale

Réf. : Cass. civ. 3, 16 janvier 2020, n° 19-13.645, FS-P+B+I (N° Lexbase : A17483BD)

Lecture: 2 min

N1967BYI

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/revue-juridique/56137376-edition-du-23012020#article-471967
Copier

par Yann Le Foll

Le 22 Janvier 2020

Le besoin social impérieux de préserver la sécurité des personnes exposées à un risque naturel d’inondation et d’éviter toute construction nouvelle ou reconstruction à l’intérieur des zones inondables soumises aux aléas les plus forts doit prendre le pas sur le droit au respect de la vie privée et familiale, et du domicile du requérant.

 

 

Telle est la solution d’un arrêt rendu par la Cour de cassation le 16 janvier 2020 (Cass. civ. 3, 16 janvier 2020, n° 19-13.645, FS-P+B+I N° Lexbase : A17483BD).

 

 

Faits. Selon l’arrêt attaqué, une personne est propriétaire d’un terrain sur lequel était édifié un pavillon d’habitation qui, le 18 juin 2006, a été détruit par un incendie. Souhaitant procéder à la reconstruction du pavillon, elle a présenté trois demandes de permis de construire qui ont été respectivement rejetées le 12 mars, le 16 mai et le 7 septembre 2007. L’intéressée ayant, néanmoins, entrepris la reconstruction de sa maison, la commune l’a assignée le 28 octobre 2014 en démolition.

 

Pourvoi. Dans son pourvoi, la personne concernée mettait en avant sa situation personnelle, parent isolé en charge de trois enfants mineurs et éligible au revenu de solidarité active, la tolérance de la commune pendant sept ans depuis la reconstruction et de l’absence de droits de tiers en jeu, mais aussi le fait que la construction constitue une reconstruction à l’identique après sinistre édifiée dans une zone urbaine dense proche d’un cours d’eau où ne sont prohibées, selon le plan de prévention des risques prévisibles d’inondation applicable, que les constructions nouvelles, mais non les reconstructions après sinistre.

 

Décision. La Cour suprême rejette cet argumentaire. Elle décide qu’ayant retenu qu’il existait un besoin social impérieux de préserver la sécurité des personnes exposées à un risque naturel d’inondation et d’éviter toute construction nouvelle ou reconstruction à l’intérieur des zones inondables soumises aux aléas les plus forts, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision d’ordonner la démolition.

 

 

Dans un arrêt également rendu le 16 janvier 2020 (Cass. civ. 3, 16 janvier 2020, n° 19-10.375, FS-P+B+I (N° Lexbase : A17463BB), la Cour de cassation a adopté une position différente, annulant la démolition de divers aménagements réalisés sur un terrain classé en zone naturelle par le plan local d’urbanisme, au motif de la préservation du droit au respect de la vie privée et familiale et du domicile (cf. l'Ouvrage "Droit de l'urbanisme" N° Lexbase : E4941E77).

newsid:471967

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.