La lettre juridique n°196 du 5 janvier 2006

La lettre juridique - Édition n°196

Éditorial

ISF ou l'insoutenable légèreté de l'être*

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N2805AK4

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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la rédaction

Le 27 Mars 2014


Ouf ! Le droit d'auteur n'est pas passé loin d'une nouvelle déconvenue à l'approche de l'année 2006... Plus ou moins mis à mal par les députés, après l'adoption, le 22 décembre dernier, de deux amendements au projet de loi relatif au droit d'auteur et aux droits voisins, qui visaient à légaliser les échanges de fichiers sur les réseaux de peer to peer, moyennant une rémunération pour les artistes, au lieu et place d'une plus grande pénalisation, ces mêmes droits d'auteur, ou le produit de l'exploitation des oeuvres, faillirent, récemment, tomber sous les fourches caudines de l'impôt de solidarité sur la fortune. Mais, c'eut été sans compter sur la vigilance de la Cour de cassation, rappelant, par un arrêt du 13 décembre 2005, que pour qu'un revenu ou une créance de revenu soit imposable à l'ISF, encore faut-il qu'il soit disponible ; or, tel n'est pas le cas d'une créance de revenu sur un compte d'auteur auprès d'une maison d'édition. Si "la promotion de la création littéraire et artistique, condition de la diversité culturelle, constitue l'une des grandes priorités du Gouvernement" (première phrase de l'exposé des motifs du projet de loi), l'administration fiscale n'a que faire de ces hautes considérations ; le droit d'auteur comme droit incorporel attaché à une oeuvre n'est certes pas soumis à l'impôt sur la fortune, mais les profits tirés des oeuvres elles-mêmes demeurent imposables. Aussi un compte d'auteur comprend-il les droits incorporels et/ou les profits enregistrés sur les mêmes oeuvres ? Comme le souligne Daniel Faucher, juriste-fiscaliste au CRIDON de Paris, dans ses observations, Pas d'ISF sur les créances de revenus !, à cette question sur L'identité des créances, la Haute juridiction n'apporte aucune réponse et se place sur le terrain de la disponibilité des revenus, excluant d'appliquer au compte d'auteur le régime du compte courant non professionnel. Que les forces créatrices de la Nation se rassurent, dans le domaine professionnel comme dans le domaine artistique, la France fait attention à ne pas encourager la fuite des cerveaux... En l'espèce, il eut été incongru que l'un des acteurs du printemps de Prague en 1968, forcé de s'exiler en France, déchu de sa nationalité tchécoslovaque, dusse s'exiler à nouveau afin d'échapper au "communautarisme" de l'ISF ! Mais aux confins des Paradoxes terminaux, reprenant l'argumentation du Conseil de la concurrence, l'administration, ou plutôt le Gouvernement, pourrait arguer, afin de ne pas refondre ou supprimer l'ISF, de "l'inélasticité" de l'imposition en France ; c'est-à-dire que, par parallélisme avec le droit de la concurrence, les populations aisées seraient insensibles à l'augmentation de leur imposition, puisqu'elles seraient insensibles à l'augmentation des prix ! Mais, ce serait là extrapoler de beaucoup et oublier Laffer. Cessons-là La plaisanterie, et sur l'inélasticité de l'offre des palaces parisiens, les éditions Lexbase vous invitent à lire le commentaire de André-Paul Weber, Professeur d'économie, ancien rapporteur au Conseil de la concurrence, Hôtels parisiens, sanctions et cohérence.

* Milan Kundera

newsid:82805

Rel. individuelles de travail

[Jurisprudence] Le salarié bénéficiaire de stock-options victime d'un licenciement injustifié avant d'avoir pu lever ses options ne peut solliciter que l'indemnisation de son préjudice

Réf. : Cass. soc., 1er décembre 2005, n° 04-41.277, Société Thales Air Defence c/ M. Jean-Pierre Bourg, FS-P+B (N° Lexbase : A8553DLD)

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N2743AKS

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par Gilles Auzero, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV

Le 07 Octobre 2010

L'exercice des options de souscription ou d'achat d'actions est fréquemment restreint par des clauses dites "de présence", qui subordonnent la levée des options à la condition que le salarié fasse encore partie du personnel aux dates prévues pour l'exercice du droit d'option. Il en résulte que le salarié licencié avant d'avoir pu lever ses options perd tout droit à celles-ci et ne peut prétendre à aucune indemnisation. Pour entraîner cette conséquence, il faut encore que le licenciement soit justifié. En effet, lorsque le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, le salarié perd également le droit d'exercer ses options en application de la clause précitée. Mais, il subit alors nécessairement un préjudice qui doit être réparé. Si la Cour de cassation vient rappeler cette solution dans un arrêt rendu le 1er décembre 2005, elle vient, en outre, expressément exclure la possibilité pour le salarié de demander l'exécution forcée de l'obligation.


Décision

Cass. soc., 1er décembre 2005, n° 04-41.277, Société Thales Air Defence c/ M. Jean-Pierre Bourg, FS-P+B (N° Lexbase : A8553DLD)

Cassation (CA Versailles, 5ème chambre sociale, 18 décembre 2003)

Textes visés : C. civ., art. 1134 (N° Lexbase : L1234ABC) ; C. civ., art. 1147 (N° Lexbase : L1248ABT) ; C. trav., art. L. 122-14-4 (N° Lexbase : L8990G74)

Mots-clefs : stock-options ; attribution individuelle ; condition (oui) ; présence dans l'entreprise au jour de la levée de l'option ; licenciement injustifié ; caducité des options (oui) ; indemnisation du préjudice (oui).

Liens bases : ;

Apport de l'arrêt

La clause du plan d'options d'achat prévoyant la caducité des options en cas de licenciement du bénéficiaire fait obstacle à l'exercice de ce droit sans qu'il y ait lieu de distinguer selon la qualification du licenciement. Le salarié privé de la possibilité de lever ses options du fait de son licenciement sans cause réelle et sérieuse peut seulement solliciter l'indemnisation du préjudice subi.

Faits

1. Un salarié, engagé en 1969 par la société Thomson, s'était vu attribuer, en septembre 1999, le bénéfice d'une option d'achat de 10 000 actions de la société, cette option pouvant être exercée dans un délai compris entre 5 et 10 ans à compter de la date d'attribution.

Licencié le 29 août 2000, le salarié a été informé par la société qu'en application de l'article 7.1.1 du règlement du plan d'options selon lequel "le licenciement du bénéficiaire entraîne la caducité de ses options à la date de rupture du contrat de travail, c'est-à-dire à la fin du préavis", il avait perdu le bénéfice de son option.

2. Pour condamner l'employeur à maintenir au salarié le bénéfice de l'option d'achat d'actions qui lui avait été consentie, l'arrêt attaqué a relevé que le licenciement du salarié n'étant pas fondé sur une cause réelle et sérieuse, l'article précité du règlement du plan d'options d'achat ne pouvait trouver application.

Solution

1. Cassation pour violation des articles 1134 et 1147 du Code civil, ensemble l'article L. 122-14-4 du Code du travail.

2. "Qu'en statuant ainsi, alors que la clause du plan d'options d'achat prévoyant la caducité des options en cas de licenciement du bénéficiaire faisait obstacle à l'exercice de ce droit sans qu'il y ait lieu de distinguer selon la qualification du licenciement et que le salarié, privé de la possibilité de lever ses options du fait de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, pouvait seulement solliciter l'indemnisation du préjudice subi, la cour d'appel a violé les textes susvisés".

Commentaire

1. Les limitations contractuelles à la levée des options

  • Présentation

L'attribution de stock-options à un salarié ou un mandataire social passe par plusieurs étapes qui suscitent des difficultés d'inégales importances. Tout d'abord, l'assemblée générale extraordinaire doit autoriser l'opération et en fixer le cadre général. Cette autorisation ne fait naître aucun droit individuel. C'est, ensuite, le conseil d'administration ou le directoire qui prend le relais afin de fixer les conditions dans lesquelles seront consenties les options.

Outre, évidemment, le choix des bénéficiaires, il appartient à l'organe de gestion concerné d'arrêter les éléments essentiels de l'option de souscription ou d'achat d'actions, qu'il s'agisse du prix du nombre de titres susceptibles d'être acquis ou du délai d'exercice de l'option. Une fois ces éléments arrêtés, les options vont être notifiées aux bénéficiaires qui pourront les lever dans le délai prévu.

Il arrive fréquemment, en pratique, que la société émettrice vienne assortir les options consenties de diverses conditions. Le plus souvent, le droit d'option est soumis au fait que le salarié, ou le mandataire social, soit encore présent dans l'entreprise au moment où il exerce ses options. En conséquence, la perte de la qualité de salarié ou de mandataire social entraîne la perte définitive des options non exercées.

Tel était le cas en l'espèce, en application de l'article 7.1.1 du règlement du plan d'options, selon lequel "le licenciement du bénéficiaire entraîne la caducité de ses options à la date de rupture du contrat de travail, c'est-à-dire à la fin du préavis". Le régime juridique de ces clauses est, de manière évidente, lié à la qualification juridique qui peut être donnée à l'option d'achat d'actions.

  • Nature juridique des options d'achat ou de souscription d'actions

Jusqu'à une date très récente, la nature juridique des options d'achat ou de souscription d'actions pouvait donner lieu à discussion, étant entendu que deux qualifications pouvaient être retenues : celle d'engagement unilatéral et celle de contrat (sur ces discussions, voir notre article, Attribution individuelle des stock-options et licenciement injustifié du bénéficiaire : le recours salutaire au droit des obligations, Bull. Joly Sociétés 2005, p. 177, § 34). Si certaines décisions de la Cour de cassation laissaient à penser que sa préférence allait vers une analyse contractuelle de l'acte juridique en cause, elle ne l'affirmait pas toutefois de manière expresse (sur cette jurisprudence, v. notre art. préc.).

Depuis un arrêt rendu le 20 septembre 2005, le doute n'est plus permis. Ainsi que l'affirme, en effet, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans cette décision, l'option d'achat d'actions "constitue une promesse unilatérale faite par la société par actions à certains de ses salariés ou mandataires sociaux de leur vendre sur leur demande un nombre déterminé de ses actions dans un délai et moyennant un prix définitivement fixés" (Cass. civ. 2, 20 septembre 2005, n° 03-30.709, Société Thales training et simulation (TTS), FS-P+B N° Lexbase : A5813DKI, JCP éd. S 2005, 1417, note R. Vatinet).

La cause est désormais entendue : l'option d'achat ou de souscription d'actions doit s'analyser en un contrat unilatéral et, plus précisément, en une promesse unilatérale de contrat, par laquelle "un individu, le promettant, s'engage envers un autre qui l'accepte, le bénéficiaire, à conclure un contrat dont les conditions sont dès à présent déterminées si celui-ci lui demande dans un certain délai" (F. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette, Droit civil, Les obligations, Dalloz, Précis, 2005, 9ème éd., § 191).

Nous n'épiloguerons pas sur le caractère quelque peu artificiel de cette qualification dès lors que le salarié bénéficiaire des stock-options ne manifeste que rarement son acceptation aux options qui lui sont proposées. Il est vrai que l'on peut se contenter d'une acceptation tacite, dans la mesure où l'offre lui est faite dans son intérêt exclusif. En outre, et ainsi que le relève le Professeur Vatinet (note préc., p. 32), "même si l'option s'analyse en un contrat, le contenu de la promesse n'est pas nécessairement négociable pour autant [...]". Le salarié n'a d'autre choix que d'accepter ou de refuser une attribution qui, en tout état de cause, se présente comme un avantage consenti par la société. Cette promesse unilatérale de vente est un contrat d'adhésion". Si l'on souscrit sans peine à ces analyses, on reste convaincu que la qualification d'engagement unilatéral aurait donné tout autant satisfaction (v. notre art. préc.).

  • Restrictions contractuelles à l'exercice des options

Ainsi que nous l'avons déjà évoqué, l'exercice des options est souvent restreint par des clauses de présence. Outre qu'une telle stipulation paraît conforme à la finalité des plans d'option, qui est de motiver et de fidéliser les salariés, il faut relever que la Cour de cassation en a admis la validité de principe dans un arrêt rendu le 9 mai 2001 (Cass. soc., 9 mai 2001, n° 98-42.615, M. Maurice Pommier c/ Société Bureau Véritas, inédit N° Lexbase : A4159AT9).

Une telle clause peut être analysée comme une condition au sens de l'article 1168 du Code civil (N° Lexbase : L1270ABN). La présence du salarié dans l'entreprise est bien un évènement futur et incertain auquel est subordonnée l'existence de l'obligation pesant sur la société émettrice (v., en ce sens J.-J. Caussain, Fl. Deboissy, G. Wicker, obs. ss. Cass. soc., 29 septembre 2004 : JCP éd. E 2005, 131, spéc., n° 4 et notre art. préc.).

Dès lors que la validité des clauses de présence est admise, elles doivent produire effet et il faut considérer que le salarié licencié avant d'avoir pu exercer ses options perd le bénéfice de celles-ci. Si une telle conséquence est évidente lorsque le licenciement est justifié, il n'en va pas de même lorsqu'il est privé de cause réelle et sérieuse.

2. Les conséquences du licenciement injustifié du salarié bénéficiaire de stock-options

  • Confirmation de la réparation par équivalent

Dans un important arrêt rendu le 29 septembre 2004, que nous avions pu commenter dans ces mêmes colonnes, la Cour de cassation avait expressément affirmé que lorsqu'un salarié a été privé de son droit de lever les options sur titres du fait de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, il en résulte "nécessairement" un préjudice qui doit être réparé (Cass. soc., 29 septembre 2004, n° 02-40.027, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A4508DDC, lire nos obs., Stocks-options et licenciement sans cause réelle et sérieuse, Lexbase Hebdo n° 137 du 7 octobre 2004 - édition sociale N° Lexbase : N3011AB7 ; JCP éd. E 2005, 131, obs. J.-J. Caussain, Fl. Deboissy, G. Wicker ; Bull. Joly Sociétés 2005, p. 97, note J.-J. Daigre).

Confirmée par la suite (v., par ex., Cass. soc., 16 mars 2005, n° 02-47.533, F-D N° Lexbase : A2979DHS, Bull. Joly Sociétés 2005, p. 1120, avec nos obs.), cette solution avait été retenue dans des hypothèses où, il convient de le noter, l'ancien salarié ne demandait pas à exercer ses options.

En d'autres termes, restait posée la question de savoir si le salarié injustement licencié pouvait, en outre, demander en justice à exercer les options dont il avait été privé par la faute de son employeur. L'arrêt commenté, et c'est là son principal apport, donne l'occasion à la Cour de cassation de répondre par la négative. Se trouve ainsi rejetée l'exécution forcée en nature.

  • Le rejet de l'exécution forcée en nature

Dans une décision rendue le 23 juin 2004, dont il faut relever qu'elle n'a pas été publiée, la Cour de cassation a affirmé que "le règlement de stock-options prévoyait que l'exercice des options d'achat était soumis à la condition que le contrat de travail du bénéficiaire soit en vigueur à la date où elles sont levées, la cour d'appel a pu décider, sans dénaturation, que ces dispositions, dont le salarié ne contestait pas avoir eu connaissance, faisaient obstacle à l'exercice de ce droit par M. X, dès lors que son contrat de travail avait été rompu avant la période prévue pour la levée des options d'achat, sans qu'il y ait lieu de distinguer selon que son licenciement procédait ou non d'une cause réelle et sérieuse". Ainsi, à lire cette décision, le licenciement injustifié du salarié lui faisait perdre son droit d'option.

C'est cette solution que vient expressément confirmer la Chambre sociale dans l'arrêt commenté qui sera publié. Rappelons, en effet, que cette dernière décide de manière on ne peut plus claire, que "la clause du plan d'options d'achat prévoyant la caducité des options en cas de licenciement du bénéficiaire faisait obstacle à l'exercice de ce droit sans qu'il y ait lieu de distinguer selon la qualification du licenciement et que le salarié, privé de la possibilité de lever ses options du fait de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, pouvait seulement solliciter l'indemnisation du préjudice subi".

Il apparaît ainsi clairement que la Cour de cassation rejette toute exécution forcée en nature, ce qui, il faut l'avouer, n'est pas sans susciter un certain sentiment de déception. En effet, ainsi que nous avions essayé, avec d'autres, de le démontrer, une telle sanction pouvait être, d'un point de vue juridique, admise. Cette assertion procédait de l'idée que la clause restreignant le droit d'option du salarié peut être qualifié de condition résolutoire.

Or, en application de l'article 1178 du Code civil (N° Lexbase : L1280ABZ), la condition doit être réputée défaillie lorsque c'est le débiteur, libéré sous cette condition, qui en provoqué la réalisation. En conséquence, le salarié injustement licencié pouvait prétendre lever les options qui lui avaient été consenties nonobstant la rupture de son contrat de travail (v., notre art. préc ; v. aussi, J.-J. Caussain, Fl. Deboissy, G. Wicker, obs. préc.).

newsid:82743

Social général

[Le point sur...] Quel avenir pour la contribution Delalande ?

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N2661AKR

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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Haute Alsace

Le 07 Octobre 2010

Depuis sa création en 1987, la contribution Delalande fait débat, de manière récurrente. A échéances régulières, des parlementaires déposent des propositions de lois visant à sa suppression. Surtout, lors de la signature de l'Accord national interprofessionnel du 13 octobre 2005 relatif à l'emploi des seniors, les partenaires sociaux ont invité les pouvoirs publics (et les partenaires sociaux eux-mêmes, dans le cadre de la gestion du régime d'assurance chômage) à dresser un bilan de cette contribution, dont on ne mesure pas très bien les effets sur la politique de "vieillissement actif", c'est-à-dire une politique d'emploi des seniors. Le bilan que dressent les économistes est très nuancé. En accroissant le coût de licenciement des quinquagénaires, cette contribution incite les entreprises à ne pas licencier ces travailleurs ("effet de rétention"). Mais, la contribution génère deux effets défavorables à l'emploi, liés à l'anticipation par les entreprises du surcoût lié à la contribution. L'entreprise qui emploie un travailleur approchant de l'âge où il sera protégé par la contribution peut vouloir précipiter son licenciement, afin d'éviter le paiement ultérieur de la contribution ("effet de seuil"). L'entreprise en phase d'embauche peut anticiper et penser que si un événement défavorable ultérieur la conduit à licencier son salarié et si ce salarié a alors l'âge protégé, elle devra payer la contribution Delalande. Ce surcoût anticipé la conduit à privilégier l'embauche de travailleurs plus jeunes, qui ne seront pas concernés dans l'immédiat par la contribution, au détriment des travailleurs plus âgés, protégés ou en passe de l'être ("effet de restriction des embauches" de travailleurs âgés).

Aussi, les effets de la contribution Delalande sur l'emploi des travailleurs âgés paraissent contradictoires. L'effet sur les licenciements est double : un effet de rétention, favorable, et un effet de seuil d'entrée, défavorable aux âges où le barème de la contribution se durcit. L'effet de restriction des embauches est, lui, défavorable aux travailleurs âgés éligibles ou en voie d'être éligibles à la contribution Delalande.

1. Le bilan de la contribution Delalande

1.1. Le dispositif en droit interne

La contribution Delalande, mise en place par loi n° 87-518 du 10 juillet 1987 (loi modifiant le Code du travail et relative à la prévention et à la lutte contre le chômage de longue durée N° Lexbase : L6433HEY), était destinée à financer le régime d'assurance chômage et à dissuader les employeurs de licencier les travailleurs âgés, selon une logique du "vieillissement actif' (C. trav., art. L. 321-3 N° Lexbase : L8925G7P). Le montant de cette contribution est variable selon l'âge du salarié et la taille de l'entreprise. Son produit est versé à l'Unedic qui, depuis 1999, en reverse la moitié à l'Etat afin de financer les préretraites AS-FNE. Mais, le dispositif, à l'usage, s'est montré très complexe (réformé à de nombreuses reprises) et peu dissuasif, en raison du nombre important de cas d'exonérations.

Cette sanction pécuniaire ne concernait, à l'origine, que les licenciements économiques des salariés de 55 ans et plus. Elle a été étendue par la loi n° 89-549 du 2 août 1989 (loi modifiant le Code du travail et relative à la prévention du licenciement économique et au droit à la conversion N° Lexbase : L4992A8E), à quelques exceptions près, à toute rupture du contrat de travail de salariés âgés de 55 ans et plus, ouvrant droit aux allocations d'assurance chômage.

Pour éviter des phénomènes d'anticipation, cette contribution a été élargie par la loi n° 92-722 du 29 juillet 1992 (loi portant adaptation de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au revenu minimum d'insertion et relative à la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale et professionnelle N° Lexbase : L7461AI8) aux salariés âgés de 50 ans et plus. Son montant a été augmenté par le décret n° 98-1201 du 28 décembre 1998 (décret modifiant l'article D. 321-8 du Code du travail N° Lexbase : L6447HEI). Le champ d'application de la contribution a été étendu à feu les conventions de conversion et aux refus de convention de préretraite AS-FNE. En dernier lieu, la loi du 21 août 2003 (loi n° 2003-775 portant réforme des retraites N° Lexbase : L9595CAM) a élargi l'un de ces cas d'exonération (prévu au 7° de l'article L. 321-3 du Code du travail), relatif à la rupture du contrat de travail d'un salarié âgé de plus de 50 ans à la date de son embauche et inscrit à cette date depuis plus de 3 mois comme demandeur d'emploi.

La loi du 21 août 2003 a ramené de 50 à 45 ans l'âge du salarié, lors de son embauche, ouvrant droit à une telle exonération, avec pour objectif de favoriser l'accès à l'emploi des salariés en seconde partie de carrière et supprimer la condition d'inscription comme demandeur d'emploi. L'objectif était de favoriser la mobilité professionnelle des salariés âgés, sans que cette mobilité exige le passage par une période de chômage.

Cette modification législative a été critiquée, en raison de son ambivalence. D'un côté, elle peut inciter les employeurs à embaucher des candidats à l'emploi ayant plus de 45 ans mais, d'un autre côté, elle supprime le frein au licenciement des salariés qui, au moment de leur embauche, avaient plus de 45 ans. De plus, l'extension de l'exonération à des catégories de salariés plus jeunes brouille l'objectif de la cotisation qui était de favoriser l'emploi des plus de 50 ans. Enfin, et en totale contradiction avec la finalité du dispositif, les employeurs ne risquent-ils pas d'être incités à embaucher des moins de 50 ans qui pourront être licenciés sans frein lorsqu'ils auront atteint ou dépassé cet âge ?

Il ne faudrait pas, dans ces conditions, que pour limiter encore les effets pervers de cette exonération à l'égard de la catégorie d'âge immédiatement inférieure aux 45 ans, le législateur en élargisse encore le champ et réduise encore l'efficacité de la cotisation au regard de son objectif initial !

1.2. Le dispositif en droit comparé

Selon la Dares, en 2004, le seul pays européen à utiliser un système de taxation des licenciements des salariés âgés est la Finlande. La taxe sur les licenciements de personnes de plus de 50 ans se distingue de la contribution Delalande par le fait qu'il ne s'agit pas d'un système forfaitaire. Inspiré du système de l'"experience rating" américain (bien que ne s'appliquant qu'aux salariés âgés), la contribution introduite en Finlande est calculée selon le montant d'indemnité de chômage que doit percevoir la personne licenciée jusqu'à son âge de départ en retraite. Créé en 1997, le système finlandais exonère, depuis 1998, les personnes embauchées à partir de 50 ans pour tenter d'éviter les effets de seuil. Parallèlement, le gouvernement finlandais a entrepris en 2004 de réduire certaines cotisations sociales plus élevées sur l'emploi des seniors et de les abaisser au même niveau que pour les autres salariés.

La taxe sur le licenciement des seniors est maintenue jusqu'à présent. Il n'existe pas d'analyse finlandaise ayant évalué son efficacité. En 2004, l'OCDE avait consacré une monographie à la Finlande, en critiquant l'effet dissuasif que cette contribution exerce sur le recrutement des classes d'âge inférieures à 50 ans sans que cette critique repose sur une analyse précise du cas finlandais. Dans la mesure où la Finlande tend à se rapprocher du modèle scandinave de non-différenciation de la situation des seniors par rapport aux autres catégories de salariés, il est probable, selon la Dares, que cette taxe sera supprimée à plus ou moins long terme.

2. Les propositions de suppression ou de réforme de la contribution Delalande

Les nombreux travaux qui ont été consacrés à la contribution Delalande ne permettent pas de dégager une ligne directrice claire, au regard d'un bilan que l'on pourrait dresser. Selon les économistes, l'effet sur les licenciements est plus faible ou difficile à mettre en évidence : les décisions de licenciement des entreprises seraient peu sensibles aux fortes variations du barème de la contribution Delalande. Ce débat renvoie à l'ambiguïté théorique des effets des coûts de licenciement sur l'emploi. L'objectif poursuivi, la protection de l'emploi, est de réduire les licenciements, en augmentant leur coût.

Mais, elle a aussi pour effet de réduire les embauches, puisque les entreprises prennent en compte la hausse moyenne du coût du travail liée aux coûts de licenciement. L'effet net sur l'emploi reste pour les économistes indéterminé.

2.1. Réformer la contribution Delalande

Le Sénat a exprimé ses réserves sur ce dispositif. Le durcissement progressif de la contribution Delalande ne se serait pas traduit par une réelle limitation des licenciements des salariés âgés ou par une augmentation effective de leur taux d'emploi. Mais, pour des raisons budgétaires, il ne faudrait pas supprimer cette contribution Delalande : le produit de cette contribution constitue une ressource non négligeable du régime d'assurance chômage. En 2002, elle a ainsi généré 594 millions d'euros de recettes brutes pour l'Unédic. Mais l'Unédic a parallèlement versé 355 millions d'euros à l'Etat au titre de sa contribution au financement du FNE, soit un montant bien supérieur aux crédits budgétaires consacrés par l'Etat au financement des préretraites AS-FNE. La contribution Delalande ne constituerait donc, en définitive, qu'une ressource nette relativement marginale pour le régime d'assurance chômage.

D'autres travaux ont suggéré de réformer la contribution Delalande pour la rendre plus efficace. En effet, un certain nombre de contentieux sont liés à la contestation par l'Assedic de l'existence d'une faute grave à l'origine du licenciement, particulièrement lorsqu'une transaction est ultérieurement signée entre l'employeur et le salarié allouant à ce dernier une indemnité d'un montant important. La tentation est grande pour les parties de procéder ainsi : l'employeur pour échapper, en partie au moins, au paiement de la contribution aux organismes d'assurance chômage, le salarié pour bénéficier d'une partie de la somme normalement due à ces derniers. En pratique, la fraude semble monnaie courante, voire systématique. Le seul obstacle à sa mise en oeuvre est d'ordre psychologique, le salarié pouvant en effet répugner à se voir licencier pour faute grave même fallacieuse. La jurisprudence admet le droit pour l'Assedic de contester l'existence d'une faute grave, dans la mesure où, si l'autorité de la chose jugée attachée à la transaction interdit au juge de se prononcer sur le litige que cette convention avait pour objet de clore, il peut en revanche restituer aux faits énoncés dans la lettre de licenciement leur exacte qualification. Cependant, la preuve est délicate et peut-être serait-il opportun de ne pas exonérer l'employeur du paiement de la contribution Delalande en cas de licenciement pour faute grave suivi d'une transaction.

2.2. Supprimer la contribution Delalande ?

Un sénateur (L. Souvet) estimait que "s'il est douteux qu'elle [la contribution Delalande] contribue à diminuer les licenciements des salariés de plus de 50 ans, il est certain que l'augmentation et l'extension de la contribution Delalande n'incitera pas à la création d'emplois".

De fait, le durcissement progressif de la contribution Delalande ne se serait pas traduit par une limitation des licenciements des salariés âgés ou par une augmentation effective de leur taux d'emploi. L'Unédic estime ainsi que les deux tiers des ruptures de contrats de travail d'un salarié de plus de 50 ans ne sont pas soumises à la contribution, compte tenu des très nombreux cas d'exonérations. Loin d'être dissuasive aux licenciements, elle semblerait, en revanche, constituer un obstacle non négligeable à l'embauche des salariés âgés. Les salariés de plus de 50 ans ne seraient pas épargnés par les licenciements économiques (le taux des licenciements des salariés âgés de plus de 50 ans reste proche de 30 %) et le taux de reprise d'emploi serait de 3 % pour les chômeurs de 50 ans et plus contre 7,2 % pour l'ensemble des demandeurs d'emploi. Les chômeurs de plus de 50 ans restent particulièrement touchés par le chômage de longue durée.

De la même manière, le Conseil d'Orientation des Retraites, dans une fiche préparée pour sa réunion du 11 juin 2002, s'interrogeait sur l'impact de cette contribution et regrettait l'absence de toute évaluation sérieuse de celui-ci : "L'impact positif ou négatif de la contribution Delalande sur l'emploi des salariés âgés est très discuté. On peut, en effet, penser que si le caractère dissuasif pour le licenciement paraît peu contestable, cet impact est peut-être compensé ou dépassé par une dissuasion à l'embauche. Cependant, aucune étude d'évaluation sur les entreprises ayant versé cette cotisation à l'Unédic ou auprès des directeurs des ressources humaines n'a été effectuée à ce jour".

En juin 2005, des parlementaires ont déposé des propositions de loi en vue de sa suppression. Cette mesure s'étant avérée désincitative en ce qui concerne l'embauche des salariés seniors, la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites a introduit un principe d'exonération concernant les salariés embauchés après 45 ans. Selon ces parlementaires, il conviendrait d'aller plus loin et de rompre totalement avec cette mesure qui constitue toujours un frein à l'emploi des salariés concernés et les pénalise lourdement dans la perspective d'une réinsertion professionnelle.

L'Assemblée générale de la Chambre de commerce de Paris a adopté un rapport présenté par P. Gassmann le 12 avril 2001, dont l'intitulé -Pour la suppression de la Contribution Delalande- ne porte pas à confusion. La contribution Delalande, qui répondait à un double objectif, dissuader les entreprises de se séparer des salariés âgés et, lorsque aucune alternative au licenciement n'était envisageable, inciter les entreprises à recourir aux préretraites FNE, au risque de supporter une lourde pénalité, aurait échoué.

A l'origine, l'objectif du dispositif était de faire obstacle aux licenciements des salariés âgés qui, compte tenu des difficultés particulières de reclassement dont ils sont victimes, se retrouvent en chômage de longue durée et dont le coût élevé de la prise en charge est assuré par l'Unédic. Le rapport P. Gassmann estime que l'instauration de la contribution Delalande n'a pas eu le caractère dissuasif que ses promoteurs espéraient. Le système aurait généré des effets pervers, en ce que les entreprises, dans la crainte d'être pénalisées si elles doivent se séparer de leur salariés âgés, ont cessé en majorité de recruter des chômeurs âgés : la contribution Delalande aurait constitué un véritable frein à l'emploi, notamment pour les salariés âgés de 45 à 50 ans.

Le second objectif, inciter les entreprises à recourir aux préretraites du FNE afin de préserver les finances de l'Unédic (assurer la prise en charge des demandeurs d'emploi âgés jusqu'à leur retraite), aurait lui aussi été un échec. Depuis la loi de finances pour 2001, l'Etat prélève sur les sommes qu'il avance à l'Unédic (au titre des préretraites FNE), en remboursement des allocations AS-FNE versées par le régime d'assurance chômage, pour le compte de l'Etat, une somme égale à 50 % des recettes annuelles.

Les partenaires sociaux, visiblement très divisés sur cette question, ne sont parvenus à rien d'autre, dans l'ANI du 13 octobre 2005 relatif à l'emploi des seniors, qu'à demander au législateur et au pouvoir réglementaire, sur la base d'une étude des effets de la contribution Delalande sur l'emploi des seniors, d'apporter à cette contribution, après consultation des partenaires sociaux, les correctifs éventuels qui pourraient favoriser l'emploi des seniors (ANI 13 octobre 2005, art. 23).

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Procédures fiscales

[Textes] Un nouvel horizon pour les pénalités !

Réf. : Ordonnance du 7 décembre 2005, n° 2005-1512, relative à des mesures de simplification en matière fiscale et à l'harmonisation et l'aménagement du régime des pénalités (N° Lexbase : L4620HDH)

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N2711AKM

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par Jean-Marc Priol, Avocat au Barreau des Hauts-de-Seine, Landwell & Associés

Le 07 Octobre 2010

L'ordonnance du 7 décembre 2005 portant diverses mesures de simplification en matière fiscale, harmonise et aménage le régime des pénalités fiscales.
Si l'objet de cette ordonnance participe à l'amélioration des relations entre les contribuables et l'administration en ce qui concerne les droits et garanties qui leur sont reconnus, elle opère surtout une véritable refonte des pénalités dans leur ensemble.
A cet effet, l'ordonnance réorganise les dispositions relatives aux pénalités en distinguant les intérêts de retard visés à l'article article 1727 (art. 12) des sanctions fiscales (art. 13) visés à l'article 1728 et suivants du CGI . Pour ces dernières elle fait ressortir neuf catégories principales d'infractions :

- infractions relatives aux déclarations et actes comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (CGI, art. 1728 à 1729 A) ;
- infractions relatives à la production de documents (CGI, art. 1729 B) ;
- retard de paiement des impôts (CGI, art. 1730 à 1731) ;
- opposition à fonctions et obstacles au contrôle de l'impôt (CGI, art. 1732 à 1735) ;
- infractions commises par les tiers déclarants (CGI, art. 1736) ;
- infractions aux règles de facturation (CGI, art. 1737) ;
- non-respect des obligations ou paiement par voie électronique (CGI, art. 1738) ;
- non-respect des conditions auxquelles sont subordonnés des avantages fiscaux (CGI, art. 1739 à 1740) ;
- délivrance irrégulière de documents permettant à un tiers de bénéficier d'un avantage fiscal (CGI, art. 1740 A).

Il n'échappera pas au lecteur attentif de l'ordonnance l'extension insidieuse de certaines sanctions spécifiques à des situations qui, jusqu'alors, ne se trouvaient pas expressément visées par l'application de certaines pénalités, telles les pénalités de mauvaise foi ou manoeuvres frauduleuses ou encore celles sanctionnant l'opposition à contrôle fiscal.

Il en est, ainsi, à compter du 1er janvier 2006, date d'application de l'ordonnance, des restitutions de créances fiscales (CGI, art. 1729) constituées par les crédits d'impôt ou les créances nées du report en arrière des déficits et dont le versement a été indûment obtenu. Ces pénalités ne s'appliquaient, jusqu'à l'intervention de l'ordonnance, principalement qu'aux hypothèses de remboursements de crédits de TVA.

Il sera noté la suppression de l'obligation visée à l'article 131 quater du CGI relative à l'obligation d'autorisation préalable du ministre de l'Economie et des Finances pour l'exonération du prélèvement libératoire des produits des emprunts contractés hors de France par les personnes morales françaises.

On remarquera avec intérêt les changements de formulation et la limitation des taux et montants des pénalités applicables.

Ainsi, la notion de "manquement délibéré" se substitue à celle de "mauvaise foi" (CGI, art. 1729).

En ce qui concerne la limitation des taux et montants, on observera que la majoration pour opposition à contrôle fiscal est ramenée de 150 % à 100 % (CGI, art. 1732). Il en est de même de la majoration de 80 % pour défaut de déclaration dans les délais de trente jours d'une seconde mise en demeure ramenée à 40 %, sauf dans l'hypothèse d'activités occultes dont la majoration demeure toujours fixée à 80 % (CGI, art. 1728).

Suivent de la même manière une réduction de taux (CGI, art. 1761) :

- de 80 % à 50 %, l'amende appliquée aux tiers déclarants pour défaut de déclaration des versements de revenus de capitaux mobiliers ;
- 100 % à 25 %, les amendes infligées pour infraction aux dispositions portant sur sur l'imposition des plus-values immobilières réalisées par les non-résidents ou pour défaut de versement de la taxe forfaitaire sur les objets précieux.

Enfin, l'article 1731 du CGI refondu supprime la sanction de non-déductibilité pour défaut de déclaration des commissions, ristournes ou honoraires versés à des tiers pour la remplacer par une amende de 50 % (CGI, art. 1736 I-1).

Toutefois, les augmentations de taux ou de montants ne sont pas complètement absentes de l'ordonnance, il en est, ainsi, des augmentations :

- de 50 % à 80 %, la majoration pour dissimulation de prix en matière de droits d'enregistrement (CGI, art. 1729) ;
- de 15 euros à 150 euros, l'amende pour non dépôt de document servant à l'assiette de l'impôt (CGI, art. 1729 B) ;
- de 7 500 euros à 10 000 euros, l'amende pour défaut de réponse aux demandes en matière de prix de transfert (CGI, art. 1735) ;
- de 300 euros à 750 euros, l'amende relative aux contraventions opérées en matière de registre de consignation (CGI, art. 1788).

L'affirmation de la reconnaissance des droits et garanties des contribuables se traduit par l'insertion dans le Livre des procédures fiscales (LPF) d'un nouvel article L. 76 B, prévoyant que l'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition de rectification. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande.

De même, aux termes des dispositions de l'article L. 80 E du LPF modifié, la décision d'appliquer les majorations en cas d'insuffisance de déclaration (CGI, art. 1729) et en cas d'évaluation d'office (CGI, art. 1732) sera, désormais, prise par un agent de catégorie A détenant au moins un grade fixé par décret (inspecteur départemental), qui vise à cet effet le document comportant la motivation des pénalités.

Un nouvel article L. 98 B est introduit dans le Livre des procédures fiscales ouvrant la faculté à l'administration des impôts de collecter, notamment, par voie électronique, auprès des organismes de recouvrement de Sécurité sociale, des informations recueillies par le biais des chèques emploi-service où des chèques emploi-service universels, ainsi que de la prestation d'accueil du jeune enfant (PAE) concernant les salaires perçus dans le cadre des emplois familiaux.

Il est, enfin, inséré, au Code des douanes, un article 345 bis-I prévoyant que, lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapporté à la date des opérations constituant le fait générateur, elle ne peut constater par voie d'avis de mise en recouvrement et recouvrer les droits et taxes perçus selon les modalités dudit code, en soutenant une interprétation différente. Il en est de même au regard de l'appréciation par l'administration d'une situation de fait (CGI, art. 345 bis II) étant, toutefois, observé que l'octroi de la mainlevée des marchandises mentionnée aux articles 73 et 74 du règlement n° 2913/92 du Conseil du 12 octobre 1992 établissant le Code des douanes communautaire (CDC) (N° Lexbase : L6102AUK) ne constitue pas une prise de position (CGI, art. 345 bis III), la garantie ne s'appliquant pas plus à la dette douanière définie aux 9), 10) et 11) de l'article 4 du règlement précité établissant le CDC (CGI, art. 345 bis-IV).

On notera que cette ordonnance s'inscrit dans la mouvance de la loi de finances pour 2006 (loi n° 2005-1719, 30 décembre 2005, de finances pour 2006 N° Lexbase : L6429HET) qui ramène le taux des intérêts de retard de 0,75 % à 0,40 % par mois, ainsi que dans la jurisprudence de l'année relative au plafonnement du cumul des pénalités de retard et insuffisance de déclaration (CE, Contentieux, 22 avril 2005, n° 257254, Société Limelight Boy's c/ Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie N° Lexbase : A9334DH8).

On remarquera, concernant l'application de cette dernière jurisprudence que l'ordonnance adopte une position s'écartant de l'arrêt du Conseil d'Etat, ainsi que de la doctrine administrative censurée par ce dernier, en adoptant, dans un nouvel article 1729 A-2 du CGI, une solution qui prévoit que dans l'hypothèse d'un redressement portant sur une déclaration produite tardivement par le contribuable, la majoration pour retard s'applique à l'intégralité de l'impôt qu'il s'agisse de celui qui résulte de la déclaration tardive ou des redressements, ajoutant que la majoration pour inexactitude ou omission prévue à l'article 1729 du CGI ne se cumule pas avec la majoration pour retard sur la fraction de l'impôt correspondant aux redressements, mais s'y substitue lorsque son taux est supérieur.

Cet aspect de règlement de combinaison des différentes pénalités applicables se trouve dans l'ordonnance, notamment, en cas de rehaussements passibles de plusieurs majorations différentes. Dans cette hypothèse aux termes des dispositions de l'article 1729 A-I, les majorations seront appliquées dans l'ordre décroissant de leur taux.

Par ailleurs, lorsque la déclaration d'ensemble des revenus visés à l'article 170 du CGI déposée hors délai comporte des éléments provenant d'une ou plusieurs déclarations de revenus catégoriels également déposées hors délais et que plusieurs majorations de taux différents sont encourues, ces dernières, selon les dispositions du nouvel article 1728-4 du CGI, seront appliquées à l'impôt sur le revenu réparti proportionnellement aux revenus représentatifs de chaque infraction étant observé que le taux de la majoration encourue au titre de la déclaration d'ensemble des revenus s'applique à la totalité de l'impôt lorsqu'il est supérieur à celui applicable au titre des autres déclarations.

Enfin, l'ordonnance uniformise à l'article 1754-I et II nouveaux du CGI les règles générales de recouvrement et de contentieux des pénalités en prévoyant que le recouvrement et le contentieux des pénalités calculées sur un impôt sont régis par les dispositions applicables à cet impôt et que pour les autres pénalités ils sont régis par les dispositions applicables aux taxes sur le chiffre d'affaires.

newsid:82711

Fiscalité des particuliers

[Jurisprudence] Pas d'ISF sur les créances de revenus !

Réf. : Cass. com., 13 décembre 2005, n° 03-18.756, Directeur général des Impôts c/ M. Milan Kundera, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A9533DLN)

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N2802AKY

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par Daniel Faucher, Consultant au CRIDON de Paris

Le 07 Octobre 2010

S'il n'est pas contestable que la fraction non consommée des revenus perçus par un redevable de l'ISF, qu'il s'agisse de liquidités ou des biens acquis en emploi de ces revenus, soit soumise à l'impôt, en revanche, une créance de revenus n'entre pas dans l'assiette de cet impôt. Tel est le sens de la décision rendue le 13 décembre 2005 par la Haute juridiction. Pour décider en ce sens, le juge a, donc, fait appel à la notion de disponibilité du revenu sans intervenir dans le débat sur l'application de l'article 885 I du CGI , puisque la créance correspondait à des sommes dues par une maison d'édition à un auteur. 1. L'application des dispositions de l'article 885 I du CGI

Le litige, subséquent à une contestation de déduction de passif, portait sur la nécessité de faire figurer en tant que créance les sommes correspondant aux droits acquis au 31 décembre de chaque année par un auteur, droits qui avaient été portés à l'actif de la déclaration ISF sous le libellé "compte courant maison Gallimard". L'administration contestait l'analyse du redevable qui prétendait qu'il s'agissait de droits d'auteur exonérés d'ISF sur le fondement de l'article 885 I, selon lequel les droits de la propriété littéraire et artistique ne sont pas compris dans la base d'imposition à l'impôt de solidarité sur la fortune de leur auteur. Le service estimait que les sommes en cause ne représentaient pas la valeur de capitalisation des droits d'auteur, mais des créances relatives aux produits des droits d'auteur, distinguant, ainsi, le droit incorporel d'exploiter l'oeuvre littéraire, qui peut être évalué mais exclu de l'ISF en application de l'article 885 I, des profits tirés de l'oeuvre, gains imposables. Alors que la cour d'appel de Paris avait fait droit à la demande du redevable, la Cour de cassation confirme l'arrêt, mais sans se prononcer sur le pourvoi de l'administration dans lequel cette dernière dénonçait l'assimilation faite par la cour d'appel de Paris entre les droits de la propriété littéraire et artistique et les sommes retirées de l'exploitation de ces droits.

2. La disponibilité des revenus, condition de l'imposition à l'ISF

La solution retenue par la Haute juridiction est fondée sur l'absence de disponibilité des sommes en cause. Après avoir rappelé que ne sont soumis à l'impôt que les revenus non consommés, c'est-à-dire des revenus préalablement perçus, elle constate que les sommes litigieuses constituaient l'état des revenus à verser, à savoir une créance de revenus et non des sommes disponibles sur un compte courant, créance qui n'entre pas dans l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune.

2.1. Le principe d'imposition du revenu disponible non consommé

Les redevables de l'ISF doivent déclarer l'ensemble des biens, droits et valeurs leur appartenant au premier jour de la période d'imposition, c'est-à-dire au 1er janvier de chaque année. Les revenus perçus au cours de l'année précédente, voire des années antérieures, n'ont pas à être déclarés en tant que tel. Seule la fraction non consommée de ces revenus, qu'il s'agisse de liquidités, de disponibilités financières ou de biens acquis en emploi de ces revenus, doit être déclarée, dès lors que ces avoirs ou biens font partie du patrimoine du redevable au jour du fait générateur de l'impôt (Réponse Taittinger, JO Sénat 26 juin 1982, p. 3190). Cette doctrine concerne, donc, les revenus encaissés. Les revenus, non encaissés effectivement sur les comptes bancaires du redevable, mais disponibles sur un compte courant doivent, également, être soumis à l'impôt, à moins que le compte ne soit considéré comme un bien professionnel. Cette notion de disponibilité, condition d'imposition, a donné lieu à une abondante jurisprudence en matière d'impôt sur le revenu. Ainsi, par exemple, des sommes versées par une société à son dirigeant sur le compte courant qu'il détient dans les écritures de celle-ci doivent être soumises à l'impôt, dès lors qu'il n'est pas établi que le dirigeant était dans l'impossibilité juridique de les prélever ou que la situation de la trésorerie de la société interdisait tout prélèvement (CE, Contentieux, 15 juin 2001, n° 204999, M. Amoretti c/ Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie N° Lexbase : A7658ATS).

2.2. Une créance de revenus non imposable

Au cas particulier, l'administration avait interrogé la maison d'édition de l'auteur, redevable de l'ISF. Il résultait de la réponse de la société Gallimard que les sommes que ce dernier devait percevoir, sommes inscrites à un compte d'auteur au 1er janvier de chaque année constituaient l'état des revenus tirés de son activité littéraire qui devaient lui être versés. En précisant que ces revenus à percevoir ne constituaient pas des "sommes disponibles sur un compte courant", le juge écarte donc, pour ce compte d'auteur, l'analyse qui prévaut pour un compte courant, considéré comme un mode de règlement des créances. Ainsi, la créance de revenus figurant sur ce compte, compte non assimilable à un compte courant, n'est pas disponible. Par voie de conséquence, elle n'entre pas dans l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune.

newsid:82802

Droit financier

[Jurisprudence] L'exécution forcée d'une offre publique obligatoire : des injonctions judiciaires prononcées dans les affaires "Hyparlo" et "Billon"

Réf. : CA Paris, 1ère ch., sect. H, 13 septembre 2005, n° 2005/04058, ADAM (N° Lexbase : A4372DK7) ; CA Paris, 14ème ch., sect. A, 19 octobre 2005, n° 05/15501, M. Roger Chamla c/ M. le président de l'AMF en la personne de Monsieur Michel Prada (N° Lexbase : A2454DLH)

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N2527AKS

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Le 07 Octobre 2010

Par deux décisions récentes, rendues à un mois d'intervalle dans des affaires distinctes (Hyparlo, 13 septembre 2005 et Billon, 19 octobre 2005), deux formations de la cour d'appel de Paris sont venues rappeler, illustrer et conforter le pouvoir du juge judiciaire d'ordonner la mise en oeuvre d'une offre publique obligatoire. Cette irruption contentieuse est, en soi, suffisamment remarquable pour être relevée, eu égard à la quasi-inexistence de jurisprudence sur le sujet depuis l'introduction du mécanisme dans notre droit positif. On s'aventurerait à y voir la trace ou l'amorce d'un mouvement de résistance des actionnaires de contrôle, ou qualifiés tels par détermination de la loi, à l'obligation qui leur est faite de déposer auprès de l'autorité de marché, en certaines hypothèses pré-définies, un projet d'offre publique visant la totalité du capital et des titres donnant accès au capital ou aux droits de vote de la société cédée. Fort heureusement, la soumission à ce devoir d'offre, aussi contraignant soit-il, continue et continuera sans doute à ne nécessiter de détour judiciaire qu'à titre exceptionnel, ce qu'invitent à penser les décisions rapportées. Laissant là l'aspect comptable des choses, l'on s'attachera davantage à la teneur de ces arrêts qui, au plan juridique, sont loin de n'avoir pour seul mérite que d'exister.

Pour partir du plus général, on relèvera, tout d'abord, la confirmation de la place de cette offre contrainte d'acquisition parmi les obligations susceptibles d'exécution forcée. Le dépôt obligatoire d'un projet d'offre publique passe ainsi, avec succès, l'épreuve de l'injonction de faire instituée, à titre de principe, par le droit boursier et démontre qu'il n'y est pas, par nature, rétif. D'aucuns pourront y voir l'emportement, au nom des impératifs boursiers, des pudeurs du droit civil face à l'exécution en nature des obligations de faire, et des illusions du droit des sociétés, bercées par une affectio societatis ne tolérant qu'une entrée libre au capital social (1). La vue serait superficielle et la déduction hâtive, qui surestimerait les obstacles évoqués et ignorerait l'évolution des matières considérées. Il suffit de constater, en droit commun, la réduction constante du noyau des obligations insusceptibles d'exécution forcée (2), surtout lorsque, comme ici, l'exécution forcée présente, faute d'alternative possible, un caractère indirect, heurtant moins brutalement les droits et libertés fondamentaux du débiteur. Tandis que l'on comprendrait mal, en droit des sociétés, qu'un actionnaire de contrôle puisse exciper d'un défaut d'affectio societatis pour échapper aux sujétions juridiques pesant sur lui ès qualités. Si l'on y ajoute la nature de type légal et réglementaire des obligations méconnues (3) et l'efficacité qui doit présider à la sanction de dispositions boursières destinées à la protection de l'investissement et de son marché, les raisons sont nombreuses de se féliciter de la confirmation jurisprudentielle ainsi apportée.

Le principe acquis, l'attention se fixe sur la mise en oeuvre et les enseignements susceptibles, à cet égard, d'être tirés des deux espèces. Or, qu'il s'agisse des modalités de calcul du prix de cette offre forcée judiciairement, compliquées par la tardiveté de son lancement, de la fixation de son calendrier, de l'appréciation de sa recevabilité, du recours à l'astreinte, de l'identification du débiteur dans l'hypothèse d'un franchissement de seuil par l'effet d'un concert, ou du type d'injonction susceptible d'être utilisée, les arrêts sous étude recèlent leur lot d'informations. Sous ce dernier regard, on ne manquera pas d'être frappé par l'éminence du rôle joué, ici, par le juge judiciaire, qui résiste manifestement au risque de marginalisation engendré par l'attribution à l'autorité de marché d'un pouvoir d'injonction direct et autonome. Des raisons techniques ou procédurales expliquent cette position centrale du juge judiciaire, naturelle lorsque l'injonction est prononcée en lieu et place de l'autorité de marché (affaire Hyparlo) (I), moins attendue, a priori, lorsqu'elle est recherchée par l'autorité de marché elle-même (affaire Billon) (II). Leur présentation doit épouser cette dualité d'hypothèses, correspondant à des configurations juridiques fort différentes.

I - L'injonction judiciaire prononcée en lieu et place de l'AMF : L'affaire Hyparlo

Les autres aspects de l'affaire ayant été accordés dans les colonnes de cette revue (4), on se focalisera sur la décision prise par la première chambre, section H, de la cour d'appel de Paris, à la suite de l'annulation de la dérogation à l'offre publique obligatoire accordée par l'AMF, d'enjoindre à la société Carrefour et/ou aux membres de la famille A. de déposer un projet d'offre publique visant la totalité du capital et des titres donnant accès au capital ou aux droits de vote de la société Hyparlo et "libellé à des conditions telles qu'il puisse être déclaré recevable par l'Autorité des marchés financiers, dans un délai de trois mois à compter du jour où le présent arrêt deviendra exécutoire".

L'utilisation du mécanisme de l'injonction est, ici, remarquable, sans précédent même en matière d'offre publique, fait remarquer un annotateur averti (5). Et pour cause : la voie de l'injonction avait été fermée par la cour d'appel de Paris elle-même ! Dans une affaire Lagardère-Filipacchi, jugée le 11 juin 1997, les conseillers parisiens, tout en procédant à l'annulation d'une dérogation à l'obligation de lancer une offre publique, avaient déclaré irrecevable la demande d'injonction formée par le représentant de la minorité agissante, pour la raison qu'il n'était pas en leur "pouvoir d'ordonner une offre publique d'achat relevant des attributions du seul Conseil des marchés financiers" (6).

Sachant que la succession de l'AMF au CMF s'est réalisée à droit constant au plan de l'étendue du contrôle juridictionnel de telles décisions, force est de constater le revirement de position ainsi opéré, qui emporte un déplacement sensible de l'équilibre des pouvoirs entre le juge judiciaire et l'autorité de marché, témoin d'une évolution significative de la perception par celui-ci de sa mission de contrôle et de sa fonction régulatrice.

L'innovation ne peut être comprise et appréciée que replacée dans le cadre dérogatoire de la compétence attribuée à la cour d'appel de Paris pour connaître des recours formés contre les décisions individuelles de l'Autorité des marchés financiers en matière d'offres publiques (C. mon. fin., art. L. 621-30 N° Lexbase : L6261DIQ et art. R. 621-44 et s. N° Lexbase : L4584HCR). Intervenant non pas, comme à l'habitude, en tant que juge judiciaire du second degré, mais en tant que juge "administratif" (7) statuant en premier et dernier ressort, par exception au principe du double degré de juridiction, la cour d'appel de Paris, répondant à ceux qui voulaient la figer dans la posture étroite du juge de l'excès de pouvoir ou de la légalité, avait réussi à s'imposer, dans le silence des textes (8) et des cours supérieures (9), comme un juge de plein contentieux ou de l'opportunité (10). Avec la décision rapportée, elle balaie quelque ancienne réserve émise par ses propres soins pour dérouler jusqu'au bout la logique du recours de plein contentieux, au point de poser, aujourd'hui, la question des limites extrêmes des pouvoirs autorisés par un tel contrôle. Celles-ci devraient se déduire du principe même sur lequel repose ce recours, conçu comme permettant à la cour d'appel de Paris de substituer, en cas de censure, ses propres décisions à celles de l'autorité de marché, participant ainsi, à titre exceptionnel, à l'administration active. Pour autant, l'expression "pleine juridiction" ne doit pas laisser accroire que la cour pourrait alors tout faire. Investi d'un simple pouvoir de "contrôle", la compétence du juge se trouve logiquement placée dans la dépendance de celle de l'autorité de marché, ce qui devrait interdire à celui-là de prendre des mesures que celle-ci ne pourrait prendre elle-même. Aussi, par exemple et contrairement à l'idée avancée un temps par certains, la cour d'appel de Paris ne saurait, au cas d'annulation d'une décision de recevabilité, fixer directement le prix d'une offre publique (11) ; ou bien trancher des contestations relevant exclusivement du droit privé des obligations (12). Il faut encore compter avec la force des choses, qui ajoute à l'insubstituabilité de l'AMF, la réformation d'une décision de recevabilité ou, comme en l'espèce, d'une décision de dérogation, conduit à renvoyer les actionnaires débiteurs concernés devant l'autorité de marché chargée d'apprécier la recevabilité de l'offre publique que ceux-ci sont sommés de présenter.

Au cas particulier, ces conditions semblent réunies. D'une part, la cour d'appel de Paris n'empiète pas sur la compétence de l'AMF, à laquelle il est demandé d'apprécier la recevabilité du projet d'offre publique à déposer par la société Carrefour et les membres de la famille A. D'autre part, la faculté d'ordonner la mise en oeuvre d'une offre publique obligatoire, dont fait usage la cour, appartient en propre à l'AMF, qui pourrait à cet effet mobiliser son pouvoir d'injonction directe. La chose était là moins évidente, car la définition de ce pouvoir, auquel il peut être recouru pour "ordonner qu'il soit mis fin, en France et à l'étranger, aux manquements aux obligations résultant des dispositions législatives ou réglementaires" avait, un temps, été interprété par un auteur comme autorisant exclusivement "des injonctions négatives [...]", ni l'autorité de marché ni la cour ne pouvant "adresser aux intéressés des injonctions positives" (obligation de faire) (13). Cette interprétation, paralysante au cas de faute par omission, semblait cependant dépassée en jurisprudence comme en doctrine.

La solution retenue paraît donc se situer en-deçà des bornes juridiques du recours de plein contentieux, à un petit détail près cependant, qui passerait presque inaperçu, pour la raison qu'il n'a pas prêté, ici, à conséquence. On veut parler de l'astreinte, que la cour évoque pour finalement ne pas y recourir. S'il n'y a pas "lieu", selon son expression, d'assortir l'obligation ordonnée d'une astreinte, c'est bien que la possibilité ne s'en trouvait pas exclue, ce qui soulève une difficulté juridique car l'AMF ne dispose pas du pouvoir de prononcer directement une telle mesure. Si l'AMF peut bien demander en justice le prononcé d'une astreinte, la loi dispose que seul son président possède alors qualité pour agir et que, au surplus, la mesure relève de la compétence exclusive du président du tribunal de grande instance de Paris (C. mon. fin., art. L. 621-14, II N° Lexbase : L8009HBA). Si le juge du contrôle persistait sur cette voie, il faudrait se résoudre à admettre que le principe de stricte substitution ou d'emprunt de compétence qui gouverne le recours de pleine juridiction peut souffrir d'entorses fondées sur l'imperium juridictionnel (14). Il en résulterait, en tous cas, une atteinte sensible aux prérogatives de l'AMF, réduite au seul examen de recevabilité du projet d'offre publique déposé dans le délai fixé par le juge, dans des conditions telles que l'on s'interroge, par exemple, sur la possibilité pour elle d'accéder à une nouvelle demande de dérogation, et de son président, en position difficile d'obtenir en justice le prononcé d'une astreinte, tout au moins à l'intérieur dudit délai (15).

II - L'injonction judiciaire demandée par l'AMF : l'affaire Billon

L'arrêt, inédit, du 19 octobre 2005, rendu par la 14ème chambre, section A, de la cour d'appel de Paris, intervient dans un contexte juridique radicalement distinct, puisque les demandes de dérogation à l'offre publique obligatoire avaient, cette fois, été refusées par l'AMF (16), qui recherchait le prononcé judiciaire d'une injonction, afin d'amener le débiteur à résipiscence. Celle-ci était, en l'espèce, assez compréhensible, puisque la société (Billon), dont le seuil du tiers du capital et des droits de vote avait été franchi en avril 2004 par M. R. Chamla, de concert avec des sociétés qu'il contrôlait, connut des difficultés financières telles qu'il fallut, un an plus tard, la placer sous redressement judiciaire (T. com. Lyon, 28 avril 2005). Saisi fort opportunément par l'AMF, une semaine avant l'ouverture de la procédure collective, le président du TGI de Paris, statuant en la forme des référés, par décision du 13 juillet 2005 :

" - ordonnait à M. Chamla de déposer dans les 8 jours de la signification de l'ordonnance, un projet d'offre publique visant la totalité du capital et des titres donnant accès au capital ou aux droits de vote de la société Billon et libellé dans des conditions telles qu'il aurait pu être déclaré recevable par l'AMF s'il avait déposé le 22 avril 2004 et ce sous astreinte de 3.000 € par jour de retard courant à compter du 15ème jour suivant la signification de l'ordonnance,
  - disait que le prix de l'offre serait augmenté des intérêts au taux légal à compter du 22 avril 2004".

L'ordonnance du 13 juillet 2005 restera dans les annales judiciaires comme la première décision d'exécution forcée en matière d'offre publique, même si elle se situe dans la droite ligne du précédent intervenu il y a une dizaine d'années dans le champ voisin des garanties de cours, lors de la mémorable affaire Hubert Industries (17). Cette rareté des recours au juge, soulignons-le, s'explique par la rareté du contentieux lui-même et non par une sorte d'affaiblissement du judiciaire au profit de l'AMF. On doit, au contraire, relever le parti pris de l'autorité de marché de s'adresser systématiquement au juge, en dépit de son pouvoir d'injonction autonome, dont l'étendue coïncide pourtant, aujourd'hui, avec celle du pouvoir reconnu au président du TGI de Paris (18). A la différence près, qui n'est sans doute pas négligeable en pareille circonstance, que l'AMF serait impuissante à assortir son injonction d'une astreinte (19).

Il faut croire, au surplus, que ladite ordonnance n'est mal fondée ni en fait ni en droit, puisqu'elle se trouve confirmée en tous points par la cour d'appel de Paris. Les moyens dirigés contre elle s'organisaient globalement autour de l'analyse de l'action de concert et des conditions de l'offre ordonnée.

L'appelant contestait, tout d'abord, l'existence d'un concert avec l'une des sociétés (Midimaille) dont le contrôle lui était attribué, indiquant avoir "par erreur" déclaré agir de concert avec elle. Sans exclure le principe d'une telle démonstration, la cour en écarte, ici, l'occurrence en s'appuyant sur un certain nombre d'éléments factuels concordants (déclarations multiples, décomptes aux assemblées générales, compétence juridique de R. Chamla...). C'étaient, ensuite, les conséquences tirées du concert constaté qui tombaient sous la critique de R. Chamla, lequel reprochait à l'AMF de ne pas avoir mis en cause les autres membres du concert. Le moyen se brise sur la solidarité légale passive des concertistes (C. com., art. L. 233-10 III N° Lexbase : L6313AIN), qui contraint chacun pour la totalité (C. civ., art. 1200 N° Lexbase : L1302ABT). La solution est d'autant plus brutale, ici, que l'intéressé avait cessé, depuis le mois de mai 2005, d'être actionnaire de la société Billon, à la suite de la vente de ses actions à trois amis. Mais cette sortie de la société devait logiquement rester indifférente à l'appréciation de la faute commise un an plus tôt. On saisit mal, en conséquence, l'effort des juges à établir que les actions "complaisamment acquises par les trois amis de M. Chamla [...] devaient être en compte dans le calcul des droits de vote détenu par le concert".

Le fait qu'il convienne de se placer au moment de l'infraction commise pour fixer les obligations du débiteur ressort plus nettement de la solution retenue pour déterminer les conditions de l'offre publique à venir. Sans apparemment justifier sa position, l'appelant faisait valoir que la décision du premier juge, ordonnant que l'offre soit réalisée aux conditions qui auraient été celles du 22 avril 2004, était contraire au règlement général de l'AMF. L'enjeu financier n'était pas mince pour lui compte tenu de l'effondrement depuis lors du cours de l'action Billon, passé de 1,70 € à 0,41 €. La prétention est justement écartée par la cour, mais au terme d'une réponse un peu contournée et non dépourvue d'ambiguïté : "qu'un projet d'offre publique au prix de 0,41 €, sanctionnerait les actionnaires susvisés et bénéficierait à celui qui n'a pas respecté la loi ; qu'en effet M. Chamla devait déposer son projet d'offre publique le 24 avril 2004, ce qu'il savait pertinemment puisqu'il a sollicité alors des demandes de dérogations qui ont toutes été rejetées ; Qu'il se devait de respecter la loi, sans que l'AMF soit obligé de délivrer une quelconque injonction ou mise en demeure [...] ; que M. Chamla est seul responsable de l'irrégularité commise qui ne peut être réparée que dans les conditions fixées par le premier juge, quelqu'en [sic] soient les conséquences envers M. Chamla ; qu'une telle réparation qui fait respecter le moins mal possible l'égalité susvisée entre actionnaires n'est donc ni une pénalité ni une "allocation de dommages et intérêts". C'est ainsi un langage de responsabilité qui est employé, une responsabilité dont on nous dit qu'elle est dépourvue de caractère punitif et dont on comprend que le mode adéquat de réparation se réalise non pas en équivalent mais en nature. On peut se demander s'il s'agissait là du langage le plus approprié et si, plutôt que de réparation en nature, au demeurant incertaine dans l'hypothèse inverse où le cours des titres sociaux se serait apprécié depuis le franchissement des seuils, il ne vaudrait pas mieux parler d'exécution en nature de l'obligation méconnue. La seule allocation possible de dommages-intérêts, que ne paraissent pas interdire les termes de l'article L. 621-14, II, du Code monétaire et financier, prenant alors la forme de dommages-intérêts moratoires, par addition au prix de l'offre, ainsi précisément déterminé, des intérêts au taux légal.

Quel que soit le raisonnement qui la sous-tend, la solution retenue constitue, en l'espèce, une aubaine pour les actionnaires minoritaires -voire même l'ensemble des actionnaires !(?)- de la société Billon, appelés à bénéficier d'une sortie in extremis du capital et ce à un prix très avantageux eu égard à la valeur actuelle de leurs titres. D'autant que, tenant compte peut-être de la situation économique de la société, plus sûrement de "résistance délibérée et persistante de M. Chamla à respecter la loi" et du "temps suffisant" dont celui-ci a disposé pour préparer son offre, la cour confirme la teneur comminatoire de l'ordonnance du premier juge ayant fixé à 8 jours de la signification de l'ordonnance le terme ultime du dépôt du projet d'offre publique, et ce sous astreinte de 3 000 € par jour de retard courant à compter du 15ème jour suivant la signification de l'ordonnance.

Alain Pietrancosta
Professeur à l'Université Paris I (Panthéon-Sorbonne)
Directeur du Master Droit financier
Centre de Recherches en Droit financier


(1) V. A. Mignon-Colombet, L'exécution forcée en droit des sociétés, Economica, 2004.
(2) Voir en dernier lieu, N. Molfessis, Force obligatoire et exécution : un droit à l'exécution en nature ?, RDC, 2005.37 ; comp. Y. M. Laithier, La prétendue primauté de l'exécution en nature, RDC, 2005.161.
(3) On sait que la jurisprudence française a été historiquement plus encline à prononcer l'exécution forcée d'un devoir légal que d'une simple obligation contractuelle, v. G. Viney, La responsabilité : effets, Traité de droit civil, LGDJ, 1988, n° 35.
(4) V. J.-B. Lenhof, Affaire Hyparlo : l'ADAM croque... l'AMF, Lexbase Hebdo n° 185 du 13 octobre 2005 - édition affaires (N° Lexbase : N9555AIQ). Adde, RDBF, sept.-oct. 2005, p. 35, obs. A. Couret ; Banque et Droit, sept. 2005, n° 103, p. 45, obs. H. de Vauplane, J.-J. Daigre ; Bull. Joly, 2005.1380 § 301, note D. Schmidt.
(5) D. Schmidt, note précitée.
(6) V. Revue CMF, 1997, n° 3, p. 30, obs. M. d'Orazio ; D. 1998, somm. p. 73, obs. Y. Reinhard ; JCP éd. E 1997, I, n° 676, obs. A. Viandier et J.-J. Caussain ; Banque et Droit, 1997, n° 54, p. 35, obs. H. de Vauplane ; Bull. Joly Bourse, 1997.750 § 120, note N. Rontchevsky.
(7) V. not. P. Delvolvé, La nature des recours devant la cour d'appel de Paris contre les actes des autorités boursières, Bull. Joly, 1990, p. 499, § 133 ; du même auteur, La cour d'appel de Paris, juridiction administrative, Etudes offertes à J.-M. Auby, Dalloz, 1992, p . 47 ; G. Canivet, Le juge et l'autorité de marché, RJ com., 1992, p. 185 ; A. Viandier, Compétence du juge judiciaire en matière de recours contre certaines décisions du CBV, Bull. Joly, 1991, p. 771 ; J.-P. Marchi, La compétence de la Cour d'appel de Paris en matière de droit boursier, Gaz .Pal., 1991, 2, 786. En faveur d'un retour du contentieux au juge administratif, v. not. P. Delvolvé, La cour d'appel de Paris, juridiction administrative, précité ; Conseil d'Etat, Rapport public 2001, Les autorités administratives indépendantes, Etudes et documents, n° 52, spéc. p. 334.
(8) Comp. la qualification réglementaire expresse retenue en matière de recours contre les décisions de sanction de l'AMF dont le Conseil d'Etat est appelé à connaître (C. mon. et fin., art. R. 621-45, I, al. 2 N° Lexbase : L4585HCS).
(9) L'exigence d'un recours de plein contentieux n'est posée qu'en matière de décisions de sanction, tant par le Conseil constitutionnel (v. en matière audiovisuelle, Décision n° 88-248 du 17 janvier 1989 N° Lexbase : A8194ACH et Décision n° 2000-433 DC du 27 juillet 2000 N° Lexbase : A9054AGG), que par la Cour européenne des droits de l'homme (v. not. CEDH, 23 juin 1981, Req. 00006878/75, Le Compte, Van Leuven et De Meyere c/ Belgique N° Lexbase : A3823AU7, série A n° 43 § 51 ; 10 février 1983, Req. 7299/75, Albert et Le Compte c/ Belgique N° Lexbase : A3824AU8, série A n ° 58 ; 26 septembre 1995, Req. 25/1994/472/553, Diennet c. France N° Lexbase : A3826AUA, série A n° 325).
(10) Il convient à cet égard de se garder d'une fausse interprétation de l'expression "prétendue plénitude de juridiction", utilisée parfois par la cour d'appel de Paris , v. not. CA Paris, 13 juillet 1988, Holophane, Bull. Joly, 1988, p. 715, Doct. et le commentaire de Y. Sexer, Une décision importante en matière d'offre publique d'achat : l'arrêt Holophane, JCP éd. E, 1988; II, n° 15337, note Th. Forschbach ; P. Delvolvé, précité ; G. Canivet, précité ; comp. A. Viandier, OPA-OPE..., éd. F. Lefebvre, 1999, n° 175 ; D. de Béchillon, D. Martin et N. Molfessis, A propos de l'étendue des pouvoirs de la Cour d'appel de Paris dans le contentieux des décisions prises par l'Autorité des marchés financiers au sujet de la recevabilité d'une offre publique, Mélanges AEDBF IV, 2004, p. 31.
(11) V. A. Pietrancosta, Nouvelles contributions de la Cour de cassation à la "banalisation" juridique et à la praticabilité du retrait obligatoire, Bull. Joly Bourse, 2001.541 § 93.
(12) V. CA Paris, 13 juillet 1988, précité.
(13) Delvolvé, n° 25.
(14) On sait, du côté judiciaire tout au moins, que le juge s'est reconnu le pouvoir de prononcer des astreintes avant même que celui-ci ne fasse l'objet d'une consécration légale.
(15) En l'espèce, la question ne se pose plus, la société Carrefour ayant, le 21 décembre, déposé auprès de l'AMF un projet d'OPA simplifiée, v. M.-A. Depagneux, Carrefour va débourser 320 millions pour reprendre Hyparlo, Les Echos, 22 décembre 2005, p. 23.
(16) V. Avis Euronext Paris, 204C1317, 3 novembre 2004.
(17) V. TGI Paris, ord. 5 août 1994, RDB, n° 46, nov.-déc. 1994, p. 267, obs. M. Germain et M.-A. Frison-Roche ; JCP éd. E, 1994, II, n° 623 note A. Viandier, Bull. Joly Bourse, 1994 .597, note C. Ducouloux-Favard ; D. Schmidt, Voies d'actions judiciaires de l'AMF, Dict. Joly Bourse, n° 69 et s. ; CA Paris, 1ère ch., sect. A, 18 septembre 1995, H. Finance et participation c/ Conseil des Bourses de Valeurs (N° Lexbase : A1655ATH), JCP éd. E 1995, II, n° 745, RDB, n° 53, 1996, p. 28, obs. M. Germain et M.-A. Frison-Roche ; Bull. Joly Bourse, 1995.511 § 88, note P. Le Cannu.
(18) T. Bonneau, F. Drummond, Droit des marchés financiers, Economica, 2e éd., 2005 , n° 283.
(19) T. Bonneau, F. Drummond, ibid.

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Concurrence

[Jurisprudence] Hôtels parisiens, sanctions et cohérence

Réf. : Décision Conseil de la concurrence n° 05-D-64, 25 novembre 2005, relative à des pratiques mises en oeuvre sur le marché des palaces parisiens (N° Lexbase : X4537ADE)

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N2402AK8

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par André-Paul Weber, Professeur d'économie, Ancien rapporteur au Conseil de la concurrence

Le 07 Octobre 2010

Prononçant des sanctions pécuniaires dans le cadre d'un dossier contentieux, le Conseil de la concurrence en établit le montant conformément aux dispositions de l'article L. 464-2-I du Code de commerce (N° Lexbase : L5682G49). Suivant ce texte, ces sanctions "[...] sont proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie, à la situation de l'organisme ou de l'entreprise sanctionné ou du groupe auquel l'entreprise appartient et à l'éventuelle réitération de pratiques prohibées [...]. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction". L'application de cette disposition, à l'occasion de la décision n° 05-D-64 du 25 novembre 2005 relative à des pratiques mises en oeuvre sur le marché des palaces parisiens, est source de surprise. Les observations que le Conseil formule, quand il s'agit pour lui de déterminer le montant de la sanction à l'occasion de cette affaire, conduisent, en effet, à se demander si tout le pan des activités pour lesquelles la demande est inélastique n'est pas appelé à échapper à la sévérité du Conseil. On peut encore se demander si, telle que rédigée, la décision n'est pas frappée d'incohérence. I - Un rapide rappel des faits

L'affaire en cause concerne les pratiques mises en oeuvre par différents établissements de luxe localisés à Paris : Le Bristol, Le Crillon, Le Four Seasons Hôtel Georges V, Le Meurice, Le Plaza Athénée et Le Ritz. Il a été reproché à ces six établissements de s'être livrés à des échanges d'informations sur les données relatives à leur activité tout au long de la période 1998 à 2002 -taux d'occupation, prix moyen et revenu moyen par chambre- et établies selon les périodes sur des bases hebdomadaires ou mensuelles. Parallèlement, certains de ces établissements ont, en vue de l'élaboration de leurs plans marketing, procédé à des recherches et échanges d'information portant, en particulier, sur la superficie des chambres et des salons, les prix des différentes suites, des petits déjeuners et des menus, le nombre des personnels employés, le pourcentage de budget marketing par rapport au chiffre d'affaires de l'hôtel, etc. Au surplus, les établissements en cause ont mis en oeuvre des actions commerciales communes consistant, en particulier, à offrir une nuit dans un des établissements concernés à un tarif unique à caractère promotionnel.
Pour le Conseil, en unissant leur volonté pour échanger d'un commun accord des informations confidentielles et stratégiques de nature à altérer l'autonomie commerciale de chacun des participants à l'accord, les établissements hôteliers ont enfreint les dispositions de l'article L. 420-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L6583AIN). C'est à ce titre que des sanctions se situant entre 55 000 (cas de l'hôtel Meurice) et 248 000 euros (cas de l'hôtel Le Crillon) ont été prononcées. Au total, le montant global des sanctions infligées s'est établi à 709 000 euros.
En revanche, le Conseil a estimé que les offres promotionnelles proposées à la clientèle n'avaient pas eu d'objet ni d'effet anticoncurrentiel ; elles n'ont donc pas donné lieu à sanction.

II - La singularité des sanctions prononcées

Pour déterminer ces montants de sanctions, comme indiqué plus haut, le Conseil a tout naturellement fait application des dispositions de l'article L. 464-2-I ci-dessus rappelé. S'agissant de la question de la "gravité des pratiques", le Conseil relève, conformément à sa jurisprudence, que"[...] les échanges d'informations en cause, pour anticoncurrentiels qu'ils soient, n'ont ni le caractère d'une entente expresse sur le niveau de prix ou de répartition des marchés, pratique généralement qualifiée d'injustifiable par les autorités de concurrence, ni celui d'un échange d'informations entre soumissionnaires à un marché public, préalablement à la remise des offres qui a pour effet de tromper l'acheteur public sur l'intensité de la concurrence" (paragraphe 296).

Mais la surprise liée à la décision tient aux remarques formées par le Conseil au titre de l'importance du dommage causé à l'économie. A cet égard, deux éléments de sens contraire sont mis en avant. Un élément aggravant, d'abord, tenant au fait que les échanges d'informations ont prévalu pendant une période relativement longue de trois années. Mais cet aspect aggravant est amoindri par le constat affirmé par le Conseil, voulant que la majeure partie des clients fréquentant les palaces est peu sensible au prix ; les clients de ces établissements "[...] sont prêts à payer des sommes très élevées pour le service rendu et les prestations de luxe offerts par les palaces. Le dommage à l'économie ne peut donc être qualifié de très important" (paragraphe 297).

Telle que rédigée la décision du Conseil appelle deux séries de remarques.

Partant de l'affirmation selon laquelle la clientèle des palaces parisiens est dotée d'une demande relativement inélastique et que, donc, toute augmentation du prix des chambres se traduit par un simple transfert de richesse de la clientèle au bénéfice des établissements hôteliers, sans perte de surplus du consommateur ou perte très modeste de ce surplus, le Conseil estime que la sanction doit être réduite. Cette incursion du Conseil dans les enseignements de la théorie économique est source de nombreuses interrogations. Le Conseil entendrait-il, désormais, se montrer d'autant plus sévère que la demande pour les biens ou services soumis à son examen est particulièrement sensible à l'évolution des prix ? Les offreurs de biens et services dits de luxe pour lesquels la demande est inélastique devraient-ils, toutes choses égales par ailleurs, bénéficier de sanctions amoindries ? Le Conseil jette-t-il là les bases d'une nouvelle approche dans la détermination du montant des sanctions ? Plus radicalement, s'orienterait-on vers la solution consistant à exonérer de toute sanction les "pratiques anticoncurrentielles" qui n'emportent aucun effet dommageable sur l'économie ?

Quel pourrait être, alors, le sens de ces pratiques ?

Mais, au-delà de ces interrogations, telle que rédigée, la décision du Conseil pose une autre question, de logique cette fois. Si, effectivement, comme soutenu dans la décision, la demande pour les prestations qu'offrent les palaces parisiens est inélastique, alors on peut s'interroger sur les motifs qui ont poussé les entreprises, d'une part, à procéder à des échanges d'informations portant, notamment, sur les prix que les uns et les autres pratiquaient et, d'autre part, sur la nécessité qu'il y avait pour elles de proposer des tarifs promotionnels. Tant les pratiques d'échanges d'informations que les formules consistant à proposer des tarifications promotionnelles particulières témoignent à l'évidence d'une demande élastique et le dommage à l'économie n'a pas le caractère anodin que le Conseil a bien voulu reconnaître.

En définitive, de deux choses l'une. Ou les entreprises avaient effectivement intérêt à procéder à des échanges d'informations confidentielles et stratégiques de nature à altérer leur autonomie commerciale, mais cela signifie alors que la clientèle est globalement sensible à la variable "prix". Ou, partant de la thèse voulant que la demande de la clientèle est, à l'inverse, insensible à la variable en cause, et l'on est alors tenu de conclure que les échanges d'information avaient un simple rôle confraternel dénué de toute portée effective, les entreprises bénéficiant de cette situation exceptionnelle voulant que le consommateur, avide de confort et de luxe, soit, comme le note le Conseil, relativement indifférent au prix demandé.

newsid:82402

[Jurisprudence] Propos autour de la cession Dailly, véritable cession fiduciaire de créances

Réf. : Cass. com., 22 novembre 2005, n° 03-15.669, M. Bruno Sapin, administrateur judiciaire et commissaire à l'exécution du plan de la société Entreprise Jean Nallet c/ Banque du bâtiment et des travaux publics (BTP Banque), FS-P+B+I+R (N° Lexbase : A7428DLP)

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N2770AKS

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Le 07 Octobre 2010

Les transferts fiduciaires ne cessent de prospérer, en droit financier, depuis de nombreuses années (V., entre autres, la Directive communautaire 2002/47 du 6 juin 2002 consacrée aux contrats de garantie financière N° Lexbase : L4787A43) que ce soient le gage-espèces (V. sur ce point, M. Cabrillac, Les sûretés conventionnelles sur l'argent, Mélanges Derruppé, p. 333 ; G. Affaki, De la relation perfectible entre le crédit et les sûretés, Banque et Droit 2004, n° 97), le prêt de titres (C. mon. fin., art. L. 432-6 et s. N° Lexbase : L6376DIY) ou encore, comme le reflète parfaitement cette décision, la cession de créance à titre de garantie (C. mon. fin., art. L. 313-24 N° Lexbase : L9257DYI). Ces exemples et la réforme en cours (V. Rapport Grimaldi et projet de réforme des sûretés ; M.-E. Mathieu, Vers quelles nouvelles formes de sûretés réelles, Lexbase Hebdo n° 186 du 20 octobre 2005 - édition affaires N° Lexbase : N9698AIZ) témoignent peut être que la propriété-sûreté aurait enfin acquis ses lettres de noblesse (V. A. Cerles, La propriété, nouvelle reine des sûretés, Mélanges M. Vasseur, p. 39). Si, pourtant, tel n'est pas le cas pour le législateur, la décision de la Cour de cassation du 22 novembre 2005 précise enfin le régime de la cession Dailly à titre de garantie. Elle la conçoit comme une véritable "propriété-garantie" et donc comme une réelle cession fiduciaire.

Est ainsi consacrée, dans cette décision, une propriété temporaire d'un droit de créance cédé à titre de garantie. Cette aliénation est fiduciaire puisque constituée à titre de sûreté.

Pourtant, la cession de créance est un acte translatif de propriété. Il ne s'agit pas, en principe, d'un transport fiduciaire d'une créance mais d'une véritable vente (C. civ., art. 1689 N° Lexbase : L1799ABA et art. 1692 N° Lexbase : L1802ABD). La créance entre dans le patrimoine du cessionnaire qui en devient propriétaire. Pour le Code civil, ce transport n'a rien de temporaire et le cédant réalise un acte de disposition.

Le formalisme de l'article 1690 du Code civil (N° Lexbase : L1800ABB) ou celui simplifié de la remise d'un bordereau pour les cessions Dailly, ne modifie en rien cette analyse. Simplement, ce n'est qu'à compter de la date apposée sur le bordereau -ou de la signification du transport- que la cession prend effet entre les parties et devient opposable aux tiers.

Mais, la cession Dailly n'obéit pas exactement aux mêmes règles que la cession de créance du droit commun. Tout en ayant la nature d'une vente, elle peut légalement être constituée à titre de garantie et sans stipulation de prix, en faveur d'un établissement de crédit cessionnaire. Et ce, à condition que la créance ait la qualité d'une créance professionnelle. Au sens de la loi, sont professionnelles les créances détenues par une personne morale sur une autre personne morale de droit privé ou de droit public et les créances d'une personne physique qui résultent de son activité professionnelle.
En l'espèce, telle était l'hypothèse. A titre de sûreté, la cession Dailly garantissait le remboursement d'opérations de crédits d'une entreprise : la cession était donc entendue comme une sûreté. Et, a priori, paradoxalement, l'établissement et la remise du bordereau avaient produit l'effet attaché à toute cession de créance, c'est-à-dire un transfert de la propriété de la créance cédée au cessionnaire.

Cette cession apparaissait donc -si l'on s'en tient à la seule lecture de la loi- réalisée en pleine propriété comme une vente "parfaite" (C. civ., art. 1589 N° Lexbase : L1675ABN) et donc dépourvue de clause de réserve de propriété ou d'éventuelles conditions suspensives (V. sur ce point, M. Vasseur, L'application de la loi Dailly, D.1982, chron. p. 273).

La question était alors de concilier le transport de la créance et donc du droit cédé avec la technique des sûretés : comment peut-on parler de cession Dailly à titre de garantie sans proclamer la validité d'une aliénation temporaire et de nature fiduciaire ?

Le législateur est, sur ce point, silencieux. L'article L. 313-24 du Code monétaire et financier indique curieusement que "même lorsqu'elle est effectuée à titre de garantie et sans stipulation de prix, la cession de créance transfère au cessionnaire, la propriété de la créance cédée". Il ne s'agit pas, en apparence, d'une propriété-fiduciaire de la créance. Il appartenait alors, tout naturellement, à la jurisprudence, de préciser le régime juridique de cette sûreté spéciale.

A l'analyse, la question était pour le moins délicate.

Elle renvoie, en effet, à une contradiction difficile à résoudre. Le droit commun de la cession de créance laisse entendre qu'il s'agit d'une vente au sens du Code civil et, le droit spécial du Code monétaire et financier offre la possibilité de céder une créance mais à titre de sûreté et ce en transférant la propriété de la créance cédée...! (V. L. Aynes et G. Kolifrath, Confirmation de la licéité des cessions fiduciaires en droit français ?, D. aff. 2005, n° 133).

Dans cette décision, les juges de droit ne se sont pas prononcés sur la validité générale des aliénations fiduciaires mais sur une question précise : que se passe-t-il lorsque la dette sur laquelle est assise la créance cédée à titre de garantie a été payée ?

Cela implique, selon la Haute juridiction, "la restitution du droit cédé".

Le cessionnaire devient alors un véritable fiduciaire.

Le droit cédé sera donc transféré dans son patrimoine mais pour pouvoir être restitué, ce transfert se fera dans une masse distincte et autonome détachée de ses biens personnels. L'on retrouve parfaitement, ici, le mécanisme de la fiducie utilisée en tant que sûreté (V. sur la dernière version du projet de loi sur la fiducie, M.-E. Mathieu, Vers un contrat de fiducie dans le Code civil ? (aspects de droit civil de la proposition de loi sur la fiducie), Lexbase Hebdo, n° 160 du 24 mars 2005 - édition affaires N° Lexbase : N2228AID).

A ce titre, le fiduciaire-cessionnaire devra donc veiller à éviter toute confusion entre ses intérêts propres, son patrimoine et la propriété fiduciaire du droit cédé. Celle-ci ne fait donc pas partie de sa succession, ni du droit de gage de ses créanciers. C'est donc bien dans un véritable patrimoine d'affectation que s'insère la créance cédée. Au final, elle est placée temporairement en dehors de tout patrimoine et située à mi-chemin entre celui du cédant et celui du cessionnaire.

La propriété de la créance est en ce cas précis une propriété fiduciaire. Cette décision laisse sans aucun doute une place conséquente en droit positif à la technique même de la fiducie-sûreté.

Cette intrusion d'une propriété temporaire à usage de sûretés dans la jurisprudence de la Cour de cassation est une remarquable avancée. Ce transfert de propriété fiduciaire protège ainsi l'établissement de crédit contre l'insolvabilité futur de son débiteur.

La cession de créance réalise une propriété temporaire : "la cession de créance faite à titre de garantie, qui implique la restitution du droit cédé au cas où la créance garantie viendrait à être payée, n'opère qu'un transfert provisoire de la titularité de ce droit" et "l'éventualité de la restitution de la créance au cédant reste subordonnée à l'épuisement de l'objet de la garantie consentie".

Cette affirmation, la pratique l'appelait de ses voeux (V. A. Prum, Une fiducie pour les banques?, RD bancaire et financier, 2004, p.3) et elle vient, enfin, d'être consacrée dans cette décision du 22 novembre 2005.

Le spectre de la fiducie-sûreté réapparaît et la cession Dailly à titre de garantie trouve sa logique : si le transfert de propriété est constitutif d'une sûreté, il doit être temporaire ; le droit cédé revenant dans le patrimoine du cédant lorsque la créance, objet de la garantie, est payée.

Mais demeurent juridiquement indépendant, le prêt consenti et la cession de créance à titre de garantie.

Cette sûreté serait donc une sûreté réelle non accessoire. Le droit de propriété de la créance conserve sa nature et, même érigé en sûreté, il est susceptible d'exister en dehors de la créance garantie. D'ailleurs, une fois celle-ci payée, le droit cédé pourrait se révéler utile pour garantir une nouvelle créance entre les mêmes parties. Cette sûreté, si telle est la volonté des parties, pourrait ne pas s'éteindre automatiquement après le règlement de la créance.

La cession Dailly est donc une cession fiduciaire autorisée par les textes et, pas à pas, son régime est aménagé par la jurisprudence.

Après cette décision, aucun doute n'existe sur l'existence d'une obligation de restitution du droit cédé, une fois la dette garantie payée. Mais d'autres questions subsistent.

Pourrait-on, par exemple, utiliser d'autres cessions à titre de garanties que la cession Dailly ?

En l'absence de dispositions le prévoyant, la réponse est a priori négative.

Seule une loi et donc un droit spécial peut expressément autoriser une telle cession.

Le Code civil, quant à lui, présente la cession de créance comme une forme de vente particulière... et n'autorise pas une aliénation fiduciaire à titre de garantie.

Au surplus, consacrer la légalité des cessions fiduciaires serait une violation du principe "pas de sûretés sans texte".

N'y a-t-il donc pas, pourtant, dans cette décision une marque du temps ? Ne faudrait-il donc pas faire naître enfin, par le biais de la fiducie, une forme de propriété sûreté ? Peu importe qu'elle soit ou non "la reine des sûretés", elle aurait sans aucun doute sa place dans la pratique et donc en droit français.

Marie-Elisabeth Mathieu
Maître de conférences à l'Université d'Evry - Val d'Essonne
Membre du Centre de formation professionnelle notariale de Paris
Jeantet Associés

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