La lettre juridique n°119 du 6 mai 2004

La lettre juridique - Édition n°119

Table des matières

De l'obscur et du profond

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N1516ABR

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par Aurélie Garat, SGR - Droit social

Le 07 Octobre 2010


La tant attendue loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social a enfin été publiée au Journal officiel et ce après avoir été validée dans son intégralité par le Conseil constitutionnel. Exemplaire dans son élaboration puisque fondée sur des accords conclus avec les partenaires sociaux, cette loi l'est également dans son contenu... C'est en tout cas l'avis du Conseil constitutionnel selon lequel le législateur a entouré de garanties suffisantes les dérogations aux principes d'articulation entre la convention collective et la loi en définissant "de façon précise l'objet et les conditions de cette dérogation". Quant au principe de faveur, il est relégué au rang de simple principe fondamental du droit du travail au sens de l'article 34 de la Constitution et entre donc pleinement dans le champ de compétence du législateur. Enfin, du grief tiré de la complexité de la loi, le Conseil constitutionnel ne s'embarrasse pas : le législateur peut être complexe pourvu qu'il soit clair. De là à affirmer que l'on peut tout passer à une loi parce qu'elle a été négociée, il n'y a qu'un pas !

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Droit financier

[Textes] Aspects de l'adoption de la réforme de la directive sur les services d'investissement : l'avancée du secteur bancaire dans le cadre de la réorganisation des marchés

Lecture: 14 min

N1499AB7

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par Jean-Baptiste Lenhof, Maître de conférences à l'ENS - Cachan Antenne de Bretagne, Membre du centre de droit financier de l'Université de Paris I (Panthéon-Sorbonne)

Le 07 Octobre 2010


Après quatre ans de négociations, l'Union européenne vient de finaliser, le 27 avril 2004, la rédaction de la réforme de la directive sur les services d'investissement (DSI) et celle-ci aboutit à une refonte complète de l'organisation des marchés financiers. Après son adoption par le Parlement européen puis par le Conseil des ministres, le texte aura enfin réussi à fixer des objectifs ambitieux aux Etats membres. Il vise, en effet, à l'harmonisation à court terme de la réglementation sur les services financiers en Europe, ce que la DSI édictée en 1993 (1), lors de sa première rédaction, n'avait pu réaliser. Quant à la transposition de la directive réformée, celle-ci est prévue pour 2006, ce qui ne laisse que deux ans aux Etats membres pour réaliser une adaptation fondamentale de leurs structures de transaction et de négociation. En attendant la publication du texte communautaire, qui n'était pas encore fixée à l'instant où ces lignes sont rédigées, une réflexion - fondée sur l'historique du grand marché financier unifié - peut d'ores et déjà être opérée. Les rapports entre les secteurs boursiers et bancaires que la première version de la DSI semblait avoir figés (I) ont, en effet, profondément évolué. Le texte ouvre ainsi largement la voie, dans sa seconde rédaction, à un rééquilibrage concurrentiel (II) et les banques auront un rôle majeur à jouer dans cette redistribution stratégique, tant au niveau de l'épargne de proximité que de l'investissement professionnel.

I - L'articulation des secteurs bancaires et boursiers, une évolution figée par la DSI

Les périodes historiques sont plutôt brèves en matière de marché financier puisqu'on peut situer le départ de la période des dernières grandes mutations du système boursier au début des années quatre-vingt. Cette époque est marquée par l'explosion des transactions financières et la disparition des anciens monopoles, l'édiction de la directive sur les services d'investissement concluant (A), en point d'orgue, une décennie à tout point de vue mouvementée pour les bourses européennes. La rédaction de la DSI, fruit d'une négociation très complexe, a cependant débouché sur un compromis peu satisfaisant dont l'ensemble des commentateurs a mesuré rapidement les limites (2) (B).

A - De la disparition du monopole des agents de change à l'édiction de la DSI

Les années quatre-vingt ont été marquées, avec l'essor des transactions sur les valeurs mobilières, par l'augmentation considérable de l'actionnariat populaire, et de l'accroissement corrélatif de la réception des ordres par les banques. Le secteur bancaire, devenu un acteur incontournable du développement des marchés, s'est trouvé confronté au monopole des agents de change et devant l'impossibilité statutaire de profiter de la croissance des activités boursières, a oeuvré auprès des pouvoirs publics pour ne plus dépendre d'une organisation professionnelle considérée comme archaïque. Les termes de l'équation, à la fin des années quatre-vingt, pouvaient se résumer à la prise en considération du poids financier et technique des banques vis-à-vis des agents de change, dont le maintien du monopole ne se justifiait plus que pour des raisons de sécurité. Le krach de 1987 viendra, à cette occasion, faire apparaître les failles dans le contrôle prudentiel des professionnels, ce qui ne sera sans doute pas étranger à rapidité de la mise en oeuvre de la loi de 1988 (loi n° 88-70 du 22 janvier 1988 [LXB=L1818DNN)].

Cette loi intervient, par conséquent, dans un contexte inquiétant pour les investisseurs mais elle n'en réforme pas moins de façon significative le statut des intermédiaires (3) en supprimant le monopole des agents de change. Elle confie, par ailleurs, l'organisation des marchés à une société de droit privé, la Société des bourses françaises (SBF), ce qui met ainsi fin à l'ancienne gestion corporative des marchés. Plus avant, le capital des nouveaux intermédiaires - les sociétés de bourse - est ouvert aux établissements bancaires. Cette avancée n'aboutit pourtant pas, malgré des réformes successives, à la création d'un secteur financier homogène où boursiers et banquiers se partageraient les prestations de service selon leurs spécialités. En effet, en dépit de liens capitalistiques puissants, les professions bancaires et boursières demeurent séparées. Ainsi, quand une nouvelle catégorie d'intermédiaires sera instaurée en 1996 (4) par la loi de modernisation des activités financières qui transposera (tardivement) la DSI, ces nouveaux professionnels, "les prestataires des services d'investissement", disposeront, à pratiquement dix ans de distance, d'un monopole sur les transactions boursières comparable à celui des agents de change.

Il convient, à la décharge des rédacteurs de la directive, de souligner que la négociation initiale de la DSI au cours de années quatre-vingt dix se heurte, dès l'origine, à la nécessité de trouver un compromis entre deux systèmes boursiers antinomiques, l'un - répondant à la technique de cotation dite latine - correspondant aux marchés gouvernés par les ordres (5), l'autre aux marchés structurés par le prix (6). La délégation anglaise souhaitait en effet, conformément à la technique instaurée à la city depuis quelques années, imposer l'approche par le prix et construire le grand marché européen autour des opérations de gré à gré. Les délégations continentales demeuraient en revanche largement attachées au principe du maintien de la cotation latine (7) et au contrôle des marchés par l'Etat.

La première version de la directive (8) sectorielle du 10 mai 1993 sur les services d'investissement (DSI) débouchera donc sur une organisation permettant de ménager les deux systèmes, d'où la coexistence en Europe des marchés réglementés (sur lesquels le cours des instruments financiers était établi par la confrontation de l'offre et de la demande) et des marchés de gré à gré sur lesquels le prix est librement débattu ou établi par les parties. L'idée, en revanche, de recourir aux marchés structurés par le prix n'a pas été transcrite dans la directive. Pour décrire sommairement ce dernier mécanisme, l'offre de valeurs dans un système gouverné par les prix s'apparente - dans une certaine mesure - à la cession d'un bloc de biens, puisque le prix offert peut varier en fonction du volume ou éventuellement sur d'autres facteurs qui permettent (en principe, car d'aucuns contestent cette analyse) d'abaisser les coûts de transaction en cédant des quantités importantes de titres. Quant à la recherche du prix de marché, elle se réalise - toujours en principe - de façon "naturelle" dans le sens ou le prix d'équilibre se fixe sans intervention extérieure ; et non, comme dans le cadre d'une cotation latine, par l'intervention d'un organisme chargé de le calculer et de le diffuser.

Confronté à la transposition de cette architecture dualiste des marchés, le législateur va opérer la transposition de la façon suivante : les marchés réglementés vont être constitués sur la base des anciennes bourses de valeur, c'est-à-dire à partir d'une organisation en marchés contrôlés par l'Etat. La différence avec l'ancien système se traduit essentiellement par le rejet de l'idée que l'activité boursière est un service public. C'est ainsi que la loi dispose que les relations, établies sur les marchés réglementés entre les professionnels et l'organisme chargé de l'organisation des opérations appelé désormais entreprise de marché, sont réputées, aux termes de L. 421-9 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L9410DY8), être de nature contractuelle (9). L'entreprise de marché est donc, à ce titre, investie de la charge de confronter l'offre et la demande d'instruments financiers, mais dans un contexte juridique désormais détaché de la tutelle de l'Etat.

B - L'insuffisance des dispositions de la DSI : l'épreuve de la transposition

Pourtant, la mise en oeuvre de la directive, bien qu'étant résolument placée sous l'égide de l'article 52 du Traité (10) de Rome (N° Lexbase : L0260AWK) et imposant de la sorte aux Etats membres le respect des principes de libre prestation de service (11) et de liberté d'établissement (12), ne débouche pas sur la constitution d'un espace économique sans frontières. En effet, les instances communautaires, en donnant aux Etats membres la faculté de maintenir certains marchés dits "réglementés" sous tutelle administrative, ont laissé la possibilité de restreindre indirectement les libertés communautaires en maintenant, en particulier, des restrictions d'accès à leurs marchés nationaux. Sur ce point, il semble d'ailleurs que les rédacteurs de la directive aient, dès le départ, jugé que l'harmonisation des réglementations était irréalisable. A défaut de tenter d'imposer une unité réglementaire aux Etats membres qui serait demeurée lettre morte, la communauté a choisi une voie originale celle du "passeport européen" (13) qui a imposé la reconnaissance mutuelle des agréments obtenus par les professionnels dans leur propre ordre juridique. Ce choix a conduit, en pratique, à une interpénétration des différentes réglementations sur les marchés, les professionnels, désormais "prestataires de services d'investissement" (14), étant assujettis, au titre de cet agrément, aux règles de conduite ainsi qu'aux règles "prudentielles" (15) de leur Etat membre d'origine.

Il apparaît ainsi aux premiers commentateurs de la loi de modernisation de 1996 que la réforme bien qu'elle se soit "fait attendre" (16), a été plus subie que préparée et qu'elle ne remplit qu'imparfaitement les objectifs que les négociateurs communautaires avaient assignés à la DSI. Si, en effet, la loi s'avère relativement précise quant à la définition des marchés réglementés, elle est singulièrement silencieuse lorsque les opérations sont conclues sur d'autres types de marchés. Cette omission est d'autant plus surprenante que le texte prévoit, paradoxalement, la possibilité de réaliser certaines transactions en dehors de marchés réglementés, notamment lorsque l'opération est d'une taille importante (17). Celle-ci, devenue de gré à gré, voit simplement sa validité subordonnée au respect de deux conditions : d'une part qu'elle soit réalisée par un prestataire de services d'investissement agréé et, d'autre part, que le marché réglementé en soit informé dans toutes ses composantes et plus particulièrement quant aux paramètres relatifs à son prix d'exécution (18).

La réforme laisse également clairement apparaître que l'ancien monopole d'intermédiation, que l'on croyait voué à disparaître en raison de l'application du principe de libre concurrence (19) demeure vivace et s'intègre aux prix de quelques restrictions - mais à travers de nombreuses dispositions - à la nouvelle donne réglementaire. En premier lieu, les marchés réglementés demeurent les marchés pivots de l'ensemble des opérations et, en second lieu, et le point a déjà été souligné, les prestataires de services d'investissement succèdent aux agents de change et sont de facto les détenteurs privilégiés d'un monopole d'intermédiation à peine atténué.

La nécessité d'une révision apparaît par ailleurs dès l'édiction de la DSI, à propos d'une autre pierre d'achoppement : la conception duale des marchés. L'approche retenue à l'issue de la négociation, avec sa vision manichéenne de marchés antinomiques (réglementés ou de gré à gré) se trouve en effet, dès le départ, en contradiction avec la dynamique même des marchés boursiers. C'est ainsi que l'émergence, pourtant parfaitement prévisible, des systèmes électroniques de transaction a été totalement ignorée. Ces derniers appelés "alternative trades systems"(ATS) sont des plates formes automatisés qui traitent électroniquement les ordres et permettent ainsi de réaliser au cours de la même opération, l'exécution, la compensation et le règlement-livraison, autant d'étapes qui sont séparées dans le fonctionnement des marchés traditionnels. L'apparition (ou la résurgence) d'autres marchés privés, fonctionnant sur les modèles traditionnels (cotation latine et fixation du prix par un organisateur de marché) avait de surcroît été prévue par les observateurs de l'époque, ne serait-ce que parce qu'il apparaissait déjà nécessaire d'organiser la négociation des valeurs qui ne pouvaient être admises aux marchés réglementés.

En conséquence, l'élaboration de la directive semble avoir pâti d'un choix conceptuel erroné. Ses rédacteurs, en raisonnant sur une organisation diptyque des opérations, ont occulté l'existence des marchés mixtes ou intermédiaires (tel l'ancien marché hors cote) alors que ces derniers étaient reconnus de longue date dans la plupart des Etats membres et étaient déjà appelés "organisés" - le terme semblant de nouveau redevenir d'actualité -. Ils répondaient en effet déjà à un besoin technique des émetteurs des investisseurs et des professionnels, et la nécessité de leur maintien apparaissant inéluctable, la directive aurait sans doute dû prendre cet élément en considération.

L'importance accordée aux marchés réglementés, et partant, la difficulté à créer un espace boursier unifié à l'échelle européenne en raison du maintien des monopoles nationaux, n'a pas manqué de susciter de nombreuses critiques. On s'aperçoit que ces dernières, en filigrane, traduisent les préoccupations des professionnels divisés entre le souci de maintenir leur monopole et le souhait d'élargir leur activité dans des conditions plus conformes à la concurrence internationale. A l'époque, le confinement du milieu bancaire doit également être souligné, bridé qu'il est par la persistance des monopoles des professionnels de la bourse ainsi que par l'impossibilité de traiter la plupart des petits ordres autrement que sur un marché réglementé.

II - Les nouveaux équilibres concurrentiels

La réforme de la DSI ne visait pas à l'origine la reconnaissance des banques en tant qu'acteurs majeurs des opérations financières. L'analyse de la première consultation, réalisée en 2001, fait en effet apparaître que la révision portait initialement et essentiellement sur trois points : régler les problèmes relatifs aux règlements livraisons transfrontières, assurer une véritable concurrence entre les ATS et les marchés réglementés et permettre la mise en oeuvre du passeport européen sans aucune restriction. Il faudra attendre la seconde consultation, en mars 2002, pour que soit évoquée la possibilité pour les banques de traiter elles-mêmes les ordres de leurs clients. Dès lors, la réforme va prendre un autre aspect et ses rédacteurs vont clarifier des notions qui étaient demeurées imprécises depuis la première version de la directive. Cette oeuvre de redéfinition s'accompagnera, en outre, de l'introduction de nouveaux concepts (A) destinés à instaurer une concurrence structurée entre les acteurs du marché (B).

A - De nouvelles définitions et de nouveaux concepts

La réforme de la DSI s'inscrit dans un nouveau cadre conceptuel, le premier axe de redéfinition concernant la notion de marché. Levant toute ambiguïté, les marchés réglementés sont maintenus dans leur forme actuelle puisqu'ils sont décrits comme des structures d'encadrement des opérations reconnues par les pouvoirs publics des Etats membres et qui garantissent un fonctionnement régulier des négociations, c'est-à-dire, qui respectent les conditions d'accès au marché et d'admission à la cotation, les dispositions d'organisation des transactions, de suspension ainsi que les règles relatives à l'enregistrement et à la publicité des négociations. Ainsi formalisée, la définition des marchés réglementés reprend les traits principaux de la DSI dans sa première rédaction. En revanche, c'est sur la reconnaissance des ATS que l'évolution de la notion communautaire de marché est la plus sensible. Ces derniers sont définis comme des "entités qui, sans être réglementées en qualité de bourse, gèrent un système multilatéral qui rapproche une multiplicité d'ordres d'achat et de vente émanant de tiers et portant sur les instruments financiers - conformément à des règles non discrétionnaires adoptées par l'opérateur du système - de manière à aboutir à la conclusion d'un contrat". Les entités en question s'entendent des entreprises d'investissement qui organisent des systèmes "multilatéraux", "non discrétionnaires", plus précisément qui offrent des garanties en terme d'accès et qui permettent l'appariement des ordres (que la transaction soit nouée irrévocablement dans le système ou non).

Face à ces deux pôles concurrentiels que constitueront demain les ATS et les marchés réglementés, la directive - nouvelle version - ouvre un type d'espace de transactions inédit en créant le statut "d'internalisateur". Ce dernier vise à encadrer les intermédiaires agréés qui exécuteront d'une manière "organisée, fréquente et systématique des ordres sur valeurs dans le cadre d'une organisation technique et juridique" qui leur sera propre. Matériellement, un organisme détenant les comptes espèces et les comptes titres de ses clients pourra ainsi traiter les ordres de sa clientèle en interne, c'est-à-dire en se portant contrepartie, à l'achat ou à la vente. La création du statut "d'internalisateur" permettra de la sorte aux établissements de crédit de traiter seuls les petits ordres de la clientèle, sans les porter directement sur le marché (qu'il soit réglementé ou non) et surtout sans devoir passer par un intermédiaire.

La création de ce nouveau statut "d'internalisateur" a toutefois contraint à reconsidérer la notion de transparence. Attachée principalement aux marchés réglementés, elle s'entendait auparavant de la possibilité d'avoir accès aux informations relatives au prix, au volume ainsi qu'à la date et l'heure des négociations réalisées et, dans un autre domaine, d'être informé sur un plan égalitaire des données concernant les fondamentaux - les aspects économiques en particuliers - des valeurs. La communication de ces informations étant réalisée par l'entreprise de marché et/ou les autorités de marché, la transparence a été garantie par ce moyen, en raison même de la structure des marchés réglementés dont, au surplus, le contrôle revient en dernier ressort à la puissance publique. La création du statut "d'internalisateur" posant, en revanche, le problème de l'information sur le prix des transactions, la notion de transparence a été étendue et précisée. Elle devra désormais être analysée à deux étapes de l'opération lorsque cette dernière sera réalisée par un "internalisateur" : celle de la "pré-transaction" et celle de la "post-transaction". La première impose l'affichage actif des ordres à cours limités sur un carnet d'ordres, qu'il s'agisse d'un carnet d'ordres centralisé d'un marché réglementé ou d'un carnet d'ordres privés, la seconde (post-transaction) concerne l'obligation de divulguer le détail, en prix et en volume, des transactions déjà conclues.

De nouvelles règles de comportement ou de conduite devront de surcroît être édictées, dont les destinataires exclusifs seront les professionnels qui s'engageront réaliser les opérations dans le cadre d'une "meilleure exécution", traduction du concept anglo-saxon de "best execution". Ce dernier recouvre l'obligation faite à l'intermédiaire de démontrer qu'il a exécuté l'ordre de son client de la meilleure manière possible en fonction du jeu de différents critères au rang desquels figurent : le prix, la rapidité d'exécution et le décalage des cours.

B - Une concurrence fondée sur l'existence de trois types d'espaces de transaction

Les établissements de crédit disposent ainsi, à l'issue de la réécriture de la directive, de la possibilité de constituer un véritable pôle de concurrence face aux acteurs traditionnels du paysage boursier. Par ailleurs, la faculté leur est désormais expressément reconnue d'accéder librement aux ATS ; or, si le développement des plates formes est encore limité, ces dernières constituent un facteur potentiel de réduction des coûts considérables. Elles pourront ainsi devenir des concurrentes officielles des marchés réglementés, lorsqu'elles seront institutionnalisées et offrir indirectement un plus grand choix d'accès aux investisseurs, y compris par l'intermédiaire des guichets bancaires.

C'est donc le schéma d'une concurrence triptyque qui se dessine, mais celle-ci a essentiellement été bâtie sur l'idée de complémentarité entre les services financiers. Les marchés réglementés en constitueront le pôle majeur et leur vocation à garantir la protection des investisseurs en fait des structures d'encadrement qui seront présumées fonctionner sur le principe de "best execution", selon l'acception retenue par la Communauté. Le deuxième pôle sera composé des plates formes ATS multilatérales qui seront soumis à des règles d'accès, de transparence et de bonne conduite comparables à celles qui gouvernent les marchés réglementés. Le troisième pôle regroupera enfin les organismes bancaires ayant adopté le statut "d'internalisateur".

La réforme, par ailleurs, augmentera la transparence des opérations en organisant la non-discrimination dans l'accès aux marchés réglementés et organisés. L'activité des "internalisateurs" sera, au surplus, étroitement encadrée puisque ces derniers seront notamment contraints d'afficher une fourchette de pré-négociation au titre des obligations de transparence. Enfin, lorsque les ordres à cours limite n'auront pas été exécutés immédiatement, ils devront être transmis sur les marchés réglementés ou sur les plateformes multilatérales car ce type d'ordre contribue à la formation des cours.

Pour le reste, les "internalisateurs" disposeront de la possibilité de proposer de meilleures conditions aux investisseurs professionnels sous réserve d'afficher les prix au préalable et de rendre ultérieurement public le montant de cette amélioration. Au-delà de ce qu'on appelle la taille moyenne du marché (20), c'est-à-dire un montant d'ordre minimum, "l'internalisateur" sera libre en ce qui concerne les règles d'affichage de prix, mais restera soumis à la publication dans les meilleurs délais des transactions (prix et volume) exécutées.

Il restera cependant aux instances communautaires à définir, dans le cadre d'une concertation avec les professionnels, les règles d'application de la directive afin de préciser certains points. Les principes de meilleure exécution restent ainsi à définir concrètement, ainsi que les modalités de calcul des fourchettes de prix affichés. Il demeure que la transposition étant prévue pour 2006, la proximité de cette date laisse augurer d'un important effort d'adaptation de l'ensemble des acteurs des marchés. La publication prochaine du texte définitif devrait, à cet égard, éclairer plus amplement les opérateurs.


(1) Directive 93/22/CEE du Conseil du 10 mai 1993 concernant les services d'investissement dans le domaine des valeurs mobilières, JOCE, n° L. 141 du 11 juin 1993, p. 27 s. (N° Lexbase : L7726AUP).
(2) H. Synvet, "La directive 'services d'investissement', première lecture", Bull. Joly bourse et produits financiers 1993, p. 547 ; H. de Vauplane, J.-P. Bornet, "Marchés financiers : le défi de la transposition de la DSI", Bull. Joly Bourse et produits financiers, mars-avril 1996, p. 95.
(3) H. de Vauplane, J.-P. Bornet, Droit des marchés financiers, Litec, 3ème éd. 2001, n° 388.
(4) Loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières (N° Lexbase : L5893A4Z).
(5) H. de Vauplane, J.-P. Bornet, Droit des marchés financiers, Litec, 3ème éd. 2001, n° 509 à 512.
(6) Ibid, n° 513 à 515.
(7) H. Causse, op. cit., n° 15, l'auteur rapporte les propos de M. le Sénateur Marini au cours des débats : "nous devons en quelque sorte réaliser une synthèse entre des catégories et des habitudes qui sont usitées outre-Rhin, d'une part et des catégories et habitudes qui sont usitées outre- Manche, [J.O. Sénat, 13 mars 1996, p. 1230, 1ère col.]".
(8) H. Synvet, "La directive 'services d'investissement', première lecture", Bull. Joly bourse et produits financiers 1993, p. 547 ; H. de Vauplane, J.-P. Bornet, "Marchés financiers : le défi de la transposition de la DSI", Bull. Joly Bourse et produits financiers, mars-avril 1996, p. 95.
(9) La même disposition figure à l'article L. 442-1 du Code monétaire et financier pour les adhérents des chambres de compensation (N° Lexbase : L3921APW).
(10) 28ème considérant de l'exposé des motifs de la directive sur les services d'investissement.
(11) 1er considérant de l'exposé des motifs de la directive sur les services d'investissement.
(12) A.Wincklet, "Public et privé L'absence de préjugé" in, Le privé et le public, Archives de philosophie du droit, Sirey 1997, t. 41, p. 315, "Le traité de Maastricht introduit dans le traité de Rome un article 3 A qui prévoit que 'l'action des Etats membres et de la communauté comporte [...] l'instauration d'une politique économique [....] conduite conformément au respect du principe de l'économie de marché'".
(13) H. Causse, "Les services d'investissement" in, La modernisation des activités financières, dir. Th. Bonneau, éd. Joly 1996, n°46. L'instauration de cette procédure d'agrément vise à permettre "aux entreprise d'investissement agréées dans leur Etat membre d'origine [...] (d') exercer dans toute la Communauté tout ou partie des services autorisés" ; v . Articles L. 511-22 (N° Lexbase : L6361DIG), L. 511-23 (N° Lexbase : L6362DIH) et L. 511-24 (N° Lexbase : L6363DII) du Code monétaire et financier.
(14) Article L. 531-1 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L9338DYI), "Les prestataires de services d'investissement sont les entreprises d'investissement et les établissements de crédit ayant reçu un agrément pour fournir des services d'investissement au sens de l'article L. 321-1" ; v. ég. l'article L. 321-1 du Code monétaire et financier .
(15) Les règles prudentielles ont vocation à régir l'organisation et au fonctionnement interne des prestataires de services d'investissement. Voir articles L. 511-40 et s. du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L6355DI9) ; article L. 532-21du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L6316DIR) pour les prestataires de services d'investissement étrangers.
(16) Th. Bonneau, "A propos d'une réforme qui s'est fait attendre" in, La modernisation des activités financières, dir. Th. Bonneau, éd. Joly 1996. p. 1 s.
(17) Sur la question : H de Vauplane "Monopole d'intermédiation et obligation de concentration sur marchés réglementés", Banque et Droit, mars-avril 1998, p. 3 s.
(18) L'article L. 421-7 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L9408DY4) dispose que le monopole ne s'applique pas aux cessions effectuées entre a) Deux personnes physiques, lorsqu'elles portent sur des valeurs mobilières ; b) Deux sociétés lorsque l'une d'elle possède directement ou indirectement au moins 20 p. 100 du capital de l'autre; c) Une personne morale autre qu'une société et une société lorsque la personne morale possède directement ou indirectement au moins 20 p. 100 du capital de la société ; d) Deux sociétés contrôlées au sens de l'article 355-1 de la loi du 24 juillet 1966 précitée par une même entreprise; e) Sociétés d'assurance appartenant au même groupe ; f) Personnes morales et organismes de retraite ou de prévoyance dont elles assurent la gestion.
(19) P. Le Cannu, "Du monopole en matière financière" in, La modernisation des activités financières, dir. Th. BONNEAU, éd. Joly 1996, n° 301.
(20) En dessous d'une taille standard de marché, l'"internalisateur" sera obligé d'afficher une fourchette pré négociation. Cette taille standard de marché correspond à la moyenne arithmétique de montants en euros des transactions effectuées pour une valeur donnée sur le marché européen.

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Rel. collectives de travail

[Jurisprudence] Précisions sur le droit constitutionnel de la négociation collective

Réf. : Cons. const., décision n° 2004-494 DC, du 2 avril 2004, Loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social (N° Lexbase : A9945DBX)

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N1496ABZ

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par Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition sociale

Le 07 Octobre 2010


Soucieux de relancer le dialogue social, les partenaires sociaux ont adopté, le 16 juillet 2001, une position commune comportant de nombreuses propositions destinées à favoriser la relance de la négociation collective (G. Lyon-Caen, Pour une réforme enfin claire et imaginative du droit de la négociation collective, Dr. soc. 2003, p. 355. ; A. Mazeaud, Sur l'autonomie collective des partenaires sociaux depuis la position commune du 16 juillet 2001, Dr. soc. 2003, p. 361). Après de longs mois de gestation, la loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social a été adoptée par le Parlement et soumise, comme l'ont été avant elle toutes les grandes lois sociales de ces dernières années, au contrôle du Conseil constitutionnel. La décision était attendue dans la mesure où les précédentes avaient parfois remis en cause certaines des mesures phares adoptées par le Parlement (notamment la décision concernant la loi de modernisation sociale du 12 janvier 2002 ayant censuré la nouvelle définition plus restrictive du motif économique). Or, non seulement aucune des dispositions concernant la partie formation professionnelle n'a été contestée par les auteurs de la saisine -on pouvait s'y attendre compte tenu de l'unanimité qui avait marqué la conclusion de l'accord national interprofessionnel ayant servi de modèle (ANI du 23 septembre 2003)-, mais encore le Conseil n'a censuré aucune des dispositions déférées, ni d'ailleurs émis de réserve d'interprétation. Nous évoquerons ici les trois points intéressants de la décision concernant l'articulation des compétences entre le législateur et les partenaires sociaux (1), la valeur du principe de faveur (2) et les limites de l'exigence de clarté et d'intelligibilité de la loi en matière sociale (3).
Décision commentée

Cons. const., décision n° 2004-494 DC, du 2 avril 2004, Loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social (N° Lexbase : A9945DBX)

Texte déféré : loi n° 2004-391, relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social,  du 4 mai 2004 N° Lexbase : L1877DY8)

Dispositions contestées :

1. Article 41 : ce texte modifie l'articulation des accords conclus à des niveaux territoriaux différents. L'article 132-13 (N° Lexbase : L5667ACU) actuel du Code du travail dispose qu'"une convention de branche ou un accord professionnel ou interprofessionnel ne peut comporter des dispositions moins favorables aux salariés que celles qui leur sont applicables en vertu d'une convention ou d'un accord couvrant un champ territorial ou professionnel plus large". Désormais, la loi n'impose plus un tel principe qui devra être expressément stipulé par les signataires de la convention ou de l'accord de niveau supérieur. Par ailleurs, l'obligation d'adaptation qui pesait sur les signataires de l'accord de niveau inférieur moins favorable est également écartée, à moins que les signataires de l'accord de niveau territorialement supérieur ne l'aient également stipulé expressément.

2. Article 42 : ce texte complète les dispositions de l'article L. 132-23 du Code du travail (N° Lexbase : L5676AC9). Il permet à un accord d'entreprise ou d'établissement de déroger aux dispositions d'une convention ou d'un accord couvrant un champ territorial ou professionnel plus large sauf si cette convention ou cet accord en dispose autrement, cette faculté ne pouvant toutefois s'exercer en matière de salaires minima, de classifications et de garanties collectives dans le cadre de la mutualisation de certains risques et des fonds de la formation professionnelle.

3. Article 43 : ce texte étend aux conventions et aux accords d'entreprise ou d'établissement la faculté, jusqu'à présent réservée aux conventions et aux accords de branche, de mettre en oeuvre certaines dispositions du Code du travail et du Code rural ou d'y déroger.

Liens base :

Solution

Arguments soulevés par les auteurs de la saisine :

1. Violation de l'article 34 de la Constitution (N° Lexbase : L1294A9S) :

Les articles 41 à 43 seraient contraires à l'article 34 de la Constitution et priveraient de garanties légales le 11ème alinéa du Préambule de 1946 (N° Lexbase : L6815BHU). Le législateur serait en effet seul compétent "pour déterminer les droits et obligations constitutifs de l'ordre public social protecteur" et "les éventuelles délégations de compétence pour y déroger devraient être précises et limitées et résulter d'une habilitation législative expresse".

Or, toujours selon les auteurs de la saisine, les articles 41 et 42, en autorisant de façon implicite et générale les accords d'entreprise et de branche à déroger aux accords de niveau supérieur, seraient entachés d'incompétence négative. L'article 43 n'aurait pas non plus suffisamment encadré les nouvelles possibilités ouvertes aux accords d'entreprise de déroger aux dispositions du Code du travail. D'une manière générale, la nouvelle architecture conventionnelle méconnaîtrait, par sa complexité, l'exigence constitutionnelle de clarté et d'intelligibilité de la loi.

2. Violation du 11ème alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 (N° Lexbase : L6815BHU) :

Ces dispositions, en permettant à des accords d'entreprise de déroger, dans un sens défavorable au salarié, à des dispositions législatives ou à des accords de branche, seraient de nature à priver de garanties légales des exigences constitutionnelles, comme "le droit à la protection de la santé, à la sécurité matérielle, au repos et aux loisirs", tel qu'il résulte du 11ème alinéa du Préambule de 1946. Le respect de ces garanties ne pourrait être laissé à la libre détermination des partenaires sociaux, certainement pas au niveau de l'entreprise (§. 15).

Décision : conformité ; absence de réserve d'interprétation.

I. Sur la méconnaissance de l'article 34 de la Constitution

1. L'article 34 de la Constitution (N° Lexbase : L1294A9S) donne au Parlement le soin de déterminer les principes fondamentaux du droit du travail, dans le respect des dispositions du Préambule de la Constitution de 1946, et notamment de son alinéa 8 aux termes duquel "Tout travailleur participe, par l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises" (§. 6 et 7).

2. Il est loisible au législateur, après avoir défini les droits et obligations touchant aux conditions et aux relations de travail, de laisser aux employeurs et aux salariés, ou à leurs organisations représentatives, le soin de préciser, notamment par la voie de la négociation collective, les modalités concrètes d'application des normes qu'il édicte. En particulier, il peut laisser les partenaires sociaux déterminer, dans le cadre qu'il a défini, l'articulation entre les différentes conventions ou accords collectifs qu'ils concluent au niveau interprofessionnel, des branches professionnelles et des entreprises. Toutefois, lorsque le législateur autorise un accord collectif à déroger à une règle qu'il a lui-même édictée et à laquelle il a entendu conférer un caractère d'ordre public, il doit définir de façon précise l'objet et les conditions de cette dérogation (§. 8).

3. Le principe en vertu duquel la loi ne peut permettre aux accords collectifs de travail de déroger aux lois et règlements ou aux conventions de portée plus large que dans un sens plus favorable aux salariés ne résulte d'aucune disposition législative antérieure à la Constitution de 1946, et notamment pas de la loi du 24 juin 1936. Dès lors, il ne saurait être regardé comme un principe fondamental reconnu par les lois de la République au sens du Préambule de la Constitution de 1946. Ce principe constitue en revanche un principe fondamental du droit du travail au sens de l'article 34 de la Constitution, dont il appartient au législateur de déterminer le contenu et la portée (§. 9).

4. Il appartient au législateur d'exercer pleinement la compétence que lui confie l'article 34 de la Constitution. A cet égard, le principe de clarté de la loi, qui découle du même article de la Constitution, et l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi, qui découle des articles 4 (N° Lexbase : L1368A9K), 5 (N° Lexbase : L1369A9L), 6 (N° Lexbase : L1370A9M) et 16 (N° Lexbase : L1363A9D) de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, lui imposent d'adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques (§. 10).

5. Les articles 41 et 42 de la loi déférée n'ont ni pour objet ni pour effet de modifier, d'une part, les rapports entre les normes législatives ou réglementaires et les accords collectifs et, d'autre part, les rapports entre les accords collectifs et les contrats de travail. Ils se bornent à régir l'articulation entre les différents accords collectifs afin d'ouvrir à des accords de niveau inférieur la faculté de déroger à un accord de niveau supérieur, sous réserve que les signataires de ce dernier n'aient pas exclu cette faculté. Ces accords devront, selon les cas, soit ne pas avoir fait l'objet d'une opposition de la part d'une majorité d'organisations syndicales ou de la part des organisations syndicales majoritaires, soit avoir été signés par des organisations syndicales majoritaires, dans les conditions prévues par l'article 37 de la loi déférée. La possibilité, pour un accord d'entreprise, de déroger à un accord de niveau supérieur est exclue en matière de salaires minima, de classifications et de garanties collectives dans le cadre de la mutualisation de certains risques et des fonds de la formation professionnelle. Ces nouvelles dispositions n'auront pas de portée rétroactive, comme le précise l'article 45 de la loi déférée (§. 12).

6. Compte tenu de l'ensemble de ces garanties, le législateur n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence.

7. Si le 2°, le 4° et le 14° du I de l'article 43 renvoient à des accords d'entreprise les modalités d'application de certaines normes législatives du Code du travail, les autres dispositions de cet article permettent à des accords d'entreprise de déroger à des règles législatives d'ordre public relatives à l'indemnité de fin de contrat ou de fin de mission et à la durée du travail. Toutefois, le législateur a défini de façon précise l'objet de ces différentes dérogations et a fixé lui-même ou renvoyé au pouvoir réglementaire, sans méconnaître l'étendue de sa compétence, les conditions de leur mise en oeuvre. Ces accords ne devront pas avoir fait l'objet d'une opposition des organisations syndicales majoritaires dans l'entreprise ou devront avoir été signés par elles selon les modalités prévues par l'article 37 de la loi déférée (§. 13).

8. Dans ces conditions, le grief tiré de la violation de l'article 34 de la Constitution doit être rejeté.

9. Si les dispositions critiquées rendent plus complexe l'articulation entre les différents accords collectifs, elles définissent de façon précise les rapports entre les différents niveaux de négociation. Ainsi, le législateur qui a entendu se référer à la position commune adoptée par les partenaires sociaux le 16 juillet 2001, n'a pas méconnu les exigences d'intelligibilité et de clarté de la loi (§. 14).

II. Sur la méconnaissance du 11ème alinéa du Préambule de constitution de 1946

1. Il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine qui lui est réservé par l'article 34 de la Constitution (N° Lexbase : L1294A9S) d'adopter, pour la réalisation ou la conciliation d'objectifs de nature constitutionnelle, des modalités nouvelles dont il lui appartient d'apprécier l'opportunité. Cependant, l'exercice de ce pouvoir ne saurait aboutir à priver de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel (§. 16).

2. Les articles 41 et 42 n'ont pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet de permettre à des dispositions conventionnelles de déroger à des normes législatives ou réglementaires. Le grief invoqué par les requérants est inopérant à l'encontre de ces articles (art. 17).

3. L'article 43 ne permet pas aux accords collectifs de déroger aux règles d'ordre public en matière de santé et de sécurité au travail. Ni la durée maximale hebdomadaire de travail, ni la définition du travailleur de nuit, qui résultent des articles L. 212-7 (N° Lexbase : L5854ACS) et L. 213-2 (N° Lexbase : L5864AC8) du Code du travail, ne sont concernées par l'extension du champ de la négociation d'entreprise. L'objet et les conditions des nouvelles possibilités de dérogation aux règles relatives à la durée du travail, et notamment au droit au repos, sont définis de façon suffisamment précise. Dans ces conditions, l'article 43 ne prive pas de garanties légales les exigences constitutionnelles (§. 18).

Commentaire

1. L'articulation des compétences du législateur et des partenaires sociaux

Le premier mérite de cette décision du 29 avril est d'avoir précisé l'articulation constitutionnelle du domaine réservé au législateur, par l'article 34 de la Constitution (N° Lexbase : L1294A9S) et à la négociation collective, conformément aux dispositions de l'alinéa 8 du Préambule de la Constitution de 1946 (N° Lexbase : L6815BHU). La présence, dans le bloc de constitutionnalité, de ces deux dispositions constitue une clef de compréhension de cette décision de conformité. En confiant aux partenaires sociaux le soin de déterminer en partie les règles applicables aux relations professionnelles, le Parlement exerce bien sa propre compétence et met en oeuvre, dans un même temps, les dispositions de l'alinéa 8 du Préambule de la Constitution de 1946 aux termes duquel, rappelons-le, "Tout travailleur participe, par l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises".

Le Conseil constitutionnel avait eu l'occasion d'affirmer, à plusieurs reprises d'ailleurs, qu'il appartenait au législateur de déterminer les conditions et garanties de la mise en oeuvre de ce principe (décision n° 77-79 DC du 5 juillet 1977 N° Lexbase : A7955ACM ; décision n° 93-328 DC du 16 décembre 1993 N° Lexbase : A8287ACW ; décision n° 97-388 DC du 20 mars 1997 N° Lexbase : A8440ACL ; décision n° 99-423 DC, du 13 janvier 2000, Loi relative à la réduction négociée du temps de travail N° Lexbase : A8786ACE). Mais, pour que cette délégation puisse respecter les dispositions de l'article 34 de la Constitution, encore faut-il qu'elle ne se traduise pas par un abandon pur et simple de compétence. Le Parlement doit donc non seulement conserver une partie de sa compétence, mais il doit préciser le domaine des questions déléguées et organiser les principes d'articulation entre la loi et les conventions collectives. C'est le premier enseignement que l'on peut tirer de cette décision, et qui ressort très nettement du considérant 8 qui en précise les conditions.

Le législateur ne peut pas déléguer purement et simplement sa compétence sans l'avoir exercée préalablement. En d'autres termes, l'indicatif présent de l'article 34 impose au législateur d'exercer impérativement sa compétence. En revanche, il lui est loisible de renvoyer aux partenaires sociaux le soin de "préciser, notamment par la voie de la négociation collective, les modalités concrètes d'application des normes qu'il édicte", les partenaires sociaux jouant alors le rôle du pouvoir réglementaire lorsqu'il met en oeuvre les principes fondamentaux définis par la Loi. Si le Parlement doit veiller scrupuleusement aux modalités d'articulation entre les principes qu'il affirme lui-même et les dispositions conventionnelles, il dispose d'une marge de liberté plus grande pour laisser aux partenaires sociaux le soin de déterminer le niveau auquel il convient de négocier ainsi que les principes d'articulation entre ces différents niveaux.

Or, les dispositions contestées concernaient bien les principes d'articulation entre accords et conventions collectives, et non directement l'articulation entre les conventions collectives et la loi. Ce n'était donc pas directement sa propre compétence que le Parlement remettait en cause, mais simplement les niveaux de négociation. Seul l'article 43 de la loi concernait en réalité directement les rapports entre les conventions collectives et la loi. Or, pour ces dispositions, le Conseil constitutionnel considère que le Parlement a entouré les facultés de dérogations ouvertes de garanties suffisantes.

En premier lieu, le Conseil rappelle que la loi doit "définir de façon précise l'objet et les conditions de cette dérogation". C'est d'ailleurs ainsi que procède le législateur depuis 1982, lorsqu'il a autorisé la conclusion d'accords dérogatoires et qu'il procède dans l'article 43 déféré, puisque le texte liste les questions qui peuvent donner lieu à la conclusion d'accords dérogatoires (indemnité de fin de contrat ou de fin de mission et durée du travail). En second lieu, le Conseil relève que ces accords dérogatoires sont soumis à un régime juridique destiné à garantir le respect de la parole majoritaire. Uniquement contrebalancés par l'existence de l'hypothétique droit d'opposition depuis 1982, les accords dérogatoires sont désormais encadrés par un régime plus efficace puisque la loi déférée a opté soit pour une opposition au critère de majorité assoupli (majorité des suffrages exprimés), soit pour une majorité de conclusion.

Il est d'ailleurs intéressant de relever que c'est l'adjonction de ces deux séries de garanties qui permet au Conseil de valider l'article 43, puisqu'il relève que "dans ces conditions, le grief tiré de la violation de l'article 34 de la Constitution doit être rejeté".

2. Le principe de faveur n'a qu'une simple valeur législative

Sur ce point, la décision du Conseil constitutionnel confirme une jurisprudence bien établie.

En premier lieu, le Conseil confirme son refus de consacrer le principe de faveur comme principe fondamental reconnu par les lois de la République, refus déjà exprimé en 1997 à l'occasion de l'examen de la loi relative à l'épargne salariale (décision n° 97-388 DC du 20 mars 1997 N° Lexbase : A8440ACL X. Prétôt, Dr. soc. 1997, p. 476), et confirmé en 2003 à l'occasion de l'examen de la loi Fillon II (décision n° 2002-465 du 13 janvier 2003 N° Lexbase : A6295A4W Dr. soc. 2003, p. 280, chron. X. Prétôt ; Ch. Radé, Le renforcement de l'autonomie des partenaires sociaux après la décision du Conseil constitutionnel concernant la loi relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi, Lexbase Hebdo n° 54 du jeudi 16 janvier 2003 - édition sociale N° Lexbase : N5514AAH ; B. Mathieu, La promotion constitutionnelle de la liberté contractuelle en matière de droit du travail, D. 2003, chron. p. 638). Les arguments avancés n'ont d'ailleurs pas changé. Sans entrer dans le détail de l'argumentation, le Conseil, qui n'examine que les lois antérieures à 1946, seules à même -par la force des choses- d'avoir été visées par le Constituant de la Quatrième République, considère que la loi du 24 juin 1936, qui a fait pour la première fois application du principe de faveur, n'a pas entendu consacrer de principe général, mais une simple solution technique à un problème particulier d'articulation des sources.

S'il ne constitue pas une règle de valeur constitutionnelle au sens où elle contraindrait le Parlement, elle constitue bien, ce que l'on savait depuis longtemps d'ailleurs, un principe fondamental du droit du travail au sens de l'article 34 de la Constitution, qui entre donc pleinement dans le champ de compétence du législateur, comme d'ailleurs l'ensemble des questions intéressant les relations professionnelles (décision n° 67-46 L du 12 juillet 1967 N° Lexbase : A7854ACU ; décision n° 89-257 DC du 25 juillet 1989 N° Lexbase : A8199ACN).

Le Parlement peut donc a priori librement disposer de ce principe, même si on sait, par le biais du grief de l'incompétence négative, que le Conseil constitutionnel parvient à contrôler les conditions dans lesquelles il y dérogerait en subordonnant la validité d'une telle loi au fait qu'elle doit définir "de façon précise l'objet et les conditions de cette dérogation". C'est ce que rappelle très fermement le Conseil dans son dixième considérant : "il appartient au législateur d'exercer pleinement la compétence que lui confie l'article 34 de la Constitution ; (...) à cet égard, le principe de clarté de la loi, qui découle du même article de la Constitution, et l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi, qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, lui imposent d'adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques".

3. La loi sociale peut être complexe, pourvu qu'elle demeure intelligible

Les auteurs de la saisine considéraient également l'ensemble du dispositif comme trop complexe et, partant, comme contraire à l'exigence de clarté et d'intelligibilité de la loi, principe consacré depuis 1999 (décision n° 99-421 DC du 16 décembre 1999 N° Lexbase : A8784ACC ; décision n° 2001-453, du 18 décembre 2001, Loi de financement de la Sécurité sociale pour 2002 N° Lexbase : A6230AXZ ; décision n° 2001-455 DC du 12 janvier 2002, Loi de modernisation sociale N° Lexbase : A7588AXC).

Or, la réponse du Conseil est sur ce point très éclairante. Sans nier la complexité des nouveaux principes d'articulation mis en place (comment le pourrait-il !), le Conseil relève que les dispositions litigieuses "définissent de façon précise les rapports entre les différents niveaux de négociation" et se réfère directement "à la position commune adoptée par les partenaires sociaux le 16 juillet 2001". En d'autres termes, le législateur peut être complexe pourvu qu'il soit clair. Il s'agit donc d'une exigence formelle qualitative, et non de l'obligation de respecter un modèle législatif hérité, sans doute, d'une lointaine tradition remontant à Portalis ou Domat...

On pourra également s'étonner que le Conseil prenne la peine de rappeler que le parlement a entendu donner suite à la position commune du 16 juillet 2001 pour justifier la complexité de la loi, comme si cette complexité était acceptable parce qu'elle avait été négociée... Mais au-delà de cette évocation destinée à rappeler la synergie entre la négociation collective et le législateur, gage de relations sociales pacifiées, il faut se féliciter que le contrôle exercé par le Conseil sur l'inintelligibilité de la loi soit aussi restreint. Toute autre solution conduirait à renforcer encore un peu plus le contrôle sur le législateur et briderait l'initiative parlementaire, à une époque où elle n'en a nullement besoin.

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Santé

[Jurisprudence] Affaire du Distilbène : condamnation en appel du laboratoire !

Réf. : CA Versailles, 30 avril 2004, 3ème ch., n° 02/05924, UCB Pharma c/ Ingrid Criou (N° Lexbase : A0032DC8) et n° 02/05/925, UCB Pharma c/ Nathalie Bobet (N° Lexbase : A0033DC9)

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N1467ABX

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Le 07 Octobre 2010

La cour d'appel de Versailles a retenu dans deux affaires, rendues le 30 avril 2004, la responsabilité du laboratoire UCB Pharma pour avoir manqué à son obligation de vigilance et de surveillance lui incombant en ne surveillant pas les effets du produit litigieux, à savoir le Distilbène, qu'il fabrique et commercialise, et ce nonobstant les avertissements contenus dans la littérature médico-scientifique. De plus, la cour d'appel, confirmant un jugement de mai 2002, rend pour la première fois un laboratoire responsable du préjudice subi. Le diéthystilbestrol, ou DES, commercialisé principalement sous le nom de Distilbène est une molécule qui a les effets d'une hormone sexuelle féminine sans y ressembler dans sa structure. Des millions de femmes y ont été exposées. Non pas qu'elles l'aient avalée, leurs mères l'ayant prise alors que, foetus, elles se développaient dans leur ventre.

Ce médicament découvert en 1938, bénéficie d'une autorisation de mise sur le marché depuis 1945 ; il est commercialisé en France depuis 1950. Il est indiqué aujourd'hui dans le traitement du cancer de la prostate. De nombreuses études l'ont évalué et ont conclu à son utilité dans les grossesses menacées. Dans la fin des années cinquante, parallèlement à l'avènement des dosages hormonaux, il atteint des records de prescription, les auteurs préconisant des cures répétées, à doses progressives de la sixième à la trente-cinquième semaine d'aménorrhée. L'indication "avortement spontané à répétition" a été supprimée en 1976 et son utilisation a été contre-indiquée chez la femme enceinte en 1977. On estime qu'entre 1950 et 1976 en France, 160 000 femmes ont été traitées par DES pendant leur grossesse. On peut évaluer ainsi que 80 000 filles et 80 000 garçons âgés aujourd'hui de 25 à 50 ans ont été exposés au DES in utero, le pic de prescription de cette molécule se situant autour des années 1970. Il a été clairement établi à ce jour que l'exposition au DES in utero est susceptible de provoquer des atteintes de l'appareil génital chez la femme en particulier avec des anomalies structurelles et morphologiques et des conséquences sur la reproduction, des risques d'adénocarcinome à cellules claires du vagin (1 pour mille des patientes exposées au DES in utero) et du col de l'utérus. Chez l'homme, cette exposition in utero est susceptible d'entraîner l'apparition de kystes épididymaires, des anomalies testiculaires et des anomalies de position du méat urinaire. Ces données ont conduit à préconiser chez la femme un suivi médical sur le plan gynécologique, pour le dépistage du cancer du col, et lors d'une grossesse.

Une information du corps médical sur l'exposition au DES in utero a été assurée par le ministère de la Santé en 1989 et 1992. Une brochure sur ce thème a été diffusée auprès des médecins généralistes, des gynécologues, des obstétriciens, des maternités, des services de gynécologie et des centres anticancéreux.

Toutefois, il semble qu'à ce jour les conséquences de cette exposition demeurent encore méconnues par une partie du corps médical. Ainsi, très peu d'effets indésirables liés à une exposition au Distilbène in utero ont été notifiés au Système national de pharmacovigilance.

L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) a rencontré en septembre 2001 les représentants du "Réseau DES France" (1), constitué de bénévoles concernés par le DES. Ce dossier a été examiné par le comité technique de pharmacovigilance de l'Afssaps du 4 décembre 2001. A l'issue de cette réunion, il a été considéré qu'une nouvelle information des professionnels de santé et du public sur les modalités de dépistage et de prise en charge des patients était nécessaire. Cette information a été diffusée en novembre 2002 auprès des professionnels de santé.

Par ailleurs, il a été constaté que la prise en charge des femmes exposées in utero au DES, reste souvent inappropriée, en particulier lors de leur grossesse. Le ministre délégué à la Santé a donc saisi le directeur général de l'ANAES le 19 novembre 2001 afin de mettre en place un groupe de travail pour élaborer des recommandations de bonnes pratiques en la matière. Ces bonnes pratiques ont été publiées en mai 2003.

Condamnée en première instance, par le tribunal de grande instance de Nanterre, sur le fondement de l'article 221-1 du Code de la consommation (N° Lexbase : L6691ABG) selon lequel "les produits et les services doivent, dans des conditions normales d'utilisation ou dans d'autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, présenter la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes", la société UCB Pharma avait interjeté appel de ce jugement.

En effet, selon elle, les victimes recherchaient sa responsabilité à raison de la défectuosité du DES, commercialisé sous le nom de Distilbène auquel elles avaient été exposées in utero. Or, pour l'appelante, le fait générateur de la responsabilité ne pouvait être que l'exposition au Distilbène en 1973 et, en conséquence, le principe de non-rétroactivité des lois s'opposait à l'application non seulement, du droit interne à la lumière de la directive de 1985 (directive n° 85/374 du 25 juillet 1985, relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres en matière de responsabilité du fait des produits défectueux N° Lexbase : L9620AUT (2)), mais aussi de l'article L. 221-1 du Code de la consommation ; l'article 17 de la directive précitée, précisant que ce texte "ne s'applique pas aux produits mis en circulation avant la date à laquelle les dispositions visées à l'article 19 entrent en vigueur", soit le 30 juillet 1988.

De plus, la société UCB Pharma souligne que l'interprétation conforme du droit national à la lumière de la directive précitée devrait conduire à constater l'extinction de l'obligation de sécurité puisque le délai au terme duquel cette obligation s'éteint est de dix ans : le Distilbène ayant été administré en 1973, l'action serait donc prescrite.

Enfin, l'appelante fait valoir que, quel que soit le régime de responsabilité appliqué, aucune faute ne saurait être retenue à son encontre. En effet, selon elle, à l'époque où le Distilbène a été administré à la mère de la victime, en 1973, il existait un consensus du corps médical sur l'efficacité de ce produit dans la prévention des complications précoces de la grossesse. Ainsi, en l'état des connaissances scientifiques de l'époque aucune responsabilité ne saurait être retenue contre elle. Et s'agissant des règles de responsabilité civile, le lien de causalité direct et certain n'est pas établi.

Mais, la cour d'appel de Versailles rejette les prétentions du laboratoire. En effet, elle retient que, compte tenu des circonstances dans lesquelles les victimes ont été atteintes, à savoir in utero, la responsabilité de la société UCB Pharma doit être recherché sur le fondement délictuel : "il convient de rechercher la responsabilité du laboratoire, non pas sur un fondement contractuel, mais sur un fondement délictuel ; il y a donc lieu d'écarter toute référence aux articles 1147 du Code civil et L. 221-1 du Code de la consommation pour ne retenir que l'application des dispositions des articles 1165, 1382 et 1383 du Code civil, en vertu desquels les tiers à un contrat sont fondés à invoquer tout manquement du débiteur contractuel lorsque ce manquement leur a causé un dommage, sans avoir à rapporter d'autre preuve".

Ensuite, il ressort des rapports d'expertise que, dès 1972, la littérature médicale énonçait que l'association entre l'administration du DES et le cancer du vagin était suffisamment significative pour en conclure qu'il fallait s'abstenir de prescrire ce type de produit aux femmes enceintes. Il est également reproché au laboratoire de ne pas avoir tenu compte de la position de la Food and drug administration américaine qui contre-indiquait, dès 1971, l'utilisation du DES chez la femme enceinte. Par conséquent, la société UCB Pharma a manqué à son obligation de vigilance et a commis une série de fautes en ne surveillant pas l'efficacité du produit litigieux et, à partir de 1971, en maintenant sa distribution et ce, malgré les avertissements contenus dans la littérature médico-scientifique.

Enfin, concernant les préjudices subis par les victimes, à savoir un adénocarcinome à cellules claires, la cour retient l'existence de présomptions graves, précises et concordantes entre l'exposition au DES in utero et le développement des cancers.

Ce n'est pas la première fois qu'un laboratoire est condamné par la cour d'appel de Versailles en raison de l'existence de présomptions graves, précises et concordantes entre l'administration d'un produit médicamenteux et les préjudices subis. En effet, mais sur un fondement différent - responsabilité du fait des produits défectueux-, la cour de Versailles avait déjà retenu la responsabilité du laboratoire GlaxoSmithKline dans l'affaire du vaccin contre l'hépatite B et de la sclérose en plaques (CA Versailles, 2 mai 2001, n° 98/06839, SA SmithKline Beecham c/ Armelle Morice N° Lexbase : A3586ATY), puis celle de l'Institut Pasteur, toujours pour le vaccins contre l'hépatite B mais avec comme conséquence le syndrome de West (CA Versailles, 12 septembre 2003, n° 97/04862, SNC Aventis Pasteur c/ Mme Colona Cesari N° Lexbase : A1108DBN). Depuis la Cour de cassation, statuant sur l'affaire Glaxo a refusé de retenir l'existence de présomptions pour démontrer l'existence d'un lien de causalité entre le produit en cause et le dommage subi (Cass. civ. 1, 23 septembre 2003, n° 01-13.063, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A5811C94).

A ce jour, la société UCB Pharma n'a pas encore formé un pourvoi en cassation contre ces deux arrêts mais, selon le réseau DES France, cela ne saurait tarder puisqu'elle a déjà déposé une requête, le jour même du prononcé des deux décisions, auprès du tribunal de grande instance de Nanterre pour demander la récusation du collège d'experts nommés depuis près de deux ans dans plusieurs dossiers. Affaire à suivre ...

Anne-Laure Blouet-Patin
SGR - Droit médical


(1) http://www.des-france.org/accueil/default.asp
(2) Il est à noter qu'une erreur s'est glissée dans les arrêts de la cour d'appel de Versailles qui font référence à une "directive du 20 décembre 1985" au lieu de la directive du 25 juillet 1985.

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Sécurité sociale

[Jurisprudence] Le droit aux prestations familiales des enfants étrangers

Réf. : Ass. plén., 16 avril 2004, n° 02-30.157, Directeur régional des affaires sanitaires et sociales des Pays de la Loire, P (N° Lexbase : A8864DBW)

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par Christophe Willmann, Maître de conférences à l'Université de Picardie

Le 07 Octobre 2010

Décision

Ass. plén., 16 avril 2004, n° 02-30.157, Directeur régional des affaires sanitaires et sociales des Pays de la Loire, P (N° Lexbase : A8864DBW)

Textes applicables : CSS., art. L. 512-1 (N° Lexbase : L5328ADP) et 512-2 (N° Lexbase : L5329ADQ ), D. 511-1 (N° Lexbase : L9602ADY) et 511-2 (N° Lexbase : L9603ADZ).

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Faits

Une Caisse d'allocation familiale peut-elle exiger que le bénéfice des prestations familiales au profit de deux enfants étrangers soit conditionné par un certificat médical, délivré par l'OMI ?

- oui, selon la CAF
- oui, selon le TASS d'Angers ; non, selon la cour d'appel d'Angers, le 10 septembre 1998
- oui, selon la Cour de cassation (31 octobre 2000)
- non, selon la cour d'appel de Poitiers (4 décembre 2001, en tant que Cour de renvoi)
- non enfin, selon l'Assemblée plénière

Solution

- L'enfant étranger ne doit pas justifier d'un titre de séjour pour bénéficier de prestations familiales versées par la CAF (pour les enfants étrangers nés à l'étranger, le certificat de contrôle médical délivré par l'OMI).

- Les étrangers résidant régulièrement en France avec leurs enfants mineurs bénéficient de plein droit des prestations familiales.

Commentaire

L'Assemblée plénière devait statuer sur un arrêt de la cour d'appel de Poitiers du 4 décembre 2001, rendu sur renvoi après une première cassation, qui a accueilli la demande d'une mère congolaise, sollicitant le bénéfice des prestations familiales en faveur de ses deux enfants à charge, pour la période antérieure à la délivrance du certificat de contrôle médical de l'Office des migrations internationales (OMI), en raison de l'entrée et du séjour réguliers de ces enfants en France avec leur mère.

La question posée était la suivante : les prestations familiales en faveur des enfants étrangers vivant en France avec leurs parents en situation régulière sont-elles dues du seul fait de l'entrée et du séjour réguliers de ces enfants sur le territoire français, ou seulement à compter de la délivrance du certificat de contrôle médical par l'OMI ? L'enjeu est considérable. D'un côté, l'impératif du contrôle de l'entrée et du séjour des étrangers en France, ainsi que la préoccupation de ne pas alourdir les dépenses sociales par la prise en charge supplémentaire de nouveaux bénéficiaires, justifient une stricte appréciation des conditions d'appréciation du droit aux prestations sociales d'enfants étrangers. A cette logique institutionnelle, s'oppose un impératif de protection des droits des enfants, qui ont un droit élémentaire, quelle que soit leur nationalité, à des conditions de vie décentes, à la nourriture, aux soins nécessaires à leur santé et à leur bien-être.

1. Bénéfice des prestations sociales pour les enfants étrangers : un droit sous conditions

  • Des textes en apparence sans ambiguïté

Bénéficient de plein droit des prestations familiales, les étrangers titulaires d'un titre exigé en vertu soit de dispositions législatives ou réglementaires, soit de traités ou accords internationaux pour résider régulièrement en France. Un décret fixe la liste des titres et justifications attestant la régularité de l'entrée et du séjour des bénéficiaires étrangers et des enfants qu'ils ont à charge et au titre desquels des prestations familiales sont demandées (CSS, art. L. 512-2 N° Lexbase : L5329ADQ ; loi n° 86-1307 du 29 décembre 1986, relative à la famille, art. 7 I N° Lexbase : L1880DYB).

Le décret nº 87-289 du 27 avril 1987 (N° Lexbase : L1879DYA) a complété les prescriptions législatives en fixant la liste des documents exigés. L'étranger qui demande à bénéficier de prestations familiales justifie la régularité de son séjour par la production d'un des titres de séjour ou documents suivants en cours de validité : carte de résident ; carte de séjour temporaire ; carte de résident privilégié ; carte de résident ordinaire ; certificat de résidence de ressortissant algérien ; récépissé de demande de titre de séjour valant autorisation de séjour d'une durée de six mois renouvelable portant la mention : "reconnu réfugié" ; récépissé de demande de titre de séjour d'une durée de 6 mois renouvelable portant la mention étranger admis au séjour au titre de l'asile ; autorisation provisoire de séjour d'une validité supérieure à 3 mois.

La disposition centrale reste celle codifiée à l'article D. 511-2 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L9603ADZ) inséré par décret du 27 avril 1987 (N° Lexbase : L1879DYA), selon lequel la régularité de l'entrée et du séjour des enfants étrangers que le bénéficiaire a à charge et au titre desquels il demande des prestations familiales est justifiée par la production d'un des titres de séjour ou documents prévus à l'article D. 511-1 (N° Lexbase : L9602ADY), à défaut par la production d'un extrait d'acte de naissance en France ou d'un certificat de contrôle médical, délivré par l'Office national d'immigration à l'issue de la procédure de regroupement familial et comportant le nom de l'enfant.

L'exigence de la délivrance du certificat de contrôle médical de l'OMI se justifie par la nécessité de respecter la procédure de regroupement familial. Cette procédure permet à l'Etat d'exercer un minimum de contrôle sur l'entrée en France des familles des ressortissants étrangers résidant sur le territoire national. La régularité de leur entrée est donc fondée sur l'accord préfectoral de regroupement familial, et l'autorisation de séjour à ce titre est matérialisée par le certificat délivré par l'OMI à l'issue de l'examen médical.

  • Une jurisprudence constante

Jusqu'à présent, la jurisprudence a toujours donné une lecture très étroite des dispositions réglementaires (CSS, art. D. 511-2 N° Lexbase : L9603ADZ). Lorsqu'une personne, de nationalité tunisienne, travaillant en France depuis un certain temps, demande le versement des prestations familiales pour ses quatre enfants mineurs nés en Tunisie, la caisse d'allocations familiales peut à bon droit refuser de verser ces prestations familiales, les enfants ne remplissant pas les conditions prévues à l'article D. 511-2 du Code de la Sécurité sociale (Cass. soc., 30 novembre 2000, n° 99-12.665, M. Abdallah Bouhnich c/ Caisse d'allocations familiales (CAF) de Paris, inédit N° Lexbase : A6823C7T), c'est-à-dire le certificat médical délivré par l'OMI. La même solution vaut pour les parents de nationalité libanaise (Cass. soc., 10 décembre 1998, n° 97-12.327, Caisse d'allocations familiales (CAF) de la région de Bayonne c/ Mme Mona Abou Habib, inédit N° Lexbase : A1899CRR). Dans la présente affaire, toutes les juridictions sollicitées s'étaient d'ailleurs prononcées en ce sens, conformément à la jurisprudence dominante.

2. Bénéfice des prestations sociales pour les enfants étrangers : un droit sans condition de nationalité

La lecture étroite de l'article D. 511-2 (N° Lexbase : L9603ADZ), qui prévalait jusqu'alors, conduisait à exiger des enfants étrangers que leurs parents produisent un document attestant de la régularité de leur séjour en France (certificat médical de l'OMI). A défaut de quoi, la CAF était fondée à refuser le paiement de prestations sociales à leur bénéfice.

Cette lecture des textes ne reposait pas pour autant sur un large consensus. Un certain nombre d'arguments militaient au contraire pour la reconnaissance d'un droit aux prestations familiales, au profit des enfants étrangers, sans autre condition que leur résidence sur le territoire français.

Un premier argument de texte pouvait être invoqué. La loi nº 95-116 du 4 février 1995 (N° Lexbase : L3000AIX) (art. 48, codifié au CSS sous l'article L. 512-1 N° Lexbase : L5328ADP) avait à cet effet fixé le principe général selon lequel toute personne française ou étrangère résidant en France, ayant à sa charge un ou plusieurs enfants résidant en France, bénéficie pour ces enfants des prestations familiales.

Le deuxième argument, d'ordre jurisprudentiel, vient d'un arrêt rendu par la seconde chambre civile de la Cour de cassation le 9 décembre 2003, selon lequel il résulte de la combinaison des articles D. 511-1 (N° Lexbase : L9602ADY) et D. 511-2 (N° Lexbase : L9603ADZ) du Code de la Sécurité sociale que la régularité du séjour d'un mineur étranger que le bénéficiaire de prestations familiales a à charge et au titre duquel il demande l'octroi desdites prestations, est justifiée par la production d'un livret ou carnet de circulation (Cass. civ. 2, 9 décembre 2003, n° 02-30.401, Caisse d'allocations familiales (CAF) du Val de Marne c/ M. Abdelaziz Aboulaynine, FS-P+B N° Lexbase : A4368DAZ). Dans cet arrêt, la Cour de cassation prenait clairement position en faveur d'un allégement des contraintes pesant sur les parents étrangers de mineurs étrangers requérant le bénéfice de prestations sociales auprès de la CAF, puisque le certificat médical délivré par l'OMI n'était pas exigé. De même, par un arrêt rendu le 4 avril 1996, la Cour de cassation décidait que le certificat de contrôle médical délivré par l'Office national d'immigration aux enfants étrangers au titre desquels sont demandées les prestations familiales n'a pour effet que d'attester la régularité de l'entrée et du séjour de ceux-ci en France (Cass. soc., 4 avril 1996, n° 94-16.086, M. Zoba Dia Sambi c/ Caisse d'allocations familiales de Pontoise, publié N° Lexbase : A2466ABX). Selon l'alinéa premier de l'article L. 512-2 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L5329ADQ), le demandeur d'une prestation sociale doit être titulaire d'un titre exigé pour résider régulièrement en France. La détention d'un tel document apparaît donc comme une condition d'ouverture des droits. Mais, à l'égard de l'enfant étranger, l'alinéa 2 du même article prévoit seulement qu'un décret fixe la liste des justifications de la régularité de son entrée et de son séjour sur le territoire national. Il ne s'agit alors que d'une règle de preuve et la date de délivrance du document est, a priori, sans influence sur celle de l'ouverture des droits laquelle peut être située en amont si la preuve est rapportée de l'antériorité de la présence des enfants en France. L'Assemblée plénière de la Cour de cassation, par le présent arrêt, s'est ralliée à ce mouvement (certes minoritaire) de la jurisprudence.

Le troisième argument est tiré du droit social européen, prohibant toute discrimination entre les ressortissants et non-ressortissants, dans l'exercice de leurs droits (singulièrement, le bénéfice d'une prestation). Le Conseiller rapporteur a développé en détails ce point. Selon lui, dès lors que des enfants étrangers sont déjà sur le territoire national après une entrée non clandestine (bien que distincte de la procédure de regroupement) et qu'ils vivent avec leur mère, elle-même en situation régulière, rien, en droit, ne les différencie d'enfants de ressortissants français ou communautaires au regard de la condition générale de résidence (posée par l'article L. 512-1 du Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L5328ADP). Exiger la production d'un certificat de contrôle médical émanant de l'OMI (ou d'un certificat médical propre à la procédure définie par traité), c'est introduire une différence de traitement fondée sur la nationalité à l'égard des enfants et de l'allocataire lui-même, différence dont la finalité relève d'une logique de police de circulation des étrangers, qui n'est pas dans un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.

En l'espèce, l'Assemblé plénière de la Cour de cassation a, implicitement, validé le raisonnement de la Cour de renvoi. Les titres de séjour visés à l'article D. 511-1 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L9602ADY) ne sont pas délivrés aux enfants mineurs. L'article D. 511-2 (N° Lexbase : L9603ADZ) renvoyant à l'article D. 511-1, il ne peut s'agir que des titres ou documents dont doit être titulaire le demandeur aux prestations et non les enfants eux-mêmes. En tout état de cause, l'article D. 511-2, qui ne s'applique qu'à défaut de la production d'un des documents visés à l'article D. 511-1, est inapplicable au cas particulier, les enfants en cause ne remplissant pas les conditions exigées quant au lieu de naissance et au regroupement familial.

Bref, l'Assemblée Plénière de la Cour de cassation, suivant l'avis du premier avocat général et le rapport du conseiller rapporteur, donne une lecture "humaniste" aux dispositions réglementaires codifiées au Code de la Sécurité sociale. Des dispositions combinées des articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, le principe retenu est que le bénéfice des prestations sociales doit être assuré sans distinction fondée sur l'origine nationale. Or, subordonner l'ouverture du droit à ces prestations familiales à la délivrance d'un certificat de contrôle médical de l'OMI pour des enfants étrangers ne répond pas à un motif suffisamment impérieux. Il peut être interprété comme une restriction supplémentaire plus rigoureuse imposée à ces enfants, qui apparaît disproportionnée par rapport au but poursuivi, s'agissant surtout de prestations indispensables pour l'entretien et le bien-être desdits enfants, ainsi que le respect effectif de leur vie privée et familiale.

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