La lettre juridique n°969 du 11 janvier 2024

La lettre juridique - Édition n°969

Avocats/Statut social et fiscal

[Brèves] Majoration de 25 % en cas de non-adhésion d’un avocat à une association de gestion agréée : carton rouge de la CEDH !

Réf. : CEDH, 7 décembre 2023, Req. 26604/16, WALDNER c/ FRANCE N° Lexbase : A727217H

Lecture: 5 min

N7846BZM

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par Marie-Claire Sgarra

Le 10 Janvier 2024

La CEDH a jugé, dans une décision en date du 7 décembre 2023, que la majoration de 25 % appliquée aux revenus de contribuables n’ayant pas adhéré à un organisme de gestion agréé était contraire à l’article 1er du Protocole n° 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Les faits. Le requérant, avocat, a fait l’objet d’une majoration de ses revenus imposables au titre des années 2006 à 2011. Motif ? Il n’était pas adhérent d’un organisme de gestion agréé (OGA).

Procédure :

  • Défaite du requérant devant le juge administratif (CE 9° et 10° ssr., 9 novembre 2015, n° 366457, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A3589NWT). 
  • L’avocat saisit alors la CEDH.
  • Le requérant se plaint d’une ingérence disproportionnée dans son droit au respect de ses biens découlant de la majoration de ses revenus professionnels imposables faute d’avoir adhéré à une association agréée. Il invoque l’article 1 du Protocole n° 1 à la Convention, aux termes duquel : « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les États de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ou des amendes ».

Rappel législatif. Avant la loi de finances pour 2006 (loi n° 2005-1719, du 30 décembre 2005, de finances pour 2006 N° Lexbase : L6429HET), l’adhésion des professions libérales à un OGA avait pour effet d’accorder aux adhérents un abattement de 20 % sur leurs revenus imposables. L’article 76 de la loi de finances pour 2006 précitée a modifié le régime fiscal applicable à ces professionnels à compter de la déclaration pour 2007 sur les revenus perçus en 2006, en abrogeant cet abattement et en le remplaçant par une majoration de l’assiette de leurs revenus imposables de 25 % en cas d’absence d’adhésion à un OGA (CGI, art. 158, al. 7 N° Lexbase : L8132LZ9).

Qu’en pense le juge français ? Le Conseil constitutionnel, dans une décision du 23 juillet 2010, a jugé que les dispositions de l'article 158, alinéa 7, avaient été adoptées pour assurer aux adhérents d'un organisme de gestion agréé une assistance technique, tout en permettant de satisfaire l'objectif constitutionnel de lutte contre l'évasion fiscale, puisqu'une telle adhésion permettait de mieux connaître les revenus non salariaux (Cons. const., décision n° 2010-16 QPC, du 23 juillet 2010 N° Lexbase : A9194E4B). La majoration, à compter du 1er janvier 2006, de 25 % de la base d'imposition des non-adhérents est intervenue dans le cadre d'une réforme globale de l'impôt sur le revenu qui a concerné tous les contribuables ; que cette mesure est la contrepartie, arithmétiquement équivalente, de la suppression de l'abattement de 20 % dont bénéficiaient, avant cette réforme de l'impôt, les adhérents à un organisme de gestion agréé. Ainsi, la différence de traitement entre adhérents et non adhérents demeure justifiée à l'instar du régime antérieur et ne crée donc pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques.

La CEDH devait déterminer si, dans les circonstances de l’espèce, la méthode choisie par le législateur pour atteindre le but qu’il s’était fixé, à savoir assurer le paiement de l’impôt au moyen du dispositif fiscal fondé sur l’article 158, 7, précité du CGI, reposait suffisamment sur une « base raisonnable », de nature à garantir un juste équilibre entre les impératifs de l’intérêt général et ceux de la sauvegarde des droits fondamentaux de l’individu.

Position de la CEDH. « Dans les circonstances particulières de l’espèce, la méthode choisie par le législateur pour atteindre le but qu’il s’était fixé, à savoir assurer le paiement de l’impôt au moyen d’une majoration de l’assiette de l’impôt dû par les non adhérents à une association agréée – à laquelle l’adhésion n’était pourtant pas obligatoire – et par les contribuables concernés ne faisant pas appel à un autre professionnel agréé – une telle faculté leur étant pourtant accordée par la loi –, ne reposait pas suffisamment sur une « base raisonnable » car contraire à la philosophie générale du système basé sur les déclarations du contribuable présumées faites de bonne foi et correctes. De plus, le taux de la majoration automatiquement applicable à hauteur de 25 % entraînait une surcharge financière disproportionnée à l’encontre du requérant. Cette méthode, telle qu’elle a été appliquée en l’espèce, a ainsi rompu le juste équilibre qui doit exister entre les impératifs de l’intérêt général et ceux de la sauvegarde des droits fondamentaux de l’individu ».

En pratique :

  • Les réclamations portant sur l’impôt sur le revenu 2020 devaient être introduites avant le 31 décembre 2023.
  • Ce dispositif de majoration de 25 % (devenu dégressif) a été supprimé à compter de l’imposition des revenus de l’année 2023.

 

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Consommation

[Brèves] La performance, le rendement et la capacité de production d’une installation sont-ils des caractéristiques essentielles du contrat ?

Réf. : Cass. civ. 1, 20 décembre 2023, n° 22-14.020, FS-B N° Lexbase : A8457194

Lecture: 5 min

N7937BZY

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par Hélène Nasom-Tissandier, Maître de conférences HDR, Université Paris Dauphine-PSL, CR2D

Le 10 Janvier 2024

► Un contrat de vente ou de fourniture de services conclu hors établissement doit, à peine de nullité, indiquer, de manière lisible et compréhensible, les caractéristiques essentielles du bien ou du service ; dans le cadre d’un contrat de fourniture et de pose d'un kit photogénérateur, l’information portant sur le résultat attendu de l'utilisation de cet équipement (la production d’électricité de l’installation), constitue une caractéristique essentielle ;
les informations relatives aux caractéristiques essentielles du bien ou du service ne peuvent figurer sur des documents annexes qui ne sont pas signés de toutes les parties.

La Cour de cassation revient sur une question déjà développée dans la jurisprudence, celle de la détermination des « caractéristiques essentielles du bien ou du service » au sens de l’article L. 111-1 du Code de la consommation dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016.

Faits et procédure. Un contrat de fourniture et pose d’un kit photogénérateur au prix de 18 600 euros a été conclu entre M. J et la société GEF Négoces avec un financement par crédit bancaire souscrit avec l’épouse de l’acquéreur. Invoquant des irrégularités du bon de commande, le couple a assigné le vendeur et la banque en nullités des contrats. La cour d’appel accueille la demande et prononcé l’annulation du bon de commande et du crédit (CA Aix-en-Provence, 6 janvier 2022, n° 19/07980 N° Lexbase : A62707HP).

La société forme un pourvoi en cassation dont seul le premier moyen, formé de quatre branches, est examiné. Un élément ne constituerait une caractéristique essentielle d'une installation photovoltaïque au sens de l'article L. 111-1 du Code de la consommation N° Lexbase : L2106L8I, qu'à la condition que les parties l'aient fait entrer dans le champ contractuel. En se bornant à constater pour annuler un bon de commande que les caractéristiques du kit photovoltaïques étaient illisibles et que la puissance du micro-onduleur n’apparaissait pas sans rechercher si les parties avaient fait entrer ces éléments dans le champ contractuel et sans tenir compte de leur précision dans un document contractuel annexe, la cour d’appel aurait violé d’une part les dispositions des articles L. 121-17 N° Lexbase : L1691K7R, L. 121-18-1 alinéa 1 N° Lexbase : L0985I7M et L. 111-1 du Code de la consommation (1ère et 2ème branches). Il est également soutenu que la nullité du bon de commande serait contraire aux dispositions de l’article L. 121-21-1 N° Lexbase : L8720IZY du Code de la consommation, l’erreur sur le point de départ du délai de rétractation n’étant pas sanctionnée par la nullité mais permet la prolongation de douze mois du délai de rétractation (3ème branche). Enfin, la nullité serait couverte par les actes d’exécution volontaire du contrat poursuivie en toute connaissance de cause par les acheteurs (4ème branche).

Solution. La Cour de cassation rejette le pourvoi en tous points. Elle fait d’abord une application combinée des articles L. 111-1, L. 121-17 et L. 121-18-1 du Code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, pour rappeler qu'un contrat de vente ou de fourniture de services conclu hors établissement doit, à peine de nullité, indiquer, de manière lisible et compréhensible, les caractéristiques essentielles du bien ou du service. En l’espèce, en l'absence d’ information portant sur le résultat attendu de l'utilisation de cet équipement (la production d’électricité de l’installation), constituant une caractéristique essentielle, la vente devait être annulée pour manquement à l’exigence de compréhensibilité. Deux enseignements s’en dégagent. D’abord, la Cour opère une interprétation de la notion de « caractéristique essentielle », non définie par l’article L. 111-1, en se référant à l’article L. 121-2, 2° N° Lexbase : L1242MAA relatif aux pratiques commerciales trompeuses, qui mentionne les « résultats attendus de l’exploitation » au titre des caractéristiques essentielles. Ensuite, elle retient qu’est une caractéristique essentielle la performance ou le rendement et non la rentabilité (v. par ex. Cass. civ. 1, 21 octobre 2020, n° 18-26.761 N° Lexbase : A85783YD). Par conséquent, et enfin, celle-ci étant par nature une caractéristique essentielle, il est inutile de rechercher si elle est entrée dans le champ contractuel.

Elle énonce ensuite qu’en application de l’article L. 121-18-1 du Code de la consommation, les informations relatives aux caractéristiques essentielles du bien ou du service, qui sont au nombre de celles que visent ces dispositions, ne peuvent figurer sur des documents annexes qui ne sont pas signés de toutes les parties. L’insuffisance des mentions du contrat ne pouvait donc être suppléée par des documents dont les acquéreurs avaient été destinataires.

Elle poursuit en confirmant qu’il résulte de la combinaison des articles L. 121-17, I, 2°, L. 121-18-1 et L. 121-21-1 du Code de la consommation, que, lorsque contrairement aux exigences du premier de ces textes, les informations relatives à l’exercice du droit de rétractation ne figurent pas dans un contrat conclu hors établissement ou sont erronées, la prolongation du délai de rétractation, prévue par le troisième, n’est pas exclusive du droit pour le consommateur de demander l’annulation du contrat en vertu du deuxième. La Cour de cassation s’était déjà prononcée en ce sens en laissant le choix de la sanction aux consommateurs (Cass. civ. 1, 31 août 2022, n° 21-10.075 N° Lexbase : A62038GT).

Enfin, lorsque le bon de commande ne mentionne pas l'article L. 121-18-1 alinéa 1er du Code de la consommation, qui prévoit la nullité du contrat en cas de manquement aux obligations d'information, les actes accomplis par les acquéreurs antérieurement aux lettres de mises en demeure, dans l'ignorance de la sanction attachée aux dispositions que citait le contrat, ne peuvent couvrir les vices qui l'affectent. Dès lors que l’acquéreur a été placé dans l’impossibilité de connaitre le vice, les actes d’exécution ne traduisent pas la confirmation tacite d’une nullité dont ils ignoraient pouvoir se prévaloir.

newsid:487937

Contrat de travail

[Brèves] Proposition de CDI à l’issue d’un CDD/intérim : nouvelle procédure applicable à compter du 1er janvier 2024

Réf. : Décret n° 2023-1307, du 28 décembre 2023, relatif au refus par un salarié d'une proposition de contrat de travail à durée indéterminée à l'issue d'un contrat de travail à durée déterminée N° Lexbase : L9097MK7

Lecture: 3 min

N7856BZY

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par Lisa Poinsot

Le 10 Janvier 2024

Publié au Journal officiel du 29 décembre 2023, le décret n° 2023-1307, pris en application de la loi du 21 décembre 2022 dite « Marché du travail » N° Lexbase : L1959MGN, prévoit une nouvelle procédure applicable dans le cadre des propositions de CDI à la suite de CDD ou mission d’intérim afin de mettre en œuvre la suppression des allocations d’assurance chômage lorsqu’un salarié refuse deux propositions de CDI visant le même emploi ou un emploi similaire.

Étape 1 

la proposition de l’employeur ou l’entreprise utilisatrice

Nature de la proposition

Après un CDD. La proposition de CDI faite par l’employeur doit respecter certaines conditions prévues à l’article L. 1243-11-1 du Code du travail N° Lexbase : L6943MKD : emploi identique ou similaire assorti d’une rémunération au moins équivalente pour une durée de travail équivalente relevant de la même classification et sans changement de lieu de travail.

 

Après une mission d’intérim. La proposition de CDI faite par l’entreprise utilisatrice doit respecter certaines conditions prévues à l’article L. 1251-33-1 du Code du travail N° Lexbase : L6944MKE : emploi identique ou équivalent, sans changement de lieu de travail.

Forme de la proposition

La proposition doit être faite par écrit soit :

  • par lettre recommandée avec accusé de réception ;
  • par lettre remise en main propre contre décharge ;
  • par tout autre moyen donnant une date certaine à sa réception.

Date de la proposition

La proposition doit être notifiée au salarié avant le terme du CDD ou du contrat de mission

Étape 2 

la réponse du salarié

Délai de réflexion

La proposition doit préciser le délai laissé au salarié pour se prononcer sur la proposition de CDI. Ce délai doit être raisonnable.

Refus du salarié

Le refus peut être exprès dans le délai laissé ou tacite à l’expiration du délai fixé.

Étape 3

l’information de France Travail en cas de refus de la proposition par le salarié

Délai d’information

L’employeur et l’entreprise utilisatrice ont 1 mois pour informer France Travail du refus exprès ou tacite du salarié de la proposition de CDI

Forme de l’information

L’information se fait par voie dématérialisée selon les modalités fixées par arrêté.

Contenu de l’information

L’information doit être accompagnée :

  • d’un descriptif de l’emploi proposé et des éléments permettant de justifier que l’emploi proposé et les conditions de travail sont identiques ou similaires ;
  • de la mention du délai laissé au salarié pour se prononcer sur la proposition de CDI, de la date de refus exprès du salarié, ou en cas d’absence de réponse, de la date d’expiration du délai prévu au terme duquel le refus du salarié est réputé acquis.

Délai de réponse

À réception des informations complètes. L'opérateur France Travail informe le salarié de cette réception et des conséquences du refus de CDI sur l'ouverture de droit à l'allocation d'assurance chômage.

 

⚠️ À noter. S'il est constaté que le salarié a refusé à 2 reprises, au cours des 12 mois précédents, une proposition de CDI, il perd le bénéfice de l’allocation d’assurance chômage (C. trav., art. L. 5422-1 N° Lexbase : L2125MGS).

 

Si les informations sont incomplètes, France Travail adresse une demande d’éléments complémentaires à l’employeur qui a 15 jours à compter de cette demande pour y répondre.

 

Pour aller plus loin :

 

newsid:487856

Conventions et accords collectifs

[Veille] Branches professionnelles du personnel des cabinets d’avocats et des avocats salariés (janvier-décembre 2023)

Réf. : Convention collective nationale du personnel des cabinets d’avocats (IDCC 1000) ; Convention collective nationale des avocats salariés (IDCC 1850) N° Lexbase : X8195AP9

Lecture: 4 min

N7858BZ3

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par Lisa Poinsot, Rédactrice en droit social

Le 11 Janvier 2024

La revue Lexbase Social vous propose de faire le point sur les actualités impactant la Convention collective nationale du personnel des cabinets d'avocats et celle des avocats salariés durant l'année 2023.


I. Jurisprudence

Convention de forfait • heures supplémentaires • rémunération (Cass. soc., 12 janvier 2022, n° 15-24.989, F-D N° Lexbase : A52737I7)

La seule fixation d'une rémunération forfaitaire, sans que ne soit déterminé le nombre d'heures supplémentaires inclus dans cette rémunération, ne permet pas de caractériser une convention de forfait.

Pour aller plus loin :

  • sur cette décision, lire  L. Poinsot, Avocat collaborateur salarié : pas de convention de forfait de salaire sans fixation du nombre d’heures supplémentaires, Lexbase Social, janvier 2022, n° 891 N° Lexbase : N0115BZB ;
  • v. également Cass. soc., 14 décembre 2016, n° 15-22.144, F-D N° Lexbase : A2087SXL et Cass. soc. 15 décembre 2021, n° 15-24.990, FS-B N° Lexbase : A17487GT, M. Le Guerroué, Avocat - salarié : attention il faut préciser le nombre d'heures supplémentaires inclus dans la rémunération forfaitaire !, Lexbase Avocats, janvier 2022 N° Lexbase : N9847BYD ;
  • lire aussi M. Le Guerroué, Veille Avocat - Toute l'actualité de la profession (décembre 2021), Lexbase Avocats, janvier 2022 N° Lexbase : N9976BY7.

    II. Textes

    A. Arrêtés

    (Néant)

    B. Avenants

    Avenant n° 27 du 14 octobre 2022, relatif aux salaires minima des avocats salariés

    • publié au Bulletin officiel des conventions collectives n° 2022/0046 du 10 janvier 2023

    Les partenaires sociaux ont décidé de fixer comme suit les salaires minima annuels des avocats salariés, sur la base d’une augmentation de 4 %.

    • arrêté du 26 décembre 2022 portant extension d’un avenant à la Convention collective nationale des avocats salariés (n° 1850) N° Lexbase : L3061MGH

    Publié au Journal officiel du 29 décembre 2023, l’arrêté du 26 décembre 2022 rend obligatoire pour tous les employeurs et tous les salariés compris dans le champ d'application de la Convention collective nationale des avocats salariés du 17 février 1995, tel que modifié par l'accord du 26 juillet 2019 étendu susvisé, et dans leur propre champ d'application professionnel, les stipulations de l'avenant n° 27 du 14 octobre 2022, relatif aux salaires minima des avocats salariés, à la Convention collective nationale des avocats salariés susvisée.

    Avenant n° 133 du 14 octobre 2022, relatif aux salaires minima du personnel salariés non-avocats

    • avenant publié au Bulletin officiel des conventions collectives n° 2022/0046 du 10 janvier 2023

    Les signataires du présent avenant décident d’appliquer, à compter du 1er janvier 2023, une augmentation de 4 % des salaires minima.

    • arrêté du 26 décembre 2022 portant extension d’un avenant à la convention collective nationale du personnel des cabinets d’avocat (n° 1000) N° Lexbase : L2723MGX

    Publié au Journal officiel du 28 décembre 2023, l’arrêté du 26 décembre 2022 rend obligatoire pour tous les employeurs et tous les salariés compris dans le champ d'application de la convention collective nationale du personnel des cabinets d'avocats, tel que modifié par l'accord du 26 juillet 2019 susvisé portant fusion des champs conventionnels, et dans leur propre champ d'application professionnel, les stipulations de l'avenant n° 133 du 14 octobre 2022, relatif aux salaires minima du personnel salarié non-avocats, à la convention collective susvisée.

    C. Accords

    Accord du 14 avril 2023 relatif au financement du paritarisme

    • accord publié au Bulletin officiel des conventions collectives n° 2023/0023 du 19 juillet 2023

    Afin de permettre et de promouvoir le dialogue social dans la branche professionnelle, les partenaires sociaux tant pour la Convention collective nationale des avocats salariés que pour le personnel non-avocat relevant de la branche professionnelle des cabinets d’avocats ont mis en place un financement consistant en un taux de cotisation assis sur la masse salariale brute des personnels concernés.

    • arrêté du 30 novembre 2023 portant extension d’un accord conclu dans le cadre de la convention collective nationale du personnel des cabinets d'avocats (n° 1000) et de la convention collective nationale des avocats salariés (n° 1850) N° Lexbase : L5318MK8

    Publié au 9 décembre 2023, l’arrêté du 30 novembre 2023 rend obligatoire pour tous les employeurs et tous les salariés compris dans le champ d'application de la Convention collective nationale du personnel des cabinets d'avocats et dans celui de la convention collective nationale des avocats salariés, les stipulations de l'accord du 14 avril 2023 relatif au financement du paritarisme, conclu dans le cadre des conventions collectives nationales susvisées.

    newsid:487858

    Entreprises en difficulté

    [Brèves] Inopposabilité de l'insaisissabilité de la résidence principale et clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif

    Réf. : Cass. com., 13 décembre 2023, n° 22-19.749, FS-B+R N° Lexbase : A550318C

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    N7790BZK

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    par Vincent Téchené

    Le 10 Janvier 2024

    ► Le créancier auquel l'insaisissabilité de plein droit de la résidence principale est inopposable peut, même après clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, exercer son droit de poursuite sur l'immeuble, qui n'était pas entré dans le gage commun des créanciers de la liquidation judiciaire.

    Faits et procédure. Les 27 mai et 22 juillet 2016, un entrepreneur a été mis en redressement puis liquidation judiciaires, la procédure ayant été étendue à son épouse le 16 septembre suivant. La liquidation a été clôturée pour insuffisance d'actif par un jugement du 3 avril 2018.

    Une banque, qui avait précédemment déclaré une créance représentant le solde d'un prêt consenti en 2001 au couple pour l'acquisition de leur résidence principale, a signifié le 7 janvier 2021 un commandement de payer valant saisie immobilière du bien. Le 21 avril suivant, elle les a assignés à l'audience d'orientation du juge de l'exécution. Ces derniers ont soulevé l'irrecevabilité de la demande.

    Arrêt d’appel. La cour d’appel de Rennes (CA Rennes, 8 juin 2022, n° 22/00454 N° Lexbase : A025777N) a déclaré l’action de la banque irrecevable et a prononcé la nullité des actes de la procédure de saisie immobilière. En effet, pour les magistrats rennais, l'action de la banque n'entrait dans aucune des exceptions prévues à l'article L. 643-11 du Code de commerce N° Lexbase : L2737MGH, au principe de non-recouvrement par les créanciers de l'exercice individuel de leurs actions après la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de leur débiteur. Dès lors, la banque n'était plus en droit de saisir l'immeuble.

    La banque a donc formé un pourvoi en cassation.

    Décision. La Cour de cassation censure l’arrêt d’appel au visa des articles L. 526-1 N° Lexbase : L9698L7C et L. 643-11 du Code de commerce. Elle énonce que le créancier auquel l'insaisissabilité de plein droit de la résidence principale est inopposable peut, même après clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, sans que l’article L. 643-11 du Code de commerce y fasse obstacle, exercer son droit de poursuite sur l'immeuble, qui n'était pas entré dans le gage commun des créanciers de la liquidation judiciaire.

    Observations. Concernant la déclaration d’insaisissabilité, la Cour de cassation avait déjà jugé que « si l'article L. 643-11, I, 2 , du Code de commerce, dont la banque (à laquelle l’insaisissabilité n’était pas opposable) revendique exclusivement l'application, autorise un créancier, dont les opérations de la liquidation judiciaire de son débiteur n'ont pas, en raison de l'insuffisance d'actif, permis de régler la créance, à recouvrer l'exercice individuel de son action contre lui, c'est à la condition que la créance porte sur des droits attachés à la personne du créancier ; qu'ayant exactement énoncé que n'entre pas dans cette catégorie le droit d'un créancier de saisir un immeuble objet d'une déclaration d'insaisissabilité qui lui est inopposable » (Cass. com., 13 décembre 2017, n° 15-28.357, F-P+B N° Lexbase : A1267W8G).

    Mais, comme un auteur a pu le relever (P.-M. Le Corre, Droit et pratiques des procédures collectives, Dalloz Action, 2023-2024, n° 592-156), en fait la possibilité de poursuivre la vente du bien après clôture pour insuffisance d’actif par le créancier auquel l'insaisissabilité n’est pas opposable ne se pose pas. En effet, n’ayant jamais perdu le droit de poursuites concernant l’immeuble, il n’a pas à se faire autoriser pour les reprendre, ces droits subsistant après la clôture pour insuffisance d’actif. C’est bien en ce sens que statue la Cour dans l’arrêt rapporté.  

    Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La réalisation des actifs, L'insaisissabilité légale de la résidence principale du débiteur personne physique, in Entreprises en difficulté, (dir. P.-M. Le Corre), Lexbase N° Lexbase : E5684E7N.

    newsid:487790

    Fiscalité du patrimoine

    [Jurisprudence] L’absence d’exercice effectif de la fonction de direction source d’exclusion du régime d’abattement des plus-values pour départ à la retraite

    Réf. : CE 3° et 8° ch.-r., 25 octobre 2023, n° 470394, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A62011PD

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    N7866BZD

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    par Jérôme Mazeres, Fiscaliste - Diplômé en gestion de patrimoine, Les fourmis du patrimoine

    Le 10 Janvier 2024

    Mots-clés : plus-value • départ retraite • dirigeants • cession de titres • abattement

    1.- En cas de cession de titres pour départ à la retraite, la plus-value privée générée est susceptible de bénéficier, actuellement, d’un abattement fixe de 500 000 euros.

    L’application de ce régime est soumise à plusieurs conditions cumulatives (CGI, art. 150-0 D ter N° Lexbase : L9350LHR).

    On rappellera, que le régime dans sa forme actuelle, vise les cessions effectuées entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2024.

    Il s’applique aussi bien dans la situation où le cessionnaire opte pour l’application du barème progressif, que dans le cas où il est soumis au PFU.


     

    2.- Parmi les conditions à remplir, certaines concernent le cédant, d’autres les titres de la société et enfin certaines concernent le cédant.

    Au niveau du cédant, celui-ci doit notamment avoir exercé les fonctions de gérant d’une SARL ou d’une société en commandite par actions, d’associé en nom d’une société de personnes, de président, directeur général délégué, président du conseil de surveillance ou membre du directoire d’une société par actions.

    Il doit également avoir détenu au moins 25 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société directement ou par l’intermédiaire d’une société interposée.

    Ces conditions doivent être remplies pendant les cinq années précédant la cession.

    Il doit cesser ses fonctions et faire valoir ses droits à la retraite dans les deux années suivant ou précédant la cession.

    Il ne doit pas détenir de la date de la cession et durant les trois années suivantes, de droit dans la société.

    3.- La condition liée à l’exercice effectif de la fonction de direction est importante, de même que celle liée à la rémunération normale, celles-ci ayant donné lieu à un arrêt récent du Conseil d’État.

    4.- Dans cette affaire, une personne physique a cédé l’intégralité des parts qu’elle détenait dans une SAS en juillet 2014, qui avait auparavant le statut de SARL, et dont il était le gérant. Il a fait application de l’article 150-0 D ter du Code général des impôts (départ à la retraite) dans son ancienne configuration qui permettait de bénéficier, outre l’abattement fixe de 500 000 euros, d’un abattement proportionnel renforcé pouvant aller jusqu’à 85 %.

    L’administration fiscale a remis en cause ces deux abattements. Le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande en décharge des suppléments d’impôts formulée par cette personne physique. La cour administrative d’appel de Paris a confirmé le jugement et ainsi le redressement.

    5.- C’est ainsi que l’affaire arrive devant le Conseil d’État suite au pourvoi de cette personne physique.

    Dans cette affaire, notre contribuable avait perçu 7 000 euros de rémunération en 2012, 14 000 euros en 2013 et rien en 2014.

    D’autre part, la société dont les titres ont été cédés avait délégué à deux autres sociétés les activités de : recherche, gestion des paiements, d’entretien et de maintenance et de recrutement du personnel, du développement commercial en garantissant un résultat brut d’exploitation.

    Le Conseil d’État a ainsi déduit que d’une part, les fonctions de direction n’étaient pas exercées par l’associé cédant, et que d’autre part la rémunération n’était pas normale.

    6.- Ces deux points, s’ils ne sont pas nouveaux, demeurent intéressants sur les éventuelles conséquences qu’ils peuvent avoir sur d’autres dispositifs, et notamment en faisant le lien avec les problématiques entourant les conventions de management fees.

    Sur le terrain de la rémunération, le Conseil d’État se réfugie derrière le pouvoir souverain des juridictions du fond.

    7.- Dans cette affaire, la CAA de Paris avait considéré que « la circonstance que l'administration n'a pas apporté d'éléments relatifs à des niveaux de rémunération de gérant dans des sociétés comparables est sans incidence sur le bien-fondé du redressement en litige » (CAA Paris, 10 novembre 2022, n° 21PA02884 N° Lexbase : A41358SX).

    La position de la CAA de Paris ne surprendra pas dans la mesure où d’autres juridictions du fond ont pu avoir une position similaire.

    On pense notamment à un arrêt rendu par la cour administrative d’appel de Bordeaux en date du 14 mars 2023 (CAA Bordeaux, 14 mars 2023, n° 21BX01166 N° Lexbase : A74219HC).

    Dans cette affaire, la juridiction du fond avait relevé qu’un dirigeant avait perçu en 2012 une rémunération de 17 650 euros et qu’il n’a pas déclaré d’autres rémunérations au cours des 5 années précédant la cession, en contrepartie de l’exercice de ses fonctions de direction. Le contribuable tentait vainement d’invoquer le versement de dividendes, devant être pris en compte. Là encore, la juridiction du fond écarte l’argument en expliquant clairement que les sommes sont versées en raison de la qualité d’associés et non en qualité de dirigeant. Peu importe d’ailleurs que ces dividendes soient soumis à cotisation sociale comme l’indique la cour administrative d’appel. On peut néanmoins regretter l’absence de précisions concernant la méthodologie à employer afin d’apprécier le caractère normal de la rémunération.

    D’autres juridictions et notamment la cour d’appel de Douai ont pu préciser la méthode (CA de Douai, 20 octobre 2003 n° 02-439). On rappellera également qu’en matière d’IFI, pour l’appréciation du caractère normal de la rémunération, la doctrine administrative précise : « L’administration doit ensuite comparer la rémunération des dites fonctions avec celle des autres dirigeants - statutaires ou salariés - de l’entreprise afin de déterminer si la rémunération perçue est en adéquation avec l’importance des fonctions effectivement exercées » (BOI-PAT-IFI-30-10-30-10, n° 240 N° Lexbase : X1262AUB).

    La position du Conseil d’État est gênante, dans la mesure où certes, celui-ci se réfugie derrière la souveraineté de la juridiction du fond, cependant cela le sentiment qu’en tant que tel, une faible rémunération peut constituer une anormalité.

    8.- Concernant la délégation des fonctions de direction, la doctrine administrative précise : « Les fonctions de direction doivent être effectivement et personnellement exercées par le cédant.
    Ainsi, il doit consacrer à ses fonctions une activité et des diligences constantes et réelles (par exemple, dans les sociétés : animation effective de l'activité des directeurs fonctionnels salariés, signature des actes et documents essentiels, contacts suivis avec les représentants du personnel, les principaux clients ou fournisseurs, etc.) » (BOI-RPPM-PVBMI-20-40-10-40, n° 50 N° Lexbase : X0306CKK).

    La délégation des fonctions de direction pose ainsi des difficultés évidentes.

    La CAA de Paris avait validé le redressement notamment au motif qu’« il ne résulte pas de l'instruction que cette activité, qui ne s'étend pas à la conduite et à la réalisation de l'activité courante de la résidence, puissent être assimilées à l'exercice normal des fonctions de gérant ».

    Ici, force est de constater que le dirigeant avait beaucoup délégué.

    9.- La question de l’exercice d’une fonction de direction par un tiers peut permettre de faire le parallèle avec les jurisprudences récentes en matière de convention de management fees, tant sur le plan juridique, que fiscale.

    D’un point de vue juridique, la chambre commerciale a eu l’occasion d’indiquer que le risque de « doublon » entre la fonction de direction et la convention est susceptible d’entraîner la nullité de cette dernière (Cass. com., 14 septembre 2010, n° 09-16.084, F-D N° Lexbase : A5818E9D).

    D’un point de vue fiscale, sans pour autant considérer qu’il n’y avait pas d’acte anormal de gestion, le Conseil d’État a pu apporter quelques précisions (CE 9° et 10° ch.-r., 4 octobre 2023, n° 466887, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A20851KG)  :

    • la conclusion d’une convention de management fees avec une autre société, portant sur la réalisation de missions relevant des fonctions inhérentes à son dirigeant, assurées par celui-ci, peut sous conditions, ne pas relever d’un acte anormal de gestion ;
    • l'absence de versement, par une société, d'une rémunération à son dirigeant au cours d'un exercice ne constitue pas une décision de gestion faisant obstacle à la rémunération de celui-ci par l’intermédiaire d’une autre société.

    10.- Pourrait-on éventuellement transposer un tel type de raisonnement aux plus-values, et au régime des biens professionnels ?

    11.- Il convient également de relever, même s’il ne s’agit pas de la rédaction de l’article 787 B du Code général des impôts N° Lexbase : L8080MHQ, qui se contente d’opérer un renvoi aux fonctions énumérées au 1° du 1 du III de l'article 975 N° Lexbase : L9125LHG, l’administration fiscale précise : « Le titulaire doit consacrer à ses fonctions une activité et des diligences constantes et réelles (par exemple, animation effective de l'activité des directeurs fonctionnels salariés, signature des pièces essentielles, contacts suivis avec les représentants du personnel, les principaux clients ou fournisseurs, etc.) (ENR-DMTG-10-20-40-10, n° 290 N° Lexbase : X6754ALQ).

    Remarque : Il est précisé que l'article 787 B du CGI n’impose pas de condition tenant à la rémunération perçue par le dirigeant ou au caractère principal de son activité dans la société ».

    12.- Reste ainsi à voir qu’elle pourrait être l’impact dans ces différentes situations de cette position du Conseil d’État, au risque de complexifier un peu plus certaines opérations de restructuration, et les choix quant au mode et « au lieu » de rémunération du dirigeant.

    newsid:487866

    Marchés publics

    [Brèves] Publication du décret fixant le seuil d’application des offres variables dans les procédures de marchés passés par les entités adjudicatrices

    Réf. : Décret n° 2023-1292, du 27 décembre 2023, fixant le seuil d’application des offres variables dans les procédures de marchés passés par les entités adjudicatrices N° Lexbase : L9087MKR

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    N7880BZU

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    par Yann Le Foll

    Le 10 Janvier 2024

    ► Le décret n° 2023-1292, du 27 décembre 2023, fixant le seuil d’application des offres variables dans les procédures de marchés passés par les entités adjudicatrices, a été publié au Journal officiel du 29 décembre 2023.

    Ce décret est pris en application de l’article 28 de la loi n° 2023-973, du 23 octobre 2023, relative à l’industrie verte N° Lexbase : L9331MIG, qui a introduit une dérogation au principe d’interdiction des offres variables en modifiant respectivement les articles L. 2151-1 N° Lexbase : L9500MIP et L. 2152-7 N° Lexbase : L9501MIQ du Code de la commande publique.

    Dans leur nouvelle rédaction, ces dispositions permettent aux entités adjudicatrices, pour leurs marchés d’un montant égal ou supérieur à un seuil de 10 millions d’euros HT, d’autoriser les opérateurs économiques à présenter des offres variables selon le nombre de lots susceptibles d’être obtenus, permettant ainsi aux entités adjudicatrices de procéder à une appréciation globale des offres et non lot par lot.

    Le seuil de 10 millions d’euros HT, fixé par le présent décret après consultation des parties prenantes, constitue un point d’équilibre entre effectivité de la mesure et protection des TPE/PME candidatant à la commande publique.

    Le dispositif devrait améliorer l’efficacité de la commande publique et l’utilisation des deniers publics par une meilleure prise en compte des économies d’échelle réalisées par les entreprises titulaires de plusieurs lots (communiqué Daj).

    newsid:487880

    Procédure

    [Brèves] Recevabilité d’une preuve déloyale : l’Assemblée plénière opère un revirement de jurisprudence !

    Réf. : Ass. plén., 22 décembre 2023, n° 20-20.648, B+R N° Lexbase : A27172AU

    Lecture: 2 min

    N7850BZR

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    par Charlotte Moronval

    Le 27 Janvier 2024

    ► Des moyens de preuve déloyaux peuvent être présentés au juge dès lors qu’ils sont indispensables à l’exercice des droits du justiciable. Toutefois, la prise en compte de ces preuves ne doit pas porter une atteinte disproportionnée aux droits fondamentaux de la partie adverse (vie privée, égalité des armes, etc.)

    Faits et procédure. Un salarié saisit la justice afin de contester son licenciement pour faute grave.

    Pour apporter la preuve de cette faute, l’employeur soumet au juge l’enregistrement sonore capturé au cours d’un entretien informel, au cours duquel le salarié a tenu des propos ayant conduit à sa mise à pied.

    Cet enregistrement avait été réalisé à l’insu de l’employé.

    La cour d’appel (CA Orléans, 28 juillet 2020, n° 18/00226 N° Lexbase : A97963RA) déclare cette preuve irrecevable, car l’enregistrement avait été réalisé de façon clandestine.

    Aucune autre preuve ne permettant de démontrer la faute commise par le salarié, la cour d’appel a jugé que ce licenciement était sans cause réelle et sérieuse.

    L’employeur forme un pourvoi en cassation.

    La solution. Énonçant le principe susvisé, l’Assemblée plénière de la Cour de cassation casse et annule l’arrêt rendu par la cour d’appel.

    Cette solution constitue un revirement de jurisprudence et s’inspire de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme.

    La Cour de cassation répond à la nécessité de ne pas priver un justiciable de la possibilité de faire la preuve de ses droits, lorsque la seule preuve disponible pour lui suppose, pour son obtention, une atteinte aux droits de la partie adverse.

    La décision de la cour d’appel, qui avait écarté les enregistrements clandestins au motif qu’ils avaient été obtenus de manière déloyale, est donc censurée.

    L’affaire est renvoyée devant une autre cour d’appel. Celle-ci devra vérifier, d’une part, que les enregistrements étaient indispensables pour prouver la faute grave du salarié, d’autre part, que l’utilisation de ces enregistrements réalisés à l’insu du salarié ne portent pas une atteinte disproportionnée à ses droits fondamentaux. 

    Pour aller plus loin : 

    • lire le communiqué de presse de la Cour de cassation ;
    • lire F. Guinebretière, La preuve illicite dans le cadre du contentieux prud’homal, Lexbase Social, octobre 2023, n° 962 N° Lexbase : N7200BZP ;
    • lire aussi Dossier spécial « La preuve en droit du travail : évolutions et nouveautés », Lexbase Social, mai 2023, n° 945 N° Lexbase : N5361BZL ;
    • v. ÉTUDE : L’instance prud’homale, L’administration de la preuve lors d’un procès prud’homal, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E6441ZKR ;
    • v. également ÉTUDE : La cause réelle et sérieuse de licenciement pour motif personnel, Les modes de preuve de la cause réelle et sérieuse, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E0803ZN3.

    newsid:487850

    Procédure civile

    [Le point sur...] Réforme de la procédure d’appel : vous vouliez de la simplification ? vous aurez de la lisibilité

    Réf. : Décret n° 2023-1391 du 29 décembre 2023 portant simplification de la procédure d'appel en matière civile N° Lexbase : L9662MK3

    Lecture: 43 min

    N7909BZX

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    par Christophe Lhermitte, Avocat Associé, Barreau de Rennes, spécialiste en procédure d’appel

    Le 26 Avril 2024

    Mots-clés : avocats • réforme • appel • procédure d’appel • procédure civile • conseiller de la mise en état • procédure avec mise en état • bref délai

    La dernière réforme de la procédure d’appel remontait à 2017, pour achever celle engagée en 2009, avec le décret du 9 décembre 2009. La réforme de décembre 2023 ne s’inscrit dans la lignée de ces deux décrets, et ne mériterait pas pour ce motif d’être appelée " Magendie 3 ".
    Pour autant, si elle ne révolutionne pas la procédure en appel, elle restera comme une réforme qui compte, notamment parce qu’elle réorganise les textes d’une manière efficace et opportune.

    Néanmoins, il ne faut pas s’attendre à une simplification, au contraire.


     

    Le 31 décembre 2023, est paru au journal officiel le décret n° 2023-1391 du 29 décembre 2023 portant simplification de la procédure d'appel en matière civile.

    Entre le projet qui a circulé en juin 2023, et le texte qui finalement deviendra le décret du 29 décembre 2023, des améliorations ont été apportées.

    Mais bien entendu, et c’était tout de même couru d’avance, et fort logique, les contestations du Conseil national des barreaux (CNB) n’ont pas été entendues. Et c’est heureux !

    Si le décret est présenté comme une « simplification de la procédure d’appel en matière civile », force est de constater que le titre est trompeur. Mais c’est dans l’air du temps de présenter les réformes comme des simplifications, peut-être pour mieux les faire accepter par une profession hostile à la réforme et incapable d’être une véritable force de proposition constructive en la matière.

    Assurément, la procédure d’appel ne deviendra pas plus simple le 1er septembre 2024, date à laquelle entrera en vigueur cette « nouvelle » procédure d’appel.

    Mais si le décret ne se distingue pas par sa simplification – mais « La procédure d’appel peut-elle être simple ?  Vous avez trois heures… » – il parvient à rendre la procédure d’appel plus lisible. Et sur ce point, c’est indéniablement une avancée majeure, qu’il faut saluer.

    C’est donc une réforme majeure… mais qui n’aura pas pour conséquence une diminution des déclarations de sinistre.

    Le temps est venu de passer à la phase dissection des nouveaux textes, pour voir ce qui nous attend à partir du 1er septembre 2024.

    I. La déclaration d’appel

    A. L’objet de l’appel

    L’article 901 du Code de procédure civile N° Lexbase : L5914MBN se suffit à lui seul.

    Exit les renvois à des articles bien souvent inadaptés, comme le curieux « objet de la demande » de l’article 54 du code précité N° Lexbase : L8645LYT.

    Si cet « objet » ne disparaît pas, il est opportunément remplacé par un « objet de l’appel en ce qu’il tend à l’infirmation ou à l’annulation du jugement » du 6° de l’article 901 du Code de procédure civile. On ne pouvait être plus clair.

    Mais prudence ! Jusqu’alors, l’objet de la demande de l’article 54 2° semblait se confondre avec les chefs critiqués de l’article 901 4° du code précité. Et la Cour de cassation, dans une souplesse discutable, ne paraissait pas dire autre chose (Cass. civ. 2, 14 septembre 2023, n° 20-18.169, F-B N° Lexbase : A57261G8).

    Avec ce nouveau texte, la déclaration d’appel devra préciser quel est l’objet de l’appel, à savoir si c’est un appel qui tend à l’infirmation ou à l’annulation. Cette disposition est à peine de nullité.

    Bien entendu, s’agissant d’une nullité, elle sera de forme, ce qui suppose de justifier d’un grief. Et ce grief sera bien souvent impossible à démontrer.

    Rappelons par ailleurs qu’un appel pourra aussi avoir pour objet la nullité du jugement (nullité qui n’est pas l’annulation), ce qui sera le cas lorsque l’appel est envisagé comme recours nullité, parce que la voie de l’appel est fermée et qu’il est reproché au premier juge un excès de pouvoir. Dans ce cas, l’appelant devra-t-il le préciser ? Nous le pensons, ne serait-ce que pour justifier cet appel pourtant fermé et donc a priori irrecevable.

    L’objet de l’appel devra aussi être distingué de « l’objet de la déclaration d’appel ». Si l’acte d’appel a pour objet, non d’introduire une instance d’appel, mais de corriger un précédent acte, cela devra être précisé, faute de quoi l’acte pourrait être regardé comme un acte introductif d’instance, ce qui peut alors poser difficulté en termes de recevabilité au motif que « appel sur appel ne vaut » (Cass. civ. 2, 30 septembre 2021, n° 19-24.580, F-B N° Lexbase : A0504488).

    La question qui peut se poser, avec cette nouvelle rédaction, serait de savoir si l’absence d’objet dans la déclaration d’appel, ou un objet erroné, peut avoir d’autres conséquences qu’une éventuelle et improbable nullité ?

    A priori, au regard de la jurisprudence récente de la Cour de cassation, qui s’illustre par la souplesse voire l’indulgence, nous ne le pensons pas.

    La réforme ne semble pas être motivée, sur ce point, par une volonté de battre en brèche cette souplesse, et de rendre plus exigeante la saisine effective de la cour d’appel.

    Mais nonobstant l’arrêt du 14 septembre 2023 précité, certaines questions méritent d’être posées : la déclaration d’appel qui omet de préciser l’objet de l’appel opère-t-elle dévolution ? l’appelant peut-il former une demande d’infirmation ou d’annulation dans ses conclusions alors que cet objet n’est pas précisé dans l’acte d’appel ? l’appelant peut-il conclure à l’annulation s’il a seulement indiqué la réformation comme objet de l’appel, et réciproquement ?

    En définitive, la question est celle de savoir si cette mention exigée, et qu’il est aisée d’indiquer dans l’acte d’appel, est purement indicative, voire décorative, ou si elle sert à quelque chose.

    Au stade jurisprudentiel actuel, force est de constater que cet objet, introduit en 2005 (Décret n° 2005-1678 du 28 décembre 2005 relatif à la procédure civile, à certaines procédures d'exécution et à la procédure de changement de nom N° Lexbase : L3298HEU), ne sert strictement à rien, de sorte qu’il eut été opportun d’en supprimer l’exigence.

    B. La notification de la déclaration d’appel

    1) Le 902 : un couac ?

    Le problème avec l’article 902 du Code de procédure civile N° Lexbase : L7237LER est qu’il est mal placé dans le code.

    L’article 902 aurait dû conserver son seul alinéa 1er concernant l’envoi de la déclaration d’appel par le greffe, mais sans renvoi à l’article 906 du Code de procédure civile N° Lexbase : L7238LES.

    Les autres alinéas, du deuxième aux cinquième, auraient dû faire l’objet d’un article qui aurait pu trouver une meilleure place après l’article 907 du Code de procédure civile N° Lexbase : L3973LUP.

    En effet, ces dispositions concernent exclusivement la procédure avec mise en état, et devaient donc apparaître sous le paragraphe 4 relatif à « la procédure avec mise en état ».

    D’autre part, le renvoi à l’article 906 du même code laisse entendre que le greffier adresse la déclaration d’appel à chacun des intimés, par lettre simple, avec indication de l’obligation de constituer avocat, uniquement en procédure avec mise en état.

    En bref délai, le greffe n’adresse donc pas la déclaration d’appel.

    Bien sûr, l’intimé recevra nécessairement la déclaration d’appel, puisque l’appelant devra la lui signifier s’il est défaillant.

    Mais il est tout de même préférable que l’intimé soit informé de cette procédure d’appel dès sa formation, ce qui laisse le temps de constituer avocat immédiatement.

    C’est un loupé !

    Cependant, en pratique, nous ne pensons pas que ce qui peut être vu comme une erreur de rédaction sera préjudiciable puisque, vraisemblablement, les greffes maintiendront l’habitude qui est la leur d’adresser de manière systématique la déclaration d’appel aux intimés, quand bien même la procédure est à bref délai.

    Mais une rectification sera la bienvenue.

    2) La citation en appel

    Dans sa substance, l’article 902 du Code de procédure civile est inchangé, si ce n’est désormais le renvoi au nouvel article 906, a priori anodin mais qui ne l’est pas tant que cela.

    Nous pouvons éventuellement regretter que n’est toujours pas prévue une obligation de signification de la déclaration d’appel à l’intimé défaillant.

    L’article 14 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1131H4N prévoit que « Nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée ». Et en appel, depuis que l’assignation a disparu, avec la réforme du 9 décembre 2009 (décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009 relatif à la procédure d'appel avec représentation obligatoire en matière civile N° Lexbase : L0292IGW), c’est la signification de la déclaration d’appel qui vaut citation (Cass. civ. 2, 24 mars 2022, n° 19-25.033, F-B N° Lexbase : A30697R4), non la signification des conclusions.

    En l’absence d’un avis relatif à l’article 902 du Code de procédure civile, la partie appelante peut omettre de faire signifier la déclaration d’appel à l’intimé défaillant, alors même que les conclusions auraient été signifiées.

    Pour cette raison, même si cette précision peut être regardée comme redondante avec l’article 14, l’article 902 du Code de procédure civile aurait pu obliger à faire signifier la déclaration d’appel au plus tard avec la signification des conclusions. Ce n’est pas prévu.

    Cependant, les droits de l’intimé sont sauvegardés, puisque l’article 14 du Code de procédure civile édicte une règle d’ordre public devant être relevée d’office (Cass. civ. 2, 10 mai 1989, no 88-11.941 N° Lexbase : A3520AHT). La cour d’appel devra donc s’assurer que l’intimé a bien reçu signification de la déclaration d’appel.

    3) La notification à l’avocat constitué entre-temps

    L’article 902 du Code de procédure civile maintient par ailleurs l’obligation de notifier la déclaration d’appel à l’avocat constitué entre-temps.

    La Cour de cassation a considéré que cette obligation de notification était sans objet dès lors qu’un avocat avait été constitué par la partie intimée (Cass. civ. 2, avis n° 15010, 12 juillet 2018, no 18-70.008 N° Lexbase : A9885XXE – Cass. civ. 2, 14 novembre 2019, no 18-22.167, F-P+B+I N° Lexbase : A6554ZYE – Cass. civ. 2, 14 novembre 2019, no 18-21.104, F-D N° Lexbase : A6578ZYB – Cass. civ. 2, 14 novembre 2019, no 18-22.811, F-D N° Lexbase : A6555ZYG).

    Cette disposition est toutefois maintenue.

    Nous ne pensons pas que le législateur ait entendu assortir cette obligation d’une sanction, ce qui au demeurant ne se justifierait pas véritablement.

    Par conséquent, cette obligation relève de la clause de style, voire du bon usage, dans l’hypothèse où l’avocat constitué par l’intimé ne serait effectivement pas en possession de l’acte d’appel, ce qui peut parfois, mais rarement, arriver.

    4) La notification en bref délai

    En bref délai, l’appelant doit toujours procéder à la signification de la déclaration d’appel, mais dans un délai qui n’est plus de dix jours, mais de vingt jours (CPC, art. 906-1 al. 1er ).

    En outre, « dans tous les cas », est joint à cette signification l’avis de fixation (CPC, art. 906-1 al. 3).

    En pratique, parce que les avis de fixation contiennent déjà cette exigence, et qu’il apparaît conforme au principe de respect des droits de la défense d’y procéder, l’avis de fixation est joint à l’acte de signification. Cependant, le « en tout état de cause » dérange.

    En effet, rien n’empêche une partie appelante de conclure avant l’avis de fixation (Cass. civ. 2, 22 octobre 2020, n° 18-25.769, F-P+B+I N° Lexbase : A86273Y8 – Cass. civ. 2, 13 janvier 2022, n° 20-18.121, F-B N° Lexbase : A14937I7), et donc de signifier les conclusions et la déclaration d’appel sans pouvoir joindre un avis de fixation qui par définition n’existe pas.

    Un « le cas échéant » aurait pu être préférable.

    Un appelant, qui aura remis ses conclusions au greffe avant l’avis de fixation, devra-t-il attendre cet avis de fixation pour signifier la déclaration d’appel afin d’y joindre l’avis de fixation ? Mais alors, quelle mention porter dans l’acte de signification ? Quel délai court à l’égard de l’intimé ? Cela oblige-t-il l’appelant à signifier une seconde fois la déclaration d’appel, une fois en possession de l’avis de fixation ?

    Notons cependant que cette disposition prévoyant de joindre l’avis de fixation n’est assortie d’aucune sanction, et que l’avis de fixation ne fait pas corps avec la déclaration d’appel.

    Nous pourrions donc considérer que l’appelant qui ne joint pas l’avis de fixation, notamment parce que cet avis de fixation n’est pas intervenu, ne sera pas sanctionné.

    Le texte édicterait une bonne pratique, non une obligation procédurale sanctionnée.

    II. Les conclusions

    A. La demande d’infirmation ou d’annulation

    Si certains nourrissaient encore l’espoir d’un abandon de la jurisprudence issue de l’arrêt du 17 septembre 2020 (Cass. civ. 2, 17 septembre 2020, n° 18-23.626, FS-P+B+I N° Lexbase : A88313TA – Cass. civ. 2, 1er juillet 2021, n° 20-10.694, F-B N° Lexbase : A20054YW – Cass. civ. 2, 4 novembre 2021, n° 20-15.757, F-B N° Lexbase : A07267BI), ils seront déçus.

    Le législateur inscrit dans le marbre cette obligation procédurale en ajoutant à l’article 954 du Code de procédure civile N° Lexbase : L7253LED que « les conclusions comprennent (…) un dispositif dans lequel l’appelant indique s’il demande l’annulation ou l’infirmation du jugement ».

    L’avocat rédacteur des conclusions devra donc être vigilant. Et l’avocat postulant, qui reste le signataire des conclusions qu’il n’a pas rédigées, devra faire preuve de la même vigilance, sauf à voir sa responsabilité engagée.

    La sanction n’est pas reprise dans le texte, mais elle est connue : c’est l’option entre la confirmation du jugement et la caducité de la déclaration d’appel.

    Et bien entendu, un appelant incident étant un appelant, il est concerné de la même manière par la mesure.

    B. Les chefs du dispositif du jugement critiqués

    L’article 954 du Code de procédure civile prévoit désormais que « les conclusions comprennent (…) un dispositif dans lequel l’appelant (…) énonce, s’il conclut à l’infirmation, les chefs du dispositif du jugement critiqués ».

    Cette réforme est pour le moins inattendue car non seulement elle n’était ni prévue dans le projet de juin 2023, ni dans le projet de décret de fin 2023, mais en outre, elle revient sur la jurisprudence de la Cour de cassation (Cass. civ. 2, 3 mars 2022, n° 20-20.017, F-B N° Lexbase : A24677P3).

    Alors que l’appelant pouvait se contenter de demander à la cour d’appel de « infirmer le jugement en toutes ses dispositions », il devra désormais lister les chefs du dispositif du jugement critiqués.

    C’est une pratique plutôt généralisée, de sorte que cette réforme ne devrait pas avoir de conséquences trop désastreuses.

    Mais le changement est néanmoins de taille. Et il y aura nécessairement des incidents dès lors que l’appelant, ou l’appelant incident, aura omis d’effectuer cette liste à la Prévert des chefs critiqués.

    C’est un stress supplémentaire pour l’avocat qui ne devra oublier aucun chef. Car si la sanction n’est pas expressément prévue, il est aisé d’imaginer que le chef non énoncé dans le dispositif ne sera pas dévolu, de sorte que la cour d’appel n’aura pas à statuer sur la prétention résultant de ce chef. D’ailleurs, le chef non repris dans le dispositif en suite de la demande d’infirmation peut être vu comme un chef retranché au sens de l’article 915-2 alinéa 1er.

    Au regard de cette obligation, il est permis de s’interroger sur l’utilité d’obliger l’appelant à établir une déclaration d’appel visant les chefs critiqués, puisque ces chefs devront en tout état de cause être énoncés dans le dispositif des conclusions.

    En tout état de cause, il devient plus que nécessaire de rédiger une déclaration d’appel de la manière la plus propre possible.

    Ainsi, au moment de remettre les conclusions au greffe, et de les notifier, l’avocat, surtout l’avocat postulant, pourra s’assurer que les chefs énoncés dans le dispositif des conclusions correspondent aux chefs indiqués dans la déclaration d’appel.

    On cherchera où se trouve la simplification, alors que c’est un écueil supplémentaire pour l’avocat.

    III. La procédure avec mise en état

    A. Une mise en état et un CME autonomes

    Jusqu’alors, pour appréhender les conditions de mise en état en appel, et les pouvoirs juridictionnels du conseiller de la mise en état, il fallait systématiquement se référer aux règles s’appliquant à la procédure de première instance, auxquels renvoie l’article 907 du Code de procédure civile N° Lexbase : L3973LUP.

    Le décret, et c’est une avancée majeure pour une meilleure lisibilité, met fin à ces renvois ; et c’est heureux.

    Si la première mouture de juin 2023 présentait quelques oublis, comme la tenue de l’audience d’incident, le décret a tout remis dans le bon ordre, et rien ne semble avoir été oublié dans l’opération de rapatriement.

    Et au passage, les textes ont été précisés, pour s’adapter très précisément à la seule procédure d’appel.

    B. Les pouvoirs juridictionnels du conseiller de la mise en état

    Aux termes des articles 913 N° Lexbase : L7246LE4 et suivants du Code de procédure civile, le conseiller de la mise en état bénéficie des mêmes pouvoirs que le juge de la mise en état en première instance, et qui sont classiques : jonction et disjonction, pouvoirs en matière de communication de pièces, homologation de transaction, etc.

    Tout y est !

    … et même plus, car l’article 789 du Code de procédure civile N° Lexbase : L9322LTG devenu l’article 913-5 pour l’appel, a subi les transformations pour s’adapter aux spécificités de la procédure d’appel, l’article 913-5 ayant au passage absorbé l’article 914 du Code de procédure civile N° Lexbase : L7247LE7.

    Au-delà de son pouvoir classique en matière de caducité de la déclaration d’appel, d’irrecevabilité de l’appel, ou d’irrecevabilité des conclusions, il est expressément indiqué que :

    • les exceptions de procédure dont il a à connaître sont « les exceptions de procédure relatives à la procédure d’appel » ;
    • les incidents d’instance dont il a à connaître sont « les incidents mettant fin à l’instance d’appel ».

    Quant aux fins de non-recevoir, la discussion qui pouvait encore avoir cours quant à la possibilité ou non de saisir le conseiller de la mise en état (CME) de certaines fins de non-recevoir qui touchaient au fond, elle n’a plus lieu d’être. Toutes les fins de fins de non-recevoir dont le conseiller de la mise en état a à connaître sont listées :

    • irrecevabilité de l’appel, avec principe de concentration des moyens tendant à l'irrecevabilité de l'appel ;
    • irrecevabilité des conclusions en application des articles 909 et 910 du Code de procédure civile N° Lexbase : L7240LEU N° Lexbase : L7241LEW ;
    • irrecevabilité des actes de procédure en application de l'article 930-1 du code précité N° Lexbase : L7249LE9 ;
    • irrecevabilité des interventions en appel.

    En conséquence, le conseiller de la mise en état n’a à connaître que des seules irrecevabilités purement procédurales, et relatives à la seule procédure d’appel.

    Une prescription qui n’aurait pas été soumise au premier juge, quelle qu’en soit la raison, ne pourra en aucun cas relever du pouvoir du conseiller de la mise en état.

    Il est à noter que le projet de juin 2023 envisageait d’étendre les pouvoirs du conseiller de la mise en état aux demandes nouvelles et à l’irrecevabilité de l’article 910-4 du Code de procédure civile N° Lexbase : L9354LTM devenu l’article 915-2 du Code de procédure civile. Il apparaît que cette extension était source de crispation, ce qui peut se comprendre aisément s’agissant des demandes nouvelles. D’une part, il était tout de même difficile, pour le conseiller de la mise en état, de relever d’office ces irrecevabilités ; d’autre part, il peut être contreproductif d’obliger le conseiller de la mise en état à se pencher sur le fond du dossier au stade de la mise en état, alors que la cour d’appel devra à nouveau apprécier le fond de l’affaire pour se prononcer au fond.

    Le conseiller de la mise en état est toujours saisi par conclusions spécialement adressées, et il doit tenir une audience d’incident de manière à entendre les avocats, même lorsqu’il relève d’office dans le cadre de l’article 911 alinéa 3 du Code de procédure civile (anciennement 911-1 alinéa 2 N° Lexbase : L7243LEY) dès lors que l’avocat demande l’organisation d’une audience (Cass. civ. 2, 26 octobre 2023, n° 21-22315, FS-B N° Lexbase : A42911PM).

    C. La mise en état

    La procédure relève de la procédure ordinaire avec désignation d’un magistrat de la mise en état sauf si elle relève de droit de la procédure à bref délai, ou si le président ne décide de l’orienter en bref délai (CPC, art. 907 N° Lexbase : L3973LUP).

    Hormis un rapatriement de tous les textes de première instance dans le chapitre propre à la procédure d’appel, la mise en état est inchangée.

    S’il avait été question, dans le projet de juin 2023, d’allonger les délais pour la remise des conclusions au greffe, pour l’appelant et l’intimé, cette proposition n’a pas été reprise dans le décret. Et c’est tant mieux !

    Sauf prorogation, le délai de remise des conclusions reste de trois mois (CPC, art. 908 N° Lexbase : L7239LET). Et la notification à l’avocat ou à la partie est enfermée dans le même délai qu’auparavant.

    Une nouveauté cependant, prévue à l’alinéa 2 de l’article 911 du Code de procédure civile : les délais peuvent être réduits mais, surtout, ils peuvent aussi être allongés.

    Cette possibilité est opportune. Par exemple, en matière de construction, certaines parties peuvent avoir intérêt à ce que certaines parties concluent au préalable, notamment lorsque celles-ci formeront un appel incident. À réception des conclusions de la partie appelante, l’intimé concerné pourra alors écrire au conseiller de la mise en état pour lui demander de proroger son délai pour conclure. Nous verrons si les avocats s’emparent de cette possibilité qui n’est pas anecdotique, mais au contraire de nature à coller à la vraie vie du dossier.

    D. La force majeure

    La force majeure n’est plus consacrée par un article distinct, l’actuel article 910-3, mais intégrée dans l’article concerné (l’article 906-2 pour le bref délai et l’article 911 pour la procédure avec mise en état), sans que son champ d’application ne soit élargi. Ainsi, la force majeure concerne la remise et la notification des conclusions, non la signification de la déclaration d’appel.

    Cette force majeure est maintenant définie dans le code comme étant « une circonstance non imputable au fait de la partie et qui revêt pour elle un caractère insurmontable », ce qui est la définition issue de la jurisprudence de la Cour de cassation (Cass. civ. 2, 25 mars 2021, n° 20-10.654, F-P N° Lexbase : A67324MB).

    E. La radiation pour défaut de diligence de l’article 912 du CPC

    Comme auparavant, le conseiller de la mise en état peut arrêter un calendrier pour que les parties échangent des conclusions après expiration des délais initiaux pour conclure.

    Dans les faits, les conseillers de la mise en état ne fixent pas ces « calendriers 912 ».

    Une sanction, inexistante dans l’actuel article 912 du Code de procédure civile N° Lexbase : L7245LE3, est ajoutée : le conseiller de la mise en état peut radier l’affaire pour défaut de respect du calendrier.

    En application de l’article 383 du code précité N° Lexbase : L2268H4R, les parties pourront rétablir l’affaire en justifiant l’accomplissement des diligences.

    Il est probable que les « radiations 912 » resteront rares.

    F. La clôture partielle

    La clôture partielle n’est pas une nouveauté en appel, car l’article 800, applicable à la procédure avec mise en état, prévoit une telle clôture.

    Cependant, son rapatriement à l’article 914-2 pourrait lui donner une nouvelle jeunesse, et donner l’idée à certains conseillers de la mise en état d’en faire usage.

    IV. La procédure ordinaire à bref délai

    A. Un bref délai distinct de la procédure ordinaire avec désignation d’un conseiller de la mise en état

    Pour une meilleure lisibilité, le code prévoit désormais un paragraphe propre à la « procédure à bref délai » et un paragraphe distinct sur la « procédure avec mise en état ».

    Déjà, cela permet de comprendre, ce qui est souvent incompris, que le bref délai ou circuit court n’est pas à opposer au circuit ordinaire. Le bref délai est un circuit ordinaire, avec pour particularité qu’il est sans désignation d’un conseiller de la mise en état. C’est pour cette raison que le paragraphe 4 n’est pas intitulé « procédure ordinaire » mais « procédure avec mise en état », étant précisé qu’il aurait pu également être appelé « procédure avec désignation d’un conseiller de la mise en état ».

    B. Le champ d’application du bref délai

    Depuis le 31 juillet 2023, le bref délai concerne déjà l’appel du jugement partiel de l’article 807-2 du Code de procédure civile N° Lexbase : L3383MI7 (à distinguer du jugement partiel en matière prud’homal).

    Avec le décret du 29 décembre 2023, l’ordonnance de protection entre dans la liste des décisions qui relèvent, de droit, du bref délai (CPC, art. 906 7°).

    C. Le délai de remise au greffe des conclusions

    En bref délai, le délai de remise des conclusions au greffe passe d’un mois à deux mois, tant pour l’appelant (CPC, art. 906-2 al. 1er) que pour l’intimé (CPC, art. 906-2 al. 2) et l’intervenant (CPC, art. 906-2 al. 4).

    Cette augmentation profitera surtout à l’intimé, dès lors que l’appelant bénéficiait d’un délai dépendant du délai pour que l’affaire soit fixée, ce qui augmentait de fait le délai d’un mois.

    Tout comme le conseiller de la mise en état en procédure avec mise en état, le président en bref délai peut non seulement réduire mais surtout allonger les délais de remise au greffe mais, semble-t-il, également les délais de notification (CPC, art. 906-2 al. 6). En circuit ordinaire, cette possibilité d’allonger les délais concerne la seule remise au greffe, non la notification des conclusions.

    D. Les pouvoirs juridictionnels du président de chambre

    1) Un pouvoir étendu et exclusif

    Le décret confirme la jurisprudence quant au caractère exclusif des pouvoirs du président de chambre pour connaître des incidents prévus à l’article 906-3 du Code de procédure civile (Cass. civ. 3, 4 mars 2021, n° 19-12.564, F-P N° Lexbase : A01994KL.

    Sans devenir l’équivalent d’un conseiller de la mise en état, le président se voit attribuer des compétences qui lui échappaient jusqu’alors.

    Il connaît désormais de l’irrecevabilité de l’appel et des interventions en appel (CPC, art. 906-3 1°), ce qui était exclu auparavant, hormis l’irrecevabilité pour non-paiement du timbre fiscal (CPC, art. 964 N° Lexbase : L7256LEH).

    En outre, il connaît des incidents mettant fin à l’instance (CPC, art. 906-3 4°). On pense notamment à la péremption, même si en pratique, la péremption n’affecte que rarement les procédures à bref délai qui par définition ne durent pas assez longtemps pour qu’aucune diligence ne soit effectuée dans un délai de deux ans (voir cependant : Cass. civ., 2 décembre 2021, n° 20-18.122, F-B N° Lexbase : A90897DY).

    Mais cela permet aussi au président de se prononcer sur un désistement, voire même de constater l’extinction de l’instance du fait d’un accord.

    Le président demeure compétent pour statuer sur la caducité de la déclaration d’appel (CPC, art. 906-3 2°) et l’irrecevabilité des conclusions et des actes de procédure (CPC, art. 906-3 3°).

    2) Le président et les exceptions de procédure

    Toutefois, il n’est pas prévu qu’à l’occasion d’une irrecevabilité d’appel, ou d’une caducité de déclaration d’appel, le président peut trancher toute question ayant trait à cette irrecevabilité ou à cette caducité.

    La question se posera lorsqu’une partie intimée, qui n’a pas conclu dans son délai, argue de la nullité de l’acte de signification des conclusions. Cette nullité est une exception de procédure pour laquelle l’article 906-3 du Code de procédure civile ne prévoit pas une compétence au profit du président.

    Pourtant, pour savoir si l’intimé est véritablement irrecevable à conclure, il faut bien que soit tranchée cette question de la nullité de l’acte de signification des conclusions. De plus, cette nullité aboutira à la caducité de la déclaration d’appel.

    Même si le texte ne le prévoit pas, il apparaît néanmoins que le président doit nécessairement être compétent pour trancher toute exception de procédure, et d’une manière générale toute question de procédure, dès lors que de cette question dépend une sanction pour laquelle il dispose d’une compétence exclusive.

    La problématique devient insoluble si, sur un incident d’irrecevabilité des conclusions, l’intimé doit faire trancher la question de la nullité par la cour d’appel, cette dernière n’ayant pas à connaître de la recevabilité des conclusions…

    3) Le président et la révocation de la clôture

    Si le président ne peut toujours pas prononcer la jonction, ce qui pourrait se révéler utile, il peut désormais, par renvoi de l’article 906-4 alinéa 1er à l’article 914-4, révoquer la clôture de l’instruction en cas de cause grave. Jusqu’alors, si le président prononçait la clôture de l’instruction, seule la cour d’appel, en bref délai, pouvait prononcer la révocation, ce qui obligeait à rouvrir les débats.

    En revanche, faute de renvoi de l’article 906-4 à l’article 914-2 du code précité, le président ne peut pas prononcer une clôture à l’égard d’une partie.

    E. Le dossier comprenant la copie des pièces

    Improprement appelé « dossier de plaidoiries », ce qu’il n’est pas, le « dossier 912 » (du nom de l’article le prévoyant) consiste à remettre non pas les pièces, mais la copie des pièces, quinze jours avant l’audience.

    Cette obligation est toujours prévue, mais à l’article 914-5, pour la procédure avec mise en état. Elle n’est assortie d’aucune sanction.

    L’article 912 ne s’appliquait qu’à la procédure ordinaire avec désignation d’un conseiller de la mise en état, et était donc exclu pour le bref délai, mais également pour le jour fixe.

    Sans l’ériger en obligation, l’article 906-5 laisse la possibilité au président de demander aux avocats de déposer (ce qui suppose une remise physique) les pièces.

    Notons que le texte vise les pièces, non la copie des pièces, ce qui est peut-être un oubli du législateur. Mais cela est en réalité sans grande conséquence.

    F. La passerelle ?

    Il existait déjà une possibilité de passer de la procédure à bref délai à une procédure avec mise en état, par renvoi de l’article 905 N° Lexbase : L3386MIA à l’article 778 du Code de procédure civile N° Lexbase : L9316LT9.

    Mais en pratique, cette passerelle restait inconnue.

    L’article 906-4 du Code de procédure civile est autrement plus lisible, et nettement plus adapté à la procédure d’appel.

    Déjà, cette passerelle suppose que les parties aient conclu. Cela est préférable, faute de quoi les parties auraient été confrontées à des difficultés quasi insolubles sur les délais pour la remise et la notification des conclusions.

    Il arrive parfois que, par erreur, une affaire relevant d’un bref délai de droit soit orientée en procédure avec mise en état.

    Compte tenu de la rédaction de l’article 778 in fine, il devait être considéré que cette désignation d’un conseiller de la mise en état avait alors pour effet de faire passer l’affaire du bref délai en procédure avec mise en état, avec toutes conséquences en termes de délais pour les conclusions, et des mentions à indiquer le cas échéant dans l’acte de signification des conclusions.

    Tel qu’est rédigé l’article 906-4 du Code de procédure civile, il n’est pas certain que cette erreur d’orientation, qui existe en pratique, puisse avoir les mêmes effets dans cette « nouvelle » procédure d’appel.

    Ne faut-il pas considérer que la désignation d’un conseiller, par erreur et avant expiration des délais pour conclure, dans une affaire qui relève de droit d’un bref délai, ne fait pas sortir cette affaire du bref délai ? La procédure resterait un bref délai, avec désignation d’un conseiller de la mise en état dépourvu de tout pouvoir juridictionnel.

    Dans ces conditions, les avocats devront veiller à réagir immédiatement en cas de désignation prématurée – c’est-à-dire avant que les parties aient conclu – et donc erronée d’un conseiller de la mise en état dans une affaire relevant de droit du bref délai, en demandant au président de revenir sur cet avis de désignation.

    L’avocat pourra rappeler au président que cette passerelle ne peut intervenir qu’après échange des conclusions.

    Cela suppose évidemment que l’avocat détermine dès l’inscription de l’appel de quelle procédure relève l’affaire, sans attendre que la cour d’appel le lui précise.

    V. Le renvoi de cassation

    A. Le délai de notification de la déclaration de saisine

    Tout comme pour le bref délai, le délai pour notifier la déclaration de saisine passe de dix jours à vingt jours, le point de départ de ce délai restant la date de la déclaration de saisine.

    L’article 1037-1 du Code de procédure civile N° Lexbase : L7045LEN a conservé le terme « signifiée » à l’alinéa 2, que la Cour de cassation a interprété comme étant une « notification » (Cass. civ. 2, 22 octobre 2020, no 19-21.864, F-P+B+I N° Lexbase : A88013YM).

    B. La notification des conclusions

    L’alinéa 3 de l’article 1037-1 du code précité prévoit un délai de deux mois pour notifier les conclusions, sans prévoir de délai supplémentaire comme c’est le cas en bref délai ou en procédure avec mise en état.

    Cependant, le cinquième alinéa renvoie désormais au cinquième alinéa de l’article 906-2 du même code qui prévoit un délai supplémentaire d’un mois à l’expiration du délai pour conclure.

    Il existe donc une contradiction qu’il appartiendra à la jurisprudence de préciser.

    Même s’il conviendra d’être prudent, et ne pas faire application de ce délai supplémentaire d’un mois, tant que la Cour de cassation n’aura pas pris position, nous pouvons raisonnablement imaginer que la Cour de cassation considèrera que ce délai s’applique, tant il paraît logique que la procédure sur renvoi de cassation suive en cela la procédure en circuit ordinaire.

    C. L’extension du déféré

    Que cela ait été voulu ou non par le législateur de 2017, le champ du déféré sur renvoi de cassation était curieusement limité (Cass. civ. 2, 5 octobre 2023, F-B, n° 22-16.906 N° Lexbase : A17101KK).

    En renvoyant désormais au sixième alinéa de l’article 906-3, toute ordonnance du président rendue en application de l’article 1037-1 du code précité a autorité de chose jugée et est susceptible de déféré devant la cour d’appel dans le délai de quinze jours.

    C’est donc une extension du champ du déféré qui est introduite sur renvoi de cassation.

    VI. La dévolution

    A. En procédure avec représentation obligatoire

    1) Une dévolution fixée par la déclaration d’appel, et sous conditions par les conclusions

    En application de l’article 901, 7° du Code de procédure civile, la déclaration d’appel contient « Les chefs du dispositif du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est, sans préjudice du premier alinéa de l'article 915-2 du même code, limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ».

    C’est l’acte d’appel qui fixe la dévolution.

    Cependant, l’article 915-2 du Code de procédure civile atténue cette affirmation puisqu’il prévoit que « L'appelant principal peut compléter, retrancher ou rectifier, dans le dispositif de ses premières conclusions remises dans les délais prévus au premier alinéa de l'article 906-2 et à l'article 908, les chefs du dispositif du jugement critiqués mentionnés dans la déclaration d'appel. La cour est saisie des chefs du dispositif du jugement ainsi déterminés et de ceux qui en dépendent. ».

    Le législateur, sans l’interdire – et contrairement à ce qui avait été la position de la Cour de cassation qui exigeait une déclaration d’appel (Cass. civ. 2, 30 juin 2022, n° 21-12.720, F-B N° Lexbase : A8574783) – souhaite que la déclaration d’appel rectificative tombe en désuétude.

    Sur le principe, pourquoi pas ?

    C’est certainement une des grandes nouveautés du décret, en ce qu’elle ouvre cette possibilité, empreinte de souplesse.

    Le risque serait de voir fleurir des déclarations d’appel vierge de tous chefs critiqués, l’appelant considérant qu’il sera toujours temps de préciser les chefs critiqués dans les conclusions elles-mêmes.

    Et les avocats qui assurent la seule postulation, sans être en charge de la plaidoirie, et qui envisagent cette mission de postulation sous l’angle de la boîte aux lettres, seront tentés de laisser le soin au confrère rédacteur des conclusions de préciser la dévolution.

    Cela étant, ce serait certainement prendre un grand risque.

    Le principe semble demeurer une dévolution opérée par le seul acte d’appel, sans que la mention des chefs critiqués dans l’acte introductif de l’instance d’appel devienne une option.

    D’ailleurs, le législateur utilise les termes « compléter », « rectifier ».

    Plus précisément, « L'appelant principal peut compléter, retrancher ou rectifier (…) les chefs du dispositif du jugement critiqués mentionnés dans la déclaration d'appel ».

    Mais est-ce à dire que la déclaration d’appel doit déjà contenir un embryon de chefs critiqués pour pouvoir la compléter ? Une telle exigence n’existe pas aujourd’hui, la partie ayant régularisé un acte d’appel sans chefs critiqués pouvant régulariser une déclaration d’appel rectificative qui s’incorpore à la précédente.

    Mais l’article 915-3 permet seulement de compléter « les chefs du dispositif du jugement critiqués mentionnés dans la déclaration d'appel », ce qui suppose que ces chefs existent déjà dans l’acte d’appel, ce qui exclurait toute déclaration d’appel vide de tous chefs.

    Prévoir qu’une telle déclaration d’appel, sans chefs, ne puisse être corrigée que par une déclaration d’appel rectificative, tandis que si seuls certains chefs sont manquants, l’appelant peut compléter par conclusions, consisterait à mettre en place une usine à gaz incompréhensibles, source de difficultés de procédure.

    En définitive, si l’intention est louable, le risque de dérapage n’est pas nul, surtout qu’il existe un naturel chez l’avocat à adopter des pratiques apparemment simples mais risquées, comme le démontre l’utilisation à outrance de l’annexe pour mentionner les chefs critiqués.

    Reporter sur les seules conclusions, la dévolution, est risqué.

    Au surplus, pour l’intimé, c’est un mépris des droits de la défense.

    Une partie, à réception de l’acte d’appel, peut comprendre si elle est ou non concernée par l’appel engagé ce qui peut conditionner l’opportunité de constituer avocat : une partie appelée en garantie par l’un des intimés peut avoir intérêt à différer une constitution, n’étant pas menacée par l’appel principal, et seulement par un hypothétique appel incident.

    Pour cela, la position de la Cour de cassation quant à l’acte rectificatif paraissait la plus adaptée.

    De plus, cela obligera les juges d’appel, pour apprécier la dévolution, à prendre en considération et l’acte d’appel et les conclusions.

    Nous attendrons avec impatience que la Cour de cassation délimite les conditions de régularisation d’une déclaration d’appel incomplète, irrégulière.

    2) Une rectification de la dévolution par conclusions

    Reste en outre à savoir dans quelles conditions cette rectification sera effectuée.

    L’article 915-2 du Code de procédure civile précise que cette rectification est opérée dans le dispositif.

    Faut-il donc considérer que suffira la formule « infirme le jugement en ce qu’il a… » suivie des chefs critiqués ? Et alors, le dispositif qui demandera à la cour d’appel de « Infirmer le jugement en toutes ses dispositions » ne sera pas suffisant pour opérer dévolution sur le tout ?

    Ou alors, le dispositif devra-t-il expressément préciser qu’il complète (ou rectifie) la déclaration d’appel des chefs critiqués, puis en les citant, comme cela doit être fait lorsque la régularisation est effectuée par une déclaration d’appel rectificative ?

    Cette disposition, aussi séduisante qu’elle puisse être en apparence, pose de véritables questions.

    Il ne saurait être trop conseillé de rédiger une déclaration complète, dès la formation de l’appel, sans compter sur un dispositif rectificatif de cet acte d’appel.

    Et dans l’hypothèse où une déclaration d’appel serait incomplète quant aux chefs critiqués, il paraît opportun de la corriger au plus vite, ce qui justifierait de remettre une déclaration d’appel (rectificative) dont l’objet serait de corriger la précédente déclaration d’appel irrégulière, sans attendre de la corriger par des conclusions, avec le risque d’oublier.

    Si le législateur entendait supprimer, de fait, la déclaration d’appel rectificative, nous pouvons douter que cet objectif sera atteint.

    Mieux, l’appelant pourrait, par ce principe dit de sécurité que les avocats affectionnent particulièrement, régulariser d’une part un acte d’appel rectificatif, et d’autre part corriger dans le dispositif de ses conclusions.

    Gageons que la déclaration d’appel rectificative a encore de beaux jours.

    3) Le nettoyage de l’article 562 du CPC

    L’article 562 du Code de procédure civile N° Lexbase : L7233LEM est nettoyé.

    Est supprimé le renvoi à cette notion nébuleuse et assez incompréhensible d’objet du litige indivisible.

    Il était difficile de comprendre dans quels cas cette disposition pouvait s’appliquer, de sorte que sa suppression a le grand avantage de ne plus avoir à se poser la question.

    Sinon, l’essence même de la dévolution est conservée.

    Sous réserve de la jurisprudence particulière et opportuniste de la première chambre civile de la Cour de cassation, en matière de divorce (notamment Cass. civ. 1, 12 juillet 2023, n° 21-19.258, F-D N° Lexbase : A80021AM), la dévolution suppose que le chef soit effectivement critiqué en appel.

    B. En procédure sans représentation obligatoire

    La Cour de cassation avait fait preuve d’une souplesse bienvenue, pour les procédures sans représentation obligatoire.

    La déclaration d’appel qui ne mentionne pas les chefs critiqués opère dévolution pour le tout (Cass. civ. 2, 9 septembre 2021, n° 20-13.662, FS-B+R N° Lexbase : A256044L – Cass. civ. 2, 29 septembre 2022, FS-B, n° 21-23.456 N° Lexbase : A34268LH).

    Cette solution, pour opportune qu’elle soit, était toutefois contraire au texte, faisant fi de l’article 562 qui s’applique aussi à la procédure sans représentation obligatoire.

    Cette souplesse est intégrée à l’article 933 6° du Code de procédure civile N° Lexbase : L8616LYR.

    La déclaration d’appel doit indiquer les chefs critiqués. Mais si elle n’indique aucun chef, l’appel est alors général.

    Il faut comprendre que cette dévolution pour le tout n’opère que si l’acte ne contient aucun chef.

    Si la déclaration d’appel contient des chefs, alors la dévolution opère que de ces seuls chefs.

    Toutefois, la procédure étant orale, il est permis de considérer que l’appelant pourrait alors régulariser une déclaration d’appel rectificative jusqu’à l’audience.

    VII. L’irrecevabilité de l’appel après une caducité ou une irrecevabilité

    L’irrecevabilité de l’article 911-1 du Code de procédure civile N° Lexbase : L7243LEY est reprise à l’article 916, sans modification.

    Ainsi, curieusement, une partie qui a essuyé une caducité de la déclaration d’appel pour un motif autre que le non-respect de l’article 902 N° Lexbase : L7237LER, 908 N° Lexbase : L7239LET du Code de procédure civile en procédure avec mise en état, ou 906-1 ou 906-2 en bref délai, pourra refaire un appel si elle est toujours dans le délai d’appel (Cass. civ. 2, 19 mai 2022, n° 21-10.422, F-B N° Lexbase : A41117XK).

    Ainsi, une caducité pour absence de remise d’une requête au premier président sur un appel compétence laissera la possibilité à la partie de refaire un appel si le délai d’appel est ouvert.

    VIII. La procédure sans audience

    La récente réforme de la procédure en première instance avait introduit la procédure sans audience.

    Celle-ci restait cantonnée à la seule procédure de première instance.

    La réforme de décembre 2023 l’élargit à la procédure en appel.

    Ce sont les articles 906-5 du Code de procédure civile pour le bref délai et 914-5 pour la procédure avec mise en état qui prévoient la possibilité pour le président (en bref délai) ou le conseiller de la mise en état (en procédure avec mise en état) « à la demande des avocats des parties, et après accord, le cas échéant, du ministère public, autoriser le dépôt des dossiers au greffe de la chambre à une date qu'il fixe, quand il lui apparaît que l'affaire ne requiert pas de plaidoiries ».

    Un dépôt des dossiers au greffe sans plaidoirie est, même si le texte ne le dit pas, une procédure sans audience.

    Si le texte prévoit une demande des avocats, en pratique, rien n’empêche le conseiller de la mise en état ou le président d’interroger les avocats pour savoir s’ils entendent demander un dépôt des dossiers sans plaidoiries.

    Pour rappel, l’article L. 212-5-1 du Code de l'organisation judiciaire N° Lexbase : L0598LTC prévoyant la procédure sans audience concerne le seul tribunal judiciaire.

    Le code de l’organisation judiciaire n’est pas modifié pour y faire entrer la procédure sans audience devant la cour d’appel.

    Il est vrai que dans les faits, les dépôts de dossier à l’audience, sans présence des avocats, se sont généralisés. Cela permet donc d’entériner une pratique existante.

    Cependant, le risque est que la distance s’accroisse davantage entre le juge et l’avocat.

    C’est peut-être une disposition opportune, dans une certaine mesure, mais dont les avocats devront user avec parcimonie, au risque de créer une justice exclusivement virtuelle, et de faire disparaître de manière irrémédiable les derniers liens qui existent entre les juges et les avocats.

    IX. En conclusion

    D’aucuns rêvent d’une procédure simple, sans sanction, dans laquelle l’avocat se promènerait sans risquer de tomber dans un piège à chaque coin de rue.

    Ce ne sera pas pour cette fois… et probablement pas pour les fois d’après, non plus, la simplicité ou la simplification étant un mythe qui continuera de nourrir les conversations.

    La procédure a toujours été périlleuse, même si les avocats ne s’en sont rendu compte qu’en 2012, date à laquelle ils ont été jetés dans le grand bain sans avoir nécessairement appris à nager.

    Il y aura un avant et un après la réforme de 2023.

    Et le grand apport de cette réforme est qu’il deviendra plus aisé de manipuler le Code de procédure civile.

    Mais plus que jamais, l’avocat devra s’aventurer en appel en ayant pris soin de s’y former, faute de quoi la déclaration de sinistre ne sera jamais loin, l’erreur étant tapie dans l’ombre, prête à surgir au moment le plus inattendu.

    newsid:487909

    Rémunération

    [Le point sur...] Partage de la valeur au sein de l’entreprise : anatomie des nouveaux dispositifs

    Réf. : Loi n° 2023-1107 du 29 novembre 2023, portant transposition de l'accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l'entreprise N° Lexbase : L4230MKU

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    par Frédérique Cassereau, Avocate associée et Thibault Minjollet, Avocat, cabinet Hoche Avocats

    Le 10 Janvier 2024

    Mots-clés : PPV • partage de la valeur • intéressement • participation • formule dérogatoire • PEE • dialogue social • ANI • bénéfices exceptionnels • valorisation de l’entreprise

    La loi sur le partage de la valeur ajoutée est entrée en vigueur le 1er décembre 2023. Elle améliore de façon notable le régime de la prime de partage de la valeur (PPV). Elle met également à disposition des entreprises des outils innovants et institue de nouvelles obligations pour parvenir à son objectif.


    Dès 1959, la France, via l’intéressement, a mis en place des dispositifs de partage de la valeur ajoutée. Ayant principalement pour objet d’« associer les salariés aux fruits de la croissance des entreprises pour mieux répartir les richesses » [1], ils constituent à la fois un levier de motivation des salariés et de compétitivité des entreprises.

    Ces dispositifs ont été largement encouragés par les pouvoirs publics ces dernières décennies et présentent de multiples visages : intéressement, participation, mais également actionnariat salarié ou encore plan d’épargne salariale. Ils sont, au demeurant, davantage répandus dans l’hexagone que dans le reste de l’Europe.

    En dernier lieu, la prime de partage de la valeur (PPV) a pris le relai de l’ancienne prime exceptionnelle pour le pouvoir d’achat (PEPA), pérennisant ainsi la possibilité de verser une prime annuelle dans des conditions sociales et fiscales avantageuses.

    Largement plébiscitée par les entreprises et les salariés, cette prime - qui avait initialement pour objet d’apporter une réponse au contexte social inédit de 2018 - permet aujourd’hui de lutter, selon le souhait du Gouvernement, contre la « période exceptionnelle d’inflation » [2] qui dure depuis près de deux ans maintenant.

    Pour autant, les outils de partage de la valeur peinent encore à se diffuser dans les petites et moyennes entreprises, en particulier dans celles de moins de 50 salariés. En 2020 [3], seules 4,8 % des entreprises de 10 à 50 salariés étaient dotées d’un accord de participation. De même, 10,9 % de ces entreprises disposaient d’un accord d’intéressement.

    Pour y remédier, le Gouvernement a invité les partenaires sociaux à négocier sur le partage de la valeur, en leur transmettant un document d’orientation, le 16 septembre 2022, qui posait 3 axes de négociation :

    • généraliser le partage de la valeur pour tous les salariés, notamment dans les plus petites entreprises,
    • renforcer, simplifier et veiller à l’articulation des différents dispositifs de partage de la valeur et,
    • orienter l’épargne salariale vers les investissements responsables et solidaires (ISR), l’économie productive et la transition écologique.

    Au terme de plusieurs semaines de discussions, les organisations syndicales de salariés [4] et les organisations patronales [5] sont parvenues, le 10 février 2023, à la conclusion d’un accord national interprofessionnel (ANI), relatif « au partage de la valeur au sein de l’entreprise ».

    Dès le 20 février suivant, la Première ministre Élisabeth Borne s’engageait à transcrire dans la loi le contenu de cet accord, qu’elle qualifiait d’« avancée historique » pour les travailleurs des entreprises de moins de 11 salariés.

    C’est dans ce contexte que l’Assemblée nationale a adopté, le 23 novembre dernier, la loi portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise N° Lexbase : L4230MKU.

    Publiée au Journal officiel le 1er décembre 2023, cette loi tend notamment à améliorer le régime de la PPV et à faciliter les modalités de mise en place et de fonctionnement de l’intéressement et de la participation (I.). Elle crée, par ailleurs, un nouvel outil de partage de la valeur et institue de nouvelles obligations à la charge des employeurs (II.).

    I. Nouveautés relatives à la prime de partage de la valeur, à la participation et à l’intéressement

    Améliorations apportées au régime de la PPV. Instituée par la loi n° 2022-1158 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat du 16 août 2022 N° Lexbase : L7050MDH, la PPV bénéficie d’un régime social particulièrement avantageux puisqu’elle fait l’objet d’une exonération de cotisations sociales, dans la limite de 3 000 € (voire 6 000 € dans certains cas [6]). La loi prévoyait en outre que les primes versées jusqu’au 31 décembre 2023 aux salariés percevant une rémunération inférieure à 3 SMIC annuels bénéficient d’une exonération totale de CGS/CRDS, de forfait social et d’impôt sur le revenu.

    Pour la seule année 2022, 4,4 milliards d’euros de primes ont été versés à quelques 5,5 millions de salariés, soit un réel succès.

    Le législateur a donc souhaité maintenir, tout en l’améliorant, le régime de la PPV. Ainsi, la loi sur le partage de la valeur prévoit que :

    • le régime d’exonération « intégral » est prolongé jusqu’en 2026, pour les salariés des entreprises de moins de 50 salariés dont la rémunération est inférieure à 3 SMIC annuel. La reconduction de ce régime d’exonération constitue, sans aucun doute, une des mesures les plus attendues, tant par les employeurs que par les salariés concernés ;
    • deux primes pourront désormais être versées par année civile (au lieu d’une seule actuellement), offrant ainsi plus de souplesse aux employeurs pour associer les salariés aux résultats de l’entreprise. Le montant cumulé des deux primes ne pourra toutefois pas excéder 3 000 € (ou 6 000 €) ;
    • la PPV pourra être placée par les salariés sur un plan d’épargne salariale ou sur un plan d’épargne retraite et, ainsi,  bénéficier d’une exonération d’impôt sur le revenu (sous réserve de respecter les conditions prévues pour tous types de versement).

    Mise en place à titre expérimental d’un régime de participation moins favorable que le régime légal. L’autre apport majeur de la loi du 29 novembre 2023 réside dans la faculté offerte à certaines entreprises de se doter d’un régime de participation moins favorable que le régime légal.

    Pour rappel, les entreprises de moins de 50 salariés n’ont pas l’obligation d’instituer un régime de participation au bénéfice des salariés. Elles peuvent, néanmoins, mettre en place un tel régime de manière volontaire au moyen d’un accord collectif ou, « en cas d’échec des négociations », par décision unilatérale après consultation du CSE (C. trav., art. L. 3323-6 N° Lexbase : L7712LQP).

    Afin d’encourager la mise en place de la participation dans ces entreprises, il est prévu, à titre expérimental et pour une durée de 5 années, qu’elles pourront mettre en application un régime de participation « dérogeant à la règle de l’équivalence des avantages consentis aux salariés », prévue par l’article L. 3324-2 du Code du travail N° Lexbase : L5939LQZ.

    Autrement dit, les entreprises de moins de 50 salariés peuvent désormais appliquer une formule de calcul de la réserve spéciale de participation dérogeant dans un sens moins favorable à la formule légale, prévue par l’article L. 3324-1 du même code N° Lexbase : L5863MAE.  

    Pour ce faire, ces entreprises devront soit :

    • appliquer un accord de participation conclu au niveau de la branche, conclu dans les conditions prévues à l’article L. 3322-9 du Code du travail N° Lexbase : L0665LZN ou,
    • conclure un accord de participation selon les modalités habituelles, à savoir l’un des modes prévus à l’article L. 3322-6 dudit code N° Lexbase : L7712LQP.

    La mise en place du régime par décision unilatérale est ainsi exclue.

    L’assouplissement de la règle de calcul de la RSP devrait donc faciliter la mise en place de la participation dans les petites entreprises, conformément à la volonté des partenaires sociaux [7].

    Possibilité de verser des avances sur la participation ou l’intéressement. La loi prévoit enfin, expressément, la possibilité de verser, sous certaines conditions, des avances sur l’intéressement et/ou sur la participation.

    La doctrine administrative semblait déjà autoriser cette faculté, mais seulement pour l’intéressement (Guide de l’épargne salariale, dossier 1 - fiche 5). Elle apparaît particulièrement bienvenue tant pour les salariés que pour les entreprises, qui disposent désormais d’une plus grande souplesse.

    L’accord du salarié devra néanmoins être recueilli préalablement et la périodicité des versements ne pourra être inférieure au trimestre. De plus, en cas de trop-perçu par le salarié, le remboursement des sommes excédant ses droits sera obligatoire et devra se faire sous la forme d’une retenue sur salaire, dans la limite de 10 % du montant des salaires exigibles. Lorsque le trop-perçu aura été affecté à un plan d’épargne salariale, il ne pourra pas être débloqué et constituera un versement volontaire du bénéficiaire qui n’ouvrira pas droit aux exonérations sociales et fiscales.

    En plus de l’amélioration des dispositifs existants, le législateur a souhaité créer un nouvel outil et de nouvelles obligations pour les entreprises afin de favoriser le partage de la valeur (II.).

    II. Les nouveaux outils visant à favoriser le partage de la valeur

    Mise en place obligatoire d’un dispositif de partage de la valeur. Pour répondre à l’objectif consistant à favoriser le partage de la valeur, en particulier dans les petites entreprises, une nouvelle obligation a été instituée (là encore, à titre expérimental, et pour une durée de 5 ans) pour les entreprises d’au moins 11 salariés qui ne sont pas tenues de mettre en place un régime de participation et qui réalisent un bénéfice net fiscal d’au moins 1 % du chiffre d’affaires pendant 3 exercices consécutifs.

    En effet, l’article 5 de la loi prévoit que les employeurs qui remplissent ces deux conditions devront, obligatoirement, soit :

    • mettre en place un régime de participation ou d’intéressement en application des dispositions du Code du travail ;
    • mettre en place un régime de participation dérogatoire dans les conditions prévues ci-dessus (§. I.) ;
    • verser une prime de partage de la valeur ;
    • abonder un plan d’épargne salariale ou un plan d’épargne retraite mis en place au niveau de l’entreprise ou au niveau interentreprises.

    Cette obligation s’applique à compter des exercices ouverts après le 31 décembre 2024. Ainsi, une entreprise ayant réalisé des bénéfices d’au moins 1 % de son chiffre d’affaires de manière constante sur 2022, 2023, et 2024, sera tenue de mettre en place l’un de ces dispositifs au titre de l’exercice 2025.

    Cette expérimentation devrait, à terme, permettre à un grand nombre de salariés des TPE de bénéficier d’au moins un dispositif de partage de la valeur. Elle fera l’objet d’un rapport d’évaluation du Gouvernement qui sera remis au Parlement au plus tard au mois de juin 2026.

    Partage de la valeur en cas de bénéfice exceptionnel. Les entreprises de plus de 50 salariés et disposant d’un ou plusieurs délégués syndicaux se voient également imposer de nouvelles obligations.

    En effet, celles-ci seront désormais tenues, lorsqu’elles ouvriront les négociations sur la mise en place d’un dispositif de participation ou d’intéressement, d’engager également des discussions sur :

    • la notion d’« augmentation exceptionnelle de [leurs] bénéfices » [8]. Celle-ci devra être définie dans l’accord et pourra être déterminée notamment au regard de critères tels que la taille de l’entreprise, le secteur d’activité ou les bénéfices réalisés lors des années précédentes ;
    • les modalités de partage de la valeur qui en découlent pour les salariés. Ce partage pourra prendre la forme :
      • soit d’un versement d’un supplément de participation ou d’intéressement ;
      • soit de l’ouverture de nouvelles négociations ayant pour objet de mettre en place un dispositif d’intéressement lorsqu’il n’existe pas dans l’entreprise, de verser un supplément d’intéressement ou de participation, d’abonder un plan d’épargne salariale ou un plan d’épargne retraite, ou de verser une PPV.

    De même, les entreprises déjà couvertes par un accord de participation ou d’intéressement seront elles aussi tenues d’engager des négociations sur la définition d’une augmentation exceptionnelle de leur bénéfice et ses conséquences en termes de partage de la valeur, avant le 30 juin 2024.

    Bien qu’il ne s’agisse que d’une obligation de négociation, cette nouvelle mesure présente l’avantage de mettre sur la table des négociations la notion inédite de « bénéfice exceptionnel » qui pourrait, à terme, devenir un véritable critère de déclenchement automatique de partage de la valeur.

    Un nouveau dispositif facultatif innovant : le plan de partage de la valorisation de l’entreprise. Alors que le partage de la valeur n’est généralement envisagé qu’au travers de l’intéressement des salariés aux résultats de l’entreprise, un nouvel outil offre aux employeurs la possibilité d’associer ces derniers à sa valorisation.

    Le « plan de partage de la valorisation de l’entreprise » permet ainsi à toute entreprise, quelle que soit sa taille, de verser une prime à l’ensemble des salariés, dont le montant sera fixé par référence à l’évolution de sa valorisation.

    En pratique, les bénéficiaires pourront percevoir une prime dont le montant sera déterminé en fonction :

    • d’un montant de référence (qui sera fixé par le plan),
    • auquel sera appliqué le taux de variation de la valeur de l’entreprise (lorsque celui-ci est positif).

    Ainsi, à titre d’exemple, si le plan prévoit un montant de référence de 5 000 € et que le taux de variation de la valorisation de l’entreprise est de 10 %, la prime sera d’un montant de 500 €.

    Ce plan devra être mis en place par accord, établi sur rapport spécial du commissaire aux comptes de l’entreprise (ou, s’il n’en a pas été désigné, d’un commissaire aux comptes désigné à cet effet), selon l’une des modalités suivantes :

    • convention ou un accord collectif de travail ;
    • accord entre l'employeur et les représentants d'organisations syndicales représentatives dans l'entreprise ;
    • accord conclu au sein du comité social et économique ;
    • à la suite de la ratification, à la majorité des deux tiers du personnel, d'un projet d'accord proposé par l'employeur.

    Il devra par ailleurs contenir un certain nombre de clauses obligatoires permettant (notamment) de fixer le montant de référence auquel sera appliqué le taux de variation de la valeur de l’entreprise, les éventuelles conditions dans lesquelles ce montant pourra différer entre les salariés (par exemple en fonction du niveau de classification ou encore de la durée de travail), la formule de valorisation retenue pour les entreprises non cotées, etc.

    Dès lors que le plan remplira les conditions pour bénéficier des exonérations sociales (notamment avoir été déposé auprès de l’administration), les primes versées entre 2026 et 2028 seront exemptées de toutes cotisations sociales (tant salariales que patronales), ainsi que de forfait social. En revanche, elles seront assujetties à la CSG-CRDS (9,7 %) ainsi qu’à la contribution patronale de 20 %, prévue par l’article L. 137-13 du Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L2231LYB.

    En conclusion, les mesures contenues dans la loi sur le partage de la valeur sont denses. Elles devraient permettre d’atteindre les objectifs que le Gouvernement s’est fixés dans ce domaine, dans le contexte d’un dialogue social un peu retrouvé avec les partenaires sociaux. Reste que le débat sur les salaires est loin d’être clos et que les enjeux sur l’actionnariat salarié ne sont pas encore suffisamment explorés.


    [1] Rapport de la Commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 2023-1107 du 29 novembre 2023, portant transposition de l’accord national interprofessionnel relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise [en ligne].

    [2] Rapport de la Commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 2022-1158 du 16 août 2022, portant mesure d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat [en ligne].

    [3] Source : Commission des affaires sociales d’après les données de la Dares (2022).

    [4] À savoir : CFDT, FO, CFE-CGC et CFTC.

    [5] À savoir : MEDEF, CPME et U2P.

    [6] Pour rappel, le plafond de 6 000 € est applicable aux :

    • entreprises ayant mis en place un dispositif d’intéressement ou de participation volontaire,
    • aux associations ou fondations reconnues d’utilité publique ou d’intérêt général,
    • aux établissements et service d’aide par le travail. 

    [7] Cf. Préambule de l’ANI du 10 février 2023, relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise.

    [8] Loi sur le partage de la valeur au sein de l’entreprise, art. 8 N° Lexbase : L4230MKU.

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    Sociétés

    [A la une] Dossier spécial : La SAS, une trentenaire bien portante - Propos introductifs

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    N7916BZ9

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    par Deen Gibirila, Professeur émérite (Université Toulouse 1 Capitole), Directeur scientifique du dossier « La SAS, une trentenaire bien portante »

    Le 11 Janvier 2024

    Créée par la loi n° 94-1 du 3 janvier 1994 N° Lexbase : L2852AWK, la société par actions simplifiée désignée par l’acronyme SAS illustre un modèle inédit de société qui correspond au troisième type de société par actions ou de capitaux aux côtés de la société anonyme (SA) et de la société en commandite par actions (SCA). Elle appartient donc à la catégorie des sociétés pouvant émettre des actions, sans toutefois pouvoir faire une offre au public de titres financiers et faire admettre ses actions aux négociations sur un marché réglementé [1], tout en pouvant être constituée sans capital légal minimal et avec un seul associé.

    Faute de pouvoir forger à leur gré les statuts de leur société en raison de contraintes instaurées par la loi du 24 juillet 1966 (loi n° 66-537 N° Lexbase : L6202AGS), recodifiée dans le Code de commerce, les associés des sociétés commerciales n’avaient pas d’autres choix que de prévoir des dérogations aux statuts initialement rédigés par eux au moyen de dispositions extrastatutaires. Ces inconvénients ont incité le législateur de 1994 à proposer aux fondateurs une nouvelle structure sociétaire dont les règles essentielles d’organisation et de fonctionnement résultent de la volonté des parties, les règles relatives de la SA venant pallier le mutisme des statuts.

    « Un îlot de liberté dans un océan de réglementation » ; cette opinion doctrinale [2] traduit la résurrection de la liberté contractuelle issue de l’apparition de la SAS dans le paysage du droit français des sociétés, à la suite de l’entrée en vigueur de loi n° 94-1 du 3 janvier 1994 destinée à pallier la rigidité de la société anonyme dont les principales modalités sont strictement déterminées par le Code de commerce.

    La SAS est désormais une structure sociétaire de premier plan dans le paysage juridique français, du fait qu’elle est la seule de la catégorie des sociétés de capitaux à permettre un large aménagement des règles d’organisation et de fonctionnement interne en restreignant notablement le nombre des prescriptions légales impératives. En cela, elle rompt avec le droit des sociétés traditionnelles en faisant prédominer la « société contrat » sur la « société institution » [3].

    Tous ces aspects contribuent à son large succès au point de lui offrir quantitativement la tête du classement des sociétés par actions, bien au-dessus de la société anonyme [4].

    Déjà, selon des chiffres assez anciens, au 30 juin 2003, il existait 1 238 747 sociétés commerciales, dont 928 249 SARL, 123 633 SA et 53 872 SAS. La SAS représentait donc près d'un tiers des sociétés par actions. Mais il s’est créé en rythme annuel 20 000 SAS, ce qui a coïncidé avec la disparition du même nombre de SA [5]. Cet effet de vases communicants, s’étant poursuivi au même rythme, à l’heure actuelle le nombre de SAS a dépassé celui des SA depuis 2005 [6].

    Quelques chiffres révèlent clairement la croissance progressive du nombre des SAS en comparaison avec la SARL [7]  qui est la forme de sociétés commerciales la plus répandue en France :

    - 2015 : SARL (82 427) ; SAS (83 179) ;

    - 2016 : SARL (76 172 ) ; SAS (106 501) ;

    - 2017 : SARL (71 901) ; SAS (119 517) ;

    - 2018 : SARL (70 421), SAS (119 034).

    Le nombre de sociétés par actions simplifiées (SAS) a considérablement augmenté ces dernières années (15 % des création de sociétés en 2011 à 48 % en 2015) [8].

    La progression du nombre des sociétés immatriculées au greffe du tribunal de commerce de Paris traduit bien ce constat. Les statistiques donnent les résultats suivants [9] :

    - 1995 : SARL, dont EURL (14 021) ; SA (2 015) ; SAS (399) ; SNC (472) ; SCS (20) ; SCA (12) ; GIE (111) ; sociétés civiles (3 156) ;

    - 2016 : SARL, dont EURL (110 208) ; SA (164) ; SAS (17 631) ; SNC (1 164) SCS (9) SCA (13) ; GIE (86) ; sociétés civiles (6 551).

    De toute évidence, la SAS constitue « une société bien portante » trente ans après sa naissance, dont la présente étude collective vise à mettre en évidence quelques points importants qui traduisent son vif succès.

    1. La liberté contractuelle dans la SAS (par Deen Gibirila, Professeur émérite, Université Toulouse 1 Capitole) N° Lexbase : N7862BZ9

    La SAS répond au principe de liberté contractuelle. Peu de dispositions du Code de commerce lui étant consacrées, elle est essentiellement régie par ses statuts, ce qui lui confère une grande souplesse. Inspirée du droit allemand, à l’instar de la SA moderne de type dualiste, cette structure sociétaire a pour vocation première de permettre la création par les entrepreneurs d’une société par actions, tout en alliant souplesse de fonctionnement et liberté d'organisation pour les associés. S’agissant de la direction, ces caractéristiques de souplesse et de liberté s'expriment entre autres, par l'absence d'obligation de se doter d'un conseil d'administration ou de surveillance, le président étant le seul organe obligatoire de direction.

    2. La compatibilité dans le droit des SAS (par Julien Delvallée, Maître de conférences à l’Université Paris-Saclay) N° Lexbase : N7829BZY

    Depuis sa création en 1994, la SAS ne cesse d'interroger doctrine et pratique sur l'articulation des règles qui constituent « son droit ». À l'origine de cette difficulté : la mécanique de l'article L. 227-1, alinéa 3, du Code de commerce N° Lexbase : L7429MHM, qui commande de transposer aux SAS, à l'exclusion de certaines d'entre elles, les règles concernant les SA, le tout sous réserve d'un test de compatibilité. Cette démarche qui n'est pas spécifique aux SAS, présente toutefois des enjeux pratiques et théoriques particuliers, en raison de l'importance des SAS dans le paysage français des sociétés. La présente étude revient sur cette mécanique de la compatibilité, avant d'en mesurer les manifestions sur le droit des SAS.

    3. La collégialité dans la SAS (par Laurent Godon, Professeur à l'Université de Versailles Paris Saclay) N° Lexbase : N7881BZW

    La collégialité dans la SAS ouvre un champ de réflexion très instructif mettant en évidence toute l’originalité de l’organisation juridique de cette forme sociale. Fondée sur la liberté statutaire, l’architecture de la société n’a manifestement pas été pensée autour de la présence d’organes collégiaux impératifs, contrairement à celle des sociétés anonymes. En fait, ce n’est que lorsque la SAS revêt un caractère pluripersonnel apparaît un collège des associés, organisé autour de la notion de décisions collectives déconnectée du concept d’assemblée générale. Quant aux organes de direction, on peut affirmer, sans risque d’être excessif, que la SAS désintègre la collégialité puisque des dirigeants réunis en collège n’existent qu’à la condition d’une prévision des statuts en ce sens, ce qui constitue une autre originalité pour une société classée parmi les sociétés par actions.

    4. Trente ans de représentation de la SAS (par Marie Rakotovahiny, Maître de conférences - HDR droit privé, Université Toulouse III) N° Lexbase : N7849BZQ

    Généralement, les fonctions de représentation et de direction sont assumées par une seule et même personne dans les sociétés. Dans la SAS, la représentation de la société à l’égard des tiers est assurée par la désignation obligatoire d’un président. L’organisation de sa direction est laissée à la discrétion des statuts. La dissociation entre la fonction de représentation et de direction la singularise. En dehors de cette désignation légale obligatoire, le régime de la représentation de la SAS relève de la liberté statutaire. En la matière, la jurisprudence a largement contribué à le définir et le façonner, même si des aspects de son régime sont encore inexplorés.

    5. Le régime social des dirigeants de la SAS (Jean-Michel Lattes, Maître de conférences en droit privé à l’Université Toulouse 1 Capitole) N° Lexbase : N7843BZI

    La loi du 3 janvier 1994 mettant en place la société par actions simplifiées (SAS) organise le cumul des fonctions dirigeantes avec des fonctions de salariés ou d’assimilés salariés. Il convient d’en mesurer les enjeux par comparaison avec d’autres formes de sociétés excluant ce type de cumuls. La détermination des principaux dirigeants de la SAS (président, directeur général,…) permet d’évaluer l’existence ou non de droits sociaux rattachés à l’exercice de leurs fonctions respectives. Des mécanismes de compensation ouvrent la possibilité de compléter ce dispositif.

    6. Plaidoyer pour un régime fiscal spécifique de la SAS (par Sébastien Jambort, Maître de conférences - HDR en droit privé et sciences criminelles Université de Toulouse - UPS - LERASS) N° Lexbase : N7837BZB

    Après 30 ans d’existence et d’évolutions de la SAS, le droit fiscal doit montrer de l’intérêt pour cette forme sociale qui connaît un grand succès. Il n’est plus possible de se satisfaire de l’article 1655 quinquies du Code général des impôts N° Lexbase : L1916HMW disposant que « Pour l’application du présent code et de ses annexes, la société par actions simplifiée est assimilée à une société anonyme ». La SAS étant devenue protéiforme, sa soumission de plein droit à l’impôt sur les sociétés peut être discutée. Par ailleurs, il n’est pas satisfaisant que les dirigeants de SAS soient assimilés du point de vue fiscal aux dirigeants de SA. En effet, la SAS peut comporter une variété de dirigeants qui n’est pas réductible aux dirigeants de la SA.

    7. SARL ou SAS : quel choix opérer ? (Jean-Louis Navarro, Maître de conférences à l’Université Lumière Lyon 2) N° Lexbase : N7836BZA

    Lorsqu’on compare la SARL et la SAS, il faut immédiatement relever les points communs qui sont tout de même nombreux, de ceux qui différent, qui sont tout aussi nombreux. C'est évidemment ces derniers qui expliquent peut-être l’engouement de la SAS face à la SARL et ceci depuis déjà plusieurs années. Le choix entre la SARL et la SAS devra être conditionné par l’importance que les fondateurs font accorder à ces divergences centrées sur la direction de ces sociétés, les droits des associés, les apports possibles, la cession de titres et les activités réalisables. Bien que la SAS gagne chaque année un peu plus les faveurs des entrepreneurs, le choix entre SAS et SARL doit principalement se faire à la lumière de la situation personnelle et des objectifs recherchés par les fondateurs de la société.

     

    [1] C. com., art. L. 227-2  N° Lexbase : L0097LTR ; J. Paillusseau, La nouvelle société par actions simplifiée. Le big bang du droit des sociétés !, D., 1999, p. 333.

    [2] Y. Guyon, Présentation générale de la société par actions simplifiée, Rev. soc., 1994, p. 207.

    [3] J. Honorat, La société par actions simplifiée ou la résurgence de l’élément contractuel en droit français des sociétés, LPA 16 août 1996, n° 99, p. 4.

    [4] J.-F. Hamelin, Le succès de la SAS, un défi pour le droit commun !, Dr. sociétés, mai 2022, repère 5.

    [5] P.-L. Périn, Direction et représentation de la SAS : état des lieux après la loi de sécurité financière, JCP E, 2004, n° 10, 332, note 2.

    [6] P.-L. Périn, art. préc.

    [7] P.-L. Périn, Statistiques des formes de sociétés commerciales en France : la SAS dépasse la SARL !, RTDF 2016, n° 1, p. 35 ; J. Heinich, La SAS plus fort que la SARL !, Dr. sociétés, juin 2017, repère 6.

    [8] QE n° 19358 de M. Dominique Potier, JOANQ 7 mai 2019 , réponse publ. 13 août 2019 p. 7496, 15ème législature N° Lexbase : L2293LSQ, Flash Defrénois 23 septembre 2019, n° 38, p. 9.

    [9] Ph. Merle, Sociétés commerciales, n° 2, Dalloz, 2017/2018, 21ème éd.

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