Jurisprudence : CAA Paris, 3e, 06-05-2022, n° 22PA00554

CAA Paris, 3e, 06-05-2022, n° 22PA00554

A3846749

Référence

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Références

Cour administrative d'appel de Paris

N° 22PA00554

3ème chambre
lecture du 06 mai 2022
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme L K, Mme E U, Mme D I, Mme Q N, Mme T O, Mme A S, Mme M H, Mme F G, Mme P C ont demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 16 juillet 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a validé l'accord collectif majoritaire conclu entre, d'une part, la fédération française de football et, d'autre part, le SNAAF-CFDT, fixant le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi.

Par un jugement n° 2119397/3-3 du 10 décembre 2021, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 16 juillet 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a validé l'accord collectif majoritaire conclu entre, d'une part, la fédération française de football et, d'autre part, le SNAAF-CFDT, fixant le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée le 7 février 2022 sous le n° 22PA00554, un mémoire en réplique, enregistré le 22 mars 2022, et un nouveau mémoire, enregistré le 5 avril 2022, la fédération française de football (F.F.F.), représentée par Me Boulanger, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2119397/3-3 du 10 décembre 2021 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a jugé que la décision litigieuse de validation était entachée de nullité en ce que la directrice générale de la F.F.F. n'avait pas le pouvoir de signer l'accord collectif majoritaire du

13 juillet 2021 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mmes U, I, N, O, K, S, H, G et C devant le tribunal administratif de Paris ;

3°) de mettre à la charge des intimés le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a jugé que la directrice générale de la F.F.F. ne détenait pas le pouvoir requis pour signer l'accord collectif majoritaire du 13 juillet 2021 relatif au contenu du plan de sauvegarde de l'emploi ; en effet, dès lors que le code du travail ne donne aucune définition de la délégation patronale, il convient de se référer aux dispositions statutaires pour déterminer les personnes susceptibles de représenter l'employeur ; le directeur général dispose, en vertu des textes fédéraux de la F.F.F., d'une délégation permanente, du pouvoir de diriger l'administration fédérale de la F.F.F. et a tout pouvoir s'agissant de la gestion du personnel ; la seule limitation de signature du directeur général prévue par les textes fédéraux porte uniquement sur les

" engagements à valeur contractuelle dépassant un montant fixé par le comité exécutif ", cette exception visant uniquement les dépenses non prévues au budget, et qui, en outre, excéderaient la somme de 300 000 euros ; or, lors de la réunion du 4 juin 2021, l'assemblée fédérale de la F.F.F. a validé le budget prévisionnel 2021/2022 intégrant une économie de masse salariale de 2 millions d'euros correspondant aux suppressions de postes envisagées dans le cadre du projet de réorganisation contenant plan de sauvegarde de l'emploi ; les pièces complémentaires produites aux débats par la F.F.F. qui l'établissaient n'ont pas été prises en considération par le tribunal administratif ; par ailleurs, la directrice générale ou ses délégataires ont toujours été les personnes présidant les institutions représentatives du personnel et signataires des accords collectifs, dans le cadre des négociations avec les organisations syndicales représentatives, sans que les partenaires sociaux n'aient, par le passé, contesté la qualité de signataire de ceux-ci, quand bien même certains actes dépassaient pourtant la prétendue limite des 300 000 euros ; à titre subsidiaire, le comité exécutif de la F.F.F. a été précisément informé dès le 20 mai 2021 qu'un projet de réorganisation de la F.F.F. était en cours, la Haute autorité du football, qui exerce un contrôle a posteriori, a été informée, quant à elle, du projet de plan de sauvegarde de l'emploi le 4 juin 2021, avant même le vote du budget prévisionnel par l'assemblée fédérale au cours de la même journée, ainsi que le

22 juin 2021, et le comité exécutif, enfin, a été informé le jour même de la signature de l'accord collectif, le 13 juillet 2021, de l'issue des négociations et du contenu précis du plan de sauvegarde de l'emploi négocié en résultant ; il a ainsi été informé, préalablement à la signature de l'accord collectif et préalablement à la demande de validation de l'accord collectif contenant plan de sauvegarde de l'emploi auprès de l'autorité administrative, qui est intervenue le 15 juillet 2021 ; en outre, le comité exécutif a confirmé expressément la ratification de l'accord collectif contenant plan de sauvegarde de l'emploi lors de sa réunion du 27 janvier 2022 ; à titre également subsidiaire, la signature de l'accord collectif majoritaire portant plan de sauvegarde de l'emploi a été ratifiée par les instances collégiales de direction de la F.F.F., en application des dispositions de l'article 1156 du code civil, modifiées par l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, aux termes desquelles, dans l'hypothèse d'un dépassement de pouvoir ou d'un défaut de pouvoir avéré émanant du signataire d'un acte, aucune nullité ni opposabilité ne peut être valablement soulevée par quiconque dès lors que le représenté a ratifié l'acte juridique litigieux ; or, comme il a été dit, le comité exécutif a été informé des mesures précises du plan de sauvegarde de l'emploi contenu dans l'accord collectif majoritaire à l'issue de la procédure de négociation et préalablement à sa signature, et les comptes relatifs à l'exercice 2020/2021, clos au 30 juin 2021, qui prévoyaient une dépense liée au plan de sauvegarde de l'emploi de 3,4 millions d'euros, ont également fait l'objet d'une délibération favorable du comité exécutif le 14 octobre 2021 et ensuite, d'une validation par l'assemblée fédérale lors d'une réunion du 11 décembre 2021 ; enfin, si l'administration, dans le cadre de son contrôle d'un accord collectif majoritaire, a l'obligation de s'assurer de la qualité des signataires de l'accord, le seul moyen tiré de ce qu'elle n'aurait pas procédé à cette vérification est inopérant ;

- c'est à juste titre que la juridiction de première instance a écarté les moyens des intimées qui avaient contesté la régularité de la procédure d'information / consultation du comité social et économique, la loyauté de la négociation de l'accord collectif, la suffisance du plan de sauvegarde de l'emploi, l'objectivité du découpage des catégories professionnelles contenues dans l'accord collectif, qui n'est pas discriminatoire à l'égard de certaines d'entre elles, et l'absence invoquée de consultation préalable de la Haute autorité du football et du comité exécutif.

Par un mémoire, enregistré le 21 février 2022, et un nouveau mémoire, enregistré le

21 mars 2022, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion conclut aux mêmes fins que la requête et à l'annulation du jugement n° 2119397/3-3 du 10 décembre 2021 du tribunal administratif de Paris.

Elle soutient que :

- en annulant la décision de validation contestée au motif que le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France n'aurait pas dû valider l'accord collectif dès lors que " la directrice générale de la F.F.F. ne pouvait pas signer l'accord majoritaire, étant dépourvue de qualité pour représenter l'employeur ", le tribunal administratif a commis une erreur de droit dès lors que, par une jurisprudence ancienne et constante, codifiée en 2016 à l'article 1156 du code civil, un éventuel dépassement par le mandataire des pouvoirs qui lui sont délégués peut être couvert par la ratification du mandant, ce qui a été le cas en l'espèce ; le tribunal administratif a également fait une lecture erronée des textes fédéraux régissant le fonctionnement de la F.F.F., qui donnent à la directrice générale de la F.F.F., à l'exclusion du comité exécutif, le pouvoir de mener les négociations et de signer des accords collectifs ; en outre, s'agissant de la limite d'engagement à 300 000 euros, seuil au-delà duquel l'autorisation du comité exécutif est requise, le tribunal administratif a fait une mauvaise lecture du procès-verbal du comité exécutif du 7 septembre 2017, dès lors que cette limite ne vise que la signature des contrats commerciaux et non les engagements pris pour la gestion du personnel, dès lors qu'en l'espèce le coût du plan de sauvegarde de l'emploi en cause avait été inclus dans le budget prévisionnel 2021-2022 de de la F.F.F., et dès lors que le comité exécutif, informé du plan de sauvegarde de l'emploi lors de sa réunion du 13 juillet 2021, ne s'est pas opposé à la signature de l'accord collectif ; en outre, il n'appartient pas à l'administration, saisie en application de l'article L. 1233-57-2 du code du travail, de contrôler la régularité des procédures internes de la F.F.F. ; en l'espèce, elle a bien contrôlé la régularité de la signature de l'accord collectif par la F.F.F., ainsi que cela ressort de l'un des motifs de la décision de validation ;

- s'agissant des autres moyens soulevés par les salariées en première instance, le moyen tenant à l'irrégularité des négociations de l'accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi doit être écarté, la circonstance, à la supposer établie, que la direction de la F.F.F. aurait menacé les représentants du comité social et économique de retirer les avantages complémentaires obtenus dans le cadre des négociations de l'accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi afin d'obtenir la signature de l'accord par le délégué syndical n'étant pas de nature à vicier ces négociations, comme l'a estimé le tribunal administratif ;

- la procédure d'information et de consultation du comité social et économique n'a pas été entachée d'irrégularité, le délai de quatre jours entre la communication aux membres des informations (les " Livre I " et " Livre II ") et la première réunion du comité étant suffisant, comme l'a constaté le tribunal administratif, et le comité social et économique ayant été informé, durant la durée de la procédure, de manière telle qu'il a pu rendre son avis, le 13 juillet 2021, en toute connaissance de cause ;

- il n'appartenait pas à l'administration de contrôler le motif économique du licenciement, qui relève de la seule compétence du juge judiciaire ;

- ainsi que l'a constaté à bon droit le tribunal administratif, s'agissant de la définition des catégories professionnelles, les parties à l'accord collectif ont choisi de ne pas se référer au référentiel des métiers de la F.F.F., ce qu'elles pouvaient faire sans méconnaître l'article

L. 1233-57-2 du code du travail, quand bien même certaines de ces catégories ne comprendraient qu'un unique salarié ;

- le caractère discriminatoire des catégories professionnelles définies par l'accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi de la F.F.F. n'est pas démontré ;

- lorsque l'administration valide un accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi, il ne lui appartient pas de contrôler le caractère suffisant des mesures prévues par ce plan ; il est souligné que l'administration a bien contrôlé la présence dans l'accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi de la F.F.F. des mesures prévues aux articles L. 1233-61 et L. 1233-63 du code du travail.

Par un mémoire en défense et en appel incident, enregistré le 4 mars 2022, et un nouveau mémoire, enregistré le 31 mars 2022, Mme E U, Mme D I, Mme Q N, Mme T O, Mme L K, Mme A S,

Mme M H, Mme F G et Mme P C, représentées par

Me Chevret, demandent à la Cour :

1°) de rejeter la requête de la F.F.F. ;

A cette fin, elles soutiennent que les moyens soulevés par la F.F.F. ne sont pas fondés.

2°) par la voie de l'appel incident, d'annuler le jugement du 10 décembre 2021 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il n'a pas fait droit à tous leurs moyens d'annulation ;

A cette fin, elles soutiennent que :

- à titre liminaire, les difficultés économiques alléguées par la F.F.F. ne sont pas établies ; en effet, le budget au 30 juin 2021 est globalement à l'équilibre ;

- à titre liminaire toujours, l'absence de signature d'un accord de méthode tient au fait que celui qui avait été proposé portait atteinte aux prérogatives du comité social et économique ;

- à titre liminaire enfin, les négociations ne se sont pas déroulées comme elles l'auraient dû ;

- la procédure d'information et de consultation du comité social et économique a été entachée d'irrégularité, d'une part en ce que la remise tardive des " Livres " I et II du plan de sauvegarde de l'emploi n'a pas permis aux membres du comité social et économique de disposer d'un délai suffisant pour en prendre connaissance avant la première réunion que, de plus, la F.F.F. a refusé de décaler, d'autre part en ce que l'ensemble de la procédure d'information et de consultation du comité a été fondé sur un motif justificatif (les difficultés économiques) qui n'était pas le motif réel pour lequel la réduction des effectifs était envisagée (la sauvegarde de la compétitivité de la fédération) ;

- l'administration ne pouvait décider de valider l'accord collectif vingt-quatre heures à peine après la demande présentée par la direction de la F.F.F. sans méconnaître les dispositions précitées du code du travail, en particulier celles de son article L. 1233-57-2 ; de plus, cet empressement confirme l'impossibilité d'un réel examen contradictoire ;

- la décision contestée doit être annulée du fait de l'absence de loyauté de la direction de la F.F.F. au cours des négociations ;

- la procédure d'élaboration du plan de sauvegarde de l'emploi a méconnu les stipulations statutaires et réglementaires de la F.F.F., le comité exécutif n'étant pas informé du projet en cours et n'ayant pas délibéré sur lui, et la Haute autorité du football n'ayant pas été en mesure d'exercer ses prérogatives ;

- les catégories professionnelles définies par l'accord collectif présentent un caractère discriminatoire, qui est confirmé par la situation individuelle de plusieurs salariées ;

- le plan de sauvegarde de l'emploi est insuffisant, le montant alloué étant sous-dimensionné par rapport aux capacités financières de la F.F.F.

3°) de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement la somme de 3 000 euros à chacune d'entre elles.

II. Par une requête, enregistrée le 8 février 2022 sous le n° 22PA00561, et un mémoire en réplique, enregistré le 21 mars 2022, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2119397/3-3 du 10 décembre 2021 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mmes U, I, N, O, K, S, H, G et C devant le tribunal administratif de Paris.

Elle soutient que :

- en annulant la décision de validation contestée au motif que le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France n'aurait pas dû valider l'accord collectif dès lors que " la directrice générale de la F.F.F. ne pouvait pas signer l'accord majoritaire, étant dépourvue de qualité pour représenter l'employeur ", le tribunal administratif a commis une erreur de droit dès lors que, aux termes d'une jurisprudence ancienne et constante, codifiée en 2016 à l'article 1156 du code civil, un éventuel dépassement par le mandataire des pouvoirs qui lui sont délégués peut être couvert par la ratification du mandant, ce qui a été le cas en l'espèce ; le tribunal administratif a également fait une lecture erronée des textes fédéraux régissant le fonctionnement de la F.F.F., qui donnent à la directrice générale de la F.F.F., à l'exclusion du comité exécutif, le pouvoir de mener les négociations et de signer des accords collectifs ; en outre, s'agissant de la limite d'engagement à 300 000 euros, seuil au-delà duquel l'autorisation du comité exécutif est requise, le tribunal administratif a fait une mauvaise lecture du procès-verbal du comité exécutif du 7 septembre 2017, dès lors que cette limite ne vise que la signature des contrats commerciaux et non les engagements pris pour la gestion du personnel, dès lors qu'en l'espèce le coût du plan de sauvegarde de l'emploi en cause avait été inclus dans le budget prévisionnel 2021-2022 de de la F.F.F., et dès lors que le comité exécutif, informé du plan de sauvegarde de l'emploi lors de sa réunion du 13 juillet 2021, ne s'est pas opposé à la signature de l'accord collectif ; en outre, il n'appartient pas à l'administration, saisie en application de l'article

L. 1233-57-2 du code du travail, de contrôler la régularité des procédures internes de la F.F.F. ; en l'espèce, elle a bien contrôlé la régularité de la signature de l'accord collectif par l'employeur, la F.F.F., ainsi que cela ressort de l'un des motifs de la décision de validation ;

- s'agissant des autres moyens soulevés par les salariées en première instance, le moyen tenant à l'irrégularité des négociations de l'accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi doit être écarté, la circonstance, à la supposer établi, que la direction de la F.F.F. aurait menacé les représentants du comité social et économique de retirer les avantages complémentaires obtenus dans le cadre des négociations de l'accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi afin d'obtenir la signature de l'accord par le délégué syndical n'étant pas de nature à vicier ces négociations, comme l'a estimé le tribunal administratif ;

- la procédure d'information et de consultation du comité social et économique n'a pas été entachée d'irrégularité, le délai de quatre jours entre la communication aux membres des informations (les " Livre I " et " Livre II ") et la première réunion du comité étant suffisant, comme l'a constaté le tribunal administratif, et le comité social et économique ayant été informé, durant la durée de la procédure, de manière telle qu'il a pu rendre son avis, le 13 juillet 2021, en toute connaissance de cause ;

- il n'appartenait pas à l'administration de contrôler le motif économique du licenciement, qui relève de la seule compétence du juge judiciaire ;

- ainsi que l'a constaté à bon droit le tribunal administratif, s'agissant de la définition des catégories professionnelles, les parties à l'accord collectif ont choisi de ne pas se référer au référentiel des métiers de la F.F.F., ce qu'elles pouvaient faire sans méconnaître l'article

L. 1233-57-2 du code du travail, quand bien même certaines de ces catégories ne comprendraient qu'un unique salarié ;

- le caractère discriminatoire des catégories professionnelles définies par l'accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi de la F.F.F. n'est pas démontré ;

- lorsque l'administration valide un accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi, il ne lui appartient pas de contrôler le caractère suffisant des mesures prévues par ce plan ; il est souligné que l'administration a bien contrôlé la présence dans l'accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi de la F.F.F. des mesures prévues aux articles L. 1233-61 et L. 1233-63 du code du travail.

Par un mémoire en défense et en appel incident, enregistré le 4 mars 2022, et un nouveau mémoire, enregistré le 31 mars 2022, Mme E U, Mme D I, Mme Q N, Mme T O, Mme L K, Mme A S,

Mme M H, Mme F G et Mme P C, représentées par

Me Chevret, demandent à la Cour :

1°) de rejeter la requête ;

A cette fin, elles soutiennent que les moyens soulevés par la Fédération française de football ne sont pas fondés.

2°) par la voie de l'appel incident, d'annuler le jugement du 10 décembre 2021 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il n'a pas fait droit à tous leurs moyens d'annulation ;

A cette fin, elles soutiennent que :

- à titre liminaire, les difficultés économiques alléguées par la F.F.F. ne sont pas établies ; en effet, le budget au 30 juin 2021 est globalement à l'équilibre ;

- à titre liminaire toujours, l'absence de signature d'un accord de méthode tient au fait que celui qui avait été proposé portait atteinte aux prérogatives du comité social et économique ;

- à titre liminaire enfin, les négociations ne se sont pas déroulées comme elles l'auraient dû ;

- la procédure d'information et de consultation du comité social et économique a été entachée d'irrégularité, d'une part en ce que la remise tardive des " Livres " I et II du plan de sauvegarde de l'emploi n'a pas permis aux membres du comité social et économique de disposer d'un délai suffisant pour en prendre connaissance avant la première réunion que, de plus, la F.F.F. a refusé de décaler, d'autre part en ce que l'ensemble de la procédure d'information et de consultation du comité a été fondé sur un motif (les difficultés économiques) qui n'était pas le motif réel pour lequel la réduction des effectifs était envisagée (la sauvegarde de la compétitivité de la fédération) ;

- l'administration ne pouvait décider de valider l'accord collectif vingt-quatre heures à peine après la demande présentée par la direction de la F.F.F. sans méconnaître les dispositions précitées du code du travail, en particulier celles de son article L. 1233-57-2 ; de plus, cet empressement confirme l'impossibilité d'un réel examen contradictoire ;

- la décision contestée doit être annulée du fait de l'absence de loyauté de la direction de la F.F.F. au cours des négociations ;

- la procédure d'élaboration du plan de sauvegarde de l'emploi a méconnu les stipulations statutaires et réglementaires de la F.F.F., le comité exécutif n'étant pas informé du projet en cours et n'ayant pas délibéré sur lui, et la Haute autorité du football n'ayant pas été en mesure d'exercer ses prérogatives ;

- les catégories professionnelles définies par l'accord collectif présentent un caractère discriminatoire, qui est confirmé par la situation individuelle de plusieurs salariées ;

- le plan de sauvegarde de l'emploi est insuffisant, le montant alloué étant sous-dimensionné par rapport aux capacités financières de la F.F.F.

3°) de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement de la somme de 3 000 euros à chacune d'entre elles.

Par un mémoire, enregistré le 24 mars 2022, et un nouveau mémoire, enregistré le

5 avril 2022, la fédération française de football (F.F.F.), représentée par Me Boulanger, conclut aux mêmes fins que la requête, à l'annulation du jugement n° 2119397/3-3 du 10 décembre 2021 du tribunal administratif de Paris et à ce que les intimées soient condamnées à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a jugé que la directrice générale de la F.F.F. ne détenait pas le pouvoir requis pour signer l'accord collectif majoritaire du 13 juillet 2021 relatif au contenu du plan de sauvegarde de l'emploi ; en effet, dès lors que le code du travail ne donne aucune définition de la délégation patronale, il convient de se référer aux dispositions statutaires pour déterminer les personnes susceptibles de représenter l'employeur ; le directeur général dispose, en vertu des textes fédéraux de la F.F.F. et d'une délégation permanente, du pouvoir de diriger l'administration fédérale de la F.F.F. et a tout pouvoir s'agissant de la gestion du personnel ; la seule limitation de signature du directeur général prévue par les textes fédéraux porte uniquement sur les

" engagements à valeur contractuelle dépassant un montant fixé par le comité exécutif ", cette exception visant uniquement les dépenses non prévues au budget, et qui, en outre, excéderaient la somme de 300 000 euros ; or, lors de la réunion du 4 juin 2021, l'assemblée fédérale de la F.F.F. a validé le budget prévisionnel 2021/2022 intégrant une économie de masse salariale de 2 millions d'euros correspondant aux suppressions de postes envisagées dans le cadre du projet de réorganisation contenant plan de sauvegarde de l'emploi ; les pièces complémentaires produites aux débats par la F.F.F. qui l'établissait n'ont pas été prises en considération par le tribunal administratif ; par ailleurs, la directrice générale ou ses délégataires ont toujours été les personnes présidant les institutions représentatives du personnel et signataires des accords collectifs, dans le cadre des négociations avec les organisations syndicales représentatives, sans que les partenaires sociaux n'aient, par le passé, contesté la qualité de signataire de ceux-ci, quand bien même certains actes dépassaient pourtant la prétendue limite des 300 000 euros ; à titre subsidiaire, le comité exécutif de la F.F.F. a été précisément informé dès le 20 mai 2021 qu'un projet de réorganisation de la F.F.F. était en cours, la Haute autorité du football, qui exerce un contrôle a posteriori, a été informée, quant à elle, du projet de plan de sauvegarde de l'emploi le 4 juin 2021, avant même le vote du budget prévisionnel par l'assemblée fédérale au cours de la même journée, ainsi que le

22 juin 2021, et le comité exécutif, enfin, a été le jour même de la signature de l'accord collectif, le 13 juillet 2021, de l'issue des négociations et du contenu précis du plan de sauvegarde de l'emploi négocié en résultant ; il a ainsi été informé, préalablement à la signature de l'accord collectif et préalablement à la demande de validation de l'accord collectif contenant plan de sauvegarde de l'emploi auprès de l'autorité administrative, qui est intervenue le 15 juillet 2021 ; en outre, le comité exécutif a confirmé expressément la ratification de l'accord collectif contenant plan de sauvegarde de l'emploi lors de sa réunion du 27 janvier 2022 ; à titre également subsidiaire, la signature de l'accord collectif majoritaire portant plan de sauvegarde de l'emploi a été ratifiée par les instances collégiales de direction de la F.F.F., en application des dispositions de l'article 1156 du code civil, modifiées par l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, aux termes desquelles, dans l'hypothèse d'un dépassement de pouvoir ou d'un défaut de pouvoir avéré émanant du signataire d'un acte, aucune nullité ni opposabilité ne peut être valablement soulevée par quiconque dès lors que le représenté a ratifié l'acte juridique litigieux ; or, comme il a été dit, le comité exécutif a été informé des mesures précises du plan de sauvegarde de l'emploi contenu dans l'accord collectif majoritaire à l'issue de la procédure de négociation et préalablement à sa signature, et les comptes relatifs à l'exercice 2020/2021, clos au 30 juin 2021, qui prévoyaient une dépense liée au plan de sauvegarde de l'emploi de 3,4 millions d'euros, ont également fait l'objet d'une délibération favorable du comité exécutif le 14 octobre 2021 et ensuite, d'une validation par l'assemblée fédérale lors d'une réunion du 11 décembre 2021 ; enfin, si l'administration, dans le cadre de son contrôle d'un accord collectif majoritaire, a l'obligation de s'assurer de la qualité des signataires de l'accord, le seul moyen tiré de ce qu'elle n'aurait pas procédé à cette vérification est inopérant ;

- c'est à juste titre que la juridiction de première instance a écarté les moyens des intimées qui avaient contesté la régularité de la procédure d'information / consultation du comité social et économique, la loyauté de la négociation de l'accord collectif, la suffisance du plan de sauvegarde de l'emploi, l'objectivité du découpage des catégories professionnelles contenues dans l'accord collectif, qui n'est pas discriminatoire à l'égard de certaines d'entre elles, et l'absence de consultation préalable de la Haute autorité du football et du comité exécutif.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B,

- les conclusions de Mme Pena, rapporteure publique,

- les observations de Me Wintrebert, avocat de la fédération française de football, et de

Me Casenave, avocat de Mme C, de Mme U, de Mme I, de Mme N, de Mme O, de Mme K, de Mme S, de Mme H et de Mme G.

Considérant ce qui suit :

1. La fédération française de football (F.F.F.), a conclu, le 13 juillet 2021 avec le syndicat SNAAF-CFDT, organisation syndicale représentative au sein de la F.F.F., un accord collectif majoritaire, en application des dispositions de l'article L. 1233-24-1 du code du travail, relatif au contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi. Par une décision du 16 juillet 2021, le directeur régional de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a validé cet accord. Par le jugement du 10 décembre 2021 dont il est relevé appel, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 16 juillet 2021, au motif unique de l'absence de qualité pour représenter l'employeur de la directrice générale de la F.F.F., signataire de cet accord collectif, les autres moyens soulevés par les requérantes de première instance ayant été écartés.

2. La requête de la fédération française de football, enregistrée sous le n° 22PA00554, et la requête de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, enregistrée sous le n° 22PA00561, sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a donc lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la requête n° 22PA00554 :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article L. 1233-61 du code du travail : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. () ". Aux termes de l'article L. 1233-24-1 du même code : " Dans les entreprises de cinquante salariés et plus, un accord collectif peut déterminer le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à

L. 1233-63 ainsi que les modalités de consultation du comité social et économique et de mise en œuvre des licenciements. Cet accord est signé par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations reconnues représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires au comité social et économique, quel que soit le nombre de votants, ou par le conseil d'entreprise dans les conditions prévues à l'article L. 2321-9. L'administration est informée sans délai de l'ouverture d'une négociation en vue de l'accord précité. ". Enfin, aux termes de l'article L. 1233-57-2 : " L'autorité administrative valide l'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 dès lors qu'elle s'est assurée de : / 1° Sa conformité aux articles L. 1233-24-1 à L. 1233-24-3 () ". Il résulte de ces dispositions que, saisie d'un accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi, l'administration ne peut légalement le valider s'il n'a pas été régulièrement signé par des personnes ayant qualité pour engager, d'une part l'employeur et, d'autre part, une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés en faveur des organisations représentatives lors du premier tour des dernières élections professionnelles au sein de l'entreprise.

4. De première part, il résulte de ce qui vient d'être dit, d'une part qu'il incombe à l'administration, saisie d'une demande de validation d'un accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi, de s'assurer de la qualité de ses signataires et, d'autre part, que le moyen tiré de l'absence de qualité des signataires d'un tel accord peut être, le cas échéant, utilement soulevé devant le juge de l'excès de pouvoir saisi de la légalité de la décision de validation. Toutefois, le moyen tiré, non de l'absence de qualité des signataires, mais seulement de ce que l'administration n'aurait pas procédé à la vérification de cette qualité, est inopérant.

5. De seconde part, aux termes de l'article 1156 du code civil : " L'acte accompli par un représentant sans pouvoir ou au-delà de ses pouvoirs est inopposable au représenté, sauf si le tiers contractant a légitimement cru en la réalité des pouvoirs du représentant, notamment en raison du comportement ou des déclarations du représenté. / Lorsqu'il ignorait que l'acte était accompli par un représentant sans pouvoir ou au-delà de ses pouvoirs, le tiers contractant peut en invoquer la nullité. / L'inopposabilité comme la nullité de l'acte ne peuvent plus être invoquées dès lors que le représenté l'a ratifié. " et, aux termes de l'article 1178 du même code : " Un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul. La nullité doit être prononcée par le juge, à moins que les parties ne la constatent d'un commun accord. / () ".

6. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la F.F.F. est une association régie par la loi du 1er juillet 1901 dont les textes fédéraux institutifs sont les statuts, le règlement intérieur et le règlement financier, qui ont valeur de documents statutaires car ayant été adoptés par délibération de l'assemblée fédérale en vertu des stipulations de l'article 11 des statuts de la fédération. D'une part, aux termes de l'article 18 des statuts : " 1. Le Comité Exécutif administre, dirige et gère la Fédération. Il suit l'exécution du budget. Il exerce l'ensemble des attributions que les présents Statuts n'attribuent pas à un autre organe de la Fédération. (.) ". Aux termes de l'article 2 de ce règlement financier : " Le Comité Exécutif détient les pouvoirs de direction et assure l'administration de la Fédération. II suit l'exécution du budget. () II est compétent pour traiter les problèmes relevant du contrôle économique de la Fédération. () Il délègue au Directeur

Général : () / - L'administration générale de la Fédération. ". D'autre part, aux termes de l'article 6 du règlement financier : " () Le Directeur Général assume la gestion du personnel en respectant le budget préparé en concertation avec le Trésorier Général et voté par l'Assemblée Fédérale. A ce titre, il dirige l'ensemble du personnel de la Fédération. Il a tout pouvoir pour embaucher, licencier, définir la politique salariale. " et, aux termes de l'article 11 du règlement intérieur : " 1. Le Directeur Général ou Directeur Général Délégué dirige l'Administration Fédérale (dénommé

" Directeur Général " dans toutes les dispositions fédérales statutaires et réglementaires). Il est responsable devant le Comité Exécutif de la gestion du personnel de la Fédération. 2. Il assiste le Président dans la préparation et l'exécution des décisions du Comité Exécutif. 3. Il propose au Comité Exécutif, puis met en œuvre, les mesures d'organisation, de gestion et de contrôle qui visent à assurer le fonctionnement continu et efficace de l'administration fédérale. () 5. En application de l'article 22 des Statuts, le Directeur Général reçoit délégation générale pour signer tous les documents qui concourent au fonctionnement courant de la Fédération, à l'exception des engagements à valeur contractuelle dépassant un montant fixé par le Comité Exécutif. En revanche, il ne pourra en aucun cas signer de paiements. ". Aux termes de l'article 22 des Statuts : " Il [le Président] peut donner délégation dans les conditions qui sont fixées par le Règlement Intérieur. ". Enfin, aux termes du compte rendu du comité exécutif du 7 septembre 2017 : " Le COMEX fixe les seuils de délégation d'engagement de dépense dans la limite du budget alloué, comme suit : ()

+ 300 000 : comité exécutif. Les dépenses non prévues au budget sont soumises à l'autorisation de la DG jusqu'à 300 000 . Au-delà, l'autorisation du COMEX est requise ".

7. D'une part, il résulte de ce qui précède que le comité exécutif, aux termes de l'article 18 des statuts, administre, dirige et gère la F.F.F., et qu'il est l'organe compétent par défaut si les textes fédéraux ne donnent pas attribution à un autre organe. Par ailleurs, il exerce le contrôle économique de la Fédération aux termes de l'article 2 du règlement financier et suit l'exécution du budget. S'il résulte de l'article 6 du règlement financier que le directeur général peut notamment licencier, la négociation et la signature d'un accord collectif majoritaire portant plan de sauvegarde de l'emploi ne peuvent être assimilés à de simples licenciements, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges. Par ailleurs, un tel accord, de par sa nature exceptionnelle, ne peut être analysé comme un acte qui concourt au fonctionnement courant de la Fédération au sens de l'article 11 du règlement intérieur et de l'article 22 du règlement intérieur, alors de surcroît que son coût a été évalué à 2,8 millions d'euros par le rapport de l'expert J mandaté par le comité social et économique, et que la combinaison de l'article 11 du règlement intérieur et de la règle adoptée par le comité exécutif du 7 septembre 2017 limite la délégation octroyée au directeur général pour engager contractuellement la F.F.F. à la somme de 300 000 euros.

8. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que la règle précitée fixée par le comité exécutif du 7 septembre 2017 requérant l'autorisation du comité exécutif pour les dépenses non prévues au budget d'un montant supérieur à 300 000 euros se limiterait à préciser les modalités d'application de l'article 15 du règlement financier, selon lequel " Dans la limite d'un montant maximum fixé par le Comité Exécutif, le Président ou le Directeur Général sont autorisés à signer, sans formalité particulière, les contrats ou engagements à valeur contractuelle nécessaires au fonctionnement régulier de la Fédération. / Au-delà de ce seuil, la signature ne peut intervenir qu'après autorisation donnée par le Comité Exécutif dans les conditions suivantes : / le dossier est inscrit à l'ordre du jour du Comité Exécutif ; / le projet de contrat est communiqué préalablement aux membres du Comité Exécutif, accompagné de l'avis écrit des services fédéraux en charge des finances et des affaires juridiques dans tous les cas, ainsi que de l'avis des services fédéraux en charge du marketing dans le cas des contrats de sponsoring ; / la décision du Comité Exécutif est portée au procès-verbal. / En cas de force majeure ou d'urgence dûment motivée, le Président ou le Directeur Général peuvent signer sans l'autorisation préalable du Comité, à la double condition qu'ils en informent simultanément par écrit les membres du Comité Exécutif et que le Comité Exécutif soit saisi, pour confirmation, au cours de sa réunion qui suit immédiatement. ", et ne viserait ainsi que la signature des contrats commerciaux, à l'exclusion des engagements pris pour la gestion du personnel et de la signature des accords collectifs. En outre, contrairement à ce qu'il est soutenu, les accords majoritaires collectifs, s'ils sont des contrats exorbitants du droit commun dont le régime est soumis à des règles d'ordre public ainsi qu'à validation par l'autorité administrative, doivent néanmoins être regardés comme des contrats ou des engagements à valeur contractuelle pour l'application des stipulations précitées.

9. Il ressort du procès-verbal de la réunion du 27 janvier 2022 du comité exécutif qu'il a expressément ratifié, dans les termes les plus explicites, la signature, le 13 juillet 2021, de l'accord collectif contenant plan de sauvegarde de l'emploi. Cette ratification pouvant intervenir en cours d'instance dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la nullité de l'acte, prononcée par le juge, a été invoquée, la directrice générale de la F.F.F. doit par suite être regardée rétroactivement, en application des dispositions précitées de l'article 1156 du code civil, comme ayant eu qualité pour signer, le 13 juillet 2021, l'accord collectif majoritaire relatif au contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé, par le jugement attaqué, que la directrice générale de la F.F.F., étant dépourvue de qualité pour représenter l'employeur, ne pouvait pas signer l'accord majoritaire et a annulé, pour ce seul motif, la décision litigieuse.

10. Toutefois, il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mmes U, I, N, O, K, S, H, G et C devant le tribunal administratif de Paris et repris en appel.

11. En premier lieu, s'il résulte notamment des dispositions de l'article L. 1233-57-3 du code du travail que, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document élaboré unilatéralement par l'employeur en application de l'article L. 1233-24-4 du même code, il appartient à l'administration de s'assurer du respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des dispositions des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 du même code et d'apprécier, à ce titre, si les mesures prévues par ces articles et contenues dans le plan sont de nature à satisfaire les objectifs de maintien dans l'emploi et de reclassement des salariés compte tenu, notamment, des moyens dont dispose l'entreprise ou le groupe, il résulte en revanche des dispositions du 3° de l'article L. 1233-57-2 du code du travail, citées au point précédent que, lorsque le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi a été déterminé par un accord collectif majoritaire signé dans les conditions prévues à l'article

L. 1233-24-1 du même code, l'administration doit seulement s'assurer de la présence, dans ce plan, des mesures prévues aux articles L. 1233-61 et L. 1233-63. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté comme inopérant le moyen tiré de ce que le plan de sauvegarde de l'emploi prévu par l'accord collectif signé le 13 juillet 2021 serait insuffisant au regard des moyens financiers dont dispose la F.F.F.

12. En deuxième lieu, le contrôle de la réalité du motif économique ressortit du seul juge du licenciement, comme l'ont rappelé à bon droit les premiers juges, et non du juge administratif. Par suite, d'une part, les intimées ne peuvent utilement soutenir, pour contester la légalité de la décision litigieuse par laquelle l'autorité administrative a validé l'accord collectif majoritaire portant plan de sauvegarde de l'emploi, que les difficultés économiques invoquées à l'appui du plan de sauvegarde de l'emploi ne sont pas fondées dès lors que le budget au 30 juin 2021 est globalement à l'équilibre. D'autre part, la circonstance qu'alors que le plan de sauvegarde de l'emploi était fondé sur les difficultés économiques rencontrées par la F.F.F., motif se rattachant au 1° de l'article L. 1233-3 du code du travail, les courriers de rupture de contrats de travail adressés aux salariées concernées par le plan de sauvegarde de l'emploi en septembre et octobre 2021 se fondaient sur la sauvegarde de la compétitivité de la Fédération, motif se rattachant au 3° du même article, est également inopérante à l'encontre de la décision contestée.

En troisième lieu, en ce qui concerne la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique :

13. Aux termes de l'article L. 1233-30 du code du travail : " I.- Dans les entreprises ou établissements employant habituellement au moins cinquante salariés, l'employeur réunit et consulte le comité social et économique sur : / 1° L'opération projetée et ses modalités d'application, conformément à l'article L. 2323-31 ; / 2° Le projet de licenciement collectif : le nombre de suppressions d'emploi, les catégories professionnelles concernées, les critères d'ordre et le calendrier prévisionnel des licenciements, les mesures sociales d'accompagnement prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi et, le cas échéant, les conséquences des licenciements projetés en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail. / Les éléments mentionnés au 2° du présent I qui font l'objet de l'accord mentionné à l'article L. 1233-24-1 ne sont pas soumis à la consultation du comité social et économique prévue au présent article. / Le comité social et économique tient au moins deux réunions espacées d'au moins quinze jours. / () ". Aux termes de l'article L. 1233-31 du même code : " L'employeur adresse aux représentants du personnel, avec la convocation à la première réunion, tous renseignements utiles sur le projet de licenciement collectif. () ". Aux termes de l'article L. 1233-57-2 du même code : " L'autorité administrative valide l'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 dès lors qu'elle s'est assurée de : / () 2° La régularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique ".

14. Saisie par l'employeur d'une demande de validation d'un accord collectif conclu sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 1233-24-1 et fixant le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi, l'administration doit s'assurer que la procédure d'information et de consultation du comité social et économique prescrite par ces dispositions a été régulière. Elle ne peut ainsi légalement accorder la validation demandée que si le comité a été mis à même d'émettre régulièrement un avis, d'une part, sur l'opération projetée et ses modalités d'application, d'autre part, sur le projet de licenciement collectif et, à ce titre, sur le plan de sauvegarde de l'emploi. Il appartient à ce titre à l'administration de s'assurer, dans l'appréciation globale qu'elle doit porter sur la régularité de cette procédure, que l'employeur a adressé au comité d'entreprise, avec la convocation à sa première réunion, ainsi que, le cas échéant, en réponse à des demandes exprimées par le comité, tous les éléments utiles pour qu'il formule ses deux avis en toute connaissance de cause. Lorsque le comité social et économique a décidé de recourir à l'assistance d'un expert, il appartient à l'administration de s'assurer que les deux avis du comité d'entreprise ont été recueillis après que ce dernier a été mis à même de prendre connaissance des analyses de l'expert ou, à défaut de remise du rapport de l'expert, à une date à laquelle l'expert a disposé d'un délai suffisant pour réaliser sa mission dans des conditions permettant au comité d'entreprise de formuler ses avis en connaissance de cause.

15. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le " livre I " et le " livre II " du plan de sauvegarde de l'emploi ont été présentés au comité social et économique d'une réunion le

17 mai 2021, dite " R0 ", et que ces documents ont été adressés par courrier électronique aux membres du comité le même jour, soit quatre jours avant la tenue, le 21 mai 2021, de la première réunion du comité social et économique consacrée au plan de sauvegarde de l'emploi. Eu égard à la circonstance que le " livre I " comportait 33 pages et 5 pages d'annexes et le " livre II " 74 pages, ce délai n'était pas d'une brièveté telle qu'il aurait empêché les membres du comité social et économique d'en prendre connaissance avant la réunion du 21 mai 2021. Au demeurant, quatre autres réunions du comité se sont tenues les 25 mai 2021 (dite " R2 "), 9 juin 2021 (dite " R3 "),

23 juin 2021 (dite " R4 ") et 2 juillet 2021 (dite " R5 "), avant que ne soit rendu l'avis lors de la réunion du 13 juillet 2021, et aucun membre du comité n'a estimé ne pas avoir été destinataire des informations nécessaires à ce qu'il puisse rendre un avis éclairé, notamment en faisant usage de la procédure de demande d'injonction présentée auprès de la direction régionale et interdépartementale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités. Enfin, les intimées ne peuvent utilement faire valoir que lors de la réunion du comité social et économique du 18 mars 2021, la direction des ressources humaines de la F.F.F. aurait affirmé qu'aucun plan de départ n'était en préparation et que rien ne le nécessitait, et que cette position aurait changé entre mars et mai 2021 à la suite de la réélection du président de la fédération, de l'élection pour quatre ans d'un nouveau comité exécutif et de l'annonce du maintien en fonction de la directrice générale, laquelle a immédiatement décidé une restructuration de ses équipes, notamment par la mise en œuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi, ces circonstances, à les supposer établies, étant antérieures à la consultation du comité social et économique sur le plan de sauvegarde de l'emploi dont s'agit, qui a commencé lors de la réunion dite " R0 " le 17 mai 2021.

16. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que le comité social et économique a été informé et consulté sur un plan de sauvegarde de l'emploi qui trouvait sa justification, comme il ressort notamment du " livre II " remis aux membres du comité le 17 mai 2021, dans les difficultés économiques et financières rencontrées par la F.F.F. en raison de la baisse de ses ressources (à court terme, du fait de la crise sanitaire, effondrement des ressources de billetterie et des ventes de produits dérivés et de séminaires d'entreprise, baisse du nombre des licenciés et demandes d'indemnisation des sponsors-partenaires privés d'une grande partie de leurs droits ; à moyen et long terme, chute des droits de retransmission des matchs à la télévision, qui ont été divisés par deux, et situation économique des sponsors-partenaires dont certains ne renouvelleront pas le contrat qui les liait à la F.F.F., qui le réviseront à la baisse ou qui raccourciront la durée de leur engagement) et au maintien de ses charges. La seule circonstance que les courriers du 14 septembre 2021 d'information sur le motif économique préalable à une éventuelle adhésion au contrat de sécurisation professionnel ont indiqué que la F.F.F. faisait face depuis quelques mois à un double phénomène amputant gravement ses revenus alors que, dans le même temps, elle conservait ses charges récurrentes, de sorte qu'il en résultait une dégradation très importante de son résultat économique et des perspectives financières défavorables, et que, " pour ces raisons, [elle] est contrainte de procéder à une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité et entraînant la suppression [du] poste dans le cadre d'un plan de redimensionnement de son organisation et de réduction de ses effectifs " et que les courriers du 7 octobre 2021 de notification du licenciement pour motif économique ont indiqué que " celui-ci est justifié par la suppression [du] poste consécutive à une réorganisation de la Fédération Française de Football, rendue nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ", et qu'ainsi au motif du licenciement pour motif économique relevant du 1° de l'article L. 1233-3 du code du travail (" des difficultés économiques ") présenté aux membres du comité social et économique lors de la procédure d'information et de consultation sur le plan de sauvegarde de l'emploi a été substitué, comme fondement des lettres de de notification du licenciement, un motif relevant du 3° du même article L. 1233-3 (" une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité "), ne saurait établir que le comité social et économique n'aurait pas été informé et consulté, du mois de mai au mois de juillet 2021, sur le motif réel des licenciements économiques envisagés, en viciant ainsi la procédure, dès lors qu'il n'est pas possible d'inférer du motif postérieur énoncé dans les lettres de licenciement que le motif sur lequel le comité social et économique a été informé et consulté n'aurait, alors, pas été le véritable motif fondant le plan de sauvegarde de l'emploi.

17. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique doit être écarté en ses deux branches.

18. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que, comme il a été dit, l'accord collectif majoritaire a été signé le 13 juillet 2021 dans l'après-midi, la demande de validation de cet accord a été présentée à l'administration le 15 juillet, qui a constaté le même jour la complétude du dossier, mentionnée sur la plateforme RUPCO, et que le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a validé, par la décision litigieuse, le 16 juillet 2021 l'accord collectif majoritaire. Toutefois, le projet de licenciement collectif portant sur un plan de sauvegarde de l'emploi au sein de la F.F.F. a été notifié à la direction régionale et interdépartementale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France par voie dématérialisée le 17 mai 2021, à la suite de quoi des échanges ont eu lieu sur le projet de plan de sauvegarde de l'emploi entre la direction de la F.F.F., les représentants du personnel de la fédération et l'administration, par voie écrite ou de visio-conférence, comme il ressort des visas non contestés de la décision litigieuse. Par suite, les intimées ne sont pas fondées à soutenir que le bref délai séparant la demande de validation de l'employeur de la décision contestée de l'administration établirait que les dispositions précitées de l'article L. 1233-57-2 du code du travail ont été méconnues. De plus, ni les dispositions de cet article, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire, n'imposent au directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités de procéder à un " examen contradictoire " avant de prendre sa décision. Enfin et au surplus, les obligations incombant à l'autorité administrative lorsqu'elle valide un accord collectif sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 1233-57-2 du code du travail lui imposent un contrôle moins approfondi que lorsqu'elle homologue le document élaboré par l'employeur sur le fondement des dispositions de l'article L. 1233-57-3 du code du travail.

19. En cinquième lieu, les vices affectant, le cas échéant, les conditions de négociation d'un accord collectif conclu sur le fondement de l'article L. 1233-24-1 du code du travail ne sont susceptibles d'entraîner l'illégalité de l'acte validant cet accord que s'ils sont de nature à entacher ce dernier de nullité.

20. D'une part, la circonstance que l'accord de méthode qui avait été envisagé sur le fondement de l'article L. 2222-3-1 du code du travail n'a pas été signé ne saurait établir que les conditions de négociation de l'accord collectif auraient été viciées. D'autre part, la circonstance, à la supposer établie, que la direction de la F.F.F. aurait menacé de retirer les avantages complémentaires obtenus dans le cadre des négociations pour obtenir la signature de l'accord collectif majoritaire, comme l'indique l'avis du comité social et économique du 13 juillet 2021, ne peut être regardée comme étant de nature à entacher de nullité cet accord collectif, comme l'ont à bon droit relevé les premiers juges. Enfin, comme il a été dit ci-dessus, la circonstance que la nécessité de mettre en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi ait été justifiée par la direction de la fédération, lors des négociations précédant la signature de l'accord collectif, par les difficultés économiques rencontrées par la F.F.F., alors que les lettres postérieures de notification de licenciement des salariées concernées étaient motivées par la sauvegarde de la compétitivité de la F.F.F., ne peut caractériser le caractère déloyal de ces négociations.

21. En sixième lieu, d'une part, aux termes de l'article 11 du règlement intérieur de la F.F.F. : " () 3. Il [le Directeur Général ou Directeur Général Délégué] propose au Comité Exécutif, puis met en œuvre, les mesures d'organisation, de gestion et de contrôle qui visent à assurer le fonctionnement continu et efficace de l'administration fédérale. () ".

22. A supposer qu'un accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi puisse être regardé comme une " mesure d'organisation, de gestion et de contrôle qui vise à assurer le fonctionnement continu et efficace de l'administration fédérale " au sens des stipulations précitées de l'article 11 du règlement intérieur de la F.F.F., il ressort des pièces du dossier que le matin même du jour de la signature de l'accord collectif, le 13 juillet 2021, le comité exécutif a été informé de l'issue des négociations et du contenu précis de l'accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi qui allait être signé. Par suite, et en tout état de cause, le moyen manque donc en fait, comme ont à bon droit estimé les premiers juges.

23. D'autre part, aux termes de l'article 28 des statuts de la F.F.F. relatif aux attributions de la Haute autorité du football : " - La Haute Autorité du Football dispose d'un pouvoir de contrôle sur la gestion de la Fédération par le Comité Exécutif, sans pouvoir s'immiscer dans ladite gestion. / - Elle est force de propositions d'intérêt général au Comité Exécutif. Son Président peut demander à être entendu par le Comité Exécutif. / - Elle favorise le dialogue entre les acteurs du football. / - Elle dispose d'un droit d'interpellation du Comité Exécutif et peut formuler des avis. / - Elle peut consulter le Comité d'Audit Interne sur les engagements financiers afin d'opérer des vérifications et contrôles. / - Elle examine le rapport trimestriel présenté par le Comité Exécutif. / - Elle peut proposer la révocation du Comité Exécutif à l'Assemblée Fédérale dans les conditions de l'article 12 des présents Statuts. / Par exception aux dispositions de l'article 27.3, cette décision doit être prise à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés. Elle doit en outre être motivée et prévoir les modalités du respect de la procédure du contradictoire. " et, aux termes de l'article 3 du règlement financier de la F.F.F. : " Dans le cadre de son pouvoir de contrôle, la Haute Autorité peut consulter le comité d'Audit Interne sur les engagements financiers afin d'opérer les vérifications et contrôles qu'elle jugera utiles. Elle dispose d'un droit d'interpellation du Comité Exécutif et peut formuler des avis. ". Ni les stipulations précitées, ni aucune autre stipulation n'impose que la Haute Autorité du Football soit consultée préalablement à la signature d'un accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi. Au surplus et en tout état de cause, la Haute autorité du football a été consultée lors de sa séance du 4 juin 2021, au cours de laquelle elle a pris acte du plan de sauvegarde de l'emploi, et a débattu de son exécution et de sa mise en œuvre. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de l'absence de consultation de la Haute autorité du football.

24. En septième lieu, la circonstance que, pour déterminer les catégories professionnelles concernées par le licenciement, un accord collectif fixant un plan de sauvegarde de l'emploi se fonde sur des considérations étrangères à celles qui permettent de regrouper les salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune, ou ait pour but de permettre le licenciement de salariés affectés sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée, n'est pas, par elle-même, de nature à caractériser une méconnaissance des dispositions de l'article L. 1233-57-2 du code du travail. Elle ne saurait, par suite, faire obstacle à la validation de cet accord. Il en va autrement si les stipulations qui déterminent les catégories professionnelles sont entachées de nullité, en raison notamment de ce qu'elles revêtiraient un caractère discriminatoire.

25. D'une part, il résulte de ce qui précède que l'accord collectif signé le 13 juillet 2021 a pu s'écarter, pour définir les catégories professionnelles concernées par le licenciement, du référentiel des métiers élaboré peu de temps auparavant qui comportait 27 " métiers RMC " [Référentiel Métiers Compétences] auquel chaque agent était rattaché, et déterminer des " catégories homogène d'emploi " dont 13, sur un total de 22 qui sont concernées par le plan de sauvegarde de l'emploi, ne comportent qu'un seul salarié, sans méconnaître les dispositions précitées de l'article

L. 1233-57-2 du code du travail. Comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges, la circonstance que l'accord litigieux comporte ainsi des catégories professionnelles comprenant un unique salarié en raison du niveau de responsabilités ou de la spécificité des compétences que requièrent les métiers en cause n'est pas de nature, à elle seule, à entacher d'illégalité la décision de validation litigieuse. Enfin, l'accord collectif validé stipulant que " les critères présidant au choix des personnes à licencier, déterminés conformément à l'article L. 1233-5 du code du travail, sont les suivants : / ) Les qualités professionnelles, déclinées selon certains paramètres et appréciées par catégorie / ) L'ancienneté / ) Les charges de famille, en particulier celles des parents isolés ) Les difficultés de réinsertion professionnelle dues à l'âge ou au handicap physique. / Chaque salarié au sein d'une même catégorie homogène d'emploi comme définie ci-dessus, se verra attribuer, sur chaque critère, un nombre de points. / Les licenciements affecteront, dans chaque catégorie homogène d'emploi, les salariés totalisant le plus petit nombre de points. / En cas d'égalité de points, il sera privilégié en premier lieu les critères professionnels et en cas de nouvelle égalité le critère de l'ancienneté ", " les qualités professionnelles " étant appréciées sur la base des deux derniers entretiens annuels d'évaluation, des points étant affectés en fonction de " l'appréciation globale " et des " objectifs de part variable liés à la surperformance ", il n'apparaît pas ainsi que ces critères d'ordre soient par eux-mêmes discriminants.

26. D'autre part, les intimées soutiennent que certaines catégories professionnelles auraient été déterminées de façon discriminatoire ou dans le but de cibler certains salariés eu égard notamment à leur état de santé, de grossesse ou à leur orientation sexuelle.

27. Ainsi, s'agissant de Mme E U, AL, il ressort de l'accord collectif validé que la " catégorie homogène d'emploi " (CHE) dont elle relève comprend quatre postes d'" R ", sans qu'il n'y ait de distinction entre eux, parmi lesquels deux postes doivent être supprimés, ceux d'" AH " et " X ". Par suite, les intimées ne sont pas fondées à soutenir qu'il existerait une catégorie unique d'" V " créée pour " cibler " Mme U. Le " Livre II " justifie la suppression du poste d'" X " par le fait que l'activité d'achat lié à la réservation et à l'organisation des voyages et déplacements est à l'arrêt en raison du choix opéré de limiter les déplacements afin de réaliser des économies et du fait que désormais, dans la pratique, l'agence de voyages est sollicitée directement par les salarié(e)s de la F.F.F., sans qu'une personne intermédiaire ne soit nécessaire. Par ailleurs, les circonstances que, sur un tableur, le nom de Mme U est surligné en rouge et qu'elle aurait été reçue en entretien individuel par la direction de la fédération ne sauraient être regardées comme des éléments de discrimination entachant la catégorie professionnelle à laquelle elle appartient. Enfin, les intimées ne peuvent utilement contester l'application à l'intéressée des critères d'ordre de licenciement, dont l'appréciation relève du seul juge du licenciement.

28. S'agissant de Mme F G, AU, l'accord collectif a défini une catégorie professionnelle spécifique au " AI " et concernant un seul salarié, dont le poste doit être supprimé. Le " Livre II " justifie la suppression de ce poste par le regroupement, au sein d'un unique service, celui des " Ressources humaines ", de deux services, celui du droit social et celui du " AA ". D'une part, si les intimées font valoir que huit salariés relèvent du même " métier RMC " des ressources humaines, cette circonstance, alors qu'au demeurant, comme il a été dit, la définition des " métiers RMC " n'a pas été reprise par l'accord collectif au titre des catégories professionnelles, ne saurait faire regarder la définition de la catégorie professionnelle propre au " AI " comme discriminatoire dès lors que ces huit salariés occupent des postes distincts quant à leur positionnement (cadres et non-cadres) et aux compétences et formations requises. D'autre part, si Mme G supervisait trois chefs de projet, cette circonstance ne rendait pas l'ensemble des postes du service " AA " interchangeables, de sorte que la création d'une catégorie professionnelle propre au " AI " n'aurait pas de justification, sinon discriminatoire. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que la circonstance que Mme G AV ait motivé le " ciblage " de son poste pour des motifs discriminatoires. Enfin, la circonstance que, sur un tableur, le nom de Mme G est surligné en rouge ne saurait être regardée comme un élément de discrimination.

29. S'agissant de Mme M H, AW, l'accord collectif a défini une catégorie professionnelle " AC " comprenant deux postes, ceux de " AB " et de " AN ", qui doivent tous les deux être supprimés. Le " Livre II " justifie la suppression de ces deux postes par le contexte : " en l'absence de perspective d'organisation de grands événements hébergés en France dans les dix prochaines années - pas de Coupe du Monde à venir en France et les JO se sont dotés de leur propre

structure -, la Fédération a décidé de supprimer les budgets pour les grands événements. Par ailleurs, l'activité de conseil destinée à accompagner d'autres pays dans l'organisation de grands événements ne génère pas de recettes depuis un an et demi. Le marché pour cette activité n'est pas suffisamment porteur. L'arrêt des budgets événements et l'absence de recette générées par l'activité de conseil événementiel implique une suppression des postes consacrés à l'activité d'organisation des événements internationaux. ". D'une part, ni la circonstance que d'autres salariés appartenaient à un même " métier RMC ", à savoir la " coordination administrative et technique ", ni la circonstance qu'au sein de la AT, Mme H occupait un poste dont les caractéristiques étaient très proches de deux autres salariés, le " AS " et le " AQ ", ne sauraient faire regarder la définition de cette catégorie professionnelle " AC " comme discriminatoire dès lors que, comme il a été dit, la définition des " métiers RMC " n'a pas été reprise par l'accord collectif au titre des catégories professionnelles. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que la circonstance, à la supposer établie, que Mme H, au retour de son congé de maternité, ait fait valoir qu'elle subissait une surcharge de travail et aurait été de ce fait mise à l'écart, ait motivé le " ciblage " de son poste, pour des motifs ainsi discriminatoires, au sein d'une catégorie professionnelle ne comportant que deux postes. Enfin, la circonstance que, sur un tableur, le nom de Mme H est surligné en rouge ne saurait être regardée comme un élément de discrimination.

30. S'agissant de Mme L K, AF, et de Mme T O, AK, l'accord collectif a défini une catégorie professionnelle " AG " et une catégorie professionnelle " AP ", ces deux catégories professionnelles ne comportant chacune qu'un seul poste, qui doivent tous les deux être supprimés. Le " Livre II " justifie la suppression du premier de ces deux postes par la décision d'annulation, par le comité exécutif, eu égard à son coût, du projet de construction du centre de la performance, ce qui met fin à l'activité innovation et centre de la performance (la circonstance qu'ultérieurement, lors de la séance du comité exécutif du 14 octobre 2021, a été projetée la création d'un centre de recherches étant à cet égard inopérante), et du second par le fait que le développement du W, qualifié d'enjeu stratégique, est l'œuvre des groupes de travail Performances 2024, qui mobilisent plusieurs directions, et dont le pilotage ne nécessite ni coordination ni de reporting, de sorte que AE n'est plus nécessaire dans la nouvelle organisation mise en place. D'une part, la circonstance que ces deux postes appartenaient à un même " métier RMC ", à savoir " l'encadrement stratégique ", ne saurait faire regarder la définition de ces deux catégories professionnelles comme discriminatoires, quand bien même elles ne comprennent chacune qu'un poste, dès lors que, comme il a été dit, la définition des " métiers RMC " n'a pas été reprise par l'accord collectif au titre des catégories professionnelles. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que la circonstance que AX, étaient parfaitement connus, de longue date, de la directrice générale, aurait été la cause d'une mesure discriminatoire au regard de leur Y conduisant à la suppression de leurs postes. Enfin, la circonstance que Mmes O et K n'auraient pas pu bénéficier des avantages prévus par le statut du personnel pour AJ est inopérante.

31. S'agissant de Mme S, AO, d'une part, la circonstance qu'elle est été incluse par l'accord collectif dans une catégorie professionnelle " d'assistant(e) de direction " comprenant cinq postes dont l'un doit être supprimé, alors que le " métier RMC " de " coordination administrative et technique " comprenait près de soixante-dix salariés ne saurait être regardée comme constitutive d'une discrimination dès lors que, la définition des " métiers RMC " n'a pas été reprise par l'accord collectif au titre des catégories professionnelles. D'autre part, la seule circonstance que, lors de ses entretiens professionnels, Mme S a fait valoir qu'elle ne bénéficiait plus, depuis vingt ans, d'une progression salariale est sans lien avec la suppression d'un des cinq postes " d'assistant(e) de direction " de la AD, qui ne peut ainsi être regardée comme motivée par une discrimination en raison de l'âge. Enfin, les intimées ne peuvent utilement contester l'application, au sein de cette catégorie professionnelle " d'assistant(e) de direction ", des critères d'ordre de licenciement, dont l'appréciation relève du seul juge du licenciement.

32. S'agissant des AR, il ne ressort pas des pièces du dossier que la création, au sein de cette direction, de deux catégories professionnelles de " Z " et de " AM ", comportant chacune un seul salarié, serait fondée de ce seul fait sur des motifs discriminatoires et viserait à " cibler " des salariés.

33. Enfin, la circonstance que le dispositif de départ volontaire, initialement limité aux catégories professionnelles concernées par le plan de sauvegarde de l'emploi, ait été ouvert à des salariés appartenant à des catégories professionnelles qui n'étaient pas concernées par ce plan, ne saurait être regardée comme une mesure discriminatoire.

34. Par suite, les intimées ne sont pas fondées à soutenir que les catégories professionnelles auraient été déterminées sur la base de motifs discriminatoires.

35. Il résulte de ce qui précède que le F.F.F. est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 10 décembre 2021, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du

16 juillet 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a validé l'accord collectif majoritaire conclu entre, d'une part, la fédération française de football et, d'autre part, le SNAAF-CFDT, fixant le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi.

Sur la requête n° 22PA00561 :

36. Le présent arrêt annulant le jugement du 10 décembre 2021 du tribunal administratif de Paris, il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 22PA00561.

Sur les frais liés à l'instance :

37. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais liés à l'instance. Dès lors, les conclusions présentées à ce titre par les intimées doivent être rejetées.

38. Dans les circonstances de l'espèce, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la F.F.F. les frais liés à l'instance.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 22PA00561.

Article 2 : Le jugement n° 2119397/3-3 du 10 décembre 2021 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 3 : La demande présentée par Mme U, Mme I, Mme N, Mme O, Mme K, Mme S, Mme H, Mme G et Mme C devant le tribunal administratif de Paris et leurs conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions présentées par la fédération française de football, tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la fédération française de football, à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, à Mme E U, à Mme D I, à Mme Q N, à Mme T O, à Mme L K, à Mme A S, à

Mme M H, à Mme F G et à Mme P C.

Copie en sera adressée au directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 11 avril 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marie-Dominique Jayer, première conseillère,

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 mai 2022.

Le président-rapporteur,

I. BL'assesseure la plus ancienne,

M.D. JAYER

La greffière,

N. DAHMANILa République mande et ordonne à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2, N° 22PA00561

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