Jurisprudence : TA Melun, du 14-10-2011, n° 1107481


TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE MELUN
N°1107481/10
___________
SARL TOKYO
___________
Mme Déal
Juge des référés
___________
Ordonnance du 14 octobre 2011
__________
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le juge des référés
Vu la requête, enregistrée le 10 octobre 2011 sous le n°1107481, présentée pour la SARL TOKYO représentée par son gérant M. Jie Chen, dont le siège social est 14 rue de la Rochette à Melun (77000), par Me Dalle, avocat ; la SARL TOKYO demande au juge des référés :
- de suspendre l'arrêté n°2011 DSCS DB 256 en date du 27 septembre 2011 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a décidé la fermeture du restaurant géré par la SARL TOKYO pour une durée d'un mois à compter de sa notification ;
- de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L .761-1 du code de justice administrative ;
La SARL TOKYO soutient que :
- l'urgence justifie la suspension de l'arrêté car cette fermeture administrative met en péril la continuité de l'exploitation du restaurant alors que le chiffre d'affaires n'a cessé d'évoluer depuis l'ouverture en avril 2011 et la réputation commerciale peut gravement souffrir de cette fermeture ; que l'arrêté porte une atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre découlant de la liberté du commerce et de l'industrie, le gérant étant de bonne foi car il a déclaré son homonyme Mme Chen dès l'embauche à l'URSSAF et elle s'est présentée sous une fausse identité avec un titre de séjour ne lui appartenant pas ; que c'est le notaire qui a omis de procéder à l'inscription modificative au registre du commerce lorsque la société a réellement démarré son activité après les travaux de mise en état des locaux ;
Vu le mémoire, enregistré le 11 octobre 2011, présenté pour la SARL TOKYO représentée par son gérant M. Jie Chen, par Me Dalle, qui précise que la requête déposée le 10 octobre l'est au titre de l'article L. 521-2 du code de justice administrative et constitue un référé-liberté qui est dispensé du timbre fiscal de 35 euros ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 octobre 2011, présenté par le préfet de Seine-et-Marne qui conclut au rejet de la requête ;
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Il fait valoir que l'urgence n'est pas établie car la mesure est strictement proportionnée aux infractions relevées le 19 mai 2011 par le service de police au frontière de Seine-et-Marne et qu'il n'existe aucun doute sérieux sur la légalité de cette décision ;
Vu le mémoire en réplique enregistré le 12 octobre 2011, présenté pour la SARL TOKYO représenté par son gérant M. Jie Chen, par Me Dalle qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens et qui précise que le gérant n'est coupable que de ne pas avoir vérifié la photo figurant sur le titre que lui présentait Mme Chen lors de l'embauche et de négliger de vérifier auprès du préfet la validité du titre produit ; que l'article L. 8221-3 du code du travail énonce que commet une dissimulation d'activité toute personne qui exerce une activité de prestation de services sans requérir son immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou sans procéder aux déclarations exigées par les organismes sociaux, or la SARL a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Melun le 1er mars 2011 soit 7 semaines avant son ouverture au public et elle a procédé dès l'embauche pour chacun des salariés aux déclarations exigées par les organismes sociaux ; que l'article L. 8221-5 du même code énonce que constitue le délit de dissimulation d'emploi salarié le fait pour un employeur de se soustraire à la déclaration préalable à l'embauche ou de ne pas effectuer auprès des organismes sociaux les déclarations relatives aux salaires et cotisations ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;
Vu l'arrêté du préfet de Seine-et-Marne en date du 27 septembre 2011 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision en date du 1er septembre 2011, par laquelle la présidente du tribunal a désigné Mme Déal, vice-présidente, pour statuer sur les demandes de référé ;
Après avoir convoqué à une audience publique :
- Me Dalle, représentant M. Chen ;
- le préfet de Seine-et-Marne ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du 14 octobre 2011 à 10 heures au cours de laquelle ont été entendus :
- le rapport de Mme Déal, juge des référés ;
- M. Chen, gérant de la SARL TOKYO assisté de Me Dalle, qui a persisté dans ses écritures et a précisé qu'il avait bien reçu début mai une lettre de l'URSSAF lui demandant son code APE et qu'il n'avait pu y répondre immédiatement ;
- Mme Lemoullec, chef de section police administrative, représentant le préfet de Seine-et-Marne qui a persisté dans ses écritures ;
Après avoir prononcé, à l'issue de l'audience à 10 heures 30, la clôture de l'instruction ;
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Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : « Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. » et qu'aux termes de l'article L. 522-1 dudit code : « Le juge des référés statue au terme d'une procédure contradictoire écrite ou orale. Lorsqu'il lui est demandé de prononcer les mesures visées aux articles L. 521-1 et L. 521-2, de les modifier ou d'y mettre fin, il informe sans délai les parties de la date et de l'heure de l'audience publique (...) » ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique : « I. La fermeture des débits de boissons et des restaurants peut être ordonnée par le représentant de l'Etat dans le département pour une durée n'excédant pas six mois, à la suite d'infractions aux lois et règlements relatifs à ces établissements. Cette fermeture doit être précédée d'un avertissement qui peut, le cas échéant, s'y substituer, lorsque les faits susceptibles de justifier cette fermeture résultent d'une défaillance exceptionnelle de l'exploitant ou à laquelle il lui est aisé de remédier. » ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le 19 mai 2011, les services de la direction départementale de la police aux frontières de Seine-et-Marne ont effectué un contrôle du restaurant géré par la SARL TOKYO et ont constaté d'une part, que ce restaurant était en activité alors que le registre du commerce et des sociétés concernant cet établissement mentionnait l'absence d'activité commerciale et d'autre part, que Mme Hu Chen, de nationalité chinoise et en situation irrégulière sur le territoire national, se trouvait à un poste de travail au sein des cuisines ; que, se fondant sur l'existence de ces deux infractions aux dispositions du code du travail, le préfet de Seine-et-Marne a, par un arrêté du 27 septembre 2011, dont la suspension est demandée, prononcé la fermeture du restaurant pour une durée d'un mois à compter de la notification de l'arrêté en application des dispositions précitées de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique ; que d'une part, si le gérant de la SARL TOKYO reconnaît que sa société n'était pas inscrite correctement au registre du commerce et des sociétés lors de la constatation des faits, il affirme qu'il appartenait au notaire de faire modifier le registre du commerce et des sociétés ; que d'autre part, si le gérant allège sa bonne foi concernant l'embauche et la déclaration aux organismes sociaux de Mme Hu, il est constant qu'elle ne bénéficiait pas d'un titre de séjour l'autorisant à travailler à la date de la constatation des faits ; que, par ailleurs, le préfet a pris l'arrêté en cause à l'issue d'une procédure contradictoire ;
Considérant qu'il résulte des dispositions législatives précitées du code de la santé publique que le préfet est en droit de prononcer la fermeture des restaurants à la suite d'infractions aux lois et règlements relatifs à ces établissements et que les restrictions apportées en ce domaine à la liberté d'entreprendre, à la liberté du commerce et de l'industrie ou au libre exercice d'une activité professionnelle résultent de la loi elle-même ; qu'il s'ensuit que, lorsque le préfet fait usage, dans les conditions et pour les motifs que la loi prévoit, de son pouvoir de police administrative, il ne peut être regardé comme portant atteinte à une liberté fondamentale au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ; qu'ainsi, les conclusions de la requête tendant à suspendre l'arrêté litigieux ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
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Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée ; il peut, même d'office, ou pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant que ces dispositions font obstacle aux conclusions de la SARL TOKYO dirigées contre le préfet de Seine-et-Marne qui n'est pas, dans la présente instance de référé, la partie perdante ;
O R D O N N E
Article 1er : La requête de la SARL TOKYO est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la SARL TOKYO et au préfet de Seine-et-Marne.
Fait à Melun, le 14 octobre 2011.
Le juge des référés,
Signé : D. Déal
Le greffier,
Signé : K. Arcole
La République mande et ordonne au préfet de Seine-et-Marne en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
K. Arcole

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