Jurisprudence : CE Contentieux, 27-07-1990, n° 44676

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 44676

Bourgeois

Lecture du 27 Juillet 1990

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)


Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés les 3 août 1982 et 23 mars 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Yvon Bourgeois, demeurant 4, rue du Professeur Esclangon à Pessac (33600), et tendant à ce que le Conseil d'Etat : 1°) annule le jugement en date du 17 juin 1982 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser d'une part une indemnité à raison d'une erreur commise dans le calcul de la cotisation à l'imposition sur le revenu due par lui au titre de l'année 1979 et d'autre part, des intérêts moratoires à raison des sommes qui lui ont été remboursées ; 2°) lui accorde une indemnité de 1 000 F et une somme de 51 F au titre des intérêts moratoires ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu : - le rapport de Mme Dominique Laurent, Maître des requêtes, - les observations de Me Hennuyer, avocat de M. Bourgeois, - les conclusions de M. Chahid-Nouraï, Commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre :

Considérant que la requête, présentée initialement par M. Bourgeois lui-même, a été régularisée par le recours au ministère d'un avocat au Conseil d'Etat ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par le ministre ne peut qu'être écartée ;

Sur la responsabilité de l'Etat :

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en déclarant ses revenus de l'année 1979, M. Yvon Bourgeois a fait mention, au titre de la catégorie des traitements et salaires, d'une somme de 35 663 F ; qu'à la suite d'une erreur matérielle, le service chargé d'établir l'impôt a retenu comme montant des salaires imposables une somme de 315 663 F ; que l'imposition établie au nom de M. Bourgeois au titre de l'année 1979, d'un montant de 86 284 F, mise en recouvrement le 30 juin 1980, a fait l'objet d'un avis d'imposition adressé au contribuable en juillet 1980 ; qu'à la même date, l'administration a notifié à M. Bourgeois, qui avait opté pour le paiement de l'impôt par voie de prélèvements mensuels sur son compte de caisse d'épargne, qu'un prélèvement complémentaire de 79 948 F serait effectué sur ce compte en décembre 1980 ; qu'aucun prélèvement n'a pu cependant être effectué à cette date, le compte de M. Bourgeois étant insuffisamment provisionné ; qu'après avoir reçu, le 10 janvier 1981, un nouvel avis l'informant que les prélèvements mensuels opérés sur son compte en 1981 s'élèveraient à 8 628 F chacun et qu'un premier prélèvement de ce montant avait été effectué le 9 janvier 1981, M. Bourgeois a présenté une réclamation au directeur des services fiscaux ; que celui-ci, constatant que la cotisation effectivement due par le contribuable à raison de ses revenus de 1979 ne s'élevait qu'à 4 655 F, a prononcé un dégrèvement de 81 629 F ; que le remboursement de la somme indûment prélevée le 9 janvier 1981 a été effectué le 4 février 1981 ;

Considérant que les erreurs ainsi relevées dans la saisie et le traitement informatisé des déclarations et dans l'exécution automatique des prélèvements mensuels ont été commises lors de l'exécution d'opérations qui, si elles se rattachent aux procédures d'établissement et de recouvrement de l'impôt, ne comportent pas de difficultés particulières tenant à l'appréciation de la situation des contribuables ; qu'elles sont constitutives d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat vis-à-vis de M. Bourgeois ; Considérant, toutefois, que M. Bourgeois, bien qu'il ait reçu en juillet 1980, d'une part, un avis d'imposition mentionnant une dette fiscale de 86 284 F et faisant état de salaires d'un montant manifestement erroné, et, d'autre part, un "avis de situation" mentionnant qu'un prélèvement de 79 948 F serait effectué sur son compte en 1980, n'a effectué de démarches auprès de l'administration et n'a présenté de réclamation écrite qu'après le prélèvement opéré à tort en janvier 1981 ; qu'il a ainsi fait preuve de négligences qui sont de nature à exonérer l'administration de la moitié de sa responsabilité ;

Considérant qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en fixant à 500 F, compte tenu de ce partage de responsabilité, le montant de l'indemnité destinée à réparer le préjudice subi par M. Bourgeois du fait notamment des multiples démarches qu'il a dû effectuer ;

Sur les intérêts moratoires :

Considérant qu'aux termes de l'article 1957 du code général des impôts, en vigueur en 1981 : "1 ... quand un dégrèvement est prononcé par l'administration à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues et reversées au contribuable donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt légal. Ces intérêts courent du jour de la réclamation ou du paiement, s'il est postérieur. Ils ne sont pas capitalisés" ;

Considérant que le dégrèvement prononcé par le directeur des services fiscaux dans les conditions rappelées ci-dessus, à la suite de la réclamation présentée par M. Bourgeois, a eu pour objet de réparer une erreur commise dans l'assiette d'une imposition ; qu'ainsi, alors même que cette décision n'a eu pour effet que le remboursement de sommes versées en acompte d'une dette fiscale, les sommes reversées doivent donner lieu, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, au paiement d'intérêts moratoires ; qu'il y a lieu, dès lors, de condamner l'Etat à verser à M. Bourgeois lesdits intérêts ;

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 17 juin 1982 est annulé.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. Bourgeois une somme de 500 F ainsi que les intérêts moratoires afférents au dégrèvement prononcé selon les modalités prévues à l'article 1957 du code général des impôts.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête et de la demande de M. Bourgeois est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Bourgeois et au ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget.

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