Jurisprudence : CA Paris, 5, 6, 26-09-2013, n° 12/00161, Confirmation



Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE aux parties le AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS Pôle 5 - Chambre 6
ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2013 (n°, pages)
Numéro d'inscription au répertoire général 12/00161
Décision déférée à la Cour Jugement du 06 Décembre 2011 -Tribunal de Commerce de Créteil - RG n° 2011FOO771

APPELANTE
SAS MACARAJA, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Villiers sur Marne
Représentée et assistée par Me Xavier ..., ainsi que Me Guillaume ..., plaidant pour la SELARL ICHAY MULLENEX ASSOCIÉS, avocats au barreau de PARIS, toque J051, et substituant Me Annabelle RICHARD, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE
SA CRÉDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

PARIS
Représentant Me Belgin PELIT-JUMEL (avocat au barreau de PARIS, toque L0056)
Assistée de Me Frédéric BELLANCA, avocat au barreau de PARIS, toque P0419

COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 10 Juin 2013, en audience publique, devant la Cour composée de
Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente
Madame Caroline FÈVRE, Conseillère
Madame Muriel GONAND, Conseillère
qui en ont délibéré Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du Code de Procédure Civile.
Greffier, lors des débats M. Sébastien PARESY
ARRÊT
- contradictoire
- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Paule MORACCHINI, président et par Madame Josélita COQUIN, greffier présent lors du prononcé.

****************
Le 16 mai 2009, la société Macaraja, exerçant l'activité de commercialisation de logiciels et plus généralement toute activité commerciale liées à l'informatique, a ouvert un compte de dépôt n° 00020017201dans les livres du Crédit Industriel et Commercial.
Le 25 mars 2011, la société Macaraja a conclu avec la société de droit japonais Tibanne, un contrat d'intermédiaire de commerce qui a été annulé et remplacé par un second contrat en date du 13 août 2011.
A la suite d'une modification du flux d'opérations enregistrées sur le compte de la société Macaraja à compter du mois de mars 2011, le Crédit Industriel et Commercial a interrogé sa cliente sur la nature et l'origine des opérations passées sur son compte en compte et la société Macaraja lui a répondu qu'elles correspondait à une activité d'intermédiation pour le paiement de transactions sur des bitcoins réalisées entre des acheteurs et des vendeurs de bitcoins via une plate-forme internet 'MTGOX' appartenant avec la société japonaise Tibanne.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 mai 2011, le Crédit Industriel et Commercial a notifié à la société Macaraja sa décision de mettre fin à leurs relations contractuelles et a procédé à la clôture de son compte le 15 juillet 2011 à l'expiration du délai de préavis de deux mois.
La société Macaraja a saisi la Banque de France afin d'obtenir la désignation d'une banque dans le cadre de la procédure dite du 'droit au compte'n'ayant pas réussi à ouvrir un compte auprès d'autres établissements bancaires. Le 11 juillet 2011, la Banque de France a désigné la Société Générale avant de désigner, à nouveau, le Crédit Industriel et Commercial par lettre du 22 juillet 2001 sur demande de la société Macaraja qui n'avait pas obtenu l'ouverture d'un compte par la Société Générale.
Par ordonnance de référé en date du 11 août 2011, confirmé en appel par un arrêt en date du 26 août 2011, le tribunal de commerce de Créteil a enjoint au Crédit Industriel et Commercial d'ouvrir un compte de dépôt au nom de la société Macaraja lequel sera ouvert sous le numéro 1097/0020088101.
Estimant que ce compte fonctionnait de manière anormale, le Crédit Industriel et Commercial a dénoncé la convention de compte par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 août 2011.
Par ordonnance de référé en date du 31 août 2011, le tribunal de commerce de Créteil a ordonné au Crédit Industriel et Commercial de rouvrir, sous astreinte le compte litigieux en limitant son utilisation aux services de base visés par l'article D.312-5 du code monétaire et financier jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur le caractère fondé ou non du refus de la banque de maintenir le compte de dépôt en ses livres au vu de la nature de l'activité de la société Macaraja ou d'une dénonciation conventionnelle dans les conditions de l'article L.312-1 du code monétaire et financier a saisi le juge du fond.
Le Crédit Industriel et Commercial a alors procédé à l'ouverture d'un compte service de base professionnel au nom de la société Macajara sous le numéro 10971/000288102 lequel a été clôturé le 9 décembre 2011.

Par jugement en date du 6 décembre 2011, le tribunal de commerce de Créteil a dit que
- il n'y a pas lieu de se prononcer sur les bitcoins,
- l'activité de la société Macaraja s'analyse comme la fourniture de services de paiements,
- la société Macaraja exerce son activité en dehors des règles de droit qui s'imposent à elle,
- le Crédit Industriel et Commercial est bien fondé à mettre un terme avec effet immédiat à ses relations contractuelles avec la société Macaraja et à ordonner la clôture du compte de dépoté n° 10971/00020088102 ouvert dans ses livres au nom de cette dernière,
- le principe de gratuité applicable aux services bancaires de base ne saurait s'appliquer aux opérations qui n'entrent pas dans le cadre du fonctionnement normal du compte tel qu'il a été ouvert par la société Macaraja,
et a condamné la société Macaraja à payer au Crédit Industriel et Commercial la somme de 4.178,59 euros correspondant aux commissions de tenue de compte et de mouvement pour la période comprise entre le 11 août 2011 et le 2 novembre 2011, débouté la société Macaraja de sa demande formée de ce chef, dit la société Macaraja irrecevable en sa demande de liquidation de l'astreinte prononcée par le président du tribunal statuant à en référé le 31 août 2011, dit la société Macaraja mal fondée en sa demande en dommages-intérêts et l'en a déboutée, dit que le Crédit Industriel et Commercial est mal fondé en sa demande en dommages-intérêts et l'en a débouté, condamné la société Macaraja à payer au Crédit Industriel et Commercial la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, rejeté toutes autres demandes, ordonné l'exécution provisoire, condamné la société Macaraja aux dépens.
La déclaration d'appel de la SAS Macaraja a été remise au greffe de la cour le 4 janvier 2012.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 19 avril 2013, la SAS Macaraja demande l'infirmation du jugement déféré et à la cour, statuant à nouveau, de
- prendre acte que le Crédit Industriel et Commercial ne conteste pas que le bitcoin ne constitue pas une monnaie électronique,
- dire que le bitcoin n'est pas une monnaie électronique, mais un bien immatériel non soumis à la législation des monnaies électroniques,
- dire que l'activité de la société Macaraja n'est pas une activité de service de paiement,
- dire que l'activité de la société Macaraja est une activité non soumise à agrément ou dispense d'agrément de l'Autorité de Contrôle Prudentiel en application de l'article 3 de la directive 2007/64/CE,
- dire, à titre subsidiaire, que si l'activité de la société Macaraja venait à être considérée comme relevant de la réglementation applicable aux établissements de paiement au sens de l'article L.521-1 du code monétaire et financier, elle entre en tout hypothèse dans le champ d'application de l'exemption dite de 'réseau limité' de l'article L.521-3-I du code monétaire et financier et que, en tant que telle, elle ne nécessite pas l'agrément de l'Autorité de Contrôle Prudentiel,
- dire que la clôture du compte par le Crédit Industriel et Commercial s'est faite en violation des dispositions sur le droit au compte et en violation des obligations contractuelles du Crédit Industriel et Commercial,
- ordonner la réouverture immédiate du compte de la société Macaraja n° 10971/00020088102 sous astreinte de 5.000 euros par jour de retard à compter d'un délai de 24 heures suivant la signification de l'arrêt à intervenir,
- ordonner que l'utilisation de ce compte de dépôt sera limité aux services de base visés à l'article D.312-5 du code monétaire et financier, sans contribution financière de son titulaire conformément à l'article D.312-6 du même code, y compris sans commission de mouvement,
- dire que cette gratuité du compte ouvert dans le cadre de la procédure du 'droit au compte' ne distingue pas la destination des opérations et concerne aussi bien les opérations concernant la France, l'Europe ou l'international,
- dire que le Crédit Industriel et Commercial n'a pas à intervenir dans la gestion de la société Macaraja et doit s'arrêter de la questionner pour chacune de ses opérations bancaires et ne plus la questionner pour les opérations qu'elle réalise via le site internet du Crédit Industriel et Commercial,
- condamner le Crédit Industriel et Commercial à lui rembourser les commissions de mouvement et les frais bancaires prélevés à tort sur son compte pour un montant respectif de 383,44 euros et de 49,50 euros,
- condamner le Crédit Industriel et Commercial à lui rembourser les commissions de mouvement et les frais bancaires d'un montant total de 4.178,59 euros que la société Macaraja a été condamnée à lui verser par jugement du tribunal de commerce de Créteil,
- condamner le Crédit Industriel et Commercial à lui payer la somme de 92.422,48 euros à titre de dommages-intérêts,
- condamner le Crédit Industriel et Commercial à lui payer la somme de 15.000 euros au titre du préjudice subi en raison du non respect de la procédure dite du 'droit au compte',
- débouter le Crédit Industriel et Commercial de l'intégralité de ses demandes au titre de son appel incident et en particulier de sa demande en dommages-intérêts de 50.000 euros au titre du préjudice subi par les opérations effectuées par la société Macaraja,
- condamner le Crédit Industriel et Commercial à lui payer la somme de 20.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.
Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, signifiées le 27 mai 2013, le Crédit Industriel et Commercial demande de déclarer l'appel de la société Macaraja mal fondé et l'en débouter, confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a rejeté sa demande en dommages-intérêts, et, sur son appel incident, de condamner la société Macaraja à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi, débouter la société Macaraja de toutes ses demandes, condamner la société Macaraja à lui payer la somme de 50.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 4 juin 2013.

CELA ÉTANT EXPOSÉ,
LA COUR
Considérant que la société Macaraja expose qu'elle est l'intermédiaire de commerce de la société Tibanne qui gère un site internet d'échange de bitcoins, accessible à l'adresse https/mtgox.com, consistant en une plate-forme d'échanges entre internautes d'un bien immatériel le bitcoin, lequel est une simple représentation d'un calcul complexe informatique réalisé par un logiciel spécifique créé en 2009 par un japonais, en fonction de la valeur que veulent bien lui attribuer les acheteurs et les vendeurs à l'occasion de chaque transaction ; qu'elle fait grief aux premiers juges d'avoir considéré que son activité s'analyse comme une fourniture de services de paiement et qu'elle a exercé cette activité en dehors des règles de droit s'imposant à elle, alors qu'elle n'est qu'un prestataire de services qui reçoit les fonds versés par les utilisateurs de la plate-forme MTGOX de la société Tibanne en garantie des transactions entre acheteurs et vendeurs de bitcoins qui ne sont pas une monnaie électronique et dont elle se dessaisit sur instructions de la société Tibanne qui la rémunère seule pour le service rendu; qu'elle ne reçoit d'instruction que de la seule société Tibanne et qu'elle procède aux virements des fonds perçus sur ses ordres; qu'elle conteste être un intermédiaire réalisant des encaissements de fonds pour le compte de tiers et revendique la qualité de sous-dépositaire de la société Tibanne en l'absence de tout lien avec les utilisateurs de la plate-forme MTGOX, appartenant à la société Tibanne, qui garantit la bonne fin de la transaction entre acheteurs et vendeurs par le dépôt des fonds versés sur son compte propre ouvert au Crédit Industriel et Commercial dans l'attente de l'ouverture d'un compte spécifique dédié, rendant les offres irrévocables ; qu'elle prétend que ce dépôt a une nature civile et ne constitue pas un dépôt bancaire au sens de l'article L. 312-2 du code monétaire et financier puisqu'elle ne peut pas disposer des fonds pour son propre compte ayant l'obligation de les restituer au bénéficiaire de la garantie ainsi qu'il a été jugé par l'ordonnance de mainlevée de la saisie pénale du 29 juin 2012 et qu'elle ne reçoit pas les fonds du public, que ce dépôt n'est pas fait dans l'intérêt des utilisateurs et qu'il s'agit d'un entiercement qu'elle effectue pour le compte de la société Tibanne en sa qualité d'intermédiaire de commerce ; qu'elle n'a commis aucune violation du monopole bancaire n'exerçant pas de manière habituelle la profession de banquier et soutient que les éléments constitutifs de l'infraction définie par l'article L.571-3 du code monétaire et financier qui repose sur des critère cumulatifs d'habitude et de diffusion ne sont pas réunis, dès lors qu'elle exerce son activité au profit d'une seule et même entité, qui est la société Tibanne, qui peut seule lui donner des instructions de mouvement qui ne sont pas des ordres de paiement, tels que définis par la directive 2007/64/CE ; qu'elle ne reçoit pas d'ordre de paiement sur son compte de dépôt et qu'elle est seule responsable des ordres de paiement sans intervention ou initiative d'un tiers ; qu'elle estime être transparente en agissant pour le compte d'un mandant et d'un tiers ; que les opérations sont réalisées sur son compte pour son propre compte afin d'exécuter les engagements de Tibanne envers les utilisateurs de la plate-forme GMTOX et qu'il existe une obligation sous-jacente impliquant des virements sur son compte ou à partir de son compte au profit de tiers, qu'il ne peut pas lui être reproché une violation des règles de lutte contre le blanchiment d'argent puisqu'elle n'est pas un établissement de paiement et n'a pas d'obligation à ce titre; qu'elle ajoute que, même en admettant qu'elle exerce une activité de prestataire de paiement, elle bénéficie de l'exemption d'agrément prévue par l'article L.521-3 du code monétaire et financier pris en application de la directive 2007/64/CE, car elle ne fournit des moyens de paiement qui ne sont acceptés qu'au sein d'un réseau limité de personnes enregistrées sur la plate-forme MTGOX, à l'exclusion de tout public extérieur, pour un éventail limité de biens ou de services portant sur l'échange de bitcoins, de sorte qu'elle rentre dans le champ d'exemption de l'agrément dite de réseau limité ; qu'il n'est pas démontré qu'elle a voulu faire des placements à court terme avec les sommes reçues des acheteurs de bitcoins pour augmenter ses revenus en violation de l'article L.522- 4 du code monétaire et financier ;
Considérant que la société Macaraja reproche ensuite au Crédit Industriel et Commercial d'avoir abusivement clôturé son compte de dépôt, lequel est nécessaire à l'exercice de son activité commerciale, sans motif et sans préavis à la suite d'une immixtion fautive dans ses affaires pour qualifier d'illicite son activité au-delà de ses prérogatives qui lui interdisent de contrôler les opérations faites par son client sur son compte au mépris du secret des affaires et d'avoir manqué à son obligation de bonne foi, en estimant qu'elle réalisait des mouvements anormaux contraires à son objet social sur son compte bancaire, bien que sa prestation au profit de la société Tibanne rentre dans son objet social ; que la banque n'est pas fondée à invoquer un comportement gravement répréhensible pour justifier la clôture de son compte dans les conditions contestées et qu'elle lui a abusivement imposé des plafonds journaliers, hebdomadaires et mensuels d'opérations l'empêchant d'exécuter sa prestation au profit de la société Tibanne ; qu'elle estime être en droit de bénéficier du droit au compte pour exercer son activité commerciale de base ayant cessé l'activité litigieuse depuis l'avis consultatif de l'Autorité de Contrôle Prudentiel du 27 avril 2011 et du principe de gratuité applicables aux services bancaires, justifiant qu'elle soit remboursée de toutes les sommes indûment prélevées sur son compte par le Crédit Industriel et Commercial ; qu'elle prétend avoir subi un préjudice important ayant subi une perte financière puisqu'elle a été empêchée d'exercer son activité du 15 juillet 2011 au 16 août 2011 et du 27 août 2011 au 2 septembre 2011 et perdu la somme de 1.074,68 euros par jour de chiffre d'affaires, une atteinte à son image ;
Considérant qu'en réponse, le Crédit Industriel et Commercial fait valoir que la société Macaraja a utilisé son compte de dépôt pour y effectuer des opérations anormales relevant de la fourniture de services de paiement au profit de tiers en violation du monopole des établissements de paiement et sans agrément ; qu'elle ne peut pas se prévaloir du droit au compte de l'article L.312-1 du code monétaire et financier pour effectuer un service de paiement au profit des utilisateurs de la plate-forme MTGOX ; que les fonds reçus par la société Macaraja des acheteurs de bitcoins ne constituent pas une garantie, qui ne pourrait être restituée qu'à la personne qui l'a constituée, alors qu'ils sont versés aux vendeurs des bitcoins à titre de paiement d'une transaction et qu'ils n'appartiennent pas à la société Tibanne ; que l'activité de la société Macaraja relève du pur service de paiement du fait de son interposition entre acheteurs et vendeurs, recevant les sommes des uns pour les verser aux autres avec pour objectif de minimiser les coûts liés aux opérations de virement et de change ; qu'elle fournit un service de paiement au sens de l'article L.314-1-II du code monétaire et financier, ce qui a été confirmé par la Direction des Agréments par lettre du 13 octobre 2011 ; que les utilisateurs de la plate-forme MTGOX qui achètent et vendent des bitcoins sont un public et n'ont pas d'autre relation avec la société Macaraja que celle de réaliser le paiement de leur transaction ; qu'il estime que la société Macaraja ne peut pas prétendre être exemptée de l'agrément prévu par l'article L.521-3 du code monétaire et financier, dès lors que son activité d'intermédiaire financier pour le règlement de transactions sur les bitcoins ne relèvent du champ de l'exemption et qu'elle n'a jamais déposé de dossier auprès de la Direction des Agréments afin de vérifier qu'elle pouvait en bénéficier ; qu'il prétend que la société Macaraja perçoit les fonds de tiers sans respecter les règles de sécurité et de cantonnement des fonds en violation des dispositions de l'article L.522- 4 du code monétaire et financier et qu'elle a voulu placer les fonds de ses clients de manière temporaire pour obtenir des revenus complémentaires se comportant comme un établissement de crédit en dehors des règles légales, qu'elle ne respecte pas les obligations relatives à la lutte contre le blanchiment de capitaux et que son activité favorise le blanchiment ; qu'il a légitimement procédé à la clôture des comptes de la société Macaraja qui a persisté à exercer une activité de fourniture de paiement en dehors des règles de droit, qui s'imposent à elle, après notification par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 août 2001, ce qu'il pouvait faire avec effet immédiat compte tenu du comportement gravement répréhensible de sa cliente même s'il a lui laissé une délai respectant le préavis ayant procédé à la clôture effective du compte le 9 décembre ; qu'il ne peut pas lui être reproché de s'être ingéré dans les affaires de son client compte tenu de l'activité anormale de son compte qui est passé en quelques mois à un solde créditeur de plus d'un million d'euros avec des mouvements quotidiens par centaines ; qu'il appartient à la société Macaraja, dont le compte dans ses livres n'a plus d'existence juridique et matériel, de saisir à nouveau la Banque de France pour avoir un nouveau compte de dépôt ; qu'il n'y a pas de faute ouvrant droit à des dommages-intérêts et que les opérations réalisées par la société Macaraja sur son compte dépassant les services bancaires de base, il n'y a pas de gratuité; qu'il demande le paiement de dommages-intérêts en réparation des fautes et de la mauvaise foi de la société Macaraja qui a utilisé le droit au compte pour multiplier les procédures afin d'exercer une activité illégale, l'obligeant à mobiliser d'importantes ressources humaines et techniques pour traiter les centaines d'opérations de paiement effectuées sur son compte de dépôt en dehors de tout cadre contractuel et pour faire cesser ces agissements ;
Considérant qu'il résulte des pièces produites que la plate-forme MTGOX appartenant à la société Tibanne permet l'échange de bitcoins entre acheteurs et vendeurs au prix de la valeur qu'ils leur donnent ; que, pour permettre les transactions dans la zone Sepa, la société Tibanne et la société Macaraja ont convenu que cette dernière encaisse les fonds versés par les acheteurs en vue de l'achat de bitcoins sur son compte de dépôts personnel ouvert dans les livres du Crédit Industriel et Commercial pour les reverser aux vendeurs, après paiement de la commission de la société Tibanne et la sienne, une fois la transaction finalisée ; qu'elle n'encaisse pas les fonds pour le compte de la société Tibanne à qui ils n'appartiennent pas, mais des acheteurs qui utilisent la plate-forme MTGOX pour passer leurs ordres d'achat afin de payer les vendeurs ; que les fonds versés sur le compte de la société Macaraja le sont en euros, qui est une monnaie réelle fondée sur une unité monétaire européenne constituant le moyen de paiement choisi entre acheteur et vendeur dans la zone euros qui représente la valeur sur le marché des bitcoins ; que la nature des bitcoins n'est pas l'objet du débat qui est de qualifier le prestation de la société Macaraja et de savoir si elle s'analyse en une prestation de paiement pour le compte de tiers, de sorte qu'il est indifférent à la solution du litige de déterminer si le bitcoin est une monnaie électronique ainsi que l'ont pertinemment dit les premiers juges, sans reconnaissance aucune de la part du Crédit Industriel et Commercial sur sa nature ;
Considérant que le versement des fonds en euros nécessaire au paiement de l'achat de bitcoins est un dépôt de fonds fait entre les mains de la société Macaraja par les acheteurs de bitcoins via la plate-forme MTGOX, qui leur donne un identifiant à cette fin, pour payer un tiers vendeur ; que les fonds versés entre les mains de la société Macaraja ne sont pas une garantie puisqu'ils sont le moyen de paiement de la transaction de bitcoins qui n'est pas le sous-jacent de la vente, mais son objet et qui sont alors payés en devises euros ; que la société Macaraja n'est pas le sous-dépositaire de la société Tibanne qui n'encaisse rien et ne lui verse rien et qu'il n'y a pas d'entiercement en l'absence de gage;
Considérant ainsi que la société Macaraja sert d'intermédiaire de commerce pour effectuer une prestation de paiement de fonds appartenant à des tiers pour le compte de tiers, ce qui s'analyse en une action de service de paiement au sens de l'article L.314-1 du code monétaire et financier transposant la directive 2007/64/CE et une activité d'intermédiaire financier régie par les articles L.511-5 et L.519-2 du code monétaire et financier, justifiant un agrément de l'Autorité de Contrôle Prudentiel que la société Macaraja n'a pas sollicité, bien qu'elle lui ait demandé son avis sur la nature de son activité et qu'elle lui ait répondu par courrier du 13 octobre 2011 que, selon elle, et sous réserve de l'avis du Collège, elle exerçait une activité de paiement supposant une habilitation ;
Considérant que la société Macaraja ne justifie pas relever du champ d'exemption de l'agrément, dès lors qu'elle effectue des opérations en nombre de réception de dépôts à vue de tiers et de virements de fonds pour le compte de tiers depuis le début de son activité d'intermédiaire de commerce à la fin du mois de mars 2011 et que son activité touche un public constitué des internautes, qui utilisent la plate-forme MTGOX, dont le nombre n'est pas limité et qui constitue un réseau ouvert sur le monde entier sans vérification réelle des identités des personnes qui l'utilisent, étant précisé que les bitcoins eux-mêmes sont acceptés par de nombreux sites internet pour l'achat de biens et de prestations de service, excluant qu'il s'agisse d'un éventail limité de biens au sens l'article L.521-3 du code monétaire et financier;
Considérant que la société Macaraja, qui reçoit des fonds de tiers sur son compte propre sans les distinguer de ses fonds propres et effectue des paiements pour le compte de tiers par virement pour restituer les fonds à un client de MTGOX qui a, soit, déposé de l'argent sur son compte et effectué des achats puis des ventes de produits avec son argent, soit, vendu un produit et récupéré l'argent en échange, tout en sachant que le client peut laisser une partie des fonds sur le site MTGOX via son compte, selon son propre mail du 18 avril 2011, générant une confusion de ses fonds propres avec ceux des tiers puisqu'ils sont fongibles, ne peut pas reprocher à la banque, qui exerce son devoir de vigilance sur la normalité du fonctionnement du compte, de l'interroger sur l'origine des fonds qui transitent sur son compte et de s'ingérer dans ses affaires, ni d'avoir imposé des plafonds d'opérations quotidiens, hebdomadaires ou mensuels, compte tenu du fonctionnement de ce compte excédant son usage normal ;
Considérant que la société Macaraja ne peut pas se prévaloir de l'ordonnance pénale du 29 juin 2012, ordonnant la mainlevée de la saisie pénale des fonds détenus sur son compte pour qu'il soit remis à la société Tibanne afin de les restituer à leurs légitimes propriétaires, qui en sont privés depuis la saisie, laquelle ne statue pas sur la nature de son activité et ne règle en rien le litige soumis à la cour ;
Considérant qu'il est établi que le Crédit Industriel et Commercial a notifié à la société Macaraja sa volonté de mettre fin à leurs relations contractuelles par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 mai 2011 avec un préavis de 60 jours ; qu'il a, ensuite, sur désignation de la Banque de France, sollicitée par la société Macaraja, qui n'avait pas trouvé une autre banque acceptant de lui ouvrir un compte de dépôt pour exercer son activité, ouvert un nouveau compte ; que, constatant que le droit au compte limité au services de base était encore utilisé pour effectuer des paiements pour le compte de tiers en dehors des règles de droit, il a informé la société qu'il procédait à la clôture de son compte, par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 août 2011 ; qu'il a cependant ouvert un nouveau compte en exécution de l'ordonnance de référé du 31 août 2011 qu'il a clôturé le 9 décembre 2011 ;
Considérant que la société Macaraja, qui n'a pas réussi à trouver d'autres établissements bancaires acceptant de lui ouvrir un compte à la suite de la résiliation de la convention de compte devenue effective le 15 juillet 2011, ne peut pas le reprocher au Crédit Industriel et Commercial, pas plus qu'elle ne peut lui reprocher d'avoir clôturé, à chaque fois, le nouveau compte ouvert dans le cadre de la procédure du droit au compte qu'elle utilisait, pour exercer une activité de service de paiement incompatible avec un usage normal de ce compte conforme à l'article D.312-5 du code monétaire et financier ; qu'il est établi par les relevés du compte qu'elle a continué à recevoir des dépôts de fonds de tiers jusqu'à sa clôture en décembre 2011;
Considérant que la société Macaraja ne peut pas, sous couvert du droit au compte prévu par l'article L.312-1 du code monétaire et financier, revendiquer le réouverture d'un compte de dépôt clos depuis le 9 décembre 2011 sur le fondement du droit au compte qu'elle a détourné de sa finalité et dont elle a abusé pour exercer une activité de prestataire de paiement, qui représente 99 % de son activité selon un courrier qu'elle a adressé à l'Insee en date du 10 août 2011, en dehors des règles de droit, et à laquelle elle n'a pas mis fin à la réception du courrier de l'Autorité de Contrôle Prudentiel du 13 octobre 2011 puisqu'elle a continué à recevoir des dépôts de fonds des utilisateurs de la plate-forme MTGOX ultérieurement ainsi qu'il a déjà été dit ;
Considérant que le principe de gratuité du compte de dépôt à vue dans le cadre du droit au compte, qui a été utilisé pour d'autre services que ceux de base, ne s'applique pas à l'utilisation du compte faite par la société Macaraja ; que c'est à bon droit que les premiers juges l'ont condamnée à payer les commissions de tenue et de mouvement de compte sur lequel pouvaient être réalisés plus de 100 virements par jour au profit de tiers;
Considérant qu'en l'absence de faute de la banque, la société Macaraja est mal fondée en ses demandes en dommages-intérêts ainsi qu'en toutes ses autres demandes ; qu'elle sera déboutée de son appel mal fondé ;
Considérant que le Crédit Industriel et Commercial est mal fondé en sa demande en dommages-intérêts en réparation du préjudice subi lequel n'est pas établi au regard des frais et commissions perçus en l'absence de tous autres éléments justificatifs ;
Considérant que le jugement déféré sera, en conséquence, confirmé en toutes ses dispositions ;
Considérant qu'il est inéquitable de laisser à la charge de la partie intimée le montant de ses frais irrépétibles en cause d'appel ; qu'il convient de condamner la société Macaraja à payer au Crédit Industriel et Commercial la somme de 10.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile;
Considérant que la société Macaraja, qui succombe, supportera les dépens d'appel;

PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement déféré,
Y ajoutant,
Condamne la SAS Macaraja à payer au Crédit Industriel et Commercial la somme de 10.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Rejette toutes autres demandes,
Condamne la SAS Macaraja aux dépens d'appel avec distraction au profit de l'avocat concerné dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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