La lettre juridique n°588 du 23 octobre 2014 : Procédure administrative

[Evénement] Les recours administratifs préalables - Compte rendu de la conférence des Universités d'été de l'Ecole des avocats Aliénor du 29 août 2014

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[Evénement] Les recours administratifs préalables - Compte rendu de la conférence des Universités d'été de l'Ecole des avocats Aliénor du 29 août 2014. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/21346704-cite-dans-la-rubrique-b-procedure-administrative-b-titre-nbsp-i-les-recours-administratifs-prealable
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par Yann Le Foll, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo - édition publique

le 24 Octobre 2014

Dans le cadre des Universités d'été de l'Ecole des avocats Aliénor qui se sont déroulées à Arcachon les 29 et 30 août 2014 et qui avaient pour thème "Les modes alternatifs de règlement des litiges", s'est tenue une conférence animée par Jean-François Brisson, Professeur à l'Université de Bordeaux sur "les recours administratifs préalables". Les éditions juridiques Lexbase, présentes à cet évènement, vous en proposent un compte rendu. I - Le cadre général des recours administratifs préalables

A - Un objet contentieux

Pour qu'il y ait recours administratif préalable, il faut que cette démarche soit une réclamation ou une contestation formée contre une décision de l'administration. L'intérêt du recours administratif préalable est d'interrompre le temps du délai contentieux. Ainsi, une lettre ne contenant aucune conclusion tendant à l'annulation d'un décret ne présente donc pas le caractère d'un recours gracieux ayant conservé le délai du recours contentieux contre ce décret (CE 1° et 4° s-s-r., 21 mai 1986, n° 48495, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A4733AMA). Dans la pratique, les tribunaux sont plutôt conciliants et requalifient souvent la réclamation de façon à révéler un objet contentieux. En outre, une part de casuistique est toujours présente dans l'appréciation du juge administratif. Concernant un recours administratif préalable obligatoire formé contre une décision relative à une allocation, l'article L. 262-47 du Code de l'action sociale et des familles (N° Lexbase : L1962IYC) exigeant que toute réclamation dirigée contre une décision relative au revenu de solidarité active (RSA) fasse l'objet, préalablement à l'exercice d'un recours contentieux, d'un recours administratif auprès du président du conseil général, une demande de remise ou de réduction d'indu de RSA doit être regardée comme le recours administratif préalable obligatoire et définit l'office du juge saisi de la décision relative à cette demande (CE, 1° et 6° s-s-r., 23 mai 2011, n° 344970 et n° 345827, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A5853HSL).

La distinction entre la demande préalable (qui lie le contentieux) et le recours préalable a eu tendance à s'estomper avec la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations (N° Lexbase : L0420AIE), dont l'article 18 énonce que "sont considérées comme des demandes au sens du présent chapitre les demandes et les réclamations, y compris les recours gracieux ou hiérarchiques, adressées aux autorités administratives [...]". Cette évolution était, d'ailleurs, à rebours de la jurisprudence du Conseil d'Etat beaucoup plus restrictive selon laquelle de nombreuses garanties d'information ne s'appliquent pas aux recours administratifs préalables : "la circonstance que l'existence de ce recours obligatoire n'ait pas été indiquée clairement dans la notification de l'arrêté attaqué, si elle empêchait que cette notification fasse courir le délai du recours contentieux à l'encontre de cet arrêté, est sans incidence sur la recevabilité de la demande présentée directement devant le tribunal administratif" (CE 1° et 2° s-s-r., 3 mai 2002, n° 224565, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A6351AYU). La question se pose de l'appréhension par le système juridique français de ces recours. Depuis 1889, le Conseil d'Etat, par l'arrêt "Cadot" et l'abandon de la "théorie du ministre juge" (CE, Sect., 13 décembre 1889, n° 66145, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A9731B7K), a affirmé qu'il était compétent pour connaître directement de tout recours en annulation dirigé contre une décision administrative, sauf si un texte en dispose autrement de façon expresse. Jusqu'alors, il n'était directement compétent pour connaître d'un recours en annulation que dans la mesure où un texte l'avait expressément prévu. A défaut, les ministres disposaient de la compétence générale pour se prononcer sur les recours dirigés contre les décisions administratives.

A partir des années 70 et 80, l'on a assisté à une modification de la perception du recours administratif en raison, notamment, de la naissance des notions de transparence et de démocratie administrative sous influence des pays étrangers, mais aussi de l'engorgement des juridictions administratives. Deux alternatives étaient alors possibles : soit réorganiser l'administration afin que celle-ci attire directement les réclamations, soit, choix finalement retenu, instituer les recours administratifs obligatoires, après une expérimentation plutôt favorable en matière fiscale (malheureusement non transposable dans le contentieux de la légalité), ce qui présentait aussi l'avantage pour les supérieurs hiérarchiques d'avoir un oeil sur ce qui se passe dans leurs services.

B - La distinction des recours administratifs et des demandes adressées à l'administration

La conciliation, la médiation, l'arbitrage, font intervenir un tiers, alors que le recours administratif préalable fait intervenir un juge ou un supérieur hiérarchique. En matière de conciliation, dans le domaine sportif (C. sport, art. L. 141-4 N° Lexbase : L5093IML et R. 141-5 N° Lexbase : L8136HZD), le contentieux doit résulter d'une décision prise soit dans le cadre de l'exercice de prérogatives de puissance publique, soit pour l'application des statuts fédéraux ; le demandeur doit avoir un intérêt direct et personnel à agir et le conciliateur fait une proposition de conciliation qui est purement indicative (voir le comité de règlement amiable des marchés publics). Le médiateur, à la différence du conciliateur, va proposer une solution alors que le conciliateur va essayer de rapprocher les points de vue.

La transaction connaît deux sortes de procédures : la transaction en cours d'instance, dans laquelle le juge administratif va contrôler le contenu de la transaction avant de l'homologuer et la transaction en dehors de toute instance. Sous réserve que la transaction ait pour objet le règlement ou la prévention de litiges pour le jugement desquels la juridiction administrative serait compétente, le juge saisi de conclusions recevables tendant à l'homologation de cette transaction vérifie que les parties consentent effectivement à la transaction, que l'objet de cette transaction est licite, qu'elle ne constitue pas de la part de la collectivité publique intéressée une libéralité et qu'elle ne méconnaît pas d'autres règles d'ordre public (CE avis, 6 décembre 2002, n° 249153, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A4627A47). Pour les pouvoirs publics, la recherche d'une solution amiable pouvant conduire à la conclusion d'une transaction doit être envisagée dans tous les cas où elle permet d'éviter un contentieux inutile et coûteux, tant pour l'administration que pour les personnes intéressées (circulaire du 6 avril 2011, relative au développement du recours à la transaction pour régler amiablement les conflits N° Lexbase : L9314IPN).

En 2008, à la demande du Premier ministre, le Conseil d'Etat a réalisé une étude sur les recours administratifs préalables obligatoires (RAPO). Ce type de recours désigne l'ensemble des procédures par lesquelles une personne, souhaitant contester une décision administrative qui lui est défavorable, est tenue de former un recours devant l'autorité administrative préalablement à toute saisine du juge, généralement administratif. Les RAPO se sont développés spécialement dans quatre domaines : le droit des étrangers (en particulier les demandes de visas), le permis de conduire (en matière de retrait de points), la fonction publique civile et l'administration pénitentiaire. Ce rapport fait suite à un mouvement important inauguré par une loi du 31 décembre 1987 (loi n° 87-1127, portant réforme du contentieux administratif N° Lexbase : L4990A8C, dont l'article 13 énonçait que "des décrets en Conseil d'Etat déterminent dans quelles conditions les litiges contractuels concernant l'Etat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics, ainsi que les actions mettant en jeu leur responsabilité extracontractuelle sont soumis, avant toute instance arbitrale ou contentieuse, à une procédure préalable soit de recours administratif, soit de conciliation"), laquelle n'a pas eu de décrets d'application. La loi n° 2000-597 du 30 juin 2000, relative au référé devant les juridictions administratives (N° Lexbase : L0703AIU), via son article 23, a elle aussi créé un RAPO concernant les militaires. La loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, de simplification et d'amélioration de la qualité du droit (N° Lexbase : L2893IQ9), a institué de manière expérimentale un RAPO à destination des agents publics jusqu'à juin 2014.

La mise en place du RAPO s'est accompagnée de quelques difficultés. Ainsi, il a été jugé en 2007 que la décision par laquelle le ministre de la Défense rejette la demande d'un ancien militaire sous contrat tendant au versement de l'allocation d'aide au retour à l'emploi n'est pas au nombre des actes relatifs à la situation personnelle des militaires ; elle n'a donc pas à faire l'objet d'un recours administratif préalable au recours contentieux devant la commission des recours des militaires (CE 2° et 7° s-s-r., 2 mars 2007, n° 291201, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A4308DU4). En 2006, la Haute juridiction estimait que "les dispositions législatives ou réglementaires prévoyant devant les instances ordinales une procédure obligatoire de recours administratif préalablement à l'intervention d'une juridiction doivent être interprétées comme s'imposant alors à peine d'irrecevabilité du recours contentieux à toute personne justifiant d'un intérêt lui donnant qualité pour introduire ce recours contentieux, une procédure de recours administratif préalable n'est susceptible de s'appliquer qu'aux personnes qui sont expressément énumérées par les dispositions qui en organisent l'exercice" (CE, Sect., 10 mars 2006, n° 278220, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A4916DNE) ; cette solution est d'application générale sauf en ce qui concerne les juridictions ordinales (CE 4° et 5° s-s-r., 28 septembre 2005, n° 266208, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A6079DKD) et a donné lieu à une modification du Code de commerce pour viser dorénavant également les tiers.

II - L'examen des recours par l'administration

A - Les droits et garanties offertes aux administrés auteurs d'un recours préalable

La motivation des décisions de rejet

Aux termes de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public (N° Lexbase : L8803AG7), modifiée par la loi du 17 mai 2011 précitée, "doivent également être motivées les décisions administratives individuelles qui dérogent aux règles générales fixées par la loi ou le règlement". En cas de silence de l'administration, le requérant est en droit de demander communication séparée des motifs.

L'assistance d'un avocat

La loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques (N° Lexbase : L6343AGZ), indique, à son article 6, que "les avocats peuvent assister et représenter autrui devant les administrations publiques [...]". Il en découle que les avocats ont qualité pour représenter leurs clients devant les administrations publiques sans avoir à justifier du mandat qu'ils sont réputés avoir reçu de ces derniers dès lors qu'ils déclarent agir pour leur compte (CE 3° et 8° s-s-r., 5 juin 2002, n° 227373, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A8675AYX).

L'obligation de transmission du recours par l'autorité saisie à tort

Dès lors qu'une autorité saisie n'a pas compétence pour traiter la demande et n'est pas au nombre des autorités administratives astreintes à l'obligation de transmission à l'autorité compétente, prévue à l'article 20 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, elle est tenue de rejeter la demande dont elle est saisie (CE 8° s-s., 12 mars 2003, n° 237613, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A5523A7P). En outre, la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations n'étant pas applicable aux établissements publics à caractère industriel et commercial, le Premier ministre n'a pas à renvoyer la demande aux établissements compétents (CE 2° et 7° s-s-r., 7 mai 2008, n° 299013, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A4292D8H).

L'obligation d'accuser réception du recours

Il résulte de la combinaison des articles 18 et 19 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, que le délai de recours ne court à l'encontre d'une telle décision implicite que si le recours gracieux ou hiérarchique, adressé après cette date, a fait l'objet d'un accusé de réception comportant les mentions exigées par les clauses règlementaires (CE 3° et 8° s-s-r., 19 février 2003, n° 243427, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A2706A7D). Toutefois, cette obligation ne s'applique pas aux relations entre les autorités administratives et leurs agents (CE 6° s-s., 13 février 2008, n° 300344, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A9152D4Q). Elle ne s'applique pas non plus dans le cas d'un recours administratif formé par un tiers à l'encontre d'une autorisation individuelle créant des droits au profit de leurs bénéficiaires (CE, Sect., 15 juillet 2004, n° 266479, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A3962KR8).

L'examen contradictoire du recours

La loi 12 avril 2000 ne combine pas l'examen contradictoire du recours avec l'obligation de motiver. Ainsi, la décision d'un préfet rejetant la demande de révision du dossier droits à paiement intervenue à la suite du recours gracieux formé à l'encontre d'une décision précédente statue sur une demande au sens de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, ce qui implique qu'il n'avait pas à motiver cette décision (CAA Bordeaux, 4ème ch., n° 08BX01366, 25 mars 2010, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A6338EXZ, voir dans le même sens, CAA Bordeaux, 6ème ch., n° 09BX02217, 13 avril 2010, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A0993MYG).

B - Les droits et prérogatives offerts aux autorités administratives agissant sur recours préalable

Le retrait et l'abrogation de la décision contestée

L'autorité administrative peut rejeter le recours en s'apercevant que la décision est illégale et donc être tentée de régulariser celle-ci, notamment si elle a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière. Elle peut faire aussi faire droit au recours et procéder au retrait ou à l'abrogation de la décision. Un arrêt "Ternon" de 2001 (CE, Ass., 26 octobre 2001, n° 197018, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A1913AX7) a précisé que, "sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires, et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision". En 2009, c'est l'arrêt "Coulibaly" qui a délivré la marche à suivre en matière d'abrogation des actes administratifs créateurs de droits, désormais conditionnée (CE, Sect., 6 mars 2009, n° 306084, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A6905ED4) et complétant les arrêts "Soulier" (CE, Sect., 6 novembre 2002, n° 223041, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A7473A38) et "Portalis" (CE, Sect., 14 mars 2008, n° 283943, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A3803D7Y) par laquelle la Haute juridiction administrative avait reconnu à l'autorité administrative un pouvoir d'abrogation particulièrement important puisque non limité dans le temps. En outre, l'autorité administrative peut légalement, dans le délai de recours contentieux, rapporter une décision implicite de rejet illégale créatrice de droits (CE 4° et 5° s-s-r., 26 janvier 2007, n° 284605, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A7085DTL).

En matière de décisions pécuniaires, l'arrêt "Soulier" précité avait indiqué "qu'une décision administrative accordant un avantage financier crée des droits au profit de son bénéficiaire alors même que l'administration avait l'obligation de refuser cet avantage ; qu'en revanche, n'ont pas cet effet les mesures qui se bornent à procéder à la liquidation de la créance née d'une décision prise antérieurement" (voir dans le même sens, une décision "Fontenille" de 2009, CE, Sect., 12 octobre 2009, n° 310300, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A0756EMX : le maintien indu du versement d'un avantage financier à un agent public, alors même que le bénéficiaire a informé l'ordonnateur qu'il ne remplit plus les conditions de l'octroi de cet avantage, n'a pas le caractère d'une décision accordant un avantage financier et constitue une simple erreur de liquidation). Dans un avis rendu le 28 mai 2014, le Conseil d'Etat a ensuite indiqué que l'administration n'a pas l'obligation de verser à l'agent public les sommes dues en application d'une décision illégale octroyant une rémunération à cet agent et ne pouvant plus être retirée (CE 2° et 7° s-s-r., 28 mai 2014, n° 376501, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A6384MP7). En matière de RAPO, ces règles ne sont pas applicables car l'on considère sue la décision du supérieur hiérarchique se substitue à la décision de l'autorité initiale et l'absorbe : dès lors, la décision initiale disparaît (CE 2° et 7° s-s-r., 8 juillet 2005, n° 264366, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A0007DKH).

La régularisation de la décision contestée

Il a été jugé que, si l'exercice d'un recours administratif préalable obligatoire a pour but de permettre à l'autorité administrative, dans la limite de ses compétences, de remédier aux illégalités dont pourrait être entachée la décision initiale, sans attendre l'intervention du juge, la décision prise sur le recours n'en demeure pas moins soumise elle-même au principe de légalité. En l'espèce, la décision du ministre ne purge pas de ses vices la décision initiale et doit présenter des garanties équivalentes, sous peine de se voir elle-même contestée (CE, Sect., 18 novembre 2005, n° 270075, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A6324DLS). Lorsque le ministre ne peut remédier à l'irrégularité de la procédure ayant donné lieu à la décision initiale, il lui incombe de rapporter celle-ci "et d'ordonner qu'une nouvelle procédure, exempte du vice qui l'avait antérieurement entachée, soit suivie" (CE 9° et 10° s-s-r., 29 juin 2011, n° 327693, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A5670HUK).

III - L'articulation des recours administratifs et juridictionnels

A - La préservation de l'accès au juge

L'interruption sous délai du recours contentieux

Le recours administratif proroge le délai contentieux. Si le recours est formé dans le délai de deux mois, il interrompt le recours contentieux qui va recommencer à courir à partir du moment où l'autorité prend sa décision (s'ouvre alors un nouveau délai de deux mois) (CE, Sect., 3 décembre 2004, n° 260786, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A1097DED). En l'absence d'indication par les dispositions applicables du délai dans lequel doit être formé, à l'encontre d'une décision administrative, un recours administratif préalable obligatoire, ce délai est le délai de recours contentieux de droit commun de deux mois (CE 9° et 10° s-s-r., 26 janvier 2011, n° 318515, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A7469GQP). En outre, un demandeur, qui n'avait pas établi devant le tribunal administratif avoir exercé dans le délai de recours posé par l'article R. 421-1 du Code de justice administrative (N° Lexbase : L8421GQX) un recours gracieux contre la décision dont il demandait l'annulation et avait vu sa demande rejetée comme tardive, peut apporter la preuve d'une telle formalité en appel (CE 1° et 6° s-s-r., 18 novembre 2011, n° 340181, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A9273HZH). Enfin, lorsque, dans le délai initial du recours contentieux ouvert à l'encontre d'une décision administrative, sont exercés contre cette décision un recours gracieux et un recours hiérarchique, le délai du recours contentieux, prorogé par l'exercice de ces recours administratifs, ne recommence à courir à l'égard de la décision initiale que lorsqu'ils ont été l'un et l'autre rejetés (CE 4° et 5° s-s-r., 7 octobre 2009, n° 322581, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A0786EM3).

La coordination du RAPO avec le référé-suspension

Il est possible d'introduire une demande de suspension d'une décision soumise à un recours administratif préalable obligatoire, sans que ce dernier ait lui-même un caractère suspensif. La suspension peut être demandée au juge des référés sans attendre que l'administration ait statué sur le recours préalable, dès lors que l'intéressé a justifié, en produisant une copie de ce recours, qu'il a engagé les démarches nécessaires auprès de l'administration pour obtenir l'annulation ou la réformation de la décision contestée (CE, Sect., 12 octobre 2001, n° 237376, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A1529AXW).

B - La fixation de l'instance

L'immutabilité des conclusions

Un recours gracieux dirigé contre certaines dispositions d'un décret n'a pu, dès lors, conserver le délai de recours contentieux en ce qui concerne les autres dispositions du décret. Ainsi, les conclusions dirigées contre lesdites dispositions sont tardives et par suite irrecevables (CE 1° et 4° s-s-r., 7 mai 1993, n° 121131, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A9558AMX).

La substitution des décisions

La décision prise à la suite du recours se substitue nécessairement à la décision initiale ; elle est seule susceptible d'être déférée au juge de la légalité. Si l'exercice d'un tel recours a pour but de permettre à l'autorité administrative, dans la limite de ses compétences, de remédier aux illégalités dont pourrait être entachée la décision initiale, sans attendre l'intervention du juge, la décision prise sur le recours n'en demeure pas moins soumise elle-même au principe de légalité. Le requérant qui entend contester cette dernière décision peut invoquer devant le juge, jusqu'à la clôture de l'instruction, tout moyen de droit nouveau, alors même qu'il n'aurait pas été invoqué à l'appui du recours administratif contre la décision initiale, dès lors que ces moyens sont relatifs au même litige que celui dont avait été saisie l'autorité administrative (CE 2° et 7° s-s-r., 21 mars 2007, n° 284586, publié au recueil Lebon N° Lexbase : A7305DU4).

La cristallisation du débat contentieux

De manière générale, il n'existe pas de cristallisation du débat contentieux (sauf dans le cas de l'immutabilité des conclusions) : on n'est pas tenu devant le juge par les arguments développés devant l'administration. En matière de RAPO, il n'y a pas d'obligation de contestation devant le juge de la première décision mais uniquement la décision rendue par l'administration sur recours. Si la décision est annulée, la décision est renvoyée devant l'autorité initiale qui doit à nouveau statuer. Dans le cas d'un recours administratif facultatif, il faut demander l'annulation des deux décisions, à savoir la décision initiale et la décision implicite de refus du recours.

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