Jurisprudence : CA Aix-en-Provence, 28-03-2013, n° 10/13609, Confirmation



COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE 11e Chambre B
ARRÊT AU FOND
DU 28 MARS 2013
N° 2013/169
Rôle N° 10/13609
SAS CLINIQUE DE LA CIOTAT
C/
SCI LA LICORNE
Grosse délivrée
le
à SIDER TOLLINCHI
Décision déférée à la Cour
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 10 Mai 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 05/12908.

APPELANTE
SAS CLINIQUE DE LA CIOTAT, représentée par son gérant,
dont le siège social est sis LA CIOTAT
représentée par Me Philippe- laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, constitué aux lieu et place de la SCP SIDER, avoués
plaidant par Me JOUTEUX de la SCP LAGRAVE-JOUTEUX, avocats au barreau de LA ROCHELLE
INTIMÉ
SCI LA LICORNE, poursuites et diligences de son représentant légal,
dont le siège social est sis LA CIOTAT
représenté par la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, constituée aux lieu et place de la SCP TOLLINCHI - PERRET-VIGNERON - BARADAT-BUJOLI-TOLLINCHI, avoués
plaidant par Me Kiet NGUYEN, avocat au barreau de TOULOUSE
*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 12 Février 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Mme CAMUGLI, conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de
Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre
Monsieur Michel JUNILLON, Conseiller
Mme Anne CAMUGLI, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats Madame Laure METGE.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2013
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2013,
Signé par Mme Catherine COLENO, Présidente de Chambre et Mme Anaïs ROMINGER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Suivant acte du 31 janvier 1986, la SCI LA LICORNE a donné à bail à usage commercial à la SARL clinique de la licorne pour une durée de neuf années allant du 1er janvier 1986 au 31 décembre 1994, des locaux situés avenue Frédéric mistral à la Ciotat moyennant la somme de 151 747,75 euros ; le bail s'est poursuivi par tacite reconduction.
Par jugement du 18 juillet 2002, le tribunal de commerce de Marseille a ordonné la cession de l'entreprise de la Société clinique la licorne au profit du Dr Rémi ... agissant pour le compte de la SAS clinique de la Ciotat.
Il a également été donné acte à la SCI LA LICORNE de ce qu'elle acceptait une réduction du montant du loyer pendant trois ans.
Par acte du 4 janvier 2005, la SCI LA LICORNE a fait délivrer à la SAS CLINIQUE DE LA CIOTAT un congé avec offre de renouvellement au prix annuel de 500 000 euros hors-taxes à compter du 1er août 2005. Elle a par ailleurs assigné ladite société le 7 décembre 2005 afin de voir fixer le montant du loyer renouvelé à cette somme annuelle de 500 000 euros.
Par décision du 12 décembre 2006, la juridiction des loyers commerciaux a constaté que le loyer devait être fixé à la valeur locative sans plafonnement à compter du 1er août 2005 en raison de la durée du bail, supérieure à 12 années, et a ordonné une mesure d'expertise.
L'expert a déposé son rapport le 16 novembre 2009 proposant une valeur locative de 325 800 euros soit 172,80 euros/m2 pour une surface utile pondérée de 1885,37 m2.
La SCI LA LICORNE a sollicité, par mémoire signifié le 16 février 2010, la fixation du loyer déplafonné à la somme de 325 800 euros par an à compter du 1er août 2005
Elle a sollicité en outre le paiement de la somme de 583 277, 52 euros arrêtée au 31 mars 2010 au titre du différentiel entre la valeur locative fixée par l'expert et la valeur du loyer réglé par le locataire depuis 2005ainsi qu'une somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement contradictoire du 10 mai 2010, la juridiction des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Marseille a
Fixé à la somme de 325 800 euros hors taxes et hors charges par an le prix du loyer du bail renouvelé au 1er août 2005, toutes autres clauses et conditions du bail expiré demeurant inchangées.
Condamné la SAS CLINIQUE DE LA CIOTAT à payer sur l'arriéré résultant du loyer ainsi fixé les intérêts au taux légal à compter de chacune d'échéances échues depuis le 1er août 2005.
Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Ordonné l'exécution provisoire.
Rejeté toute autre demande.
Fait masse des dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire et dit que chaque partie en supportera la moitié.

La SAS CLINIQUE DE LA CIOTAT a relevé appel de la décision le 19 juillet 2010 ainsi que de l'ordonnance rendue par la même juridiction le 12 décembre 2006.
Par conclusions récapitulatives et en réponse notifiées et déposées le 10 janvier 2013, elle conclut à la réformation en toutes leurs dispositions des décisions du 12 décembre 2006 et du 10 mai 2010.
À titre principal elle entend voir juger la SCI LA LICORNE irrecevable en ses demandes fins et conclusions,
A titre subsidiaire elle conclut au rejet des demandes de la SCI LA LICORNE.
À titre infiniment subsidiaire elle entend voir fixer le montant du loyer à la somme de 222 473 euros par an à compter du 15 février 2010.
Au rejet en tout état de cause de la demande de la SCI LA LICORNE de rappels de loyer depuis 2005.
Elle sollicite la condamnation du la SCI LA LICORNE à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens comprenant les frais d'expertise.
Elle fait valoir que l'ordonnance du 12 décembre 2006 qui a jugé que le loyer devait être fixé selon la valeur locative sans plafonnement à compter du 1er août 2005 ne lui a jamais été signifiée et qu'elle est donc recevable à en relever appel. Elle soutient que contrairement à ce qu'a estimé le juge, elle n' aà aucun moment acquiescé ou donné son accord sur une durée supérieure à 12 années du bail expiré et une fixation de la valeur locative à compter du 1er août 2005.
Elle conteste que sa participation aux opérations d'expertise ait couvert le défaut de signification de la décision et qu'elle ait acquiescé au renouvellement tacite du bail depuis le 1er janvier 2005
Elle soutient que du fait de l'accord intervenu en 2002, le bail d'origine n'a pas été poursuivi mais qu'un nouveau contrat a été accepté par les futurs cocontractants et homologué par le tribunal de commerce de sorte que le bail en cours de validité aurait une durée de 8 ans, ce qui rend la demande de déplafonnement irrecevable et ne permet la révision du loyer que dans le cadre des révisions triennale. Elle conteste que la SCI ait accepté une réduction du loyer sous la contrainte du tribunal de commerce.
Subsidiairement elle soutient qu'à l'occasion de la cession intervenue par le jugement du 18 juillet 2002, le bailleur acceptant une diminution par deux du loyer pendant trois années et acceptant tacitement que le loyer soit fixé à son niveau initial à l'expiration de cette durée, l'accord ainsi homologué constitue une fixation amiable du nouveau loyer, ce qui interdit de faire application du déplafonnement du loyer sur la base de la seule durée du bail que l'accord du mois de juillet 2002 place les parties dans le cadre exclusif des dispositions de l'article L 145-38 du code du commerce, peu important la durée du bail reconduit, une nouvelle demande ne pouvant être formée moins de trois ans après que le nouveau prix est devenu applicable et avec la démonstration nécessaire d'une évolution notable des facteurs locaux de commercialité depuis la dernière fixation amiable ou judiciaire du loyer.
À titre subsidiaire, elle invoque les difficultés financières récurrentes de la clinique, conteste qu'il y ait eu agrandissement des surfaces locatives, invoque l'insalubrité et la non-conformité des locaux ( suppression du service de réanimation en 2002), la demande de fixation du loyer à 325 000 euros représentant une augmentation de près de 60 % du loyer actuel.
Elle propose pour l'appréciation des facteurs locaux de commercialité, la prise en compte des contraintes légales et réglementaires, la nécessité d'investir dans des plateaux techniques haut de gamme aux coûts exorbitants, la référence aux loyers payés par d'autres cliniques privées sur le territoire.
Sur le point de départ du rappel de loyer, elle soutient que le nouveau loyer ne peut s'appliquer qu'à compter du 15 février 2010, date de la demande chiffrée dans le mémoire après rapport d'expertise. Elle précise qu'elle a quitté les locaux à compter du 1er janvier 2012.
Par conclusions récapitulatives déposées et signifiées le 25 janvier 2013, la SCI LA LICORNE conclut à l'irrecevabilité de l'appel formé par la SAS CLINIQUE DE LA CIOTAT à l'encontre de l'ordonnance du juge des loyers commerciaux du 12 décembre 2006 par application des dispositions des articles 776 et 272 du code de procédure civile, le premier président de la cour d'appel n'ayant pas autorisé le recours, l'appelante ne justifiant aucun motif grave et légitime et ayant en outre accepté le principe de l'expertise à laquelle elle a de surcroît participé.
Elle rappelle que la SAS CLINIQUE DE LA CIOTAT a, par courrier du 14 février 2005, accepté le principe du renouvellement tout en contestant les conditions du nouveau loyer, acquiesçant des lors au principe d'un bail commercial qui excédait la durée de 12 ans pour avoir été renouvelé tacitement depuis le 1er janvier 2005 et ayant de surcroît retenu la date du 1er août 2005 comme point de départ du loyer renouvelé.
Elle estime que la réduction du loyer consenti par le bailleur est intervenue à titre exceptionnel car en cours de location dans le cadre d'un plan de redressement par voie de cession et ne saurait en aucun cas emporter cessation de l'ancien bail au profit d'un nouveau régularise par le preneur, qu'au demeurant le preneur n'a jamais fait état dans ses correspondances d'un renouvellement de bail en date du 1er août 2002, qu'il n'aurait pas sinon accepté le renouvellement du bail sollicité par le bailleur à effet au 1er août 2005.
Elle répète que le plafonnement n'a pas vocation à s'appliquer en présence d'un bail d'une durée excédant 12 ans ni dans le cadre comme en l'espèce de locaux monovalents de sorte que la question de l'évolution des facteurs locaux de commercialité n'a pas lieu d'être en l'espèce. Elle conclut à la confirmation de l'appréciation de l'expert reposant sur la méthode métrique, prenant en compte la situation de l'immeuble, le dynamisme de la commune, l'augmentation des surfaces louées notamment. Elle rappelle que les difficultés rencontrées par le preneur n'interfèrent pas sur la fixation du loyer qui repose sur des critères objectifs. Elle maintient que le montant du loyer renouvelé doit s'appliquer à la date d'expiration de l'ancien bail soit le 1er août 2005.
Elle conclut à la confirmation du jugement du 10 mai 2010 et à la condamnation de la SAS CLINIQUE DE LA CIOTAT à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive outre celle de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 12 février 2013.

MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la forme
La recevabilité de l'appel dirigé contre le jugement du 19 juillet 2010 n'est pas contestée et
la procédure ne révèle à cet égard aucune irrégularité susceptible d'être relevée d'office.
Si la décision du 12 décembre 2006 a ordonné une mesure d'expertise, elle a jugé que le loyer des lieux loués devait être fixé à la valeur locative à raison de la durée, supérieure à 12 années, du bail.
L'appel formé par la SAS CLINIQUE de LA CIOTAT le 19 juillet 2010 à l'encontre de cette décision, signifiée le 30 juin 2010, sera déclaré recevable des lors que conformément aux dispositions de l'article 480 du code de procédure civile, celle-ci tranche dans son dispositif, partie du principal et a eu, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche.
La SCI de LA LICORNE soutient d'autre part que la participation de la SAS CLINIQUE de LA CIOTAT aux opérations d'expertise aurait couvert le défaut de signification de l'ordonnance du 12 décembre 2006.
Or, le seul fait pour le preneur, de se présenter aux opérations d'expertise est insuffisant à prouver une intention non équivoque de sa part d'acquiescer à la décision en ce qu'elle retient le principe du déplafonnement du loyer.
L'appel dirigé contre l'ordonnance du 12 décembre 2006 sera par conséquent également déclaré recevable.
Sur la recevabilité de la demande de déplafonnement.
La SAS CLINIQUE de LA CIOTAT rappelle que le bailleur, dans le cadre de la procédure collective ayant donné lieu au jugement du tribunal de commerce de Marseille du 18 juillet 2002 ordonnant la cession à son profit et à celui du docteur Rémy ... de l'entreprise de la SA clinique la LICORNE, a accepté la diminution du loyer pendant trois années et la fixation du loyer à son niveau initial à l'expiration de cette durée.
Elle conclut que cette acceptation d'une modification de l'obligation essentielle du bail d'origine et de cet accord donné au surplus à un tiers au contrat de bail avec lequel il n'existait préalablement aucune relation, que le bail d'origine n'a pas été poursuivi et qu'un nouveau contrat accepté par les futurs cocontractants a été homologué par le tribunal de commerce.
Or, la durée du bail du 31 janvier 1986 a excédé 12 ans à partir du 31 décembre 1998 de sorte que par application de l'article L 145-34 du code du commerce, le déplafonnement du loyer était acquis, la SAS CLINIQUE de LA CIOTAT ne pouvant soutenir que les mesures adoptées dans le cadre du redressement judiciaire de la SAS CLINIQUE de LA CIOTAT, dérogatoires au mécanisme contractuel, auraient constitué le point de départ d'une nouvelle relation de cette nature.
Pour les mêmes raisons, il ne peut être retenu que les parties se sont accordées sur un nouveau loyer à compter de juillet 2002 de sorte que l'action en déplafonnement, ne serait recevable qu'à l'expiration d'une durée de 12 ans et/ou en justifiant d'une évolution notable des facteurs locaux de commercialité.
Au demeurant dans le courrier du 14 février 2005 qu'elle adresse en réponse à celui du bailleur en date du 4 janvier 2005 par lequel ce dernier lui donne congé à compter du 1er août 2005, elle indique " accepter le principe du renouvellement " sans aucunement faire référence à la date du 1er août 2002 or, si elle avait dû être retenue, cette date aurait, comme le rappelle la SCI de LA LICORNE, privé d'effet le congé avec offre de renouvellement du 4 janvier 2005.
La demande de cette dernière aux fins de voir fixer le montant du loyer à la valeur locative du bien loué était par conséquent recevable et fondée.
En outre les lieux loués ont été reconnus monovalents par l'expert judiciaire en raison de leur conformation, à la fois par leur usage mais également du fait que leur transformation en vue d' une autre activité nécessiterait des travaux importants et coûteux de sorte que le loyer échappe au plafonnement résultant de l'application de l'Indice National de la Construction et que le prix du bail doit être déterminé selon les usages observés dans la branche d'activité considérée.
L'ordonnance de la juridiction des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Marseille du 12 décembre 2006 sera des lors confirmée en ce qu'elle a jugé que le loyer devait être fixé selon la valeur locative sans plafonnement, à compter du 1er août 2005, date à laquelle le bailleur a entendu mettre fin à la tacite reconduction du bail et donner congé pour le 1er août 2005 et en ce qu'elle a ordonné une expertise.
Sur la valeur locative du bien loué.
L'expert judiciaire a précisément décrit la caractéristique d'implantation de la clinique, établissement privé accolé à une unité d'hospitalisation publique, le poids des contrôles administratifs dépendant de la politique sociale et régissant par réglementation l'autorisation d'exercer ainsi que le type d'exploitation permis mais également la nature future des soins et le nombre de lits autorisés.
Il a rappelé que les politiques de régulation imposées à l'exploitant de ce type d'établissement ont entraîné depuis 1998 la perte ou restructuration de plus de 6000 lits d' hospitalisation, que les 1067 établissements privés commerciaux existants sur le territoire métropolitain sont soumis à un schéma de planification et d'organisation ( la loi hospitalière de 1970 instaurant la carte sanitaire, la loi hospitalière de 1991 instituant les schémas régionaux d'organisation sanitaire, l'ordonnance de 1996 instituant l'agence régionale d'hospitalisation, la tarification de l'activité par la réforme T2A du 1er mars 2005).
Il a précisé que cette dernière réforme a supprimé la référence au prix de journée de sorte que ni la méthode dite hôtelière ni la méthode " au lit " ne sont plus applicables, puisque le financement des cliniques est assuré par une dotation lors de missions d'intérêt général concernant l'enseignement ou la recherche et que les soins sont financés non plus en fonction de la durée du séjour et des actes médicaux qui en découlent mais à partir de leur pathologie, que la réforme du 1er mars 2005 a établi un cadre de forfait prestation n'incluant pas cependant les honoraires des praticiens et les forfaits techniques de sorte que des durées maximales et minimales de séjour ont dû être définies, mais qu'un dispositif transitoire ou chaque établissement privé se voit affecter d'un coefficient correcteur qui lui est propre a été établi avant la mise en place en 2012 de ce dispositif complexe.
L'expert a précisé que sa mission consistait à fixer la valeur locative de la clinique de la Ciotat au 1er août 2005 soit postérieurement à la réforme du 1er mars 2005 mettant fin à la référence au prix de journée d'hospitalisation.
Il en a conclu que la méthode applicable devait être la méthode métrique qui rend compte à la fois de la nature du bâtiment occupé, indépendamment du chiffre d'affaire réalisé des lors que le bailleur n'est pas l'associé du preneur et qu'il s'agissait dans la pratique de pondérer les surfaces du bâtiment selon un canevas usuellement utilisé en la matière, que sur la base de cette surface pondérée, il convenait d'appliquer une valeur locative au mètre carré moyen rendant compte de la situation générale et particulière de l'immeuble, de son état, de la conformation des lieux'.
Il a exclu les méthodes dites d'excédent brut dans la mesure où le loyer y est fixé en fonction de la performance de la clinique elle-même induite par les praticiens qui s'en servent comme outil d'exploitation de leurs compétences alors que le bailleur n'est pas l'associé du preneur et que le loyer ne doit pas dépendre de la renommée des praticiens qui exercent ainsi que la méthode du chiffre d'affaire théorique immobilier en l'absence de métré précis, des bilans des autres cliniques du secteur comparable en activité et du coût induit par des expertises en cascade qu'il conviendrait alors d'effectuer.
L'expert a décrit la situation générale et particulière de l'établissement, ses caractéristiques, les superficies du complexe immobilier en surfaces utiles et pondérées, relevant que les locaux mis à disposition disposent d'une superficie importante à même de recevoir des plateaux techniques et le public et permettent un bon usage du complexe immobilier en dépit de l'ancienneté relative des bâtiments et de l'absence de places de stationnement associées directement à l'exploitation de la clinique; il a pris en compte le processus de groupement de coopération sanitaire public-privé pour réaliser l'activité chirurgicale sur un seul site entrepris par le centre hospitalier de la Ciotat et la SAS de LA CIOTAT qui permet à cette dernière de conserver un haut niveau d'activité chirurgicale et de s'assurer un nombre suffisant de patients et ce de manière pérenne grâce aux investissements importants entrepris pour constituer un plateau technique attractif pour les praticiens.
Compte tenu de la désignation et de la destination des lieux, des obligations respectives des parties, des clauses du bail dont il a considéré qu'elles sont clairement favorables au preneur des lors qu'il n'assume ni le paiement de la taxe foncière ni les travaux prévus par l'article 606 du code civil et qu'elles prévoient en outre la possibilité de sous-louer en totalité ou partiellement les locaux, l'expert a conclu que le loyer prévu en 1986 pouvait être considéré comme très élevé.
Il a écarté le chiffre d'affaires effectivement réalisé des lors que le bailleur n'est pas l'associé du preneur de même que l'estimation du chiffre d'affaire théorique des lors que c'est la pathologie selon une nomenclature tarifaire à double niveau comprenant plusieurs milliers de pathologies, l'ensemble capé selon la durée du séjour qui est facturée et non plus le séjour lui-même.
En réponse aux dires des parties, il a maintenu le metré retenu du cabinet Vernet, précisé que les pondérations découlent de l'usage de locaux, et que le loyer versé au 1er avril 2005, appliqué sur la base de la surface pondérée faisait ressortir une valeur locative de 107,99 euros par m2 pondéré par an.
S'agissant du rapport de M. ..., l'expert judiciaire a rappelé qu'il datait du 14 décembre 2004, période antérieure à la réforme du 1er mars 2005 ayant eu pour conséquence la disparition de la méthode hôtelière d'évaluation de la valeur locative puisque c'est la pathologie qui est, depuis, effectivement rémunérée et non le séjour lui-même, que la valeur locative retenue de 150 EUR par mètre carré pondéré à appliquer à la surface pondérée de 3369,10 m2 pour la seconde méthode n'était pas irraisonnable même en l'absence d'éléments comparatifs mais que la pondération des locaux retenue lui paraissait trop globale.
Il a précisé d'autre part s'agissant du prix au mètre carré applicable qu'il n'existe pas une grande variété d'éléments de référence de loyer pour les établissements de santé dans l'ensemble du département des Bouches-du-Rhône mais également dans les autres, que les cliniques sont relativement muettes et que l'accès à la source de la référence de la valeur locative est considéré comme un élément confidentiel, que la plupart des cliniques existantes ont eu en outre à l'origine de leur constitution, des relations d'intérêts croisés entre bailleur et preneur qui étaient aussi des praticiens de l'établissement, que la conséquence en a été que le loyer est aligné sur le montant de l'échéance du crédit ayant permis l'acquisition du terrain et la construction de l'établissement soit sur un loyer dit de confort pour rémunérer le propriétaire/exploitant avec une fiscalité moins douloureuse par le biais d'une société civile immobilière.
L'expert a indiqué ne pouvoir qu' 'à gros traits', indiquer des tendances de prix au mètre carré s'échelonnant entre 103 EUR par mètre carré en 2002 et 202 EUR par mètre carré (fixation judiciaire en 2005) pour des maisons de retraite, s'être heurté à l'absence d'éléments de référence adéquats, le seul élément en sa possession étant une clinique non MCO, une clinique MCO étant assise sur un foncier plus complexe et plus pointu qu'une maison de retraite, l'emplacement de la SAS de LA CIOTAT, à proximité immédiate et mitoyenne d'un hôpital public lui paraissant le garant d'une synergie et donc d'une pérennité de sorte qu'il lui a paru de simple bon sens d'estimer que la valeur locative unitaire soit supérieure à celle d'une maison de retraite, qu'a contrario une clinique de type MCO est davantage tributaire d'obligations réglementaires lourdes et annuelles qui dans l'hypothèse où elles ne seraient pas remplies auraient pour conséquence la fermeture à bref délai, de l'établissement de soins.
Il a retenu de cet ensemble d'éléments une valeur locative au mètre carré annuel de 180 EUR mais l'a corrigée en fonction de l'emplacement, de la moyenne des coefficients tenant à la destination des lieux, à la consistance et la nature des locaux ainsi qu'à leurs équipements pour aboutir à un prix au mètre carré annuel de 172,80 euros soit pour l'ensemble des locaux commerciaux au 1er août 2005 une valeur locative annuelle arrondie à 325 800 EUR.
La valeur retenue par l'expert se situe d'ailleurs dans la fourchette de valeur locative communément admise dans la région de 7 à 10 % du chiffre d'affaires.
Il y a lieu, l'expert judiciaire ayant répondu de façon complète, précise et argumentée à l'ensemble des objections de la SAS de LA CIOTAT, de valider ses conclusions en ce qu'elles retiennent un prix annuel de 172,80 euros au mètre carré de sorte que le jugement déféré sera confirmé.
La décision critiquée sera par ailleurs confirmée en ce qu'elle a retenu qu'il convenait de fixer cette valeur locative annuelle à compter du 1er août 2005, date de la demande formulée par acte du 4 janvier 2005 par le bailleur et que les intérêts au taux légal devaient courir sur l'arriéré à compter de chacun des termes échus depuis cette date, en application de l'article 1155 du code de procédure civile.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.
La décision déférée sera également confirmée en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile, en ce qu'elle fait masse des dépens en ceux compris les frais d'expertise judiciaire et impose à chaque partie d'en supporter la moitié.

PAR CES MOTIFS
la cour, statuant publiquement, contradictoirement,
Déclare les appels de la SAS CLINIQUE de LA CIOTAT recevables.
Confirme en toutes leurs dispositions l'ordonnance du 12 décembre 2006 et le jugement du 10 mai 2010 du juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Marseille.
Rejette toute autre demande.
Dit que chacune des parties supportera par moitié la charge des dépens, en ceux compris le coût des opérations d'expertise, dont distraction respectivement, au profit de Me ... et la SCP Vigneron-Bujoli-Tollinchi
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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