Jurisprudence : CE 9/10 SSR, 27-07-2015, n° 367151, mentionné aux tables du recueil Lebon

CE 9/10 SSR, 27-07-2015, n° 367151, mentionné aux tables du recueil Lebon

A0740NNQ

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CE 9/10 SSR, 27-07-2015, n° 367151, mentionné aux tables du recueil Lebon. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/25566761-ce-910-ssr-27072015-n-367151-mentionne-aux-tables-du-recueil-lebon
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Abstract

Il résulte des dispositions des articles L. 16 B du LPF et 164 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008, de modernisation de l'économie, d'une part, qu'une société, dûment informée par l'administration du recours ouvert devant la juridiction judiciaire, ne peut utilement critiquer devant le juge de l'impôt l'objectif et le déroulement des visites ayant donné lieu à une autorisation de l'autorité judiciaire et menées sous son contrôle, d'autre part, que la décision de recourir à la procédure de visite et de saisie prévue par les dispositions de l'article L. 16 B du LPF ne peut être utilement contestée devant le juge de l'impôt.



CONSEIL D'ETAT


Statuant au contentieux


367151


SOCIETE FRANCESCO SMALTO et Cie


M. Vincent Villette, Rapporteur

M. Edouard Crépey, Rapporteur public


Séance du 1er juillet 2015


Lecture du 27 juillet 2015


REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 10ème et 9ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 10ème sous-section de la section du contentieux


Vu la procédure suivante :


La société Francesco Smalto et Compagnie a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2002, 2003 et 2004, ainsi que des intérêts de retard correspondants. Par un jugement n° 0817435 du 26 janvier 2011, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.


Par un arrêt n° 11PA01556 du 24 janvier 2013, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté la requête de la société dirigée contre ce jugement.


Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 25 mars et 25 juin 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Francesco Smalto et Cie demande au Conseil d'Etat :


1°) d'annuler cet arrêt ;


2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel.


Vu les autres pièces du dossier ;


Vu :


- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;


- la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 ;


- le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :


- le rapport de M. Vincent Villette, auditeur,


- les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public ;


La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Francesco Smalto et Cie ;




1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Francesco Smalto et Cie a porté en charges déductibles au titre des exercices 2002, 2003 et 2004 des dépenses de publicité et de communication que lui avait refacturées la société Francesco Smalto International ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration a remis en cause la déductibilité de ces dépenses ; que la société Francesco Smalto et Cie demande l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris qui a rejeté sa requête tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondantes auxquels elle a été assujettie à raison de ces redressements ;


Sur les moyens relatifs à la procédure d'imposition :


2. Considérant que l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction issue de l'article 164 de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, ouvre aux personnes soumises à des visites domiciliaires la faculté de saisir le premier président de la cour d'appel d'un appel de l'ordonnance autorisant la visite des agents de l'administration fiscale ainsi que d'un recours contre le déroulement de ces opérations ; que le même article 164 de la loi du 4 août 2008 comporte des dispositions transitoires destinées à ouvrir un recours similaire contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention rendue dans des procédures de visite et de saisie achevées avant l'entrée en vigueur de la loi du 4 août 2008 ;


3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, d'une part, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la requérante, dûment informée par l'administration du recours ouvert devant la juridiction judiciaire, ne pouvait utilement critiquer devant le juge de l'impôt l'objectif et le déroulement des visites ayant donné lieu à une autorisation de l'autorité judiciaire et menées sous son contrôle ; que, d'autre part, la décision de recourir à la procédure de visite et de saisie prévue par les dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ne peut être utilement contestée devant le juge de l'impôt ; qu'ainsi, le moyen soulevé devant les juges du fond et tiré de ce que le recours à ces dispositions aurait reposé en l'espèce sur un détournement de procédure était inopérant ; que, ce motif devant être substitué à celui retenu par l'arrêt attaqué, les moyens du pourvoi tirés de ce que la cour aurait, en répondant à ce moyen, commis une erreur de droit et entaché son arrêt d'insuffisance et de contradiction de motifs ne peuvent qu'être écartés ;


Sur les moyens relatifs au bien-fondé des impositions :


4. Considérant, d'une part, que la société requérante reproche à la cour d'avoir commis des erreurs de droit en ce qui concerne la détermination du régime de la preuve et son application ; qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (.) notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (.) " ; que, si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que, dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ; qu'en vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis ; que la seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense ; que le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration ;


5. Considérant qu'après avoir constaté que les dépenses litigieuses correspondaient à des factures régulièrement émises par la société Francesco Smalto International, la cour a relevé que l'administration apportait des éléments de nature à contester l'existence, l'objet et le montant des prestations refacturées à la société requérante et que les pièces produites par la société requérante, ne portant d'ailleurs que sur certains des exercices vérifiés, ne permettaient d'établir ni la nature ni le montant des prestations qui lui avaient été refacturées ni la contrepartie qu'elle en avait retirée ; qu'ainsi, la cour n'a pas méconnu les principes gouvernant le régime de preuve applicable ; que, si elle a cru pouvoir déduire de l'avis de la commission départementale des impôts et des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales que " l'administration supportait la charge de la preuve ", elle n'a pas, ce faisant, remis en cause les principes généraux dont elle avait fait application ;


6. Considérant, d'autre part, que la cour n'a pas commis d'erreur de droit dans l'application des règles de la preuve mais s'est livrée à une appréciation souveraine du caractère probant des pièces du dossier en écartant la mention de l'avis de la commission départementale des impôts dont se prévalait la requérante et qui attribuait au vérificateur des propos en contradiction tant avec le contenu de la proposition de rectification et aux réponses du supérieur hiérarchique et de l'interlocuteur régional qu'aux écritures de l'administration devant le juge de l'impôt ; que, contrairement à ce que prétend la requérante, la cour a recherché si les dernières pièces produites devant elle étaient de nature à établir la réalité et l'objet des prestations fournies par la société Francesco Smalto International ; qu'en jugeant que tel n'était pas le cas, elle a porté sur le contenu de ces documents une appréciation souveraine non arguée de dénaturation ; qu'en jugeant également que la clef de répartition des charges refacturées n'était pas justifiée avec précision, la cour a donné à sa décision une motivation suffisante au regard des éléments présentés devant elle et s'est livrée à une appréciation souveraine de la valeur probante de ces éléments ; qu'enfin, dès lors que la cour jugeait que les dépenses litigieuses n'étaient pas déductibles, il ne peut lui être reproché de n'avoir pas recherché en outre si l'administration démontrait le caractère excessif du montant de ces dépenses ;


7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Francesco Smalto et Cie n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;




D E C I D E :


Article 1er : Le pourvoi de la société Francesco Smalto et Cie est rejeté.


Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Francesco Smalto et Compagnie et au ministre des finances et des comptes publics.



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