Jurisprudence : CE 8/3 SSR, 27-03-2000, n° 195019

CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

N° 195019

MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT
c/M. Sinigaglia

M. Maïa, Rapporteur
M. Arrighi de Casanova, Commissaire du Gouvernement

Séance du 3 mars 2000
Lecture du 27 mars 2000

Cette décision sera publiée au Recueil LEBON

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 8e et 3e sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 8e sous-section de la Section du contentieux

Vu le recours, enregistré le 20 mars 1998 au secrétariat du contentieux d'Etat, présenté pat le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT ; le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 10 février 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé, à la demande de M. Sinigaglia, le jugement du 21 mars 1996 du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a ordonné, sous astreinte, la démolition du bâtiment exploité par celui-ci sur le territoire de la commune de Saint-Cyprien (Pyrénées-Orientales) et la remise en état des lieux ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance de la marine d'août 1681 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Vu le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 modifié par le décret n° 97-1177 du 24 décembre 1997 ;

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de M. Maïa, Auditeur,
- les observations de Me Blondel, avocat de M. Sinigaglia,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'un procèsverbal de contravention de grande voirie a été dressé le 31 mai 1994 à l'encontre de M. Sinigaglia , faisant référence à l'ordonnance de la marine d'août 1681 et mentionnant que l'intéressé, exploitant de la discothèque « Le Bill Board » implantée sur le territoire de la commune de Saint-Cyprien-Plage (Pyrénées-Orientales), occupait le domaine public maritime, sans droit ni titre depuis le 31 décembre 1992 ; que le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 10 février 1998 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, à la demande de M. Sinigaglia, a annulé le jugement du 21 mars 1996 du tribunal administratif de Montpellier en tant que ce jugement avait ordonné, sous astreinte, la démolition du bâtiment exploité par l'intéressé et la remise en l'état des lieux ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du titre VII du livre IV de l'ordonnance d'août 1681, « sera réputé bord et rivage de la mer tout ce qu'elle couvre et découvre pendant les nouvelles et pleines lunes, et jusqu'où le grand flot de mars se peut étendre sur les grèves » ; que l'article 2 du même titre dispose : « Faisons défense à toutes personnes de bâtir sur les rivages de la mer, d'y planter aucun pieux ni faire aucuns ouvrages qui puissent porter préjudice à la navigation, à peine de démolition des ouvrages, de confiscation des matériaux et d'amende arbitraire » ; que ces dispositions ne fondent des poursuites pour contravention de grande voirie que pour les atteintes au seul domaine public maritime ;

Considérant que, par l'arrêt attaqué, la cour a jugé, d'une part, que le terrain d'assiette de la discothèque exploitée par M. Sinigaglia n'appartenait plus, à la date à laquelle a été dressé le procès-verbal à l'origine des poursuites engagées à l'encontre de l'intéressé, au domaine public maritime et que, d'autre part, même dans l'hypothèse où, du fait de ses aménagements réalisés par la commune de Saint-Cyprien-Plage dans la zone dont fait intégralement partie ce terrain et de l'affectation consécutive de cette zone à l'usage public, cette parcelle aurait été de nouveau soumise à un régime de domanialité publique, sa protection par la répression des contraventions de grande voirie n'aurait été assurée ni par l'ordonnance de la marine d'août 1681, ni par aucun autre texte ; que le ministre, qui ne conteste pas le premier motif de l'arrêt attaqué, n'est pas fondé à soutenir que le second serait entaché d'erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre n'est pas fondé, par les moyens qu'il invoque, à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Sur les conclusions de M. Sinigaglia tendant à l'applcation des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant qu'aux termes de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés » ; que l'article 43 de la même loi autorise le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle à demander au juge de condamner, dans les conditions prévues à l'article 75 précité, la partie perdante « au paiement d'une somme au titre des frais qu'il a exposés » ; que l'article 37 de la même loi dispose que « (...) L'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner, dans les conditions prévues à l'article 75, la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à une somme au titre des frais que le bénéficiaire de l'aide avait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Il peut, en cas de condamnation, renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre le recouvrement à son profit de la somme allouée par le juge » ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle ne peut demander au juge de condamner à son profit la partie perdante qu'au paiement des seuls frais qu'il a personnellement exposés, à l'exclusion de la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle confiée à son avocat ; mais que l'avocat de ce bénéficiaire peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement à son profit de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

Considérant, d'une part, que M. Sinigaglia, pour le compte de qui les conclusions de la requête relatives à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 doivent être réputées présentées, n'allègue pas avoir exposé de frais autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été allouée ; que, d'autre part, l'avocat de M. Sinigaglia n'a pas demandé la condamnation de l'Etat à lui verser la somme qu'il aurait réclamée à son client si ce dernier n'avait bénéficié d'une aide juridictionnelle totale ; que, dans ces conditions, les conclusions de la requête tendant à la condamnation de l'Etat sur le fondement de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent être accueillies ;

DECIDE :

Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT est rejeté.

Article 2 : Les conclusions de M. Sinigaglia tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'équipement, des transports et du logement et à M. Sinigaglia.

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