Jurisprudence : Cass. crim., 06-09-2023, n° 22-86.045, FS-B, Rejet

Cass. crim., 06-09-2023, n° 22-86.045, FS-B, Rejet

A77781ES

Référence

Cass. crim., 06-09-2023, n° 22-86.045, FS-B, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/99668604-cass-crim-06092023-n-2286045-fsb-rejet
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Abstract

Les circonstances aggravantes constituent un élément accessoire du fait principal poursuivi et leur adjonction n'excède pas la saisine de la juridiction de jugement. Dès lors, les juges peuvent retenir une circonstance aggravante non visée par la prévention, qui résulte de la procédure ou des débats, à la condition toutefois que le prévenu en soit avisé, soit invité à s'en expliquer et puisse organiser sa défense, au besoin en sollicitant un renvoi. N'encourt pas la censure l'arrêt qui retient, à l'encontre du prévenu, la circonstance que les faits ont été commis en bande organisée, non visée par la poursuite, après avoir mis dans le débat qu'elle envisageait de relever ladite circonstance, et invité le prévenu à s'en expliquer


N° H 22-86.045 FS-B

N° 00873


ECF
6 SEPTEMBRE 2023


REJET


M. BONNAL président,


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 6 SEPTEMBRE 2023



M. [Aa] [P] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, chambre 5-4, en date du 31 août 2022, qui, pour infractions à la législation sur les étrangers aggravées, l'a condamné à six ans d'emprisonnement et l'interdiction définitive du territoire français.


Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Turbeaux, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [X] [P], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 juin 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Turbeaux, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, Mmes Ab, Sudre, MM. Laurent, Gouton, Brugère, conseillers de la chambre, M. Mallard, Mmes Guerrini, Diop-Simon, conseillers référendaires, M. Valat, avocat général, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. M. [X] [P], poursuivi du chef d'aide au séjour irrégulier d'étrangers, a été condamné à trois ans d'emprisonnement, 10 000 euros d'amende et dix ans d'interdiction du territoire français par le tribunal correctionnel, qui a retenu la circonstance aggravante que les faits ont été commis en bande organisée.

3. M. [Ac] a relevé appel et le ministère public a formé appel incident.


Examen des moyens

Sur le premier moyen

4. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale🏛.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [Ac] pour aide à l'entrée, la circulation ou le séjour irréguliers en France en bande organisée, à une peine de six ans d'emprisonnement et à l'interdiction définitive du territoire français, alors « que s'il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c'est à la condition de n'y rien ajouter ou de ne pas substituer des faits distincts à ceux de la prévention, sauf acceptation expresse par le prévenu d'être jugé sur des faits ou circonstances aggravantes non compris dans la poursuite ; que le prévenu a été présenté au tribunal correctionnel en comparution immédiate pour aide à l'entrée et au séjour irréguliers d'étrangers en France ; qu'après avoir annulé le jugement entrepris, la cour d'appel l'a condamné pour le délit d'aide à l'entrée et au séjour irrégulier en France, en bande organisée ; qu'en retenant la circonstance aggravante de bande organisée, qui ajoutait aux faits poursuivis, la cour d'appel a méconnu les articles 6, § 1 et 3, a), de la Convention européenne des droits de l'homme et 388 et préliminaire du code de procédure pénale. »


Réponse de la Cour

6. Selon les articles 6, § 3 a) et b), de la Convention européenne des droits de l'homme, tout accusé a droit notamment à être informé, dans le plus court délai, d'une manière détaillée, de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui et de disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense.

7. La Cour européenne des droits de l'homme retient que l'acte d'accusation joue un rôle déterminant dans les poursuites pénales en ce qu'il avise la personne mise en cause de la base juridique et factuelle des reproches formulés contre elle (CEDH, arrêt du 19 décembre 1989, Ad c. Autriche, n° 9783/82).

8. Elle considère toutefois que les juridictions de jugement, y compris en cause d'appel, peuvent requalifier les faits dont elles sont saisies. De même, il ne leur est pas interdit de modifier la cause de l'accusation ou de préciser, sur la base des éléments produits lors des débats et portés à la connaissance de l'accusé, les modalités d'exécution de l'infraction poursuivie (CEDH, arrêt du 25 mars 1999, Ae et Sassi c. France, n° 25444/94⚖️ ; arrêt du 25 juillet 2000, Af c. Italie, n° 23969/94 ; décision du 8 décembre 2009, Ag c. Italie, n° 45291/06).

9. La Cour européenne des droits de l'homme exige qu'alors, sur le fondement des textes précités, la personne mise en cause soit dûment et pleinement informée, et dispose du temps et des facilités nécessaires pour organiser sa défense sur ces nouveaux éléments (CEDH, arrêt précité du 25 mars 1999 ; arrêt du 26 juin 2018, Ah Ai et autres c. Portugal, n° 56396/12⚖️).

10. En droit interne, en application de l'article 388 du code de procédure pénale🏛, les juges ne peuvent statuer que sur les faits dont ils sont saisis, à moins que le prévenu n'accepte expressément d'être jugé sur des faits distincts de ceux visés à la prévention (Crim., 19 avril 2005, pourvoi n° 04-83.879⚖️, Aj. crim. 2005, n° 135 ; Crim., 11 septembre 2019, pourvoi n° 18-81.040⚖️, publié au Bulletin).

11. Cependant, ils peuvent, sans l'accord du prévenu, retenir une circonstance aggravante résultant de la procédure ou des débats.

12. En effet, une telle circonstance constitue un élément accessoire au fait principal, qui ne s'en trouve pas modifié. L'adjonction à laquelle il est procédé n'excède pas la saisine de la juridiction.

13. Une telle adjonction n'est toutefois possible qu'à la condition d'avoir été mise dans le débat, de sorte que le prévenu en ait été préalablement avisé, qu'il soit invité à s'en expliquer et qu'il lui soit permis d'organiser sa défense, au besoin en sollicitant un renvoi.

14. En l'espèce, il résulte de l'arrêt attaqué que la cour d'appel a informé le prévenu, lors des débats, qu'elle envisageait de relever la circonstance aggravante de commission en bande organisée, non visée dans l'acte de poursuite, et l'a invité à s'expliquer sur celle-ci, de sorte que les droits de sa défense ont été respectés.

15. Ainsi le moyen, qui fait grief à l'arrêt d'avoir, en retenant la circonstance aggravante de commission en bande organisée, ajouté aux faits poursuivis, n'est pas fondé.

16. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du six septembre deux mille vingt-trois.

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