Jurisprudence : Cass. com., 30-08-2023, n° 20-14.727, F-B, Cassation

Cass. com., 30-08-2023, n° 20-14.727, F-B, Cassation

A31291EM

Référence

Cass. com., 30-08-2023, n° 20-14.727, F-B, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/99363060-cass-com-30082023-n-2014727-fb-cassation
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Abstract

Il résulte de la combinaison des articles 67 F du code des douanes, 61-1 et D. 594-16 du code de procédure pénale que la personne à l'égard de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction et qui n'est pas placée en retenue douanière ne peut être entendue sur ces faits qu'après avoir été informée, le cas échéant, du droit d'être assistée par un interprète, lequel ne peut être choisi parmi les agents des douanes chargés du dossier. L'inobservation des dispositions de l'article D. 594-16 du code de procédure pénale, édictées dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, entache l'audition de nullité


COMM.

FB


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 30 août 2023


Cassation


M. VIGNEAU, président


Arrêt n° 528 F-B

Pourvoi n° W 20-14.727


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 30 AOÛT 2023


M. [S] [V], domicilié [… …], a formé le pourvoi n° W 20-14.727 contre l'arrêt rendu le 24 décembre 2019 par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion (chambre civile), dans le litige l'opposant au directeur régional des douanes et droits indirects de Mayotte, domicilié direction des douanes de Mayotte, [Adresse 3], défendeur à la cassation.


Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Tostain, conseiller référendaire, les observations de la SCP Richard, avocat de M. [V], de la SARL Boré, Aa de Bruneton et Mégret, avocat du directeur régional des douanes et droits indirects de Mayotte, et l'avis de M. Crocq, avocat général, après débats en l'audience publique du 31 mai 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Tostain, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis, 24 décembre 2019) et les productions, le 28 septembre 2016, les agents de l'administration des douanes ont procédé à l'audition de M. [V] sur des faits d'importation sans déclaration de marchandise prohibée, à savoir l'importation non déclarée d'un navire de pêche à Mayotte avec usurpation des titres de navigation du navire immatriculé [Immatriculation 2] et francisé FA 192068101, infraction prévue et réprimée à l'article 414, alinéa 1er, du code des douanes🏛.

2. Le 29 septembre 2016, les agents de l'administration des douanes ont procédé à la saisie dudit navire.

3. Par un règlement transactionnel du 26 octobre 2016, M. [V] a consenti à l'abandon du navire saisi et au paiement d'une amende.

4. Soutenant qu'il n'avait commis aucune infraction, qu'il n'avait pas bénéficié d'un interprète neutre et que son consentement avait été vicié, M. [V] a, après le rejet de sa contestation, assigné l'administration des douanes, d'une part, en annulation du procès-verbal du 28 septembre 2016 et de la transaction du 26 octobre 2016, d'autre part, en dommages et intérêts.


Examen du moyen

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. M. [V] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à voir prononcer la nullité du procès-verbal de constat de la direction régionale des douanes de Mayotte du 28 septembre 2016 et, en conséquence, de rejeter ses demandes tendant à voir prononcer la nullité du règlement transactionnel du 26 octobre 2016 conclu sur le fondement dudit procès-verbal, à voir ordonner à la direction régionale des douanes de Mayotte de lui restituer l'embarcation immatriculée [Immatriculation 2] et à la voir condamner à lui payer les sommes de 4 000 euros au titre de la restitution de l'amende douanière et 67 200 euros à titre de dommages et intérêts, alors « que la personne à l'égard de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction et qui n'est pas placée en retenue douanière ne peut être entendue sur ces faits qu'après la notification des informations prévues à l'article 61-1 du code de procédure pénale🏛 ; qu'il doit ainsi lui être notifié qu'elle a notamment le droit d'être assistée par un interprète ; que si un interprète est requis ou désigné par l'autorité judiciaire compétente, cet interprète peut, en cas de nécessité, être une personne majeure ne figurant pas sur les listes d'experts judiciaires dressées par le bureau de la Cour de cassation et par chaque cour d'appel, ou sur la liste d'interprètes traducteurs prévue à l'article R. 111-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile🏛 ; que, dans ce cas, cette personne ne peut être choisie parmi les enquêteurs, les magistrats ou les greffiers chargés du dossier, les parties ou les témoins ; qu'en décidant néanmoins, pour débouter M. [V] de sa demande tendant à voir prononcer la nullité du procès-verbal de constat du 28 septembre 2016, que ce procès-verbal ne se trouvait pas vicié du seul fait que l'un des agents des douanes, qui procédait au constat d'infraction, avait fait office d'interprète, la cour d'appel a violé l'article 67 F du code des douanes🏛, ensemble les articles préliminaire, 61-1, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019🏛, 803-5 et D. 594-16 du code de procédure pénale. »


Réponse de la Cour

Vu l'article 67 F du code des douanes et les articles 61-1 et D. 594-16 du code de procédure pénale🏛 :

6. Il résulte de la combinaison de ces textes que la personne à l'égard de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction et qui n'est pas placée en retenue douanière ne peut être entendue sur ces faits qu'après avoir été informée, le cas échéant, du droit d'être assistée par un interprète, lequel ne peut être choisi parmi les agents des douanes chargés du dossier.

7. L'inobservation des dispositions de l'article D. 594-16 du code de procédure pénale, édictées dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, entache l'audition de nullité.

8. Pour rejeter la demande d'annulation du procès-verbal de constat du 28 septembre 2016, portant audition de M. [V] du chef d'importation d'une marchandise prohibée, l'arrêt retient que ce procès-verbal, rédigé par l'inspecteur des douanes, M. [Ab], et le contrôleur des douanes, M. [Ac], ce dernier ayant servi d'interprète à M. [V] en shimaoré, langue comprise par l'intéressé, n'est pas vicié, dès lors que les infractions douanières peuvent être constatées par un seul agent des douanes ou de toute autre administration et que rien ne permet de contester la sincérité du concours apporté par M. [Ac] àAdM. [V].

9. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

10. En application de l'article 624 du code de procédure civile🏛, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt rejetant la demande d'annulation du procès-verbal de constat du 28 septembre 2016 portant audition de M. [V] du chef d'importation d'une marchandise prohibée entraîne la cassation des chefs de dispositif rejetant les demandes d'annulation de la transaction conclue les 29 septembre et 26 octobre 2016 entre le directeur régional des douanes de Mayotte et M. [V], de restitution du navire immatriculé [Immatriculation 2] et de l'amende douanière et d'allocation de dommages et intérêts, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire, faute pour la cour d'appel d'avoir recherché les conséquences de l'annulation de l'audition de M. [V] sur la validité de la transaction.


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 décembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis, autrement composée ;

Condamne le directeur régional des douanes et droits indirects de Mayotte aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande formée par le directeur régional des douanes et droits indirects de Mayotte et le condamne à payer à M. [V] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente août deux mille vingt-trois.

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