Jurisprudence : CE 9/8 SSR, 06-11-1998, n° 143806

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 143806

M. DESMERY

Lecture du 06 Novembre 1998

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)


Le Conseil d'Etat statuant au Contentieux, (Section du contentieux, 9ème et 8ème sous-sections réunies),
Sur le rapport de la 9ème sous-section, de la Section du Contentieux,

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 23 décembre 1992 et 22 avril 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Michel DESMERY, demeurant Villa Zima, 76, avenue du Roi Albert, à Cannes (06400) ; M. DESMERY demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 3 novembre 1992 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 19 avril 1990 du tribunal administratif de Limoges, rejetant sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu, ainsi que des pénalités y afférentes, auxquels il a été assujetti au titre des années 1980 et 1981 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de M. Dulong, Conseiller d'Etat, - les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. DESMERY, - les conclusions de M. Loloum, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : "En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. ... Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés..." ; qu'aux termes de l'article L. 69 du même livre : "... Sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes... de justifications prévues à l'article L. 16" ;

Considérant que M. DESMERY se pourvoit contre l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a confirmé le rejet opposé par le tribunal administratif de Limoges à sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu, ainsi que des pénalités y afférentes, auxquels il a été assujetti, par voie de taxation d'office, en application des dispositions précitées de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, au titre des années 1980 et 1981 ;

Sur la régularité de l'arrêt attaqué :

Considérant que la cour administrative d'appel, après avoir relevé que M. DESMERY avait déclaré des revenus bruts de 180 118 F au titre de l'année 1980 et de 180 885 F au titre de l'année 1981, alors qu'au cours des mêmes années, des sommes de 623 184 F et de 2 187 023 F avaient été respectivement portées en 1980 et 1981 au crédit de ses comptes bancaires et du compte courant ouvert à son nom dans les écritures de la SARL Desmery, dont il était gérant minoritaire, a jugé que l'écart résultant du rapprochement de ces chiffres suffisait à indiquer que M. DESMERY avait pu disposer de revenus plus importants que ceux qui avaient fait l'objet de ses déclarations ; que M. DESMERY reproche à la Cour de n'avoir pas répondu à l'argument qu'il avait invoqué devant elle, tiré de ce qu'il y avait lieu d'exclure du calcul de l'écart ci-dessus mentionné les sommes qui provenaient de virements de compte à compte ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, même en faisant abstraction des montants auxquels, selon M. DESMERY, ces sommes se seraient élevées, le total des crédits portés sur les comptes de l'intéressé continuait de présenter avec ses revenus déclarés un écart suffisant pour justifier la mise en oeuvre de la procédure prévue par les dispositions, précitées, de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, en s'abstenant de répondre à l'argument ci-dessus rapporté de M. DESMERY, la cour administrative d'appel n'a pas entaché son arrêt d'une insuffisance de motivation ;

Considérant qu'il résulte des motifs de son arrêt que la Cour s'est implicitement mais nécessairement prononcée sur le moyen de M. DESMERY selon lequel l'administration n'était pas en droit de lui demander de fournir des justifications quant à la date d'entrée dans son patrimoine de l'or dont la vente aurait été, selon lui, à l'origine de certains des versements effectués sur ses comptes ; Considérant, enfin, que la Cour a suffisamment répondu au moyen tiré par M. DESMERY de ce que l'insuffisance de ses réponses aux demandes de justifications de l'administration était due à l'incapacité de sa banque à lui délivrer les photocopies de chèques qu'il avait demandées ;

Sur le bien-fondé de l'arrêt : En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant que, contrairement à ce que soutient M. DESMERY, l'administration était en droit de justifier devant la cour administrative d'appel l'usage qu'elle avait fait, en l'espèce, de la procédure de demandes de justification prévue par les dispositions précitées des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, par d'autres éléments que ceux qu'elle avait antérieurement présentés ; qu'ainsi, la Cour a pu, sans erreur de droit, juger que le recours à cette procédure avait été régulier, en se fondant sur les éléments invoqués devant elle par l'administration, alors même que le vérificateur avait justifié, par des motifs différents, la mise en oeuvre de la même procédure ;

Considérant que la Cour a pu, de même, légalement juger que le fait, par l'administration, d'avoir, d'une part, demandé à M. DESMERY, en réponse à ses allégations concernant des ventes d'or, de justifier de la ou des dates d'entrée de cet élément dans son patrimoine, d'autre part, tenu compte, pour apprécier l'importance des sommes non déclarées dont l'intéressé avait pu disposer au cours des années 1980 et 1981, de celles dont le compte courant ouvert à son nom dans les écritures de la SARL DESMERY avait été crédité, n'avait pas entaché d'irrégularité la procédure d'imposition ; Considérant, enfin, qu'en estimant que, eu égard au caractère insuffisant des explications fournies par M. DESMERY en réponse aux demandes de justifications qui lui avaient été adressées par l'administration, l'intéressé avait été régulièrement taxé d'office en application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, la cour administrative d'appel a porté sur les pièces du dossier soumis à son examen une appréciation souveraine qui, n'étant entachée d'aucune dénaturation, ne peut être discutée devant le juge de cassation ; En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'en jugeant que M. DESMERY n'apportait pas la preuve, lui incombant, de l'exagération des bases des impositions régulièrement mises d'office à sa charge au titre de 1980 et de 1981, la cour administrative d'appel a porté aussi sur les faits ressortant des pièces du dossier qui lui était soumis une appréciation souveraine, qui ne peut être remise en cause devant le juge de cassation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. DESMERY n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. DESMERY est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Michel DESMERY et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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