Jurisprudence : CE Contentieux, 08-04-1998, n° 157508

CONSEIL D'ETAT

Statuant au Contentieux

N° 157508

M. RENUCCI

Lecture du 08 Avril 1998

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)


Le Conseil d'Etat statuant au Contentieux, (Section du contentieux, 8ème et 9ème sous-sections réunies),
Sur le rapport de la 8ème sous-section, de la Section du Contentieux,

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 5 avril 1994 et 5 ao–t 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Mario RENUCCI, demeurant 85, chemin des Vinaigriers, à Nice (06000) ; M. RENUCCI demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 2 février 1994 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête dirigée contre le jugement du 1er octobre 1992 du tribunal administratif de Nice qui a rejeté sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1982 à 1985 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de M. Ma‹a, Auditeur, - les observations de la SCP Monod, avocat de M. Mario RENUCCI, - les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions de M. RENUCCI ayant trait aux suppléments d'impôt sur le revenu établis au titre des années 1982 à 1984 :

Considérant qu'aux termes du 1 bis de l'article 302 ter du code général des impôts : "Le régime d'imposition forfaitaire... du bénéfice demeure applicable pour l'imposition due au titre de la première année au cours de laquelle les chiffres d'affaires limites prévus pour ce régime sont dépassés. Cette imposition est établie compte tenu de ces dépassements" ; que, lorsque l'action de l'administration est prescrite en ce qui concerne une année par suite de l'expiration de son délai de reprise, cette situation ne fait pas obstacle à ce qu'elle détermine le régime d'imposition applicable au titre de l'année suivante, pour laquelle son action n'est pas prescrite, en établissant qu'au cours de l'année précédente, atteinte par la prescription, le contribuable avait réalisé un chiffre d'affaires supérieur à la limite prévue pour l'admission au régime forfaitaire d'imposition ; que, dès lors, la cour administrative d'appel de Lyon a pu juger, sans erreur de droit, que le fait, par le vérificateur, de s'être référé, pour déterminer le régime d'imposition applicable à M. RENUCCI, au titre de l'année 1982, au chiffre d'affaires qu'il avait réalisé au titre de l'année 1981, prescrite, et qui excédait, pour la première fois, la limite fixée pour l'application du régime du forfait, n'entachait pas d'irrégularité la procédure suivie ; que la cour n'a pas davantage commis d'erreur de droit en jugeant que le contrôle avait pu régulièrement porter sur l'année 1981, non mentionnée dans l'avis de vérification adressé à M. RENUCCI, dès lors qu'aucune imposition supplémentaire n'a été mise à la charge de celui-ci au titre de cette année ;

Considérant que la cour a pu légalement juger que le fait que la vérification de la comptabilité de l'entreprise de M. RENUCCI s'est déroulée dans divers locaux de cette entreprise n'avait n'entaché ce contrôle d'aucune irrégularité et qu'elle n'a pas davantage commis d'erreur de droit en estimant qu'il appartenait à M. RENUCCI de justifier de son allégation selon laquelle le vérificateur se serait refusé, au cours de la vérification, à tout échange de vues ;

Considérant qu'en relevant que M. RENUCCI ne justifiait pas de l'existence d'un emport de documents comptables par le vérificateur, la cour n'a méconnu aucune règle ayant trait à la charge de la preuve ; qu'en jugeant que l'existence d'un tel emport n'était pas démontrée par une attestation du 3 décembre 1992 rédigée par une ancienne collaboratrice du comptable de M. RENUCCI, devenue depuis lors une salariée de celui-ci, la cour s'est livrée à une appréciation souveraine des faits de l'espèce ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les faits ainsi retenus seraient matériellement inexacts ;

Considérant que la cour a pu légalement juger que les moyens tirés par M. RENUCCI des irrégularités qui auraient entaché la vérification approfondie de sa situation fiscale d'ensemble et de celle de son épouse, étaient inopérants, dès lors que, par une souveraine appréciation des faits de l'espèce, elle a relevé que les redressements opérés résultaient exclusivement de constatations faites au cours de la vérification de comptabilité concomitante ;

Considérant que c'est aussi par une appréciation souveraine et sans erreur de droit, que la cour a jugé que M. RENUCCI n'apportait pas la preuve de ses allégations selon lesquelles il aurait souscrit en temps utile les déclarations de ses bénéfices industriels et commerciaux des années 1982 et 1983 ;

Considérant que le moyen tiré par M. RENUCCI de ce que l'administration avait omis de lui adresser des mises en demeure de souscrire les déclarations de son revenu global des années 1982 et 1983 était inopérant, dès lors, en tout état de cause, que l'intéressé n'a pas fait l'objet d'une taxation d'office de son revenu global au titre de ces années ;

Considérant que, pour juger que les termes des notifications adressées à M. RENUCCI satisfaisaient aux prescriptions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales, la cour a jugé qu'en l'espèce, la citation d'aucune disposition particulière du code général des impôts ne s'imposait à l'administration ; que, ce faisant, elle n'a commis aucune erreur de droit et a porté, sur l'utilité de cette mention, une appréciation souveraine ; Considérant, enfin, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la cour, dont l'arrêt n'est pas entaché d'insuffisance de motifs, n'a pas dénaturé les faits de l'espèce en jugeant que M. RENUCCI n'apportait pas la preuve du caractère exagéré des impositions qui lui ont été assignées au titre des années 1982 à 1984 ;

Sur les conclusions de M. RENUCCI ayant trait à l'impôt sur le revenu établi au titre de l'année 1985 :

Considérant que M. RENUCCI a soulevé, dans sa requête introductive d'instance enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon le 2 décembre 1992, un moyen qui mettait en cause la régularité de la procédure suivie pour établir les impositions mises à sa charge au titre de l'année 1985, motif pris de ce que l'avis de vérification correspondant lui avait été adressé avant la date limite fixée pour le dépôt de la déclaration des résultats de l'exercice clos au cours de cette année ; que la cour s'est abstenu de répondre à ce moyen, qui n'était pas inopérant, dès lors que la situation de taxation d'office dont entend se prévaloir le ministre ne pouvait être constituée avant cette date limite ; que, par suite, M. RENUCCI est fondé à soutenir que l'arrêt attaqué doit être annulé, en tant qu'il rejette les conclusions de sa requête concernant l'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 1985 ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article 11, deuxième alinéa, de la loi du 31 décembre 1987, de régler, sur ce point, l'affaire au fond ;

Considérant qu'il est constant que l'avis de vérification mentionnant l'année 1985 a été adressé à M. RENUCCI le 24 avril 1986, avant que n'expire le délai limite de dépôt des déclarations de bénéfices industriels et commerciaux réalisés en 1985, qui avait été reporté au 2 juin 1986 ; que, pour ce motif, les impositions et pénalités mises à la charge de M. RENUCCI au titre de l'année 1985 doivent être regardées comme ayant été établies au terme d'une procédure irrégulière, en tant qu'elles procèdent de la reconstitution des bénéfices industriels et commerciaux de l'intéressé ; que M. RENUCCI est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 1er octobre 1992, le tribunal administratif de Nice a rejeté les conclusions de sa demande en décharge visant ces impositions et pénalités ;

D E C I D E :

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 2 février 1994 est annulé, en tant qu'il rejette les conclusions de M. RENUCCI aux fins de décharge de l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquels il a été assujetti au titre de l'année 1985, en tant qu'ils procèdent de la reconstitution de ses bénéfices industriels et commerciaux.

Article 2 : M. RENUCCI est déchargé de l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquels il a été assujetti au titre de l'année 1985, en tant qu'ils procèdent de la reconstitution de ses bénéfices industriels et commerciaux.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 1er octobre 1992 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. RENUCCI est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Mario RENUCCI et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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