Jurisprudence : Cass. soc., 21-06-2023, n° 21-24.279, Rejet

Cass. soc., 21-06-2023, n° 21-24.279, Rejet

A983393L

Référence

Cass. soc., 21-06-2023, n° 21-24.279, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/96981917-cass-soc-21062023-n-2124279-rejet
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Abstract

Il résulte des articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du code du travail que lorsque l'employeur propose un poste au salarié déclaré inapte, il doit s'assurer de la compatibilité de ce poste aux préconisations du médecin du travail, le cas échéant en sollicitant l'avis de ce médecin, peu important que le poste ait été créé lors du reclassement


SOC.

BD4


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 21 juin 2023


Rejet


Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président


Arrêt n° 708 F

Pourvoi n° Z 21-24.279


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 JUIN 2023


La société GBB., société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Z 21-24.279 contre l'arrêt rendu le 16 septembre 2021 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale et des affaires de sécurité sociale), dans le litige l'opposant à M. [I] [M], domicilié [… …], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, quatre moyens de cassation.


Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Lacquemant, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Aa et Rebeyrol, avocat de la société G.B.B., de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [M], après débats en l'audience publique du 23 mai 2023 où étaient présents Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lacquemant, conseiller rapporteur, Mme Salomon, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 16 septembre 2021), M. [M] a été engagé en qualité de plombier-chauffagiste par la société CGB le 15 octobre 1982.

2. Il a été victime le 2 novembre 1984 d'un accident du travail et placé en arrêt de travail à plusieurs reprises, en dernier lieu le 6 mars 2017.

3. Il a été déclaré inapte par le médecin du travail et une proposition de reclassement, qu'il a refusée, lui a été faite le 29 mai 2017.

4. Il a été licencié le 16 juin 2017 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

5. Le 28 septembre 2017, il a saisi la juridiction prud'homale pour contester son licenciement et obtenir paiement de diverses indemnités.


Examen des moyens

Sur les premier, deuxième et troisième moyens

6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile🏛, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le quatrième moyen

Enoncé du moyen

7. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner à payer au salarié une somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors « que les propositions de reclassement faites par l'employeur au-delà de son obligation légale, ne peuvent lui être imputées à faute ni lui être opposées pour juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse, ne seraient-elles pas compatibles avec l'état de santé du salarié ; que l'obligation légale de reclassement, qui s'impose à l'employeur lorsqu'un salarié est déclaré inapte à son poste de travail, n'implique pas l'obligation d'envisager la création d'un nouveau poste conforme aux prescriptions du médecin du travail ; que lorsque l'employeur décide, au-delà de son obligation légale de reclassement, de proposer un poste qu'il envisage de créer pour le salarié déclaré inapte, le fait qu'il n'ait pas soumis ce poste à l'appréciation du médecin du travail est sans incidence sur le bien-fondé du licenciement ; qu'en affirmant en l'espèce que ''Dans la mesure où comme développé plus avant, l'employeur a proposé un poste de reclassement sans s'assurer auprès du médecin du travail de sa compatibilité avec l'état de santé du salarié et n'a pas pris en compte le motif de son refus pour accomplir les diligences nécessaires auprès du médecin du travail et envisager, au besoin, un aménagement du poste proposé en fonction de son avis, alors qu'en proposant un poste d'assistant administratif, l'employeur admettait le besoin de création d'un tel poste, il n'a pas rempli son obligation de reclassement de manière sérieuse et loyale, ce qui rend le licenciement sans cause réelle et sérieuse'', la cour d'appel a violé les articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du code du travail🏛🏛 dans leur version issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016🏛. »


Réponse de la Cour

8. Aux termes de l'article L. 1226-10 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, lorsque le salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.
Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.
L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.

9. L'article L. 1226-12 du même code dispose que l'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi.

10. Il résulte de ces textes que lorsque l'employeur propose un poste au salarié déclaré inapte, il doit s'assurer de la compatibilité de ce poste aux préconisations du médecin du travail, le cas échéant en sollicitant l'avis de ce médecin, peu important que le poste ait été créé lors du reclassement du salarié.

11. L'arrêt constate que l'employeur a proposé au salarié un poste d'assistant administratif créé pour lui, que ce poste impliquait la conduite d'un véhicule dans des conditions et un périmètre non précisés, que le médecin du travail, sans exclure les déplacements, avait exclu un maintien long dans une même position et que le salarié, qui a refusé le poste, avait évoqué l'incompatibilité du poste avec son état de santé.

12. L'arrêt relève ensuite que l'employeur n'a pas pris en compte le motif du refus du salarié et ne s'est pas assuré auprès du médecin du travail de la compatibilité de ce poste avec l'état de santé du salarié ou des possibilités d'aménagements qui auraient pu lui être apportées.

13. En l'état de ces constatations, dont elle a déduit que l'employeur n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement de manière sérieuse et loyale, la cour d'appel a légalement justifié sa décision.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société CGB aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande formée par la société CGB et la condamne à payer à M. [M] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un juin deux mille vingt-trois.

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